Dans quel sens faire ses courses dans la galerie d'un camp LIDL? |
La
présentation de l'émission d'Elise Lucet sur France 2 (sic face à
Allemagne 1) ne précise pas que le « géant allemand »
est une entreprise « populiste » créée dans les années
d'accession au pouvoir de Hitler1.
Il n'est pas précisé non plus que Free n'est qu'une succursale du
numérique américain qui domine la planète. Mais Elise Lucet sait
se faire comprendre de ceux qui réfléchissent. Il n'y a pas de plan vigipirate pour les terroristes de la hiérarchie en entreprise avec leurs caméras cachées et leur GPS à oreillette. L'exhibition en prime time des
féroces méthodes terroristes d'exploitation en prenant deux
entreprises étrangères de deux impérialismes qui font la pluie et
le beau temps sur la planète, n'est pas anodine. Elle vise en
quelque sorte à aller dans le sens de l'impuissance prolétarienne
dans un monde revenu à celui des Dickens et Zola, où il est
impossible de faire grève ni même d'organiser une section syndicale
primaire de base. Elle s'inscrit dans la campagne de dénonciation de
la main-mise allemande croissante sur l'Europe, quand le petit minet
de l'Elysée leur refile les bijoux de famille (Alstom passe sous
leadership de Siemens). Au lieu de lutter contre les patrons de ces
« multinationales » au fonctionnement de type nazi
numérique, la gauche populiste anti-europe pourra arguer qu'on brade
l'économie « française », sans que cela donne matière
à autre chose qu'une indignation impuissante et surtout sans fixer
d'autre objectif que « produire français » avec un
impossible retour au faux socialisme des nationalisations. Les
bourgeoisies dominantes abolissent les frontières pour renforcer
leurs grands trusts (en particulier face à la Chine) tout en
chargeant les diverses chapelles de gauche pleureuse de faire défiler
éternellement dans le calme et la soumission électorale des troupes
de vieillards cacochymes.
On
nous bassine avec l'horreur présumée du score de l'AFD en Allemagne
quand les méthodes « fascistes » sont elles bien
présentes dans les entreprises yankees et boches. Un paternalisme
autoritaire et méprisant transpire des PDG suant et bafouillant ;
comprenez-les : ils font la charité à des gens sans compétence
qui sont si bêtes qu'il leur faut porter toute la journée un casque
sur la tête où une machine leur dicte précisément et sans
contestation tout ce qu'ils doivent faire de façon répétitive. Ces
braves patrons humanitaires ne sont pas au courant du comportement de
chiens aboyant des merdes de petits contremaîtres. Et caviar sur le
plateau on ne peut pas flinguer ces tortionnaires – car mieux que
dans l'imagination d'Orwell c'est une voix électronique qui flique
l'ouvrier - car les ouvriers otages préfèrent se suicider pour
finir le travail de persécution, de mépris de la médecine du
travail et de chantage permanent2.
La
mère Lucet se garde bien de frôler l'impolitesse face à des
sous-fifres patronaux couvés par not' gouvernement (car ils créent
des emplois... même de merde), tout comme elle évite de rappeler
que LIDL avait perdu 500.000 clients en 2016 en partie à cause des
caisses raccourcies où le client (supposé pauvre et donc sans
défense) est jeté dehors sans avoir le temps de remplir son cabas.
On se félicite par contre des trois lecteurs de code (qui
éviteraient à la caissière de se contortionner) alors que cela
signifie que le client se fait jeter plus vite encore et ira ramasser
sur le sol ses achats afin que le client suivant puisse s'entasser
sur lui. En réalité le client est traité aussi vilainement que
l'employé de LIDL, Lucet aurait pu le dire, mais risquer alors un
procès pour dénigrement déloyal du commerce de la marchandise
« nazie »3.L'idéal
serait que les consommateurs boycottent cette entreprise « fasciste »
mais les consommateurs sont des... cons, et des moutons et pas une classe sociale distincte ni opprimée. Et les
consommateurs pauvres peut-on leur jeter la pierre d'aller là où
les produits sont moins chers parce que dans les hangars cachés on
traite comme bétail numérisé (pas encore tatoué comme dans les
camps de la mort) les pauvres hères, femmes ou hommes, réduits à
l'état de bêtes de somme. La plupart des magasins de gadget en Europe et en Afrique vendent bien des objets (pas cher) fabriqués par des enfants chinois. Qui s'en plaindrait? Christopher Lasch reviens!
Cette
exhibition en prime time du malheur d'être employé dans des boites
étrangères au régime nazionalzozialiste, vient encore servir à la
démoralisation dans l'échec programmé de la protestation contre la
loi travail – découpée en rondelle par la syndicratie et le pitre
individualiste Mélenchon. La loi travail ne peut que célébrer
l'automatisation décérébrée, les salaires misérables et la
politique du licenciement sans préavis qui réussit si bien à la
bochitude industrie allemande. Le loup fasciste industriel est bien
dans les murs et pas dans quelques faits divers racistes. La
parcellisation des tâches sans compétence particulière sans même
savoir parler la langue du pays va comme un gant à la démagogie
(antiraciste et cosmopolite) de l'accueil au tout venant migrant,
suscitant l'ire, (non la phobie) des ouvriers autochtones. Dans la
réalité des nouveaux bagnes aseptisés il est interdit aux ouvriers
de se parler entre eux, et même de se connaître et se comprendre,
en France, comme au Maroc ou en Algérie4.
Comme debaters bcbg, Lucet n'a pas trouvé mieux qu'un vague
sociologue cire-pompe et la ministre du travail qui, souriante de
bout en bout, n'a cessé d'enfiler des généralités ronflantes et
sans risques de gêner les généreux « pourvoyeurs d'emplois »
pour les sans diplômes.
Et
quand, au plan électoral truqué ils protestent en mettant un papier
en faveur du parti le plus cuistre et le plus nul, on les accuse de
populisme maladif et de racisme intrinsèque. La domination nazie n'a
jamais eu le temps de devenir aussi totalitaire et aliénante.
Ils
entendent syndicalistes et minorités maximalistes qui leur chantent
« tous ensemble, tous ensemble ». Y a pas de mot d'ordre
plus creux, plus utopiste et si coupé de la réalité. Ni la télé
ni les minuscules organismes protestatiares ne vous diront quels
seront les chemins de la lutte finale, ou esmi-finale, si vous ne les
trouvez pas vous-mêmes.
POUR
CEUX QUI N'ONT PAS VU L'EMISSION PERVERSE
EXTRAIT
D'UN ARTICLE DU MONDE TRES AMBIGU (un des actionnaires n'est autre
que le patron de Free, donc ménagé) qui résume assez bien
l'émission de la 2 : un scandale limité – on fournit quand
même du travail à des « illettrés » qui n'iront pas
s'acheter un costard avec leur paye misérable, et, comme le
reportage récurrent naguère sur le clochard fainéant, on vous
montre qu'il y a pire exploité que soi et que c'est plutôt
rassurant pour le reste de la classe ouvrière mieux lotie (hein vous
les « privilégiés » du public qui râlaient tout le
temps ! Vous verrez, vous aurez aussi un jour un casque sur la
tête, cette merveilleuse invention qui « dépersonnalise »
le commandement). L'article veut aussi faire croire que la création
d'un syndicat permettrait de mieux défendre les ouvriers, ce qui est
franchement se moquer du monde (ouvrier) et faire se bidonner les
patrons intelligents.
« …
les témoignages décrivent avec précision comment ces
enseignes réduisent leurs employés à l’état de
« semi-machines ». Lidl et ses 1 530 enseignes en
France sont sortis du hard-discount en bouleversant le fonctionnement
de leurs magasins comme celui des entrepôts. L’enquête chez Free
auprès des salariés employés dans les centres d’appels, ceux que
Xavier Niel (par ailleurs actionnaire à titre
personnel du Monde) appelle les « ouvriers du
XXIe siècle », met en
exergue une répression du droit de grève et du droit syndical,
notamment au Maroc.
« O.K., 2-3,
répétez », tel est le dialogue qui revient en boucle,
par une oreillette, entre un préparateur de commandes Lidl et… le
logiciel informatique.
Celui-ci, considéré par l’entreprise comme un GPS permettant des
gains de productivité, est plutôt vu par les salariés comme un
enfer. Il faut dire
que c’est leur seule interaction de la journée, pour éviter
de les détourner
de la cadence qui leur est imposée.
Polyvalence à outrance
Ce système a été mis
place en 2012, lorsque l’enseigne est sortie de son modèle hard
discount en France, un positionnement qui ne rapportait plus assez de
parts de marché après vingt ans de croissance ininterrompue. Il
fallait alors impérativement réagir.
Et de quelle manière… Déjà connue pour la polyvalence à
outrance de ses caissiers, qui entre deux clients enfilent le costume
de magasinier pour faire
de la mise en rayons, Lidl semble aller
encore plus loin pour gagner
en productivité. Poussant même certains de ses salariés au
suicide. Comme Yannick. Cet agent de maîtrise de 33 ans s’est
donné la mort en juin 2015 dans son entrepôt, près
d’Aix-en-Provence,
alors qu’il assumait seul depuis plusieurs semaines le travail de
trois personnes.
Chez Free, c’est plutôt
chacun sa tâche, mais surtout pas de vagues. Au risque de se
retrouver
sur la liste noire des employés les plus récalcitrants. Pour le
fleuron français de l’Internet et de la téléphonie, un employé
récalcitrant, c’est celui qui débraye. Comprenez : qui
exerce son droit de grève.
Après trois heures de
débrayage cumulées, le salarié risque son poste. Dans un centre
d’appels en région parisienne, leur nombre a été divisé par
deux en un an. Un chantage à l’emploi
que Free exerce aussi au Maroc où elle emploie 1 800 personnes.
En avril 2012, un centre
d’appels de Casablanca s’est mis en grève pour protester
contre ses conditions
de travail et pour l’ouverture d’un syndicat. Parmi les
contestataires, plusieurs ont été licenciés.
Selon
l’enquête « Parlons travail », réalisée par la CFDT
auprès de plus de 200 000 travailleurs, les chiffres sont
alarmants : un quart des salariés vont travailler
avec la boule au ventre, plus d’un tiers affirment avoir
fait un burn-out et 43 % ressentent des douleurs à cause de
leur métier.
Ce numéro de « Cash
investigation » met subtilement en lumière les abus du lean
management, qui vise à la participation de l’ensemble des
employés d’une entreprise à la lutte contre le gaspillage en
chassant tout ce qui produit de la « non-valeur
ajoutée », méthode née au sein des usines Toyota dans les
années 1970. On regrette cependant le trop-plein de mise en scène
qui, sur un tel sujet, dénature parfois la gravité du propos.
Travail, ton univers
impitoyable, de Sophie Le Gall (Fr., 2017, 120 min). France 2,
mardi 26 septembre à 21 heure
LUTTEZ CONTRE LE DETOURNEMENT MENSONGER
NOTES
NOTES
1Comme
avec la voiture du peuple, le capitalo-fascisme allemand est en
avance sur son temps, avec la création de grands magasins pour
pauvres. Jusqu'au milieu des années 1990, la plupart des enseignes
Lidl avaient des vitres teintées pour que les classes les plus
populaires puissent faire leurs courses en toute discrétion.
2Vous
trouverez peu d'historiens pour vous dévoiler que la dépression
n'existait pas au siècle de Dickens. En France des porions étaient
simplement zigouillés, comme Zola s'en est fait l'écho (cf. le
meurtre de l'ingénieur Watrin). Dans son deuxième tome de son
histoire de Staline, Adam B . Ulam raconte que dans la période
qui précède la première révolution russe, les patrons qui ne
veulent pas négocier ou refusent les syndicats, sont assassinés.
C'est d'ailleurs une des principales raisons pour lesquelles la
bourgeoisie a accepté l'intronisation, longue et heurtée, puis son
intégration, du syndicalisme pour parer au... crime social,
comprenant que la paix sociale ne pouvait être régentée sans
« lientenants de la bourgeoisie » en milieu ouvrier (la
belle expression est de Lénine, ce que je rappelle toujours à tout
trotskien de passage).
3Le
patron de Free, Xavier Niel est actionnaire du Journal Le Monde,
lequel avec le Huff Post, est inféodé à la puissance américaine.
Les grands patrons les plus cyniques étant propriétaires des
principaux organes de presse et des chaînes (sic) de télévision,
où vais-je pouvoir faire entendre ma voix et faire comprendre que
mon licenciement a été totalement inique et orchestré par la
crapulerie managériale ? Dois-je flinguer un patron, devenir
terroriste, me suicider ou attendre le grand soir à la Saint
Glinglin ?
4J'ai
informé ici qu'une employée de plateforme téléphonique de
Bouygues à Alger n'est paysée que 100 euros par mois (SMIC
algérien : 150 zuros).
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