"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

jeudi 6 novembre 2025

La violence et le changement social en Amérique (1969)


par HOWARD ZINN (1969)

(partie 2chapitre 4)

(merci à Jean-Pierre Laffite pour sa traduction)





Vers le début des années 1980, alors que j'étais à New York, j'ai trouvé dans la grande poubelle de la bibliothèque de la big pomme, un ouvrage collectif sur la question de la violence, patronné par Howard Zinn. Howard Zinn (1922-2010) célèbre historien américain engagé sur plusieurs fronts de la contestation sociale et contre plusieurs guerres successives au cours de son existence, est toujours une référence pour son histoire populaire des Etats Unis et sa réhabilitation des minorités opprimées. Cet écrit de 1969 plein de finesse et de conscience humaine reste très actuel face à l'expansion des sectarismes, des communautarismes et l'empêchement de toute réflexion rationnellle par l'ensemble des rackets politiques, surtout ceux de la gauche nèo-stalinienne et wokiste. La violence est un sujet à la fois complexe, difficile et hétéroclite. La réflexion de Zinn souligne la responsabilité de l'Etat, mais n'oublie pas non plus la responsabilité individuelle de chacun où, les plus conscients peuvent agir comme Orwel qui, pendant la guerred'Espagne tirait en l'air pour ne pas avoir à tuer un soldat d'en face passant devant lui. Jeune ouvrier j'ai connu des collègues qui, mobilisés en Algérie avaient agi de la même manière. Nous savons, en tant que membres du prolétariat, que nous ne pouvons avoir le culte de la violence. Celle-ci est le plus souvent défensive, à une étape supérieure celle-ci ne vise pas la destruction des individus mais des instutions de l'Etat bourgeois. Mais il ne faut pas tout mélanger car comme il le dit si bien: "La violence dirigée contre la propriété ne devrait pas être mise sur le même plan que la violence faite aux gens".


C’est une idée fausse fondamentale que l’on se fait sur les États-Unis – que je vais discuter – et que l’on pourrait énoncer de la manière suivante : les États-Unis sont une nation particulièrement non-violente, car dotée d’un régime spécifique destiné à mettre en œuvre le changement social au moyen de la réforme parlementaire pacifique. Ma thèse est que cette idée se fonde sur deux défauts de la vision : l’un est le défaut consistant à ne pas reconnaître l’importance de la violence déclarée qui a caractérisé notre comportement vis-à-vis des nationalités et des races autres que la nôtre ; l’autre est le défaut à ne pas reconnaître la place de la violence – à la fois déclarée et dissimulée – dans le progrès social américain. Cette idée fausse entraîne un double principe : il y a, d’une part, une tendance nationale à rendre absolue la valeur du changement social aux dépens de la vie humaine quand la violence requise pour ce changement est dirigée contre d’autres nations ou d’autres races ; et, d’autre part, une tendance à rendre absolue la valeur de la paix aux dépens du changement social au sein du cadre national.

C’est avec ces deux affirmations que j’aimerais discuter de la violence et du changement social dans l’histoire des États-Unis, en ne prétendant pas faire davantage qu’une brève étude impressionniste. Et je désire suggérer un certain nombre de propositions sur la violence qui méritent peut-être réflexion.

Notre premier grand bouleversement social a été l’expulsion des Britanniques et de leur bureaucratie locale lors de l’établissement d’une nation indépendante. Une nouvelle classe privilégiée a été créée qui s’est fondée sur le renversement du gouvernement royal et de celui des propriétaires coloniaux, ainsi que sur la redistribution de la terre après la confiscation des domaines du roi, des propriétaires et des loyalistes. Cela s’est accompagné de changements : la diminution des conditions de propriété nécessaires à la participation politique dans les nouvelles constitutions étatiques ; l’abolition de la primogéniture et de la substitution héréditaire ; la séparation de l’Église anglicane et de l’État ; et la libération des esclaves dans les États du Nord. Cela a été accompli au moyen de sept années de guerre au cours de laquelle 25 000 hommes de l’Armée Continentale ont été tués, soit environ un homme sur huit de ceux qui y étaient enrôlés. Pour juger l’importance de cette violence, l’on devrait considérer que la même proportion de mortalité dans notre population actuelle s’élèverait à la mort de 1 500 000 personnes.

Le grand changement social suivant a été la pacification du continent et la création d’un marché commun, allant d’un océan à l’autre, large de 1 500 miles, à travers lequel, le travail, le capital, les matières premières et les produits finis, ont pu circuler librement. Cela a été une condition préalable vitale pour le développement du colosse industriel qui, au vingtième siècle, produirait la moitié des biens du monde avec six pour cent de la population mondiale. Et la création de ce marché commun a impliqué une série d’actes violents que nous avons comme par hasard évacués de notre mémoire.

Le premier de ces actes a été l’expulsion et l’extermination des Indiens qui, à l’époque de Christophe Colomb, étaient au nombre de 1 000 000 dans ce qui est maintenant le territoire des États-Unis, et qui sont environ 400 000 aujourd'hui. La violence est fréquente à l’intérieur des groupes, mais il semble qu’il est fait appel à elle plus facilement quand elle est dirigée contre des étrangers. L'étranger est soit physiquement bizarre, linguistiquement ou culturellement distinct, soit investi d'étrangeté en raison de la distance. Il devient une victime invisible, une sorte d’objet envers lequel l’inimitié peut être multipliée sans hésitation. Au début du XIX° siècle, un voyageur français a noté ce qui suit à propos du traitement des Indiens par les Américains :

« Dans le cœur de la société, si policée, si pudique, si sentencieusement morale et vertueuse, l’on rencontre une insensibilité complète, une sorte d’égoïsme froid et implacable quand il est question des indigènes américains… C’est le même instinct sans pitié qui anime la race européenne ici comme partout ailleurs. ».

Selon John Collier, Commissaire aux Affaires indiennes dans l’administration Roosevelt et l’une des principales autorités du monde en ce qui concerne les Indiens, il y avait 600 sociétés indiennes distinctes à l’époque où l’homme blanc est arrivé en Amérique du Nord, et il n’y avait pas un mile carré du continent qui soit inoccupé ou inutilisé. « Ces sociétés existaient en parfait équilibre écologique avec la forêt, la plaine, le désert, les eaux, et la vie animale ». La guerre entre elles était contrôlée, modérée, prudente ; leurs ambitions étaient petites.

C’est alors que l’homme blanc est arrivé, et non pas un seul et unique conquérant blanc, comme dans les territoires situés au sud du Rio Grande, mais différentes puissances : Espagnols, Hollandais, Français et Anglais, luttant les uns contre les autres et impliquant les Indiens dans leurs batailles. Les sociétés indiennes ont néanmoins été préservées et leur domination a été indirecte, en tant que politique calculée des puissances européennes concurrentes, puis codifiée par les nouveaux États-Unis comme loi fondamentale des relations indiennes.

Mais quand les Espagnols, les Hollandais, les Français et les Anglais, ont quitté le continent, c’est en tout cas ce que dit Collier, « il n’est resté qu’un empire en expansion, avec des préjugés de race et une faim de terres illimitée. Les politiques initiales à l’égard des sociétés indiennes et de l’indianité ont été inversées ; une politique tout d’abord implicite et sporadique, et ensuite explicite, soigneusement rationalisée et mise en œuvre de manière complexe, d’extermination des sociétés indiennes et de toute caractéristique indienne, de liquidation finale des Indiens, est devenue une politique officialisée, une loi et une pratique. ».

Le récit est difficile à lire sans broncher, car il s'agit de la face cachée des événements les plus chers de l'histoire américaine. Nous idéalisons les premiers aventuriers de la Virginie, mais ils se sont établis sur le territoire de la Confédération powhattan et ils ont anéanti ses membres dans une guerre sanglante. Nous sommes fiers des puritains, mais ce grand théologien puritain, Cotton Mather, un intellectuel de premier plan de la colonie, a dit lorsque la maladie a décimé les Indiens après l’accostage du Mayflower : « Les bois ont été presque débarrassés de ces créatures pernicieuses pour faire place à une meilleure croissance ». Lorsque les colons de la Nouvelle Angleterre ont brûlé les wigwams des Pequots et les ont massacrés quand ils s’enfuyaient, Cotton Mather a noté cela froidement : « L’on a supposé que pas moins de six cents âmes pequotes ont été envoyées en enfer ce jour-là ». Andrew Jackson, souvent présenté comme une sorte de précurseur du New Deal, a envoyé le général Winfield Scott pourchasser les Cherokees de Géorgie, menant quatorze mille d’entre eux vers l’ouest sur une “piste de larmes” dans laquelle quatre mille sont morts en chemin. Après la Guerre civile, les Indiens des Plaines ont été traqués, harcelés et tués, et ceux qui sont restés ont été entassés dans le Territoire Indien de l’Oklahoma, d’où finalement ils ont également été chassés.

L’Armée des États-Unis a écrasé les Indiens dans une série de guerres et de batailles : le massacre de Chivington en 1864 au Colorado, le massacre de Black Kettle commis par Custer en 1868 au Texas, la déportation des Cheyennes vers le sud en 1878, et le massacre de Wounded Knee en 1890. Il y a eu la guerre contre les Cheyennes et les Arapahos, ainsi que la guerre contre les Sioux, dans les années 1860. Dans les années 1870, sont survenues la guerre de la Red River, la guerre contre les Nez Percés, la guerre contre les Apaches, et d’autres guerres contre les Sioux.

Dans le récit de la violence, nous pourrions noter un phénomène qui est différent de la rapide destruction des corps ou de la lente destruction des esprits : il s’agit de l’élimination des moyens de la vie – la terre, les refuges, les vêtements, la nourriture. Dans le cas des Indiens des Plaines, cela a été accompli par le massacre de leur matière première la plus essentielle : le bison. Dans un premier temps, les chemins de fer ont séparé les grands troupeaux en deux parties ; ensuite, des chasseurs professionnels avec des fusils à répétition ont transformé les plaines en abattoir ; vers 1870, un million d’entre eux par an ont été tués. Vers 1875, le troupeau du sud était pratiquement exterminé, et dix années plus tard c’était le tour du troupeau du nord.

Collier dit : « C'est parmi les Indiens des Plaines que la politique d'anéantissement des sociétés, puis de la personnalité indienne individuelle, a été poussée à l'extrême ». Cette affirmation est importante parce qu’elle est une reconnaissance de la violence qui va au-delà de la violence physique : la destruction de la culture et de la personnalité. Cela sonne de manière familière à nos oreilles ces jours-ci parce que nous avons pris tardivement conscience que le lynchage n’a pas été la pire chose qui est arrivée aux nègres dans ce pays. Dans la comparaison qu’effectue Stanley Elkins des camps de concentration nazis avec les plantations esclavagistes américaines (dans son livre Slavery [Esclavage]), son souci n’est pas les coups de fouet et les raclées, mais les attaques portées à la psyché, la déformation du moi, la paralysie de l'identité. Et naturellement, cela n’a pas pris fin avec l’interdiction de l’esclavage parce que la violence exercée sur la personne du nègre continue dans les plantations du Sud, dans les villes du Sud, et dans les ghettos du Nord. Le jeune nègre emploie constamment le terme de “camp de concentration” ou de “prison” pour décrire le ghetto.

L’évacuation des Indiens a été une étape nécessaire dans le déblaiement forcé de cet espace national qui hébergera l’économie la plus productive de l’histoire mondiale. Morceau par morceau, a été assemblé ce qui constitue aujourd'hui les États-Unis : certaines acquisitions ont été faites grâce à une diplomatie intelligente, comme l’achat de la Louisiane et du territoire de l’Oregon ; d’autres ont été effectuées par la violence, comme la Floride orientale après une campagne de harcèlement menée par Andrew Jackson, ainsi que les États du Sud-ouest (du nouveau Mexique à la Californie) comme résultat de la guerre contre le Mexique. À l’époque de la Guerre civile, les États-Unis se sont étendus d’un océan à l’autre. Vers 1890, Frederick Jackson Turner a pu utiliser la découverte du Bureau du recensement selon laquelle la frontière avait disparu pour lancer une série de discussions relatives à sa signification. Le fait que Turner ait vu la frontière comme une influence bienveillante sur la démocratie américaine était un autre signe de la tendance nationale à tester notre bienveillance par la façon dont nous nous comportons les uns envers les autres, et non envers ceux – que ce soient les Indiens, les nègres, les Mexicains, ou les Espagnols – qui se trouvent au-delà de la frontière.

La Guerre civile, avec toutes ses complexités, fait fortement partie du même processus qui a été décrit plus haut, c'est-à-dire d’un violent effort couronné de succès de la part du gouvernement national pour maintenir son contrôle sur un vaste hinterland agraire dont les matières premières et les marchés étaient nécessaires pour faire exploser le développement qui aurait lieu à la fin du XIX° siècle. Le président Lincoln a dit sans détours que c’était le maintien du Sud dans l’Union qui était son principal souci, et non pas la question de l’esclavage. Mon objectif est de montrer que le développement constitutionnel et économique supposé pacifique de ce grand territoire que sont les États-Unis a exigé une guerre qui a coûté 600 000 vies. Sur une population de 33 000 000 habitants, environ 2 300 000 jeunes hommes sont partis au combat, et un sur quatre y est mort. Si l’on appliquait cela à notre population actuelle, ce serait comme si 3 5000 000 jeunes hommes étaient morts à la guerre. Edmund Wilson, dans son introduction cinglante à Patiotic Gore [Le carnage patriotique], élimine une partie du non-sens romantique qui entoure non seulement les centenaires de la Guerre civile, mais tous les traitements élogieux de la croissance territoriale américaine.

Au cours de la guerre, l’esclavage a été aboli. Que ce soit ou non la première cause de la guerre (et nous devons faire la distinction entre son aspect économique-politique et son aspect humain pour en discuter), son abolition a été l’un des grands changements dans l’histoire américaine, et elle a été une conséquence de l’explosion la plus concentrée de violence que cette nation ait jamais connue. Il est difficile de voir comment l'esclavage aurait pu être aboli à ce moment-là, sans une série de révoltes comme celles planifiées par John Brown, ou finalement sans une guerre dévastatrice menée, ironiquement, deux ans plus tard par le même gouvernement qui a condamné John Brown à mort pour avoir cherché un moyen moins coûteux d'émanciper l'esclave.

Si la position du nègre dans ce pays est un test pour la thèse selon laquelle nos institutions libres se sont développées sur la base d’un changement parlementaire pacifique, cette thèse ne pouvait guère être avancée avec sérieux. Le fait que cela puisse être avancé témoigne du rôle minime que joue le nègre dans la conscience nationale. Il est toujours une exception, à noter puis à mettre de côté, de sorte que l’état de la nation peut être évalué sans sa présence gênante. (Quand un sixième de la population de la nation était composée d’esclaves noirs, cela était connu sous le terme d'“institution particulière”). La violence exercée sur le nègre dans cette situation d’esclavage, au-delà de la violence physique, le privant de propriété, de femme et d’enfants, d’éducation, de culture africaine, de sa propre identité – le processus d’une totale aliénation –, n’a jamais été correctement prise en compte, même par nos scientifiques les plus humains, qui limitaient souvent leur souci à se demander combien de nègres étaient réellement fouettés par le propriétaire de la plantation. Et la violence faite à notre esprit dans la société contemporaine commence seulement à entrer dans notre conscience.

Avec l’indépendance sécurisée par rapport au contrôle européen, avec le continent unifié et pacifié (et ici, comme avec la Révolution américaine, il y a eu d'autres bonus : une banque nationale et des lois sur les droits de douane, les chemins de fer et la propriété, auxquelles le Sud ne s'opposait plus), le prochain grand changement a été l’industrialisation et l’urbanisation d’une nation agricole. Ceci ne peut être considéré comme un développement pacifique que si la violence se limite à des dommages physiques manifestes et intenses. Ceux qui travaillaient sur les chemins de fer, dans les mines, dans les fabriques et les usines, étaient soumis à une sorte de servitude qui leur détruisait à la fois le corps et l’esprit. Les horaires étaient longs, les salaires bas, et souvent il y avait un enfermement de type servage dans une ville-entreprise. George Fitzhugh, dans Cannibals All [Tous des cannibales], juste avant la Guerre civile, avait fustigé les Nordistes qui critiquaient l’esclavage alors qu’ils s’accrochaient à leur système industriel. « Vous, avec le contrôle du travail que votre capital vous donne, vous êtes un propriétaire d’esclaves – un maître, sans les obligations d’un maître. Ceux qui travaillent pour vous, qui sont à l’origine de vos revenus, sont des esclaves, sans les droits de esclaves. ».

La dépression des années 1870 et celle des années 1890 ont provoqué de grandes souffrances. Durant les trois premier mois de 1874, par exemple, environ 90 000 travailleurs sans logis, beaucoup d’entre eux étaient de femmes, étaient logés dans les postes de police de New York City, blottis les uns contre les autres sur des bancs. Ils étaient expulsés à l'aube, affamés, pour laisser la place à la fournée suivante. Le Mouvement des Grangers [Fermiers], le Parti du Billet vert et le Parti Populiste, sont nés en réponse à la détresse des agriculteurs au cours de ces années-là. Les dépressions se sont atténuées et les mouvements ont décliné, mais le problème est que le progrès industriel de la nation a été effectué avec un coût humain important de millions de personnes, un coût qui doit être pris en compte dans toute définition élargie de la violence. Le nouveau livre de Barrington Moore : Social Origins of Dictatorship and Democracy [Les origines sociales de la dictature et de la démocratie] illustre, ce sont ses mots, « les contributions de la violence au réformisme progressif » dans le chapitre dans lequel il discute du mouvement des enclosures en Angleterre, un autre pays avec un développement parlementaire prétendument pacifique.

Un autre changement social important dans l’histoire américaine a été le développement de ce que nous dénommons le “welfare state” [l’État- providence], l’établissement de niveaux de vie acceptables pour les deux tiers de la nation, en limitant la pauvreté et la détresse à ces parties de la population qui ne peuvent pas s’associer facilement (travailleurs agricoles et des services), qui manquent d’une base territoriale (ouvriers migrants) ou qui sont mis à part du reste de la population pour des raisons raciales. L’État-providence a commencé lentement au cours de l’Ère progressiste avec la législation de l’administration Wilson et il atteint son point culminant avec le New Deal [Nouvelle Donne]. Ce qui est souvent négligé, c’est le rôle joué par la violence d’un type patent lors de l’introduction de ce qui est appelé l’Âge de la Réforme, lequel a débuté avec le XX° siècle.

Le progressisme de Roosevelt-Taft-Wilson a suivi une période où ont eu lieu les plus violentes luttes du travail qu’un pays ait jamais vues : les grèves de chemins de fer de 1877, qui ont entraîné l’armée et les travailleurs dans des affrontements armés ; les événements de Haymarket de 1886 ; la grève de Homestead de 1892 ; la grève du textile à Lawrence en 1892 ; la grève de Pullman de 1894 ; la grève du charbon du Colorado de 1913-14, qui a culminé avec le massacre de Ludlow. C’était la période de Big Hill Haywood, de Mother Jones et des Industrial Workers of the World. Comme pour la période du New Deal, elle s’est accompagnée de grèves violentes, sur le tas et régulières ; le désordre, qui a été documenté lors des séances du Comité La Follette surprendra toute personne qui pense que ce sont les manœuvres politiciennes tranquilles et l’éloquence de FDR qui racontent l’histoire des réformes du New Deal.

Le changement le plus important des années récentes est la fin de la ségrégation de jure, bien quelle ne le soit pas de facto, dans le Sud, et l’éveil de la nation aux protestations des nègres pour la première fois depuis la Reconstruction. Quelles que soient les insuffisances et le manque d’application des différentes lois sur les droits civiques adoptées depuis 1957, aussi vides que soient de nombreuses déclarations passionnées sur l'égalité raciale émanant de la Maison Blanche, il semble tout à fait clair que dix années d’agitation dans la communauté noire, depuis le boycott de Montgomery de 1955 aux marches de Selma de 1965, ont eu beaucoup à voir avec ces petits gains.

Pour effectuer un aperçu rapide, la société américaine, je le crois, montre un consensus croissant au fil du temps. Mais ce que nous avons n’est pas un consensus complet depuis longtemps, mais une série de pas vers le consensus, chacun accompagné de violence qui détruit, exclut ou incorpore, un groupe dissident. La Révolution a établi un nouveau consensus fondé sur l’indépendance, en excluant les Britanniques et leurs partisans loyalistes. Ceux qui n’ont pas été satisfaits des nouvelles classes privilégiées (les rebelles de Shay dans le Massachusetts, la révolte du whisky en Pennsylvanie) ont été supprimés par la force des armes afin de créer un consensus apparemment pacifique avec la nouvelle Constitution. Ceux qui étaient laissé de côté par le nouvel arrangement – les Noirs – ont été réprimés avec tout l'attirail du système esclavagiste. Le travail organisé, après la période de 1877-1939 des grèves violentes, a été amené au consensus avec la législation du New Deal. Et récemment, les Noirs de la classe moyenne ont été pacifiés avec la promesse de leur incorporation dans la classe moyenne blanche, en laissant leurs frères (représentés par Stokely Carmichael et d’autres comme lui) en dehors du consensus.

De plus en plus d’éléments de la vie américaine ont été invités à entrer dans l’endogroupe dominant de la société américaine, généralement après une violence déclarée de différentes sortes ; chaque accroissement fortifie le groupe qui peut alors continuer, ou même accroître, la violence dirigée vers ceux qui sont extérieurs au consensus (des leaders noirs respectables seront de plus en plus bienvenus à la Maison Blanche tandis que la police aura de plus en plus l’habitude de briser les révoltes noires dans les villes et sur les campus universitaires). La création d’un consensus assuré chez soi semble créer la possibilité d’exercer des quantités de plus en plus grandes de violence à l’encontre de groupes externes à l’étranger. (Je n’ai pas parlé de l’accroissement rapide des moyens de violence et de l’utilisation de la violence par les États-Unis à l’étranger au cours de ce siècle, pour la bonne raison qu’il est trop bien connu ; je choisirais comme moments dramatiques importants le bombardement de Dresde, la bombe atomique d’Hiroshima, et les bombardements au napalm du Vietnam).

Notre développement constitutionnel pacifique tant vanté est, en d’autres termes, fondé sur un système qui maintient la paix au niveau national tandis qu’il la viole à deux autres niveaux de l’existence humaine. C'est-à-dire que le système permet de troubler la paix intérieure de millions d’Américains qui sont trop pauvres, ou trop de couleur, ou trop différents dans un sens ou un autre, pour être traités avec respect par le gouvernement et par la société. Et dans le domaine de la politique étrangère, il permet un absolutisme dans la prise de décision qui agit contre ce qu’à la fois Hobbes et Locke reconnaissaient comme étant une loi fondamentale de la nature humaine – la préservation de la vie.

Cela me ramène à ma thèse : à savoir que nous avons un double critère pour porter un jugement sur la violence à l’intérieur et à l’extérieur du groupe national-racial : nous accordons une valeur suprême à la paix au sein de la société qui nous a déjà intégrés et une valeur suprême à la violence dirigée vers ceux qui sont en dehors de la société. Un exemple frappant de cela, c’est la crainte générale avec laquelle le gouvernement et le public ont accueilli les propos militants d’auto-défense des nègres, ou tout écart par rapport la non-violence absolue, ainsi que la volonté générale du gouvernement et du public d’utiliser les moyens violents les plus effrayants en Asie.

Laissez-moi maintenant énoncer en conclusion ce que certains éléments d'une éthique unique de la violence pourraient être :

  1. Toutes les formes de douleur et de mauvais traitements – qu’elles soient manifestes, intenses et physiques, ou bien psychologiques, dissimulées et atténuées – devraient être placées sur la même échelle d’actions destructrices. Cela crée de grands problèmes pour peser certaines formes de violence par rapport à d’autres, mais il est préférable de résoudre les problèmes assez facilement en n’assignant pas de poids à des types de violence qui vont au-delà de la définition courante. Les ingrédients habituels, les éléments moléculaires de toutes les sortes de violence, ont besoin d’être isolés. (Par exemple, nous avons besoin de reconnaître l’identité de la violence à la fois dans le crime et dans sa punition).

  2. Il s’ensuit que nous payons le prix d’une paix sociale superficielle qui réprime et cache la violence souterraine. Le prix est non seulement la conservation de cette infra-violence, mais l’explosion finale en violence déclarée. Les compromis tant vantés de 1820 et de 1850 qui ont aplani la question de l’esclavage ont peut-être rendu inévitable la Guerre civile. La Dépression des années 1930 a été peut-être le prix à payer pour avoir passé sous silence les souffrances des années 1920. Les griefs mis de côté sont payés avec des intérêts composés.

  3. La violence officielle ne devrait pas bénéficier de privilèges particuliers par rapport à la violence privée. John Brown a été pendu pour avoir tenté, par un acte de violence de plutôt petite envergure, de libérer les esclaves nègres ; mais le gouvernement des États-Unis s’est attiré peu d’opprobre pour une guerre dans laquelle 600 000 humains ont été tués pour la même cause. Un meurtre commis par la police, bien qu’injustifié, est privilégié d'une manière dont l'acte de meurtre commis par un citoyen privé ne l'est pas.

  4. La violence commise par les autres devrait être pesée de manière égale à la violence commise par nous-mêmes ; nous avons été horrifiés quand Hitler a tué plusieurs milliers de personnes en faisant tomber des bombes sur Rotterdam, mais nous acceptons facilement le massacre de plus de 100 000 personnes dans le bombardement de Dresde. Nous considérons que l’assassinat par le Viet Cong d’un chef de village est plus terrible que le bombardement américain de la population d’un village. Pearl Harbor est infiniment plus condamné qu’Hiroshima. Nous sommes plus troublés par une pierre lancée par un nègre sur un policier blanc que par l’homicide d’un autre nègre par un policier. Nous serions choqués si les nègres décidaient de bombarder l’État de l’Alabama afin de se débarrasser de son régime d’oppression – mais, dans les affaires internationales, nous acceptons un tel raisonnement.

  5. Nous devrions partir du principe que toutes les victimes sont créées égales, que la violence faite à des hommes d’autres races ou ayant d’autres croyances religieuses ne bénéficie pas pour autant d’une dispense spéciale : un communiste mort est un homme mort, comme l’est un anti-communiste mort. George Orwell, dans Homage to Catalonia [Hommage à la Catalogne], a écrit qu'il s’était retenu de faire feu dans la Guerre civile espagnole alors qu'un soldat fasciste, passant en courant, avait du mal à garder son pantalon relevé. « Comment pouvez-vous tuer un homme », écrivait-il, « qui a du mal à maintenir son pantalon relevé ? ».

  6. La violence dirigée contre la propriété ne devrait pas être mise sur le même plan que la violence faite aux gens. Lorsque je vivais à Atlanta, un policier y a tiré sur et tué un adolescent noir qui s’enfuyait d’un magasin dans lequel un distributeur de friandises avait été volé de deux dollars. De telles scènes peuvent être multipliées par cent ; beaucoup de ceux qui ont été tués dans des émeutes urbaines au cours des années récentes ne faisaient rien d’autre que de piller des magasins.

  7. Nous devrions être constamment conscients de notre disposition à accepter la violence sur la base d’arguments symboliques : les animaux commettent des violences pour des buts immédiats et visibles, mais les humains peuvent être poussés à la violence par un mot, un slogan, un processus de conditionnement pavlovien dans lequel nous sommes si éloignés de ce que le symbole représente que nous ne pouvons pas réellement peser les coûts et les inconvénients humains de nos propresactes. Le terme de “négro”, d’“impérialiste” ou de “communiste”, a ôté, et continue encore à ôter, un jugement rationnel de l'esprit même d’intellectuels.

  8. Finalement, nous devrions tenir compte du critère de fécondité de Jeremy Bentham, dans son schéma utilitariste : à savoir que non seulement nous devrions mesurer les résultats immédiats de nos actions, mais que nous devrions aussi considérer les effets prolifératifs d'une action excessive dans la gestion de la violence manifeste et de l'inaction dans la tolérance de la violence souterraine. Dans les deux cas, l'intensité peut entraîner des conséquences inattendues et terribles.



mercredi 5 novembre 2025

C'EST QUOI LES DEPENSES IMPRODUCTIVES ? LES BUDGETS MILITAIRES !

 

caricature simpliste du capital

(pétrole, gouvernance du monde et richesse)


Mon cher ami de longue date, tu as beau être un vénérable professeur d'université dans une matière peu prisée par les français, en politique tu ne me parais pas, ou du moins de moins en moins éclairé ou éclairant. Aussi je tiens à te répondre ici plus précisément à la suite notre engueulade d'hier soir où tu m'as fait entendre nombre de conneries. Amicalement, JLR

Pour Marx les dépenses militaires sont improductives ! Et tu m'as raconté des conneries sur un possible développement de l'économie de guerre...comme sauveur d'un capitalisme en crise et pas seulement financière !

Le pétrole n'est pas partout la cause des guerres comme tu l'ergotais de façon simpliste :

 L'annexion de la Crimée par la Russie  n'a rien à voir avec le pétrole comme enjeu territorial ! en 2014 est venue rappeler aux pays d'Europe de l'Ouest et aux anciens pays du bloc soviétique que le nationalisme russe pouvait encore être un danger. Les budgets de la défense sont repartis à la hausse, du moins dans les pays qui se sentaient le plus concernés et une nouvelle accélération a été enregistrée à partir de 2022.

Sans surprise, parmi les trente-deux pays membres de l'OTAN, on voit que c'est la Pologne qui a le plus dépensé en matière de défense en 2024 en proportion de son PIB (4,12%), devant l'Estonie (3,43%) et la Lettonie (3,12%). L'Allemagne et la France étaient alors au coude-à-coude, avec respectivement 2,12% et 2,06% de leur PIB.

Il y a a une crise du pétrole et pas une simple concurrence, certes menée de façon agressive par Trump (cf.le faux prétexte du combat contre la drogue pour s'emparer des plus grandes réserves pétrolières du mone au Venezuela. Mais comme l'explique depuis longtemps ce texte du courant communiste international (et bravo à eux, les plus clairs sur l'analyse géopolitique internationale, et lire en note leur explication remarquable1) :

«  La crise du pétrole n’est elle-même en dernier ressort qu’un produit de la crise économique générale. La-bourgeoisie mondiale trouve dans cette crise un bouc-émissaire inattendu, mais particulièrement opportun pour précipiter une série de mesures "impopulaires" qu’elle devra prendre. Les classes dominantes savent que la "récession" prévue exigera des licenciements, du chômage, c’est-à-dire d’attenter à un des seuls avantages réels que le capital ait été capable d’offrir au prolétariat depuis la deuxième guerre : la sécurité de l’emploi. La politique des pays producteurs de pétrole du Proche-Orient fournit dans ces conditions une occasion trop tentante de rendre effective une part de ces mesures; tout en en faisant porter la responsabilité sur cet homme à tout faire des moments difficiles de la bourgeoisie : "l’étranger" (en l’occurrence les arabes). Si les choses sont bien faites, on peut même se payer le luxe d’une petite "union sacrée de toutes les classes" face à la difficulté. La manœuvre est trop intéressante pour ne pas la deviner derrière toutes les campagnes de propagande actuelles qui accompagnent un raz de marée totalement disproportionné de fermetures d’usines et d’élévation des prix (l’essence en particulier). La force mystificatrice de cette manœuvre doit être dénoncée.

Dans l’ambiance de panique que la bourgeoisie développe une intervention militaire américaine au Proche-Orient, afin de rétablir "l’ordre pétrolier", apparaîtrait aux yeux des populations occidentales plus justifiée que lors des précédents conflits. La bourgeoisie aux abois aura de plus en plus à utiliser ce genre de mystifications. Dans cette tâche elle pourra compter sur les partis de gauche et sur les rabatteurs de ceux-ci : les gauchistes.

C’est pour cela que dans la période qui vient les révolutionnaires devront redoubler d’efforts pour mettre en lumière les véritables causes de la crise actuelle. Ils devront dénoncer toutes les mystifications véhiculées par les partis du capital pour tenter de préparer le prolétariat à la guerre impérialiste; seule réponse possible du capital a la crise ».

LES BUDGETS MILITAIRES EN HAUSSE MENENT A LA CATASTROPHE

Ainsi que nous le rappelle l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale (IfW Kiel), dans un rapport publié au début du mois de février, l'Allemagne nazie consacrait en 1939 près de 27% de son produit intérieur brut (PIB) aux dépenses militaires, tandis que le Royaume-Uni, après avoir trop négligé ce danger, faisait un gros effort de rattrapage à environ 15% de son PIB. Aujourd'hui, ce qui est demandé aux pays européens, c'est de monter autour de 3% de leur PIB. Les conséquences pour la population ne sont pas exactement les mêmes. L'énorme buget d'Hitler a affaibli rapidement l'Allemagne en guerre, e c'est ce qui arrivera à Poutine !

Pourquoi militariser l’économie européenne ne va pas sauver l'industrie française ? (slate)

Un marché non durable et moteur de guerres permanentes

Quand on a faim, on achète de la nourriture, on la mange, puis elle disparaît : il faut donc en produire à nouveau pour assouvir les faims suivantes. Et ainsi de suite. On a besoin de se déplacer pour travailler, voir sa famille ou partir en vacances. Pour cela, on prend les transports en commun ou un véhicule personnel. Cette utilisation continue des transports publics ou d’un véhicule privé les use. Au bout d’une certaine usure, il faut réparer ou remplacer ces véhicules. Ainsi qu’investir dans le développement et l’entretien des infrastructures de transport et la production des véhicules. C’est le cycle de vie d’un produit qui assure une certaine durabilité à un modèle économique répondant à des besoins et une demande présents dans la société. De son côté, l’investissement dans l’armement nourrit un cercle vicieux où la paix devient une menace pour les profits. Tant que les conflits – par exemple: guerre en Ukraine, génocide à Gaza, occupation du Congo oriental soutenue par le Rwanda (avec la bénédiction de l’UE) – font rage, les armes trouvent un “marché”. Mais si les États stockent sans les utiliser, le marché s’engorge et sature. Pour survivre, les fabricants ont besoin que ces armes brûlent sur les champs de bataille, générant de nouvelles commandes.
La militarisation de l’économie crée ainsi une incitation structurelle à la guerre, renforcée par le lobbying des industriels. Pire : les conflits servent même de vitrine commerciale. Certaines entreprises, comme celles fournissant Israël, n’hésitent pas à vanter des équipements «testés en conditions réelles», transformant les massacres en argument marketing. (1)

L’investissement dans l’armement nourrit un cercle vicieux où la paix devient une menace pour les profits. Les armes ont besoin d’un « marché ».

Les États-Unis représentent pleinement cette logique destructrice. Seul pays à avoir construit un énorme complexe militaro-industriel, donc un secteur industriel fort basé sur l’armement, ils enchaînent les guerres. Rien que depuis 2001 : Afghanistan (2001-2021), Irak (2003-2011,), Libye (2011), Syrie, Yémen, soutien à l’Ukraine et à la guerre génocidaire israéliennes contre les Palestiniens. Cette situation de guerre permanente alimente un secteur colossal : en 2024, les exportations d’armes américaines ont atteint 318,7 milliards de dollars, soit une hausse de 29 % en un an (Reuters, janvier 2025). Le département d’État lui-même justifie ces chiffres par la « reconstitution des stocks envoyés à l’Ukraine » et la préparation à de « futurs conflits majeurs ».(2)
Contrairement au discours officiel, militariser l’économie n’offre aucune protection – elle aggrave les risques de guerre. L’histoire européenne en témoigne : les vagues de réarmement, notamment en Allemagne au XXᵉ siècle, ont conduit à deux guerres mondiales et à un continent en ruines. Aujourd’hui, reproduire ce schéma reviendrait à sacrifier toujours plus de vies, à détruire des sociétés et des communautés pour nourrir une industrie prête à tout vampiriser et dont la survie dépend… de notre propre insécurité. Comme le résume l’économiste Michael Roberts, le keynésianisme militaire ne peut fonctionner qu’en situation de guerre.(3)

 L’illusion d’une relance par des dépenses militaires

L’économie européenne est dans une impasse. L’Allemagne, première puissance industrielle du continent, est en récession. « Les chaînes de valeur ou les capacités de production existantes dans nos industries traditionnelles – automobile, acier, aluminium ou produits chimiques – peuvent trouver de nouvelles opportunités dans la reconversion et l’approvisionnement d’une empreinte croissante de la base industrielle de défense [TDLR] », affirme la Commission européenne.(4) Mais l’espoir que la militarisation de l’économie remettra le Vieux Continent sur les rails de la croissance risque d’être de courte durée. En économie, pour comparer l’effet de différents types d’investissements, on utilise ce qu’on appelle l’effet multiplicateur. Ce terme désigne le phénomène par lequel une dépense initiale entraîne une série d’autres dépenses, investissements et activités économiques. Par exemple, lorsqu’on investit dans un parc éolien, l’énergie produite peut alimenter des usines, attirer des entreprises et créer de nouveaux emplois. Investir dans des chemins de fer facilite les échanges et le transport de marchandises, ce qui stimule l’activité économique. Financer la recherche et le développement (R&D) peut déboucher sur des innovations qui renforcent le développement industriel. Produire une excavatrice ou un bulldozer aide à construire des bâtiments, des routes ou des ponts. En comparaison, un tank ne produit ni énergie, ni innovation, ni transport, ni bâtiments. Il mobilise des ressources, mais sans effet d’entraînement durable dans l’économie.
Plusieurs études récentes menées se sont penchées sur les effets des dépenses militaires sur l’économie. Selon le Kiel Institute for the World Economy, l’un des principaux instituts de recherche économique en Allemagne, ces dépenses ont un effet réduit sur la croissance car elles sont déconnectées des besoins de la société, que ce soient les entreprises privées, l’Etat ou les consommateurs.  Comme l’a récemment rappelé l’économiste de l’Université Catholique de Louvain, Paul Van Rompuy, la banque d’investissement américaine Goldman Sachs a calculé quant à elle, que le multiplicateur des dépenses de défense de l’UE, dans le cadre du programme «Rearm Europe», n’était que de 0,5 après deux ans Pour l’institut GWS (Gesellschaft für Wirtschaftliche Strukturforschung), elles peuvent générer un certain dynamisme économique à court terme, au moment des achats d’armes, mais sans impact significatif à long terme. Le CEO d’ArcelorMittal Europe, Geert Van Poelvoorde, résume la situation avec lucidité : « Fournir de l’acier pour la défense n’est pas un problème. 1 000 chars, cela représente 30 000 tonnes, ce qui ne correspond qu’à trois jours de production dans une seule usine. Donc non, le renouveau de la défense ne signifie pas automatiquement le renouveau du secteur sidérurgique. [TDLR] ».

Ta reprise de la thèse du pétainiste Henri Coston (selon laquelle la finance gouverne le monde...donc les juifs)

Coston qui était un journalisteéditeur et essayiste français collaborationniste et antisémite, né à Paris (15e arrondissement) le 20 décembre 1910 et mort à Caen le 26 juillet 2001

Pendant l'entre-deux-guerres, il se fait connaître en tant que journaliste et militant d'extrême droiteantisémite et antimaçonCollaborationniste sous Pétain. En 1928, jeune journaliste fonde La Contre-Révolution, revue antisémiteanticommunisteantimaçonnique et opposée aux sociétés secrètes en général, mais qui ne connut que deux numéros. En 1930, il crée les Jeunesses anti-juives, puis le journal La Révolte ouvrière avec notamment Henry Charbonneau. t l'occupation allemande, il est condamné à la Libération. En 1955, il réédite son livre « Les financiers qui gouvernent le monde ». Et, en 1958 : « La franc-maçonnerie gouverne ». Ce plumitif facho reste une référence pour toutes les extrêmes droite et les péquenots sans culture politique, mais désormais, de façon opaque, aussi pour notre extrême gauche wokiste (= révisionniste)..

Cette idéologie qui affirme que « la finance gouverne le monde » est reprise par le couple de sociologues Pinço et Charlot, qui depuis longtemps s'en prennent aux riches et peuvent donc servir de bréviaire à la gauche bourgeoise devenue priritairement anti-riche avec ses supplétifs gauchistes ! Confirmant qu'elle n'est pas aussi élognée que çà...des théories fachos. Le livre de pinçons Charlot, salué par Le Monde - « La finance gouverne » est dans la même filiation imbécile.

Comme ce pauvre Mélenchon qui salue le nouveau maire multiethnique de New York, il s'agit de gomme le conflit des classes. Depuis dix ans, la bourgeoisie aurait connu des bouleversements liés notamment au pouvoir grandissant de la finance sur l’industrie, la politique et les médias. Avec de nouvelles fonctions sur les différentes formes de richesse, l’argent, la culture, les relations sociales et devenant le pouvoir principal.

Ce parti pris plus que simple constat peut apparaître proche de réalité si on décrypte le gouvernement Trump :

« Après une campagne démagogique contre les banquiers et les élites, Trump a nommé, dès son arrivée à la Maison-Blanche, les banquiers de Goldman Sachs aux plus hautes responsabilités : Gary Cohn, son vice PDG, est désormais directeur du Conseil économique national. Stephen Bannon a été promu haut conseiller et chef de la Stratégie. Steven Mnuchin occupe le poste capital de secrétaire au Trésor. La banque Goldman Sachs est encore représentée par Anthony Scaramucci comme conseiller du Président. C’est un ancien avocat de cette banque, Jay Clayton, qui va diriger l’autorité des marchés financiers.Une des plus grandes sociétés pétrolières et gazières du monde, ExxonMobil, est au cœur de la diplomatie américaine, avec Rex Tillerson, son ex-PDG, nommé ministre des Affaires étrangères. Voilà de quoi générer quelques juteux conflits d’intérêts. D’autant qu’ExxonMobil est la deuxième capitalisation boursière au monde. Un signal fort pour confirmer le déni du dérèglement climatique. Le pétrole et le charbon, la fracturation hydraulique, l’exploitation de sables et de schistes bitumineux : la catastrophe est assurée. Aussi n’est-on pas étonné de retrouver comme ministre de l’Environnement Myron Ebell, un lobbyiste financé par Texaco, Ford et Philip Morris.
Un investisseur milliardaire surnommé « le vautour » a été choisi comme Secrétaire au commerce ».

Ce constat peutêtre convaincant pour tout anticapiltaliste simpliste mais nommer « riches » n'est pas définir la classe bourgeoise qui contient aussi des pauvres ou moins pauvres acquis politiquement à cette classe dominante. Le populiste Trump vient servir à accréditer la nouvelle thèse (wokiste) selon laquelle le peuple n'aurait qu'à dénoncer et lutter contre les riches. Comme Macron, Trump est le VRP des diverses industries nationales. Trump, représentant de la plus grande puissance se démène comme un fou pour contrôler la manne pétriolière mondiale : le pétrole, nerf de la guerre, ce à cause de quoi Hitler a perdu la guerre. Mais on ne peut pas dire que la gouvernance capitaliste est seulement ou même prioritairement conduite par financiers et patrons du pétrole. D'autres intérêts nationaux sont en jeu, territoires, industries d'exportation, terres rares...Les partis politiques ne sont pas tous ficelés par les trusts et lalutte DES classes serait énormément simple contre les riches s'il n'y avait pas autant d'intermédiaires collaborateurs, syndicats, partis, journalistes, etc. La bourgeoisie ne se définit pas en soi omme richesse, vision figée et infantile, mais comme rapport social. Et l'explication donnée en 1848 par le Manifeste communiste reste toujours aussi lumineuse et...lucide:

« La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production et donc les rapports de production, c'est-à-dire l'ensemble des rapports sociaux. Tous les rapports sociaux stables et figés, avec leur cortège de conceptions et d'idées traditionnelles et vénérables, se dissolvent ; les rapports nouvellement établis vieillissent avant d'avoir pu s'ossifier. Tout élément de hiérarchie sociale et de stabilité d'une caste s'en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané, et les hommes sont enfin forcés d'envisager leur situation sociale. Leurs relations mutuelles d'un regard lucide".



1 « Cette "ère des massacres", inaugurée par la première guerre mondiale et contrastant avec un long 19° siècle nettement moins meurtrier, est attestée par l'importance relativement faible des dépenses militaires dans le produit mondial et sa quasi-constance tout au long de la phase ascendante du capitalisme, alors qu'elles augmentent fortement par la suite. De 2% du produit mondial en 1860, à 2,5 % en 1913, elles atteignent 7,2% en 1938 pour se situer aux environs de 8,4% dans les années 1960 et plafonner aux environs de 10% au moment du sommet de la guerre froide à la fin des années 1980. (Sources : Paul Baïroch pour le produit mondial et le SIPRI pour les dépenses militaires). L'armement a ceci de particulier que, contrairement à une machine ou à un bien de consommation, il ne peut être consommé de façon productive (il ne peut que rouiller ou détruire des forces de production). Il correspond donc à une stérilisation de capital. Aux +40 % correspondant à la croissance des dépenses improductives dans la période de décadence, il faut donc encore rajouter +6 % correspondant à l'augmentation relative des dépenses militaires... ce qui nous amène à un produit mondial surévalué de près de moitié. Voilà qui ramène les prétendues performances du capitalisme au 20° siècle à de plus justes proportions et qui contraste fortement avec cette ère de "progrès matériel, intellectuel et moral presque ininterrompu" du long 19° siècle.

 Par exemple, la part de la production d'armement -secteur improductif- dans le pro­duit intérieur mondial augmente fortement en décadence (1,77% en 1908, 2,5% en 1913, 8,3% en 1981 ([7])) et donc plus fortement encore dans la production industrielle mon­diale car la part de cette dernière dans le produit intérieur mondial baisse au cours de la décadence.

 C'est ce double mouvement de recherche d'une rentabilité croissante afin de redresser le taux de profit, ainsi que la nécessité de trouver de nouveaux marchés où écouler sa production, qui est à la racine du phénomène de mondialisation apparu dès les années 80. Cette mondialisation ne résulte pas, comme veulent nous le faire croire les gauchistes et autres altermondialistes, de la domination du (méchant) capital financier improductif sur le (bon) capital industriel productif, capital financier qu'il faudrait abolir selon la variante présentée par les gauchistes (qui appellent indûment le Lénine de L'impérialisme stade suprême du capitalisme à la rescousse pour se faire), ou réguler et taxer (taxe Tobin) selon la variante altermondialiste ou sociale-démocrate de gauche, etc.

La place et l'évolution de l'Asie de l'Est dans l'histoire du développement capitaliste | Courant Communiste International





lundi 3 novembre 2025

AVEC SON COMBAT FISCAL CONTRE LES RICHES LA GAUCHE BOURGEOISE RENOUE AVEC PROUDHON

 


et invente un anticapitalisme petit-bourgeois populiste et fédéraliste

« Le combat ou la mort : la lutte sanguinaire ou le néant. C'est ainsi que la question est invinciblement posée. » George Sand

« Les français sont des veaux ». Charles de Gaulle



Le spectacle lamentable d'un parlement qui parlemente comme l'avait enjoint machiavéliquement le petit télégraphiste Lecornu – qui vote et revote, pinaille finalement, rouspète, contrepète pour amender, recommander des taxes à n'en plus finir - et révèle la mise en scène en apparence d'une volonté partagée de toutes ces cliques politiques de solutionner le gouffre financier de l'Etat ; le fond des querelles sans fin serait sensé opposer ceux qui veulent faire payer la minorité des riches à ceux qui veulent faire payer la masse des pauvres. Capharnaüm complet, soit ils votent ensemble de tous bords haineux, soit ils censurent, soit de gauche à droite ils votent pour une mesure anti-pauvre le découvert bancaire a minima 200 euros. La plus drôle : la taxe sur les bijoux de la Castafiore, pas ceux envolés du Louvre. D'abord exonérer la résidence principale jusqu’à 1 million c’est pour les bobos parisiens, pas pour le bon con. En bijouterie, il va falloir qu'un futur gouvernement de députés improductifs fasse embaucher une multitude de flics contrôleurs de rue et de châteaux sans mandats de perquisition. Et dire que le « président des riches » Macron voulait réduire le nombre de fonctionnaires. Avec leur nouvel ISF, rien ne changera pour les bas salaires ni pour les chômeurs. Par contre le risque bien réel, du fait de l'incurie politique de toutes les cliques bourgeoises et petites bourgeoises, de faire plonger la France dans une crise abyssale et faisant exploser la misère, n'est plus une vue de l'esprit.

Pur spectacle électoral pervers avec la trouille de la dissolution ! D'une part les diverses ponctions sur le patrimoine des riches sont insuffisantes dans tous les cas pour combler le déficit de l'Etat. L'imposition élargie aux plus pauvres également. De plus les députés peuvent bien voter, adouber, censurer, c'est le Sénat (de droite) qui aura le dernier mot. Pas de vraie solution sauf à dissoudre et à ce que le RN ramasse la mise. L'agitation sur le portefeuille des riches comme solution, et en les présentant comme les vrais puissants, « individuellement » (ce qui évite de nommer la classe bourgeoise comme un tout) est devenu l'argument simpliste numéro un de toutes les cliques de la gauche bourgeoise socialo-écolo-bobo. Je ne reviendrai pas là-dessus, puisque j'ai décrypté cette fausseté dans mon article précédent où le mot riche sert à masquer et remplacer la bagarre des classes.

Il nous faut revenir à la source de l'idéologie de la social-démocratie (et d'ailleurs aussi du stalinisme adouci) ; depuis 1945 c'est Proudhon. Le match Proudhon/Marx s'est soldé en ce début du XXIème siècle par la prééminence du roi Proudhon, prince des anarchistes devenu rois des socialo-libéraux. Parti d'un point de vue social et soucieux des classes travailleuses Proudhon s'est avéré être un charlatan politique hors de la lutte des classes, mais ses théories mutualistes, fédéralistes ont la vie dure. Il s'est avéré être un simple réformiste antiétatique. En quelque sorte assez représentatif de l'esprit contestataire de la gauche caviar devenue gauche bobo minoritaire dans une décadence tripartite de l'ordre bourgeois actuel. Dans la plupart des pays européens, à force de nier la classe ouvrière et de découpler la petite bourgeoisie du monde salarial, on a fini par découpler le peuple électoral en trois tronçons : droite classique plus extrême droite, gauche bobo incluant employés, ingénieurs et profs, et dernier tiers une classe ouvrière rabougrie censée être devenue raciste, mais en oubliant toujours le quatrième Etat : l'abstention.

Or ce gonflement de la petite bourgeoisie (salariée) qui se croit supérieure au prolétariat tout en étant une partie de celui-ci (du point de vue salarial) mais confuse dans sa cervelle, induit un poids « père mêle tout » pour la bourgeoisie traditionnelle (de droite à gauche) l'obligeant à des concessions avec les diverses théories wokes mais qui n'aboutissent qu'à la paralysie étatique car le petit bourgeois moderne est, comme l'a décrit Marx pour Proudhon, en hésitation permanente :

 « Mais en dépit de ses allures d'iconoclaste (= insoumis, sic!), déjà dans Qu'est ce que la propriété ?, on trouve cette contradiction que Proudhon, d'un côté, fait le procès à la société du point de vue et avec les yeux d'un petit paysan (plus tard d'un petit-bourgeois) français, et de l'autre côté, lui applique l'étalon que lui ont transmis les socialistes ».

Proudhon est tout sauf un révolutionnaire comme ses pâles imitateurs incultes à la Mélenchon. Il est hostile à une révolte armée pour détruire un Etat bourgeois qu'il conteste pourtant et dont il souhaite la disparition. Pour lui, la propriété est la seule force qui puisse servir de contre-poids à l'État.

Mélenchon idem mais en fondant une 6ème république par voie électorale. Un autre zigue, individualiste, philosophe nunuche, Michel Onfray, en a fait son héros hors sol, titrant une de ses conférences « L'anarchie sans le désordre».

Le petit bourgeois ergoteur décrypté par Marx

Avec sa brillante polémique fondatrice contre Proudhon (Misère de la philosophie) face à laquelle celui-ci a été bien incapable de répondre, Marx a jeté les bases de la cohérence matérialiste pour la lutte des classes. Dans ce pamphlet, écrit initialement directement en français, Marx critique son gadget « l'impôt sur la consommation », de la même manière qu'il aurait pu se moquer de l'impôt sur les riches pour tenter de mieux faire durer la société actuelle1. Ensuite, un des multiples mérites de l'ouvrage est de rappeler, ce qu'oublient anarchistes et admirateurs de la gauche bobo, de rappeler le refus de la grève par Proudhon, typique du petit boutiquier ou du paysan. Marx est en outre le premier à dénoncer l'individualisme en politique, cette « vanité de l'individu » mais dans un courrier privé2

De plus Proudhon anticipa déjà la personnalisation stupide de la vie politique par la gauche bourgeoise au XX ème siècle et par après, principale mystification pour gommer l'existence de classes opposées ; ainsi tout devient la faute d'individus méchants : Staline, Hitler, etc., puis Thatcher, Le Pen, Ceausescu, Mao, Poutine, etc. Dans le camp de l'extrême bêtise cela se traduit par « Macron dehors », « la police tue », « patrons voleurs »etc.

La formule imbécile de Proudhon « la propriété c'est le vol » correspond tout à fait à la formulation anticapitaliste primaire « faire payer les riches », ces parasites, ces "voleurs" (Nathalie Arthaud), ultra-riches qui disosent de la propriété nationale principale, voire qui gouvernent le monde grâce à leur fortune...si jalousés pourtant par les bobos parisiens dits « couches moyennes » qui les vomissent pathologiquement. Marx est sans pitié pour la formule de Proudhon : « ainsi définir la propriété bourgeoise n’est autre chose que faire l’exposé de tous les rapports sociaux de la production bourgeoise. Vouloir donner une définition de la propriété, comme un rapport indépendant, d’une catégorie à part, d’une idée abstraite et éternelle, ce n’est peut être qu’une illusion…». Toute propriété ne devient pas capital. Les rapports sociaux sont le reflet des stratifications et hiérarchisations de la société capitaliste, pas la simple propriété privée qui recouvre tout et n'importe quoi.

Les rapports de propriété antiques avaient été remplacés par la propriété féodale, celle-ci par la propriété bourgeoise, en adéquation avec les exigences de chaque régime. Plus consternant : « les notions juridiques du bourgeois sur le vol s’appliquent tout aussi bien à ses profits honnêtes ». Il s’agit donc de supprimer le capital pas en soi les riches (bien que cela ne me gêne aucunement qu'on puisse faire raquer les riches). . Marx favorise la compréhension du mode de fonctionnement des institutions bourgeoises, complexe et plus politique qu'économique quand Proudhon est réducteur en privilégiant des causalités simplistes personnalisées. Proudhon anticipe donc le réformisme populiste que nous fait subir la gauche bourgeoise en ce début de siècle dangereux . Le mutuellisme et le fédéralisme sont les bases politiques étroites des cliques écologiques. Comment ne pas sourire, en comparant avec nos oisillons députés actuels refusant de voter le budget, un Proudhon, élu député qui déclara : « Je vote contre la constitution parce que c'est une constitution » !

Avec Proudhon, penseur écologique avant l'heure gaucho-bobo, on assiste au triomphe de l'idéologie propriétaire avec sa seconde formule ridicule : « La nature n'est effectivement pas à tout le monde puisqu'on nous l'a volée ». Dans la foulée proudhonienne de la gauche bobo, ce n'est même plus la bourgeoisie, ni les patrons, ni l'industrie qui pourrissent la terre ; on en est venu à calculer le CO 2 du riche : « « Les ultras-riches brûlent notre planète » : l’ONG Oxfam dénonce dans un rapport les inégalités d’émission de gaz à effet de serre dans le monde »3. Les riches fument-ils plus que les prolos ? Jettent-ils plus d'ordures ? Rien n'est démontré et on s'aperçoit comme vous l'avez lu dans la note dans la note que les bourgeois sont sensés surtout « polluer la démocratie », autrement dit le même argument de base de la mélasse anar des insoumis et autre anticapitalistes en peau de lapin, arc-boutés au fond dans la défense de l'actuelle démocratie...bourgeoise ! Le choeur des clowns anti-pollueurs contre les nantis polluant s'allonge à chaque prestation télévisée : Picketty, Zucman, Le Monde Diplo, Edwy Plenel, Pinçon-Charlot le couple bien nommé qui crucifie « la violence des riches » qui personnalise à qui mieux mieux la domination capitaliste, au prétexte de défendre des « couches populaires », pourtant en effet suivistes et souvent idiotes en se moquant du marxisme qui explique que la domination est « sans visage » refusant d'individualiser le conflit des classes.4

Lettre à J.-B. Schweitzer

Londres, le 24 janvier 1865.

Monsieur,

(...) J'ai reçu hier la lettre dans laquelle vous me demandez un jugement détaillé sur Proudhon. Le temps me manque pour répondre à votre désir. Et puis je n'ai sous la main aucun de ses écrits. Cependant pour vous montrer ma bonne volonté, je vous envoie, à la hâte, ces quelques notes. Vous pourrez les compléter, ajouter ou retrancher, bref en faire ce que bon vous semblera ».


On peut appliquer plusieurs des réflexions dans la lettre à Schweitzer sur l'amateurisme proudhonien à la plupart des députés de la gauche bobo (du PS à LFI), celles-ci en particulier :

«Il partage les illusions de la philosophie “ spéculative ” : au lieu de considérer les catégories économiques comme des expressions théoriques de rapports de production historiques correspondant à un degré déterminé du développement de la production matérielle, son imagination les transforme en idées éternelles, préexistantes à toute réalité, et de cette manière, par un détour, il se retrouve à son point de départ, le point de vue de l'économie bourgeoise 5.

« Proudhon n'a que des idées imparfaites, confuses et fausses sur la base de toute économie politique, la valeur d'échange »,

« Il emprunte aux socialistes l'illusion de ne voir dans la misère que la misère (au lieu d'y voir le côté révolutionnaire, subversif, qui renversera la société ancienne) ».
« ... Il veut planer en homme de science au-dessus des bourgeois, et des prolétaires; il n'est que le petit bourgeois, ballotté constamment entre le Capital et le Travail, entre l’économie politique et le communisme ».

« Le petit-bourgeois, tout comme notre historien Raumer, se compose de “ d'un côté ” et de “ de l'autre côté ”. Même tiraillement opposé dans ses intérêts matériels et par conséquent ses vues religieuses, scientifiques et artistiques, sa morale, enfin son être tout entier. Il est la contradiction faite homme ».

« il saura bientôt jongler avec ses propres contradictions et les élaborer selon les circonstances en paradoxes frappants, tapageurs, parfois scandaleux, parfois brillants. Charlatanisme scientifique et accommodements politiques sont inséparables d'un pareil point de vue. Il ne reste plus qu'un seul mobile, la vanité de l'individu, et, comme pour tous les vaniteux, il ne s'agit plus que de l'effet du moment, du succès du jour ».




NOTES


1Marx peut se moquer de tous les à peu près économiques de Proudhon  (comme de ses héritiers actuels ignorantins et fabulateurs à la triste assemblée nationale): « Les derniers “ exploits ” économiques de Proudhon furent sa découverte du “ Crédit gratuit ” et de la “ Banque du peuple ” qui devait le réaliser. Dans mon ouvrage Zür Kritik der politischen Oekonomie (Contribution à la critique de l'économie politique) Berlin 1859 (pp. 59-64) , on trouve la preuve que la base théorique de ces idées proudhoniennes résulte d'une complète ignorance des premiers éléments de l'économie politique bourgeoise : le rapport entre la marchandise et l'argent; tandis que leur superstructure pratique n'était que la reproduction de projets bien antérieurs et bien mieux élaborés ».(cf. Lettre à Schweitzer)

2Lettre à J.-B. Schweitzer Londres, le 24 janvier 1865.

3« Un individu appartenant aux 0,1 % les plus riches [de la planète] émet plus de CO2 en une journée qu’une personne parmi les 50 % les plus pauvres en une année. » L’ONG Oxfam tire la sonnette d’alarme, ce mercredi 29 octobre, dans un rapport intitulé « Pillage climatique : comment une puissante minorité plonge le monde dans le chaos ». Selon l’étude, 55 % des millionnaires interrogés estiment que la concentration extrême de richesse constitue une menace directe pour la démocratie. En d'autres termes, plus de la moitié des riches citoyens reconnaissent que l’accumulation des fortunes colossales entre les mains d’une minorité affaiblit les institutions démocratiques et alimente l’instabilité mondiale. Seuls 40 % des répondants contestent cette idée, tandis que 6 % restent indécis. Ce sentiment est particulièrement marqué en ce qui concerne l’impact politique. Une large majorité (75 %) des répondants considère que les milliardaires achètent de l’influence politique à travers des donations ou des actions en coulisses. De plus, 72 % estiment que les milliardaires utilisent leur contrôle sur les médias pour manipuler l'opinion publique, et 71 % voient dans les réseaux sociaux un outil d’influence disproportionnée.

Les ultra-riches : un danger pour les institutions fondamentales (sic).

4« Loin d’être l’œuvre d’un ‘’adversaire sans visage’’, cette violence de classe se rapporte bien à une pratique politique, économique et sociale de classe, de la classe bourgeoise soit les très riches possédants mais aussi de la classe capitaliste soit des grands détenteurs des moyens de production, ce qu’on nomme conceptuellement un classisme, et qui se manifeste ordinairement par une politique très destructrice au plan social et environnemental a ses agents, ses stratégies et ses lieux. Les dirigeants politiques de droite et de gauche (PS et écolos modérés) du bloc dominant y ont une part écrasante de responsabilité ». Mais ce discours est pourtant bien celui des PS, écolos-bobos et LFI ! Le couple pincez Charlot ose proposer cette navrante solution anticapitaliste primaire: taxer les milliardaires pour réduire leur puissance ! Ils sont reproducteurs de formules cucul la praline :   « thatchérisation du monde », « Sarko et Macron, présidents des riches ».