« Le marxisme est une conception révolutionnaire du monde qui doit toujours lutter pour des connaissances nouvelles, qui ne hait rien autant que la pétrification dans des formes valables dans le passé et qui conserve le meilleur de sa force vivante dans le cliquetis d'armes spirituel de l'auto-critique et dans les foudres et éclairs de l'histoire ». Rosa Luxemburg
"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)
Marx (L'idéologie allemande)
«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »
Thucydide
samedi 12 mars 2011
L’ATTENTISME CRIMINEL
(Les aventures du Colonel Sarkozi, suite 1)
Comme le tremblement de terre en Iran au moment de la prise du pouvoir des ayatollahs, le dramatique tsunami au Japon est venu comme un bonheur pour les requins impérialistes européens, américains et russes pour faire passer au second plan de l'actualité l’avancée irrésistible du boucher Kadhafi .Les cris diplomatiques contre le massacre des « populations civiles » ont quasiment disparu. L’initiative du colonel Sarkozi a fait long feu tant ce pauvre vantard tient à confirmer qu’il n’a aucune parole. Tout ce qu’il a promis en politique intérieure, diminution du chômage, sécurité des personnes, etc. rien n’a été tenu comme rien ne sera tenu puisqu’il est aussi considéré comme une merde au niveau international. On ne peut s’empêcher de remarquer que depuis trois jours déjà, personne, aucun de ses habituels opposants hystériques du PS ou des particules gauchistes n’ait donné de la voix contre sa prétention à faire « cavalier seul » pour tenir haut le drapeau de l’hypocrite occident. Cette retenue, que je n’ai cessé de dénoncer sans écho, est propre non au souci de ménager un effort en apparence louable que du fait du sujet lui-même : la préparation à la guerre. Historiquement toutes les fractions de la bourgeoisie de droite à gauche se positionnent invariablement le doigt sur la couture du pantalon quand les intérêts nationaux sont en jeu. Ce silence assourdissant de la gauche caviar et des gauchistes en dit plus long sur leur complicité dans la défense de l’Etat-nation que toutes leurs alternances depuis 30 ans. Une première explication s’impose : naturellement hostiles au dictateur « fou » la gauche caviar et succédanés écologistes n’eussent pu qu’approuver l’initiative faussement solitaire du colonel Sarkozi = fâcheuse position belligène pour l’opinion prête à crucifier tous ces politiciens prêts à envoyer au casse-pipe nos pioupious même engagés rétribués. La deuxième explication est la stratégie de l’attente, laissez Sarkozi se planter pour lui reprocher son soi-disant individualisme, comme le fait le national-chauvin torchon Marianne.
Mais revenons à ce qui caractérise l’attitude des grands requins internationaux, l’attentisme et l’art de ne rien faire pour ne pas faire tomber par terre le jeu d’échecs obscur qui se joue.
Fort heureusement pour les requins capitalistes et le plaisantin Sarkozi, le tsunami dramatique au Japon est venu remiser au second plan de l’actualité le tsunami militaire de l’ancien fou de Tripoli.
Pour démêler l’écheveau du suspense libyen il faut remonter aux fondamentaux qui ont présidé aux réactions des principaux requins face au « printemps arabe » : le laisser-faire et le refus de s’en mêler militairement. La gentille vague démocratique des populations paupérisées mais indistinctes, de la petite bourgeoisie diplômée aux masses de jeunes chômeurs, ne pouvait recevoir qu’un amical appui verbal sans aller jusqu’à encourager à dissoudre les armées et bourgeoisies locales. Il ne faudrait pas prendre les bourgeoisies américaine et française pour des névrosées suicidaires !
De la Tunisie à l’Egypte (comme actuellement au Yémen, au Barheïn, etc.) jamais les bourgeoisies dominantes n’ont levé le petit doigt pour retenir la main criminelle des Ben Ali et Moubarak. Jamais Kadhafi n’a été immédiatement stoppé dans ses massacres successifs. La diplomatie internationale capitaliste ne connait ni la pitié ni la souffrance des martyrs. Plus que le souci des intérêts des uns et des autres, comme tous les dictateurs encore en place ou les armées maintenues qui conservent le pouvoir à la bourgeoisie en promettant au peuple gogo des élections pour les rouler encore dans la farine et empêcher toute révolution, DEMEURE LA VOLONT COMMUNE DE STOPPER CE TSUNAMI SOCIAL.
COMMENT S’Y PRENDRE EN SAUVANT LA MINE CONTRITE DE L’HUMANITAIRE OCCIDENTAL COMPATISSANT ?
Le débat sur la question souffreteuse d’une zone d’exclusion aérienne a agité les différents diplomates criminels. Pas méchant mais inutile ce contrôle aérien, la force des soudards de Kadhafi n’est pas dans le ciel (comme les faucons US l’ont expliqué, des douze Mirage vendus en 1973, deux seulement sont en état de marche). Les hélicos de fabrication russe capables de voler à basse altitude sont imprenables du haut des airs. En vérité c’est par une réelle intervention terrestre, coûteuse en vies humaines « alliées » qui est apparue comme inévitable. Même les faucons US reculent. La bourgeoisie française (qu’il ne faudrait pas confondre avec le seul colonel Sarkosi) se cabre à son tour quand l’émissaire US Robert Gates somme France et Italie d’assurer la no fly zone. Juppé est chargé de répondre par la négative. La tribu à Berlusconi n’a même pas répondu tant son soutien à l’ami de Tripoli lui est naturelle. Il se produit ensuite un curieux glissement. La diplomatie française se tournant vers Londres pour constituer un tandem plausible face aux réticences allemandes qui gouverne l’apparente « mollesse européenne ». Le glissement est habile mais insuffisant. Pendant ce temps les journalistes et les politiciens en France laissent les blogueurs et les idiots de Marianne se déchaîner contre l’individualiste colonel Sarkozi. La Maison blanche soutient les pétitionnaires anglais et français au Conseil de sécurité de l’OTAN. Mais une fraction probablement des plus avisés spécialistes en diplomatie fait signe à Obama et Sarkozy que l’OTAN fait mauvais genre si elle met ses gros pieds kakis en Afrique. Sarkozi se déclare aussitôt hostile à une intervention de l’OTAN mais continue à plaider pour mouiller l a farouche Europe, laquelle ne veut toujours pas se laisser pénétrer par les désidérata américains.
L’équation est simple à ce niveau et compréhensible même par un non diplomate : l’impérialisme US ne peut pas dégarnir ses fronts afghan et irakien. Ils demandent des efforts à tous ses amis européens, lesquels poussent des cris de pucelle effarouchée impréparée à l’acte… de guerre. Le viril général Obama continue à poser ses conditions. Il a obtenu de haute lutte le ralliement de la France sarkozienne à l’OTAN mais veut toujours plus. Il a essuyé une rebuffade du colonel Sarkozi il y a quelques mois à peine ; il ne demandait pourtant que 500 trouffions ou trouffionnes de plus en Afghanistan. Quoique alléché par l’idée d’être le décoré d’un nouveau pont d’Arcole, Sarkozi n’est pas prêt à l’action solitaire où trop d’amis européens verraient avec joie la bourgeoisie française penaude s’embourber. La reconnaissance des quelques représentants de tribus libyennes coûte moins cher qu’un cavalier seul, est même opportune puisque dans l’ordre énuméré, Sarkozi a été suivi par les Etats-Unis et la farouche europe empruntée.
POURQUOI LA BOURGEOSIE US TEMPORISE
Si le « printemps arabe » n’était pas encore en développement, nul doute que le choix ancien de la bourgeoisie US d’éliminer Kadhafi, aurait été réglé. La plupart des monarchies arabes + Israël + les nuls de « l’unité africaine » (incapables d’endiguer l’horreur en Côte d’Ivoire) n’auraient pas levé le petit doigt pour sermonner l’empire US. La ligne d’Obama obéit à la même logique que Bush père, sans sentiment et qui va vers la même catastrophe. L’impérialisme US ne peut pas s’empêcher de généraliser le chaos qui sert si bien le maintien de l’ordre bourgeoise et la prospérité de l’industrie d’armement, dont la Palestine est le joyau.
Il suffit de rappeler qu’après l’invasion du Koweit le 2 août 1990 par l’armada de Saddam Hussein, les « forces multinationales » pachydermiques aux ordres du gendarme américain viennent remettre « à sa place » Saddam dont le régime est sauvé par ceux-là même qui lui avaient déclaré la guerre. La décision du général Bush de stopper la guerre choque. L’argument est pourtant le même que pour la boucher Kadhafi aujourd’hui : il fallait éviter le risque d’éclatement du pays et du renforcement de l’Iran par l’intermédiaire des chiites irakiens. Ce coïtus interruptus doit aboutir à la nécessité d’une deuxième opération chirurgicale, puis d’une troisième. L’imitation du scénario irakien des années 1990 en 2010 en Libye contient les mêmes ingrédients, jusqu’à la farce des armes chimiques… supputées.
Pour aller vite, je reprends le résumé de Wikipédia d’un passé récent forcément oublié :
« La guerre d'Irak, parfois connue sous le nom de troisième guerre du Golfe, a débuté le 20 mars 2003 avec l'invasion de l'Irak (dite « opération Iraqi Freedom ») par la coalition menée par les États-Unis contre le parti Baas de Saddam Hussein. Le président George W. Bush a officiellement déclaré son achèvement le 1er mai 2003, sous la bannière Mission accomplie. L'invasion a conduit à la défaite rapide de l'armée irakienne, et à la capture et l'exécution de Saddam Hussein. La coalition et l'Irak occupé ont tenté d'établir un nouveau gouvernement. Toutefois, la violence contre les forces de la coalition a rapidement conduit à une guerre asymétrique entre les insurgés, l'armée américaine et le nouveau gouvernement irakien. En mars 2011, Iraq Body Count, qui fonde son analyse sur des données publiées dans les médias], estime que 99.980 à 109.230 civils irakiens sont morts dans les violences, constituées essentiellement d'attentats], et au moins 250.000 civils irakiens auraient été blessés, auxquels il faut ajouter 4439 morts (selon Globalsecurity) et 32.050 blessés dans les rangs américains (4757 morts pour l'ensemble des troupes de la coalition et plus de 36 000 blessés), les morts des sociétés militaires privées et parmi les combattants irakiens (armée irakienne et insurgés). La guerre a provoqué l’exode d’au moins deux millions d’Irakiens, réfugiés à l’étranger depuis 2003 (principalement en Syrie et en Jordanie, mais également en Europe et aux États-Unis). L'organisation National Priorities Project estime à plus de 778 milliards de dollars le coût de la guerre.
La guerre d'Irak a été la seconde guerre après celle d’Afghanistan caractérisée par la doctrine Bush de « guerre préventive » et concernant ce que certains appellent le « nouvel empire américain ». Cette guerre intervient dans la Global War On Terrorism (GWOT) que George W. Bush a déclarée en réponse aux attentats du 11 septembre 2001. La deuxième guerre d'Irak a été menée sous l'impulsion des États-Unis. Après avoir lancé une offensive en Afghanistan, lieu où Ben Laden se serait réfugié, et suspectant des liens entre l'Irak et al-Qaida, George W.Bush charge Donald Rumsfeld et Tommy Franks de constituer un plan d'attaque contre l'Irak. C'est le plan d'opération 1003V, qui est une « évolution » du plan de guerre de la première guerre du Golfe.
Les raisons invoquées officiellement étaient principalement :
• la « lutte contre le terrorisme », l'Irak étant présenté comme un État soutenant al-Qaida, responsable entre autres de l'attentat contre le navire militaire USS Cole, des attentats contre plusieurs ambassades des États-Unis en Afrique et des attentats du 11 septembre 2001
Ces accusations ont depuis été démontrées comme non fondées, y compris par le sénat américain, Saddam Hussein (comme Moubarak et Kadhafi) considérant l'extrémisme islamiste comme une menace pour son régime.
• l'élimination des armes de destruction massive qu'était censé détenir l'Irak.
La possession de missiles longues portée et leurs prolifération sont démontrées depuis les années 1990 mais L'Irak Survey Group chargé par le gouvernement américain de trouver ces armes déclara en septembre 2004 qu'il n'y avait plus aucune arme chimique depuis 1991, ni aucun programme en cours en vue d'en obtenir de nouvelles (voir plus bas), et que seules ont été collectées dans tout le pays 500 munitions abandonnées ou oubliées et dans un état dégradé, datant de la guerre Iran-Irakl'arrestation de Saddam Hussein, l'instauration d'une démocratie et la pacification de la région par un effet d'exemple.
Le maintien de Saddam par Bush est toujours largement présenté comme une erreur, or, comme Kadhafi qui n’a jamais cessé de plaider sa cause de collaboration à la lutte contre « l’ennemi islamiste »), Saddam avait encore à jouer le gendarme régional, et c’est pourquoi Bush lui laissa finir le boulot contre les kurdes. Fin février 1991, les villes sunnites du sud de l’Irak se soulèvent comme nos tunisiens et égyptiens d’aujourd’hui. Le mouvement est aussi spontané et sans programme. La population soulevée veut simplement le renversement du régime. Ce sont des révoltes d’espoir plutôt que des soulèvements révolutionnaires, comme l’écrit justement Hamit Bozarslan. Dans un premier temps les insurgés kurdes parviennent à chasser les soudards de Saddam. Mais très vite les deux révoltes kurde et chiite sans liens organiques, spontanées, sont écrasés sous les yeux passifs comme aujourd’hui de ladite « administration américaine ». Loin des caméras la « Garde républicaine » de Saddam commet un immense massacre, de 100.000 à 300.000 victimes.
Après le renversement de Saddam, comme en Afghanistan, la bourgeoisie US encourage la retribalisation de la société, ce qu’elle envisage sereinement à nouveau pour la Libye avec le classique, raciste, et colonialiste bien connu argument que ces peuples « ne sont pas mûrs pour la démocratie ».
On connait le résultat 8 ans après, le chaos qui n’en finit pas en Afghanistan comme en Irak, où l’impérialisme américain se heurte sans fin à des groupes terroristes écrans d’autres grandes puissances dont nous ne révèleront pas les noms pour l’instant.
Comme Saddam, même avec ses prolongations coûteuses, une prolongation de Kadhafi (de toute façon condamné à être éliminé tôt ou tard par l’Oncle Samuel) s’avère profitable pour l’heure pour la bourgeoisie mondiale, qu’une victoire hégémonique des « tribus unies » de Benghazi. Kadhafi a promis de pardonner aux dits insurgés, comme Saddam avait promis la grâce à ses deux beau-fils qui avaient désertés, en leur coupant le kiki à leur retour. Obama, Merkel et le colonel Sarkosi pourront toujours compatir sur les monceaux de cadavres qu’ils avaient voulu réagir mais qu’on les en empêché. Quoique personne ne sera dupe cette fois-ci de la lâcheté et impuissance de la vieille europe ni du triple jeu US et leur absence totale de sincérité (avec leur ami Sarkozi) de leur discours sur la démocratie.
Dans son éditorial, Le Temps, de Genève, appelle à son tour les Etats à "se méfier des solutions simples", même s'ils "ont eu parfaitement raison" de privilégier jusqu’ici sanctions économiques, interdiction de visa, embargo sur les ventes d’armes, isolement diplomatique et menaces militaires. Mais, avertit-il, "l’heure des solutions difficiles approche". "Sauf miracle, les pays susceptibles d’intervenir devront choisir dans de brefs délais entre une intervention militaire périlleuse et l’abandon d’une population en danger. Avec, dans les deux cas, l’assurance que leur décision pèsera non seulement sur la Libye mais sur tout le 'printemps arabe'".
Ce journal bourgeois oublie d’ajouter que l’option victoire de Kadhafi est la « solution difficile » de l’heure diplomatique présente pour geler le printemps arabe.
A suivre…
jeudi 10 mars 2011
LE COLONEL SARKOZI VA-T-IL BOMBARDER TRIPOLI ?
« Vos intérêts ne sont pas les miens » voilà ce qui peut résumer la nouvelle cacophonie européenne face à « l’action humanitaire » engagée par la bourgeoisie française quand les colLègues européens jouent les sages sur la montagne (de cadavres) et que la bourgeoisie US joue la prudence, alternant le show démocratique ( vive la liberté des peuples !) et le froid des rumeurs (ce soir Washington assure craindre les armes chimiques de Kadhafi). Difficile de s’y retrouver entre la diabolisation continue du colonel psychopathe et les étranges hésitations américaines et européennes. « Massacre des civils » remplace allègrement « guerre civile », mais si les civils sont armés eux aussi et massacrent en partie ceux d’en face ? Et si la guerre n’avait jamais été civile ?
Curieuse « initiative française » ! Pointée du doigt pour son manque de réactivité aux événements de Tunisie et d’Egypte, serait-elle en passe de se racheter cette bourgeoisie soudainement belliqueuse ? Oui car le colonel Sarkozi a assuré qu’il y aurait des frappes ciblées ! Sans dommages collatéraux ?
Quelles exagérations, quels mensonges les sous-fifres sarkoziens vont-ils nous jeter à la figure pour justifier leur « aide humanitaire » aux insurgés de bric et de broc, de tribus et de clans, qui seraient « en difficulté » sur le terrain, et dont certains chantent déjà la gloire de la France et de son colonel trois étoiles et demi ?
La guerre est-elle jouable sans unanimité nationale ? Le PS, le PC et le NPA voteront-ils les crédits de guerre ? Ou, à défaut le débauchage de BHL suffira-t-il à ravir l’opinion nationale, plus qu’elle n’avait été éblouie par la pose du demi-philosophe en chemise blanche échancrée sous les murs de Sarajevo ? Le ralliement in extremis du ségoléniste BHL aura-t-il autant de panache que l’ex-ministre Kouchner avec son sac de riz sur l’épaule en Somalie ?
Nul doute que le viril engagement du colonel Sarkozi a pour but de séduire l’opinion intérieure dont il a téléguidé un sondage affolant les antifascistes, avec cette annonce simultanée de sa volonté d’ « aborder avec ses partenaires européens la question du "danger migratoire" suscité par l'insurrection libyenne ». Ce volet « humanitaire » donnera un coup de sang à l’électeur dubitatif, prêt pour une fois à regarder sur son écran au-delà de la ligne bleue des Vosges, qui rêvera que les fuyards ne prennent même pas le bateau pour pousser jusqu’à Lampedusa ou (horreur) à Nice (promenade des anglais) !
L’Europe, ce panier de crabes impérialiste, n’est même pas le cadre de travail de la question libyenne. Personne ne peut croire que le colonel Sarkozi ait joué les fiers à bras kaki sans consulter le général Obama. Hors du cadre européen, Paris et London travaillent aussi à l'ONU à un projet de résolution du Conseil de sécurité, qui permettrait d'imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye. En choisissant clairement le camp des rebelles à la veille du sommet de Bruxelles, le colonel Sarkozi, qui a réclamé plusieurs fois le départ de son homologue le colonel Kadhafi, souhaite entraîner le reste des pays européens, jusque-là prudents et divisés sur leur attitude face à la crise libyenne, principalement Berlusconi chagriné de ne plus pouvoir baiser la main du duce libyen.
Derrière le bal des prétendants croquemorts de Kadhafi… une longue histoire de marchandages où le plus malin n’était pas celui que l’on croyait. Depuis 2003 sous commandant Chirac puis depuis 2007 avec le colonel Sarkozi, l’oligarchie française avait mis en œuvre une stratégie de diversification des échanges commerciaux et militaires avec la bourgeoisie néo-coloniale tripolitaine qui furent loin d’être aussi florissants qu’avec l’Italie du bon Sylvio Berlusconi. Les échanges avaient été caractérisés par un déficit commercial structurel. Les importations de Libye (à 95% des hydrocarbures, soit 2,5% des approvisionnements français) étaient estimés en 2007 à 2165 millions d’euros. Le commerce français n‘exportait que pour l’équivalent de 521 millions d’euros, ce qui en faisait tout de même le cinquième fournisseur de la Libye.
LE MIRAGE DES RAFALES
En 2007 la libération des infirmières bulgares n’avait été que la tapisserie du tableau d’un Kadhafi remastérisé et relifté par colonel Sarkozi & co. La recherche d'uranium faisait bien partie du mémorandum signé à l’époque par l’ex étudiant maoïste Kouchner et son homologue libyen. Le principal point de l'accord, qui avait fait grincer des dents à la communauté des gangsters internationaux, avait concerné la fourniture, d'un réacteur nucléaire à la Libye "d'ici plusieurs mois voire plusieurs années". Tractation commerciale purement « humanitaire », si l’on en croyait les VRP du colonel Sarkozi, car destinée à l'alimentation d'une usine de production d'eau potable, une ressource très rare dans le désert libyen. L’Etat sarkozien devait être chargé de la construction du réacteur et de la formation des techniciens. Le trust Areva était en piste sans garantie." Le point le plus juteux concernait une "coopération" en matière de Défense ». Les rumeurs qui ne devaient rester que des rumeurs pronostiquaient la vente de plusieurs avions de combats à la Libye, au début de l'année 2007 (une quinzaine de Rafales). Des négociations avaient en effet été évoquées dans la presse entre Dassault et la Libye pour la vente d'une quinzaine de Rafales au colonel Kadhafi. Immédiatement démenties par l’ex-ministre Michèle Alliot-Marie, ces négociations correspondaient à un marché potentiel de 2,5 milliards d'euros pour l'entreprise française. Ce devait être le premier contrat à l'export pour cet avion commercialisé par Dassault et encore jamais vendu à l’étranger. Sauf que ce qui apparaissait comme acquis... ne le fut pas du tout. En juin 2008, six mois après la visite de Kadhafi, Les Echos annoncaient que le dossier avançait : "les discussions se poursuivent normalement, et Dassault peut raisonnablement espérer conclure d'ici à l'automne". Dassault n’était pas inquiet ni inculpé, la signature du contrat de vente de ces fameux 14 Rafale devant intervenir à l’automne 2008. L'automne arrive, et rien n'a été signé. Ni en 2008, ni en 2009. Et en 2010 ? La Tribune annonce en juillet dernier que "Paris tente de propulser le Rafale en Libye". Plus de deux ans après, il est temps... Selon le quotidien Les Echos, qui a le sens de la formule, on assista à "une accélération des négociations" (sic) mais il ne faut pas se réjouir trop vite car... "tout dépend du guide".
Le fiasco était patent peu après. En réalité, à l'exception de la commande ferme de 21 airbus pour 2,7 milliards d'euros, tous les autres dossiers évoqués n’étaient alors qu’au stade des négociations : "aujourd'hui, on n'a aucun élément précis sur les volumes, les types d'appareil et donc les montants d'un contrat. On ne sait pas très bien ce qui va remonter de cette négociation globale" relevait un cadre d'Eurocopter, cité par Libération. Même son de cloche du côté de Veolia : "On n'a rien signé du tout. Sur l'annonce de l'Elysée, on ne souhaite pas faire de commentaire". D’où le désir de revanche « humanitaire » très accentué de la bourgeoisie française derrière le guide de l’Elysée.
La bourgeoisie française s’était ridiculisée au terme de ce marché de dupe par la "remise en selle" du pouvoir libyen sur la scène internationale, selon les termes du colonel Sarkozi qui prétendait "aider la Libye à réintégrer le concert des nations" (de brigands humanitaires). Si des voix naïves en Europe soulignèrent que certaines exigences en matière de droits de l'Homme (cette scie à VRP oligarchiques) n’étaient toujours pas respectées, plusieurs pays dont la Grande-Bretagne et les Etats-Unis avaient avoué leur amitié retrouvée pour la mafia de Tripoli. La balance de l’économie trahit toujours la vérité des « échanges humanitaires » : le déficit commercial de la France avec la Libye se creusa lourdement à 3,7 milliards.
Fin 2010, le gouvernement Fillon rêvait encore conquérir des parts de marché dans le secteur financier, l’industrie, la construction, l’eau, les télécommunications et l’ingénierie. Le patronat français y était impliqué. Pour le moment une quarantaine de filiales ou de représentations d’entreprises françaises s’étaient installées pour œuvrer à cet objectif dans ce désert de 6 millions d’habitants dont le ratio PIB/habitant était le plus élevé d’Afrique. En 2009, il était estimé à 105 000 dollars. La Libye est le deuxième exportateur de pétrole du continent, avec plus de 60 ans de réserves estimées au rythme actuel de production. Quant à ses réserves de gaz, elles tourneraient autour de 1500 milliards de m3. Kadhafi ne pourra pas plus détruire cette manne géologique que son regretté ami Saddam.
Les investissements français, principalement orientés vers le secteur pétrolier, sont comme les bijoux de la colonelle, précieux mais volatiles. L’ancien secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant, promu ministre de l’Intérieur, avait effectué pas moins de quatre visites en Libye depuis 2008, la dernière remontait à juillet 2010.
Oubliée l’affaire El-Mismari, qui avait pourtant sonné l’alarme (un des principaux conseillers de Kadhafi depuis 1969, qui avait fait défection) et qui demandait l’asile politique à la France.
Le revirement de l’oligarchie française est très récent et date du 26 février dernier où le gouvernement du colonel Sarkozi avait suspendu les activités de son ambassade à Tripoli. Curieusement la protection des intérêts français a été confiée à l’ambassade de Russie. Ce jeudi seulement la Russie suspend ses livraisons d’armes à Kadhafi. Autant dire que la décision de lâcher Kadhafi est toute récente et a fait l’objet d’intenses marchandages.
La bourgeoisie française, plus ou moins sponsorisée par la bourgeoisie US – qui l’a réintégrée dans l’OTAN et convaincue d’apporter sa quotepart militariste en Afghanistan – peut être déléguée pour décharger quelque peu le lourd fardeau de pax americana sur le reste du monde. Le colonel Sarkozi portant haut le drapeau de la démocratie… humanitaire. A moins que cette pauvre armée française toujours à la traîne n’arrive que pour compter les cadavres sur les ruines de Benghazi.
A suivre…
mercredi 9 mars 2011
La bourgeoisie internationale tente de jouer le chaos
Les flics tirent dans la foule au Yémen, des dizaines de blessés dont six morts probables.. Du jamais vu dans l’histoire de la répression des manifestations populaires. Kadhafi continue tranquillement de bombarder la population civile. En Côte d’Ivoire les flics de Gagbo ont tranquillement tiré dans une foule de femmes, causant au moins sept mortes. La « communauté internationale » et la « communauté africaine » se révélant incapables apparemment de « faire respecter les élections » ; en vérité comme en Libye, tout se passe dans les coulisses entre compétiteurs impérialistes. Les banques qui devaient geler les avoir de Kadhafi traînent des pieds de peur de perdre gros. Tous les grands Etats, ces bandits de grand chemin, poussent sur le perron de grand cris contre les violations des droits de l’homme et les viols de femmes, mais s’en fichent royalement, tout occupés qu’ils sont à évaluer leurs pertes et profits en armes et or noir.
En coulisses la bourgeoisie a tout intérêt à activer le chaos en l’absence d’une alternative de classe. Autant les services secrets égyptiens avaient organisé l’attentat contre une Eglise copte, causant plusieurs morts avant le soulèvement de la place Tahrir, autant d’autres « services » des Etats toujours en place, relayant les précédents avec le même personnel, continuent à semer le bordel : attentat crapuleux contre un prêtre en Tunisie, manifestation en Egypte dans un quartier copte à la suite d’un double meurtre lors d’un projet de mariage bi-confessionnel, évocations de revendications tribales en Libye, discours raciste sur l’incapacité des divers « insurgés » à fonder parti politique apte à gouverner ou leader « charismatique », etc.
Le gonflement médiatique d’affrontements inter-communautaires au Caire a pour but de faire passer au second plan la très bonne attaque des locaux de la sécurité d’Etat, comme ce commentateur nous en informe :
« Egypte: des bâtiments de la sécurité d'Etat pris d'assaut LE CAIRE - Des bâtiments de la sécurité d'Etat ont été pris d'assaut samedi en Egypte par des manifestants à la recherche de preuves d'abus commis par ce puissant appareil dépendant du ministère de l'Intérieur, dont des militants exigent la dissolution, ont indiqué des témoins. Environ 2.500 manifestants ont fait irruption dans le bâtiment de la sécurité d'Etat à Nasr City au Caire "s'emparant de documents officiels avant que les responsables ne les brûlent ou les déchirent", a dit un responsable des services de sécurité. A Cheikh Zayed, dans la banlieue du Caire, des centaines de manifestants ont tenté de pénétrer dans le siège local de la sécurité d'Etat. Des employés ont tiré des coups de feu en l'air avant que l'armée ne s'interpose pour empêcher que le bâtiment soit pris. La dissolution de ces services, accusés par des organisations de défense des droits de l'Homme d'abus et de torture, est l'une des principales revendications des militants pro-démocratie. L'un des manifestants a affirmé à l'AFP que le but était de s'emparer des dossiers de la sécurité d'Etat "de crainte que les preuves de violations ne soient détruites"."On pouvait voir la police à l'intérieur en train de brûler des papiers", a-t-il dit."Les fenêtres étaient ouvertes et des papiers s'envolaient par les fenêtres", a ajouté un autre manifestant, joint par l'AFP par téléphone. A Marsa Matrouh, ville située au nord-ouest du Caire sur la côte méditerranéenne, un groupe de manifestants a pu entrer dans le siège de la sécurité et s'emparer de documents, avant de mettre le feu au bâtiment d'où s'élevait une épaisse fumée noire, a rapporté un témoin à l'AFP. Les manifestants se sont ensuite attablés à un café non loin de là pour éplucher les papiers récupérés, a-t-il ajouté.A Zagazig, ville du Delta du Nil, des manifestants s'en sont également pris à des bureaux de la sécurité d'Etat, ainsi qu'à Fayoum, au sud du Caire, selon des responsables des services de sécurité. Vendredi, des manifestants avaient été blessés par balle lors d'un rassemblement réclamant la dissolution de la sécurité d'Etat à Alexandrie, la grande ville du nord de l'Egypte. L'armée, qui gère le pays depuis la démission sous la pression populaire du président Hosni Moubarak le 11 février, avait dû intervenir pour ramener le calme. Selon un responsable des services de sécurité, près de 100.000 personnes travaillent à la sécurité d'Etat, sans compter les informateurs. Vendredi, entourant le nouveau Premier ministre Essam Charaf, les manifestants de l'emblématique place Tahrir au Caire avaient scandé "Le peuple veut la fin de la sécurité d'Etat"."Je prie pour que l'Egypte soit un pays libre et que ses services de sécurité soient au service des citoyens", a répondu M. Charaf, nommé jeudi en remplacement d'Ahmad Chafic. La colère contre les abus quotidiens et la torture par la police ont été l'un des éléments déclencheurs le 25 janvier des manifestations sans précédent contre le régime de M. Moubarak, qui était en poste depuis près de 30 ans. 05 mars 2011 21h07 http://www.romandie.com/infos/News2/110305200727.f7eiyg5b.asp Dans de nombreuses casernes ,des comités de soldats sont en constitution et réclament la destitution de la hiérarchie corrompue......La nouvelle est fracassante. La chute de la Sécurité d'Etat est plus importante encore que celle de Moubarak qui, et c'est un manifestant qui l'a hurlé en ouvrant un dossier par hasard, était fiché lui aussi..http://crisdegypte.blogs.liberation.fr/cairote/2011/03/egypt-larmée-torture-video.html#comments.
Les infos sur l’ensemble des phénomènes sociaux qui touchent le croissant arabe restent dispersées, sans suite, sans analyse sérieuse mis à part les broderies sur la dite révolution démocratique : il ne serait plus question que des conciliabules vertueux entre éléphants impérialistes ne voulant pas casser la porcelaine et éviter de faire lever la « rue arabe » (c'est-à-dire un nationalisme paysan). Avec le cas de l’Algérie c’est flagrant. Voilà un pays, où d’après nos informateurs secrets, il se passe tous les jours des conflits « de classe », mais pour lequel l’info reste à éclipses, et encore lorsqu’elle apparaît très sélective en faveur de l’opposition bourgeoise qui n’arrive pourtant pas à rallier les masses prolétaires.
Le mouvement de soulèvement généralisé est toutefois freiné par le feuilleton Kadhafi. La bourgeoisie utilise ce freinage à dessein, où il apparaît de toute manière que le vieux dictateur s’est tiré une balle dans le pied en usant de forces mercenaires contre son peuple (Franco s’était bien servi aussi de tirailleurs marocains, mais c’était une autre époque de défaites ininterrompues du prolétariat). Partout le mouvement ne demande qu’à e redéployer bien que partout tous les Etats fassent d’abord tirer sur la foule, femmes et enfants compris. Partout ailleurs, en Arabie Saoudite et surtout en Syrie, les masses piaffent d’impatience d’abattre les tueurs rois du pétrole et le sinistre Assad.
Si les prolétaires en France en particulier sont pardonnables à cette étape d’y perdre leur latin, paradoxalement et comiquement, les répercussions des soulèvements arabes rentrent quand même par la fenêtre des partis bourgeois, tous s’affole de la remontée du FN. Les peurs et les fantasmes politiques ont de curieuses résonances. Cette soi-disant peur de l’envahissement me semble pourtant bien « médiatisée » avec sondés rétribués… pour évacuer encore une fois la solidarité révolutionnaire de classe….
Pourquoi la Libye s'enfonce dans la guerre civile
(Je vous transite cet article de Ouest France de Bruno Ripoche, pour une fois qu’un article de journal provincial vaut bien les productions nationales assez poussives en ce moment)
L'insurrection contre Kadhafi entre, aujourd'hui, dans sa quatrième semaine. Ni la rébellion, ni le régime ne semblent en mesure de l'emporter par KO.
Repères
Pourquoi la révolution ne débouche-t-elle pas en Libye ?
Parce que le régime du colonel Kadhafi, d'abord sonné par la révolte partie de Benghazi, deuxième ville du pays, ne s'est pas effondré. Une partie de l'armée a rallié l'insurrection populaire. Mais cette armée joue un rôle moins décisif qu'en Tunisie ou en Égypte. Mouammar Kadhafi l'a affaiblie après une tentative de coup d'État en 1993. À sa place, il avait fait monter en puissance trois « unités de protection » (environ 10 000 hommes), dont la 32e brigade, dirigée par son fils Khamis. Kadhafi a aussi gardé le soutien de quelques tribus, dont la sienne, les Kadhadfa, qui contrôlent la région de Syrte, verrou sur la route de Tripoli.
Qui prend le dessus ?
Personne à ce stade. L'insurrection a conquis le littoral de l'Est jusqu'à Bin Jawad, dont elle a été repoussée ce week-end. Elle n'avance plus. Une ligne de front semble se stabiliser à hauteur de Ras Lanouf, violemment bombardée hier par l'aviation. Il s'agit du principal terminal pétrolier du pays, donc d'un enjeu stratégique, les hydrocarbures étant l'unique richesse de la Lybie. Des villes de l'Ouest se sont aussi soulevées, dont Misrata (200 000 habitants), le port pétrolier de Zaouia (ouest de Tripoli) et une bande allant de Zintan à la frontière tunisienne. Mais elles sont isolées les unes des autres, souvent encerclées, et les blindés du régime y font des incursions meurtrières, sans parvenir à les reprendre. En milieu urbain, les rebelles ont l'avantage.
Ces combats peuvent-ils durer ?
Kadhafi possède la supériorité matérielle. Mais ses avions sont peu précis. Ses hélicoptères feraient des cibles faciles. Quant aux rares affrontements au sol, ils n'auraient jamais engagé plus d'une centaine d'hommes de chaque côté. Shashank Joshi, analyste au Royal United Services Institute de Londres, parle d'« escarmouches » et souligne que « les forces ne sont pas aussi déséquilibrées qu'il y paraît ». Aux unités d'élite, les milliers de jeunes insurgés, encadrés par d'ex-militaires, opposent leur détermination et du matériel (DCA mobiles, chars, lance-roquettes) récupéré dans les casernes de l'Est. Mais à une telle distance de leurs bases (700 km de Tripoli et 350 km de Benghazi), aucun des deux camps ne paraît en mesure de l'emporter par KO.
Une issue négociée est-elle envisagée ?
Des avocats de Tripoli se seraient proposés comme intermédiaires pour « arrêter le bain de sang », mais l'entourage de Kadhafi a démenti les avoir mandatés pour négocier une immunité et de l'argent contre le départ du colonel. Le Conseil national libyen (gouvernement des insurgés de Benghazi) a rejeté leur médiation. Son président Moustafa Abdeldjeïl, a déclaré à Al-Jazira que Kadhafi a « soixante-douze heures pour quitter le pays » s'il veut éviter des poursuites.
Une intervention étrangère peut-elle faire pencher la balance ?
Encore faudrait-il qu'elle ait lieu ! Il y a urgence, les combats ayant fait plus de 1 000 morts, selon le seul bilan avancé par Ban Ki-Moon, le secrétaire général de l'Onu. Il date du... 25 février ! Mais la diplomatie avance lentement : Paris et Londres doivent présenter à l'Onu un projet de zone d'exclusion aérienne, qui interdirait à Kadhafi d'utiliser son aviation. Cette no fly zone a la bénédiction des monarchies arabes du Golfe et de l'Organisation de la conférence islamique (57 pays). Mais Moscou et Pékin, qui possèdent un droit de veto à l'Onu, renâclent. En attendant, l'Otan a porté de dix heures à 24 heures/24 la surveillance de ses avions-radars en Méditerranée.
Lors d'un entretien téléphonique hier soir, le président américain Barack Obama et le Premier ministre britannique David Cameron, ont déclaré qu'ils avaient pour «objectif commun en Libye » la fin des violences et le départ de Kadhafi."
lundi 7 mars 2011
ALGERIE ET REVENDICATION SOCIALE
De la Tunisie à la Libye, on nous a saoulé avec la revendication de la liberté démocratique qui n’a encore jamais fait pousser le blé toute seule… Voici le pays où la classe ouvrière la plus importante du Maghreb, qui risque bien de « recadrer » les soulèvements du croissant arabe en rappelant que c’est la classe ouvrière qui est déterminante, et que les étudiants ont un rôle à jouer, dans leur domaine, mais aussi pour appuyer les prolétaires qui, eux, restent l’avant-garde dans la lutte sociale.
Algérie : la grogne sociale gagne tout le pays
Par Mélanie Matarese le 7 mars 2011(repiqué du blog Visa pour l’Algérie)
Dans la rue, rien ne va plus. Ironie de l'histoire : ce ne sont pas les appels au «changement de système» de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie qui tarabustent aujourd’hui le pouvoir algérien, mais… les étudiants, les garde-communaux, les chômeurs, ou encore les cheminots. La grogne sociale a non seulement gagné en puissance mais s’est propagée dans tout le pays. Tour d’horizon de cette contestation à suivre de près…
LES ETUDIANTS
C’est le mouvement le plus généralisé (les universités bougent depuis début février) et le mieux organisé puisque les collectifs de huit universités algériennes - Béjaïa, Sétif, Tizi Ouzou, Boumerdès, Alger et Mostaganem - se sont fédérés en Coordination nationale autonomes des étudiants. Pour Farid Cherbal, enseignant et syndicaliste, ce mouvement est «le plus large qu’a connu l’université algérienne depuis 1987». La nouvelle Coordination appelle à un sit-in devant tout les rectorats des universités le mercredi 9 mars et à une journée de grève et de marche dans plusieurs wilayas le lundi 14 mars.
Que veulent-ils ? Ils demandaient au départ l’abrogation d’un décret présidentiel voulant aligner les diplômes de l’ancien système (magisters) avec les masters issus du LMD ; le maintien du diplôme d’ingénieur des universités et l’alignement de ces diplômés sur les masters, tous les deux des bac+5. Aujourd’hui, les revendications se sont élargies et diversifiées selon les régions. La Coordination est donc en train d’étudier une plate-forme commune à toutes les universités.
Que dit le gouvernement ? Le Conseil des ministres a abrogé le décret présidentiel, maintenu le diplôme d’ingénieur mais n’a pas autorisé l’alignement avec les masters. «Une commission chargée d’établir les équivalences a été mise en place par le ministère, explique une enseignante de l’université de Blida, et des propositions affluent des universités et des écoles. On attend une réponse pour le 27 mars, quand tout le monde sera en vacances…»
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Il y a déjà eu des affrontements entre les forces de police et les étudiants qui n’hésiteront pas à radicaliser le mouvement. Selon les universités, ils ont été rejoints par les enseignants. Et les déclarations du recteur de l’université d’Alger, hier sur une chaîne de télévision nationale, selon lesquelles il n’y a pas de différence entre le magister et le master, pourrait les agacer un peu plus. «L’erreur émane clairement du ministère, poursuit l’enseignante chercheuse de Blida. S’il est vrai que l’Algérie ne peut se soustraire aux systèmes qui s’appliquent à l’échelle mondiale, elle aurait pu temporiser.»
LES GARDES COMMUNAUX
Ils sont environ 100.000 dans tout le pays, mais plus que leur nombre, c’est leur charge symbolique qui est importante. Car ces paramilitaires ont été recrutés dans les années 90 pour lutter contre le terrorisme et certains ont été tués ou sont encore blessés. Ils se font entendre depuis un mois, d’Annaba à Sidi Bel Abbès en passant par Alger où ils ont manifesté ce lundi 7 mars.
Que veulent-ils ? Ils rejettent le plan de redéploiement prévu par le gouvernement et le nouveau statut d’agent de sécurité qui leur a été proposé. Ils se disent «marginalisés après avoir protégé la population». Certains ont carrément été mis à la retraite avec une pension d’environ 100 euros, d’autres ont été orientés vers des entreprises publiques avec un salaire inférieur à celui qu’ils percevaient et avec un contrat moins avantageux. Ils réclament un statut avec, entre autres, des indemnités pour les services rendus durant la décennie noire, une retraite anticipée et une prise en charge de victimes du terrorisme, une augmentation des salaires.
Que dit le gouvernement ? Le programme de redéploiement de la garde communal a été officiellement gelé le 20 février dernier. Daho Ould Kablia, le ministre de l’Intérieur, a reçu leurs représentants le jeudi 3 mars. «Je dois dire toute notre reconnaissance et notre gratitude pour le travail gigantesque qui a été fait par ce corps pour protéger le pays et d’être à l’avant-garde de la lutte contre le terrorisme», a-t-il déclaré. La loi de finances 2010 prévoit un fonds spécial pour accompagner le processus de dissolution du corps dont une partie sera affectée au ministère de la Défense.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Le gel du redéploiement ne les a pas convaincus, pas plus que la rencontre avec le ministre. Ils se disent prêts à radicaliser leur mouvement. «Mais il y a fort à parier que le gouvernement les laisse tomber comme il a laissé tomber les patriotes, souligne un journaliste de Chlef, à l'ouest d'Alger. Dans une wilaya comme la nôtre, où il y avait dans les années 90 quelque 5.000 patriotes et 3.000 gardes communaux, ils ont pourtant joué un rôle capital. Certains sont aujourd'hui invalides, avec une famille à charge et ne touchent qu'une pension d'environ 70 euros...»
LES CHÔMEURS
Depuis fin janvier, date de sa création, le Collectif national pour la défense des droits des chômeurs, a appelé à plusieurs rassemblements. Il annonce une manifestation le 20 mars prochain, à Alger, où sont attendus des chômeurs de tout le pays, y compris du Sud (zones pétrolières) où le mouvement est le plus dur.
Que veulent-ils ? Un travail décent, une allocation chômage à hauteur de 50% du salaire minimum (qui est de 150 euros environ), la permanisation de tous les contractuels des dispositifs d’aide à l’emploi et de tous les travailleurs précaires, l’ouverture de nouveaux postes budgétaires dans tous les secteurs, notamment dans la Fonction publique, l’interdiction des licenciements économiques et la suppression du service militaire pour les jeunes de 25 ans, la baisse de la durée du service militaire à 6 mois.
Que dit le gouvernement ? «À part les mesures qui ont été annoncées en Conseil des ministres, et qui ne correspondent pas aux aspirations des chômeurs, pour l’instant, le pouvoir ne nous a adressé aucun message», assure Samir Laribi, porte-parole de la Coordination.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Le chômage (10% de la population) touche surtout les jeunes -21% des 16-24 ans d’après les chiffres officiels, plus de 70% des 16-29 ans selon certains sociologues- et les diplômés de l’enseignement supérieur (à plus de 20%). Or ceux sont eux qui sont les plus mobilisés, tous mouvements confondus. Par ailleurs, comme l’explique le syndicaliste Yacine Zaid, «C’est la première fois que les chômeurs arrivent à se structurer pour réclamer leurs droits. Et ils sont en train de mener un véritable travail de proximité dans toutes les régions.»
LES CHEMINOTS
Ils ont déjà mené plusieurs mouvements de grève en 2010, et dimanche 6 mars, les cheminots d’Alger ont décidé de paralyser le trafic ferroviaire entre les banlieues est/ouest et la capitale pour protester contre leurs conditions de travail et leurs salaires, d’environ 180 euros auxquels s’ajoutent 5 euros de prime de risque.
Que veulent-ils ? Une augmentation de salaire. Comme les garde-communaux, ils mettent en avant leur rôle pendant la décennie noire. «Au moment où le terrorisme ravageait l'Algérie, seuls les cheminots ont bravé la menace, se défendent-ils, au détriment de leur vie, pour assurer le transport des Algériens.»
Que dit le gouvernement ? Il n’a pas encore réagi. La Société nationale des transports ferroviaires dit avoir reçu les travailleurs et fait des propositions pour améliorer les conditions de travail. L'an dernier, le ministère des Transports s'était engagé à les augmenter.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Si la contestation reste circonscrite à Alger, cela ne devrait pas avoir de conséquences autres qu’économiques.
Algérie : la grogne sociale gagne tout le pays
Par Mélanie Matarese le 7 mars 2011(repiqué du blog Visa pour l’Algérie)
Dans la rue, rien ne va plus. Ironie de l'histoire : ce ne sont pas les appels au «changement de système» de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie qui tarabustent aujourd’hui le pouvoir algérien, mais… les étudiants, les garde-communaux, les chômeurs, ou encore les cheminots. La grogne sociale a non seulement gagné en puissance mais s’est propagée dans tout le pays. Tour d’horizon de cette contestation à suivre de près…
LES ETUDIANTS
C’est le mouvement le plus généralisé (les universités bougent depuis début février) et le mieux organisé puisque les collectifs de huit universités algériennes - Béjaïa, Sétif, Tizi Ouzou, Boumerdès, Alger et Mostaganem - se sont fédérés en Coordination nationale autonomes des étudiants. Pour Farid Cherbal, enseignant et syndicaliste, ce mouvement est «le plus large qu’a connu l’université algérienne depuis 1987». La nouvelle Coordination appelle à un sit-in devant tout les rectorats des universités le mercredi 9 mars et à une journée de grève et de marche dans plusieurs wilayas le lundi 14 mars.
Que veulent-ils ? Ils demandaient au départ l’abrogation d’un décret présidentiel voulant aligner les diplômes de l’ancien système (magisters) avec les masters issus du LMD ; le maintien du diplôme d’ingénieur des universités et l’alignement de ces diplômés sur les masters, tous les deux des bac+5. Aujourd’hui, les revendications se sont élargies et diversifiées selon les régions. La Coordination est donc en train d’étudier une plate-forme commune à toutes les universités.
Que dit le gouvernement ? Le Conseil des ministres a abrogé le décret présidentiel, maintenu le diplôme d’ingénieur mais n’a pas autorisé l’alignement avec les masters. «Une commission chargée d’établir les équivalences a été mise en place par le ministère, explique une enseignante de l’université de Blida, et des propositions affluent des universités et des écoles. On attend une réponse pour le 27 mars, quand tout le monde sera en vacances…»
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Il y a déjà eu des affrontements entre les forces de police et les étudiants qui n’hésiteront pas à radicaliser le mouvement. Selon les universités, ils ont été rejoints par les enseignants. Et les déclarations du recteur de l’université d’Alger, hier sur une chaîne de télévision nationale, selon lesquelles il n’y a pas de différence entre le magister et le master, pourrait les agacer un peu plus. «L’erreur émane clairement du ministère, poursuit l’enseignante chercheuse de Blida. S’il est vrai que l’Algérie ne peut se soustraire aux systèmes qui s’appliquent à l’échelle mondiale, elle aurait pu temporiser.»
LES GARDES COMMUNAUX
Ils sont environ 100.000 dans tout le pays, mais plus que leur nombre, c’est leur charge symbolique qui est importante. Car ces paramilitaires ont été recrutés dans les années 90 pour lutter contre le terrorisme et certains ont été tués ou sont encore blessés. Ils se font entendre depuis un mois, d’Annaba à Sidi Bel Abbès en passant par Alger où ils ont manifesté ce lundi 7 mars.
Que veulent-ils ? Ils rejettent le plan de redéploiement prévu par le gouvernement et le nouveau statut d’agent de sécurité qui leur a été proposé. Ils se disent «marginalisés après avoir protégé la population». Certains ont carrément été mis à la retraite avec une pension d’environ 100 euros, d’autres ont été orientés vers des entreprises publiques avec un salaire inférieur à celui qu’ils percevaient et avec un contrat moins avantageux. Ils réclament un statut avec, entre autres, des indemnités pour les services rendus durant la décennie noire, une retraite anticipée et une prise en charge de victimes du terrorisme, une augmentation des salaires.
Que dit le gouvernement ? Le programme de redéploiement de la garde communal a été officiellement gelé le 20 février dernier. Daho Ould Kablia, le ministre de l’Intérieur, a reçu leurs représentants le jeudi 3 mars. «Je dois dire toute notre reconnaissance et notre gratitude pour le travail gigantesque qui a été fait par ce corps pour protéger le pays et d’être à l’avant-garde de la lutte contre le terrorisme», a-t-il déclaré. La loi de finances 2010 prévoit un fonds spécial pour accompagner le processus de dissolution du corps dont une partie sera affectée au ministère de la Défense.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Le gel du redéploiement ne les a pas convaincus, pas plus que la rencontre avec le ministre. Ils se disent prêts à radicaliser leur mouvement. «Mais il y a fort à parier que le gouvernement les laisse tomber comme il a laissé tomber les patriotes, souligne un journaliste de Chlef, à l'ouest d'Alger. Dans une wilaya comme la nôtre, où il y avait dans les années 90 quelque 5.000 patriotes et 3.000 gardes communaux, ils ont pourtant joué un rôle capital. Certains sont aujourd'hui invalides, avec une famille à charge et ne touchent qu'une pension d'environ 70 euros...»
LES CHÔMEURS
Depuis fin janvier, date de sa création, le Collectif national pour la défense des droits des chômeurs, a appelé à plusieurs rassemblements. Il annonce une manifestation le 20 mars prochain, à Alger, où sont attendus des chômeurs de tout le pays, y compris du Sud (zones pétrolières) où le mouvement est le plus dur.
Que veulent-ils ? Un travail décent, une allocation chômage à hauteur de 50% du salaire minimum (qui est de 150 euros environ), la permanisation de tous les contractuels des dispositifs d’aide à l’emploi et de tous les travailleurs précaires, l’ouverture de nouveaux postes budgétaires dans tous les secteurs, notamment dans la Fonction publique, l’interdiction des licenciements économiques et la suppression du service militaire pour les jeunes de 25 ans, la baisse de la durée du service militaire à 6 mois.
Que dit le gouvernement ? «À part les mesures qui ont été annoncées en Conseil des ministres, et qui ne correspondent pas aux aspirations des chômeurs, pour l’instant, le pouvoir ne nous a adressé aucun message», assure Samir Laribi, porte-parole de la Coordination.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Le chômage (10% de la population) touche surtout les jeunes -21% des 16-24 ans d’après les chiffres officiels, plus de 70% des 16-29 ans selon certains sociologues- et les diplômés de l’enseignement supérieur (à plus de 20%). Or ceux sont eux qui sont les plus mobilisés, tous mouvements confondus. Par ailleurs, comme l’explique le syndicaliste Yacine Zaid, «C’est la première fois que les chômeurs arrivent à se structurer pour réclamer leurs droits. Et ils sont en train de mener un véritable travail de proximité dans toutes les régions.»
LES CHEMINOTS
Ils ont déjà mené plusieurs mouvements de grève en 2010, et dimanche 6 mars, les cheminots d’Alger ont décidé de paralyser le trafic ferroviaire entre les banlieues est/ouest et la capitale pour protester contre leurs conditions de travail et leurs salaires, d’environ 180 euros auxquels s’ajoutent 5 euros de prime de risque.
Que veulent-ils ? Une augmentation de salaire. Comme les garde-communaux, ils mettent en avant leur rôle pendant la décennie noire. «Au moment où le terrorisme ravageait l'Algérie, seuls les cheminots ont bravé la menace, se défendent-ils, au détriment de leur vie, pour assurer le transport des Algériens.»
Que dit le gouvernement ? Il n’a pas encore réagi. La Société nationale des transports ferroviaires dit avoir reçu les travailleurs et fait des propositions pour améliorer les conditions de travail. L'an dernier, le ministère des Transports s'était engagé à les augmenter.
En quoi sont-ils en mesure de déstabiliser le pouvoir ? Si la contestation reste circonscrite à Alger, cela ne devrait pas avoir de conséquences autres qu’économiques.
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