Présentation
Cet article du numéro
4 de Living Marxism, paru en 1938, est saisissant, il a une étrange
résonance actuelle; son titre est évidemment une parodie du fameux texte de Rosa Luxemburg: Masses et chefs, avec toujours aussi peu de respect pour les chefs. La crise mondiale du coronavirus a des
ressemblances frappantes avec la veille de la Seconde Guerre
mondiale. Les militants de Living Marxism autour de Paul Mattick
étaient-ils de doux rêveurs, des désespérés qui voulaient rêver
comme leurs collègues de Bilan de l'autre côté de l'Atlantique, en
Belgique, espérant toujours la « révolution mondiale » ?
Alors que les bruits de bottes résonnaient tristement en Europe ?
Ils n'étaient pourtant ni fous ni utopistes et bien dans la réalité
de l'époque qui faisait suite au krach de 1929 et où l'on vit se
dérouler durant les années 1930 probablement les luttes ouvrières
les plus importantes de l'histoire du capitalisme par leur nombre,
leur simultanéité non pas dans des pays « arriérés »
mais dans les principales nations européennes et jusqu'en Chine.
Dans le milieu maximaliste historique nous avons toujours combattu
les illusions et le cinéma des fronts populaires que nous
caractérisions comme « cours à la défaite » à la
suite des fausses solutions de la gauche bourgeoise. Or il faut
réviser cette vision lointaine de soixante-huitards qui croyaient
tout savoir et ont pensé que la montée à la guerre avait été un
tranquille boulevard par la bourgeoisie. Je l'ai souvent rappelé, si
la bourgeoisie allemande derrière Hitler, attend un an de 1939 à
1940, c'est qu'elle, et aussi les autres bourgeoisies, a peur d'une
nouvelle Commune de Paris. Il s'en est fallu de peu d'ailleurs que
Hitler rate son coup dans les Ardennes, comme le révèlent des
archives d'histoire réactualisées.
On a reproché à
Living Marxism d'avoir ouvert la porte au « modernisme »
avec la notion d'ancien mouvement ouvrier, qui n'était pas forcément
une idée confuse, si le prolétariat est pérenne il sa connu de
nombreuses recompositions, en même temps que la modernisation des
usines et la généralisation d'emplois de bureaux (qui lui ont fait
croire longtemps qu'il n'était plus une classe « ouvrière »).
En relisant ce texte, il n'a aucun manque de confiance dans les
capacités du prolétariat, même avec un « nouveau »
mouvement ouvrier, mais il y manque, bien sûr, une actualisation de
la forme que prendront les pouvoirs « législatif et exécutif »
du prolétariat – que l'on nommait « pouvoir des conseils
ouvriers » - alors que son « ancienne » base
naturelle était les usines (disparues) et qu'existent une myriade
infinie de petites entreprises, qui font supposer que les formes du
« pouvoir prolétarien » de l'avenir seront dépendantes
plutôt de lieux, de concentrations industrielles ou salariales, de
quartiers paupérisés, etc. La discipline dont a fait preuve
pratiquement partout la population mondiale face à la pandémie
vient prouver que la responsabilité est dans celle-ci pas dans nos
Etats « impotents » comme sont impotents nos variétés
de partis et syndicats1.
Pour la mise en place des pouvoirs « législatif et exécutif »,
nous pouvons faire confiance au prolétariat, qui saura non pas
ré-inventer le capitalisme mais se réinventer.
Des milieux gauchistes, trotskiens probablement, ont aussi reproché jadis au courant représenté par Mattick et Living Marxism, d'avoir fait équivaloir nazisme et stalinisme (fascisme "blanc et rouge"), ils ont eu tort, Staline a autant massacré qu'Hitler mais il a fait plus de mal que lui en ridiculisant pour un siècle la notion et perspective de communisme. Il a encore de nombreux souteneurs criminels qui le couvrent de lauriers pour avoir "gagné la guerre contre Hitler". Et haussé l'ordre bourgeois démocratique (et impotent) au rang d'un mausolée miteux.
Des milieux gauchistes, trotskiens probablement, ont aussi reproché jadis au courant représenté par Mattick et Living Marxism, d'avoir fait équivaloir nazisme et stalinisme (fascisme "blanc et rouge"), ils ont eu tort, Staline a autant massacré qu'Hitler mais il a fait plus de mal que lui en ridiculisant pour un siècle la notion et perspective de communisme. Il a encore de nombreux souteneurs criminels qui le couvrent de lauriers pour avoir "gagné la guerre contre Hitler". Et haussé l'ordre bourgeois démocratique (et impotent) au rang d'un mausolée miteux.
Nos aïeux de Living
Marxism expriment assez bien qu'on est encore en période
d'hésitations. 11 millions d'américains sont au chômage en 1938,
ce n'est pas rien, il n'y en avait pas tant à la veille de la
révolution en Russie. Mais un grand nombre de chômeurs ne signifie
pas veille de révolution.. . Quoique, s'il a fallu à Hitler
attendre un an avant d'envahir la France, il faudra quatre ans à la
bourgeoisie américaine pour se mêler à son tour de la guerre
mondiale ! Le temps d'embrigader les chômeurs, me direz-vous ?
Et de diaboliser dans la classe ouvrière UN SEUL fauteur de guerre.
Liquidons un cliché : « Hitler aurait résorbé le
chômage » et « la guerre aurait permis de développer
l'économie et sa gestion ». Lisons ce qu'en dit le grand
économiste Daniel Cohen (qui confirme la longue hésitation US à
entrer en guerre) :
« Mesuré
à l'aune du seul taux de chômage, le succès nazi a, de fait, été
époustouflant. D'un pic de 5 millions de chômeurs en 1932,
l'Allemagne nazie n'en compte plus que 400 000 en 1938. Par
comparaison, aux Etats-Unis où le taux de chômage a pourtant baissé
de moitié entre ces deux dates, il reste à un niveau extrêmement
élevé en 1938, de plus de 14%. Ce n'est qu'avec la Seconde Guerre
mondiale que le chômage américain retrouvera les niveaux antérieurs
à la crise. (en revanche) Ce n'est qu'à partir de 1936 que les
nazis se sont préparés à la guerre. A partir d'octobre 1936,
Goering prend la responsabilité de la planification économique.
Avec un résultat, selon Overy, qui se traduit par une «planification
confuse, des pénuries d'emploi, une organisation industrielle
médiocre». Au lendemain de la guerre, les alliés seront abasourdis
par la mauvaise organisation des usines allemandes. Si l'on prend
comme mesure de la réussite économique la progression de la
productivité du travail, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Elle
double aux Etats-Unis entre 1913 et 1938, progresse de 180% en
France, mais n'augmente que de 37% en Allemagne »2.
Une
histoire du chômage aux Etats-Unis nous apprend ceci :
« En
général, la durée moyenne du chômage était de 3 à 4-5 mois. Une
grande majorité des chômeurs appartenait à la classe ouvrière et
le taux de chômage était beaucoup plus élevé chez les ouvriers
que dans les classes moyennes. Mais ce taux de chômage – et
en termes psychologiques la menace de chômage – n'était
pas du tout identique dans les différents corps de métiers :
ainsi, les ouvriers de la chaussure étaient beaucoup plus souvent au
chômage que ceux du textile. Plus surprenant, peut-être, est le
fait que la répartition du chômage était assez égalitaire dans
les différents groupes sociaux de la classe ouvrière. Les immigrés
connaissaient davantage le chômage que ceux qui étaient nés dans
le pays, mais la différence n'était pas très importante. De la
même façon, le taux de chômage des jeunes n'était guère plus
élevé que celui des adultes. Et, en général, les hommes et les
femmes ont été touchés par ce phénomène de la même façon
pendant toute cette période »3.
Aujourd'hui
les différences sont non seulement plus marquées, plus
inégalitaires mais montrent que les fameuses couches moyennes sont
particulièrement impactées, leurs enfants et leurs grand-mères. On
compte près de 36 millions de chômeurs déclarés aux Etats-Unis
(vous avez bien lu qu'il n'y en avait que onze en 1938). Je vous
passe le nombre de millions en train de monter dans tous les pays,
sans oublier l'immense masse des travailleurs journaliers jamais
comptabilisés. Les Etats bourgeois des années 1930 n'étaient pas
des Etats « impotents » comme nos actuels exploiteurs
dans tous les pays qui ont fait preuve d'une irresponsabilité et
impéritie impardonnables. Cet élément politique clairement perçu
par l'ensemble de la population est probablement le fait le plus
subversif apparu sur la planète depuis la seconde boucherie
mondiale. Tous les Etats ont révélé leur incompétence, clown
chinois comme clown américain et le lilliputien Etat français qui
s'est laissé dépouiller tranquillement depuis des lustres de toute
son industrie de base.
Les
questions posées par cette catastrophe endémique, qui est surtout
une grande catastrophe du cynisme capitaliste ne permet plus de jouer
à la contestation. Les petits rigolos gilets jaunes peuvent cesser
leur carnaval qui s'est fondu au niveau localiste du syndicalisme et
ne représente plus au carrefour que des piquets de vieux machins
déconfinés des EPHAD. Merci au syndicat SUD de s'être désolidarisé
à Purpan de cette noria de vieux anars ou vieux péquenots.
La
crise du covid-19 a enfin mis en évidence que la société opaque de
la consommation, des voyages, de la libre entreprise, des
perpétuelles distractions numériques et pipolesques, dépendait de deux choses très
triviales : la production et la consommation. Que le travail et
la faim dans le monde sont liés. Que c'est une classe principalement
qui permet au monde de fonctionner et de ne pas crever. Il paraît
qu'elle était devenue depuis longtemps invisible ! Et qu'elle a
de l'imagination lorsqu'il s'agit de produire ce qui est essentiel et
pas superflu.
Enfin
tout l'objet secondaire de l'article - « l'avant-garde »
- occupe finalement peu de place, comme aujourd'hui, mais c'est d'un
côté normal, et répétitif historiquement, mais il ne faudrait pas
seulement le déplorer. L'épisode de fléau mondial que nous sommes en train de vivre, va-t-il cher Paul Mattick, nous permettre de jouer la revanche de 1938? Qui sait?
(traduction :
Pierre Hempel)
Les
changements économiques et politiques se sont poursuivis avec une
rapidité déconcertante depuis la fin de la guerre mondiale.
Les vieilles conceptions dans le mouvement ouvrier sont devenues
défectueuses et inadéquates avec des organisations de la classe
ouvrière qui n'offrent qu'un spectacle d’indécision et de
confusion. Compte
tenu de l’évolution de la situation économique et politique, il
semble que la réévaluation en profondeur de la tâche de la classe
ouvrière devienne nécessaire pour trouver les formes de lutte et
d’organisation les plus nécessaires et efficaces.
La
relation au "parti", "organisation de l’avant-garde"
des masses joue un rôle important dans la discussion contemporaine.
Que
l’importance et le caractère indispensable de l’avant-garde ou
du parti soit surestimée dans les milieux ouvriers n’est pas
surprenant, puisque toute l’histoire et la tradition du mouvement
tend dans cette direction. Le
mouvement ouvrier d’aujourd’hui est le fruit des développements
économiques et politiques qui ont trouvé leur première expression
dans le mouvement chartiste en Angleterre (1838-1848), le
développement ultérieur des syndicats à partir des années
cinquante, et dans le mouvement lassalléen en Allemagne dans les
années 1860. Correspondant au degré de développement capitaliste
des syndicats et des partis politiques développés dans les autres
pays d’Europe et d’Amérique.
Le
renversement du féodalisme et les besoins de l’industrie
capitaliste en eux-mêmes nécessitaient la vocation du prolétariat
et l’octroi de certains privilèges démocratiques par les
capitalistes. Ce dernier
avait réorganisé la société en fonction de leurs besoins.
La structure politique du
féodalisme a été remplacée par le parlementarisme capitaliste.
L’État capitaliste, l’instrument
pour administrer les affaires communes de la classe capitaliste, a
été établi et adapté aux besoins de la nouvelle classe.
Il
fallait maintenant compter avec le prolétariat dérangeant dont
l’aide contre les forces féodales avait été nécessaire. Une
fois mis en oeuvre, il ne pourrait pas être complètement éliminé
en tant que facteur politique. Mais il pourrait être rattaché. Et
cela a été fait - en partie consciemment avec ruse et en partie par
la dynamique même de l’économie capitaliste - lorsque la classe
ouvrière s’est ajustée et soumise au nouvel ordre. On a organisé
des syndicats dont les objectifs limités (meilleurs salaires et
conditions) pouvaient être réalisés dans une économie capitaliste
en expansion. On a joué le jeu de la politique capitaliste dans
l’État capitaliste (dont les pratiques et les formes étaient
déterminées principalement par les besoins capitalistes) et dans
ces limites, ont été obtenu des succès apparents.
Mais
c’est ainsi que le prolétariat adopta les formes capitalistes
d’organisation et les idéologies capitalistes. Les partis
ouvriers, comme ceux des capitalistes, devinrent des sociétés
limitées, les besoins élémentaires de la classe furent subordonnés
à l’opportunisme politique. Les objectifs révolutionnaires ont
été déplacés dans le cadre de marchandages et les manipulations
des positions politiques. Le parti est devenu très important, ses
objectifs immédiats ont prédominé sur ceux de la classe. Quand
des situations révolutionnaires ont mis en mouvement la classe, dont
la tendance est de lutter pour la réalisation de l’objectif
révolutionnaire, les partis ouvriers "représentaient" la
classe ouvrière et étaient eux-mêmes "représentés" par
les parlementaires dont la position même au parlement constitue la
résignation à leur statut de négociants au sein de l'ordre
capitaliste.
La
rattachement général des organisations ouvrières au capitalisme a
vu l’adoption de la même spécialisation, dans les activités
syndicales et de parti, qui caractérise la hiérarchie des
industries. Les directeurs,
les surintendants et les contremaîtres voyaient leurs contre-parties
dans la présidence, les organisateurs et les secrétaires des
organisations syndicales. Conseils
d’administration, comités exécutifs, etc. La
masse des travailleurs organisés comme la masse des esclaves
salariés dans l’industrie a laissé le travail de direction et de
contrôle à des supérieurs. Cette émasculation de l’initiative
ouvrière se poursuivit rapidement alors que le capitalisme étendait
son emprise. Jusqu’à ce
que la guerre mondiale mette fin à une expansion capitaliste plus
pacifique et "ordonnée".
Les
soulèvements en Russie, en Hongrie et en Allemagne avaient montré
une résurgence de l’action et de l’initiative de masse.
Les nécessités sociales avaient
contraint à l’action par les masses. Mais
les traditions du vieux mouvement ouvrier en Europe occidentale et le
retard économique de l’Europe de l’Est ont compromis
l’accomplissement de la mission historique du prolétariat.
L’Europe occidentale a vu les
masses défaites et la montée du fascisme à la Mussolini et Hitler,
tandis que l’économie arriérée de la Russie a développé ce
"communisme" dans lequel la différenciation entre classe
et avant-garde, la spécialisation des fonctions et l'enrégimentation
du travail ont atteint son point le plus élevé.
Le
principe de la direction, l’idée de l’avant-garde qui doit
assumer la responsabilité du prolétariat révolutionnaire est basé
sur la conception d’avant-guerre du mouvement ouvrier. Les tâches
de la révolution et de la réorganisation communiste de la société
ne peuvent être réalisées sans l’action la plus large et la plus
complète des masses elles-mêmes. C’est leur tâche et leur
solution.
Le déclin de l’Économie capitaliste, la paralysie progressive, l’instabilité, l’âne chômeur, les coupes salariales et la paupérisation intensive des travailleurs - tous ces contraindre l’action, en dépit du fascisme à la Hitler ou au fascisme déguisé de l’A.F. de L4. Les anciennes organisations sont soit détruites, soit volontairement réduites à l’impuissance. L’action réelle est maintenant possible seulement en dehors des anciennes organisations. En Italie, Allemagne, en Russie, le fascisme Blanc et Rouge a déjà détruit toutes les vieilles organisations et confronté directement les travailleurs face au problème de trouver les nouvelles formes d'organisation de la lutte. En Angleterre, en France et en Amérique, les vieilles organisations maintiennent encore un degré d'illusions parmi les travailleurs, mais leur longue soumission aux forces de la réaction sape leur crédibilité.
Le déclin de l’Économie capitaliste, la paralysie progressive, l’instabilité, l’âne chômeur, les coupes salariales et la paupérisation intensive des travailleurs - tous ces contraindre l’action, en dépit du fascisme à la Hitler ou au fascisme déguisé de l’A.F. de L4. Les anciennes organisations sont soit détruites, soit volontairement réduites à l’impuissance. L’action réelle est maintenant possible seulement en dehors des anciennes organisations. En Italie, Allemagne, en Russie, le fascisme Blanc et Rouge a déjà détruit toutes les vieilles organisations et confronté directement les travailleurs face au problème de trouver les nouvelles formes d'organisation de la lutte. En Angleterre, en France et en Amérique, les vieilles organisations maintiennent encore un degré d'illusions parmi les travailleurs, mais leur longue soumission aux forces de la réaction sape leur crédibilité.
Les
principes de la lutte indépendante, de la solidarité et du
communisme seront imposés dans la lutte de classe actuelle.
Avec la puissante tendance vers la
consolidation et l’action de masse, la théorie du regroupement et
du réalignement des organisations militantes semble dépassée.
Certes, le regroupement est
essentiel, mais il ne peut s’agir d’une simple fusion des
organismes existants. Dans
les conditions nouvelles une révision des formes de combat est
nécessaire. "La Clarté
d’abord - puis l’unité". Même
les petits groupes qui reconnaissent et exhortent les principes du
mouvement de masse indépendant sont aujourd’hui beaucoup plus
importants que les grands groupes qui déprécient le pouvoir des
masses.
Il
y a des groupes qui perçoivent les défauts et les faiblesses des
partis. Ils
critiquent souvent la combinaison du front populaire et des
syndicats.
Mais
leurs critiques sont limitées.
Ils
n’ont pas une compréhension globale de la nouvelle société.
Les
tâches du prolétariat sont complétées par par après par la
saisie de la production et l’abolition de la propriété privée.
La
question de la réorganisation sociale doit être posée et résolue
avant.
Le
socialisme d’Etat doit-il être rejeté?
Quelle
sera la base d’une société sans esclavage salarial ?
Qu'est-ce
qui détermine les relations économiques entre les usines ?
Qu’est-ce
qui détermine les relations entre les producteurs et le produit
total?
Ces
questions et leurs réponses sont essentielles pour comprendre les
formes de lutte et d’organisation d’aujourd’hui. Ici, le
conflit entre le principe de direction et le principe d’organisation
de masse indépendante devient apparent. Car, une compréhension
approfondie de ces questions, conduit à la réalisation que
l’activité la plus large, globale, directe du prolétariat en tant
que classe, nécessaire afin de réaliser le communisme. D’une
importance primordiale est l’abolition du système des salaires. La
volonté et les bonnes volontés des hommes ne sont pas suffisantes
pour conserver ce système après la révolution (comme en Russie)
sans finalement céder à la dynamique qu’il implique. Il ne faut
pas seulement se saisir des moyens de production et abolir la
propriété privée. Il faut abolir la condition de base de
l’exploitation moderne de l'esclavage salarié, et cette loi
apporte les mesures successives de réorganisation qui ne seraient
jamais invoquées sans le premier pas.
Les
groupes qui n’ont pas mis à leur ordre du jour ces questions,
leurs critiques sont vaines, il leur manque les éléments les plus
importants pour la formation d'une politique révolutionnaire saine.
L’abolition
du système des salaires doit être soigneusement étudiée dans son
rapport avec la politique et l’économie.
L’article
suivant - La production et la distribution communiste (traduit sur ce
blog) - traite de certains aspects économiques du problème.
Nous
aborderons ici certaines des implications politiques.
Il
y a d’abord la question de la prise du pouvoir par les
travailleurs.
Il
faut insister sur le principe des masses (non du parti ni de
l’avant-garde) qui guide les travailleurs.
Le
communisme ne peut être introduit ou réalisé par un parti.
Seul
le prolétariat peut le faire.
Le
communisme signifie que les ouvriers ont pris leur destin en main;
qu’ils
ont aboli les salaires;
qu’ils
ont, avec la suppression de l’appareil bureaucratique, combiné les
pouvoirs législatif et exécutif.
L’unité
des travailleurs ne réside pas dans la fusion sacro-sainte des
partis ou des syndicats, mais dans la similitude de leurs besoins
dans l’action de masse.
Tous
les problèmes des ouvriers doivent donc être considérés en
relation avec le développement de l’auto-action des masses.
Il est faux de dire
que l’esprit non combatif des partis politiques serait dû à la
malice ou au réformisme de leurs dirigeants.
Les
partis politiques sont impuissants.
Ils
ne feront rien, parce qu’ils ne peuvent rien faire.
En
raison de sa faiblesse économique, le capitalisme s’est organisé
pour la répression et la terreur et est actuellement politiquement
très fort, car il est forcé d’exercer tous ses efforts pour se
maintenir.
L’accumulation
du capital, énorme à travers le monde, a rétréci le rendement du
profit, - fait qui se manifeste par les contradictions entre les
nations;
et,
dans les politiques internes, par la "dévaluation",
l’expropriation partielle de la classe moyenne et l’abaissement
du niveau de subsistance des travailleurs ;
et,
en général, par la centralisation du pouvoir des unités du grand
capital dans les mains de l'Etat.
Contre
ce pouvoir centralisé, de petits groupes ne peuvent rien faire.
Les
masses seules peuvent le combattre, car elles seules peuvent détruire
le pouvoir de l’État et devenir une force politique.
C’est
pourquoi la lutte fondée sur les organisations artisanales devient
obsolète, et les grands mouvements de masse, sans restriction par la
limitation de telles organisations, doivent nécessairement les
remplacer. Telle est la nouvelle situation à laquelle sont
confrontés les travailleurs.
Mais
d’elle jaillit une faiblesse réelle.
Depuis
que l’ancienne méthode de lutte par le biais des élections et
l’activité syndicale limitée est devenue tout à fait futile, une
nouvelle méthode, il est vrai, s'est instinctivement développée,
mais cette méthode n’a pas encore été appliquée de façon
consciente, et n'est donc pas efficacement appliquée.
Là
où leurs partis et leurs syndicats sont impuissants, les masses
commencent déjà à s’exprimer par les grèves sauvages. En
Amérique, en Angleterre, en France, en Belgique, Hollande, Espagne,
Pologne – des grèves sauvages se sont développées et, à travers
elles, les masses apportent la profonde preuve que les vieilles
organisations ne sont plus utiles pour la lutte.
Les
grèves sauvages ne sont pas, cependant, désorganisées, comme leur
nom l’indique.
Elles
sont désignées comme telles par les bureaucrates syndicaux, parce
ce sont des grèves formées en dehors de leurs organisations
officielles.
Les
grévistes eux-mêmes organisent la grève, car c’est une vieille
vérité : c'est seulement en tant que masse organisée que les
travailleurs peuvent lutter et dominer.
Ils
forment des piquets de grève, pourvoient à l'éjection des briseurs
de grève, organisent des secours de grève, nouent des relations
avec d’autres usines… En un mot, ils assument eux-mêmes la
direction de leur propre grève, et ils l’organisent sur la base de
l'usine.
C’est précisément
dans ces mouvements que les grévistes trouvent leur unité de lutte.
C’est
alors qu’ils prennent leur destin en main et unissent "le
pouvoir législatif et exécutif" en éliminant les syndicats et
les partis, comme l’illustrent plusieurs grèves en Belgique et en
Hollande.
Mais l'action indépendante de classe est encore faible. Le fait que les grévistes, désireux de poursuivre leur action indépendante pour élargir leur mouvement, appellent les syndicats à les rejoindre, est une indication que, dans les conditions existantes, leur mouvement ne peut pas encore devenir une force politique capable de lutter contre le capital concentré. Mais ce n'est qu'un début.
Mais l'action indépendante de classe est encore faible. Le fait que les grévistes, désireux de poursuivre leur action indépendante pour élargir leur mouvement, appellent les syndicats à les rejoindre, est une indication que, dans les conditions existantes, leur mouvement ne peut pas encore devenir une force politique capable de lutter contre le capital concentré. Mais ce n'est qu'un début.
Parfois,
cependant, la lutte indépendante fait un grand bond en avant, comme
avec les grèves des mineurs asturiens en 1934, les mineurs belges en
1935, les grèves en France, en Belgique et en Amérique en 1936, et
la révolution catalane en 1936. Ces « épidémies » sont
la preuve qu’une nouvelle force sociale est en train de surgir
parmi les travailleurs, trouve le leadership des travailleurs, soumet
les institutions sociales aux masses, est déjà « en marche ».
(les guillemets sont du traducteur)
Les
grèves ne sont plus alors de simples interruptions de profits ou de
simples perturbations économiques. La
grève indépendante tire sa signification de l’action des
travailleurs en tant que classe organisée. Avec
le système des comités d’usine et des conseils ouvriers qui
s’étendent sur de larges espaces, le prolétariat crée les
organes qui règlent la production, la distribution et toutes les
autres fonctions de la vie sociale. Autrement
dit, l’appareil administratif civil est privé de tout pouvoir et
la dictature prolétarienne s’établit. Ainsi,
l’organisation de classe dans la lutte pour le pouvoir est à la
fois l’organisation, le contrôle et la gestion des forces
productives et de la société tout entière. C’est
la base de l’association des producteurs et des consommateurs
libres et égaux.
C’est
donc le danger que le mouvement de classe indépendant représente
pour la société capitaliste. Les
grèves sauvages, apparemment de peu d’importance à petite ou
grande échelle, sont un communisme embryonnaire. Une
petite grève sauvage, dirigée comme telle par les ouvriers et dans
l’intérêt des ouvriers, illustre à petite échelle le caractère
du futur pouvoir prolétarien.
Un regroupement de militants doit s’appuyer sur la connaissance que les conditions de lutte rendent nécessaire l’union des "pouvoirs législatif et exécutif" entre les mains des ouvriers d’usine. Ils ne doivent pas faire de compromis sur cette position : Tout le pouvoir aux comités d’action et aux conseils ouvriers ! C’est le front de classe. C’est le chemin vers le communisme. Rendre les travailleurs conscients de l’unité des formes organisationnelles de la lutte, de la dictature de classe, du cadre économique du communisme, avec l'abolition du salariat – est la tâche des militants.
Un regroupement de militants doit s’appuyer sur la connaissance que les conditions de lutte rendent nécessaire l’union des "pouvoirs législatif et exécutif" entre les mains des ouvriers d’usine. Ils ne doivent pas faire de compromis sur cette position : Tout le pouvoir aux comités d’action et aux conseils ouvriers ! C’est le front de classe. C’est le chemin vers le communisme. Rendre les travailleurs conscients de l’unité des formes organisationnelles de la lutte, de la dictature de classe, du cadre économique du communisme, avec l'abolition du salariat – est la tâche des militants.
Les
militants qui se nomment eux-mêmes « l'avant-garde »
présentent aujourd'hui les mêmes faiblesses qui caractérisent les
masses à présent. Ils croient encore que les syndicats de l’un ou
de l’autre parti doivent diriger la lutte de classe, mais avec des
méthodes révolutionnaires.
Mais
s’il est vrai que des luttes décisives approchent, il ne suffit
pas de dire que les dirigeants « ouvriers » sont des
traîtres.
Il
faut surtout aujourd’hui, formuler un plan pour la formation du
front de classe et les formes de ses organisations.
À
cette fin, la mise sous contrôle des partis et des syndicats doit
être un objectif inconditionnel du combat.
C’est
le point crucial de la lutte pour le pouvoir.
1Le
sommet de l'impotence de la lutte syndicale a été exhibée à
souhait par la sérénade pour la défense des retraites, sans
queue
ni tête, sans aboutissant ni perspective politique. La CGT, aussi
bête qu'un vulgaire bureaucrate gilet jaune, vient de confirmer son
rôle de premier syndicat impotent de France.
2Daniel
Cohen à libé
https://www.liberation.fr/tribune/2000/02/21/hitler-et-l-emploi_317690
3https://journals.openedition.org/ccrh/2830
4
American
Federation of Labor
ou
AFL,
syndicat nord-américain qui après les heures de gloire de sa
fondation est devenu un des principaux flics sociaux pour envoyer la
classe ouvrière à la guerre patriotique.