Au
cours de l'année 1968 et par après surgirent un certain nombre de
petits groupes à vocation révolutionnaire, très peu spontanés ils
provenaient de courants antérieurs. Le pôle le plus cohérent, mais
plus discret durant le mois de mai, était issu de la dite « gauche
italienne », minorités communistes diverses qui avaient
combattu la montée du stalinisme, puis avaient dû se réfugier à
l'étranger après la prise du pouvoir par Mussolini. Plusieurs
individus découvrirent aussi l'apport théorique de la « gauche
hollandaise », courant oublié et qualifié de « conseilliste
anti-parti », idéologie en faveur de simples « Conseils
ouvriers » qui apparut plus séduisante à la jeunesse révoltée
mais surtout estudiantine ; dans leur courte célébrité les
artistes situationnistes basèrent leurs approximations politiques
sur ce courant très critique du léninisme.
C'est
de Socialisme ou Barbarie que s'inspiraient de nouveaux cercles
encore immatures, avec une présence notable de Pouvoir ouvrier. De
l'anarchisme le plus sérieux était apparu « Noir et Rouge »
reconnaissant un rôle central à la classe ouvrière. Enfin, même
s'il n'apparut tel au début, car conseilliste lui aussi, le petit
groupe Révolution Internationale, présent dans le cercle d'Henri
Simon « Echanges », allait commencer à élaborer une
synthèse des dites gauche italienne et gauche hollandaise, sans
qu'on puisse certifier 50 ans plus tard que la synthèse ait abouti
au parti mondial débarrassé de tout léninisme et de tout
spontanéisme.
NAISSANCE
EPHEMERE D'UNE MOUVANCE ULTRA-GAUCHE LITTERAIRE
Dans
les braises de la modernité des luttes diverses, parcellaires et
étroites animées par les nombreuses couches de la petite
bourgeoisie en expansion numérique, les doutes sur le prolétariat
apparurent très vite dans les milieux militants gauchistes,en
particulier sous une impulsion de Jacques Camatte, à la fois
passionnante (la republication en français des textes italiens et
hollandais (on s'arrachait ou on volait « Invariance ») ;
mais aussi ambiguë car cet ancien bordiguiste remettait en cause
progressivement le marxisme et le rôle révolutionnaire du
prolétariat. Cette démarche est particulièrement destructrice
surtout en milieu étudiant (dont les situs s'étaient si bien
moqués) et parmi les professions intellectuelles. Démarche perverse
en ce qu'elle posait avoir à la fois porté à la connaissance les
textes politiques les plus importants dépassant la contre révolution
pour « rajeunir le marxisme » comme aurait dit Pierre
Souyri, mais en même temps détruisant l'intérêt de ces textes en
décrétant que la classe ouvrière avait été intégrée par le
capital. Camatte fût par après un des premiers théoriciens de
l'idéologie écologiste hippie.
Une
nuée de mini-groupes, parfois simplement un ou deux individus
s'inscrivirent dans cette filière révisionniste moderniste ;
la bien nommée revue « Négation », et surtout La
Banquise emmenée également par un ancien bordiguiste Gilles Dauvé,
qui fût effacé du tableau lors du scandale de la négation des
chambres à gaz. J'en ai évoqué quelques uns dans mon Histoire du
maximalisme. Avec mon « Précis de communisation » je me
suis moqué des successeurs phraseurs et comiques, tout comme de ceux
qui subsistent de nos jours avec pour seules boussoles arrogance et
mépris pour tous ceux qui n'adhèrent pas à leurs fadaises .
Je vais néanmoins actualiser le tableau actuel d'une autre catégorie
que les négateurs du prolétariat : des épiciers,
individualiste marginaux, passés par toutes les couleurs du
gauchisme et de l'anarchisme, pour finir imbus de leur vanité et
surtout armés de la plus minable pensée élitaire bourgeoise :
la docte morale. On verra que les Coleman et Bernardo sont des
modernistes du même acabit que feu les comunisateurs.
APRES
LA DISPARITION DU MARAIS ULTRA-GAUCHE NEGATIONNISTE DU PROLETARIAT
Y
A-T-IL DES HERITIERS ?
Pas
vraiment sauf avec les deux dinosaures de Temps critiques, Ab Irato,
L'encyclopédie des nuisances... Pas une grosse perte mais la marge
politique est toujours habitée par quelques arrivistes mal dégrossis
du gauchisme, qui semblent se soucier plus de leur propre édification
que du sort de la classe ouvrière.
Deux
mouvances de petits éditeurs aux chevilles gonflées : Ni
patrie ni frontières...de classe et l'épicerie portugaise Radio
Vosstanie. Les deux boutiques se repassent d'ailleurs les plats.
Un
personnage est central dans la continuité marginale des observateurs
supérieurs de la société, se prend-il pour un nouveau Maspéro ?
Yves
Coleman est connu à l'échelle internationale, et dans certaines
universités américaines comme Proofreader, translator and militant
for migrants' rights (Correcteur, traducteur et militant pour les
droits des migrants), donc surtout comme humanitaire. Il est toujours
confraternels avec ses amis professeurs, écrivains ou journalistes.
Depuis
vingt ans il tient sa boutique, et auto-édite sa petite revue « Ni
patrie ni frontières » revue éclectique mais où sont
évoquées des questions la plupart du temps négligées par les
partis et sectes politiques. Ses réponses et commentaires sont en
général cohérentes et pleine de bon sens, dérogeant généralement
à la bienséance des propagandes bourgeoises. Je l'ai connu petit
chef à LO où il dirigeait le dimanche matin à Cachan les
pétitionnaires trotskiens de LO contre des transports « qui
nous roulent ». Il a été ensuite fondateur de Combat
communiste, petit groupe resté trotskien, avec des textes sans
intérêt ; de ce groupe ne reste que lui et un auteur de romans
policiers genre sous-Manchette, Gérard Delteil. Après une longue
traversée du désert en Amérique du sud il a créé sa revue en
pontife revenu d'un militantisme aveugle, sans avouer avoir puisé
une nouvelle inspiration d'un niveau politique supérieur à ses
années trotskiennes, dans les publications subversives du milieu
maximaliste.
Ses
réflexions les plus abouties sont très pertinentes souvent et
claires politiquement. Pour notre sujet, une de ses réponses au
couple de Temps critiques - « Fin de parcours – est
intéressante, convenons-en:
« Tout
individu a un passé politique, passé qu’il a plus ou moins bien
digéré, y compris au niveau du vocabulaire, ou avec lequel il a (ou
croit avoir) radicalement «rompu» – ce qui n’est pas mon cas,
du moins si vous entendez par là «jeter le bébé avec l’eau du
bain». Il me semble cependant un peu vain de reprocher à son
interlocuteur de n’avoir pas le même passé que vous, ou de ne pas
en avoir tiré les mêmes leçons. Derrière cette idée de la
«rupture» définitive, je sens poindre l’illusion de détenir la
Vérité, qui serait préservée, elle, de toute d’une
«contre-dépendance», réelle ou supposé (…) politique
(et sans doute plusieurs, puisque vous êtes un collectif) dont on
décèle les traces dans vos textes. Vous avez, comme la
plupart des individus ayant pas mal bourlingué, conservé une partie
des idées de votre jeunesse, et une part du vocabulaire des groupes
ou des penseurs qui vous ont influencés, en y ajoutant une dose
d’idées nouvelles, ou qui contrastent fortement avec les
précédentes (…) Vous avez choisi de vous arrêter à mi-chemin
dans votre «révision critique» du marxisme en préservant une
partie de votre héritage antérieur. De votre passé, vous ne faites
qu’en partie table rase, vous aussi (…)
Or cette description
convient parfaitement à ce qu'est devenu Coleman, il est resté au
fond un trotskien donneur de leçons, surtout antiracistes et
antifascistes. C'est à dire un gauchiste de la race supérieure.
Pourtant, ce
parasite imparfait du maximalisme étroit rappelle des constats
historiques moins bien argumentés par le CCI par exemple avec ses
généralités, ou moi-même dans mon histoire du trotskysme en
France.. Toujours dans cette même lettre à TC, il recadre nos
doctes professeurs en comunisation pour leur ignorance de la trahison
nationaliste des trotskysmes d'après guerre: il est toujours
mielleux avec ces négateurs du prolétariat et ne les recadre jamais
sur le sujet car pour lui le prolétariat est...raciste. Mais des
tirades historiques où il fait croire à une distanciation du
trotskisme peuvent leurrer le lecteur informé. Il garde toute son
estime à ses anciens chefs de LO qui « sont des êtres humains
gentils dans la vie privée ».
«Méconnaissance
de l’extrême gauche» et Résistance Vous dites que les
«trotskystes les plus conséquents» (en fait uniquement Lutte
ouvrière, donc ni le PT, ni la LCR ni les autres groupes trotskystes
plus petits) seraient vaccinés contre le poison nationaliste de la
Résistance. Pour LO, je n’en doute pas, quant aux autres, vous me
permettrez d’en douter. C’est bien mal connaître l’histoire du
mouvement trotskyste français et international que de croire qu’il
se serait livré à une solide critique de la Résistance, en tout
cas sur les mêmes bases que celles des «internationalistes du
troisième camp», pour reprendre le titre du trop bref opuscule de
Pierre Lanneret sur le sujet. Sans doute ignorez-vous que le PCI (qui
rassembla après la Libération presque tous les trotskystes français
à l’exception du minuscule groupe Barta, lointain ancêtre
revendiqué par Lutte ouvrière) édita une brochure après guerre
pour expliquer que, s’il n’était pas le «parti des fusillés»
comme le PCF, il avait lui aussi un passé de résistant ? Sans doute
ignorez-vous que les errements chauvins de certains groupes furent
passés sous silence et qu’aucun bilan n’en fut tiré pour
faciliter l’unification de tous les courants de l’époque ? Sans
doute ignorez-vous les débats très vifs au sein du mouvement
trotskyste international pendant et au sortir de la Seconde Guerre
mondiale, autour de la question nationale en Europe ? Sans doute
avez-vous oublié la cour éhontée que fit la LCR à Charles Tillon,
ministre de l’Air pendant les massacres de Sétif, lorsque ce
stalinien mal repenti présida le Secours Rouge dans les années 70 ?
Sans doute ignorez-vous que, encore il y a deux ans, lors d’une
université d’été de la LCR, une affiche critique vis-à-vis de
la Résistance rédigée par une de ses tendances, fut immédiatement
arrachée ? Sans doute n’avez-vous pas pris connaissance du numéro
de la revue Dissidences, publication animée par des historiens
trotskystes ou trotskysants, sur les «trotskystes et la Seconde
Guerre mondiale» ? Comme je leur écrivais: «En ce qui concerne la
position de la majorité des groupes trotskystes par rapport à la
Résistance, il me semble que vos articles sont très complaisants et
vos rares citations soigneusement choisies pour minimiser le
problème. Depuis la Commune de Paris, on sait qu’il existe une
tradition patriotique d’extrême gauche, cela n’a rien de
vraiment nouveau, il suffit de lire Jules Vallès, par exemple. Je
trouve dommage que vous n’évoquiez pas cette continuité, non pas
pour la stigmatiser ou la condamner automatiquement (si vos
rédacteurs partagent cette position, libre à eux), mais au moins
pour montrer l’écart qui sépare les positions de principe du
groupe Barta (ou de la gauche communiste italienne) de celles des
autres groupes. «Cet écart n’est pas simplement dû à des
divergences secondaires, aux réflexes sectaires d’une dizaine de
militants. Il traduit une profonde divergence politique que vous
passez allégrement sous la table. Et cette divergence politique a
des effets encore aujourd’hui, puisque les descendants supposés de
Barta (LO) sont régulièrement accusés d’être des collabos
déguisés, tout ça parce qu’ils se sont refusés (et se refusent)
encore à voir la moindre potentialité révolutionnaire dans la
Résistance. «Et je n’ai aucune tendresse particulière pour les
écrits de Barta qui voyait dans la progression militaire de l’Armée
rouge une avancée pour la révolution socialiste mondiale («La
stratégie communiste a pour tâche de coordonner la lutte de l’Armée
rouge avec le développement de la lutte de classes dans les pays
capitalistes» – 30 juin 1941 – «L’avance soviétique
rapproche l’heure de la révolution socialiste en Europe»– 20
janvier1943 – «Les victoires de l’Armée rouge seront la
victoire du socialisme si les ouvriers des pays capitalistes d’Europe
accomplissent la révolution prolétarienne» –28 février 1943).
On peut difficilement imaginer une position plus dangereuse pour les
ouvriers d’Europe de l’Est – et de l’Ouest – que celle de
Barta. D’autre part, en ce qui concerne la France, il est évident
que si l’organisation de Barta avait eu quelques centaines de
militants, ils auraient été obligés de se poser la question de la
lutte armée, des alliances tactiques éventuelles avec les FTP. Et
cela n’est jamais évoqué dans les textes de l’UC puis de LO sur
la question.» Aucun d’entre vous n’a sans doute jamais milité
longtemps dans une organisation trotskyste, ni ne suit les débats
internes ou publics entre ces tendances. Vous en êtes pardonné, à
chacun sa croix ! Pourtant vous devriez au moins savoir que ces
groupes (LO, la LCR et le PT) qui sont aujourd’hui dominants dans
l’extrême gauche en France ont été complètement modelés par
des gens qui ont connu la période de la Résistance et formé leurs
successeurs à leur image: pour ne prendre que quelques noms,
intéressez-vous à l’histoire de Robert Barcia dit Hardy (LO), à
celle de Pierre Boussel dit Lambert (PT) ou à celle de Pierre Frank,
aujourd’hui décédé (LCR), et vous constaterez que la référence
à la Résistance est essentielle pour comprendre à la fois le
fonctionnement de ces groupes, aujourd’hui, et leur politique,
notamment par rapport à la question nationale, à l’Europe, etc.
Que la référence à la Résistance ne soit pas explicite dans leurs
publications ne signifie pas qu’elle ne fasse pas partie du
patrimoine politique de ces groupes et de leurs plus jeunes
militants. Il est d’ailleurs à noter que dans plusieurs débats
sur le soutien à la prétendue «Résistance» irakienne actuelle,
il a été fait allusion à des comparaisons avec la Résistance
française, y compris dans la presse trotskyste anglo-saxonne –
mais sans doute ne vous intéresse-t-elle pas. Vous dites que le
mouvement altermondialiste ne serait pas marqué par la Résistance
et que seuls quelques maos des années 60 et 70 auraient colporté le
mythe de la Résistance (les «mao spontex» de la Gauche
prolétarienne et les «mao-staliniens» étaient quand même
largement majoritaires à l’époque dans l’extrême gauche, vous
l’avez oublié, et ils ont efficacement poursuivi leur décervelage
chauvinostalinien pendant une bonne quinzaine d’années ;
d’ailleurs on retrouve une minorité d’entre eux… à la
CNT-Vignoles). Lorsqu’on voit le nombre d’anciens maos et
d’anciens staliniens qui militent à ATTAC et dans toutes les
associations liées aux luttes dans le «tiers monde» et y occupent
des postes de petits cadres, on se demande bien d’où a pu vous
venir cette idée baroque. La nature a horreur du vide et, s’il y a
bien une référence politique qui fasse la quasi-unanimité à
gauche et à l’extrême gauche, c’est bien celle de la Résistance
[Comme en témoignent depuis quelque temps les références de plus
en plus fréquentes au programme de collaboration de classes du
Conseil national de la Résistance, janvier 2011]. Pour comprendre un
courant ou une situation politique, il faut tenir compte de
l’explicite et de l’implicite ».
Ce
long extrait montre une connaissance et une qualité d'analyse rares.
Et c'est le cas pour nombre de sujets ou questions ; je l'assure
car je suis un lecteur de l'oeuvre complète du bonhomme (je pourrais
citer des pages entières de sa compil 4 de 2009 sur terrorisme et
violence, l'analyse marxiste y est impeccable). Apparemment, parce
que, sur le fond, tout le discours reste froid, sans passion. On est
dans le débat d'idées pas dans la sueur à fond de cale.
Ces
félicitations faites il n'en reste pas moins donc une gêne, le
versant démiurge du personnage. Petit éditeur autogéré de
quartier, capable d'un boulot soigné, belles couvertures glacées,
aucune faute (il est correcteur chez Gallimard), il publie largement
(nombre limité)- de l'ex Charles Reeve (Joao Bernardo) qui n'est pas
n'importe qui, créateur de Combate, seul vrai groupe révolutionnaire
au Portugal dans les années 1970 et un des meilleurs mémorialistes
de la magnifique lutte des ouvriers portugais en 1974 - jusqu'à
Michel Roger (et moi à mon insu alors qu'il me déteste) pour un
ouvrage consacré à Marc Chirik.
Pourquoi
ce malaise donc ? Mais parce qu'il pontifie, polémique
gentiment avec universitaires et sectes modernistes. Sous
l'expression d'idées politiques repiquées au maximalisme, ce n'est
pas une conscience de classe qui l'anime mais une conscience
« culturelle », moraliste qui repose sur les mêmes
catégories mentales que la moyenne des gauchistes :
l'antiracisme, la dénonciation, comme Mélenchon, de tout
contradicteur comme fâchiste ; sous des écrits patelins il
sait se montrer très hargneux et violent. En effet comme il l'a dit
lui-même plus haut ; on ne peut jamais effacer complètement
son passé...trotskyste.
L'épicerie
portugaise : Radio Vosstanie
Le
créateur de cette radio (radio libre) a grenouillé dans
l'anarchisme puis aurait été éclairé par les textes
« conseillistes » des hollandais et divers auteurs côtés
dans les bréviaires des résidus ultra-gauches de la fin du siècle
dernier. Sur son blog, il avoue quand même avoir été à deux
réunions du CCI et aurait pu ajouter que je l'avais invité à
dîner. S'estimant déjà très important il n'allait pas s'abaisser
à demander à adhérer à l'organisation la plus claire du
maximalisme, en vue de son envol comme radioman en 2009. Il a pompé
les idées principales du CCI en laissant de côté la question
horrible du parti. Lorsque je l'ai reçu j'aurais été bien en peine
de le contredire car je venais de quitter un organisme comme devenu
fou, alors que je persiste à penser que sans partis pas de
révolution possible. Lui, oubliant l'apport théorique fondamental
du CCI, balaie d'un revers de main un groupe parano composé « que
de profs » !
« je
fais ce préambule c'est pas pour éviter ta question sur le CCI
c'est pour dire que le CCI bien sûr a été sur le chemin (j'ai du
faire 2 ou 3 réunions publiques) et ça été très très rapide de
zapper cette orga complètement léniniste, paranoïaque et quasi
complotiste. Ce n'est pas propre à cette orga. C'est simplement le
destin d'une orga qui n'est confrontée à rien si ce n'est, la
construction du saint parti et qui sécrète ses propres méthodes,
fantasmes, mode de survie pour exister. Je ne parle même pas ici de
sociologie parce que là c'est encore plus gros ! Y a pas d'ouvriers
au sens sociologique chez eux et c'est même pas une critique
ouvriériste que je fais, mais ya que des profs et des cadres de la
fonction publiques comme dans toutes ses scissions du genre PI ! »
Sa
radio et son site sont bien léchés, faciles à consulter. Il est le
seul à ma connaissance en France à avoir créé une radio militante
qui se veut subversive et démocratique ; il faut remonter
quarante années en arrière pour rappeler l'éclosion passionnée
des « radios libres » vite absorbées par le système. On
y invite tel minable petit groupe ou des intellectuels à la
notoriété négligeable, même les petits profs modernistes de TC.
De quoi finir par « s'y croire » ; comme disait
Aznavour : « je m'voyais déjà en haut de l'affiche »
Et
ce qui devait arriver arriva. Perclus de rhumatismes politiques Joao
Bernardo pointa son nez dans la boutique, tout heureux de trouver un
sponsor confraternellement lusitanien. Radio Vosstanie, malgré la
liste des bons auteurs classiquement conseillistes qu'il fait lire à
sa groupie, est devenue radio Lisboa. Toute la place est de plus en
plus réservée a questions portugaises. Et cela convient à Joao
pour qui la révolution au pays en 1974 a été l'événement du
siècle passé. On peut désormais acheter tous les livres en
portugais qu'on désire si on n'aime pas la traduction française.
Bon soyons charitable, chaque compagnie ou groupuscule peut admirer
son pays sans être tout à fait nationaliste ; le CCI n'a-t-il
pas écrit dernièrement que la France est le pays type des
révolutions ?
Comme
je l'ai déjà dit Bernardo n'est pas n'importe qui, c'est un vrai
écrivain. J'ai adoré ses premiers petits livres, c'est une plume.
Mais pas en politique. La place de l'histoire de Combate est devenue
principale, fabulatrice (ils n'étaient que trois) et typique de
prétentions spontanéistes à créer une non-organisation
anti-léniniste mais en réalité pire que léniniste avec des
conseillers secrets ou masqués à la mode bakouniniste, de plus
autogestionnaire débile ; il suffit de lire la description
qu'en fait l'ami Bernardo (ils s'appellent soouvent comme cela au
Portugal ou au Brésil, ou Da Silva) :
« Combate
ne comptait ni permanents ni journalistes professionnels, et
n’importe qui pouvait coopérer avec nous tant qu’il respectait
les principes généraux de notre Manifeste. Les tâches étaient
réparties équitablement entre tous et il n’y avait pas de
responsables; le nom du directeur de publication était fictif et
uniquement destiné à répondre à une exigence légale. Toute
personne participant à nos réunions pouvait donner son avis et
voter - à condition qu’elle prenne en charge une tâche. Certes
nous avions un groupe stable de camarades qui se rencontraient au
moins une fois par semaine, mais d’autres personnes collaboraient
de façon sporadique ou étaient présentes seulement lorsque nous
discutions de certaines luttes. Nous avions un collectif dans le Sud
(à Lisbonne) et un autre dans le Nord (à Porto). Parfois, des
travailleurs d’une entreprise donnée venaient discuter de leur
lutte et ils nous aidaient ainsi à préparer le prochain numéro.
Sur les huit pages de Combate, sept traitaient des luttes dans les
usines, les champs, les casernes et les quartiers, et une était
consacrée à l’éditorial. Bien que le contenu de ce texte fut
discuté par toutes les personnes présentes, il est probable que la
procédure aurait pu être plus démocratique, mais il est clair
qu’avec les pressions du moment, les circonstances politiques
constamment changeantes et la nécessité d’accomplir les tâches
et de respecter des délais, une seule personne (généralement la
même) rédigeait F édito. Rétrospectivement, il nous semble qu’il
aurait été préférable de demander à certains groupes de
travailleurs de participer davantage et peut-être même d’écrire
leurs propres éditoriaux sur les événements en cour ».
C'est
du bla-bla
qui sert à masquer la futilité et la maigreur de leur intervention
réelle. Tout pour abuser notre naïf radioman qui avait déjà été
abusé lors de l'interview des trois alcoolos de Boulogne sur mer qui
lui avaient fait croire qu'ils écoulaient 250 exemplaires par mois
de leur revue anar, dans une cité où même Voici a du mal à se
vendre.
RI, pas encore CCI à
l'époque, avait salué l'apparition de Combate,
et nous avions reçu en réunion de section un de ses représentants.
Mais très vite perçu ses faiblesses politiques :
« Alors
que pour "Combate" la presse est essentiellement un
instrument d'information et de description, elle est pour nous un
instrument d'intervention et d'orientation politique.La question
n'est pas une différence entre ouvriers en lutte et "professeurs",
mais entre immédiatistes qui se contentent d"'informer" et
groupes politiques qui disent leur nom et qui, au sein de la classe
et dans ses luttes, défendent une orientation révolutionnaire ».
Combate
ce n'était pas que de faux conseillistes mais des léninistes à
leur façon, comme ne le souligne pas assez RI à l'époque; ils sont en réalité des bakouninistes manipulateurs avec la fable de "l'autonomie ouvrière" et les pieds dans le merdier de l'autogestion:
« Leurs
articles révèlent, aussi, une tendance à voir la crise
actuelle au Portugal comme un phénomène portugais plutôt
que comme une manifestation de la crise mondiale du capitalisme et
plus encore, il semble qu'il y ait une conscience limitée du fait
que les problèmes que rencontre la classe
ouvrière au Portugal peuvent seulement être résolus au niveau
international. "
(World Révolution, introduction à l'article de
"Combate" : "quels conseils ouvriers ? ")
Ce que nous disions a été
confirmé par l'évolution ultérieure de "Combate". Les
camarades du CCI ont rencontré et ont discuté à plusieurs
reprises avec "Combate" depuis l'été 75. Mais,
malheureusement, ces discussions fraternelles n'ont fait que mettre
en évidence une propension, de la part de "Combate",
au localisme, à la stagnation théorique, et à
l'éclectisme. Dans la situation portugaise, qui requiert de la part
des révolutionnaires des idées particulièrement claires, ces
traits négatifs ont conduit rapidement à l'apparition et à
l'élargissement d'un décalage entre les activités de "Combate"
et les besoins de la classe ouvrière ».
UN
LOCALISME CHAUVIN ET ANTI-MARXISTE
Notre
docte Coleman publie une série d'âneries de Bernardo sans appareil
critique. Dans le fascicule « Anticapitalisme : Anti
quoi ? », on lit que le marxisme est contradictoire et
ambigu. Souvent le ton est arrogant façon « je vous l'avais
bien dit ». Sur l'économie, un sujet que Bernardo ne maîtrise
pas apparemment on a droit chaque fois à un charabia insolite et
obscur qui se ridiculise par cette fleur de rhétorique anarchiste: « le capitalisme
ne connaît pas de crise générale aujourd'hui » ! (p.24)
Le
fond de pensée de l'ex Charles Reeve est lamentablement gauchiste
primaire et étranger à la classe ouvrière :
« D'un
côté les secteurs ouvriers traditionnels, qui donnent à la classe
ouvrière un arc de continuité historique, se sont tournés vers
l'extrême droite populiste voire vers le fascisme. Ce qui devait
être notre base naturelle est l'un des piliers qui soutiennent nos
pires ennemis ».(p.25)
Commentaire
digne de n'importe quel con de gauchiste. Cette bêtise antifa de
salon (où il est votre fascisme récurrent?) fait suite au gommage
de la classe prolétarienne par les thinks tank socialo-bourgeois,
renforcé par le fait que tous les partis y compris gauchistes l'ont
laissé tomber, permettant au RN de récupérer provisoirement la
mise et sur des questions réelles comme l'immigration massive et ses
conséquences qui ne sont que des expressions de racisme pour les
bobos Colemant et Bernardo. Pourtant il faut noter que Bernardo a de
beaux restes et reste ferme sur la dénonciation du féminisme
bourgeois et de l'écologie où, par contre le CCI a mis du formol
dans son vin. Il fait par ailleurs une parfaite description de la
crise gestionnaire de la gauche (qu'il nomme dysfonction du
capitalisme) assez imagée et conforme à ce qui se passe en ce
moment en France ; mais cela finit en catastrophe, le vieux
dinosaure portugais reste un homme pour la gauche « restaurée »
ou restaurable : « La
gauche ne reviendra à sa vocation première de soutenir les luttes
ouvrières au lieu de gérer le capital, que lorsqu'une nouvelle
étape des luttes amènera les travailleurs à assumer à nouveau la
dimension sociologique de la classe ».
La
« dimension socilogique de la classe » ? Même
Bourdieu n'aurait pas osé dire ça ! Le plus ridicule est à
venir. Une des principales cuistreries de la gauche hollandaise, pas
la conseilliste mais du type au scooter: les races n'existent pas !
C'est sûr depuis que la gauche bourgeoise antiraciste a supprimé le
mot de la constitution ! Fallait y penser dès le 18ème siècle
merde ! Et que je te recopie des pages de livres savants
prouvant que « ce sont les racistes qui ont inventé les
races ». Bien sûr qu'elles existent les races, ou alors du fait que les chiens ont quatre pattes il faut supprimer le mot pattes qui risquerait d'être confondu avec les pâtes Panzani! Voir les différences morphologiques et la longueur des poils qui différencient les diverses races de ces animaux serait alors discriminatoire? Cette théorie wokiste qui veut gommer les différences visibles et évidentes mais en surface est débile; avec Bordiga nous répondons par contre il n'y a qu'une seule espèce humaine. Tant pis pour les martiens du wokisme et leur victime Bernardo.
Bernardo
pose quand même au passage une question intelligente, sans être
capable d'y répondre : le racisme est-il inhérent au
capitalisme ? Non puisqu'il a existé de tout temps même s'il
ne portait pas ce terme mais des variantes de xénophobie...et qu'il
n'est pas prêt de disparaître ! Surtout par le fait que les
grands patrons et leurs obligés syndicalistes gauchistes sont
outrancièrement antiracistes. Le racisme n'est pas issu en soi du
colonialisme, car comme il le note lui-même dans ses recopiages les
pires racismes existent et ont existé en Afrique (« composante
structurelle de ces sociétés »)..
Sous
la domination des médias capitalistes, la question du racisme reste
toujours confuse. L'antiracisme est un misérable mantra qui fuit la
réalité du racisme qui n'est pas un mal en soi mais une étrangeté.
Or la question est pourtant simple : Je suis raciste parce que
je ne connais pas l'autre ou qu'il me fait peur. Lorsque j'apprends à
le connaître je ne peux plus être raciste.
Enfin,
et c'est triste, notre gentil libertaire Bernardo qui a dû fuir le
fascisme de ce salaud de Salazar, est incapable d'en fournir une
définition claire par rapport à son époque et ne fait que réciter
ce hochet à gauchistes illettrés.
NOTES