« Lorsque
les gilets jaunes virent arriver la CGT, ils se dirent le gilet est
des nôtres ».
Proverbe
turc
Le
canular raté de l'appareil syndical
On
m'a viré du groupe de soutien à Eric Drouet parce que j'ai osé
dire que Drouet s'était pris pour Bonaparte à l'assaut de l'Elysée
où Macron « attendait qu'il vienne le chercher », et
parce que j'ai aussi estimé que la nouvelle coqueluche en jaune à
la mode des médias – mis en selle par Drouet – un jeune
avocaillon du nom de François Boulo, se prenait à son tour pour
Napoélon.
Les
créateurs de groupes de discussion vont être bientôt aussi
nombreux que les disputailleurs. Il s'en crée tous les jours, et
cela donne parfois des croisements cocasses où quelqu'un vous répond
alors que vous ne l'avez pas sonné ni interpellé.
Elle
est donc terminée, sobrement ce mardi soir, la simple et
traditionnelle « journée d'action » CGT que d'aucuns
qualifièrent de « gréve générale » illimitée –
TOUS ENSEMBLE (et avec
Besancenot toujours sur son petit strapontin |
La CGT et deux ou trois confréries syndicales corporatives du NPA mais aussi une foule d'internautes avaient tant salivé à cette blague de « convergence des luttes » inventée par l'appareil CGT ; et aussi notre nouveau président de Groland BFM, l'avocat François Boulo (voir son appel comique troupier ci-joint aux couleurs nationales, vu par un million huit cent mille internautes!) . Il faut reconnaître qu'on vit dans un monde schizophrénique où des univers différents évitent de se côtoyer. Il y aurait parait-il un grand débat national citoyen alors que tous les soirs les chaînes d'infaux ne diffusent qu'un soliloque d'un type qui se fait passer pour le président de la France, jusqu'à saturation. L'overdose du pédagogue bavard en costard-cravate qui-a- réponse- à-tout fait monter le score des chaînes diffusant des feuilletons américains, mais cela la SOFRES ne sait pas le comptabiliser. Marginalement une « famille » gilet jaune organise aussi son débat « citoyen » avec une possible synthèse électronique dans un mois, quand la synthèse gouvernementale elle sera tout simplement improbable et noyée.
Panneau typique sur FB, ce qui s'appelle "tomber dans le panneau". |
De
l'invention de la grève perlée à celle de la grève pleurée
Les
grands penseurs de la CGT – qui innovent à chaque fois pour
converger vers la défaite – ont imaginé faire contrepoids au
samedi en gilet jaune par un semainier en badge CGT. Il
s’agit là d’un premier «
mardi de l’urgence sociale », que
la CGT propose de réitérer chaque semaine, en parallèle au grand
débat national organisé par l’exécutif, qu’elle boycotte, et
pour niquer l'exclusivité des weekends en gilets jaunes.
L'appareil syndical dit préférer réclamer «
sur le bitume »
des revendications que partagent les « gilets jaunes » :
augmentation du smic, réforme de la fiscalité, rétablissement de
l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), développement des
services publics, liberté de manifester, et les noyer dans des
actions tout azimuts et sans aucun sens , comme elle a su si bien
désorganiser toute lutte commune sur les retraites et enterrer
lentement et à petit feu la protestation des cheminots.
Le
sosie de Staline, moustache d'époque certifiée mais gentil comme
tout1,
Martinez, a rappelé que des «convergences» étaient prévues
entre les «gilets jaunes» et les manifesttaions dans «une
trentaine de départements»: «je suis intéressé par le mouvement
quand il porte des revendications sociales, mais je ne suis pas
fasciné par une minorité qui porte autre chose, qui ne fait pas
partie des valeurs de la CGT», ajoutant que les mobilisations «le
samedi, c'est bien, mais la semaine, c'est mieux». Le bonze syndical
n'a pas dit combien de militants avaient été chargés d'enfiler le
gilet jaune.
Plus
de 160 défilés d'encartés ont été organisés partout en France.
A Paris, le cortège est parti à 14 heures de l’Hôtel de
Ville en direction de la place de la Concorde. Il a rassemblé à
peine une dizaine de milliers de personnes, avec quelques tâches
jaunes au milieu. L'enfumage de la convergence des non luttes
syndicales et de la protestation en gilet jaune n'a donc pas trop
réussi, sauf chez les commentateurs journalistes et les idiots
porteurs accessoires de gilets jaunes. A Marseille et Lyon le
syndicat a surtout draînés ses badgés habituels, retraités et
employés municipaux.
Proclamé
avec Solidaires et une partie de Force ouvrière, soutenu par le
NPA, le PCF et la France insoumise, cet appel à la grève nationale
a été repris par les gilets jaunes sur les pages Facebook dédiées
au mouvement. Eric Drouet, une des tronches vues à la télé,
faisait rêver ses potes à partir de la caméra de son portable
depuis la fin du mois de janvier pour faire de balade CGT le point de
départ d'une grève générale illimitée, notion à laquelle il
n'avait pourtant jamais réfléchi de sa vie. Un autre bateleur de
foire en rajoutait :
« Un
sacrifice à faire aujourd'hui pour notre avenir et celui de nos
enfants et petits enfants », estimait François
Boulo,
avocat porte-parole des jaunes gilets à Rouen à l'initiative de cet
embryon de convergence des colères, syndicales et non syndicales.
L'avocat de 32 ans croyait à un "moment historique" et
semblait, par cette initiative, en vue de ravir la casquette à Fly
rider au sein du mouvement
bigarré
qui jusqu'ici avait peiné à faire émerger des leaders incontestés.
Cet homme, âgé d'à peine 32 ans, alla jusqu'à affirmer « on
vote depuis 40 ans et on est trahi nous les classes moyennes ».
Ce n'est un secret pour personne il était déjà citoyen dans le
ventre de sa mère.
Les
journalistes étaient persuadés que les gilets jaunes ne boudaient
plus les syndicats
Tout
était parti d'une vidéo publiée le 22 janvier par Le
Média,
un
site d'informations proche de la France insoumise. Dans cette
séquence visionnée près de 2.000.000 de fois, ce sous-marin de
LFI, François Boulo estimait qu'il était « temps que la
résignation change de camp et d'en revenir au respect de l'article 2
de notre Constitution selon lequel le principe de la République est:
'gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », du
Mélenchon et du Maduro mélangé. Il préssentait la grève générale
illimitée comme le seul moyen de gagner la bataille, aussi l
sortit-(il de son chapeau. La vidéo qui aurait
fait mouche dans le marais des gilets jaunes. Outre Éric Drouet qui,
lui aussi avait sorti le concept de grève générale illimitée de
sa casquette de routier, sans nommer les syndicats, avait rapidement
appelé à la mobilisation, de nombreux internautes se sont emparés
du sujet, voyant en cette promesse de grève générale illimitée et
miraculeuse une façon de se renouveler, mais surtout de contraindre
l'enfermé de l'Elysée à accéder à leurs revendications confuses.
« BON. On a tous
compris que les choses sérieuses commencent MARDI 5 FEVRIER avec la
Grande Grève Générale Illimitée!", lance par exemple un
gilet jaune radical sur la page Facebook "La France en colère -
Carte des rassemblements", une des plus populaires du mouvement.
Son message a été partagé près de 3000 fois et a suscité quelque
1500 commentaires, un nombre d'interactions assez élevé pour une
personne qui ne fait pas partie du quintette des visages connus de la
mobilisation à l'image de Maxime Nicolle, Priscillia Ludosky ou
encore du galeux Benjamin Cauchy.
L'appel
de François Boulo avait, supposait-on, créé une petite brèche
dans la défiance qu'entretenaient les gilets jaunes envers les
syndicats. Sachant que l'extinction des révoltes sociales vient
toujours des camions à eau des pompiers de gauche, l'avocat tendait
ses bras fragiles sur la nomenklatura syndicale. Les sondages réptés
de Drouet depuis son camion semblaient confirmer une ouverture de la
masse en jaune à communier avec les appareils syndicaux.
Au-delà
de ces appels à cesser le travail pendant une durée indéterminée
qui, malgré une forte mobilisation virtuelle allaient perdre des
plumes à l'épreuve du terrain et du réel, certains internautes
plus avisés plaidaient pour une grève bobo naturopathe de la
consommation. Celle qui consiste à ne plus faire ses emplettes dans
les hypermarchés pour privilégier les producteurs locaux et autres
circuits courts. Une façon de s'en prendre, là aussi, à l'économie
du pays macronien, stratégie notamment défendue par Maxime Nicolle
à l'initiative du "référendum
des percepteurs" ou Priscillia Ludosky, fervente défenseure
des blocages de ports, frontières et autres points sensibles pour le
transport de marchandises.
Moi président gilet jaune. |
Boulo,
en tête d'un sondage organisé par Drouet
Selon
une presse légère et provinciale hésitations stratégiques et
atermoiements auraient fécondé la divine apparition de l'avocat
rouennais François Boulo qui semblait fédérer dans sa Normandie
natale tous les adeptes d'un langage châtié, davantage que les
porte-parole officieux de la contestation. Il est peu à peu devenu
une star des pages Facebook dédiées au mouvement. Ses interventions
médiatiques, pourtant pleurnichardes citoyennes, se diffusèrent
comme des traînées de poudre sur les réseaux sociaux ; la
traînée de poudre est bien lamentable, je vous en inflige des
extraits seulement en note2.
Des extraits qui servent à louer, n'est-ce pas, la clarté et la
combativité du jeune avocat, finaliste en 2014 d'un concours
d'éloquence!
Il a
également été adoubé par le tronc télé, sans doute le plus
connu du mouvement anti-taxe, Éric Drouet. Le chauffeur-livreur qui
avait notamment vanté les mérites de la prestation de l'avocat dans
l'émission exceptionnelle de "Balance Ton Post" avec le
fin Cyril Hanouna et la brillante sous-ministre Marlène Schiappa, a
notamment effectué un sondage depuis son camion pour savoir quel
serait le meilleur représentant du mouvement à la télévision.
François Boulo est arrivé largement en tête des votes. Il a
recueilli deux fois plus de voix que les mousquetaires Drouet,
Rodrigues, Ramous, Nicolle, Ludosky.
François
Boulo avait fustigé, lors d'une magnifique apparition télévisée,
l'idée de créer une liste 3. Ce qui ne l'avait pas empêché ce jour devant les caméras de BFM de déplorer les mille blessés policiers et les suicides dans la police qui sont certainement la première préoccupation des manifestants tabassés et gazés par ces mêmes policiers (un avocat ne défend-il pas n'importe quelle cause?); il aura tout le temps de pleurer la grève générale illimitée et
disparue avant d'être née.
gilets jaunes ou apparentée aux
élections européennes 2019, expliquant que le "seul moyen de
se faire enfin entendre par le pouvoir exécutif" était "la
grève générale illimitée", idée absconse dont il n'avait
pourtant jamais eu connaissance ni souci pendant ses études
d'avocat. Ce mardi soir on peut penser raisonnablement qu'il pourra
ranger sa robe et son bavoir d'avocat dans sa penderie en n'oubliant
pas d'y mettre des boules de naphtaline, et aussi qu'il devra penser
à se recycler ailleurs que dans les matinales des radios
périphériques
L'apolitisme
un danger pour le prolétariat ?
Il
y avait jusque là les appareils syndicaux pour se boucher le nez
face à ces gilets jaunes louches et non badgés. Les syndicaux c'est
normal ils sont les gardiens du prolétariat, chargés de le parquer
par entreprises, par corporations pour assurer que la paix sociale
est une garantie éthique qui empêche les gens de s'entretuer. Il y
a pire que les syndicats toutefois, des sectes à la marge qui
pensent à la place du prolétariat. Le CCI, dont je vous ai déjà
vaguement parlé ici, a été très incommodé par la méfiance du
politique de la part de ce marais gilet jaune composé surtout
d'épiciers et d'ouvriers anti-immigrés.
« Comment
expliquer une telle méfiance ? Totalement dégoûtés par des
décennies de mensonges de la part des partis bourgeois officiels,
par des tas de promesses jamais tenues suivies d’attaques
systématiques bien réelles, par des affaires en tous genres et une
corruption croissante, sans parler de la langue de bois des
démagogues et la froideur des technocrates, cette partie de la
population qui compose les “gilets jaunes” s’est sentie non
seulement paupérisée mais aussi méprisée. Par un rejet quasi
instinctif vis-à-vis des “politiques”, les “gilets jaunes”
entretiennent finalement l’illusion qu’ils ne sont animés
d’aucun “parti pris” politique, et se considèrent seulement
comme de simples “citoyens” excédés par la misère et les taxes
en tous genres. Ils ne chercheraient uniquement qu’à se défendre
et à manifester leur colère »4.
Ce
rejet n'est pourtant pas raisonné par les bestiaux gilets jaunes,
c'est « instinctif », qui ont de plus le culot de se
prétendre citoyens et qui ont la prétention de « se
défendre », qualité comme l'on sait réservée à la seule
classe ouvrière, la pure et l'incorruptible. Attention nous explique
le rédacteur, c'est un mensonge cet apolitisme, au vrai c'est un nid
de fachos qui veulent à tout prix la démission de Macron. En gros
le même discours que tous les gauchistes et du NPA au début de la
fronde des gilets jaunes, quand tous ces ânes ne voyaient que méprisable mouvement anti-taxes (qui servent à payer leur métier de profs) alors que des milliers d'ouvriers ne pouvaient plus faire le plein pour aller au travail... La réflexion n'a pas trop progressé dans
la secte « internationaliste » et « prolétarienne » !
Ils ne sont pas tous fachos quand même ces anti-taxes ?
« En
réalité, dans le mouvement composite et interclassiste des “gilets
jaunes” n’existe pas une, mais des
expressions politiques
diverses et variées, un véritable kaléidoscope reflétant les
nuances multiples provenant des couches intermédiaires que forment
notamment la petite bourgeoisie et dans laquelle se sont égarés
beaucoup d’ouvriers qui, en raison du vide laissé par la classe
ouvrière, sont réduits à rester de simples “citoyens” attachés
à la “nation” ».
J'eusse
aimé qu'on m'explique ce « vide laissé par la classe
ouvrière » - cette classe aurait-elle dû manifester à la
place des gilets jaunes envoyés dans un goulag ? - et pourquoi
tant d'ouvriers, intimement concernés par la hausse des taxes, sont
ainsi méprisés de « s'être égarés » au milieu de
(sales?) couches intermédiaires ?
Rien
n'empêche les ouvriers qui participent ou ont participé à ce
mouvement de poser leurs revdnications de classe, et ils l'ont fait
souvent, et même de façon prédominantes ces derniers temps par
rapport au gadget effectivement petit bourgeois du RIC, au point que
le barnum CGT est venu pour conforter l'aile petite bourgeoise avec
sa revendication de citoyenneté. L'apparition « fraternelle »
de la CGT n'est pas en soi une « tentative de récupération »
comme pourrait le laisser croire de vieux schémas applicables aux
grèves, mais une manière autrement plus efficace que le mépris du
CCI de flinguer la question de l'extension de la lutte (certes en
grande partie minée par la revendication petite bourgeoise de la
citoyenneté) au domaine de la lutte de classe prolétarienne. La CGT
ne fait pas alliance mais contre-feu !
A
la suite des éditorialistes de la presse bourgeoise la plus cucul la
praline, notre contempteur de ces affreux gilets jaunes charges
Maxime, Fly rider, de tous les péchès, de répandre des idées
réactionnaires... Il ne faut pas quand même exagérer l'importance
du bonhomme ; comme nobre de jeunes youtubers et autres
internautes farceurs ils font circuler des fake news ou des conneries
qui ne tiennent pas la route ; on ne peut leur reprocher les
facilités vulgaires du net. Et de dénoncer une série d'apprentis
politiciens, mais sans le démontrer ni nous expliquer pourquoi ils
renoncent tous à tour de rôle.
LES
GILETS JAUNES = souillure morale ?
« Une
chose est certaine, le prétendu “apolitisme” n’a
malheureusement pas d’autre effet que de déposséder les ouvriers
mobilisés et de les diluer dans un magma informe, allant du lumpen
proletariat aux
petits patrons, en les privant de leur autonomie de classe et de
leurs propres moyens de lutte. Comme elle n’est pas un mouvement de
la classe ouvrière, cette protestation n’a pu prendre que la forme
disséminée de piquets, d’attroupements, de poussées violentes et
aveugles, de guérillas urbaines, de casse et de pillages sur fond de
chants nationalistes et même parfois de propos xénophobes. Qu’un
tel mouvement puisse s’accommoder d’expressions politiques
réactionnaires et xénophobes de la pire espèce, de chants
patriotiques et nationalistes sur les Champs-Élysées notamment,
sans s’en démarquer ni les rejeter fermement de manière
explicite, témoigne
de la souillure morale qu’un tel mouvement,
au-delà de sa colère légitime, peut véhiculer. Même si la
période est totalement différente aujourd’hui, le prolétariat ne
doit pas oublier que c’est au nom de “l’apolitisme” que le
fascisme s’est imposé dans les années 1930 ».
Saisissons
à la racine ce raisonnement machiavélique stupide. Il est en gros
reproché aux ouvriers, qui ont participé souvent en grand nombre à
la protestation, de s'être laissé avoir par « l'apolitisme »
et de s'être privé de leur « autonomie de classe » !
Franchement c'est typique d'une vue de l'esprit d'intellectuel petit
bourgeois, aussi incapable de juger autant des déterminations pour
un ouvrier d'entrer en grève. Lorsque la lutte a commencé on ne
s'est pas posé la question est-ce que c'est apolitique ou pas, la
protestation contre la hausse de l'essence était son essence (philo)
imbéciles ! La description qui suit a été faite par tous les
journaux qui sont lus à Neuilly, quoiqu'avec un peu plus de
diplomatie, ce sont les lecteurs carrément bourgeois qui au bas des
articles dénonçanet des « poussées violentes et aveugles »,
« une guérilla urbaine » (ouh que ça fait peur aux
membres en charentaises du CCI!), « casse et pillage sur fond
de chants patriotiques et nationalistes » ! A ma
connaissance même les gauchistes les plus critiques n'ont pas osé
écrire des conneries pareilles dignes d'un instituteur pétainiste.
Le
fascisme s'est-il imposé naguère grâce à l'apolitisme ?
Tiens
voilou une nouvelle invention de la secte ! C'est la théorie
des staliniens et de leurs héritiers maoïstes. Tout est toujours
politique et celui qui refuse la politique (surtout celle du parti)
est un fasciste. Il
y aurait de façon prégnante un
prétendu apolitisme qui sert à l’extrême droite pour se placer
au-dessus de la mêlée et profiter de la défiance largement
partagée (et justifiée !) à l’égard de la classe politique ;
c'est attribuer bien trop d'importance aux agents électoraux de Mme
Le Pen, qui veulent juste une proportionnelle intégrale dans le même
régime capitaliste corrompu et sans le changer d'un iota. N'est pas
Hitler qui veut.
Réduire
la victoire du fascisme naguère à un viol des foules
« apolitiques »
est digne d'un psychiatre comme Reich mais pas très conforme à la
vérité politique. Qu'il y ait un un rejet du politique après
l'écrasement des spartakistes ne veut pas dire que c'est ce rejet
qui a facilité la victoire du nazisme. Le nazime a opéré à un
« remplacement » du politique ou même à un replacement.
Les nazis reprirent
à leur compte tous les supports symboliques révolutionnaires en y
faisant passer leur programme réactionnaire. Ils avaient
effectivement compris que devant des foules de plus en plus
apolitiques, de moins en moins enclines à se donner les moyens de
classe en vue d’une révolution communiste, il fallait jouer sur
les sentiments, la croyance en une libération prochaine facile et
méritée, faire naître un nouveau mysticisme issu de la religion,
et non en appeler à leur raison matérialiste, comme les communistes
l’ont cru à tort.
On
ne peut pas imaginer que les faibles théoriciens proches du RN comme
Chouard puissent faire rêver à un mysticisme citoyen rédempteur et
émancipateur, ni que les appels de Jérôme Rodrigues à « un
juste salaire » provoquent le nirvana des foules en gilets
jaunes.
Le
mouvement des gilets jaunes a certes fonctionné depuis le début sur
la base de cliques d'amis, motards et routiers, et cela ne correspond
pas à la manière de lutter de classe ouvrière qui se méfie des
côteries, non seulement parce qu'elles ne sont pas démocratiques,
mais parce qu'elles ne permettent pas une réelle délégation de
responsabilités et de représentation. Les ronds points ont
fonctionné comme les clubs sportifs du tout début du cercle dernier
en maintenant un apartheid régional et sans vraies coordinations, ce
qui n'a été entrepris que dans le cas de Commercy, expérience sur
laquelle il faudra revenir sans la jeter à la manière du CCI comme
simple socialisme municipal. Les gens venaient aux manifs en groupes
sans concertation et repartaient dans leurs régions respectives sans
qu'il y ait eu d'autres moments de rencontres que les bagarres avec
les flics.
L'apolitisme
était nommé en d'autres temps neutralisme. Ce neutralisme dans les
années 1930 était anti-parlementaire et trouvait des partisans dans
les deux extrêmes de l'échiquier politique, sans qu'on puisse le
relier au seul fascisme. L'apolitisme est duplicité, il est rejet du
politique mais pour faire rentrer une vraie politique par la
fenêtre ; il peut être l'ambiguïté même d'un groupe
révolutionnaire qui, se disant anti-syndical, n'en veut pas moins
créer son propre comité syndical.
Les
lieux de lutte des gilets jaunes ont pris, comme les groupes sportifs
des années trente rétifs aux récupérations politiques facsistes
ou staliniennes, une forme communautaire, de lutte contre la
solitude, comme l'a fort bien remarqué Jérôme Rodigues. Cela, la
secte politique ne peut pas le comprendre et condamne aussitôt comme
« fasciste intégral » un mouvement dont elle a été
absente et surtout qu'elle était bien incapable de comprendre avec
son marxisme bègue et bête. Le souvriers aussi dans leurs longues
grèves vivent et se réjouissent d'un aspect communautaire de la
lutte, de se réchauffer ensemble autour d'un brasero, de ne pas
s'endormir seul tous les soirs, de veiller tard en refaisant le
monde.
L'apolitisme
se conjugue aussi avec dépolitisation qui souvent mène à une
re-politisation sur des bases plus saines ou enrichies des erreurs
des périodes de « politisation » forcée et forcenée.
Le mouvement gilet jaune a effectué un « retrait » du
politique, qui n'est pas fini, qui montre de grands élans de naïveté
comme témoigne ce désir de reconnaissance à travers un beau
parleur comme l'avocat (quoique pour retomber dans la même mélasse
politicienne). Le retour en politique ou la capacité à s'approprier
en termes de classe la lutte politique dépend de l'existence de
luttes de la classe (prolétarienne) ce qui est loin d'être le cas
même s'il y a toujours des grèves, et de la capacité des
révolutionnaires, s'il en reste, à comprendre que la classe
ouvrière n'est pas seule victime du capitalisme. Le CCI, avec son
raisonnement d'enfermé, c'est un Krontsadt par semaine et des
goulags mentaux en permanence.
L'apolitisme
a de solides lettres de noblesse. L'Espagne depuis les années 1870
est considérée comme apolitique, ce qui expliquera la pénétration
rapide de l'anarchisme et sa grande influence contrairement aux
autres pays européens. L'insubordination y est longtemps la seule
forme d'expression politique des masses. Lorsque la CNT est créée
en 1910, son programme tient en trois mots : fédéralisme,
action directe et apolitisme. Au début ce mouvement est contre toute
forme de terrorisme et se cantonnera dans un réformisme prudent, ce
qui n'empêche pas la CNT d'adhérer carrément à l'Internationale
communiste en 19205.
Il ne
faut pas mépriser l'apolitisme en général, il y a des apolitismes
qui ne peuvent nous leurrer, qui peuvent véhiculer n'importe quoi.
Il y a un apolitisme historique et traditionnel dans le prolétariat,
chose remarquée par Trotsky durant la révolution russe, preuve que
cette classe ne peut pas vivre seulement de politique et première
candidate à la fin de la politique. Même ceux qui se vivent comme
apolitiques ne sont pas hors de la société politique, ni des fachos
déguisés, cela c'est la théorie stalinienne qui l'affirmait. La
secte CCI elle s'inscrit dans le même genre de croisière morale
avec des termes de curés (souillures, effluves nauséabondes..)6.
En réalité ils sont frustrés de ne pouvoir mobiliser personne avec
leurs concepts étriqués et mettent tout sur le dos d'un apolitisme
manipulé, alors que celui-ci n'est ni artificiel ni manipulé.
UN
DES PIRES CONCEPTS GAUCHISTES !
« Dans
un contexte où la classe ouvrière a perdu pour l’instant son
identité de classe, sans pour autant avoir subi une défaite, de
telles effluves nauséabondes ne peuvent que présenter de très
grands dangers : naturellement, ceux de la division entre les
fractions qui cèdent aux pires sirènes nationalistes et xénophobes
d’un côté, et de l’autre, ceux qui s’accommodent de
l’idéologie démocratique, c’est-à-dire du masque hypocrite de
la dictature capitaliste, un système qui n’a d’autre possibilité
à offrir qu’une barbarie croissante. La réalité, c’est que la
classe ouvrière a besoin d’une réelle politisation
de sa lutte ! Elle a besoin de renouer avec ses propres méthodes
de combat, son propre projet
politique
révolutionnaire ».
On
a une classe qui a perdu sa carte d'identité, va-t-elle la réclamer
au commissariat du coin ? Mais jamais défaite, quoique la
plupart des grèves aient échoué depuis des décennies. Deux
dangers, d'un côté des ouvriers racistes, de l'autre des démocrates
à lacon. Classe ouvrière bête, donc il faut la « politiser » ;
c'est ce genre de slogan que hurlaient les sergents recruteurs
trotskiens et maoïstes en 1968 et dont RI (ancienne série) s'était
moqué ; voilà qu'on nous ressort cette ânerie qui vise à
d'une manière ou d'une autre à conscientiser des idiots, et qui
reflète bien leur incapacité à analyser le mouvement
d'insubordination, ses enseignements malgré ses contradictions et
aussi des efluves nauséabonds (il y en a aussi dans n'importe quelle
grève). En appeler enfin à un mouvement prolétarien pur de toute
« souillure » des autres classes et complètement
autonome ou vacciné contre d'éventuelles infections morales, tel
est bien le délire d'une secte devenue anti-marxiste.
Finalement,
comme vous venez de vous en rendre compte ce mouvement historique des
gilets jaunes n'est pas si ennuyeux ni si apolitique qu'on veut bien
le dire, et nous incite encore et toujours à continuer à réfléchir
plus loin et dans une perspective autrement subversive que les
éventuelles synthèses du gouvernement Macron et de nos sages gilets
jaunes collecteurs d'avis et de contre-avis sur les solutions à
apporter à une France en crise quoique en oubliant que c'est le
monde entier qui est en crise.
EXTRAIT
DE ROSA LUXEMBURG
« Les
pôles opposés en apparence non seulement ne s'excluent pas, mais
encore se conditionnent et se complètent réciproquement. Pour la
conception anarchiste des choses en effet, la spéculation sur le
« grand chambardement », sur la révolution sociale,
n'est qu'un caractère extérieur et non essentiel; l'essentiel,
c'est la façon toute abstraite, anti-historique, de considérer la
grève de masse ainsi d'ailleurs que toutes les conditions de la
lutte prolétarienne. L'anarchiste n'envisage que deux conditions
matérielles préalables de ces spéculations « révolutionnaires » :
c'est d'abord « l'espace éthéré » et ensuite la bonne
volonté et le courage de sauver l'humanité de la vallée de larmes
capitaliste où elle gémit aujourd'hui. C'est dans cet « espace
éthéré » que naquit ce raisonnement il y a plus de soixante
ans déjà que la grève de masse était le moyen le plus court, le
plus sûr et le plus facile de faire le saut périlleux dans un
au-delà social meilleur. C'est dans ce même « espace
abstrait » que naquit récemment cette idée, issue de la
spéculation théorique, que la lutte syndicale est la seule réelle
« action de masse directe » et par conséquent la seule
lutte révolutionnaire - dernier refrain, comme on. sait, des
« syndicalistes » français et italiens. Le malheur a
toujours été pour l'anarchiste que les méthodes de lutte
improvisées dans l' « espace éthéré », se sont
toujours révélées de pures utopies, en outre la plupart du temps,
comme elles refusaient de compter avec la triste réalité méprisée,
elles cessaient insensiblement d'être des théories révolutionnaires
pour devenir les auxiliaires pratiques de la réaction.Or
c'est sur le même terrain de la considération abstraite et sans
souci de l'histoire que se placent aujourd'hui d'une part ceux
qui voudraient déclencher prochainement en Allemagne la grève de
masse à un jour déterminé du calendrier, sur un décret de la
direction du Parti, et d'autre part ceux qui, comme les délégués
du Congrès syndical de Hambourg veulent liquider définitivement le
problème de la grève de masse en en interdisant la « propagande ».
L'une et l'autre tendances partent de l'idée commune et absolument
anarchiste que la grève de masse n'est qu'une arme purement
technique qui pourrait à volonté, selon qu'on le juge utile, être
« décidée » ou inversement « interdite »,
tel un couteau que l'on peut tenir fermé pour toute éventualité
dans la poche ou au contraire ouvert et prêt à servir quand on le
décide. Sans doute les adversaires de la grève de masse
revendiquent-ils à juste titre le mérite de tenir compte du terrain
historique et des conditions matérielles de la situation actuelle en
Allemagne, par opposition aux « romantiques de la révolution »
qui planent dans l'espace immatériel et se refusent absolument à
envisager la dure réalité, ses possibilités et impossibilités.
« Des faits et des chiffres, des chiffres et des faits »,
s'écrient-ils comme M. Gradgrind dans Les Temps difficiles de
Dickens. Ce que les adversaires syndicalistes de la grève de masse
entendent par le « terrain historique » et les
« conditions matérielles », ce sont deux éléments
différents : d'une part la faiblesse du prolétariat, de
l'autre la force du militarisme prussien ». (Grève de masse,
chapitre II).
NOTES
1Il
n'enverrait même pas une mouche dans un goulag.
Fatima :
« Bravo Monsieur j'aime vous entendre parler c'est très clair
je vous regarde à TV et à chaque je suis ravie car même face à
l'adversaire vous arrivez à être dominant bravo bravo !!!!! »
Un
autre dégouline de poésie cathare :
« Les
larmes de la combativité coulent en t'écoutant François.. Nous
sommes fiers d'avoir un digne représentant de nos valeurs communes!
Tu es légitimement à ta place car tu connais le fond du
problème.Nous suivrons cet appel et nous le relayerons..Pour
qu'enfin le peuple reprennent ses droits!Fier d'être gilet
jaune,fier d'être résistant et fier de toi pour toujours.A bientôt
mon ami.Force et courage à tous!!!Nous y arriverons! »
« IL
EST GRAND TEMPS DE RÉAGIR !MERCI FRANCOIS !Ce gouvernement
d'irresponsables, totalement incompétents à sortir «politiquement»
d'une crise provoquée directement par son manque de responsabilité
dans la gestion des événements et sourd à toutes les demandes
clairement formulées par une grande majorité de la population ...
est en train de nous conduire à la «catastrophe» sociale,
environnementale et économique !Il est grand temps de lui reprendre
les 'clefs de la maison France ». « Ne plus allez au
supermarché et favoriser les petit commerçant ». « Bravo
Mr boulot (sic) quel réel plaisir de vous entendre!Votre
argumentaire ainsi que votre calme sont un exemple de ce qui doit
être fait et dit. Surtout ne faiblissez pas et ne doutez jamais de
notre cause qui est à mon sens la plus noble qui soit. ». Et
moi diplomate je leur ai répondu sous plusieurs variantes ceci :
« « c'est beau comme un avocaillon bien propre sur lui,
débitant les plus creuses banalités politiciennes peut enflammer
tant de puceaux politiques, en fait c'est le meilleur croque-mort
qu'il fallait à ce mouvement sans colonne vertébrale. Il a
d'ailleurs un aspect Chirac! je me marre ». Il n'y a pas que
des moutons de Panurge, on lit ceci d'un autre internaute
dubitatif : « Depuis le début, il répète exactement
les même revendication,celle des gilets jaune. Quelque soit l
émission ou il est interwieuver, il répète les 4 mêmes
revendications que les gj scande depuis 2 mois. Pour un avocat qui
doit bien gagner sa vie, cela paraît démagogue. Peut-être cherche
t-il plus de clients parmi les GJ ou même vise t-il pour plus tard
le poste de Président ?? ». Y A DU BOULOT EN EFFET ?
3Il
avait déjà informé ses groupies de facebook de ses apparitions au
cours de la grève générale « illimitée » de ce
pauvre mardi cégétiste : « [À
ÉCOUTER] Retrouvez-moi ce mardi matin entre 6h30 et 11h00 dans les
différentes matinales de France
Inter, France
Info, Radio
Classique, France
Bleu Haute-Normandie
et
sur Kernews
(en
région nantaise).J'aurai l'occasion d'évoquer cette première
journée de grève illimitée du 5 février 2019.#GiletsJaunes
#GreveNationaleIllimitee
#OnLacheRien
#5Fevrier2019
#TousUnis
4http://fr.internationalism.org/content/9836/mouvement-des-gilets-jaunes-lapolitisme-danger-proletariat
5https://www.persee.fr/doc/polit_0032-342x_1936_num_1_5_5659
6On
croirait lire des pages du Parisien libéré d'il y a 40 ans :
« Le
prolétariat ne doit donc pas se fourvoyer dans des pratiques de
guérilla urbaine enfermée par les slogans nationalistes de la
petite bourgeoisie haineuse et révoltée, mais au contraire
s’ouvrir sur un mouvement massif à vocation internationale, un
mouvement unitaire dont la perspective est l’abolition consciente
des rapports sociaux capitalistes ». Cela me rappelle la liste
des péchés dans mon missel d'enfant : « tu ne dois pas
t'enfermer dans la haine mais t'ouvrir au bonheur que te réserve le
Seigneur ! ».