"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

mercredi 24 janvier 2024

MARX ENNEMI DES PAYSANS ?


 « La paysannerie est une classe à faible caractère de classe ».

Teodor Shanin

« Pierr' Frank prend sa faucille

Et laiss' tomber le marteau »

Chanson situationniste

« On déverse de la merde devant les préfectures parce qu'on est considéré comme de la merde »

Un agriculteur français


Qu'on le constate ou le déplore, le « sac de patates » est universellement méprisé. Il sent la merde et l'esclavage féodal. Ce n'est pas ce soudain engouement des « français » pour une cause perdue d'avance qui l'infirmera dans la durée ; il ne s'agit au demeurant que d'un soutien sentimental tant les conditions sont différentes entre les classes : quel intérêt commun entre le petit entrepreneur et son ouvrier agricole ?

Je fais partie de cette vieille et dernière génération qui passa de l'état de paysan à celui d'ouvrier, statut qui n'est plus du tout le même. Certes il ne faut pas les oublier ces « gueux » qui nous ont toujours nourri, enfin eux et les agriculteurs de tous les pays. Ils font partie de la très ancienne histoire humaine et existèrent bien avant la classe ouvrière. Nous admirons toujours la longue épopée de leurs jacqueries.

Jusqu'à l'âge de 21 ans – il était né en 1918 – mon père fût paysan en Margeride. Puis c'est la guerre qui l'arracha à la ferme paternelle. Fait prisonnier dans la Somme puis déporté au stalag1B, il réussit à s'évader, est embauché comme garçon de caisse à la société générale de La Bourboule. Quand son directeur le somme de se dévouer pour le STO, il se fait la malle une seconde fois pour rejoindre le maquis auvergnat, où il participera à la sauvegarde et protection des juifs commerçants de Clermont. Ma mère avait été femme de chambre des Rothschild au grand hôtel de la Bourboule à la fin des années 1930. Rencontrée au bar du coin elle avait abandonné son mari pour enfourcher la moto du beau résistant aux yeux verts. A Albi lorsqu'il y avait de la friture dans ce couple adultère j'entendais ma mère invectiver ainsi mon père : « paysan ! Tu resteras toujours un paysan ! ». Il est vrai qu'on ne peut jamais s'émanciper complètement de son éducation de jeunesse... pourtant pour le reste de sa vie il resta toujours un prolétaire aux mille métiers.

Fin des sixties, au même âge où mon père était mobilisé, rencontrant le milieu maximaliste dit à l'époque ultra-gauche, je fus choqué d'entendre que la résistance nationale avait été « bourgeoise » , voire « plouque»! Longtemps après j'avais questionné Marc Chirik, avec la franchise qui a toujours présidé à notre amitié, pas simple camaraderie. Après lui avoir narré la trajectoire de mon père, voici ce que je lui dis : « vous les ultra-gauches, dénonciateurs des deux camps impérialistes, vous êtes marrant. Pendant la guerre votre groupe aurait tenu dans une traction avant ! Comment vouliez-vous que les prolétaires français vous rejoignent alors que la majorité de cette classe était prisonnière en Allemagne, et je préfère que les Ricains aient gagné plutôt que les Schleus ! Marc resta un instant silencieux puis esquiva une longue réponse et se contenta de me répondre : « je comprends ton père ». A la libération mon père est chômeur pour un moment. La patrie reconnaissante.

Revenons à nos patates. Le vrai programme communiste du « marxisme classique » contient la perspective de la fin de la séparation entre la ville et la campagne. Tout un programme vague et inimaginable pour longtemps1. Pour Marx c'était une des questions cruciales pour le but d'avenir ; la dissolution des classes hiérarchisées de la forme capitaliste, délimitation en classes indispensable à la domination bourgeoise. Des générations de sociologues ont conspué un « ennemi de la paysannerie », qui n 'avait rien compris à la paysannerie parce qu'il observait (déjà) en Angleterre une agriculture déjà sans paysans. La fameuse phrase du Dix-huit Brumaire de Louis Bonaparte : « Les paysans français sont comme des pommes de terre dans un sac» était pourtant une juste intuition qui préfigurait l'éclatement futur de cette classe disparate plutôt ficelée à la classe dominante, et qui est désormais minoritaire dans plupart des pays industrialisés. Tout en posant toujours problème. Avec son ouvrage «L'absorption de l'agriculture dans le mode de production capitaliste» qu' un Claude Servolin l'analysa . Marx n'est pas un ennemi mais un observateur sagace de cette vieille classe paysanne conservatrice et sans avenir, et cela se confirmera à la fin du XX ème siècle après les illusoires trente glorieuses qui butèrent sur la crise mondiale de 1973-75.

D'autres sociologues plus modernes que les conservateurs anti-marxistes ont heureusement produit des analyses plus conforme aux progrès et avanies du capitalisme moderne. Les petits producteurs marchands ont fini par se trouver «objectivement» prolétarisés alors qu'ils se pensaient toujours comme des petits entrepreneurs. Malgré deux siècles de règne du Code Napoléon, les règles de transmission de la terre sont restées très variées de région à région. En Vendée, le grand propriétaire résidant gouverne ses métayers devenus fermiers. En Beauce, le grand fermier exploite les terres de dizaines de propriétaires qu'il ne connaît pas. Etc. Pendant longtemps le lien avec la famille à la campagne resta naturel pour les ouvriers de la première génération. Cet auteur pouvait considérer une interdépendance fraternelle qui nous apparaît ringarde au XXI ème siècle :

« ... hiérarchie en deux classes sociales : les manouvriers et les laboureurs du XVIIIe siècle, devenus les ouvriers sidérurgiques et les agriculteurs de la fin du XXe, ont conservé leurs rapports sociaux d'échanges de services et de répartition du pouvoir municipal. Les femmes demeurent maîtresses du domestique et les hommes de l'extérieur, que ce soient les champs ou l'usine, le café ou le conseil municipal. Tant que les femmes font leur jardin, élèvent leur basse-cour et règlent chez l'épicier ou à la fontaine les problèmes sérieux (stratégies matrimoniales et police des mœurs), elles conservent leur pouvoir indépendant de celui des hommes. Que la moitié des hommes aillent travailler à l'usine (jusqu'à la crise) et qu'il ne reste plus qu'une poignée d'agriculteurs n'avait pas transformé le village paysan en une banlieue ouvrière ».

LE CHANT FUNEBRE DE LA PAYSANNERIE

Or aujourd'hui les villages ressemblent plutôt à des EPHAD. La moyenne d'âge des paysans est de 52 ans. Ils sont souvent divorcés parce que le métier est dur et de plus en plus mal rétribué, avec toutes les chances de ne plus retrouver une compagne et de crouler sous le sac de dettes. Actuellement les gouvernants antiracistes comme les patrons, ont décidé de saupoudrer le pays et ses villages d'africains, que des hommes en général, certainement pour « rajeunir et faire évoluer les campagnes », en les logeant à l'hôtel sans se soucier de la suite.

Tout cela est secondaire et sert surtout à faire danser la gauche bourgeoise et son internationalisme de pacotille. L'explosion de colère, il faut insister sur ce fait, a son origine dans la guerre en Ukraine. Ordre gouvernemental : priorité au blé ukrainien dont on se soucie peu de savoir si on a utilisé des pesticides (plus 230 millions de poulets ont été importés en solidarité...)2 ; avec l'intégration de l'Ukraine à l'Europe s'il n'y a pas la guerre mondiale avant, la production de blé en France n'existera plus.

Il existe de jeunes agriculteurs dynamiques, plus entrepreneurs que paysans reclus sur leur parcelle, mais qui véhiculent l'idéologie écolo fallacieuse qui croit pouvoir relancer le capitalisme , cependant ils sont très minoritaires face cette idéologie punitive qui les détruit. Le fond de la pensée paysanne domine encore dans ce milieu : mépris de l'ouvrier et le peu de considération de la femme. N'oublions jamais, en mangeant mandarines, oranges, légumes divers, l’exploitation brutale des ouvriers agricoles et des travailleurs saisonniers, aussi par de « jeunes entrepreneurs dynamiques » !

Une autre anecdote édifiante sur l'esprit paysan ? Un jour en lozère, un voisin vigneron du côté d'Alès me convia à rendre visite à Belvezet à un ami paysan célibataire quinqua vivant encore à la ferme avec ses parents et sans femme. Il commença ainsi les présentations : « moi 37 hectares, ma femme 8 hectares »... Le paysan reste attaché à « sa parcelle » et l'exhibe comme sa principale fortune, ne décrochant pas du culte de la propriété privée. Il a souvent été du côté du manche policier, et composé la corporation. L'armée versaillaise qui a massacré des milliers d'ouvriers parisiens en 1871 était surtout composée de paysans.

Marx dans le « 18 Brumaire » en 1852, ne contestait pas une capacité insurrectionnelle des paysans, mais il leur dénie une aptitude à l’action autonome. La paysannerie est décrite comme le sac de pommes de terre, une masse amorphe — au sens politique du terme — incapable de fixer une orientation propre. L’image renvoie aussi à la dispersion des unités paysannes : structures fragmentées, inaptes à nouer des liens entre elles, et multiples parcelles dispersées. La paysannerie ne peut se représenter politiquement ; elle doit être représentée. Son représentant ne peut qu’être son maître. Elle tombe de ce fait sous la coupe de grandes forces sociales considérées comme porteuses d’un projet propre : la noblesse, la bourgeoisie ou le prolétariat.

Au moment de la vague révolutionnaire du début du siècle dernier, la paysannerie est un fardeau immense pesant sur l’action des révolutionnaires. Engels avait été à la fois plus « classiquement marxiste » et plus conscient des limites du mir, ou plus sensible à ce qui lui semblait un processus de décomposition de la communauté paysanne traditionnelle. La prudence s'imposait pour le pouvoir bolchevique qui a finalement foncé dans le tas, et sans avoir tous les torts face aux attentats anarchiques et à cette masse immense difficile à maîtriser et peu soucieuse d'inventer autre chose que le capitalisme. Engels conseillait comme indispensable de composer avec les attentes des paysans, pourtant considérés comme conservateurs acharnés du passé, ni les forcer, ni les brusquer. Engels avait encore insisté sur ce point dans un de ses ultimes écrits de 1894-1895. Quoique presque un siècle plus tard la bourgeoisie ne se gêne pas pour les malmener et les éradiquer.


L'OXYMORE DE LA FAUCILLE ET DU MARTEAU


Célèbre dans le monde entier l'oriflamme rouge sur lequel on a dessiné le manche du marteau croisant la lame courbe de la faucille fût surtout le fruit symbolique en 1923 de la politique opportuniste de Lénine et de la III ème Internationale.

Lénine a en effet été impressionné par les formes de lutte des paysans en 1905-1906 ; une lutte qui est directement dirigée contre les propriétaires fonciers et tout ce qui incarne l’ancien régime. Il s’était enthousiasmé pour la spontanéité paysanne au point que des membres du parti bolchevique l’accusèrent d’illusion pro-paysanne et de régresser du marxisme au populisme.

Dans le cours de l’année 1917, et plus encore en 1918, Lénine avait constaté que la paysannerie faisait certes une révolution, mais que c’est sa révolution à elle, celle de l’appropriation des terres partagées égalitairement mais aboutissant au plein rétablissement des structures communautaires traditionnelles. Les deux révolutions, celle de la paysannerie et celle des forces populaires urbaines, sont de nature différente et ne se rejoignaient que dans le désir de paix (en dehors de l’élimination de l’ancien régime qui est obtenue pratiquement d’un seul coup). La jonction espérée en 1918 entre conseils ouvriers urbains et soviets des comités de paysans ne se concrétise pas .

L’hérésie de cette supposée alliance avait ainsi donné raison à Trotsky dans sa polémique avec le


Lénine d’avant 1914, mais pas tout à fait dans le sens qu’il le croyait alors. Trotsky s’était moqué des espoirs que Lénine plaçait en 1905 dans un partenariat entre ouvriers et paysans. Il réaffirmait, avec Marx, l’incapacité de la paysannerie à agir globalement et par elle-même sur le plan politique. Il répétait que la paysannerie ne pouvait que suivre l’une ou l’autre des grandes forces sociales, qu’il n’y avait pas d’autonomie possible et donc qu’il s’agissait d’une alliance inégale. Un prolétariat décidé pouvait et devait, selon lui, entraîner la paysannerie. Sinon, comme en 1905-1907, les baïonnettes du paysan-milicien obéissant à ses officiers rendraient possible la survie de l’ancien régime et la victoire de la contre-révolution.(cf. La révolution permanente). Toujours selon Trotsky, Lénine était inconséquent, sa formule de 1905 sur « la dictature démocratique des ouvriers et des paysans »
 signifiait que le prolétariat organisé dans son parti allait jouer un rôle décisif dans le succès d’une révolution qui resterait pour une longue période de nature bourgeoise. Le parti ouvrier qui conduirait cette révolution binaire ne confirmerait pas le caractère prolétarien et communiste de 1917. Il opposait à Lénine sa conception de la « révolution permanente » : si le prolétariat socialiste prenait la tête de la révolution, il ne s’arrêterait pas en chemin et irait jusqu’au bout du processus engagé, passant sans transition de la phase bourgeoise, qu’il accomplirait, à la phase socialiste sauf que la dite contre révolution stalinienne a mis tout le monde d'accord. 

L'idéologie d'une « révolution paysanne » en Chine est demeurée longtemps une pure affabulation qui séduisit un paquet de fils de bourgeois parisiens et qui, depuis, montés dans la hiérarchie sociale, ont fait mine d'oublier leur imbécillité politique à l'époque. Plus que nos petites sectes maximalistes la supercherie fût démontée par un Lucien Bianco décillé, Simon Leys et Pierre Souyri. Dans le cas chinois, le monde révolutionnaire fictif, c’est avant tout celui de son élite kaki rassemblée dans le parti (PCC fondé en 1921), du moins après le retournement contre-révolutionnaire de l’allié nationaliste du Guomindang, supposé, pour l’IC, représenter la bourgeoisie combattante ]. Pire encore, le PCC perd rapidement toute base sociale urbaine large partir de la défaite de 1927. Réussir une soit disant révolution, en réalité le bricolage d'un capitalisme d'Etat sous-développé, sera l’œuvre du maoïsme, qui reste méfiant et à distance critique du monde paysan qui sera en partie décimé par les « gardes rouges ».

Le bilan qui découle de la contre-révolution de 1927 est sans appel. La contre-révolution s’impose aisément ; en l’absence des révolutionnaires, c’est la rapide débandade de l’action paysanne qui révèle une fois de plus sa faiblesse, sa fragmentation, son absence de sens de l’organisation. L’échec de 1927 fait écho en quelque sorte au marxisme classique : la paysannerie doit être politiquement représentée, ne peut se représenter elle-même.

QUAND LE « SAC DE PATATES » EST DEVENU « PAQUET DE DETTES » méprisé par le gauchisme « léniniste 

Le paysan, ligoté par les banques, est perclus de dettes faramineuses ? Des dettes énormes à faire pâlir les ouvriers avec leurs petits déficits bancaires résorbables en faisant attention. Mêmes les gros paysans sont en voie de disparitions derrière de grands consortiums où l'enrichissement est garanti opaque. Les médias compatissent, interviewent à tout va le paysan avec sa casquette, ses bottes crottées et son mégot. On déplore un burn out des agriculteurs. On imagine que vont se lever par milliers des « consommateurs efficaces » prêts à « acheter français » certes plus cher mais pour « sauver nos paysans ». Le ronron commun persiste à, être la « transition écologique » qui va sauver le monde avec une productivité saine niveau moyen âge mythique dans la petite cervelle des bobos parisiens et provinciaux. L'Etat serait aux abois, nouvelle jaunisation d'une colère prétendue spontanée, reprenant l'exemple des luttes ouvrières du lointain passées qui, elles, débordaient vraiment les syndicats d'Etat. Faut pas extrapoler ni exagérer. Seule similitude : comme les syndicats encadreurs des ouvriers, les machins syndicaux paysans délèguent exclusivement des femmes comme secrétaires générales, ce qui fait résolument « révolution féministe » mais foutage de gueule pour la situation des femmes en général.

La nouveauté de ce mouvement pas complètement cornaqué par la FNSEA et la Coordination paysanne est que la mouvance écologique et gouvernementale voilà l'ennemi et pas le « fascisme qui monte si on veut s'asseoir dessus ». Des déchets ont été déversés devant des locaux d'EELV. Le minuscule PCF appelle à une jonction des luttes « contre la vie de plus en plus chère » car nous sommes avant tout des citoyens tiens tiens...donc braves électeurs sans voix.

Le NPA défend mordicus l'idéologie écolo, si punitive, si ambiguë, dont les règles sont variées de la plus laxiste à la plus contraignante ; sûrs d'être envoyés chier par les paysans ;. Comme ces agriculteurs qui demandent le beurre et l'argent du beurre, nos trotskiens les plus girouettes promettent la lune écolo et nous inventent cette nouveauté géniale pour la survie de l'humanité française, une « sécurité alimentaire » que je ne me rappelle pas avoir vue mentionnée dans le Manifeste de 1847, qui est sans doute un apport fondamental à un marxisme moderne passé à la moulinette de l'écologie conformiste, guestapiste et pacifique :

« La FNSEA, syndicat majoritaire, utilise cette colère pour tenter de faire reculer encore un peu plus les protections environnementales. Comme le gouvernement dont il est l’allié privilégié ou l’extrême droite, la FNSEA incarne un modèle agricole intensif et productiviste, destructeur pour les paysans es comme pour l’environnement et la santé. L’accaparement des terres par les multinationales, le poids de l’agrobusiness et des centrales d’achat qui tirent les prix d’achat vers le bas, la signature de traités de libre-échange sont les vraies menaces. C’est cette orientation qu’il faut combattre. Il faut répondre aux revendications des agriculteurs/trices. Cela veut dire changer profondément les politiques publiques agricoles : imposer aux grands groupes des prix plancher et aux banques un moratoire sur les dettes ; favoriser les modèles bio paysans ; développer et soutenir la filière bio. La mise en place de la sécurité sociale alimentaire assurerait une alimentation de qualité pour tous·tes, faciliterait de nouvelles installations, et permettrait une juste rémunération des paysan/es. Une autre agriculture est possible ! Pour cela, il faut rompre avec l’agriculture intensive, productiviste, industrielle, dopée à la chimie ». 

La version de la scission du NPA, - REVOLUTION PERMANENTE - grenouille devenue plus grosse que le bœuf, offre une prise de position plus charpentée et plus argumentée qui analyse bien la manip syndicale, ce qui ne l'empêche aucunement d'être débile « La colère des petits agriculteurs est légitime : il faut dégager la FNSEA et se lier aux ouvriers ».

Comme le compère cité plus haut, il faut enseigner aux ploucs comment penser révolutionnaire et penser révolutionnaire c'est penser écolo :

« Une précarité systémique d’une partie des exploitants, canalisée sur le terrain anti-écolo

Mais si c’est sur ce terrain que s‘exprime de façon prédominante les revendications de l’ensemble des agriculteurs mobilisés, plutôt que contre la grande distribution et les grands capitalistes du secteur, c’est que la direction du mouvement et ses revendications sont capturées par les gros bonnets de la FNSEA et des JA. Ces syndicats majoritaires ont à leur tête les grands gagnants de la concentration foncière et de l’agro-industrie », 

REVOPERM affirme un trotskisme anti-européen, vont-ils s'allier avec le fringant Bardella ?

« Or, si par ses traités, l’Europe accentue la concurrence entre les différents pays de l’Union européenne, c’est essentiellement pour favoriser les grands patrons de l’agro-alimentaire et diviser les petits exploitants agricoles quelques soient leurs pays. De ce point de vue, lutter contre l’Europe au service des patron de l’agro-business, implique de lutter à l’échelle nationale contre les grands patrons qui font partie de ce conglomérat européen. À rebours de ceux qui comme l’extrême-droite cherchent à diviser les agriculteurs en faisant de l’exploitant agricole des autres pays européens l’ennemi du français, il s’agit de lutter contre les vrais responsables d’un système agricole qui favorise les grands capitalistes de l’industrie, de la grande distribution et des banques. Ce qui est en jeu c’est donc bien la crise de tout un système agricole, qui ne vit d’ailleurs qu’à coup de subventions massives, elles aussi versées majoritairement à ceux qui ont déjà tout, qui est à l’origine de la colère qui traverse toute l’Europe ».

Lorsque les trotskiens donnent des leçons de ce genre, en parlant « internationaliste » ils ne s'aperçoivent pas combien ils sont ridicules d'appliquer des motivations de lutte extensive propres à la classe ouvrière au magma paysan sans conscience et sans capacité à offrir un projet politique, avec un argumentaire moisi très léniniste opportuniste3 ;

En résumé le vieux programme de transition au communisme des années 1930 avec deux nouveautés un trotskisme européen et l'écologie pardessus tout leur bazar !

  • lutte à visage européen

  • contrôler les prix

  • rationaliser écologiquement la production

  • une nationalisation de toutes les banques sous contrôle des travailleurs, et notamment du Crédit Agricole, dont l’ancienne présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, est administratrice.

  • un revenu garanti pour chaque actif agricole, qui ne soit pas inférieur au SMIC, dont nous exigeons l’augmentation à 1800 euros pour tous, ainsi que 35 heures de travail hebdomadaire maximum.

Suit un appel à toutes les mafias syndicales de la gauche bobo et bourgeoise, somme toute ringard et classiquement triste :

« Le mouvement ouvrier (sic), et au premier chef les directions syndicales, ne peuvent pas rester muettes et doivent proposer un programme en direction des agriculteurs de petites et moyennes exploitations. Un programme qui cherche à remettre en question le système agraire actuel qui est destinée servir les grands capitalistes de l’agro-alimentaire, la grande distribution, l’industrie et les banques. Voilà ce que devrait proposer le mouvement ouvrier aux agriculteurs, pour lutter contre l’influence de l’extrême-droite, mais aussi de « syndicats » traitres vendu aux lobbys agro-alimentaires et retourner la colère légitime des petits agriculteurs contre les vrais responsables : le grand patronat ».

PEUT-ON SE PASSER DES PESTICIDES ?

Sur cette question comme sur celles du nucléaire, on m'excusera de l'image usée par les années mais si parlante en l'espèce, nos professeurs de lutte écolo-gauchistes et tous les autre ânes de LFI et des résidus PCF et PS, ils veulent mettre la charrue avant les boeufs ou même se passer de ces animaux. Ils participent aux prétentions affichées journellement par les sirènes de la domination pour seriner la capacité d'adaptation, de renouvellement, d'intelligence (certes artificielle) du présent capitaliste. Or de vrais changements ne sont pas possibles dans le système actuel où il faut faire avec les moyens du bord, sachant même qu'ils sont limités voire potentiellement dangereux. Stopper la construction de centrales nucléaires a été une connerie monstrueuse des Hollande et Macron dont j'ai déjà démontré le pourquoi. Pour les pesticides c'est pareil. Du point de vue de classe on peut émettre un avis même si on n'est pas aux commandes et sans prendre au sérieux les délires irresponsables de tous ces bobos militants. Il faudra faire un historique de toutes les débilités imposées par les dites couches moyennes, au nom de la recouvrance de la nature traditionnelle, comme la réintroduction des loups qui dépècent des élevages et auquel les paysans ne doivent pas toucher un poil, sinon direction la prison !

Pour réduire l’usage des pesticides, l’État a dégainé en 2009 une feuille de route, le plan Écophyto. Sa dernière version reporte à 2025 l’objectif de réduire de moitié l’usage de ces produits. Certaines filières agricoles ne disposent pas ou peu de méthodes de substitution aux pesticides pour lutter contre les ravageurs et les maladies. C’est le cas de la betterave.  L'Etat a dû consentir à des exceptions concernant l'utilisation détergents et polluant, ce qui a indigné la mouvance écolo-bobo.

 La culture intensive rend la betterave particulièrement vulnérable aux maladies. Pour augmenter les rendements, la production s’est fortement mécanisée, ce qui a exigé de travailler des parcelles de plus en plus vastes au détriment des haies où vivent les insectes et les oiseaux susceptibles de réguler les populations de ravageurs. Dans le Nord-Pas-de-Calais, les champs de betteraves se déploient à perte de vue, les insectes y infestent donc de grandes surfaces, contrairement aux zones où les cultures sont diversifiées.

Juste deux autres exemples supplémentaires . D’autres filières se retrouvent dans une impasse, notamment celles de la pomme de terre ou du blé, soumises à la même logique de production intensive. Les pommes de terre sont de grosses consommatrices de fongicides. Il existe des variétés résistantes au mildiou, première cause de traitement. Mais elles sont peu cultivées car elles ne correspondent pas aux exigences techniques des industriels de l’agroalimentaire qui fabriquent des frites.

Enfin, on a expliqué aux paysans depuis des décennies qu'il est possible de se passer du glyphosate pour désherber en utilisant des moyens mécaniques qui supposent d'acheter un tracteur à 60.00 euros, qui ne peut passer dans les vignes très en pente, seule solution : à la main comme à l'époque féodale ! Merci les écolos conseillers de la noria des boutiquiers des « énergies renouvelables ». Nos khmres rouges-verts sont donc aussi responsables des lourdeurs administratives et flicages permanents dont se plaignent les paysans4. Ils ont raison désormais de vouloir voter RN car celui-ci est plus réaliste et ne promet pas la lune peinte en vert, même si au pouvoir il n'y pourrait rien changer. Quoiqu'il n'ai rien à craindre politiquement, en face il n'y a que des charlots qui promettent monts et merveilles quand tout le système s'emballe et devient incontrôlable sans qu'aucune solution ne soit crédible.

Voilà c'est tout pour aujourd'hui. Dans ce merdier le gouvernement a intérêt à ne pas laisser traîner des mois sans baisser culotte comme lors de la crise des gilets jaunes. Mais il n'a rien à craindre d'une supposée alliance paysans-ouvriers. Les paysans sont des petits patrons otages du crédit agricole. Un jeune paysan n'aura pas assez de toute sa vie pour rembourser des crédits gigantesques. Un tracteur neuf cela va chercher dans les 100.000 euros sans compter le matériel, remorques et etc.

L'ouvrier lui va mieux y arriver avec un crédit de 5000 euros pour acquérir une voiture d'occasion, et probablement mieux manger à sa faim que ce pauvre homme qui roule perché sur son tank à gros pneus, enfermé dans une vie de merde, avec l'odeur de la merde, sans connaître les joies de la grève et sans trouver femme dans son village de grabataires.

Qui veut être paysan aujourd'hui ?





NOTES


1Théme fondateur et fondamental du marxisme, avec déjà en filigrane un souci écologique, est l’opposition entre la ville, conçue comme lieu de progrès, et la campagne, perçue comme source de régression. Marx reliait tout projet de modernité (bourgeois ou post-capitaliste) à la victoire des villes sur le monde rural arriéré. Mettre fin à la cassure entre les deux mondes, cette exigence du socialisme, ce n’était pas procéder à une réunification harmonieuse, c’était déruraliser les campagnes, au moins socialement et économiquement. La paysannerie incarnait la « barbarie au sein de la civilisation ». Ces formules visaient le monde rural français des années 1850. Dans le Manifeste du parti communiste (1848), Marx et Engels considéraient que l’un des grands mérites de la bourgeoisie c’était d’avoir « arraché une grande partie de la population à l’idiotisme de la vie des champs ». On pourrait dire à peu près la même chose en ce moment, mais à l'envers : la bourgeoisie affairiste et décadente écrase les petits agriculteurs pour les faire disparaître au profit des gros.

2Le poulet français coûte 6 euros quand l'ukrainien n'en vaut que 3 ! Dans ces conditions qui veut acheter français ? En Ukraine les antibiotiques pour animaux ne sont pas interdits. La débilité bureaucratique de la bourgeoisie française soumise à l'irresponsabilité de la gauche bourgeoise écolo est bien décrite ici et je comprends d'autant mieux la colère des paysans: «Surtransposition» des normes : quand la France alourdit les contraintes des agriculteurs au-delà de ce qu’exige Bruxelles (lefigaro.fr) Et devinez qui vient jeter de l'huile sur le feu et qui montre qu'il serait urgent que même les paysans fassent tomber ce gouvernement d'une élite lâche et hors des réalités: le Haut conseil pour le climat (machin créé par Macron) vient de publier une annonce aussi débile que la surimposition des critères écologiques (en réalité très capital-profit pour la filière), appelant à accélérer "la transition climatique" dans l'agriculture! encore un concept  trotskiste ! Vive l'insurrection paysanne!

3Sur leurs fanions rouges ils ont inversé les lettres RP sans doute en filiation avec le PCF qui avait inverser la faucille et le marteau pour faire original par rapport au drapeau de Staline ; ils devraient reprendre ces deux outils à la place de leur minable appellation.

4Je pourrais vous livrer d'autres anecdotes vécues dans le Pas de Calais où des écolos se font casser la gueule. Tel ce touriste bourgeois parisien qui était venu sermonner un gardien des parc à moules, qui doit tirer au fusil pour éloigner les mouettes, ce qui fait qu'il arrive qu'une prenne du plomb dans l'aile. Le bobo parisien avait surgi pour morigéner l'ouvrier en le menaçant ; pourtant grand et costaud il a été accompagné à l'hôpital mâchoire et nez fracturés.