"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

vendredi 9 août 2019

A PROPOS DE LA VACANCE DE LA CLASSE OUVRIERE



"Désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s'en aperçoit"
Nicolas Sarkozy (juillet 2008)
« Jojo avec un gilet jaune qui a le même statut qu'un ministre ».
Emmanuel Macron (décembre 2018)
« On a commencé la politique riches, on la finit pauvres ». Patrick Balkany

« La bourgeoisie a dépouillé de leur auréole toutes les activités considérées jusqu'alors, avec un saint respect, comme vénérables. Le médecin, le juriste, le prêtre, le poète, l'homme de science, elle en a fait des salariés à ses gages. La bourgeoisie a déchiré le voile de sentimentalité touchante qui recouvrait les rapports familiaux et les a réduits à de simples rapports d'argent » 
Marx

L'Etat français, après avoir éborgné et mutilé tant de gens manifestants, poussé à la noyade un jeune homme qui n'avait que le tort de s'amuser, veut se racheter en nous expliquant le bien-fondé des dépenses auxquelles il se livre après avoir empoché le produit social. Il nous explique comme à des débiles que les dépenses de l’État comprennent des dépenses de personnel, de fonctionnement, d’intervention (exemple : aides économiques), d’investissement (exemple : construction des routes) ainsi que le remboursement des intérêts de la dette. Les trois principaux postes des dépenses publiques sont les retraites, l'assurance maladie et l'éducation nationale. Ils représentent plus de 55 % à eux trois ». C'est donc la population en retraite, les malades et l'éducation (inégalitaire) qui « coûteraient » le plus à la bonté de l'Etat. Emmanuel Macron et son gouvernement ont plus d’un (mauvais) tour dans leur sac. À grand renfort de com’, ils veulent faire accroire surtout à la classe ouvrière muette que tout va beaucoup mieux. À lire le projet de loi de finances pour 2019, on voit qu’il n’en est rien. Le déficit de l’État, déjà abyssal, ne cesse de se creuser : 69 milliards d’euros en 2016, 76 milliards en 2017, 83 milliards en 2018, 98,7 milliards d’euros prévus en 2019. Concrètement, quand l’État prend 100 aux contribuables, il dépense 130. À mi-mandat (fin 2019), la dépense publique aura augmenté de 51 milliards contre 37,1 milliards pour
la même période sous François Hollande, comme le signale le rapporteur macroniste du Budget à l’Assemblée, Joël Giraud soi-même.Conséquence, les impôts explosent : 1 057 milliards d’euros de prélèvements obligatoires en 2018, 1 070 milliards en 2019… En 2002, le montant n’était « que » de 670 milliards.
Au début de son imposant ouvrage – Le capital au XXI ème siècle – Thomas Picketty salue les économistes du XIX e siècle, incluant un Marx « mal informé et parfois obscur »1 : « Il est plus que temps de remettre la question des inégalités au cœur de l'analyse économique et de reposer les questions ouvertes au XIX e siècle »2. A la page précédente il notait : « Nous verrons que la forte réduction des inégalités de revenus qui se produit un peu partout dans les pays riches entre 1914 et 1945 est avant tout le produit des guerres mondiales et des violents chocs économiques et politiques qu'elles ont entraînés... ». On a ainsi dès le départ un résumé d'un raisonnement économiste hors de la réalité du capitalisme et de l'impérialisme. Je reviendrai à plusieurs reprises sur les facéties de cet économiste qui battait son ex-femme Aurélie Filipetti.


« Bercy montre que les pauvres restent dans la mouise malgré la redistribution », titrait un récent article le Figaro qui se moque....
 « Dans les avis d’imposition que les Français reçoivent actuellement, le ministère des Comptes publics prend des exemples tellement caricaturaux pour prouver le bien-fondé de sa politique que la démonstration se retourne contre lui.
Qu’ils paient ou non l’impôt sur le revenu, les 38 millions de foyers fiscaux français reçoivent actuellement leur avis d’imposition au titre des revenus 2018. Rien de plus classique en cette période de l’année. Ce qui l’est moins, c’est la leçon d’économie politique que Bercy entend prodiguer à cette occasion. Un véritable exercice pro domo pour justifier le modèle français, «la France ayant fait le choix d’un système combinant haut niveau de prélèvement et haut niveau de transferts et de services publics» nous dit le document reçu par tout un chacun. Lequel fait par ailleurs l’objet d’un site spécial, «aquoiserventmesimpots.gouv.fr». Soucieux de ménager la chèvre et le chou, les 56% de foyers français d’un côté qui n’acquittent pas l’impôt sur le revenu, et de l’autre les 44% qui le paient, Bercy tient un double langage. À destination des premiers, qui auraient tendance à se plaindre de leurs faibles ... »

Heureusement on fait croire que nombreux sont ceux qui ne payent pas d'impôts même s'ils payent quand même les indirects et sont insécurisés et flexibilisés dans leur quotidien... On n'épiloguera pas sur le train de vie sénatoriale de tous les parasites politiques au pouvoir dont l'affaire Rugy a révélé finalement que « c'est normal », de même qu'est normal l'accroissement faramineux du budget militaire3. Tout est bon pour masquer les privilèges du pouvoir, dont il use et abuse sans vergogne de Rugy à Hidalgo et Mélenchon. Certains journalistes suce-boules du pouvoir vont même jusqu'à assurer que c'est le mouvement des vestes jaunes qui a mis le budget de l'Etat sur la paille. Etonnez-vous que du fumier soit répandu depuis un moment sur les permanences des bureaucratie politiques. Puisque syndicats et partis sont conçus comme définitivement pourris, l'allusion à la révolte en veste jaune est devenue la référence pour être de gauche avec les complaintes hasardeuses sur l'antiracisme, le retour d'Hitler et le sauvetage oecuménique des migrants en mer. On me permettra de me ficher de cette référence outrancière aux derniers mohicans gilets jaunes. Tout est fait pour les victimiser à double sens, intimidation et sanctification. La presse pipole adore broder sur les quatre mousquetaires, tout en les ridiculisant un peu plus. Drouet prétend se présenter aux élections présidentielles, or à mon avis il faut au moins le brevet et une maîtrise du français pour postuler. Depuis que ses chevilles ont enflé, alors qu'il ne sait pas aligner deux mots correctement en public, il pose au gourou ; il m'a d'ailleurs banni assez rapidement de son site sans cervelle parce que je lui avais demandé de corriger ses ramassis de textes bourrés de fautes, et pas méchamment ; lorsqu'on a vocation à jouer un rôle public il est interdit de persister dans son ignorance sauf à considérer que le langage SMS est le top du progrès social et politique. Flyer rider reste conforme à son comportement de hippie itinérant. Le portugais éborgné reste conforme à ses pauses agressives et s'est pris les pieds dans le tapis lorsqu'on apprit son comportement violent vis à vis de sa compagne ; même si l'algarade a été exagérée par la presse, cela fait désordre pour ces gens qui veulent succéder à l'idéologie de gauche éparpillée et en vois d'annihilation. Priscilla elle est moins pointée du doigt, mais le résultat est aussi catastrophique que pour ses compères, elle épouse toutes les modes gauchistes après avoir été suivre les leçons du louche propagandiste (Chouard) de cet imbécile RIC. La protestation qui prétend durer éternellement s'est fondue dans la noria des thèmes à gauchistes.
Que certains de nos intellectuels d'ultra-gauche, y inclus les modernistes, et d'ex militants du CCI se soient pris de passion dans la durée pour feu le mouvement gilet jaune révèle les limites des concepts anti-capitalistes caméléons des professionnels de la conscience apportée de l'extérieur. Les résidus de gilets jaunes peuvent s'amuser en bordure du cirque médiatique en durer même sept années comme le mouvement poujadiste il n'ont pas plus d'avenir que ce dernier. Ce ne fût qu'un soubresaut non pas de vagues couches moyennes mais des couches les plus pauvres cornaquées par des artisans et des commerçant floués par le système élitaire, qui ne veulent surtout pas le mettre en cause mais avoir droit au plaisir de partager mieux le règne de la marchandise. Du fait de la longue passivité politique de la classe ouvrière, la presse bourgeoise se sert de l'aspect spectaculaire et émeutier du mouvement de la veste jaune pour livrer une analyse réductrice de la lutte des classes en termes de pauvres contre les riches où les dits « pauvres » vivent une infériorité dans la représentation d'eux-mêmes, ce qui rejoint une thèse de Bourdieu qui considérait que « les luttes des classements, individuelles ou collectives » sont une dimension oubliée de la lutte des classes. En effet le mouvement veste jaune se situe plus au niveau d'une « lutte des classements » typique des complexes de la petite bourgeoise, instable et peu considérée en effet socialement et politiquement à la fois par les prolétaires4 et par la haute bourgeoisie. La pauvreté qui touche ces prétendues « couches moyennes » (de la campagne) n'est pas vécue comme une situation définitive, mais un processus de déstabilisation voulu « par les riches » et « leurs politiciens » dans une vie marquée par « l'incertitude du lendemain » ; ce qui donna en effet plus une tonalité 1789 que 1917, avec cette définition du pauvre selon Babeuf et les drapeaux tricolores ubuesques.
Nous étudierons donc non seulement le mépris de la haute bourgeoisie « riche » mais aussi la manière dont elle occulte son fonctionnement élitaire même si celui-ci est transparent aux yeux de la population, et engendre une haine permanente qui n'est pas forcément le meilleur ferment à l'éveil d'une conscience de classe. De plus l'exclusion dont sont victimes tant d'artisans et de petits commerçants comme beaucoup plus d'ouvriers, confirme que le travail ne met pas à l'abri de la pauvreté du lendemain, au risque de déchoir socialement, même temporairement. Nous montrerons donc ce qui ne peut être contenu dans les statistiques ni dans les radotages généralistes des sectes plus ou moins marxiennes. Il s'agit aussi d'une révolte contre l'instabilité si bien représentée par l'ubérisation dans un combat qui est devenu quotidien pour la... survie.
Comme dans la Russie post-stalinienne, où la nouvelle bourgeoise s'inspire complètement de l'occidentale, les « pauvres » ou « exclus » sont perçus (quoique plutôt stigmatisés) comme fainéants, incapables, extrémistes et inconséquents politiquement5. Le mépris des intellectuels gauchistes, ex-tiers-mondistes dits « insoumis », devenus écolos bornés, à l'égard des « beaufs », et défenseurs démagogiques de la jeunesse, des races et des travailleurs comme catégorie syndiquée, contient le même discours culpabilisateur que la bourgeoisie « libérale » comme quoi la « populace » est à la fois incapable de sacrifices (y inclus révolutionnaires) pour la réussite des réformes (= attaques anti-ouvrières), s'enferre dans un racisme intrinsèque et est incapable de se rendre compte que les migrants sont ses « frères de classe »6. Les médias font une large place à cet antiracisme oecuménique et à ce démocratisme donneur de leçon pour ridiculiser plus encore tout « messianisme prolétarien » d'une classe « rabougrie », réduite à des couches « arriérées » et qui l'ont bien cherché voire mérité ; la négation du prolétariat n'est-elle pas au fond le principal aspect de ce simulacre de démocratie conviviale ? Pendant complémentaire de la haute bourgeoisie, le gauchisme et tous ses dérivés « associassionnistes » ne cessent de discréditer la dérive « extrémiste » (lepéniste) d'une catégorie de la population « lumpenisée » (lepénisée) dont personne ne se soucie ni des motivations ni de l'appartenance de classe. Sur ce plan, la révolte de la veste jaune avait effectivement déstabilisé les professionnels de la formulation de la révolte in et de la liberté out.

UN PROLETARIAT découpé en strates hostiles

Cette paupérisation et exclusion d'une masse croissante de la population, masquées par les mirifiques aides sociales au compte-goutte, n'est qu'une prolétarisation méconnue et niée. Le mouvement veste jaune a pris une veste finalement, malgré la résistance impuissante de ses épaves petites bourgeoises, parce qu'il n'a été que l'expression de la désagrégation sociale, qui explique la passivité politique du prolétariat, (et non pas, comme je le répéterai, comme expression déviée d'une colère de ce prolétariat).
Depuis cent ans que gauche, extrême et ultra gauche ont rêvé d'unification de la classe ouvrière vers un mythique grand soir – pourquoi pas ? - le hic qui est resté sous le boisseau, sauf pour ceux d'en bas et les exclus en général, réside dans les modalités de la prise du pouvoir, certes envisagé selon la règle de l'éligibilté/révocabilité ? Qui sera élu et sur quels critères ? Les sociologues des années 1960 aux années 1990 avaient relevé l'extrême hétérogénéité, rivalité et hiérarchisation des relations dans une même corporation7

UNE SOCIETE DE CADRES…

Picketty fait un constat juste : « Dans une large mesure, nous sommes passés d'une société de rentiers à une société de cadres, c'est à dire d'une société où le centile supérieur est massivement dominé par des rentiers (des personnes détenant un patrimoine suffisamment important pour vivre des rentes annuelles produites par ce capital) à une société dont le sommet de la hiérarchie des revenus – y compris le centile supérieur – est composée très majoritairement de salariés à haut salaire, de personnes vivant du revenu de leur travail »8.
Il s'agit d'un « décrochage » des super-cadres, non d'une modernisation sociologique bourgeoise (une sorte de prolétarisation comme diraient nos vieux modernistes), dont Picketty donne une explication hilarante :
« … il est possible que ce décrochage s'explique également par une forme « d'extrémisme méritocratique », c'est à dire par un besoin des sociétés modernes (sic) et en particulier de la société américaine, de désigner elles-mêmes des gagnants et de leur offrir des rémunérations d'autant plus extravagantes qu'ils semblent avoir été choisis en fonction de leur mérite propre et non suivant les logiques inégalitaires du passé » (p.531).
Le problème pour Picketty n'est pas la capitalisme comme un tout morbide et destructeur mais le surplus d'enrichissement (jalousie typique du bobo de classe moyenne) : « les fortunes se multiplient et se perpétuent parfois au-delà de toute limite et de toute justification rationnelle possible en termes d'utilité sociale »9.

Temporisée par le cadre de l'Eduque naze…

Il faut qu'on s'arrête à présent sur cette partie plus traditionnelle d'éducation à la société bourgeoise, le personnel enseignant qui a perdu toute sa superbe du XIX e siècle. Dans une société où la part des professions intellectuelles et des cadres supérieurs a fortement augmenté, leur statut social s’est relativement déprécié.
Dans toutes les formes d'association, du plus petit syndic d'immeuble au groupe politique gauchiste les enseignants trustent les postes de « direction »10. Les profs, qui font partie indéniablement du prolétariat, ont un tic rédhibitoire : une vocation obstinée au commandement, malgré leur ravalement au rang de petits télégraphistes du système 11. Ils ne sont rien eux aussi pour l'ordre bourgeois, tant qu'ils se contentent de reproduire les inégalités sociales, même involontairement, alors, disposant d'une meilleure faculté d'expression et de l'aura de leurs diplômes, ils tentent de se hisser autrement et contre cet ordre. Ils eurent un rôle crucial dans la formation de la morale et de l'idéologie de la gauche bourgeoise ces instituteurs, puis ces professeurs de l’enseignement secondaire, au sein des partis contre révolutionnaires SFIO, parti radical puis PCF et filiales gauchistes, en tant que militants et élus, porteurs, pour la plupart, de l'idéologie de l'intérêt national, de l'Etat d'assistance et des vertus de l'encadrement syndical.
Plus engagés à batailler politique que le reste de la population, c'est parce que dieu est mort que ces intellectuels se sont convertis en politique, ils eussent été curés au dix-huitième siècle. Ce sont souvent des enfants de militants syndicaux, la propagande n'est-elle pas éducation ? Après guerre l'’embourgeoisement des enseignants n’avait pas été plus important que dans le reste de la société française, si la part relative des enseignants issus des classes populaires n’a pas beaucoup évolué rapportée à leur part dans la population active depuis 1970, leur niveau d’études s’est en revanche fortement élevé de même que le nombre des recrutés sur concours alors que disparaissaient les Écoles normales d’instituteurs.
Leur sentiment de déclassement les empêche de s'embourgeoiser et est au fondement de la désyndicalisation avec une moindre appétence à s’engager dans l’action collective. Plus que les ouvriers ils sont les victimes involontaires d’un système qui les dépasse, mais dont on les rend responsables12.

LE DESENGAGEMENT DE L'ETAT LIBERAL

Il n'y a que Picketty pour miser sur un « retour de l'Etat » social !13 Avec les communautarismes et transnationalismes, la société capitaliste génère l'atomisation (déjà soulignée en 1968) et la précarité sociale, dissolution apparente mais fausse des groupes sociaux, concurrence intense pour le lucre et la fausse vie et des rapports de plus en plus aliénés avec autrui. Les notions de conscience collective sont systématiquement discréditées aussi bien dans la vie personnelle que dans l'entreprise où les patrons n'ont même plus besoin du sale boulot des syndicats pour diviser les prolétaires14. L'idée que la grève ne sert plus à rien et que les travailleurs du rang ne sont pas assez diplômés pour s'occuper de politique encouragent à l'abstention, une auto-exclusion du champ politique, même extra-parlementaire. Incompétents de tous les pays ne vous unissez pas ! Le travailleur précarisé perçoit les CDI comme des privilégiés et pas du tout comme des « frères de classe » (= résultat de cent années d'accumulation de grèves syndicales corporatives). Pour eux l'exploitation n'est pas le problème, l'exclusion si.
Même si le vrai chômage permanent ne concerne en vérité qu'un peu plus de deux pour cent en France, l'idéologie dominante est parvenue à nous inculquer que la majorité des « pauvres » a un goût trop marqué par l'assistanat, alors que cette « tare » confirme seulement que le travail en régime capitaliste est une torture !
Partout on arrive à nous convaincre qu'on est « de trop ». Sous les simagrées démocratiques , c'est encore et toujours une couche restreinte de la population – même s'il subsiste encore un épais matelas de bobos écolos en 4X4 – qui accapare les richesses produites par la majorité qui constitue le prolétariat moderne. C'est le classique processus d'accumulation du capital au détriment de ceux qui vivent de leur travail où la paupérisation des prolétaires prend la forme d'une déstabilisation de la condition... salariale, sans faire disparaître la classe ouvrière comme telle mais où des masses d'individus sont rendus d'autant plus dépendants de leur travail qu'ils sont moins regardants sur les conditions du travail. L'Etat redonne tous pouvoirs au patronat en dénonçant le « luxe » de l'assistanat, et en ne prétendant plus au rôle d'arbitre. On essaiera de montrer par après qu'en réalité il expose désormais dangereusement la minorité des « riches » à des actions de type émeute et « vengeances », manifestant non pas encore un sérieux réveil prolétarien mais un affaiblissement de l'Etat face aux multiples formes de la désagrégation : émeutes et terrorismes « intérieurs ».

La révolte en veste jaune une alternative à une lutte de classe exclue de l'entreprise ?15

C'est la question, pas forcément bête que beaucoup ont été amenés à se poser. Sans faire de concession aux petits profs modernistes il faut bien constater que l'unification des grèves jusqu'à la sainte grève générale n'est plus même du domaine de la légende comme l'internationalisme, mais relève de l'absence, sauf dans les radotages du NPA et du CCI. Les syndicats comme les grèves au lointain temps jadis avaient participé de la formation de la conscience de classe. Depuis belle bluette les syndicats ne servent qu'à fabriquer des consommateurs râleurs et des moutons fidèles à la politique de l'autruche (Libertad revient!). Quant aux grèves, elles sont de plus en plus hyper-corporatives et mendient la plupart du temps un label qui nous fit gerber dans le passé : « produisons français », « défendons la production française » qui « seule sauvera nos emplois » face à l'Europe prédatrice et aux géants ricain et chinoque16.
Nos intellos les plus sympas comme Tom Thomas, référence de l'ami Yann, ou Gérard Bad tentent de sortir des ornières du marxisme bègue, parfois avec bonheur mais ils restent aussi dans la mouise comme nous tous quant à découvrir l'élixir qui redonnera du tonus à la lutte de classe embourbée – bien que toujours vivace – dans tant d'embûches et les sournoiseries de l'événementiel. Gérard Bad, qui est le probable successeur d'Henri Simon se livre à des analyses fouillées, souvent intéressantes mais qui pêchent par l'impuissance politique coutumière du conseillisme (allez parler de « prise du pouvoir par les conseils ouvriers » au prolétariat d'aujourd'hui … et on vous rira au nez)17. Citons un extrait de ses longues analyses sociologiques, mâtinées de cette vieille propension (léniniste) à propre à tous les anciens soldats d'orgas de lancer tout de même des directives:
« Le mouvement des gilets jaunes, est la réponse ultime à l'insécurité sociale globale, qui d' ailleurs ne touche pas que la province, ce mouvement des samedis ACTE est particulièrement déconcertant pour l' état, puisque celui-ci n' a que très peu de prise économique sur lui (il n'y a pas de perte de salaire) mais plutôt des soutiens divers, même de la « violence » du boxeur où 117 000€ ont été récolté en moins de 24 heures, cette cagnotte a été immédiatement bloqué par le pouvoir, comme soutien à la violence. Mais toutes les tentatives visant à retourner l' opinion publique contre les gilets jaunes se sont retournées contre le Macron (jupiter) surnommé dorénavant Macron l' éborgneur .Ce mouvement peut de se fait tenir longtemps, d' autant que le temps travail pour lui, puisque que l' économie mondiale entre officiellement en stagnation.
A l' avenir nous n' aurons plus dans les pays désindustrialisés un prolétariat autre que précaire qui mettra du temps à s'organiser, et devra s' engager dans des mouvements type gilets jaunes, dont l' évolution reste pour le moment controversée. N 'en reste pas moins que la détermination des gilets jaunes, malgré la féroce répression visant en particulier les yeux est impressionnante.
Macron l'éborgneur et ses sbires doivent démissionner, ils démissionnent d' ailleurs les uns après les autres depuis quelque temps de peur d' avoir à rendre des comptes »18.

Gérard Bad nous entraîne au cœur de la question effleurée tant par des militants honnêtes que par tous les has been de 68 : « Les gilets jaunes comme produit social des défaites économiques du prolétariat », j'ajoute par contre un point d'interrogation.
La formule n'est pas fausse apparemment, mais elle l'est de toute façon. Relier ce mouvement inter-classiste et sans tête à la lutte générale du prolétariat est typique de nos intellos conseillistes pour qui il n'y a que deux positions dans la vie, assis et debout (non séparées), les autres positions du corps important peu. Pourtant il y a d'un côté les défaites constantes ou partielles de la lutte de la classe ouvrière, dans ses formes diverses (grèves ultra isolées, manifestations qui ne servent à rien, pétitions, pisser sur les flics et barbouiller les patrons, etc.), qui ne débouchent depuis des années sur aucun projet politique relevant de l'antique perspective communiste. De l'autre il y a eu la même erreur que Sarkozy de la part d'un gouvernement élitaire qui pensait en avoir fini avec la question sociale, parce que les grèves ne gênent plus et ne conscientisent plus personne, parce que les syndicats sont des toutous adorables même avec les gentils roquets du NPA et de LO. Tout le monde peut se tromper et la bande à Macron est restée sur le cul, bien fait. Christophe Guilluy a bien mieux prévu et expliqué le phénomène que tous nos plumitifs à prétention émancipatrice d'un prolétariat endormi, vous lirez sa dernière interview plus bas. Cela dit, Guilluy n'est pas net concernant la place du prolétariat, dans ses anciens ouvrages il parlait de « classes ouvrières » comme on parle de couches sociales, puis dans le dernier il est tombé dans le piège idéologique véhiculé par le pouvoir élitaire, il ne parlait plus ni de classes ouvrières au pluriel ni au singulier mais de « couches moyennes », ce qui est aussi creux que de parler de peuple en général. Lui aussi est un gentil réformiste qui, comme les zozos gilets jaunes, espère que les élites bourgeoises vont l'entendre et lui donner une médaille.
Gérard Bad comme d'autres observateurs inquiets en vient à penser que les luttes à l'intérieur des entreprises c'est terminé, ce en quoi il se trompe évidemment, elles existent toujours même faiblasses ou dévitalisées par les syndicrates. Au plan politique elles sont toujours devenues vie secondaires tant en 1917 qu'en 1918. La vie de la société ne peut être organisée comme un cartel des conseils d'usine, ce que les bolcheviques avaient parfaitement compris et ne peut leur être reproché. Qu'ils nous expliquent ces braves conseillistes ringards comment dans la société communiste de demain, si elle advient, on pourrait organiser la société à partir des comités élus de cette masse de cols blancs surtout motivés par le lucre sous un capitalisme « certes imparfait » et la multitude de boites conditionnant le fromage, les jouets, les médicaments et les munitions, quand une masse de plus en plus importante de la population n'est plus employée, quand l'objectif de l'humanité en peut plus être la production reine à outrance, et que la grande masse de la population n'a pas envie de faire de la politique tous les jours ni de révolution permanente ?
Même penser que le mouvement protestataire veste jaune aurait été une fuite de vapeur venue indirectement d'un prolétariat bridé par les syndicats et désespéré des partis politiques n'est pas conforme à la réalité. Je l'ai dit et redit au début il y a eu beaucoup de prolétaires engagés dans ce mouvement sans structure mais sans tête, et pas du tout démocratique contrairement à ce que dit Guilluy ci-dessous. Même si le gauchisme et certains maximalistes naïfs ont cru monter des assemblées pour permettre au mouvement de penser et de se penser, on est retombé dans les habituelles manœuvres de récupération des aspirants gourous (il y en a foule) à côté des sectes politiques non gouvernementales habituelles. L'originalité du début du mouvement de la veste jaune a été de privilégier l'action sur l'organisation et la pensée, car il y a toujours des « penseurs » syndicaux, gauchistes ou indépendants pour chapeauter dès le début toute révolte. Cela n'empêche qu'il faut « penser » aussi à tel moment à ce qu'on veut faire dans la durée et se fixer un réel projet politique, or la forme protestataire - barrage des routes - n'était pas favorable à la tenue d'AG consciente ; les chefaillons auto-proclamés n'y tenaient d'ailleurs pas ; ils ont laissé tout retomber dans l'idiotie syndicrate, l'action pour l'action et un mot d'ordre complètement crétin tombé un beau jour sans rime ni raison, puis abondamment défendu par des clowns de l'extrême droite louche comme Chouard, qui ne sont vraiment pas fiables es qualité démocratique.
Je le répète, l'émeute prolongée ne provient que de la connerie à Macron et de ses sbires ministériels, qui ont cru qu'il suffirait de faire crever des yeux pour tarir la protestation. La hausse subite des produits pour rouler en voiture jusqu'au boulot, qui n'a pas concerné les bobos parisiens, a été l'étincelle à la campagne où réside la masse de la population et de la petite bourgeoisie paupérisées. La colère s'est exprimée longuement sans être récupérable par syndicats et clowns comme Mélenchon et Quattermens, certes mais le mouvement poujadiste n'avait pas pu être récupéré non plus ni par la CGT ni par le PCF. Les révoltes subites ne sont généralement pas révolutionnaires mais conservatrices, elles ne sont pas non plus éphémères comme le montre la persistance de barbouillages en jaune des radars et le purin déversé sur les boutiques politiques. Ce mouvement n'a plus rien à voir avec la classe ouvrière, même si j'ai hésité au début à le qualifier de simplement petit bourgeois. S'il est un signe pour l'avenir, contrairement à l'hypothèse de Gérard Bad (les luttes de classe futures seraient destinées à prendre cette forme bâtarde) c'est que les couches intermédiaires (moyennes...) sont de toute façon vouées à péricliter, le petit boutiquier et l'artisan, comme au pic de toutes les crises économiques du passé, seront floués et l'Etat ne pourra leur accorder un strapontin qu'en cas de crise politique grave, comme cela a été le cas avec le recours au nazisme, ou même bien d'autres exemples, notamment De Gaulle avec le SAC, composé et recruté chez les brutes de la couche moyenne. Macron devrait comprendre qu'il ne faut pas se contenter de sustenter l'élite petite bourgeoise diplômée des ghettos urbains antiracistes, mais aussi de réserver une part du gâteau aux défavorisés du système scolaire mais devenus petits patrons.
Les pauvres vivent 13 ans de moins que les riches et c'est même pourquoi les présidents des riches insistent pour que les pauvres travaillent plus longtemps. Il ne faudrait pas qu'ils bénéficient trop longtemps de la retraite. Mais la lutte pour la défense des retraites, qui est une des luttes principales de la classe, est menée de telle façon, par la syndicratie, que les plus jeunes n'y voient aucun intérêt ou la prolongation des « privilégiés » déjà hors du travail. Or la retraite par répartition, que même les ouvriers chinois veulent conserver, est en faillite.
Ceci nous amène au principal, les antagonismes de classe ne sont pas vécus pour l'essentiel dans le cadre du travail, de la production ou de la reproduction, ils sont supportés dans la vie quotidienne et opposent de manière irréfragable riches/pauvres et prolétaires. Le problème est que la lutte des classes sur ce terrain n'a pas permis toujours une véritable affirmation des classes inférieures, du prolétariat qui a tout à perdre à se diluer dans des couches sans conscience que la jalousie, la haine et l'envie (certes compréhensibles mais nihilistes). Car il ne s'agit pas simplement de déshabiller les riches pour leur chiper leur place ni d'imputer l'oppression capitaliste à leur mode de vie et de mépriser. C'est pourtant sur ce sentiment que la plupart des sociologues et plumitifs, qui font leur jus sur l'arrogance des riches, faussent la problématique de la lutte des classes. Il est évident que la révolution (prolétarienne) va déposséder les très riches, comme en 1789 comme en 1917, mais ce n'est pas le plus difficile (en limitant les massacres) parce que le plus difficile reste la destruction de l'Etat bourgeois.
Tous les petits rigolos comme Ellul, Gorz, Picketty et les petits marquis des ghettos riches BHL et Luc Ferry, et à leur suite les modernistes se sont ingéniés à nous expliquer pendant des décennies que la classe ouvrière avait disparu. Mettons... mais jamais que la classe bourgeoise ne s'était jamais aussi aussi bien portée, pas fondue du tout dans la population, très délimitée... Etrange mon cher Watson !

COMMENT IDENTIFIER LES RICHES QUI SE CACHENT ?

La classe bourgeoise est le produit, non pas simplement d’une accumulation de biens (plus ou moins disproportionnés) , mais de rapports sociaux qui transcendent ces inégalités. La notion d’inégalité connote l’idée d’une continuité, d’une échelle sociale sur les barreaux de laquelle les groupes pourraient être rangés en fonction de la répartition des richesses. Il n’y a pas en fait de continuité, mais des ruptures, comme le montre l’exemple de la bourgeoisie. Une classe est une construction sociale des agents sociaux eux-mêmes, qui travaillent sans cesse à définir les limites de leur groupe. Elle existe en-soi et pour-soi, et ne se perpétue que si elle combine ces deux manières d’être. On peut alors se demander si la bourgeoisie n’est pas aujourd’hui, dans les sociétés occidentales, la seule classe digne de ce nom, étant peut-être la seule à développer des pratiques collectives, un collectivisme pratique qui, au-delà de la langue de bois libérale célébrant un soi-disant individualisme plus théorique que réel, soude les rangs de ceux qui ont à défendre ensemble leurs privilèges commun…19
La richesse de chacun rejaillit sur la richesse de tous les autres et chacun pense que l’on est toujours plus riche au contact de gens riches. Ce système permet et favorise la reproduction au sein des mêmes familles des privilèges propres à leur milieu. Les enfants grandissent ensemble et apprennent à aimer leurs semblables depuis le plus jeune âge. Les mères de famille y veillent avec soin par la composition de rallyes, ces associations informelles d’enfants et d’adolescents autour de pratiques culturelles ou festives. Si nécessaire, elles vérifient sur le Bottin mondain la possibilité d’intégrer un nouveau membre en regardant dans cet annuaire s’il appartient bien à un réseau familial « honorable ». Ce principe de l’entre-soi aide à la socialisation des héritiers pour qu’ils soient aptes à capter leur héritage et à le transmettre à leur tour.
« Nous avons affaire à un choc de classes. Nous sommes véritablement dans une situation d’affrontement de classes. Nous avons suivi le débat autour de l’EPAD (Établissement public pour l’aménagement de la région de la Défense) et de l’EPASA (Établissement public d’aménagement Seine-Arche). Nous continuons de regarder avec attention la fusion des deux établissements publics. Les séances du conseil général des Hauts-de-Seine sont intéressantes car elles mettent en exergue la lutte de territoires qui s’exprime dans ce projet »20.
C'est le fonctionnement d’une oligarchie au service de laquelle œuvre le président des riches. Elle est absolument impitoyable vis-à-vis des autres classes sociales notamment dans l’espace urbain. Elle développe un urbanisme de classe d’une grande violence, comme le souligne aussi Guilluy dans son interview.
« On peut dire que l’objectif est de placer les salariés sur une trajectoire qui va du boulot au caveau ! Les êtres humains qui ne font pas partie de leur milieu sont de la chair à spéculation. C’est la raison pour laquelle nous parlons de guerre de classe. Il n’y a plus de garde-fou, ni de protection. Les services publics ont vraiment vocation à tous disparaître au profit du privé. Tout est marchandisé. Il est souvent question de mondialisation mais ce n’est pas le bon mot. La bourgeoisie a toujours été mondialisée, nous sommes au stade de la marchandisation généralisée de la planète.
Les enfants ont aussi une idée de la place qu'ils occupent dans la hiérarchie sociale et, en fonction, se projettent différemment dans l'espace social : Zarca a montré que le désir d'exercer une profession supérieure est moins fréquent chez les enfants de milieux populaires
Cette construction passe aussi par l'observation. "La manière dont les parents parlent de la femme de ménage et à la femme de ménage, à la nourrice, aux enseignants, à leur patron, à leurs collègues." Ainsi que la manière dont ils sont traités en retour. Le comportement plus ou moins distant, plus ou moins dominé qu'ils entretiennent avec ces personnes participent à cet apprentissage "par corps" (c'est l'expression du sociologue Pierre Bourdieu), c'est-à-dire qui s'exprime par la gêne, les sourires, la posture physique, etc. Des travaux ont montré que les enfants ont plus facilement tendance à nouer des amitiés avec ceux qui leur ressemblent socialement.Cela s'explique peu ou prou de la même manière que l'homophilie sociale observée à l'âge adulte. D'abord par la fréquentation de lieux de rencontre socialement homogène, en fonction du degré de mixité de l'école fréquentée par l'enfant. Pour les grands bourgeois, une ville riche est une ville où l’on se retrouve entre soi ; c’est prouvé statistiquement par nos travaux de 1989. L’être humain préfère être avec des gens qui lui ressemblent, je pense que c’est valable pour toutes les catégories sociales.
Dix ans après sa construction, la ségrégation sociale a repris ses droits. Les cadres moyens et cadres supérieurs se sont finalement regroupés dans les logements les plus agréables de cet ensemble d’un seul tenant. Les ailes donnent directement sur les grandes pelouses, c’est plus agréable pour les enfants ; en revanche, la grande tour avec des ascenseurs toujours en panne, avec une concentration beaucoup plus forte, n’héberge que des travailleurs immigrés ou des familles extrêmement modestes ».
Dix ans après sa construction, la ségrégation sociale a repris ses droits. Les cadres moyens et cadres supérieurs se sont finalement regroupés dans les logements les plus agréables de cet ensemble d’un seul tenant. Les ailes donnent directement sur les grandes pelouses, c’est plus agréable pour les enfants ; en revanche, la grande tour avec des ascenseurs toujours en panne, avec une concentration beaucoup plus forte, n’héberge que des travailleurs immigrés ou des familles extrêmement modestes.Dans un sondage mené auprès de 1000 personnes en septembre 2018, 82% des sondés estiment que leur mauvaise image est due à leur comportement. , ils ne se sentent pas tenus aux règles la politesse, vous bousculent sans se sentir obligés de dire pardon dans les stations pour riches comme Hardelot, Cannes, Deauville, Trouduculville...
CE QUE LES RICHES PENSENT DES PAUVRES
« Pour vraiment comprendre les inégalités et la pauvreté, il faut aussi s’intéresser à la vision qu’en ont celles et ceux qui bénéficient le plus de l’état actuel de la répartition des diverses ressources : les classes supérieures. Celles-ci ont un poids disproportionné sur les décisions individuelles et collectives – des choix ordinaires en matière résidentielle, scolaires ou d’embauche jusqu’aux grandes orientations politiques – qui contribuent à la perpétuation voire à l’aggravation des inégalités, ainsi qu’au caractère plus ou moins généreux ou répressif des politiques de lutte contre la pauvreté. Les classes supérieures ont aussi un rôle important dans la diffusion des représentations et des divers registres argumentatifs sur lesquels s’appuie la stigmatisation des pauvres. En exprimant plus ou moins explicitement, lorsqu’elles parlent des pauvres, des jugements sur ce qui est moralement respectable, distinctif sur le plan culturel ou valable du point de vue économique, elles peuvent contribuer au marquage et à la consolidation des frontières sociales ou, au contraire, à leur effacement ou leur déplacement.

Visiblement, le souci qu’ont les classes supérieures est de préserver un certain "ordre moral" qui leur est propre est un élément structurant dans leurs relations aux milieux considérés comme “pauvres” .

Ce qui ressort d’abord de l’enquête, c’est qu’au quotidien le souci principal des classes supérieures, en termes de stratégie de distinction et d’éducation, n’est pas de se démarquer des plus pauvres. Principalement parce que, pour elles, cette distinction va le plus souvent de soi. D’autant que, dans le cas francilien, la plus grande partie des classes populaires habite à distance des beaux quartiers, si bien que les occasions d’interaction sont plutôt rares. Nos interviewés cherchent plutôt à se démarquer des classes moyennes-supérieures et moyennes, plus proches d’eux et vis-à-vis desquelles ils tiennent à affirmer leur supériorité statutaire et à défendre leurs avantages. Pour des raisons indissociablement identitaires et stratégiques en termes de reproduction sociale, ils tiennent par exemple à ce que leurs enfants grandissent dans des quartiers et fréquentent des écoles « qui leur correspondent », et ils définissent de façon très élitiste et restrictive la classe sociale à laquelle ils s’identifient ou à laquelle ils aspirent et qu’ils prennent pour modèle.
Néanmoins, c’est lors des rares occasions où cet ordre moral local est effectivement "menacé" par la perspective d’une mixité avec des classes populaires que l’on observe les réactions les plus péremptoires et violentes. Cela a notamment été le cas avec le projet de construire un centre d’accueil dans le XVIe arrondissement de Paris ou, à Delhi, quand a été émise l’idée de contraindre les écoles de la grande bourgeoisie à accueillir des élèves de milieux défavorisés.
Au-delà des dynamiques d’agrégation affinitaire et de recherche d’un entre-soi, nos interviewés évoquent aussi des logiques plus explicitement motivées par la répulsion à l’égard des pauvres. Ils cherchent à se protéger des interactions avec les classes populaires lorsqu’elles semblent menacer leur mode de vie ou, ce qui est plus souvent le cas dans les villes que nous avons étudiées, leur apparaissent mettre en danger leur sécurité physique ou sanitaire. Mais si l’on retrouve dans chacune de ces trois villes une stigmatisation des pauvres en termes de péril physique et d’atteinte à la propreté, ce n’est pas dans la même mesure. Les interviewés parisiens considèrent moins les pauvres comme dangereux et sales que ce n’est le cas à São Paulo, où – il faut bien le reconnaître – les taux et niveaux de violence sont particulièrement élevés, la police n’étant d’ailleurs pas en reste. De même, la représentation des pauvres comme sales, potentiellement malades, désordonnés et enlaidissant la ville est davantage prononcée et récurrente à Delhi. Le rapport aux espaces publics est aussi différent dans chacune des trois villes : les Parisiens aisés les fréquentent régulièrement mais souhaitent voir s’imposer partout les normes de politesse et d’urbanité qui sont celles de la bourgeoisie ; les riches delhiites considèrent comme allant de soi de ne fréquenter que ceux de certains quartiers soigneusement sélectionnés, entre lesquels ils évoluent selon une routine qui les rassure pleinement ; tandis que leurs homologues paulistains sont davantage dans un repli obsidional sur les espaces privés.
Un chapitre du livre est consacré à la façon dont les habitants des beaux quartiers (s’)expliquent la pauvreté et en déduisent d’éventuelles « solutions » à la question sociale. Une rhétorique dénonçant le caractère hérité, et donc largement irrémédiable, de la situation des pauvres se combine alors souvent avec un argumentaire les accusant de ne pas savoir y remédier par eux-mêmes… Cette articulation entre naturalisation de la pauvreté et culpabilisation des pauvres peut par exemple s’opérer en faisant du soi-disant penchant pour la paresse des pauvres une tendance certes héréditaire, mais à laquelle ils seraient coupables de ne pas résister. À Paris, où la grande majorité des interviewés évoquent spontanément les déterminants sociaux de la pauvreté et considèrent comme évident que tous les enfants ne disposent pas des mêmes opportunités et chances de réussite, ils n’en sont pas moins nombreux à affirmer que les adultes qui restent pauvres manquent de volonté pour s’extraire de leur condition. Ainsi, on retrouve dans les entretiens les critiques de l’État-Providence caractéristiques de la rhétorique réactionnaire. L’aide aux pauvres serait à la fois ou alternativement : sans effet véritable sur le problème qu’elle cherche à résoudre, perverse car désincitant les individus à faire des efforts, et dangereuse pour l’équilibre des finances publiques et donc pour l’État lui-même… Donc oui, indubitablement : tout ceci se révèle peu propice à la solidarité.21

VOULEZ-VOUS SAVOIR A PARTIR DE QUEL REVENU VOUS ETES PROLETAIRE ?

« Pour résumer l'inégalité au niveau mondial oppose des pays où le revenu moyen par habitant est de l'ordre de 150-250 euros par mois (l'Afrique subsaharienne, l'Inde) à des pays où le revenu par habitant atteint 2500-3000 euros par mois (l'Europe occidentale, l'Amérique du nord, le Japon) soit entre dix et vingt fois plus. La moyenne mondiale qui correspond approximativement au niveau de la Chine, se situe autour de 600-800 euros par mois »22.

Ce que dit l'Observatoire des inégalités :

« Selon nos estimations, le seuil de pauvreté vaut 781 euros par mois pour une personne seule , 1 518 euros pour un couple sans enfant et 1 999 euros pour un couple avec deux enfants. Les catégories
populaires (les 30 % les plus modestes) rassemblent ceux qui touchent moins de 1 265 euros par mois pour une personne, 2 468 euros pour un couple sans enfant et 3 302 euros pour un couple avec deux enfants. Le niveau de vie mensuel des classes moyennes est situé entre 1 265 et 2 275 euros par mois pour une personne seule, entre 2 468 et 4 423 euros pour un couple sans enfant et entre 3 302 et 5 743 euros pour un couple avec deux enfants. Les catégories aisées se situent au-dessus de ces niveaux. Si on fixe le seuil de richesse au niveau du double du revenu médian, on devient riche à partir de 3 125 euros mensuels pour une personne seule, 6 072 euros pour un couple sans enfant et 7 995 euros pour une famille avec deux enfants »23.
La définition sociologique, par le biais des professions, englobe en général l’ensemble des employés et des ouvriers. Ils représentent la moitié des actifs et non seulement 30 % de la population. Nos catégories « aisées » rassemblent des ménages aux revenus très inégaux, des cadres supérieurs aux PDG de multinationales et la limite supérieure de notre graphique (qui semble être de 9 000 euros) devrait être bien plus haute .
À quel niveau devient-on riche ? En utilisant différentes méthodes, nous aboutissons à un chiffre compris entre 3 000 et 4 000 euros mensuels après impôts et prestations sociales. L’analyse de Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.
On entrerait dans le club des riches à partir de 3 125 euros par mois pour une personne seule (données 2016), 6 072 euros pour un couple sans enfant et 7 995 euros pour un couple avec deux enfants. À ce niveau, on appartient aux 8 ou 9 % les plus riches.
Ce type de seuil est de plus en plus fréquemment utilisé dans des travaux de recherche . L’Insee s’intéresse beaucoup au seuil de pauvreté et très peu à celui de la richesse. Mais l’institut a donné une définition très semblable, qui est passée inaperçue . Il a qualifié d’« aisée » (évitant d’utiliser le qualificatif de « riche ») la population qui se situe à partir de 1,8 fois le niveau de vie médian, soit 3 020 euros par mois pour une personne seule (données 2014). Par construction, ce seuil est très proche de notre définition située au double du niveau de vie médian.
Est-on vraiment « riche » avec 3 000, 5 000 ou même 10 000 euros par mois ? À ce niveau, on reste modeste par rapport aux patrons des plus grandes entreprises, qui chiffrent leurs revenus en centaines de milliers d’euros. Il existe, au sein des populations les plus riches, des écarts de taille. Entre le cadre supérieur et une partie du patronat qui perçoit quelques centaines d’années de Smic chaque année, les niveaux de vie sont incomparables... Certes, on est toujours le pauvre d’un autre, surtout en France. Pointer du doigt une élite de « super-riches » (les fameux 1 %) est aussi une façon de se dégager de toute responsabilité de solidarité quand on touche un revenu convenable qui, sans être astronomique, nous place en tous cas bien au-dessus du plus grand nombre.
● En moyenne, les Français les 10% les plus aisés perçoivent des revenus 8,7 fois plus élevés sur les 10% les plus pauvres, après impôts et prestations sociales. La France est le pays en Europe, après la Suisse, où les riches sont les plus riches: le 1% le plus riche récupère presque 6% des revenus de l’ensemble des ménages et touche au moins 7000 euros par mois, contre 5800 au Royaume-Uni. Les 10% reçoivent 23,8% de l’ensemble des revenus.
● Les écarts de patrimoine sont bien plus élevés que ceux des revenus. Le 1% le plus fortuné de France possède 17% de l’ensemble du patrimoine des ménages et les 10% presque la moitié. Le patrimoine médian des cadres est supérieur à 200.000 euros, versus 16.400 euros pour celui des ouvriers non qualifiés.
● En bas de l’échelle, 5 millions de personnes pauvres vivent avec moins de 855 euros par mois pour une personne seule.


UN TROTSKIEN A REVOLUTIONNE LA STATISTIQUE SOCIALE

J'ai fait des recherches à l'INSEE Malakoff il y a vingt ans pour retrouver la nomenclature qui servait de base aux stats de l'INSEE à la fin des sixties – sur la carte perforée en haut à gauche on
trouvait les deux catégories les plus basses « homme de troupe » et « ouvrier » (je crois que homme de troupe se trouvait au-dessus d'ouvrier, car le soldat depuis l'Antiquité reste supérieur au travailleur) – impossible de retrouver cette fiche si classe !24
Après guerre, « à une époque où « il [fallait] tout inventer. Fabriquer des questionnaires, des plans de sondage et des nomenclatures, rédiger les instructions aux enquêteurs et former ces derniers, expérimenter les techniques d’interview sur le terrain ». Dans une institution encore en construction, l’essentiel était de répondre aux attentes exprimées en matière de description de la société, qui émanaient de différents types d’utilisateurs potentiels : statisticiens de l’INSEE, professionnels des études de marché et chercheurs. À cette époque, les agences de publicité et le milieu de la recherche étaient en demande d’un outil organisant les informations collectées sous la forme de libellés de profession dans des enquêtes de nature sociologique ou historique et des études de marché. La société d’après-guerre, en pleine reconstruction, était encore à décrire et le développement des méthodes quantitatives en fournissait l’occasion ».

Après une formation en mathématique et philosophie dans les années 1930, J. Porte, âgé d’une trentaine d’années, avait rejoint l’Institut en 1947, au sein du service de la démographie qu’il choisit pour des raisons politiques. Trotskiste pendant la guerre, devenu « plutôt anarchiste » ensuite, il « avait de l’intérêt pour le contrôle des naissances et l’avortement »25. Certains des choix opérés dans le code témoignent de cette liberté, comme celui de réunir dans le groupe « 8. Autres catégories » les artistes, les membres du clergé et les militaires et d’indiquer comme exemples de la catégorie « 99. Autres personnes non actives » : « capitaliste, idiot, imbécile, propriétaire foncier, prostituée ». Ces choix firent scandale à l’INSEE sans toutefois disparaître immédiatement du code. Le groupe 8 resta en l’état jusqu’à la refonte de la nomenclature en 1982 ; la liste de la catégorie 99 ne fut revue que pour le recensement de 1962, où elle devint « ménagère, propriétaire foncier, détenu ». Aussi inclassable que certaines des professions qu’il eut à regrouper, J. Porte conserva une image atypique à l’INSEE. Comme le précise J. Porte à A. Desrosières, « un OQ [ouvrier qualifié] on sait ce que c’est, mais après ? Où [allait]-on mettre les autres ? » Et les cadres ? « C’était déjà banal », répond-il (concernant le CSP, catégories socio-professionnelles, devenu aussi (hi!) contrat de sécurisation professionnelle ).
Techniquement, l’adéquation avec la logique des catégories conventionnelles vint progressivement : même si le découpage entre ouvriers spécialisés et qualifiés était présent dès la première version du code en 1951, aucune question n’a été posée avant 1962 pour repérer les qualifications ouvrières et il fallut attendre la refonte de 1982 pour qu’elle soit théorisée et étendue à l’ensemble des salariés.

LA STATISTIQUE UN NOUVEAU MOYEN POUR DECOUVRIR LES MYSTERES DE LA LUTTE DES CLASSES
La « sociologie des classements sociaux» et qui a été développée par P. Bourdieu et ses collègues à partir des années 1975. deux legs de cette sociologie à la statistique publique : le premier a trait au cadre d’interprétation sociologique des inégalités sociales mises en évidence par les statistiques, le second à la nécessité d’un regard réflexif invitant à dénaturaliser les catégories utilisées par les statisticiens. Des statisticiens publics (Alain Darbel, Jean-Paul Rivet et C. Seibel), avait utilisé la nomenclature dans l’enquête conduite à la fin des années 1950 sur le travail et les travailleurs en Algérie . La variable s’est ensuite imposée au fil des années comme une clé d’analyse centrale de la sociologie qu’il a développée autour de la question de la reproduction des inégalités sociales (à travers la CSP du père) et des rapports de domination entre les classes sociales. Derrière ces inégalités, ce sont les formes de domination, notamment culturelles ou symboliques, que la statistique permet d’objectiver. Et c’est par ce biais que la sociologie de P. Bourdieu a pesé sur la nomenclature des CSP : d’utilisatrice assidue du code de 1954, elle est devenue source d’inspiration de la refonte.
Munie des méthodes d’analyse factorielle à partir du début des années 1970, cette sociologie a d’abord produit des cartographies de l’espace social représentant les catégories de J. Porte, puis elle a accompagné les choix visant à repositionner certaines catégories lors de la refonte de façon à occuper au mieux cet espace. Ainsi, les artistes, qui faisaient partie d’une catégorie « Autre », sont intégrés au groupe des « Cadres et professions intellectuelles supérieures » en raison de leur capital et de leur légitimité culturels (bien que non certifiés), de même que certaines professions intellectuelles (les journalistes et publicistes notamment) qui étaient auparavant classées avec les cadres moyens. Dans la version de 1982, le regroupement des catégories suit ainsi un principe hiérarchique selon le volume total de capital qui repose davantage, pour les unes, sur le capital économique (cadres administratifs et ingénieurs d’entreprise, agents de maîtrise, techniciens et professions intermédiaires administratives ou commerciales d’entreprise) et, pour les autres, sur le capital culturel (professeurs et professions scientifiques, professions de l’information, de l’art et des spectacles, instituteurs et assimilés, professions intermédiaires de la santé et du travail social). Le positionnement des professions libérales, pourtant le plus souvent non salariées, dans le groupe des cadres correspond à cette même logique, puisqu’elles cumulent hauts niveaux de diplôme et de revenus. Et si la note présentant les réflexions autour du positionnement des agents de maîtrise indique qu’il n’y a pas de « bonne solution», l’option finalement retenue (classement au sein des professions intermédiaires et non plus des ouvriers) est de fait cohérente avec une lecture en termes de volume total de capital.
À cet égard, on peut considérer que l’arrimage aux catégories du droit, présenté comme un des principes fondamentaux de la refonte, est en partie subordonné à cette lecture sociologique de l’espace social. Le classement de certaines professions en témoigne, comme celui d’agents de catégorie A du secteur du travail social ou de l’enseignement dans le groupe des professions intermédiaires ou, inversement, celui déjà cité des artistes au sein des cadres et professions intellectuelles supérieures. C’est avec l’espace social de La distinction de P. Bourdieu en tête, et en combinant graphiques et analyses résultant des groupes de travail ayant examiné les découpages possibles du social dans un domaine d’emploi limité que la nomenclature d’ensemble a été reconstruite26.

L'étude sociologique permet de confirmer les inégalités de classe et de vérifier ce que la politique lambda laisse dans l'ombre. Et qui corrobore généralement notre bonne vieille analyse marxiste. Entre autres que la femme est le prolétaire de l'homme27. Ou sa pute28.

Le prolétariat, comme les autres classes n'est plus très famille (laquelle famille ouvrière était jadis aussi un creuset de transmission de la conscience de classe). On apprend notamment que les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses, ou encore que les Français se séparent plus et cohabitent plus souvent qu'avant. Deux familles sur dix sont monoparentales. Mais celles-ci tendent à évoluer. En effet, l'Insee constate que deux familles sur dix sont monoparentales (composées d'un parent qui ne vit pas en couple et réside avec ses enfants). C'est 4% de plus qu'en 1999. La monoparentalité concerne en majorité les femmes, surtout les moins diplômées. Comme l'explique l'Insee, celles-ci ont tendance à rompre plus tôt leur union, ont plus souvent des enfants mineurs que les femmes les plus diplômées.
"Le type d’union se diversifie même si le mariage reste majoritaire", analyse Isabelle Robert-Bobée, co auteure de l'étude. "Les unions sont devenues plus fragiles avec une forte augmentation de la part des familles monoparentales", ajoute-t-elle.
Après une séparation (divorce ou rupture de Pacs), le niveau de vie des femmes comme celui
des hommes diminue. Logique: à deux, on fait des économies d'échelle. Le loyer, par exemple, est souvent bien moins important que lorsqu'on vit seul.
Mais cette baisse du niveau de vie a deux poids deux mesures. Car il baisse de 3% pour les hommes et de... 20% pour les femmes. Ce niveau, pour une femme séparée en 2009 et n'ayant pas formé de nouvelle union en 2010, baisse en effet de 14,5% alors qu'il aurait augmenté de 5,5% si elle était restée en couple. Le niveau de vie d'un homme augmente quoi qu'il arrive, même lorsqu'il se sépare (+3,5%) entre 2009 et 2010, mais s'il n'avait pas connu la rupture, celui-ci aurait encore plus augmenté (+6,5%).
L'insee montre qu'au fil des générations, les premières unions sont de plus en plus courtes. Entre 1978 et 1987, 30% des personnes nées entre 1978 et 1987 ont eu une première union cohabitante durant moins de cinq ans. 30 ans plus tôt, ce nombre n'était que de 9%.
Phénomène parallèle à l'augmentation des ruptures, il est de plus en plus fréquent pour les Français de vivre plusieurs unions cohabitantes. En 2013, 19% de hommes et femmes de 26 à 59 ans avaient vécu deux relations cohabitantes de couple. Par comparaison 58% des personnes de 35 nées entre entre 1968 et 1977 vivaient en couple avec leur premier conjoint. Ce chiffre était encore plus élevé auparavant.

Quant au cursus universitaire... Si l’on considère maintenant le niveau de diplôme obtenu par les
jeunes âgés de 25 à 29 ans, il s’avère qu’en 2010-2012, 65 % des enfants de cadres ou de professions intermédiaires sont diplômés du supérieur contre 30 % des enfants d’ouvriers ou d’employés. En outre, les premiers possèdent un niveau plus élevé : en 2010-2012, 29 % d’entre eux sont diplômés d’un Master, d’un DEA, d’un DESS, d’un doctorat ou d’une grande école, contre 7 % des enfants d’ouvriers ou d’employés. En revanche, le taux de diplômés de l’enseignement supérieur court professionnalisant varie peu selon le milieu social : 14 % des enfants de cadres ou de professions intermédiaires ont obtenu un BTS, DUT ou diplôme équivalent contre 18 % des enfants d’ouvriers ou d’employés en 2009- 2011. Ces taux sont assez stables par rapport à la période 2003-2005. Par ailleurs, les enfants de milieu moins aisé quittent plus souvent l’enseignement supérieur sans avoir obtenu un diplôme : en 2010-2012 parmi les jeunes âgés de 25 à 29 ans, c’est le cas de 13 % des enfants de cadres ou de professions intermédiaires ayant étudié dans le supérieur contre 21 % des enfants d’ouvriers ou d’employés.

Tant que le nombre des classes moyennes sera aussi massif et avec ses hauts revenus, la révolution sous la direction du prolétariat restera impossible.

ANNEXE : interview de Guilluy

Qu’entendez-vous exactement par « France périphérique » ?
Christophe Guilluy : ’France périphérique’ concerne la répartition géographique de la classe ouvrière en France. Il y a quinze ans, j’ai remarqué que la majorité de la classe ouvrière vivait en réalité très loin des grandes villes mondialisées - loin de Paris, Lyon et Toulouse, mais aussi très loin de Londres et de New York.
Techniquement, notre modèle économique mondialisé fonctionne bien. Cela produit beaucoup de richesse. Mais il n’a pas besoin de la majorité de la population pour fonctionner. Il n’a pas réellement besoin de travailleurs manuels, d’ouvriers et même de propriétaires de petites entreprises en dehors des grandes villes. Paris crée assez de richesse pour la France entière et Londres fait de même en Grande-Bretagne. Mais vous ne pouvez pas construire une société autour de cela. Les gilets jaunes sont une révolte des classes ouvrières qui vivent dans ces lieux.
Ce sont généralement des personnes qui travaillent mais qui ne gagnent pas beaucoup, entre 1000 € et 2000 € par mois. Certains d’entre eux sont très pauvres s’ils sont au chômage.D’autres étaient autrefois des classes moyennes. Ce qu’ils ont tous en commun, c’est qu’ils habitent dans des régions où il ne reste presque plus de travail. Ils savent que même s’ils ont un emploi aujourd’hui, ils pourraient le perdre demain et qu’ils ne trouveront rien d’autre.

Quel est le rôle de la culture dans le mouvement de la veste jaune ?

Guilluy : Non seulement la périphérie française réussit mal dans l’économie moderne, mais elle est également mal comprise par les élites sur le plan culturel. Le mouvement de la jaquette jaune est un véritable mouvement du 21ème siècle dans la mesure où il est à la fois culturel et politique. La validation culturelle est extrêmement importante à notre époque.
Une illustration de cette fracture culturelle est que la plupart des mouvements et manifestations sociaux modernes et progressistes sont rapidement endossés par les célébrités, les acteurs, les médias et les intellectuels. Mais aucun d’eux n’approuve les gilets jaunes . Leur émergence a provoqué une sorte de choc psychologique dans l’establishment culturel. C’est exactement le même choc que les élites britanniques ont vécu avec le vote sur le Brexit et qu’ils subissent encore, trois ans plus tard.
Le vote sur le Brexit a également beaucoup à voir avec la culture, je pense. C’était plus que la question de quitter l’UE. De nombreux électeurs ont voulu rappeler à la classe politique qu’ils existaient. C’est pour cela que les Français utilisent les gilets jaunes pour dire que nous existons . Nous assistons au même phénomène dans les révoltes populistes à travers le monde.
Comment les classes ouvrières en sont-elles venues à être exclues ?
Guilluy : Toute la croissance et le dynamisme sont concentrés dans les grandes villes, mais les gens ne peuvent pas simplement y aller. Les villes sont inaccessibles, notamment en raison de la hausse des coûts du logement. Les grandes villes ressemblent aujourd’hui à des citadelles médiévales. C’est comme si nous retournions dans les cités-états du moyen âge. Curieusement, Paris va commencer à faire payer des entrées, tout comme les droits d’accise que vous deviez payer pour entrer dans une ville du Moyen Âge.
Les villes elles-mêmes sont également devenues très inégales. L’économie parisienne a besoin de cadres et de professionnels qualifiés. Il a également besoin de travailleurs, principalement des immigrants, pour le secteur de la construction, la restauration, etc. Les entreprises s’appuient sur ce mix démographique très spécifique. Le problème est que « les gens » en dehors de cela existent toujours. En fait, la « France périphérique » englobe la majorité des Français.

Point fort : quel rôle l’élite métropolitaine libérale a-t-elle joué ?

Guilluy : Nous avons une nouvelle bourgeoisie, mais parce qu’ils sont très cool et progressistes, cela donne l’impression qu’il n’y a plus de conflit de classe. Il est vraiment difficile de s’opposer aux hipsters quand ils disent qu’ils se soucient des pauvres et des minorités.
Mais en réalité, ils sont très complices de la relégation de la classe ouvrière. Non seulement bénéficient-ils énormément de l’économie mondialisée, mais ils ont également engendré un discours culturel dominant qui exclut les personnes de la classe ouvrière. Pensez aux "déplorables" évoqués par Hillary Clinton. Il existe une vision similaire de la classe ouvrière en France et en Grande-Bretagne. Ils sont considérés comme une sorte de tribu amazonienne. Le problème pour les élites est que c’est une très grande tribu.
La réaction de la classe moyenne aux vestes jaunes a été révélatrice. Immédiatement, les manifestants ont été dénoncés comme étant xénophobes, antisémites et homophobes. Les élites se présentent comme antifascistes et antiracistes, mais ce n’est qu’un moyen de défendre leurs intérêts de classe. C’est le seul argument dont ils disposent pour défendre leur statut, mais cela ne fonctionne plus.
Maintenant, les élites ont peur. Pour la première fois, il existe un mouvement qui ne peut être contrôlé par les mécanismes politiques normaux. Les gilets jaunes ne sont pas sortis des syndicats ou des partis politiques. Il ne peut pas être arrêté. Il n’y a pas de bouton "off". Soit l’intelligentsia sera forcée de reconnaître convenablement l’existence de ces personnes, soit elle devra opter pour une sorte de totalitarisme doux.
On a beaucoup parlé du fait que les exigences des gilets jaunes varient beaucoup. Mais avant tout, c’est une demande de démocratie. Fondamentalement, ce sont des démocrates - ils veulent être pris au sérieux et ils veulent être intégrés à l’ordre économique.

Comment pouvons-nous commencer à répondre à ces demandes ?

Guilluy : Tout d’abord, la bourgeoisie a besoin d’une révolution culturelle, notamment dans les universités et les médias. Ils doivent cesser d’insulter la classe ouvrière, de ne plus penser à tous les gilets jaunes comme des imbéciles.
Le respect culturel est fondamental : il n’y aura pas d’intégration économique ou politique avant l’intégration culturelle. Ensuite, bien sûr, nous devons penser différemment à l’économie. Cela signifie se passer de dogme néolibéral. Nous devons penser au-delà de Paris, Londres et New York.

(Christophe Guilluy interviewé par Fraser Myers).

Et l'avis d'un excellent cinéaste :

« La lutte des classes, la cohabitation entre les riches et les pauvres est un problème universel dans le monde actuel. Qu’on le veuille ou non, nous sommes obligés de coexister, et le film parle des difficultés qui en résultent. En France, vous avez le mouvement des « gilets jaunes », qui a démarré en raison du prix de l’essence, puis a pris une autre tournure. Nous avons le même genre de tensions en Corée. Or, je ne pense pas qu’on arrivera à une solution miracle, ni qu’il faille attendre un messie. Personne ne sait comment tout cela va tourner, mais c'est un combat à mener au jour le jour et tous ensemble ».

Bong Joon-ho : « Riches et pauvres sont obligés de coexister »

Dans un entretien au « Monde », le réalisateur sud-coréen de « Parasite », Palme d’or à Cannes,




NOTES


1Cet ancien conseiller économique de la bourgeoise PS Royal est en général assez condescendant avec les « limites » de Marx qu'il crédite d'une « certaine clairvoyance » pour sa méfiance vis à vis de la dette publique qu'il percevait « comme un instrument au service de l'accumulation du capital privé » (cf. p.210). Avec cette diiférence qu'au XX e siècle, la dette a été noyée dans l'inflation et repayée en monnaie de singe. Picketty ne comprend rien à la baisse tendancielle du taux de profit et ne cesse de porter des jugements pour décrédibiliser Marx : « Marx n'utilise pas de modèle mathématique et sa prose n'est pas toujours limpide » (p.360) ; « ...en dépit de toutes ces intuitions importantes, Marx conserve le plus souvent une approche relativement anecdotique et peu systématique des statistiques disponibles » (p.363). Picketty s'affirme lui picrocholin et nunuche (cf. La lutte des classes ou la lutte des centilles ? p.396).
2p.38.
3Deuxième budget de l’État, le ministère des Armées emploie 270 000 personnels civils et militaires, intervient militairement au Sahel et au Levant, est un acteur économique central de nombreux territoires, travaille avec plus de 26 000 PME et exerce son expertise sous les mers jusque dans l’espace. Chargé de la défense du territoire national, de la lutte contre le terrorisme et de la défense des intérêts vitaux de la Nation, le ministère des Armées est doté d’un budget de remontée en puissance afin de pouvoir répondre aux missions qui lui sont confiées.
Cf. le dernier rapport du cabinet IHS Markit sur les budgets de défense mondiaux, publié mardi 18 décembre. Selon IHS, les dépenses
militaires françaises ont dépassé le budget de défense russe en 2017 et 2018. Paris devance même Moscou de deux milliards de dollars cette année (53,6 milliards de dollars contre 51,6 milliards). IHS avait annoncé ce croisement de courbes dès fin 2016, soulignant la chute régulière de la Russie dans son classement : celle-ci avait été dépassée par l’Inde et l’Arabie saoudite en 2015, sortant du top 5 mondial.
Depuis 2015, 120 bateaux militaires ont été vendus par les chantiers navals français à Riyad, sans compter la rénovation par Naval Group des principales frégates, équipées pour l’électronique par Thales et pour les missiles par MBDA. La ministre Florence Parly, en dévoilant début juillet le rapport 2018 des ventes d’armes de la France à travers le monde, s’enorgueillissait de la présence de la monarchie saoudienne en troisième position des meilleurs clients de l’industrie d’armement tricolore. Cela n’est pas nouveau : dans la décennie précédente, l’Arabie saoudite était le second meilleur client, avec 11 milliards d’emplettes d’engins de mort.
Ce pourrait n’être que les affaires courantes, et hautement rentables, des industriels de l’armement soutenus par le gouvernement. Sauf que les engins vendus ne sont pas purement décoratifs et qu’ils tuent. Et, dans le cas de l’Arabie saoudite, ils contribuent aux massacres que le royaume perpètre depuis 2015 au Yémen. La responsabilité des dizaines de milliers de morts déjà recensés et de la famine qui touche le pays incombe au pouvoir tenu par Mohamed Ben Salman, et aussi à ceux qui l’arment.
4Même si le mouvement comporta nombre de prolétaires, ceux-ci ne se nomment pas ainsi, les manifestants monocolores (de la couleur des cocus et des fous) préféraient encore se nommer « pauvres » et généralement, ce qui est quelque peu ridicule, « de la couche moyenne », terme qui au demeurant n'implique aucune prise de conscience d'aucune sorte.
5Voir l'excellente étude de Karine Clémant : Russie, pauvreté de masse et stigmatisation des pauvres.
6« Il faut culpabiliser les ouvriers » Monique, femme-gourou du CCI.
7Cf . Pierre Ansart : Les sociologies contemporaines (Seuil 1990), confirme ce que j'ai vécu pendant des décennies sur le tas. « On sait que ce système d'organisation humaine du travail est caractérisé par des distinctions très rigides des différents statuts et par une rigoureuse hiérarchisation de ces statuts depuis les ouvriers d'entretien jusqu'aux responsables de la direction. De plus, du fait de la nature du travail, une pression permanente est exercée pour que les tâches soient journellement exécutées. De cette double pression résulte une particulière faiblesse des rapports interpersonnels : les échanges sont limités , l'intérêt porté au travail aussi faible qu'il est possible, les syndicats ont peu d'influence et ne sont pas estimés » (p.130). Et sur la théorie des conflits dans les organisations (de divers types) lire p.129 et suiv.
8Il ajoute, en bon social-démocrate admiratif des progrès de l'économie capitaliste : « nous sommes passés d'une société de super-rentiers à une société de rentiers moins extrême que celle du passé, avec davantage d'équilibre entre la réussite par le travail et par le capital » (p437). Preuve que Picketty ne se relit pas, puisque par après il est obligé d'expliciter l'hyper sélection par le fric des universités de l'élite bourgeoise... (p.714 : Le rendement pur des dotations universitaires et p.777 : Méritocratie et oligarchie à l'université, et l'allusion aux mécanismes de sélection sociale mis en évidence par Bourdieu et Passeron, p.779). Ce que d'autres auteurs dénoncent mieux que lui. Sur ce prétendu équilibre il se contredit à peine quelques pages plus loin en reconnaissant la hausse des inégalités françaises depuis les années 1980-1990, sans oublier que « la part des profits n'a finalement fait que retrouver autour de 1990 le niveau qui était le sien à la veille de Mai 68 » (p.457). Il ne croit pas que la capital est en permanence assis sur un volcan et qu'on évitera des nouveaux kachs style 1929, en jugulant pareillement à 2008 toute nouvelle crise grâce à la capacité des banques centrales à « créer les liquidités nécessaires » (p.753) !!! Nouvel anti-communiste chic, missi dominici d'un capitalisme plus égalitaire, Pichetty prétend se hausser, en conclusion, hors de la problématique de dépassement du capitalisme (en terme de « recherche « ) mais sans être très sûr de lui : « Loin de stimuler les recherches (sic) sur le capital et les inégalités, les affrontements autour du capitalisme et du communisme ont plutôt contribué à les stériliser, aussi bien d'ailleurs parmi les historiens et les économistes que parmi les philosophes. Il est plus que temps de les dépasser, y compris dans les formes que prend la recherche historique, qui demeure me semble-t-il profondément marquée par ces affrontements passés » (resic). p.949.
9 Cf. page 708, La hiérarchie morale des fortunes (sic).
10Des statistiques indiquent que le phénomène serait en régression, le personnel enseignant vivant le même dégoût et désenchantement de la politique que le reste du prolétariat et subissant la violence des élèves bradés et des parents bobos : (cf. L'Express, https://www.lexpress.fr/styles/enfant/comment-ameliorer-le-dialogue-parents-enseignants_1577541.html : « Ces statuts (de la loi Jospin), volontairement flous, auraient donné trop de marge de manoeuvre aux parents. Ajoutons à cela la montée de l'individualisme, la progression du communautarisme, la crise économique, la hausse du chômage, et l'on obtient un système scolaire en panne sèche, où les parents craignent pour l'avenir de leurs enfants et où les enseignants dépriment en voyant ce qu'est devenue leur profession. Ainsi, pour éviter les clashs à répétition et opter pour la paix sociale, certains professeurs choisissent l'autocensure: "Dans certains cas, l'enfant est devenu l'oeil de Moscou auprès de ses parents, profitant du moindre faux pas de l'enseignant -si tant est que c'en fût un- pour provoquer une polémique et accuser le professeur. J'ai vu une élève d'école primaire en arriver à mordre son institutrice ». Société de l'enfant-roi : « La relation avec les membres du personnel enseignant n'est pas toujours de tout repos, comme la jeune femme nous l'apprend : « Les parents vont souvent préférer croire la version de leur enfant plutôt que celle de l'éducateur ou de l'enseignant. Certains voient ces derniers, surtout les éducateurs, comme des fonctionnaires pas vraiment intelligents. Ils ne respectent pas notre profession et on peut parfois sentir leur mépris. » Néanmoins il faut savoir que la proportion d'enseignants parmi les parents d'élèves est de 15% ! Comme quoi les chieurs sont souvent les mêmes ! Ils ont surtout peur : https://journals.openedition.org/trema/540
12https://www.cairn.info/revue-education-et-societes-2015-2-page-83.htm : « le lien entre activisme et syndicalisation se distend, celui entre activisme et engagement politique, semble rompu pour l’écrasante majorité des enseignants ». Ils sont divisés pire que les ouvriers en hiérarchie intellectuelle, entre agrégés et certifiés et divisions corporatives (entre enseignants du premier et du second degré, du second degré général et du second degré professionnel et technique, entre contractuels, certifiés et agrégés). Les enseignants qui continuent à occuper des mandats et des responsabilités partisanes sont pour beaucoup retraités ou en statut de détachement. Ils sont beaucoup plus rares parmi les nouveaux élus et responsables, depuis 2003, alors que leur présence est plus fréquente sur les listes municipales de droite. Ils ont peur et les billevesées immigrationnistes et islamogauchistes sont en perte de vitesse. Cette peur bien précise de la part des futurs exclus du système : celle qui est au cœur de toute relation de domination - soumission : la peur pour le dominant que le dominé ne se soumette plus. « Les enseignants aujourd’hui semblent mis devant un véritable défi par leurs élèves : faire le deuil du pouvoir sur autrui et simultanément développer une nouvelle forme d’autorité pour pouvoir transmettre les savoirs et la loi, en devenant un modèle d’adulte plausible. Défi d’autant moins anodin qu’il correspond à une véritable anxiété pour ces élèves incertains qui, sans être véritablement dans le révolte, ne sont déjà plus dans la soumission … ». Mendel le signalait déjà : « Subjectivement, les enseignants, pour plusieurs raisons, ne veulent et ne peuvent renoncer à l’autorité. Ce sont ces raisons qu’il aurait fallu mieux montrer. D’abord avant tout la situation infantilisante faite aux enseignants par l’administration (et auquel répond le corporatisme des syndicats) : à défaut d’avoir un pouvoir individuel et surtout collectif « sur le contenu de leur acte de travail » il ne leur reste plus que le pouvoir sur les autres, sur les élèves (et encore, celui - ci est - il de plus en plus mal assuré) ... Par ailleurs, certaines situations scolaires, dans les banlieues des grandes villes, sont devenues à la limite de l’impossible et contraignent les enseignants à des acrobaties humiliantes. Et, enfin, last but not the least, ces derniers ne voient ouverte aucune alternative qui pourrait succéder au couple autorité - force (l’ultima ratio de l’autorité étant toujours l’usage de la force). » (MENDEL, 1993)

13Voir ses délires à partir de la page 754.
14L'Etat se désengage, abandonnant en grande partie sont rôle prétendu d'arbitre impartial, précisément parce que « ses » syndicats (CGT, CFDT, FO et même les prétendus indépendants) ne servent plus à berner les ouvriers, sont discrédités et surtout inutiles face à l'individualisation forcenée des tâches. Gageons que les subventions étatiques en faveur des permanents syndicaux vont connaître aussi une paupérisation... souhaitable du point de vue du prolétariat honnête !
15« Gilets jaunes » : Bordeaux la bourgeoise paie ses fractures. La violence des manifestations dans la ville cossue a mis en évidence la cassure entre un centre-ville désormais accessible aux seuls privilégiés et des zones périurbaines gagnées par un sentiment d’injustice et d’exclusion. (Le Monde). « 
« Je me rappelle une manifestation en janvier. J’étais dans ma boutique avec des clients et des “gilets jaunes”, pas des casseurs, mais des gens comme vous et moi, se sont approchés en criant : “C’est une agence de voyages ! C’est pour les riches ! Venez, on casse tout !”. Drouet ne veut pas seulement être président de la république choaurdienne mais débile en chef, il sermonne le peuple et menace la macronie d'une rentrée dure niveau menace syndicale gauchiste ringarde (et avec ses habituelles ridicules fautes d'orthographe: "
Les anti gilets jaunes qui applaudissent les manifestants de Hong-Kong . Vous pensez quoi de votre démocratie en france?
À part payer vous avez le choix de faire quoi d’autre??
Donc au final pas vraiment plus qu’eux !!
Quand ceux d’en bas s’en sortirons plus ça vous attendra vous aussi !!
Ce n’est qu’une question de temps !!
On critique aussi beaucoup les BB
Mais quand en Chine ils sont là et ça prouve qu’il y’a que comme ça que ça marche tout le monde dit bravo !!
Les manifestants de Hong Kong nous montrent comment marche la solidarité en septembre c’est comme ça que ça doit marcher pas avec les manif cgt fo ou encore partie politique ou à thème à la con je sais pas quoi!!
On se bat contre ce gouvernement , on est pas là pour se balader
Bonne soirée à tous et vivement la rentrée !!!!
Force à tous les gilets jaunes !!
Eric Drouet : Facebook – La France en Colère !!!

16Ou sont présentées comme inutiles et vouées à l'échec dans le secteur esclavagiste de l'ubérisation par exemple. Certains groupes de livreurs de Deliveroo ont bien du mérite d'envisager une grève nationale à partir des grandes villes, c'est loin d'être gagné contre cette mafia obscure et ...sans frontières.
17Par contre, une des forces des idéologues de la villa Montmorency est de certifier que le communisme veut le nivellement par le bas. Ils sont soutenus par conseillistes et anarchistes qui croient que le communisme est égalité et obligation de consommer pour tous la même chose. Sans oublier la propagande la gauche néo-stalinienne et trotskienne.
19Inégalités entre les riches et unité de la classe bourgeoise, Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot. Dans Les sociologies critiques du capitalisme (2002) https://www.cairn.info/les-sociologies-critiques-du-capitalisme--9782130531852-page-139.htm

20Interview du couple Pinçon-Charlot.
22Thomas Piketty, Le Capital au XXI ème siècle, p.111 ;
23https://www.inegalites.fr/Riches-pauvres-et-classes-moyennes-comment-se-situer

24À l’époque de la refonte de la nomenclature, entre la fin des années 1970 et le début des années 1980, des statisticiens en début et milieu de carrière se rencontrent à la division « Emploi » de l’INSEE : les premiers, comme A. Desrosières ou Alain Goy, ont près de quarante ans ; les autres, comme L. Thévenot et, un peu plus tard, Michel Gollac et Baudouin Seys, environ dix de moins. Tous participent, de près ou de loin, à la refonte et partagent un intérêt pour les sciences sociales : les premiers ont été marqués par le passage de P. Bourdieu à l’École nationale de la statistique et de l’administration économique (ENSAE, école de formation de l’INSEE), lorsqu’il y enseigna au milieu des années 1960 ; les seconds étaient lycéens ou étudiants lors de mai 1968 et font partie d’une génération fortement politisée.
25J. Porte se rappelle par exemple avoir « assisté à plusieurs réunions au Centre d’études sociologiques » et « vu souvent Pierre Naville », qui était « déjà trotskiste avant la guerre », mais « ne croit pas avoir discuté avec lui sur les CSP, ni avec Touraine ». Questionné plus précisément au sujet de son utilisation des travaux sur la qualification et le travail ouvrier, notamment de P. Naville, il répond ne pas les avoir consultés. Dans son article du Traité de sociologie du travail, il précisait qu’« il y [avait] analogie mais non identité entre les concepts de ‘catégorie socio-professionnelle’ et celui de ‘classe sociale’ [...] [parce que les CSP n’étaient] rattachées à aucune des théories diverses et contradictoires à partir desquelles les sociologues des différentes écoles [avaient] voulu définir les ‘classes sociales’ ». En 1976, lorsqu’A. Desrosières l’interroge sur le choix de l’appellation retenue pour les catégories, il répond qu’il « ne les appelai[t] pas des classes pour ne pas [s]’engueuler avec certaines personnes qui, elles, les considéraient comme des classes ». « Bien sûr, il y [avait] une origine marxiste : je le dis, on peut les regrouper d’une façon qui satisfait les marxistes, et allez donc... Ça m’est égal. Je veux bien satisfaire les utilisateurs marxistes comme les autres. » À Vaucresson, il reprend cette position en indiquant qu’à l’époque où il a élaboré le code des catégories socioprofessionnelles, la sociologie était très influencée par le marxisme ; pour ou contre, tous les auteurs prenaient position. La fabrication d’un code des catégories socioprofessionnelles répondait à une demande assez forte : « marxiste ou non, on parlait beaucoup des classes sociales ; il s’agissait d’aboutir à un système pratique pour classer les individus ». 26https://fr.wikipedia.org/wiki/Professions_et_catégories_socioprofessionnelles_en_France
27On n'en traite jamais dans les sectes politiques vertueuses et qui affichent un culte nunuche du prolétariat, mais l'exploitation existe aussi entre prolétaires. Cela me dégoût toujours de voir le nombre croissant de jeunes prolétaires qui, vivant en HLM, font payer le crédit d'achat d'un appartement en le louant à un prolétaire comme eux, et plus cher que leur loyer HLM...
28Au 21 ème siècle comme au 19 ème les femmes sont encore obligées de se prostituer because non le vice mais la pauvreté. Un exemple récent avec titrage sensationnel de la presse-pute : « Elle confie ses enfants pour aller se
prostituer ». Dimanche, la mère de famille âgée de 28 ans s’était présentée au commissariat de Noailles à Marseille (Bouches-du-Rhône) pour signaler la disparition de ses enfants. Elle avait expliqué aux policiers les avoir confiés à une adolescente à son arrivée en gare Saint-Charles, quatre jours plus tôt. Son but était de pouvoir se prostituer afin de régler une dette d’argent. Problème : L’adolescente a disparu avec les enfants et leur mère ne connaît ni son identité ni son adresse, relate La Provence.