« On
ne gouverne pas, au sens propre du terme, des hommes et des femmes
alphabétisés depuis quatre générations ». Françoise
Giroud (La comédie du pouvoir)
« Le
plus sot orgueil est celui qui naît de l'ignorance ». Johann
Georg Zimmermann (Les réflexions sur la solitude,1756)
« L'ignorance
n'a jamais sauvé personne » (Marx à Weitling)
Récemment,
la prima donna de la rentrée littéraire Piketty remarquait que la
plupart des partis politiques sont constitués de diplômés, il
aurait pu ajouter en particulier surtout d'enseignants, avec les
traditionnels défauts de la profession : ils savent tout sur
tout et ont toujours raison. Ce n'est sûrement pas la principale
raison du discrédit des partis fondé surtout sur leur absence d'un
programme social et révolutionnaire et sur leur corruption
coutumière une fois qu'ils sont au pouvoir à tour de rôle. Même
un parti par exemple qui ne serait composé que d'ouvriers serait
aussi pourri avec la même absence de programme véritable pour
« changer la société ». Le ou les partis en veste jaune
sont du même acabit réactionnaire, fondés sur les desiderata de
quelques personnages sans mémoire et sans consistance, qu'ils
prétendent s'adresser à la population indistincte en général ou
aux « pauvres » en particulier, leurs propositions
alternatives n'en sont pas et sont même carrément creuses. On les
flatterait plutôt si on tentait de leur expliquer qu'elles sont
utopiques, car l'utopie socialiste a, elle, encore un passé
respectable.
« L'appel
aux armées » d'un certain Sylvain Baron est venu ridiculiser
complètement le putschisme d'opérette des résidus en vestes
jaunes ; putschisme du niveau des crétins black blocs, qui se
confond désormais avec, (certes occupation de retraités gauchistes
chaque samedi) mais qui sert désormais de viatique au pouvoir.
Traditionnellement le putschisme est l'action de fractions de droite
ou de factions d'extrême droite pour empêcher ou suppléer l'action
de masse. Il se confirme bien que le corpus politique dans lequel la
queue du mouvement de protestation s'est enferré provient bien de
l'idéologie d'extrême droite. Cette idéologie ne vise pas à
renverser le capitalisme mais à le pérenniser de manière
autoritaire et en flattant l'impossible et fumeux égalitarisme, même
à l'état de promesse électorale. La « lutte contre Macron »
se résume sommairement en deux slogans imbéciles : la justice
fiscale et le RIC. La « justice fiscale » dans un monde
dominé par la finance corrompue est aussi saugrenue que loufoque. Le
RIC, produit des marges de l'extrême droite, est un gadget
hyper-démocratique grotesque qui ignore la vraie critique du
parlementarisme par le communisme historique et vante un
totalitarisme politique permanent alors que justement le prolétariat
peut se passer de politique au quotidien, et que la délégation sert
à cela... mais pas dans une permanente paranoïa du contrôle des
délégués...1
« L'appel
aux armées »2
est une vieille ficelle des factions de droite militariste comme lors
de la fin de la colonisation de l'Algérie ; on se souvient que
ce pauvre Luc Ferry, pauvre bourge affolé, avait appelé les
policiers à se servir de leurs armes et à faire intervenir
l'armée ; et depuis écoule peu ses pensums en librairie. L'an
passé une autre louche veste jaune, Chalençon, avait exprimé son
souhait que l'armée prenne le pouvoir pour permettre l'installation
d'un « gouvernement de transition » (…) « seul
moyen d'éviter la guerre civile ».
A
rigolo, rigolo à demi, la semaine dernière dans un bled de l'Indre,
le clan en veste jaune de Sylvain Baron avait convoqué les
journaleux pour une exhibition fanfaronne avec une « lettre »
à un vulgaire colonel
« pour réclamer l’intervention de l'armée dans le but de
« neutraliser ou mettre en fuite » Emmanuel Macron et son
gouvernement »3.
Le recours à l'armée est toujours le fait de la classe bourgeoise
dans des circonstances où ce n'est pas des agités, en jaune en vert
ou en rouge, qui cassent dans la rue sans objectif cohérent, mais
quand la classe ouvrière menace de renverser l'Etat. Aucune
révolution digne de ce nom ne peut avoir lieu sans désintégration
des armées et polices bourgeoises et encore moins leur ralliement en
tant que corps constitué. Baron est un con.
Le
délire des grandeurs a beau s'emparer d'une foule de Narcisse –
entre radicalisation putschiste et aventure électoraliste - on en
rigole dans les chaumières prolétariennes ou en s'en fiche
tellement ils sont cons ces agitateurs de bistrot « jaune »
(la couleur des traîtres en général ou des cocus). Flatter un
mouvement moribond depuis des mois ne réussit pas plus aux prêcheurs
en eau trouble. On n'a pas oublié non plus les Jean-Luc
Mélenchon et Olivier Besancenot, membre du nouveau parti
anticapitaliste (NPA, tendance fémino-écolo), qui avaient eu beau
faire savoir qu'ils soutenaient l'appel à une «grève générale
illimitée» lancé par le brave Eric Drouet... personne n'a envie de
suivre un ignare et deux de ses admirateurs béats... de jalousie4.
SON
COURRIER EST REMPLI DE MEPRIS SOCIAL...
Une
des méthodes pitoyables de la gauche bourgeoise, et souvent
néo-stalinienne dans ses
versions végans notamment, est l'exaltation
de l'ignorance ou plutôt une sorte de compassion perverse pour les
« exclus de la culture ». Un trouble journaleux, un
incertain Vincent Glad, qui fait partie des snipers sadiques à la
Moix et Caron, a pris la défense de l'orthographe désastreuse de
Drouet, à défaut de son inculture politique crasse. Attention qu'on ne se méprenne pas sur le fond de mon propos
ici, qu'un révolté crie sa révolte sans savoir écrire ou même
qu'il l'écrive en langage sms, ne diminue en rien le respect que je
lui porte ni mon écoute. Ici il s'agit d'autre chose :
l'affirmation de fierté de son inculture et de son ignorance.
Soutenu par un plumitif provocateur de Libération concernant le
« choc culturel »:
« Mon
courrier des lecteurs arrive chaque jour sur Twitter et il n’est
pas toujours agréable à ouvrir. Mes tweets sont devenus un grand
défouloir pour les anti-gilets jaunes, qui rivalisent de bons mots
et de commentaires méprisants pour moquer l’inculture ou la bêtise
des manifestants. Considérant que leur influence est majeure sur le
mouvement, il m’arrive souvent de relayer les publications d’Eric
Drouet et Maxime Nicolle sur leurs groupes Facebook respectifs. Ces
prises de parole me paraissent une information au même titre que les
communiqués de presse d’une centrale syndicale. Les réponses que
je reçois sont d’une grande violence, tournant en général autour
de leur QI supposément faible et de leurs fautes d’orthographe. La
foule haineuse n’est pas toujours là où on le croit ».
Le
défenseur de la mauvaise orthographe en gilet jaune explique
ensuite :
« Renvoyer
systématiquement les gilets jaunes à leurs fautes d’orthographe
est une manière d’exclure les classes populaires de l’espace
politique légitime. Les gilets jaunes n’écrivent pas sur Internet
pour se faire bien voir mais simplement pour se faire comprendre.
Eric Drouet répète sans cesse qu’il fait de nombreuses fautes
d’orthographe et c’est d’ailleurs pour cela qu’il privilégie
l’exercice
du live en vidéo ».
On
peut apprécier modérément que l'auto-désigné leader Drouet soit
intronisé « représentant des classes populaires »
(lesquelles?). Drouet ne répète pas qu'il sait qu'il fait sans
arrêt des fautes d'orthographes, il s'en flatte et envoie chier ceux
qui le lui font gentiment remarquer. Ce journaliste réac qui
regrette « qu'on ne puisse pas vivre ensemble », dénonce
cette « intolérance orthographique » d'une foule
haineuse (contre une autre foule haineuse!?), et déplore deux mondes
différents qui s'entrechoquent ! C'est à dire la fable où il
n'y a plus, face à face, que les vestes jaunes et Jupiter Macron !
Mais plus du tout prolétariat versus bourgeoisie ! Ce Glad
n'est même pas un joyeux membre de la confrérie éclatée des
vestes jaunes mais un vulgaire pervers qui a fini par se faire
jeter5.
L'IGNORANCE
QUI CARACOLE EN VESTE JAUNE
L'ignorance
politique (et orthographique) rime avec refus d'esprit collectif.
Certainement qu'il y a nombre de petits bourgeois haineux qui se
fixent sur la malheureuse orthographe de Drouet pour dénoncer aussi
cette prétention à se la jouer « Jojo égal d'un ministre »
(il prétend aussi se porter à la candidature présidentielle...).
Mais le problème n'est pas là6.
Cette indifférence à corriger sa propre insuffisance en orthographe
est révélateur des deux tares majeures de ce mouvement finalement
totalement poujadiste et inculte sur les vraies causes et remèdes à la misère sociale et politique :
- l'individualisme borné : j'écris comme je veux, ce que je veux, qui m'aime me suive !
- Le collectif n'existe pas : comment puis-je imaginer par exemple qu'une conne d'enseignante m'aide à corriger mes communiqués adoubés précieusement par mon parterre de journalistes !
Le
pire n'est pourtant pas dans l'étalage sans complexe de cette
nullité orthographique, qui dessert même tout propos sensé en se
ridiculisant souvent, un mot sonore n'a pas forcément le même sens,
mais dans l'ignorance politique TOTALE de l'histoire du mouvement
social, socialiste et communiste. Ils prétendent rénover le
parlementarisme ! S'ils en connaissaient vraiment l'histoire et
les critiques de la gauche historique maximaliste ils ne secouraient
pas autant leur balayette de carnaval ! Le blocage de la
circulation automobile apparaît plus efficace que la grève
classique mais ne génère aucune conscience de classe ni n'ouvre la
voie à une réelle solution politique ou alternative au capitalisme.
L'ultra-démocratisme de façade (et vraiment creux) que leur a
refilé l'extrême droite signifie une atomisation encore pire que la
farce démocratique actuelle (avec la possibilité qu'ils y ajoutent
l'addendum de Caron : faire passer un examen aux électeurs pour
voir s'ils sont capables de voter en connaissance de cause!). Le
comble de leur utopie électorale est bien entendu l'invraisemblable
« justice fiscale »7,
mot d'ordre typique du petit boutiquier affolé prêt à prendre en
otage un CRS. On va voir comment Piketty prend la défense du petit
boutiquier.
Enfin
le comble de l'ignorance politique et de l'incapacité à réfléchir
reste l'ignorance des classes sociales. Il y aurait « l'élite
avec Jupiter » et « la population ». Un conception
simple mais, pour être gentil, néo-fasciste ! Cette vision
bipolaire, plaquée d'ailleurs au quotidien par les médias (avec
approbation gouvernementale bien sûr) vient là aussi effacer
l'opposition fondamentale prolétariat/bourgeoisie, la seule qui peut
poser la question révolutionnaire du renversement du système. Je
sais qu'on nous assure que ce n'est plus qu'une vision de l'esprit de
communistes ringards. M'en fous, regarder l'histoire, apprenez en
connaissant l'histoire. Le prolétariat reste une classe sociale
universelle, non pas cette confuse notion de peuple ou de population,
mais fondamentalement apatride et qui n'a pour but et conscience,
contrairement aux classes intermédiaires, que de renverser
réellement le capital.
La
grève du métro pour la défense des retraites est bien plus
dangereuse et significative que les fumées jaunes des bandes
d'agités décorés avec des slogans néo-fachos !
Continuez
à rêver réformer l'ignominie capitaliste ! Mais tant que
votre confusion pipole en jaune perdurera vous resterez impuissants
face à l'Etat, car celui-ci, plus malin que vous sait que seule une
opposition claire des classes peut être le seul vrai danger pour son
règne prolongé. La révolte initiale a nettement disparu, laissant
place aux agitations frénétiques de carriéristes qui ne valent pas
plus que les politiciens que nous avons rejetés définitivement.
LES
GILETS JAUNES « idiots utiles » de Macron ?
Franchement
ils le sont devenus, comme les poujadistes jadis qui, au bout de sept
ans de contestation, sont devenus gaullistes. Il exista probablement
dès la préhistoire quelques idiots utiles qui s’ignoraient, leur
avènement comme espèce à part entière, identifiée comme telle,
est contemporain de celui des régimes totalitaires et de
l'hyper-démocratisme aussi totalitaire. C’est en effet la noirceur
de la cause qu’il sert par une confondante naïveté qui, par
contraste, propulse l’idiot utile et lui donne tout son relief. Le
prototype ? L’intellectuel de gauche occidental manipulé par
le régime soviétique pour en vanter les mérites (ou a minima en
taire les crimes) puis reconverti en islamo-gauchiste défenseur du
mode de vie musulman. En
raison sans doute de cet ancêtre commun, on attribue généralement
la paternité de l’expression à Lénine. Mais nul ni moi n’en a
trouvé trace dans ses écrits.
Un
idiot utile sort du lot en ce moment dans l'espoir de toucher les
prébendes d'un autre best-seller, surtout en milieu jaune. Avec
«Capital
et idéologie» pour Thomas Piketty: la propriété, c’est le mal.
Hé hé on se souvient d'un certain Proudhon selon qui la propriété
« c'est le vol ». Encore un millier de pages pour
« dépasser
le capitalisme ».
Mais comment mettre en œuvre ces propositions radicales visant à
redéfinir la notion même de propriété ? Et suffiraient-elles
à détruire les piliers de l’hyper-capitalisme contemporain ?
Piketty
soutient les vestes jaunes et la transition écolo
Deux
objectifs incompatibles autant que sont ennemis croissance et
décroissance : quand les riches parlent de décroissance le
pauvre sort son revolver.
Lisons
la complainte de la nouvelle femme de ménage du capitalisme, qui se
prélasse dans la guimauve idéologique à la mode :
« Pour
autant, est-on bien sûr que ces politiques ont produit les effets
escomptés ? Depuis la crise de 2008, et surtout depuis Trump,
le Brexit et l’explosion du vote xénophobe partout en Europe, on
mesure mieux les dangers posés par la montée des inégalités et le
sentiment d’abandon des classes populaires, et beaucoup comprennent
le besoin d’une nouvelle régulation sociale du capitalisme. Dans
ces conditions, en rajouter une couche en faveur des plus riches en
2018 n’était vraiment pas très malin. Si Macron veut être le
président des années 2020 et non des années 1990, il va falloir
qu’il s’adapte vite.
Le
plus triste est l’effroyable gâchis sur le front climatique. Pour
qu’une taxe carbone réussisse, il est impératif d’affecter la
totalité de son produit à l’accompagnement social de la
transition écologique. Le gouvernement a fait tout le contraire :
sur les 4 milliards de hausse de taxes sur les carburants de 2018, et
les 4 milliards supplémentaires prévus pour 2019, il n’envisageait
de consacrer qu’à peine 10% aux mesures d’accompagnement, alors
que le reste finançait de facto la suppression de l’ISF et la flat
tax sur les revenus du capital.S’il veut sauver son quinquennat,
Macron doit immédiatement rétablir l’ISF et consacrer ces
recettes pour compenser ceux qui sont le plus durement touchés par
les hausses de taxe carbone, qui doivent reprendre leur cours. Et s’il
ne le fait pas, alors cela signifiera qu’il aura fait le choix
d’une idéologie pro-riches dépassée au dépend de la lutte
contre le réchauffement climatique ».
Pas
d'inquiétude pour l'Etat bourgeois donc, le discours lénifiant de
Piketty peut séduire le petit boutiquier en veste jaune, voire
l'émouvoir, mais Piketty reste le roi des réacs en faisant semblant
d'oublier la violence qui régit les rapports sociaux et en proposant
de régler tout par l'impôt (justice fiscale quand tu nous tiens) et
en évacuant toute utilité et pérennité à 200 ans de luttes de
classes.
NOTES
1L'idée
de référendum d'initiative populaire date des années 1980 et fit
les beaux jours de Pasqua à Le Pen, les Bachaud et Chouard ont
repris le filon qui s'est imposé sans objection dans la guimauve
gilet jaune.
2En
fait il y en a eu deux, l'autre, qui comportait un laïus destiné à
culpabiliser les masses qui n'ont plus envie de suivre une bande de
rigolos ou de se faire crever un oeil par les flics, puis une
injonction au tous ensemble même avec les syndicats véreux, a
disparu de la circulation. Elle était plus perverse que le
lourdingue appel au « colonel ».
3Pantalonnade
sans mémoire encore. L’annonce
du recours à l'armée par Macron et sa mise en scène par le
gouvernement, vieille habitude cyclique dans la lutte des classes en
France, avait immédiatement enflammé l’opposition, de
gauche comme de droite. Les réactions critiques s'étaient
multipliées. La myriade des « gilets jaunes » s'était
émue de l’annonce sur les réseaux sociaux, y voyant une nouvelle
atteinte aux libertés. « Jamais
de la vie un soldat français ira tirer sur un civil français sur
le sol français [car] les militaires français sont pour la plupart
des enfants de “gilets jaunes” » avait
assuré casquette à l'envers. L’utilisation
de l’armée lors d’un conflit social n’était pourtant pas une
première. En 1992, Pierre Bérégovoy, alors premier ministre,
avait fait appel aux militaires pour dégager des axes routiers
bloqués par des camionneurs qui protestaient contre l’instauration
du permis à points. Plus de cinq cents soldats, des blindés
légers et un char AMX-30 avaient notamment été envoyés sur
l’autoroute du Nord, près de Phalempin, afin de libérer l’axe
Paris-Lille. L'ex-militaire Benjamin Cauchy lui a
carrément rejoint de camp des souverainistes, adieu Berthe en
jaune !
4Casquette
à l'envers, Maxime Nicolle, a dénoncé à sa façon les factions
du compromis électoraliste, aussi ignare que son pote Drouet :
"La politique, c'est de la connerie, ça tue l'humain. Vous
n'avez rien compris, et en plus vous prenez les gens pour des cons."
5La
« Ligue du LOL », un groupe secret d’une trentaine de
journalistes et communicants très influents, est accusée d’avoir
harcelé une douzaine de victimes sur Twitter, surtout des femmes, à
partir de 2009.
- Une victime présumée, Florence Desruol, affirme à 20 Minutes que le créateur du groupe, Vincent Glad, et d’autres membres de la LdL, ont notamment eu recours à des comptes Twitter anonymes pour l’attaquer en ligne.
- Mis à pied à titre conservatoire par Libération, Vincent Glad, qui a travaillé chez 20 Minutes puis à Slate, a d’abord nié avant de reconnaître qu’il était « effectivement une des six ou sept personnes à avoir le mot de passe du compte » @Foutlamer
6Il
est aussi là, dans l'excuse de l'ignorance, qui reste inexcusable
depuis la meilleure tradition antique. Après
s'être enquis auprès de tous ceux qui passent pour savants
(artisans, poètes et politiques), le Socrate de L'Apologie
conclut qu'être compétent en un domaine n'exclut pas la forme la
plus insidieuse de l'ignorance : croire savoir, donc se croire
dispensé d'apprendre. N'est pas savant celui qui dispose d'une
technique particulière, ou qui occupe une célébrité provisoire.
Le sophiste l'a compris, qui prétend, grâce à sa maîtrise du
discours, à un savoir total. Se laisser persuader par lui, c'est
vivre dans la Caverne : c'est lui qui manipule les figurines
dont les prisonniers, enchaînés par leur ignorance, voient défiler
les reflets sur la paroi, en les tenant pour seuls réels. Son
savoir ne trouve même pas sa mesure dans la conception d'un modèle
à inscrire dans un matériau approprié, ou dans la production
d'une totalité devant intégrer harmonieusement ses parties :
ce n'est pas un savoir-faire, c'est, dit Gorgias,
un art de la flatterie. Le sophiste vise l'agréable, non l'utile.
Si
près de nous Marx écrivait que l'ignorance se cumule avec la
misère : « L’accumulation de richesse à un pôle
signifie donc en même temps à l’autre pôle une accumulation de
misère, de torture à la tâche, d’esclavage, d’ignorance, de
brutalité et de dégradation morale pour la classe dont le produit
propre est, d’emblée, capital”. « Ignorance
never yet helped anybody »
(Reminiscences
of Marx and Engels,
p.272, my emphasis, AW)
contre Weitling. Marx
dénonce Porudhon dans La
misère de la philosophie,
en 1845 ; il y dénonce l'ignorance de Proudhon concernant
les questions économiques. Il lui reproche d'être un esprit
"petit-bourgeois", et de propager un socialisme utopique,
Proudon un ancêtre gilet jaune !
7Quand
on sait que nombre de vestes jaunes de bas étage ne payent pas
d'impôts...