"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

dimanche 17 mars 2019

LES GILETS JAUNES AU BOUT DE LEUR NAUFRAGE POLITIQUE


« Moi personnellement le samedi je resterai sur les Champs-Élysées quoi qu'il arrive. Parce que c'est bien beau de venir sur Paris, de marcher, on fait deux-trois pancartes... C'est bien de le faire mais après on se fait pourrir à la fin" par les forces de l'ordre ».
Eric Drouet

« Ils sont là pour semer le cahos »
(Premier tweet de Castaner avec la faute d'orthographe en prime)

« Le mouvement n'existe plus » le même

"Tous ceux qui étaient là se sont rendus complices" du saccage des Champs-Elysées ». (encore lui) (les gilets jaunes sont complices des black blocks)
« Quelques centaines, quelques milliers de gilets jaunes sont venus pour casser la République » (bis repetita)



Un piège dans une noyade écologienne... pour un ultimatum raté

Le Monde a estimé que la nouvelle émeute sur les Champs était un piège à gilets jaunes, pas vraiment. Les violences symboliques restent populaires. La destruction de boutiques de luxe n'arrache
des larmes à personne, pas même aux bourgeois. La double attaque du Fouquet's est si louche qu'on ne peut s'empêcher de la placer, tant pis si ce n'est pas politically correct, au niveau d'un banal complot à l'insu du public : comment se fesse-t-il que le bar des riches après avoir été saccagé, puis gardé par une rangée dense de CRS soit incendié par après ? Deuxième couche pour incendier l'indignation ? 1 Quand les badauds gilets jaunes détournent la volonté de criminaliser en posant devant le bar détruit pour leurs selfies... Contrairement à ce que nous ressassent les employés de BFM ce n'est pas un symbole du capitalisme qui est attaqué mais un symbole de la richesse de ceux que les bobos GJ souhaitent plus taxés !

La scène a un goût de réchauffé2. Et je ne suis pas le seul à être interloqué par la mise en scène bâclée3 que d'aucuns nomment stratégie de la tension Le gouvernement rêvait de rééditer l'effroi citoyen espéré lors de l'assaut de l'Arc de triomphe le 1 er décembre 2018 – quand ce pauvre Macron fit piteuse mine chassé des beaux quartiers où il espérait incarner le retour à l'ordre parfait - aussi toute la journée d'hier ne fût que consignes de laisser-faire aux policiers, aucune fouille générale comme lors des précédentes manifestations parisiennes, pas d'arrestations massives, pas d'usage du LBT. Le mot d'ordre était simple : cassez ! Cassez ! Il en restera toujours quelque chose de bon, voire de tout bon : la victimisation de l'Etat bourgeois4. Et « gloire aux black blocks « qui font parler de nous » pour les plus stupides des GJ.

L'Etat a fait mine d'être surpris par une nouvelle scène de guérilla inattendue, toujours « inédite », sachant pourtant, comme nous tous, qu'on allait nous refaire le coup du tag "les gilets jaunes triompheront" et des méchants encapuchonnés venus aussi d'Europe. Les sites des groupes du marais des autonomes anars appelaient pourtant depuis des semaines à faire de cette journée un « ultimatum » en manifestant « autrement que par les mots » ou les tweets navrants de Drouet ou de casquette à l'envers ; des meneurs gilets jaunes se démarquaient eux-mêmes piteusement de la violence vengeresse qui s'annonçait sans fard. Dès potron minet des groupes avec ou sans gilets jaunes remontaient tranquillement l'avenue des Champs-Elysées. Puis les pavés volent, les flics se contentent de lancer des lacrymos ; on pille tranquillement sans qu'un pandore ne moufte, comme lors du pillage place de la République lors de l'acte je sais plus lequel. Des gilets jaunes font des selfies, contents d'assister au spectacle en direct. Des voitures flambent complaisamment filmées par les médias.
Certains participants nous émeuvent un instant ; un handicapé vêtu de jaune est mêlé aux casseurs avec ses deux cannes, il progresse en sautillant comme simple manifestant avec ses moyens ; plus loin un gilet jaune sur chaise roulante, poussé par un gilet jaune valide, agite ses bras, voire a lancé un pavé. Tout le monde peut participer, même les vieux et les handicapés. Inédit ! La prochaine fois j'emmènerai un de mes aveugles.

Mais ce n'est que la partie « récréative » où les badauds sont devenus admirateurs des black blocks sans cervelle. L'essentiel se joue ailleurs et les agités de l'émeute exhibitionniste ne s'en rendent même pas compte. Même le retour faussement précipité du Macron au ski (une "omniabsence" manière de signifier qu'il s'en fichait du présumé ultimatum) ne permet pas de dramatiser outre mesure les incendies des quartiers huppés; on a fini par en avoir l'habitude, l'opinion aussi. Même s'il y avait eu mort d'homme, et dieu sait si Castaner en rêvait, l'opinion aurait jugé fifty fifty répression policière et casse des cagoulés. On ne « retourne » pas l'opinion aussi facilement que dans les sixties surtout après une aussi longue contestation de la politique de pillage fiscal de l'Etat. Enfin, le stop and go policier n'abuse plus personne5.

L'essentiel de la noyade politique du mouvement « contestataire » gilets jaunes incapable en définitive de mettre en cause le capitalisme et de se rallier à la seule classe dangereuse, la classe ouvrière, était déjà orchestrée depuis plusieurs jours sous couvert de la catégorie « jeunes » avec leur embrigadement derrière la protestation écologique soft et infantile. On les avait fait défiler par milliers la veille avec un slogan emprunté aux gilets jaunes « fin du monde et fin de mois difficiles ». La presse se félicitait, tout en exhibant prioritairement les poignées d'individus dispersés sur les Champs et en train de casser, en commentant sans cesse le fait « indéniable » que les « plus pacifiques des gilets jaunes » se soient rendus à la « Marche pour le climat ».

C'est le Figaro, plus macronien qu'on ne croit qui qualifia cette césure comme UN NAUFRAGE POLITIQUE, avec la paraphrase terroriste que « les 1500 casseurs présents dans la capitale se sont une nouvelle fois servis des «gilets jaunes» comme de «boucliers humains» pour piller les commerces, incendier des bâtiments et harceler des policiers et gendarmes pourtant prévenus et déployés en nombre. La capitale a renoué avec ce mauvais parfum de décembre ». Ce que confia benoitement le petit Griveaux(employé ministériel) : «  Je vais vous dire mon sentiment : la France n’en peut plus ! Nous faisons face à une minorité d’enragés. J’ai aussi vu samedi dans les rues des gens qui ont manifesté calmement pour le climat, notamment des jeunes ».

DERNIER CARNAVAL GILETS JAUNES ?
Place au nouveau gadget de Terra nova...

Le grand bla-bla national fût le grand oublié de la journée, c'est bien la seule victoire que le mouvement agonisant des GJ pourra revendiquer. Comme tout mouvement contestataire, creux politiqument et sans perspective crédible, il est finalement dévitalisé par la gauche bourgeoise. Sur C.News la parole est donnée toute la journée aux « souteneurs » syndicaux et écolos du mouvement qui reprochent au gouvernement... son imprévoyance quand quelques ringards de la droite caviar se permettent de regretter qu'on n'envoie point l'armée. A part Castaner chargé du rôle du monsieur Loyal sans nunance, la presse a consigne de laisser s'exprime un soutien asphyxiant au mouvement qui mérite de se fondre dans les « convergences » et qu'on ne doit pas trop culpabiliser pour la sympathie envers les casseurs.

Je n'ai pas oublié qu'on s'est fait avoir aux lendemains de mai 68, pratiquement personne dans le mouvement révolutionnaire marxiste n'a vu venir la capacité de récupération de la contestation par la mafia sociale-démocrate (sauf Jean-Pierre Hébert). La gauche bourgeoise se nourrit toujours de l'échec de courant populaire confus ou avec des orientations faiblardes. On se rappelle que, quelques décennies plus tard le think thank Terra Nova avait "théorisé" l'abandon de la classe ouvrière par le PS, à un moment où, prolophobie allait de pair avec la chute de l'URSS et que les ouvriers, les employés, avaient déserté le parti solférinien ; le "programme" de la "gôche" caviar avait abandonné toute préoccupation de classe, en termes de manque d'emploi, de mépris social, au profit du "sociétal", comme le mariage pour tous. Cette "analyse", selon laquelle, les préoccupations socio-économiques de la Classe ouvrière "seraient en déclin" triomphait au profit de valeurs libertaires apparues dans le sillage de Mai 68. Hélas pour ce conclave de franc-mac, les "nouvelles" catégories pointées par TERRA NOVA ont des "valeurs" très proches de celles des prolétaires que l'on veut ignorer dans leurs réduits provinciaux ou banlieusards. Il en est de même pour les femmes, deux fois plus au chômage que les hommes. Idem pour les diplômés, quand on sait que les jeunes diplômés de Sciences Po ne trouvent pas d'emploi.Tout cela c'est le mouvement des gilets jaunes qui l'a remis en lumière et merde à Terra nova et à « place publique » du petit à Glucksmann.

En milieu d'après-midi Fakir, le support de l'âne d'Amiens est triomphaliste, la gauche bourgeoise convergente et multicolore est quasi au complet en ordre de marche avec ses tronches de la bobologie parisienne les Boulo, Dion et même la Priscilla, pas un flash ni un entrefilet sur l'ancien héros Drouet6

« Paris, 15 h 20 — Il y a tellement de monde à la marche du siècle que la manifestation peine à quitter la place de l’Opéra vers le boulevard des Italiens. Tout est plein, plein, plein, y compris les trottoirs. Il y a un mélange de Gilets jaunes, de pancartes sur le climat, et des drapeaux des Coquelicots, Sud-Solidaires, Attac, la CGT, la France insoumise, EELV. Agir pour l’environnement distribue des pancartes aux manifestants, Oxfam maquille les gens qui le veulent, les paysans de la Confédération paysanne sont là. On ne peut dire encore combien de monde est là, mais certainement plus que prévu. C’est impressionnant7.
« Aujourd’hui, les différents mouvements à Paris nous permettent d’instaurer un vrai rapport de force, estime Samir Baaloudj, militant issu des quartiers populaires. Depuis 40 ans, on subit des violences policières, on parle de précarité, de pouvoir d’achat, de chômage. C’est ce qu’on vit, et c’est aussi ce que l’on partage avec les Gilets jaunes. »
 Nous avons décidé de marquer symboliquement et de façon très forte la convergence de nos revendications. Nous demandons à reprendre en main notre destin commun. Nous ne ferons pas l’impérieuse transition écologique si nous n’arrivons pas à rétablir la justice fiscale et sociale », a
La récup finale
commencé François Boulo.
« J’ai appelé dès le 8 décembre à la convergence entre les mouvements climatique et Gilets jaunes car la cause est dans ce système économique qui laisse de côté à la fois la nature et les gens », a approuvé Cyril Dion, qui rencontrait pour la première fois François Boulo.
« Ce qui se passe cette semaine est déterminant. Il doit y avoir un avant et un après, un basculement. Nous ne pouvons plus avoir des actes du gouvernement allant à l’opposé des discours sur la question sociale et climatique », a confirmé Jean-François Julliard, de Greenpeace ».

Avec fiston Glücksmann, essayiste au Nouvel Obs mais parfait inconnu sur la planète jaune et prolétaire, le PS moribond croit pouvoir surfer sur une nouvelle génération d'électeurs écolocompatibles avec le même vieux bla-bla confusionniste qui chie sur la classe ouvrière :

« Les “gilets jaunes” ne luttent pas seulement pour le pouvoir d’achat mais contre les injustices sociales et la prédation des multinationales qui épuisent les ressources de la planète », assure cette fonctionnaire. Un « même combat » qui a rassemblé plus de 100 000 personnes à Paris, dans un cortège surnommé la « marche du siècle », et plus de 350 000 dans 220 villes de l’Hexagone, selon les organisateurs. Les préfectures de police, elles, évoquent 36 000 manifestants dans la capitale, 8 000 à Montpellier, 2 500 à Marseille, 2 000 à Rennes. Quels que soient les chiffres, la mobilisation reste forte au lendemain de la grève scolaire pour le climat, qui a rassemblé 168 000 jeunes dans le pays, et plus d’un million dans le monde.
La veille, l'essayiste avait annoncé sur France Inter sa décision de mener, avec la militante écologiste Claire Nouvian, une liste aux élections européennes du 26 mai. Il précisait son souhait de lancer une troisième offre cohérente à côté de "l'offre des nationalistes et des populistes" et de "l'offre libérale qui gouverne aujourd'hui la France et la Commission européenne". Il défendait notamment "une offre écologique et sociale. Un dépassement de la social-démocratie, une régénération de la social-démocratie à travers l'écologie."

Tant pis pour les Jadot et Hamon, mais cette « convergence électorale » liste de bric et de broc de politicien parisiens bien trop mise en honneur au cours de ce nouveau samedi émeutier a peu de chance de faire oublier que la gauche bourgeoise a intronisé Macron et son hyper libéralisme, pour nous « sauver du fascisme » ; ni de faire vraiment de l'ombre à Macron.

Complet accord avec cet internaute anonyme : « la convergence des luttes" est une antienne de l'extrême gauche urbaine qui essaie de récupérer le mouvement des gilets jaunes né en novembre et décembre avec lequel elle n'a rien à voir. Les gilets jaunes ont disparu, remplacés par les habituels gauchistes qui se sont déguisés... et ont dévitalisé le mouvement qu'ils avaient d'abord raillé ». L'écologie est la nouvelle morale number one du capitalisme qui, au nom de l'œcuménisme de monsieur tout le monde et de madame personne nous convie à prier pour un monde propre nettoyé surtout des soucis "de classes" et qui a pour but de faire passer à la trappe que c'est le capitalisme qui est la première pollution de l'humanité.




NOTES SUR LES FABRICANTS DE LA DISPARITION DU PROLETARIAT

« Le rapport de la fondation Terra Nova qui constatait le "divorce" entre la gauche et la classe ouvrière et proposait de s'appuyer sur d'autres électorats a déclenché au sein du PS une polémique dont s'est emparée la droite pour dénoncer le "cynisme électoral" des socialistes.Le rapport, intitulé "Gauche, quelle majorité électorale pour 2012", a été écrit notamment par Olivier Ferrand, strauss-kahnien, président et fondateur de Terra Nova.Que dit cette note ? Terra Nova fait le constat d'un "divorce" entre la gauche et la classe ouvrière, laquelle est de moins en moins nombreuse et, "en déclin" (chômage, précarité), a tendance "au repli" et vote "de moins en moins à gauche".
Un "nouvel électorat de la gauche" émerge, baptisé "la France de demain", qui comprend "les diplômés", "les jeunes", "les minorités et les quartiers populaires" et "les femmes", unifié par "des valeurs culturelles, progressistes". Cette "France de demain" est la "stratégie centrale" pour gagner, notamment au premier tour. Ensuite, deux autres stratégies "complémentaires" sont possibles, en élargissant cette coalition aux "classes moyennes" et aux "classes populaires".Dans le second cas, c'est une stratégie "difficile" car elle va "à contre-courant: les tendances sont au basculement des classes populaires à droite" et se heurte au "FN, qui se pose en parti des classes populaires".En fait le raisonnement suivi dans cette note est assez simple : les classes populaires ont basculé culturellement à droite ».

« Voyez-vous, nous explique-t-on, depuis les années 70, les valeurs de la gauche ne sont plus celles du monde ouvrier. La gauche s'identifie à un certain libéralisme culturel, elle porte des valeurs de libération sexuelle, de tolérance, elle est favorable à l'islam, à l'homosexualité, aux immigrés. La classe ouvrière, elle, est « contre les immigrés, contres les assistés, contre la perte des valeurs morales et les désordres de la société contemporaine. » Bref, en plus d'être écrasée économiquement, la classe ouvrière a tous les torts. Ce qui a d'ailleurs poussé l'économiste atterré, Bruno Amable, avait titré sa chronique dans Libération Ouvriers, sales et méchants .
Mais revenons au raisonnement développé : que faire devant ce constat d'un divorce culturel ? s'interrogent les auteurs. La réponse ne tarde pas, elle aurait plu à Brecht. Vous connaissez cette formule, qu'il fallait dissoudre le peuple quand il ne donnait pas satisfaction ?
Pourquoi le PS est-il devenu le chantre du multiculturalisme, le défenseur des minorités, en même temps qu'il enterrait l'égalitarisme ? N'a-t-il pas trouvé une idéologie de substitution dans le « tous différents » ? « Tous différents » plutôt que « tous égaux » ?
Pendant ce temps-là les aspirations populaires ont été reprises et exploitées avec profit par la droite, et surtout l'extrême droite : le travail, mais aussi l'identité nationale, le modèle d'autorité social-familial, le sens de l'appartenance et de la protection collective, etc.
C'est donc« le sens du peuple » qu'il faut retrouver, dit Laurent Bouvet. Un sens que les caciques du PS semblent avoir un peu perdu.
À partir de la fin des années 1970, la rupture va se faire sur le facteur culturel. Mai 68 a entraîné la gauche politique vers le libéralisme culturel : liberté sexuelle, contraception et avortement, remise en cause de la famille traditionnelle… Ce mouvement sur les questions de société se renforce avec le temps pour s’incarner aujourd’hui dans la tolérance, l’ouverture aux différences, une attitude favorable aux immigrés, à l’islam, à l’homosexualité, la solidarité avec les plus démunis. En parallèle, les ouvriers font le chemin inverse. Le déclin de la classe ouvrière – montée du chômage, précarisation, perte de l’identité collective et de la fierté de classe, difficultés de vie dans certains quartiers – donne lieu à des réactions de repli : contre les immigrés, contres les assistés, contre la perte de valeurs morales et les désordres de la société contemporaine. Malgré cette discordance sur les valeurs culturelles, la classe ouvrière continue au départ à voter à gauche, qui la représente sur les valeurs socioéconomiques. Mais l’exercice du pouvoir, à partir de 1981, oblige la gauche à un réalisme qui déçoit les attentes du monde ouvrier. Du tournant de la rigueur en 1983 jusqu’à ‘l’Etat ne peut pas tout’ de Lionel Jospin en 2001, le politique apparaît impuissant à répondre à ses aspirations. Les déterminants économiques perdent de leur prégnance dans le vote ouvrier et ce sont les déterminants culturels, renforcés par la crise économique, ‘hystérisés’ par l’extrême-droite, qui deviennent prééminents dans les choix de vote et expliquent le basculement vers le Front national et la droite. À la place, le rapport recommandait « la stratégie centrale ‘France de demain’, partagée par tous les suivistes gauchistes du NPA et Cie : une stratégie centrée sur les valeurs » : « Si la coalition historique de la gauche est en déclin, une nouvelle coalition émerge. Sa sociologie est très différente : 1. Les diplômés. 2. Les jeunes. 3. Les minorités et les quartiers populaires. 4. Les femmes. Contrairement à l’électorat historique de la gauche, coalisé par les enjeux socioéconomiques, cette France de demain est avant tout unifiée par ses valeurs culturelles, progressistes : elle veut le changement, elle est tolérante, ouverte, solidaire, optimiste, offensive.  »

Tout ce que le mouvement gilet jaune, au plus fort de sa lutte, a détruit en fait, quoique sans être capable de renouer avec la lutte de classe ni à redonner la primeur du combat au prolétariat qui contient à la fois la classe ouvrière et les couches intermédiaires (et diplômées) flouées par la fuite en avant désordonnée économiquement du système. (JLR)

L’Illusion économique, le démographe Emmanuel Todd observait déjà le « divorce des deux cœurs sociologiques de la gauche » et les tares du militantisme des enseignants (qui peuplent nos sectes maximalistes) :
« Les enseignants, qui constituent l’un des cœurs sociologiques de la gauche, sont faiblement menacés par l’évolution économique. N’ayant pas à craindre au jour le jour le licenciement ou une compression de salaire, ils ne se sentent pas menacés d’une destruction économique, sociologique et psychologique. Ils ne sont donc pas mobilisés contre la pensée zéro. (...) Sans être le moins du monde ‘de droite’, statistiquement, ou favorables au profit des grandes entreprises, ils sont atteints de passivisme et peuvent se permettre de considérer l’Europe monétaire et l’ouverture des échanges internationaux comme des projets idéologiques sympathiques et raisonnables. L’immobilité idéologique des enseignants les a séparés de cet autre cœur sociologique de la gauche que constituent les ouvriers, qui eux subissent, depuis près de vingt ans, toutes les adaptations, tous les chocs économiques concevables. Les résultats électoraux des années 1988-1995 mettent en évidence cette dissociation, peut-être temporaire, des destins. La stabilité du vote enseignant pour la gauche, aux pires moments de la plongée du Parti socialiste, a contrasté avec la volatilité du vote ouvrier, désintégré, capable de se tourner vers le Front national comme vers l’abstention ».


NOTES

1Ce temple des riches et du symbole de l'arrivisme (cf. l'intronisaton de Sarko) est depuis longtemps l'objet de convoitises immobilières et de bisbilles entre propriétaires syriens. Sa destruction complète est rêvée par certains pas spécialisment pour ridiculiser des gilets jaunes.
2Deux jours après le premier décembre 2018 qui avait vu l'impressionnate attaque à l'Arc de triomphe et la piteuse et inutile réaction de Macron, j'écrivais :
« Il est frappant de constater que les pilotes de l'Etat « assiégé » par les gilets jaunes ont fonctionné en se basant sur la façon dont le pouvoir gaulliste naguère avait mis fin à la crise de mai 1968, sans maîtriser autant une fin d'évènements alors que de bien plus dangereux « événements n'en sont qu'à leur début. Or, on dirait qu'il se passe l'inverse de mai 68, le calme qu'on ne pensait nullement ébranlé par de simples pétitions cède le pas à une série de blocages pacifiques puis à des comportements, pas du tout pacifiques mais de type insurrectionnaliste ». (Macron fait le dos rond et les manifestants tournent en rond)

3Sur le Figaro un lecteur écrit : « « Sur les images, il y a plus de photographes et de policiers que de vandales. Et pourtant il agissent à leur guise sans même risquer de se faire arrêter. Il est clair qu'il n'y a aucune consigne d'arrestation des casseurs, juste des lampistes que l'on met en garde à vue à tour de bras pour l'exemple et que l'on relâche sans preuve. Il y a plus de policiers mobilisés que de GJ à Paris !Comment imaginer qu'une dizaine de vandales soient laissés libres d'agir et de mettre le feu à des commerces pour le 18ème samedi consécutif ? Tous les éléments de flagrant délit étaient réunis. Les auteurs ne sont même pas arrêtés. Incompréhensible ! »


4Le 10 décembre 2018 j'écrivais :
« Pour cet acte IV la stratégie de dramatisation par l'Élysée visant à séparer les casseurs des Gilets jaunes "raisonnables", a porté ses fruits en faisant emprisonner d'abord des manifestants qui n'étaient pas des casseurs. L'arrestation massive de centaines de simples manifestants avant qu'ils n'aient mis le pied sur le sol parisien, totalement arbitraire, a servi toute la journée à justifier ce gros mensonge : « D'ampleur inédite, les interpellations et fouilles préventives ainsi que la présence massive des forces de l'ordre ont permis d'éviter un nouveau déchaînement insurrectionnel à Paris ». La plupart de celles et ceux qui ont été arrêtés, et curieusement en majorité le soir avec un simple « rappel à loi » n'étaient pas venus pour « déchaïner une insurrection », ni ce brave Coupat qui voit sa GAV prolongée comme si sa seule présence avait eu un quelconque intérêt pour les gilets jaunes. L'Etat a l'habitude de fabriquer des complots pour abuser l'opinion publique, je peux vous en rappeler plusieurs et sous tous les présidents. A coup sûr,nous dit-on curieusement dès potron minet, les dégâts « seront plus étendus » que le samedi précédent. C'est bon pour l'audience. Et les sondages ».
« La police si zélée depuis le matin pour arrêter « préventivement » les manifestants venus de province a laissé le soir les casseurs détruire place de la République pendant de longues minutes alors que les télévisions d'Etat filmaient tranquillement ces abrutis qui s'acharnaient à détruire des vitrines... indestructibles. Les forces d'annihilation de toute protestation sociale s'étaient livrées tôt le matin à de véritables rafles de manifestants pas du tout casseurs mais pour abonder sur leur nombre supposé pour alimenter la chronique de leurs amis journalistes et ainsi prouver l'efficacité policière. Les forces de maintien de l'ordre social ont bien fait « leur boulot », et le spectacle de désolation des vitrines défoncées et des véhicules incendiés une nouvelle fois de façon arbitraire et un peu partout dans Paris et surtout d'une ampleur notable et inédite en province, devrait suffire à inverser la tendance de l'opinion mais pas assez pour que le roi des cons puissent caracoler et oser se montrer dans son arrogance psychopathe sans baisser un peu plus culotte ».
5Le système a tout à perdre à ce que des policiers/casseurs en civil soient identifiés (cf. le cas du 23 mars 1979), aussi est-ce rarement que l'on peut dénoncer des manips grossières ; l'Etat adope des manipulations plus subtiles, que je nomme « stop and go », comme on l'a vu lors des contestations précédentes : « Tout est mis en place pour que les manifestations dégénèrent. Côté renseignement, on constate depuis une dizaine d’années une double évolution, avec des manifestants beaucoup plus pacifiques qu’avant, mais des casseurs toujours plus violents, organisés de manière quasi paramilitaire. Certains de ces groupes sont identifiés avant qu’ils intègrent les manifestations. Mais aucune consigne n’est donnée pour les interpeller en amont. En fin de journée, nous savons qu’un groupe de casseurs dangereux vient d’arriver gare du Nord pour aller perturber Nuit debout, à République. Une compagnie de CRS se trouve sur leur passage, prête à intervenir. Mais l’ordre leur est donné par la préfecture de se pousser dans une rue adjacente ! Les collègues leur signalent l’imminence de l’arrivée du groupe de casseurs. Mais ordre est donné de les laisser passer.
(…) J’ai constaté la présence dans les manifestations de policiers (?) sans uniforme, habillés comme des Black blocks, et munis de marteaux sur l’usage desquels on pouvait légitimement s’interroger. Lorsque l’on sait que sous le régime d’Emmanuel Macron n’importe qui peut s’affubler d’un brassard et tabasser des manifestants, sans que la justice ne s’en émeuve beaucoup. J’ai lu force témoignages parlant de la passivité de la police au moment des déprédations et des pillages. J’ai vu que le profil des personnes arrêtées en masse et condamnées lourdement pour des infractions fantaisistes, démontrait qu’il ne s’agissait absolument pas des casseurs habituels qu’en général la police connaît. Alors, j’ai fini par me dire « tiens cela me rappelle quelque chose ».
Il y a aussi d'autres versions qui confirment de toute façon que des policiers sont chargés de se déguisés en civil : « Ils ont été filmés à la descente d’un camion de police, en marge de la mobilisation des Gilets jaunes à Paris, qui a viré à la guérilla, samedi. Ces policiers en civils font désormais le buzz malgré eux puisqu’à la volée, des manifestants les accusent d’être des casseurs potentiels. Dans un tweet, la police nationale se défend ce dimanche. Dans cette vidéo publiée sur les réseaux sociaux par des Gilets jaunes, on voit des policiers en civils se préparer, sans doute pour rejoindre la manifestation des Gilets jaunes à Paris ce samedi. Ils s’équipent à la descente d’un camion de police, avec tout l’attirail du profil du casseur, comprenez jean, basket, cagoule, voire des casques… Sur la bande-son, des manifestants s’insurgent contre ce dispositif et les accusent de se mêler aux casseurs pour donner une mauvaise presse au mouvement des Gilets jaunes. Dans cette vidéo publiée sur les réseaux sociaux par des Gilets jaunes, on voit des policiers en civils se préparer, sans doute pour rejoindre la manifestation des Gilets jaunes à Paris ce samedi. Ils s’équipent à la descente d’un camion de police, avec tout l’attirail du profil du casseur, comprenez jean, basket, cagoule, voire des casques… Sur la bande-son, des manifestants s’insurgent contre ce dispositif et les accusent de se mêler aux casseurs pour donner une mauvaise presse au mouvement des Gilets jaunes.
Dans un tweet posté ce dimanche, la police nationale se défend et explique que c’est un dispositif « habituel » mis en place lors des manifestations. «  Comme dans toute manifestation, les policiers en civil procèdent discrètement à des interpellations et renseignent sur les mouvements du cortège ».
6Qui se prend désormais pour un bonze syndical, croyait à une « grosse journée finale » (avec assez de casse) mais pour délaisser des manifs cycliques devenues inutiles ; il se croit permis d'appel au « blocage complet des raffineries et des ports », mais au blocage par qui et dans quel but ?
7Fakir avec son aspirant successeurà Mélenchon, ce pauvre Ruffin, réchauffe le slogan éculé du syndicalisme gnangnan en signalant qu'il s'est répandu en province : « Montpellier, 15 h 40 — Le cortège climat a rejoint les Gilets jaunes au cri de : « Tous ensemble tous ensemble » et « Gilets jaunes, Gilets verts, même combat ».

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