Salafiste serviable et bobo en terrasse |
La mixité
compartimentée des bobos multiculturels et la classe ouvrière
imputrescible
« Même
au moment où il n'y a pas une lutte de classes déclarée, il y a
lutte de classes latente, par le fait que, dans une hiérarchie il
faut que les rangs les plus élevés maintiennent leur position... ».
Maurice Halbwachs (cité par Louis Chauvel, p.156)
On ne m'enlèvera pas de
la tête l'idée que les sociologues les plus dérangeants se gardent
d'en référer aux sources de leur radicalité1,
masquant ce qu'ils doivent aux tréfonds, méconnus du public,
du maximalisme ;
Michéa n'en a pas tout assimilé et se gargarise avec des notions
confusément libérales comme « le peuple », Clouscard et
Lasch, comme Guilluy, ignorent la notion de prolétariat, et
compatissent accessoirement à un milieu rural irrécupérable2.
Sauf que nous les maximalistes n'avons pas besoin de savantes
analyses sociologiques ni de grèves à répétition (qui ne sont
jamais des hydres de révolution contrairement à ce qu'en disait
Lénine) pour affirmer l'existence, la force et l'importance du
prolétariat, il suffit de noter les chiffres du taux de profit
mondial, et qu'il constitue la moitié de l'humanité. La classe
ouvrière ne meurt jamais.
En tout cas ces auteurs,
considérés comme iconoclastes, peuvent faire impression à celui
qui les découvre pour la première fois. Pourquoi ? Parce
qu'ils prennent la pose, la pose de l'auteur qui SAIT, qui combat le
monde entier, la pose du chef de parti, même sans parti, même sans
avoir été chef ni sous-chef de parti. Mieux encore, l'auteur
radical oublie de mentionner qu'il lit en cachette des écrits
révolutionnaires sans lesquels il n'aurait pas osé mettre en cause
telle ou telle doxa dominante. J'excepterai quelques vrais géographes
et des statisticiens qui, comme Michèle Tribalat, avec une démarche
rigoureuse, de type scientifique, sont amenés à traiter sur des
données brutes, non maquillées, sur la composition des populations,
ethnicité et classes sociales, et qui sont donc amenés, forcément,
à confirmer le fond de l'argumentation marxiste du maximalisme face
aux fables du « vivre ensemble » et de la « paix
armée » entre catégories sociologiques illogiques.
Guilluy, qui lance son
pavé « Le crépuscule de la France d'en haut » (chez
Flammarion) – 3
le patronat, ils occupent les emplois des secteurs stratégiques du
CAC 40 ; pourfendeurs de l'idéologie dominante, ils fabriquent
l'essentiel du discours médiatique et culturels... ». Il y
adéjà un hic, ils ne pourfendent pas l'idéologie dominante, ils
sont celle-ci !
lamentation pour une France « périphérique »
et non pas dénonciation de la dissolution programmée de la classe
ouvrière - espérait bien en faire un best-seller, tout en étant
sagement réformiste dans ses conclusions finales. Mais, prenons-le
en cours de route. Il nous dit que la bourgeoisie : « …
a compris que la défense de ses intérêts ne passait pas par la
lutte des classes, mais au contraire par le brouillage des classes »
(p.26). Mais ce constat n'est pas une nouveauté. Voyons-en plutôt
la spécificité de cette bourgeoisie soi-disant « antithèse
de celle d'hier ». Paris est la ville bobo par excellente et la
première fédération du PS, avec 40% de cadres :
« Contestataires de salon de l'économie mondialisée, les
bobos parisiens occupent la partie haute de l'échelle des salaires ;
contre (tout contre)
L'auteur utilise une
technique un peu facile de généralisation pour scandaliser, en
opposant l'enrichissement des cadres supérieurs à la baisse du
niveau de vie des employés et des ouvriers, alors qu'un autre
auteur, Louis Chauvel, explique qu'une partie des cadres est aussi
touchée par la paupérisation. Mais il ne faut jamais trop plaindre
les cadres en général, ils disposent en général de pensions de
retraite presque trois fois supérieures à celles des ouvriers.
Guilluy ne nous explique pas que sans « encadrement » qui
ferait marcher l'exploitation de l'homme par l'homme ?
Par contre il tape juste
sur la bien-pensance néo-chrétienne de l'élite dominante –
tolérante, bienveillante et altruiste- pour « les plus
faibles » - comprenez non pas les ouvriers mais les immigrés :
« cette compassion (…) est d'autant plus facile qu'elle
s'adresse le plus souvent à des catégories populaires immigrées où
le rapport de classes est court-circuité par les différences
culturelles des catégories populaires immigrées qui ne remettent
pas en question la domination sociale de la nouvelle bourgeoisie ».
Comme géographe Guilluy
met en évidence l'hypocrisie de la gentrification, un parc de
logements au centre ville pour ceux qui « ont les moyens »,
et un parc de logements réservé aux flux migratoires d'où sont
exclues ce qu'il appelle les « classes populaires
traditionnelles » (euphémisme qui lui évite de nommer le
prolétariat). Le constat est percutant de vérité sur le clivage
introduit par la bourgeoisie grande et petit bobo néanmoins :
« La ville mondialisée a besoin de catégories supérieures
qualifiées et d'exploiter à la marge des catégories populaires
immigrées, voilà tout ». Il ne précise pas qu'il y a encore
suffisamment d'immeubles vétustes au centre des villes qui comptent,
pour y loger la nounou noire et la bonne arabe, sans qu'elles soient
toujours reléguées à la Courneuve ou à Bagneux : « Les
immigrés dans le parc très social de banlieues, les key-workers
dans le parc social intermédiaire de la ville-centre : la
bourgeoisie libérale des métropoles sait se faire étatiste quand
ses intérêts sont en jeu »4.
Au niveau de l'expression
politique publique, l'effacement de la classe ouvrière est
...criant : un baromètre de la « diversité » du
CSA a noté que 57% des cadres supérieurs parlent à la télé
contre 2% des ouvriers, sans préciser que les ouvriers sont
convoqués dans les émissions les plus débiles. Bah tout le monde a
fini par le savoir comme le fait que tous les médias sont contrôlés
par les banques et le lobby de l'armement dans le cadre de
« l'entre-soi médiatique ». Le pire est que l'auteur
comme les médias pense que la seule vengeance contre cet
abrutissement serait le refuge électoral dans les bras de la mère
Le Pen et pas demain dans une guerre civile sanglante !
Guilluy n'est ni
dialectique ni connaisseur de la logique orwellienne, c'est pourquoi
il est inapte à comprendre que le discours de l'intelligentsia
universitaro-médiatique se lamentant de la montée de la xénophobie
(et défendant pas exemple le ridicule burkini) est le principal
pourvoyeur (fourvoyeur) de cette même xénophobie avec cette
compassion envers les immigrés « en général »
soupçonnés de se complaire dans leur misère sociale et religieuse,
tout comme de produire le djihadisme impérialiste.
A force de pointer du
doigt le bobo moyen, il oublie d'analyser qu'il n'est qu'un
sous-produit lui aussi de la grande bourgeoisie, ce quadra du NPA,
qui a déménagé d'un quartier isalmisé, qui habite les beaux
quartiers et qui place ses enfants en école privée !
Le représentant de la
mondialisation heureuse, des banques et de la surexploitation des
ouvriers, l'encravaté Macron a eu le courage d'affirmer la
conviction renversante du gauchiste de base : « L'arrivée
de réfugiés est une opportunité économique. Et tant pis si la
mesure n'est pas populaire »5.
Quelle lâcheté en fait !
Guilluy peut nous
éclairer sur la nouveauté de cette immigration rêvée par le
patronat et les grandes fortunes : « L'immigration permet
de répondre aux besoins du marché de l'emploi peu ou pas qualifié
des métropoles, mais aussi de contrôler la masse salariale d'une
main-d'oeuvre bon marché et peu syndiquée. Bref un système
d'exploitation classique de l'immigration qui repose sur la
permanence des flux ». Non, faux, pas classique. Il s'agit
surtout d'une immigration de guerre qui, à la fois, sert à faire
passer « nos » guerres par perte et profit, mais aussi à
répandre une religion de soumission et de repli sur soi, laquelle
religion, l'islam pour ne pas la nommer, est très prégnante comme
on le voit et ne pose aucin problème aux dominants dans leurs cages
dorées. Guilluy s'aligne lui aussi sur les sondages fabriqués, avec
questions orientées, où est demandé s'il y a trop d'étrangers en
France – ce dont on se fout – et non pas trop d'arrivées
musulmanes, certes « exploitées » ; car, comme il
le note lui-même plus loin, la haute bourgeoisie a besoin de
l'aliénation musulmane : « Une exploitation rendue
invisible grâce à la mise en avant de la thématique de l'altérité
culturelle qui vient opportunément se subtituer à un rapport de
classes plus difficile à assumer » (p.76)6.
On disserte un peu
beaucoup sur la baisse du nombre des grèves, mais pas autant sur le
nouvel engagement militant des bobos, la pétition, le clic ou le
like d'une « gauche hashtag », sorte de « gentrification
des luttes sociales ». Et Guilluy d'en référer au super-bobo
François Ruffin des fameuses nuits à dormir debout de la petite
bourgeoisie parisienne... d'où la classe ouvrière (française et
immigrée) a été justement absente ! Il eût été beaucoup
plus efficace d'expliquer la mort du gauchisme et de dénoncer le
réformisme radical creux de la bande à Hamon.
Incapable de nommer la
principale classe exploitée par son nom, Guilluy continue à brasser
des « classes populaires », mais ce qu'il note là est
très vrai, toujours dans la lignée de l'effacement de la principale
classe révolutionnaire, réduite à cette misère nommée
« assistanat » : « Tout se passe comme si on
avait déjà acté qu'en milieu populaire (sic) désormais la figure
du « travailleur » laissait place à celle de l'
« assisté ». Dans ce modèle inégalitaire, les classes
supérieures produisent et profitent des richesses, les classes
populaires (resic) consomment (un peu), tendent la main et finissent
par perdre leur autonomie » (p.115).
Ne voyez là nullement la
complainte outragée d'un communiste maximaliste. Guilluy est un
néo-souverainiste, désolé du gâtisme de Chevènement : « Le
rouleau compresseur de la mondialisation, les abandons successifs de
souveraineté et le choix de l'immigration par le grand patronat ont
mis fin au modèle assimilationniste républicain ». Qu'on le
déplore ou qu'on le pérore !
Le capitalisme financier
et multiculturaliste n'est certes pas avare de contradictions –
Cameron et Merkel ayant reconnu que la multiculturalisme était un
échec - « c'était avant que le patronat allemand exige
l'arrivée d'un million de migrants en 2015 » (p.121)7.
Guilluy ne voit pas que le marketing ethno-culturel américain ne
prend pas, non à cause, de Le Pen, mais à cause de l'exploitation
des prolétaires par la gauche caviar et ses succédanés gauchistes.
Il y a incontestablement une désaffection de la classe ouvrière
(française et de souche immigrée issue de la guerre d'Algérie) vis
à vis des élites dites socialistes et du gauchisme syndical en
général. Lui aussi, en tant que manager sociologique ne voit pas ni
ne connaît « l'opinion » en milieu ouvrier sur la
question du racisme. Il saisit en partie que l'idéologie bisounours
antiraciste sert à contrer « moralement » toute remise
en cause du capitalisme « tolérant » à l'égard des
« minorités » (mais pas des classes), « échangiste »
et « multiculurel », mais seulement sur les plateaux de
télévision où règne la discussion de comptoir entre journaputes.
Guilluy, sans référence
ni tradition historique prolétarienne, ne sait pas que la
concentration urbaine de la classe ouvrière a toujours été un bain
pour sa conscience de classe, et que de fait la bigarure
multiculturaliste a pour but de détruire toute notion
d'internationalisme dans la cité, en expulsant les « en
trop », les « relégués », les divers « exclus »
vers les zones à faible densité urbaine toujours représentatives
du « désert français » face à Paris (cf. Lessing) et
de l'emprise de la calotte et du pouvoir paternaliste patronal et
syndical. Il sait par contre quel est l'épouvantail agité par Big
Brother média (qui est confondu par les bobos désormais avec le méchant Trump) pour protéger l'ordre bourgeois.
Pour cacher qu'il a
découvert la critique de l'antifascisme de salon du pouvoir et de
ses gauchistes résiduels dans le milieu ultra-gauche, dit tel en
tout cas, Guilluy en réfère à Pasolini qui disait, fort justement
d'ailleurs, à propos d'une gauche qui abandonnait la question
sociale : « il s'agit de mettre en scène un antifascisme
facile qui a pour objet un fascisme archaïque qui n'existe plus et
n'existera plus jamais » (p.172). Je ne résiste pas à citer
la suite pour mes lecteurs gauchistes et trotskiens voyeurs :
« C'est d'ailleurs
en 1983, au moment où la gauche française initie son virage
libéral, abandonne les classes populaires (resic) et la question
sociale, qu'elle lance son grand mouvement de résistance au fascisme
qui vient. Lionel Jospin reconnaîtra plus tard que cette « lutte
antifasciste en France n'a été que du théâtre » et même
que « le Front national n'a jamais été un parti fasciste ».
Ce n'est pas un hasard si les instigateurs et financeurs de
l'antiracisme et de l'antifascisme sont aussi des représentants du
modèle mondialisé (…) du medef aux entreprises du CAC 40, de
Hollywood à Canal Plus, l'ensemble de la classe dominante se lance
dans la résistance de salon. « No Pasaran » devient le
cri de ralliement des classes dominantes, économiques ou
intellectuelles, de gauche comme de droite (…) les groupes
« antifa » (…) recrutent essentiellement des jeunes
diplômés de la bourgeoisie » (p.173)8.
LE DESIR DE REVOLUTION
N'EST PAS ETERNEL MAIS IL N'EST PAS MORT
Si près de 80% de ces
salauds de cadres et les vieux machins de plus de 65 ans croient que
le régime démocratique est irremplaçable et le meilleur système
possible, près de 40% des jeunes, des ouvriers et des employés
considèrent que « d'autres systèmes politiques peuvent être
aussi bons que la démocratie » (p.200).
Guilluy a raison de
conclure qu'on assiste bien plus à une mondialisation de la
sédentarisation qu'au nomadisme à la con d'Attali, que la mobilité
pour tous est un mythe sauf pour les bourgeois sur les tarmacs.
Louis Chauvel, avec « La
spirale du déclassement, essai sur la société des illusions »
(Seuil), fournit un travail plus scientifique et donne des
annotations pertinentes sur l'état du prolétariat. Mais la lecture
est aride au milieu de plus nombreux graphiques que chez Guilluy. Il
faut parvenir à la page
164 pour trouver une réflexion sur
l'amenuisement des grèves à partir des années 2000 :
« Dans les années
1970, 2 millions de journées de travail ont été consacrées à la
grève, contre seulement 75000 au début des années 2010, moins
qu'au début du XX e siècle. Ces écarts sont considérables et
signifient une baisse de vingt à un de ce type d'action collective
depuis la période qui suit immédiatement les événements de
1968 ».
Chauvel écarte d'emblée
ceux qui ont abandonné le prolétariat et la causalité du chômage
de masse, tout comme une lutte supplétive à travers les blogs. Il
souligne plutôt deux causes : l'institutionalisation des
syndicats (dont les théoriciens s'appuient d'ailleurs sur l'usine à
mystification de la gauche caviar (terra nova) et les intellos
négateurs de la classe ouvrière, mais sans le dire ouvertement) et
la non transmission du savoir militant par la génération de 68 :
« Plus
vraisemblablement , l'institutionnalisation des syndicats les a
orienté vers un rôle d'agence de négociation et de cogestion des
carrières et des ressources plus que de coordination des luttes.
L'aspect générationnel
est peut-être aussi important : une génération mobilisée a
disparu sans transmettre le savoir-faire organisationnel de la
conflictualité sociale alors même qu'elle hésite à saisir le
contexte nouveau vécu par les générations suivantes et leurs
enjeux ».
Je ne suis pas d'accord
avec des deux affirmations, d'abord parce que les syndicats sont
devenus des collabos de l'Etat bourgeois depuis plus d'un
demi-siècle, et ensuite que la transmission du militantisme syndical
réformiste comme révolutionnaire se fait toujours même à petite
dose. Mais nos sociologues raisonnent toujours à courte vue sur
l'hexagone comme si les événements du monde n'influaient guère sur
l'interne « conflictualité sociale ». Chauvel passe à
côté de l'explication majeure de la chute du muer de Berlin et,
hors d'une compréhension du développement de la conscience de
classe ; il l'avoue d'ailleurs quelques lignes plus loin :
« ...les aspects subjectifs des classes sociales (culture
ouvrière, comportement politique et syndical, conscience de classe,
identité collective, mouvement social, etc.) demeure un mystère des
sciences sociales ».
Chauvel fait parfois des
remarques très justes, sans jamais se placer au niveau historique
international non plus, différenciant par exemple le petit nombre de
grèves très gentiment réformistes de nos jours comparé à des
grèves d'une autre envergure dans les années 1930 où, derrière la
grève d'époque il y avait en effet l'hydre de la révolution (qui
pourtant venait d'échouer en Allemagne comme en Russie) : « Il
est vrai que celle-ci (la lutte des classes) a culminé dans les
années 1930, l'enjeu était moins la mobilisation de rue et la
grève, même générale, que celui de la prise du pouvoir par un
parti communiste versant dans la clandestinité et l'organisation
secrète. L'indicateur même de participation aux grèves peut
réduire la visibilité de l'action de classe (TB » (p.168). La
conscience de classe a eu la vie dure : « A partir des
trente glorieuses et de l'édification d'un système
social-démocrate, les inégalités ont été fortement régulées
sans que la conscience de classe se soit dissoute pour autant ».
Si le tournant des années 1979 a déjà vu s'atténuer la
mobilisation sociale, et que le rêve de la société sans classes
s'est éloigné selon Chauvel, il a conclu que le discours
égalitariste n'aurait plus d'effet à une époque de creusement
d'inégalités plus fortes que jamais. Bizarre ! Car il exprime
le contraire quelques lignes plus loin : les dernières
décennies montrent « un contenu et des contours plus stables
des classes sociales » !
LA GRANDE « ANOMIE »
IDENTITAIRE
En reprenant ce terme de
la langue de bois des sociologues Chauvel veut traiter de la crise
d'identité si étalée partout comme concept justifiant la
confusion capitaliste. Reprenant les termes flous de « classes
moyennes », il envisage que la petite bourgeoisie soit amenée
« à partager le sort de ce qui reste de la classe ouvrière »
laquelle est « à peine au-dessus d'une classe de
post-travailleurs – ce qu'en anglais nous pourrions appeler
post-working class, constituée d'individus a priori atomisés,
spécialement subventionnés pour se tenir hors de la sphère de
l'emploi ». Suit cette curieuse analyse d'une non-classe
(certainement les subventionnés universel de Hamon coupés de toute
conscience et responsabilité de classe) avec des individus rêvant
d'une révolution hors classe dont ils seraient les prochains
meneurs : « Cette position sociale située en dehors du
sens collectif offert par la participation à la production
collective étant intolérable à la majorité des individus, au long
terme, les personnes dans cette non-position sociale s'inventent
nécessairement d'autres supports identitaires, en se constituant
l'idéologie d'une révolution spécifique dont ils pourraient se
sentir les nouveaux leaders ». (p.173)
Chauvel croit identifier
donc une forme idéologique spéciale d'accompagnement de
l'effondrement économique du système capitaliste par un
« post-prolétariat » « pour qui les néomarxismes
en vogue dans les classes moyennes intellectuelles pourraient ne pas
avoir les mêmes attraits ». Dans son langage peu clair et
heurté de sociologue Chauvel s'avoue inquiet, sans taxer ni de
populisme ni de fascisme ce nouveau « post-prolétariat
assisté » dans un monde où la coupure avec les élites
(bourgeoises) est béante, dans un « ensemble civilisationnel
où le tiers-monde côtoie à quelques kilomètres de distance,
parfois moins, les zones les plus privilégiées de la planète ».
Il ne voit une restructuration des classes que dans une ou deux
générations et le remplacement du support identitaire de classe par
les substrats religieux plus que par le « marxisme
occidental ». Il est très pessimiste : « La
constitution d'un noyau d'exclusion , d'un précariat diplômé, et
la diffusion de nouvelles approches religieuses de la question
sociale sont de nature à désagréger ce qui reste de l'héritage
idéologique populaire (sic) et solidaire de la Reconstruction ».
A part comparer avec la
décadence de l'Empire romain et noter « les risques
s'accumulent mais l'apocalypse promise tarde », notre sociologue
pas plus que son compère Guilluy n'a de cheminement politique
révolutionnaire à indiquer, il espère tout au plus au final une
jeunesse capable de « travailler par elle-même ».
NOTES
1Les
Philippe Murray, Michel Clouscard, Hervé Algalarrondo, Christopher
Lasch, Jean-Claude Michéa, l'ex NPA Robin (et sa reprise de
l'expression « la gauche du capital » au courant
maximaliste de la Gauche communiste) ; Bourdieu et Jacques
Julliard ont des fulgurances presque marxistes, Julliard restant
toutefois un bon démocrate jacobin... Géographes comme Guilluy et
démographes statisticiens comme Michèle Tribalat par leurs
analyses méthodologiques arrivent à peu près aux mêmes
conclusions que les révolutionnaires maximalistes concernant la
répartition des classes sociales, leurs confrontations et de cette
plaie : la petite bourgeoise (même si elle est qualifiée à
tort de « couches moyennes »).
2Les
limites de Guilluy sont visibles dès son apologie des gougnafiers
et poujadistes « bonnets rouges ».
3Selon
le mot de Sacha Guitry.
4Les
key-workers sont les agents de service public nécessaires à
l'ordre bourgeois de proximité et de soin : flics,
infirmières, instituteurs... qui peuvent bénéficier de logements
de proximité en priorité.
5Page
73. Vu les états de service de Macron chez Rothschild et son train
de vie, on comprend son besoin de personnel de service...
6Avec
une belle image : « Ainsi, quand un bobo achète les
services d'une nounou africaine, cette « exploitation
traditionnelle du prolétariat » sera habillée d'
« interculturalité ». Sans noter que nombre de vedettes
du cinéma, journalistes ou richissimes « hommes de gauche »
sont passés au tribunal pour surexploitation ou sévices sur femme
de peine...
7Lire
aussi pour le comique de la cohabitation des bobos émancipés mais
cannabissophiles compartimentés avec les barbus en pyjamas :
Géraldine Smith « rue jean pierre timbaud » stock 2016
8Et
d'autres bonnes formules qui clouent au pilori des imbéciles utiles
du système comme Coleman et ses amis communisateurs : « ce
n'est pas le FN qui influence les classes populaires, mais
l'inverse »). OU mieux pour la lutte qui est la nôtre POUR le
communisme : « Si elle (la bourgeoisie) perd la guerre
des représentations, la classe dominante est nue » p.175).
« Le « théâtre de la lutte anti-fasciste » se
joue devant des salles vides ». « La quincaillerie
« révolutionnaire » proposée par les tenants d'une
petite bourgeoisie n'attire plus personne, surtout pas dans les
milieux où l'urgence est de boucler les fins de mois »
(p.195). Cependant, comme je l'ai constaté, dans les médiathèques
de la gauche au pouvoir dans les municipalités de banlieue tout ce
qui n'a pas le label anti-fasciste part à la poubelle, ainsi les
mémoires de Wagner et de Cosima son épouse et divers ouvrages de
penseurs considérés comme off... un nouvel autodafé à la
Hitler...démocrate multiculturaliste !