« Soyons
terrible pour empêcher le peuple de l'être ». Danton (1789)
« Le
prolétariat russe s'est délayé dans les bureaux ». Alexandra
Kollontaï (1920)
« Le
monde du capitalisme en décomposition est surpeuplé. L'admission
d'une centaine de réfugiés supplémentaires devient un problème
majeur pour une puissance mondiale telle que les Etats-Unis ».
Trotsky, 26 mai 1940
Dans mon article du 10
février je m'interrogeais sur la campagne « propreté en
politique », suite à la focalisation sur le Pénélopegate -
où ce ramdam avait pour but de dire au peuple « tu es indigné
de tant de détournement d'argent public et par cette trouble
cagnotte des députés, c'est normal peuple tu as le pouvoir... de
voter » ; et nous le gouvernement « de gauche »
et la presse de nous foutre de ta gueule.
En réalité dans la
prolongation de la campagne « propre » ce n'est plus ni
le peuple ni tel ou tel candidat qui importe de consulter ou
d'ausculter, mais « les juges » ; c'est inédit en
France, des élections de type présidentiel qui ne sont plus
qu'affaire de juges ; cet imbroglio peut-il redorer le blason
corrompu de la démocratie bourgeoise ? J'en doute fort, la
plupart de députés apparaissent bien comme des voyous en cravate.
Chacun sent bien qu'il s'agit de règlements de compte entre factions
bourgeoises via l'appareil judiciaire, intégralement inféodé lui
au gouvernement « de gauche », et pendant que ça
judiciarise à tour de bras, on en oublie la cagnotte... si
profitable à tous les heureux « élus » !
Je ne me suis trompé que
sur un point ; je pensais que le FN n'aurait été désigné à
la vindicte électorale qu'entre les deux tours ; que nenni le
voici déjà judiciarisé comme ce pauvre Fillon, coupable des mêmes
détournements de fonds au titre des gardes du corps variante du
népotiste garde du corps de Pénélope ; il est néanmoins
frappant de voir que ni les électeurs « républicains »
ni ceux du FN ne sont le moins du monde gênés par les révélations
à flot continu sur les cagnottes respectives de leurs chevaux de
course par les officines para-gouvernementales Canard Enchaîné et
Médiapart. Et que même les ouvriers en général s'en foutent au
fond – pourris pour pourris... qui se ressemble s'assemble.
Sachant ce dégoût quasi
irréversible du prolétariat, l'inénarrable mafia de BFM n'a pu
s'empêcher de manifester son mépris pour cette
classe...lilliputienne et si inutile au fond à Marine ! Une
vague pigiste fît savoir – de source sûre – que les ouvriers ne
représentant plus que 11% de la population, ils étaient désormais
insuffisants pour garnir le troupeau électoral de Mme Le Pen. Et
qu'il fallait à cette dame souquer désormais plus ferme en
direction par exemple des fonctionnaires. On ne s'abaissera pas ici à
répondre à cette estimation ridicule d'une classe ouvrière
riquiqui limitée au seul col bleu, mais quel acharnement pitoyable
après nous avoir tant assuré que la classe ouvrière avait disparu,
puis que ses résidus votaient FN systématiquement, voici ces mêmes
résidus méprisés comme bons à rien. Gageons qu'il rendront une
belle crotte abstentionniste à la pigiste de BFM (aux ordres d'un
des ânes nommés « chef du service politique de BFM »)
et à ce FN que tous les médias s'acharnent à criminaliser parce
que le diaboliser ne sert plus.
En tout cas, il y en a
encore un qui aura tenté encore de le diaboliser, mais aux marges,
sur le plan artistique. Ce type se nomme Lucas Belvaux. Son film
« Chez nous », avec un Rassemblement National Populaire
parodie grossière du FN et de sa blondasse, est un film totalement
indépendant mais « engagé » puisqu'il est financé par
la région des Hauts de France (antifascistes Les Républicains) et
le très antifasciste gouvernement belge. Avec ces deux sources de
financement il ne restait plus qu'à trouver, sans nuance - le
décor, le meilleur décor possible avec en toile de fond les
crassiers et les mornes plaines du ch'nord d'une classe ouvrière
dissoute dans l'alcool, la pédophilie et le stade Bollaert. La vie
de la classe ouvrière est à crédit. La classe ouvrière qui ne
possédait pas grand chose jusque là, même pas les usines ni les
mines du ch'ti coin, ni les bistrots qui ont fermé, serait-elle
quelque part l'inventeur de la dernière formule du clochard assis à
même le sol : « je suis chez moi » ? Je
plaisantais.
On ne saura jamais,
contrairement à « je suis Charlie » d'où est sortie, de
quelle cour d'école, de quelle soirée avinée, la complainte « on
est chez nous ». Elle n'est certainement pas issue d'une parole
ouvrière. L'ouvrier sait qu'il n'est pas chez lui même dans sa
tanière, qu'il lui faut payer jusqu'à son dernier souffle comme
disait tonton Karl Marx. Elle n'est pas venue de ce ch'Nord qui est
une région, depuis plus de trente années voire plus où la plupart
des prolétaires doivent s'échapper vers d'autres lieux en France où
trouver un travail, plutôt en région parisienne ou dans la
gendarmerie. Ces « terres du Nord » - qui ont vu
s'accumuler des générations d'ouvriers immigrés de tous pays, et
qui doivent désormais subir le chantage à l'hospitalité aux
migrants – qui signifie partager la misère1
- sous les désidératas de la Perfide Albion et regarder se répandre
un communautarisme musulman arrogant (dixit Roubaix), consolation
pour les uns face au chômage et à l'exclusion pour les uns et
réceptacle de tous les fantasmes identitaires pour les autres –
sont-elles vouées à être enfermées dans le choix sans nuance :
« chez nous » ou « chez eux » ?2
Racistes versus antiracistes ?
La formule est devenue le
credo des identitaires et du FN qui ne vont pas se gêner pour
récupérer une identité... inexistante ou disparue. Mais faire de
cette formule l'axe d'un scénario de film, sans un seul instant
évoquer ce qu'elle signifie en vérité : l'isolement de classe
voire le sentiment d'être étranger à toute classe, l'exclusion du
travail, l'exclusion de la région natale, l'exclusion de toute
considération sociale, civile et politique, etc. c'est se foutre de
la gueule des prolétaires comme le FN qui répercute la formule pour
mieux dissoudre le désarroi qu'elle contient en promettant la lune
nationale et le père noël pour payer l'électricité et le loyer.
Avant de vous avouer mon
sentiment, je tenais à vous témoigner de l'effet sur le public d'un
tel film plus enragé dans la manipulation simpliste qu'engagé dans
la vérité sociale et politique : la sidération. Dans une
salle à Paris, j'ai vu l'ensemble du public rester assis malgré la
longueur du générique final, comme tétanisé. J'ai entendu des :
« ça fait peur », ou des « il est manichéiste
mais reflète quand même la réalité ».
On eût dit que la
campagne électorale était entrée dans la salle par effraction avec
le fantasme d'un nouveau 2002 ! Le scénario ne vaut pas
tripette pourtant, il est franchement incrédible : une brave
infirmière DE se fait recruter par un parti populiste, et se fait
baiser doublement en acceptant de laisser apposer sa tronche sur
l'affiche de la cheftaine du groupe national populo et par son mec,
ex-ami d'enfance dont elle ne s'apercevra qu'en fin de scénario que
ce n'est qu'un sale petit skin qui mène la chasse aux pauvres
migrants apeurés. Les séquences sont assez représentatives du
pauvre imaginaire gauchiste dans sa névrose antifa : repas de
beaufs avec merguez, voitures qui se mettent en filature et conduites
par on ne sait trop qui (vieille recette des antiques films noirs US
pour ficher la trouille), couple marchand seul dans la nuit le long
des sinistres corons, alternance de séquences de violences de skins
avec la douce vie de famille de l'infirmière, complots des membres
du parti populo pour masquer ses liens avec ses plus troubles et
fachos sectateurs, Hénart Blog et Paint Ball pour catéchiser les
petits skins, etc.. Les membres du parti populo et les skins de nuit
ont tous des sales gueules ; la clone de Marine Le Pen,
Catherine Jacob a autant de charisme que la plus belle vache blonde
du salon de l'agriculture, tout comme Marine Le Pen a le même visage
gracieux et glamour de papa.
Des petits cons de
quartiers qui se moquent des femmes qui passent dans la rue ou
taguent gentiment la voiture de l'infirmière, et qui se font buter
par les skins vengeurs, entraînent la compassion de la salle qui a
un haut le cœur face « à une violence disproportionnée »
de la bande de skins en embuscade (j'ai pensé lors de cette séquence
qu'au fond le film pouvait plaire aussi aux membres du FN capables
d'humour). Le seul suspense paraît vers la fin, le mec skin de
l'infirmière affirmant avoir viré sa cutie, gros plan sur la foule
ouvrière du stade Bollaert (où sans doute se niche le fâchisme),
bisous entre l'infirmière et son petit musclé qu'a pas les yeux en
face des trous. Elle a renoncé à être une poule du parti populo et
son skin « déradicalisé » (?) souriant aux côtés du
papa communiste qui semble avoir pardonné l'escapade facho. Puis
crac, faisant défiler les photos du portable de son mec ex-skin, la
naïve infirmière tombe sur les photos où il pose en terrorisant un
couple de migrants. Et que je te le gifle et que je te l'envoie par
terre. Générique de fin. Atterrant de bêtise gauchiste !
L'imagination est au mouroir.
Grotesque vraiment. Le
film du réalisateur gauchiste tombe à plat en plus au mauvais
endroit, au mauvais moment, où ce ne sont certainement pas des
sales skins qui butent les migrants, ni les manifestants contre le
49-3 mais... la police « démocratique », fée totalement
absente de ce téléfilm manichéen comme l'est d'ailleurs
l'antifascisme de salon pour ados boutonneux (et autres lecteurs
infantiles du « livret brun » et du fascicule neuneu de
feu Stéphane Hessel). Même si cette ennuyeuse compil de séquences
clichés à gauchistes remplit des salles de gens séduit par la
qualité des acteurs, ce film bâclé ne pouvait tomber plus mal
après les violences criminelles de la soldatesque policière contre
Adama Traoré, Théo, et un jeune blanc (bien de « chez nous »)
lui aussi enculé avec une matraque, puis aussi cet autre jeune beur
tabassé jusqu'à lui casser la mâchoire parce qu'il roulait sans
permis... Ce pauvre film signifie en gros que quelques poignées de
skins racistes qui défraient l'actualité seraient le danger
principal ! Donc exit la police chienne de M.Hollande3
dont certains sont des amis sincères de ces mêmes skins.
D'ailleurs une des
séquences, qui a fait peur à un des admirateurs du film de
propagande gauchiste, montre un conférencier expliquant comment
répandre la peur parmi la population – avec la méthode tupperware
– sur le web ces salauds démultiplient les faits divers :
« vous informez 20 contacts qui informeront 20 autres contacts,
puis 50, puis cela fera des milliers ». (ouah la trouvaille de
génie du réalisateur!)
Or le nombre de faits
divers où sont impliqués en partie et parfois souvent certains des
« derniers arrivés » n'a pas besoin d'être démultiplié
par un « complot d'extrême droite », comme n'ont pas
besoin d'être démultipliées les bavures policières qui sont, en
effet, elles aussi nombreuses et répétées en ce moment avec le
soutien total de la magistrature bourgeoise.
C'est là que la bât
blesse, on avait senti la prétention du jeune réalisateur à
« faire comprendre » comment des gens pouvaient
s'embarquer dans un parti comme le FN, mais non seulement il est
incapable de nous expliquer comment l'infirmière, qui n'est ni
idiote ni raciste, finit par se faire embringuer par le manipulateur
Dussolier (en Florian Philippot vieux), mais en plus il est
incompétent pour ne serait-ce que tenter de nous décrire ce qui a
fait monter le score du FN, dans la réalité électorale française.
La vision est celle du gauchiste lambda, plaquée : le FN c'est
des gros crânes ras, musclés et regard torve qui ratonnent du
« bougnoule », et que leurs conférenciers soft du parti
iceberg électoral-cool conseillent en vocabulaire alternatif:
« dites pauvres migrants et pas bougnoules », etc.
La vision du gauchiste
bobo est là tout entière, illustration poussive sur la causalité
protestataire des
électeurs des partis populos : c'est des
racistes et des amis honteux des skins buveurs de bière.
L'imaginaire creux qui est le pâle décor du film pue le réchauffé
petit bourgeois qui ne connaît ni le chômage, ni la violence des
zones déshéritées, ni la loi des petits caïds de quartier. Il
n'arrive même pas à la cheville du réalisme socialiste, du cinéma
social ou des grandes œuvres qui moquent l'idéologie bourgeoise
manichéenne. Un film qui n'apprend rien qu'on ne sache déjà sur
les petits rigolos du cirque gauchiste et sur le vide sidéral de
l'idéologie populiste. Un film certainement utile à la foire
électorale française dont les comédiens-députés anti-fascistes peuvent
remercier le gouvernement belge et son réalisateur. Une chose est
sûre, le ch'Nord est une terre raciste et de plus en plus
d'infirmières sont en passe de se mettre au chevet du FN...Une autre est une certitude également, le FN recrute comme n'importe quel parti bourgeois officiel: la prise en considération par la "reconnaissance", promis à être tête de gondole du moindre péquin sur les affiches... apéro-pastaga et bals d'après-congrès, drague militante, corruption vénale, passe-droits, clientélisme et j'en passe.
NOTES:
1En
1938, Trotsky écrivait : « Les mesures philanthropiques
en faveur des réfugiés deviennent de moins en moins
efficaces... ».
2Dans
les années 1930, Trotsky pouvait sortir parfois de belles âneries,
sur les noirs américains comme sur les ouvriers immigrés, ainsi il
pensait que les travailleurs étrangers étaient forcément
révolutionnaires : « Les travailleurs étrangers ont une
mentalité différente, tout simplement parce que ce sont des
étrangers (!?), une mentalité d'émigrants, plus mobile, plus
réceptive aux idées révolutionnaires. Voilà pourquoi l'idéologie
communiste peut gagner le respect des travailleurs étrangers et en
faire un puissant instrument de pénétration dans l'ensemble de la
classe ouvrière française ». Après la conscience apportée
de l'extérieur par des intellectuels selon Lénine jeune, la
conscience apportée de l'étranger par Trotsky vieux ? Que
dirait-il aujourd'hui de cette masse de migrants qui apporte « de
l'extérieur » une mentalité de « mahométans
arriérés » (l'expression est aussi de Trotsky), franchement
anti-ouvrière et anti-communiste ? Admirable pénétration de
l'idéologie (libérale) de la soumission pour les besoins
industriels des bourgeoisies britannique et allemande.
3Lors
de son émission en vedette, Mélenchon a effectivement posé la
question qu'il fallait à un policier syndicaliste (noir) venu lui
porter la contradiction, concernant l'affaire Théo, l'autre a été
infoutu de répondre autrement qu'en défendant son corps de
mercenaires d'Etat, pour ensuite reprocher au candidat de moquer ses
potes « cowboys ». Une opération de basse police et de
basse magistrature a au même moment « informé » que la
famille de Théo aurait détourné des fonds généreusement alloués
pour monter une entreprise, mais aurait fait acte de népotisme
(comme Fillon...). Belle parade mais qui n'excuse aucunement les
petits sadiques en uniforme qui enculent à l'aide de leur matraque
télescopique les gens qu'ils ont alpagués à cinq contre un pour
des délits inexistants.
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