Marina Ginesta comme tu étais belle, je t'aime toujours plus que la révolution échouée. |
Les
historiens agréés par la classe dominante peuvent varier les
interprétations selon les besoins de l'époque. Pour le petit frère
de l'anti-fascisme, l'anti-racisme, on se gardera bien de « bouffer
du curé » par les temps qui courent (et ne se rattrapent pas)
- cannibalisme primitif bouseux que ne reste pas une des gloires de la guerre espagnole1
- comme la réquisition brutale des petits commerces et des petites
entreprises à la manière du goulag stalinien ; réquisitions
qui ont fait plus pour le succès de Franco que l'indignation
occultée que le généralissime factieux ait envoyé des « maures »
massacrer en premier lieu les prolétaires espagnols. L'anarchisme
moderne était inévitablement propice à la pénétration
stalinienne. Quoi de plus autoritaire et sectaire qu'un anarchiste si
on lui donne « du pouvoir », même local ? Je souris
toujours quand je vois les stades ou médiathèques des cités
post-staliniennes nommées « salle Léo Ferré ».
Donc
bien longtemps après la tragédie de 1936, l'historiographie
bourgeoise tolérée a connu successivement deux vagues :
jusqu'à la fin des années 1960, glorification du combat
antifasciste indifférencié, mais après 1968 – on ne remarque
guère que les grandes secousses politiques du prolétariat poussent
les historiens à se rapprocher de la vérité – dénonciation du
coup de poignard dans le dos du stalinisme en Espagne, mais cette
dernière vague est encore une mystification qui dure jusqu'à
aujourd'hui en mettant tout sur le dos des seuls affidés de Staline,
faisant passer finalement les organismes traîtres comme la CNT et
l'extrême gauche de l'époque (POUM et divers) pour des victimes,
nonobstant qu'elles furent « consentantes » par leur
soumission initiale au chantage « guerre anti-fasciste d'abord,
révolution sociale ensuite », restaurant la criminelle « union
sacrée » nationale (dans une version « internationale »
romantique) qui sert à chaque fois à envoyer les prolétaires au
casse-pipe.
Sans
avoir à se fader tous les bons ouvrages classiques (Broué, l'épais
Bolloten, etc.) je vous recommande, pour aller rapidement au cœur de
la compréhension essentielle, les quinze pages du chapitre 3 (la
fraction et la guerre d'Espagne) du livre de Michel Roger : Les
années terribles 2.
Voici ce que j'en disais sur ce blog le 12 décembre 2012 :
(1926-1945 – ed Coleman, 2012), qui fournit le
meilleur résumé sur cette tentative révolutionnaire si vite
détruite en guerre impérialiste occultée par la foutaise de
l'antifascisme
« Sur
le moment de la guerre d’Espagne, il n’y a rien à redire, tout
est bien analysé ; y compris cette excellente remarque, contre
tous les cinglés accrocs aux armes, que l’échec était certain
sur le plan militaire et que les armes ne remplacent pas la lutte
prioritaire sur le « front de classe ». La description de
la militarisation des anars et des ouvriers par l’Etat bourgeois
républicain est une douche froide pour tous les fans de la mythique
« guerre révolutionnaire » !
3.
LECONS
D'UNE DEFAITE, PROMESSE DE VICTOIRE4
Le
mexicain Munis a hérité sans nul doute du sens de la formule à la
Trotsky. Bilan reconnaissait sa dette littéraire au talentueux Léon
à la plume de paon. Munis a aussi la plume brillante, plus
percutante que les lourds pensums de Bilan. Est-ce un hasard si Munis
s'est associé avec le plus politique et le plus brillant des
surréalistes Péret pour écrire bien plus tard le pamphlet « Les
syndicats contre la révolution » qui nous a tant épaté en
1968 ? Non, Munis est non seulement un orateur brillant et
courageux, mais aussi une pointure littéraire5
.
C'est
aussi parce qu'il est au plus près des mystifications, qu'il trempe
sa plume dans l'indignation, mais, contrairement aux poncifs selon
lesquels être le nez sur le terrain diminuerait la sagacité, il va
plus loin et plus profond que les réfugiés italiens en Belgique, ou
même leur minorité de fraction qui est venue bec dans l'eau
constater la mystification et la militarisation bourgeoise.
La
contribution militante, politique et historique de Munis a été
jusqu'à présent généralement ignorée ou minimisée. Les éditions
au titre débile - Science Marxiste - ont comblé somptueusement une
partie de cet oubli. Un autre individu s'est ajouté à l'exercice, Y
Coleman avec son édition artisanale Sans patrie ni frontières. J'ai
déjà dit en 2012 ce que je pensais de l'épicerie Coleman. Bref
rappel. Coleman, ex de LO et Combat communiste, fait son retour en
politique en 2002 avec sa propre machine à imprimer et lance un
appel d'offre avec pour fonds de commerce réconcilier marxisme et
anarchisme ; cela donne pendant des années des articles
culturels, apolitiques où il pontifie dans le sens du vent de la
gauche caviar6 :
féminisme avec l'exhumation de Voltairine de Cleyre, Emma Goldman ;
antiracisme où il enfourche tous les dadas de l'idéologie
multiculturaliste
US et salue même les Gresh et autres islamophiles
à la Tariq Ramadan. C'est une sorte de gauchisme philosophoque
(c'est une faute de frappe involontaire, mais bienvenue car le phoque
aime à se glisser « dans les eaux glacées de l'égoïsme »).
Ces milieux cultuels ne passionnant guère que les bobos comme lui,
il se met à la recherche, sans le dire à sa maman, d'un arrimage
des textes de la « gauche communiste » maximaliste, il
récupère au passage un Michel Roger, puis nous concocte une compil
de textes de Munis. Recherche de la considération ? Projet
orgueilleux d'être un jour reconnu comme spécialiste de tout le
bazar politique du gauchisme et de l'ultra-gauchisme et pouvoir
obtenir une chaire à Sciences-Po ? Peu importe, il compile et
il n'y comprend rien, comme le démontre sa misérable introduction à
Munis où il rend hommage obséquieusement, s'incline devant Munis
qu'il a dû croiser une fois ou deux à la fête de LO, salue son
honneur. Mais il laisse entendre que les idées de Munis c'est
ringard, et que les textes du mexico-espagnol ne méritent d'être
lus que pour leurs « qualités humaines et politiques rares » !
Munis avait totalement raison de dire que ce pauvre cénacle nommé
Combat communiste était irrécupérable ; de même que nous
avons eu confirmation que la plupart de ces individus n'étaient bons
qu'à devenir des « avortons du capital ». Ce qui avait
choqué les âmes sensibles à l'époque, de cette sorte d'âmes
oecuméniques, pour l'union de tous, apolitiques en somme comme la
plupart de ceux qu'on trouve dans les poubelles de LO.
Tome 1 sans Tome 2 |
Sous
des airs caressant, tentant de parasiter des idées « radicales »
auxquelles il ne pige que pouic,Coleman lance un dernier crachat !
« Il est très facile, à 50 ans de distance, de repérer sur
quels points Munis s'est trompé, les phénomènes qu'il n'a pas
prévus ou envisagés, ceux auxquels il a accordé trop d'importance,
etc. ».
Quelle
flagornerie ! Mais Munis ne fût jamais une anguille idéologique
lui, ni un parasite ignorantin de la nature du projet révolutionnaire
prolétarien. Il a eu droit dans sa vie à se tromper comme vous et
moi, mais pourquoi notre sous-Maspéro7
n'a-t-il pas été capable de dire plutôt que Munis s'est
« rarement » trompé politiquement, qu'il a surtout été
capable d'être un théoricien du mouvement révolutionnaire ?
Quelques exemples. Si, au début, Munis a du mal à décoller du
carcan idéologique du trotskysme et croit même aux billevesées de
Trostky sur la proximité de la révolution en France et en Espagne,
il apprend très vite à penser par lui-même et bien. Il est très
clair sur la capacité machiavélique de l'Etat à fabriquer la
théorie interclassiste et dissolvante de l'antifascisme (sur
laquelle l'antiraciste Coleman ne se prononce pas). Munis est très
clair sur la nécessité de la primauté du politique sur toutes les
jardineries autogestionnaires et peu à peu contre la fable de
« l'armée rouge » comme avant-garde de la révolution.
Coleman a pondu un texte lamentable d'incongruités et de banalités sur la guérilla (cf. Offensives réactionnaires) qu'il faut lire la contribution de Munis pour
s'en laver les mains8.
Toujours dans sa période trotskyste, face à ses camarades
centristes américains Munis ne s'est pas non plus trompé :
« L'impérialisme allemand en particulier illustrait seulement
les intérêts de l'impérialisme en général. Sans révolution
victorieuse, l'Europe était et reste à la servitude, toujours par
rapport au camp victorieux » (p.197).Munis ne s'est pas trompé
– ni n'a été complice comme les résidus de la IV e
Internationale après guerre – sur la nature de la guérilla
yougoslave (p.199). Munis ne s'est pas trompé en décrivant les
résistants comme forces répressives de l'Etat capitaliste (p.200)9.
Munis s'est-il trompé en répliquant aux trotskystes américains
qu'il ne fallait pas s'attendre à ce que l'armée rouge amène la
révolution en Europe ? Munis n'est-il pas celui qui avec
Natalia Trotsky, face à cet embryon d'Internationale auto-proclamée
et impuissante remet en cause la sacro-sainte et réactionnaire
défense de l'URSS ?10
Les
héritiers espagnols nous fournissent une heureuse rectification aux
billevesées de ce pauvre Coleman en introduction (géniale et
exemplaire) de la compil aux éditions Coleman : « Munis
ne croit pas au parti unique, il l'exècre, d'autant qu'il est une
pure invention stalinienne. Pour lui, le parti historique du
prolétariat ne peut être que le prolétariat lui-même en pleine
action révolutionnaire. Aucune organisation ne pourra lui ravir
cette fonction sans aller contre la révolution, car le mouvement
révolutionnaire d'une classe, son devenir, n'admettent aucune
camisole de force ni impositions partitistes, aussi savantes et
raffinées qu'elles soient. Il incarne le mouvement de la liberté
face à la nécessité : on ne peut donc penser la dictature du
prolétariat, transition vers la liberté de tous les êtres humains,
qu'en respectant et en approfondissant la liberté du prolétariat »
(p.17). Et si Munis était le dernier grand marxiste d'envergure, le
plus fidèle à l'esprit et à la méthode de Marx ? Pour Marx
la dictature du prolétariat n'était-elle pas le contraire de la
dictature d'un parti ? Pourquoi ses prétendus héritiers
« orthodoxes » ou néo-staliniens occultent-ils sa
méfiance instinctive à l'égard des conspirateurs ou
révolutionnaires professionnels, leur prétention à être « les
officiers de l'insurrection » et leur foi fétichiste en la
puissance de l'organisation11.
En vérité il exista bien un drôle de parti de la révolution,
conspirateur et pour la prise du pouvoir... contre la classe
ouvrière : le PSUC stalinien
Munis
ne tresse pas un catalogue de nationalisations comme le contestataire
du POUM Rebull12,
qui croit encore à un socialisme national. Munis est encore au début
sur la position trotskyste de soutien critique à la Russie et croit
en juillet 1936 que l'Etat bourgeois a disparu ; il se rend
compte vite que ce n'est pas le cas avec la réaction de la « contre
révolution démocratique », laquelle dissout le comité
central des milices le 22 octobre 1936, qui avaient pourtant déjà
été « militarisées » par le gouvernement Caballero
mais qui pouvaient devenir le principal contre pouvoir prolétarien.
L'Etat
bourgeois peut s'adapter, se déguiser. Mais il y a un héritage
bizarre et contre-indiqué du culte de l'Etat parmi la floppée de
ceux qui se réclament de Marx, qui est un culte servile de l'Etat,
oubliant sa nature, oubliant qu'il faut le détruire comme en Russie
avant de pouvoir reconstruire un autre système. Marx et Engels ont
toujours exprimé leur méfiance de l'Etat. Dans leur critique des
programmes de Gotha et d'Erfurt, Marx et Engels écrivaient
pourtant : « Une éducation du peuple par l'Etat est chose
éminemment condamnable. Déterminer par une loi générale les
ressources des écoles primaires, les aptitudes exigées du personnel
enseignant, les disciplines enseignées, etc., et comme cela se passe
aux Etats-Unis, surveiller à l'aide d'inspecteurs d'Etat ,
l'exécution de ces prescriptions légales, c'est absolument autre
chose que de faire de l'Etat l'éducateur du peuple ! Bien plus,
il faut proscrire de l'école au même titre toute influence du
Gouvernement ou de l'Eglise (…) C'est au contraire l'Etat qui a
besoin d'être éduqué d'une rude manière par le peuple »13.
Munis
comprend très vite la supercherie « démocratique » qui
enveloppe de sa toile d'araignée et de son chantage à
l'anti-fascisme toute l'extrême gauche espagnole : « …
le POUM a couvert les traîtres et s'est lui-même fermé l'accès
aux masses. Le même processus s'est produit avec la CNT, de façon
plus accentuée »14 ;
bien que pas encore dégrossi de l'héritage lénino-trotskien – il
manquerait le parti et une « armée rouge » - et donc
paradoxal dans ses explications, Munis tape juste en ce début 1937,
malgré son retard sur les prises de position des italiens de Bilan :
« La bourgeoisie mondiale, aidée efficacement par la
bureaucratie soviétique, s'appuie sur les partis socialiste et
stalinien pour sauver la bourgeoisie espagnole et transformer la
guerre civile en guerre impérialiste ». En février il est de
plus en plus lucide : « Les rivalités impérialistes se
déchaînent en Espagne puisque notre société reste capitaliste
(…) Les possibilités d'une issue révolutionnaire à court terme
sont pratiquement inexistantes. (…) Avant d'être en mesure de
vaincre militairement les fascistes, il (le prolétariat) devra
vaincre politiquement les staliniens et les réformistes. Les plus
grands maux sont à craindre si le prolétariat ne prend pas cette
orientation » (p.58).
Le
tract de la section « bolchevique-léniniste » de la IV e
Internationale, qui suit au même moment, est certes rédigé
collectivement mais on y trouve des formules à l'éclat de diamant
dont seul Munis est capable : « … derrière le mot
populaire, se cache la politique de la bourgeoisie ; celle-ci à
son tour se reflète dans la création de l'armée populaire, dont le
nationalisme va concurrencer celui de l'armée de Franco, dans la
réorganisation de l'appareil répressif de la bourgeoisie ;
elle se lance dans la persécution des révolutionnaires et apparaît
dans toute sa splendeur réactionnaire en essayant de faire la paix
avec les fascistes – aussi espagnols – ou en transformant la
guerre révolutionnaire de classe, en guerre bourgeoise, c'est à
dire impérialiste ». Mais des illusions de correction ou
redressement des piou-pious de base des CNT, FAI et POUM demeurent,
tout comme la fable de « l'armée révolutionnaire aux mains du
prolétariat ». Les limites politiques évidentes des « amis
de Durruti » sont fraternellement relevées. En août 1937,
Munis émet des doutes sur l'aspect révolutionnaire des armes, qui
n'ont pas servi à faire progresser la « révolution » en
cours : « Cela montre que les armes ne peuvent pas
résoudre le problème, si elles ne sont pas guidées par une
politique claire » (p.77)15.
En
février 1938, les victoires militaires et les prolétaires sous
uniforme sont des pièges de plus en plus visibles : « Si
un soldat émet une critique contre son chef immédiat ou contre le
gouvernement, ou s'il lit un journal ouvrier clandestin, il est puni
d'une peine d'emprisonnement et parfois d'une condamnation à mort.
Dans 80% des cas, les commissaires politiques ne sont rien d'autre
que des espions staliniens qui agissent contre les soldats
révolutionnaires. (…) Loin de changer cet état d'esprit, la
victoire de Teruel va renforcer la lutte des officiers contre les
soldats (…) Les ouvriers, en revanche, peuvent être condamnés
comme fascistes simplement parce qu'ils sont en possession d'un
fusil. Les réunions des travailleurs sont interdites, les réunions
syndicales elles-mêmes sont restreintes et surveillées par la
police (…) la presse et les organisations ouvrières les plus
fidèles à leur classe sont dans la clandestinité ; plus de
quinze mille combattants sont emprisonnés et les agissements des
bandes de la Guépéou sont couverts par le ministre de l'Intérieur »
(cf. Voz leninista n°3, 5 février 1938).
Munis
et ses compagnons rejoignent finalement l'analyse faite deux ans plus
tôt par Bilan comme le raconte Michel Roger : « Au lieu
de mener la lutte sur un front de classe, on a mené les ouvriers en
dehors des centres industriels. La lutte était perdue d'avance !
Pour la Gauche italienne, pendant la révolution la lutte est
essentiellement politique, sortir de cette sphère dès le début
c'est aller à l'échec car sur le terrain militaire, on rencontre
les spécialistes de la guerre et des professionnels qui sont mille
fois plus forts que les prolétaires expérimentés. Sur le terrain
de la lutte sociale, c'est une situation inverse qui existe »
16.
Le
groupe de Munis n'est ni défaitiste ni résolu à rester
observateur, ni manichéiste à la façon des éternels bobos, vis à
vis des autres groupes aussi « impurs » soient-ils17 ;
il se bat pour un regroupement avec les « centristes »,
la gauche du POUM et les Amis de Durruti : « Le centrisme
peut inclure des éléments révolutionnaires qui évoluent vers le
réformisme, ou vice versa ; dans tous les cas l'évolution
prend du temps et transforme un courant politique au fil des
événements. Personne ne se couche révolutionnaire un soir pour se
réveiller centriste le lendemain matin » (p.90). Mais Munis
n'a guère d'illusions sur l'avenir du POUM et Cie :
« Conquérir
le pouvoir en faveur de la classe ouvrière », quelle belle
perspective ! Les dirigeants du POUM espèrent se mettre
d'accord avec la CNT et la FAI (…) alors qu'ils espèrent également
arriver au pouvoir pour livrer le prolétariat entre les mains du
gouvernement » (utilisant) le mot d'ordre de Front unique pour
le transformer en un slogan mensonger, afin de calmer le
mécontentement de leurs militants » (p.91).
En
février 1939, interviewé par ses camarades français de la Lutte
ouvrière (n°110), sur la déploration par les médias de la
faiblesse en armement du gouvernement de Front populaire en Espagne,
Munis va décoiffer ses interlocuteurs qui n'en attendaient pas
tant :
« …
Militairement, malgré la propagande du Front populaire, cette
politique (de guerre) n'a pu créer qu'une « discipline »
au sens bourgeois du mot, mécanique et répressive, sans donner aux
soldats ni organisation, ni capacité technique, ni non plus la
solidarité d'une armée bourgeoise. Le résultats concrets furent le
monopole de tous les postes de commandement par des arrivistes
dépourvus de toute capacité militaire, ce qui entraînait une
discipline ne s'exerçant contre les soldats que pour maintenir les
privilèges des parvenus (…) Les soldats avaient le sentiment que
l'organisation de la fameuse « armée populaire » ne se
faisait que pour garantir les privilèges des parvenus et de la caste
militaire pour réfréner toute activité politique à la base. Aux
moments décisifs et dangereux, cette organisation aboutissait
inévitablement à la fuite du commandement18,
ou à son passage à l'ennemi.. » (p. 98).
En
avril 1938, Munis est à nouveau interviewé mais par Le Réveil
syndicaliste. Décidément tous les intervieweurs sont obsédés par
l'aspect militaire, et Munis corrige encore :
« C'est
de toute évidence que les causes principales de la défaite
militaire sont dans la politique du gouvernement et non dans
l'insuffisance du matériel de guerre. Le Front populaire par son
programme bourgeois démocratique, a réussi, grâce à l'aide des
organisations ouvrières, à empêcher le prolétariat d'organiser
la société socialiste esquissée le 19 juillet 1936 ». Mais
il est encore dans la croyance en un socialisme pouvant débuter dans
un cadre national (isolé) espagnol, pensée éminemment trotskyste
et néo-stalinienne. Il pense encore que le comité central des
milices (en effet vite dissous par le gouvernement bourgeois) aurait
pu ouvrir la voie à un renforcement (militaire révolutionnaire?) de
la tentative révolutionnaire. Mais sa pensée évolue très vite,
basta les histoires de victoires militaires mais aussi les fumeuses
collectivisations et autres nationalisations : « Toutes
ces réalisations admirables du prolétariat n'ont aucune valeur
durable sans l'affermissement de ses conquêtes par son pouvoir
politique, ses armes ».
Un
étonnant tract du groupe d'avril 1939 – intitulé Vive la
révolution espagnole (p.111) – explique qu'une « révolution
sociale » n'a pas pour principales armes... les armes :
« Pourquoi,
avec leur force ordinaire, ont-ils pu vaincre votre héroïsme
combatif et votre volonté d'émancipation politique et sociale ?
A cause du manque d'armement, comme vous le disent les chefs du Front
populaire ? Mensonge ! En juillet 1936, ils furent vaincus
sans armes ; sans armes furent conquis l'Aragon, Guadalaraja,
Albacette, San Sebastian ; avec une proportion d'armes
infiniment inférieures à celles disponibles dernièrement, Madrid
fût défendue durant les journées mémorables de novembre ;
les révolutions se sont toujours faites et se feront en
infériorité en armes par rapport à l'ennemi19.
Ne vous laissez pas tromper par cette fumisterie mensongère répandue
par les traîtres à votre cause, coupables de votre défaite.
L'infériorité en armement du prolétariat résulte de son
infériorité comme classe dans le monde capitaliste. C'est une
difficulté qui ne pourra jamais être dépassée, mais contrecarrée
à grande échelle en introduisant dans le camp ennemi le facteur
dissolvant des idées et des consignes révolutionnaires »20.
Puis
Munis avec ses formules concises et percutantes démolit l'idéologie
antifasciste dominante et qui est derrière toutes les questions
naïves des observateurs lointains du théâtre « des
opérations » :
- les russes ne fournissent qu'une quantité minuscule d'armes,
- les partis pro-russes utilisent l'argument mensonger de l'infériorité en armement pour faire oublier qu'ils sont eux les vrais usurpateurs casseurs de la révolution,
- la défaite n'est pas due à une « trahison des démocraties » amis à une idéologie de Front populaire qui a servi « à noyer le mouvement de solidarité du prolétariat international »,
- le prolétariat a d'abord été vaincu par le Front populaire avant de l'être par Franco.
Munis
frappe un grand coup en décrivant la soumission anarchiste et celle
du principal parti d'extrême gauche le POUM comme le résultat, on
peut dire classique, de l'apolitisme
anarchiste21 :
« … le Front populaire déchaîna contre les masses
exploitées une véritable guerre civile, de l'apolitisation et de la
hiérarchisation de l'armée en consonance avec le code bourgeois,
jusqu'à l'assassinat et la persécution des militants
révolutionnaires. Cette politique allait épuiser le prolétariat,
lui imposer une passivité chaque fois plus évidente face à la
guerre, à laquelle les commandants gouvernementaux ne fixaient que
des objectifs bourgeois (les 13 points de Negrin) (…) Une
situation, en somme, où même la supériorité en armement n'aurait
pu garantir la victoire (…) Le Front populaire organisa une armée
bourgeoise ».
Enfin, leçon supplémentaire, la plupart des organisations d'extrême gauche sont
désormais, depuis l'expérience espagnole, étrangères au
prolétariat et à ses buts : « Le Front populaire,
pouvoir politique de la bourgeoisie, put se maintenir, vaincre les
travailleurs et faciliter la voie à Franco, parce que les
organisations ouvrières d'extrême gauche, l'anarchisme et le POUM
ne surent pas (?) guider les masses vers la conquête du pouvoir
politique. La trahison va d'une extrémité à l'autre de la gamme
politique. Aucune de ces organisations ne sera capable demain de
garantir la victoire de la révolution. La guerre civile espagnole a
été leur tombe ».
J'ai
mis un point d'interrogation sur le « ne surent pas » -
car j'ai des doutes sur la traduction des anars de L'esclave salarié
qui ont traduit ce texte – sans oublier l'incompétence politique
de Coleman. J'aimerais savoir quel fût le verbe utilisé en
espagnol, car le raisonnement ici de Munis est sortir des oeillères
trotskystes, et signifie plutôt que les « organisations
traîtres » n'étaient plus à même d'indiquer ou diriger quoi
que ce soit au nom du prolétariat révolutionnaire.
Le
texte qui résume superbement l'analyse de la tentative
révolutionnaire en Espagne, est rédigé par Munis en août 1943
(p.126) : Signification historique du 19 juillet (p.137).
Spécialiste de la dénonciation de la farce de la théorie de la
« guerre révolutionnaire », j'ai évidemment été
ébloui par la réflexion profonde, méconnue, et que tous les
apprentis guévaristes ou terroristes eussent dû avoir lu (sans
lustucru) à l'orée des sixties : Quelques réflexions sur la
guérilla « nationaliste », qui ne comporte qu'un seul r
contrairement à guerre. Munis démonte impeccablement les lubies et
illusions sur les possibilités des guérillas « organisées en
général par des pouvoirs réactionnaires » : « Les
paysans sont les derniers à se mobiliser contre l'oppression, et,
quand ils le font, ils ont tendance à adopter des formes de lutte
extrêmes et antisociales si l'occasion se présente. Ce sont ces
caractéristiques qui feront des paysans les derniers émancipés (…)
Il faut combattre le particularisme paysan, le faire passer de la
guérilla à la lutte sociale ».
Enfin,
je crois que, après Rosa Luxemburg et Anton Pannekoek, il est un des
rares à avoir remis en cause la fable séculaire sur la « guerre
révolutionnaire » : « En finir avec l'oppression
n'est pas un problème militaire, mais social, ce n'est pas un
objectif national, mais international » (p.140). Sa période
trotskyste, non seulement montre que le trotskysme d'avant-guerre
était l'aiguillon du mouvement révolutionnaire international, bien
que centriste (= confus et en dégénérescence), et en retard par
rapport à la reconnaissance de l'URSS comme Etat impérialiste
anti-ouvrier, mais permettait des avancées théoriques dans ses
débats22.
Dans les débats avec le SWP américain, Munis décèle déjà les
théories moribondes (qui nous paraissent d'ailleurs aussi comiques
qu'invraisemblables aujourd'hui) : « … l'instruction
militaire sous contrôle syndical aurait dûe être conçue comme un
mot d'ordre pour démontrer aux masses que le contrôle des
dirigeants traîtres n'altère en rien le caractère réactionnaire
de la guerre « antifasciste », et que les masses armées
évoluent plus facilement vers les révolutionnaires afin de
transformer la guerre impérialiste en guerre civile »23 .
Osons
une interprétation, je pense que Munis approfondit la question
controversée de la guerre révolutionnaire, pendant sa période
trotskyste parce qu'il est amené à remettre en cause la défense de
l'URSS, le fameux « soutien critique », en état critique
depuis surtout le pacte Hitler-Staline : « Notre « défense
inconditionnelle de l'URSS » était un mot d'ordre
fondamentalement militaire, destiné à empêcher la défaite de
l'Etat ouvrier dégénéré face à l'impérialisme, et qui était
déterminé en grande mesure par la défaite générale de la
révolution mondiale » (p.203). Et de charger l'incroyable
déduction délirante des trotskystes américains : « ...Comme
si la victoire militaire de l'URSS pouvait inévitablement entraîner
le triomphe de la révolution prolétarienne, du moins en Europe.
Voici ce qu'écrivait The Militant le 27 février 1943 : « il
est presque impossible de concevoir l'avancée de l'armée rouge en
Allemagne sans que ne s'ensuive une révolution sociale »
(p.205). Munis répond : « l'armée rouge ne peut pas être
un instrument de la révolution, elle en sera son bourreau »24.
Depuis
Mexico, en avril 1946, Munis fournit un texte rare, méconnu voire
inconnu qui analyse très finement du point de vue marxiste le
triomphe du capitalisme d'Etat (sans le nommer) en Russie : Les
révolutionnaires devant la Russie et le capitalisme mondial, où il
prévoit l'effondrement au long terme du « vandalisme
stalinien ».
On
trouve le texte de 1950, alors que Munis a fondé un autre groupe,
Union ouvrière internationale : Contre les deux blocs, pour le
socialisme (p.368). L'explication de l'omerta sur la rupture de
Natalia Trotsky avec la Quatrième Internationale par Munis
(p.376) ; et la lettre de Natalia à... France-Soir.
Cela
fait trois ans qu'on attend le tome 2.
notes (+ voir plus bas: chronologie d'une révolution avortée)
1Je
présume que l'historiographie est entrée dans sa « troisième
période », qu'elle va chercher à s'aventurer sur les terrains non labourés, violer le sacro-saint manichéisme anti-fasciste - tout ayant été dominé jusqu'ici par le noir et blanc, au point que certains estiment que toute l'histoire de la révolution ou guerre espagnole est à refaire - si j'en juge par le fait que ma republication de
l'échange de lettres entre Bernanos et Simone Weil - terrible transgression - reste à ce
jour, la communication la plus consultée sur mon blog !
Comment ne pas aimer l'oeuvre de Bernanos, qui resta toujours
pauvre, et une œuvre révélée surtout parce que Pialat a su en
extraire de grands films ? Quant à Simone Weil, présentée
comme un penseur majeur du XX e siècle par certains ignorantins et
« première établie » de l'histoire, elle fût élevée
à la pensée universelle par … la Gauche communiste, puisqu'elle
fût amenée à fréquenter les cercles maximalistes avant d'aller
s'engager bêtement en Espagne (cf. témoignage de Marc Chirik qui
l'a connue).
2Egalement
percutante cette interview : « Durruti dans le
labyrinthe. Qui a tué Durruti ? », sur le site des
giménologues : http://gimenologues.org/spip.php?article644
3
Sur ce blog donc 12 dec 2012 avec un titre un peu provocateur mais
dans un but accrocheur : « Un travail de fainéant sur la
Gauche italienne ») ; et aussi le 9 décembre 2012 dans
l'article « Un maximalisme indestructible » où je
reproche à l'auteur de ne pas avoir travaillé sur l'oeuvre du
mémorialiste bordiguiste Lucien Laugier) ; enfin le 4 février
2014 : « Une compil majeure sur l'histoire de la GCF » :
« L'enfer continue ». Lire donc sur ce blog : La
Gauche italienne dans l'émigration par Lucien Laugier en tapant
ceci (car la CIA a flingué mon moteur de recherche) :
http://proletariatuniversel.blogspot.fr/p/la-gauche-italienne-dans-lemigration_12.html
4Coup
de chapeau à la célèbre formule de Munis :
http://leftcommunism.org/IMG/pdf/Tomo_IV_Munis_Jalones_de_derrota.pdf
5Lors
de la fameuse première grande conférence des groupes maximalistes
de l'après-guerre, dans les sous-sols de l'Eglise de la Porte de
Choisy, Munis était venu lire son texte « Fausse trajectoire
de Révolution Internationale », puis le fier hidalgo s'était
éclipsé. Marc Chirik me fît alors cette réflexion : « tu
as vu cette prestance ? Munis c'est la classe ! ».
6Le
plus navrant est « Offensives réactionnaires » où il
véhicule une sereine pensée gauchiste d'une platitude toute
conformiste.
7Coleman
se la joue Maspéro. Debord s'était moqué des publications
hétéroclites pour marché gauchiste de Maspéro & Co, il
disait : maspérisé. Comme nous complétons : Coleman
colemanise. Néanmoins, me fichant de la marque de l'édition si le
contenu importe, et si l'éditeur n'y comprend rien, je tiens au
moins à remercier Coleman de nous avoir au moins permis de
découvrir en langue française (ce que la plupart des vieux machins
maximalistes ne connaissaient pas non plus) ces superbes textes de
Munis, choix peut-être discutable, mais dans une chronologie
intéressante qui m'a permis de travailler dessus.
8Idem
sur le sabotage, lire p.171 sa dénonciation lumineuse.
9Lire
p.201, malgré des confusions et espoirs fous partagés par
l'ensemble des révolutionnaires marxistes lors de la libération de
Paris.
10A
la fin des années 1970 je crois, présent à la Mutualité pour un
cercle Léon Trotsky, ou les profs de LO distillent un savoir
politique pour classe de troisième, j'ai eu honte pour ces
trotskiens dégénérés lorsque j'ai entendu une voix qui
commença
à parler avec simplicité : « je suis Munis, militant de
la IV e Internationale avec Trotsky puis du FOR..... ».
J'étais ému. Je ne me rappelle plus du contenu qui devait être
très critique pour LO. La salle s'était contentée de rigoler de
l'accent espagnol du vieil homme, Arlette affichait un air benêt à
la tribune comme si cela avait été un marchand de lessive. Tous
ignoraient quel grand personnage était présent. La réponse de la
secte stalinienne avait été, comme chez les informés de France
Inter : « on passe à la question suivante ». Par
la suite nous nous sommes quelques fois accrochés aux permanences
du FOR. Un jour il m'a dit : « toi, tou est un disciple
du Chirik, si yavé oun fouzi yo té tourais » ; j'avais
répondu je crois : « bof tu saurais même pas t'en
servir ». Il ne respectait rien et moi non plus.
11Marx
est très cruel pour les futurs divers « marxistes-léninistes »,
ces « bohèmes d'origine prolétarienne » : « la
seule condition de la révolution est une bonne organisation de leur
conspiration. Ce sont les alchimistes de la révolution, et ils
partagent le désarroi mental, l'étroitesse d'esprit et les idées
fixes des alchimistes de jadis ».
12Agustin
Guillamon – qui accomplit pourtant une œuvre remarquable de
restitution et de décryptage de la guerre d'Espagne – veut nous
faire de Rebull un nouveau théoricien maximaliste original. A voir.
Page 36 de la compil de Coleman, Munis raconte au même Guillamon
avoir essayé en vain de contacter Rebull et que celui-ci a
collaboré à la résistance nationale en France.
13Sur
l'approfondissement de la question de l'Etat dans la période de
transition, le grand théoricien qui prolonge Engels et Lénine,
demeure à mon avis Marc Chirik dont les écrits méritent d'être
republiés plus largement que mon édition confidentielle.
Sollicitant les Cahiers Spartacus pour ce projet, je me suis entendu
répondre : « bof... faudrait peut-être voir avec son
fils et Raoul » ; autrement dit avec les mous, qui ne
feront jamais rien, comme Spartacus qui préfère publier tout ce
qui est libertaire, même et surtout enfumant, pour la clientèle.
Marc et Munis ont fait un bout de chemin ensemble. Munis que j'ai
croisé plus souvent que Coleman ne s'en vante, me dit un jour :
« Chirik m'a piqué toutes mes idées », j'ai toujours
pensé que ce n'était pas entièrement faux (sur la question
syndicale en particulier) mais Munis n'a-t-il pas « piqué les
idées » de Marx, Engels, Rosa, Lénine, etc. Ne sommes-nous
pas tous des pilleurs d'idées de nos ancêtres chéris ?
14Boletin
n°1 du groupe bolchevique-léniniste d'Espagne, 1 er janvier 1937,
page 53 de l'ed Coleman.
15Munis
est autrement plus clair que Rebull dont le fan, A.Guillamon, nous
le décrit venant plaider auprès des chefs du POUM, une main sur le
cœur et l'autre avec la carte de Barcelone , la possible et
victorieuse attaque des locaux gouvernementaux début mai 37 à
Barcelone. Rebull se fait baiser par les collabos poumistes :
« Il lui fut répondu qu'il ne s'agissait pas d'une question
militaire, mais politique (sic, comme quoi la bourgeoisie peut
reprendre nos arguments), la prise du pouvoir signifiait la rupture
de l'unité anti-fasciste et elle précipiterait la victoire rapide
des armées de Franco » (p. 66 de l'édition Spartacus).
L'anti-défaitisme révolutionnaire a de la ressource !
16p.
213 Les années terribles.
17Dans
le CCI, à la fin des années 1980, nous étions une minorité avec
Marc Chirik à dire que le PCI bordiguiste et le FOR n'étaient pas
des gauchistes, une frange de grands intellos (aile bobo du CCI),
profs d'université d'ailleurs, dénigraient la notion de
centrisme : un groupe politique ne pouvait être que bourgeois
ou prolétarien. Sur le sujet Marc s'est battu d'arrache-pied et a
produit des textes à l'unisson de Munis et des anciens, qui avaient
vraiment assimilé la méthode marxiste.
18Ce
qui se reproduira à l'identique lors de la fameuse triste débâcle
en France en juin 1940, preuve aussi très occultée que comme en
Espagne le prolétariat français ne voulait plus aller au
casse-pipe comme en 14. Munis aligne les formules choc, qui évitent
d'inutiles digressions : « (le pc stalinien à Malaga)
devint le bras droit de l'Inquisition franquiste dans sa répression
contre les ouvriers ».
19Je
ne sais pas si le surlignage était fait par Munis ou l'éditeur
Coleman, en tout cas : bon surlignage !
20C'est
ce qui peut être nommé l'increvable « défaitisme
révolutionnaire » dont se gaussent Coleman et ses amis
révisionnistes « communisateurs » (cf.
http://tempscritiques.free.fr/spip.php?article335:
Vernissage d'une antiquité : le défaitisme révolutionnaire »
se moquant du responsable du site Matière et Révolution; et
cf. http://blog.tempscritiques.net/archives/948
.Position toujours problématique (que faire face à daech?), à ce
propos Miche Roger rapporte un épisode troublant et questionnant
dans « Les années terribles » : « En août
1936, lors d'une réunion du Comité central du POUM, le délégué
de la Gauche italienne présent en tant qu'observateur, déclara
qu'il ne fallait pas chercher à tuer les prolétaires enrégimentés
par Franco mais appeler à la fraternisation avec eux. « Les
dirigeants de cette organisation « marxiste »
affirmèrent qu'une telle propagande méritait la peine de mort ».
Il paraît que le délégué y échappa de peu. Même au péril de
ma propre vie, j'aurais été complètement solidaire de ce camarade
courageux, au contraire des petits profs de Temps critiques et leur
pote l'intello Coleman.
21Munis
fustige à plusieurs reprises l'apolitisme anarchiste, ce qui est
rare et inconsidéré dans la plupart des écrits maximalistes :
p. 116, 143 (l'aveuglement apolitique de l'anarchisme). Il explique
cet apolitisme comme ignorance de l'Etat... et c'est profondément
juste puisque les anarchistes finissent toujours par se faire
bouffer par l'Etat, ou se mettre à son service comme tous les
anciens chefs gauchistes, ou les intellectuels secondaires
négationnistes du prolétariat et révisionnistes du marxisme (cf.
Les veuves du terrorisme italien et allemand, les communisateurs,
etc.) en théorisant la fin des classes et le dépérissement du
marxisme (ou sa décomposition comme disait Sorel).
22Sur
la nature capitaliste de l'Etat russe, le substitutionnisme de
parti et la pourriture des syndicats, le courant issu du KAPD au
début des années 1920 était à l'avant-garde mais traité d'ultra
gauche impuissant par les trotskystes-léninistes ; les
bordiguistes qui avaient été les premiers à critiquer Staline et
à soutenir Trotsky avaient été éliminés de la scène
internationale par le triomphe de Mussolini, et les opportunistes
trotskystes les classaient dans la case honteuse dite ultra-gauche,
par suivisme avec la brochure infantile de Lénine. Mais les
meilleurs éléments du trotskysme et des deux courants précédents
allaient se retrouver épisodiquement après guerre, puis féconder
le renouveau du mouvement révolutionnaire dans les sixties.
23p.160,
et p.146 : Le SOCIALIST WORKERS PARTY et la guerre
impérialiste. Les camarades américains en prennent plein la
tronche : « Nous accusons précisément nos camarades
américains d'être tombés dans une déviation centriste par
rapport à la guerre. Comme les centristes, ils ont laissé dans
l'ombre la lutte idéologique et pratique contre la guerre et mis au
premier plan le bavardage sur la défaite de Hitler et celle du
totalitarisme » (p.178).f
24Bon,
si Munis s'est trompé une fois, à la fin de son long texte adressé
au SWP américain : « La Quatrième Internationale et ses
partis sauront aussi corriger leurs propres erreurs » ;
mais il est vrai que tout le monde se trompait, on était en 1944 !
Par après, on se doute, même si Coleman est infoutu de fournir un
appareil critique politique décent que les amendements proposés au
congrès trotskien par Munis n'ont pas été acceptés.
Adler comme Filiu nous assurent qu'en fait c'est parce que le djihadisme est affaibli et qu'il n'en a plus plus longtemps, exactement comme on a expliqué à nos millions d'ancêtres sacrifiés pour le capital il y a un siècle que c'était "la der des der".
CHRONOLOGIE
DU SABOTAGE D'UNE REVOLUTION AVORTEE
Ceci n'est qu'une ébauche pour
les deux années où les carottes ont été cuites, rare certes, mais
révélatrice de comment l'Etat bourgeois n'a pas disparu, s'est
renforcé en poussant à la trahison de vieilles organisations
ouvrières sans principes solides, et surtout vous observerez –
j'ai intentionnellement retiré les épisodes militaires (qui
entretenaient un climat de guerre inclinant à l'union patriotique) –
que la bagarre à l'arrière a pour but de dissoudre la révolution
sociale, qui n'a pu éclore, se renforcer ; et pourquoi ?
Parce qu'il n'a pas pu y avoir un parti communiste mondialiste digne
de ce nom, bien sûr. Mais un tel parti ne peut apparaître (que vous
le vouliez ou nom) que dans une dynamique de montée et
généralisation mondiale de la révolution, or ce ne pouvait être
le cas dans la situation centripète de l'Espagne isolée, et
« encadrée » par les impérialismes quand le
gouvernement bourgeois républicain et stalinien travaillait pour
Franco.
1936
- 16 juillet : victoire électorale du Front populaire bourgeois,
- 17 juillet : veille (?) du coup d'Etat de Franco, le gouvernement censure les éditoriaux qui avertissent du coup d'Etat ; le syndicat des Transports maritimes de Barcelone s'était emparé des armes se trouvant dans les navires « Manuel Arnus », « Argentina », « Uruguay » et « Marquis de Cornillas » (130 fusils et de smunitions). Il les avait transporté à son local. Le 18 veille du soulèvement militaire, la police enleva une partie des armes (d'après Bilan n°36).
- 18-20 juillet : grève générale (aucune chronologie n'indique clairement si celle-ci a débuté le jour du putsch ou le lendemain ou surlendemain, il semble que les atermoiements aient duré trois jours)
- 19 juillet : la stalinienne Ibarruri lance le mot d'ordre militariste « non passaran » à l'attention des ouvriers à embrigader, depuis le balcon du ministère de l'Intérieur, comme réponse nationale au putsch des généraux depuis le Maroc
- 20 juillet : La CNT et à sa suite l'UGT lancent le mot d'ordre de grève générale à toute l'Espagne alors que les ouvriers sont partout déjà dans la rue ; la grève générale à Madrid n'est de fait que le prolongement de la grande grève de la construction qui durait depuis juin ; une journée après Barcelone le prolétaires madrilènes emportent d'assaut la caserne de la Montana. En secret, dans le cabinet ministériel de Companys, CNT et FAI prêtent allégeance au gouvernement bourgeois. Des navires français et britannique mouillent au large de Barcelone prêts à intervenir. Tournant précoce vers la « guerre sainte antifasciste », avec l'appel à la cessation des grèves voisine avec l'injonction de créer des « colonnes armées » pour défendre la République bourgeoise.
- 21 juillet : Décret de la Généralité (gouvernement de Catalogne ) annonçant la création de milices citadines « pour la défense de la République et la lutte contre le fascisme et la réaction ».
- 24 juillet : CNT et UGT appellent à la reprise du travail ; la première colonne de volontaires nommée Durruti (embrigadement d'abruti?) part au front de Saragosse ; le Poum (parti d'unification marxiste » joue à la surenchère d'extrême gauche appelant à faire durer la grève générale « jusqu'à ce que le fascisme soit écrasé partout). Le front d'Esquerres qui groupe tous les partis bourgeois de gauche reçoit une lettre du Poum où celui-ci, invité par Companys, accepte de collaborer avec tous les partis contre le fascisme mais refuse d'entrer au gouvernement de Front Populaire. La « Batalla » du Poum proclame qu'à Saragosse « se concentre l'attention révolutionnaire mondiale ».
- 2 août : la Généralité voulant appeler sous les drapeaux les ouvriers, la CNT s'aligne apparemment sur le refus des ouvriers : « Des miliciens ? Oui ! Des soldats ? Non ! » ; le Poum demande la « dissolution » et pas la destruction de l'armée ; c'est pourtant la porte ouverte à la militarisation et au dessaisissement du contrôle des armes par les prolétaires. A Barcelone est créé le comité central des milices antifascistes qui n'est pas un nouveau pouvoir, mais un supplétif du gouvernement gérant le ravitaillement, l’administration judiciaire, la formation des unités de la milice, leur envoi au front, les questions économiques… A Madrid la Garde civile reste intacte et « garde jalousement les coffres-forts du capitalisme : les banques ».
- 26 juillet : la CNT botte en touche : « le seul ennemi du peuple, c'est le fascisme »
- 28 juillet : le Poum, qui au travers du POUS, contrôle le syndicat des employés, lance le mot d'ordre de reprise du travail « pour les ouvriers qui ne se trouvent pas dans les milices. Il faut créer la mystique de la marche vers Saragosse, dira-t-on aux ouvriers, puis nous réglerons leur compte à la Généralité et à Madrid » (cf. Bilan n°36). On continue à exproprier des entreprises mais sous le contrôle des délégués du gouvernement. Dans les régions agricoles où n'existe pas un prolétariat nombreux, triomphe progressivement la répression sanglante des troupes franquistes.
- 30 juillet : à Madrid, la Pasionaria, cheffe du parti stalinien, déclare qu'il s'agit de défendre la révolution bourgeoise.
- 3 août : « Mundo Obrero », organe du parti stalinien proclame qu'il défend la propriété privée des amis de la République et lance le mot d'ordre : « pas de grèves dans l'Espagne démocratique ». A la même époque interview de Companys où il met en évidence que la CNT et la FAI « sont aujourd'hui les représentants de l'ordre et que la bourgeoisie catalane n'est pas une bourgeoisie capitaliste mais hulanitaire et progressiste », « notre gouvernement défend les classes moyennes » (sic).
- 6 août : En Catalogne, les staliniens du PSUC, expulsés de la direction du Comité Central des Milices Antifascistes le 6 août font leur retour au sein du gouvernement d'union de la Généralité
- 8 août, célèbre discours du chef stalinien Jesus Hernandez, salue une guerre nationale pour l'indépendance de l'Espagne.
- 11 août : déjà très contrôlés par les syndicats, les comités d'usine sont reliés par décret au Conseil de l'Economie du gouvernement.
- 22 août : sous le signe « Hasta el fin », les ouvriers catalans sont envoyés au casse-pipe vers Majorque.
- 25 août : le plenum de la CNT annonce les accords concluant au désarmement de 60 % des miliciens appartenant aux différents partis ; la CNT fait comprendre qu'il n'existe plus qu'un front : le front militaire. Mise au point des Etats capitalistes pour une organisation du conflit : faciliter l'envoi d'armes à Franco et invention des « légions étrangères prolétariennes », qui prendront le nom de « brigades internationales ».
- 29 août, selon la « Batalla », organe du Poum, les ouvriers de Saragosse auraient mené pendant quinze jours la grève générale.
- 1 er septembre, le chef du Poum, A.Nin déclare : « notre révolution est plus profonde que celle faite en Russie en 1917. L'exaltation de la « guerre révolutionnaire » est croissante dans la phase de la chute d'Irun, les journaux toitrent : « La chute de Huesca est imminente »
- 4-5 septembre : le socialiste Largo Caballero nommé premier ministre en compagnie des ministres anarchistes Garcia Oliver et Federica Montseny
- 9 septembre:conférence à Londres en faveur de la non-intervention en Espagne
- 11 septembre : le Poum salue le gouvernement Caballero comme progressiste par rapport à celui de Giral.
- courant septembre l'instrument de Staline, le Komintern invente les Brigades internationales
- 16 septembre est créée la Milice de surveillance de l'arrière (Milicia de Vigilancia de Retaguardia), chargée de contrôler l'ensemble des milices qui n'ont pas de rôle actif au front mais à l'arrière, mais qui restent puissantes et indépendantes
- 26 septembre : la formation du Conseil de la Généralité de Catalogne (= gouvernement bourgeois) a lieu sous condition que disparaisse le Comité central des Milices.
- 27 septembre le chef anarchiste Garcia Oliver et celui du POUM Nin se retrouvent au gouvernement ( la Généralitat de Catalogne)
- 28 septembre : décret de création de l'armée bourgeoise dite Armée populaire de la République
- 1 er octobre : dissolution du Comité Central des Milices Antifascistes (décret de Madrid approuvé par la CNT)
- 10 octobre : décret créant l’armée populaire et militarisant les milices (couic ! Embrigadés)
- 14 octobre : consignes syndicales de la CNT : application du décret de militarisation et de mobilisation pour la Catalogne. Le navire « Zanianine » fait escale dans le port de Barcelone signalant la fin de la non-intervention du côté russe.
- 22 octobre : le gouvernement espagnol légalise la création des Brigades internationales, et décret de collectivisation des terres et des usines en Catalogne ; la CNT entre au gouvernement de Madrid.
- 27 octobre : l'opposition à la militarisation par la CNT est de pure forme : « Milices ou armée nationale ? Pour nous autres milices populaires ! ».
- 1er novembre : le POUM publie le décret de militarisation de l'Espagne
- 4 novembre : entrée de la CNT dans le gouvernement Caballero
- 17 décembre : la Pravda annonce qu'en Catalogne, le « nettoyage des trotskystes et des anarcho-syndicalistes a déjà commencé ». Le POUM est viré du gouvernement stalinien.
1937
- 8 janvier 1937 : le Comité exécutif populaires de Valence est dissous.
- 27 février : le journal de la FAI, Nosotros, est interdit
- 12 mars : décision de la Généralitat (gouvernement de Barcelone) de récupération de toutes les armes non militarisés au sein de l'Armée populaire
- mars : achèvement de la militarisation des milices dans « l'Armée populaire »
- 17 avril : les forces de police de l'Etat bourgeois républicain exigent la dissolution des patrouilles ouvrières de la CNT et procèdent en particulier au désarmement des ouvriers armés
- 3 mai: le gouvernement tente de s’emparer du central téléphonique de Barcelone aux mains des employés et gardés par la CNT. Grèves et barricades partout, une véritable insurrection partie à la base. Le gouvernement depuis Valence envoie 5 000 hommes supplémentaires mais Garcia Oliver et Federica Montseny prêchent le retour au calme ! Cette répression des insurgés ouvriers anarchistes et marxistes par l'État bourgeois républicain et les milices du parti stalinien restera longtemps occultée. La honte cette passivité et collaboration des anarchistes du gouvernement, ainsi que des chefs du POUM
- 4 mai : tract du groupe de Munis Voz leninista : « Vive l'offensive révolutionnaire »
- 13 mai : Le 13 mai 1937, les deux ministres staliniens Hernandez et Uribe proposent au gouvernement de sanctionner la CNT et le POUM, jugés responsables de l'anarchie et des difficultés que connaît le camp républicain, politiquement comme militairement, poussant Caballero à la démission le 15 mai
- 17 mai : formation du gouvernement par le socialo-stalinien Negrin excluant anarchistes et poumistes
- 25 mai : 25 mai, la FAI est exclue des tribunaux populaires. Le 15 juin, c'est le POUM qui est déclaré illégal, ses activités interdites, son comité exécutif est emprisonné, la 29e division (ancienne division « Lenin » du POUM) est dissoute ;
- 6 juin : 6 juin, un décret gouvernemental rend illégales toutes les collectivités rurales qui n'ont pas encore été dissoutes. Le Conseil régional de défense d'Aragon est définitivement dissous en août, ses instances sont occupées par la force à partir du 10 août par l'Armée populaire du gouvernement bourgeois tandis que Joaquim Ascaso son président, est emprisonné ; le SIM (service d’enquêtes militaires) envoyé par le gouvernement et entièrement contrôlé par le GPU organise une répression féroce : des milliers de militants sont arrêtés et torturés, dans des dizaines de cul de basse fosse.
- 16 juin : arrestation, torture et mise à mort de Andrès Nin leader du POUM par les tueurs du parti espagnol et russe
- en août, les critiques vis-à-vis de l'URSS sont interdites : les bandes armées du parti stalinien mettent fin à la collectivisation des terres en Aragon, organisée depuis la mi-36 par le Conseil régional de défense d'Aragon
- 1er octobre16 septembre est créée la Milice de surveillance de l'arrière (Milicia de Vigilancia de Retaguardia), chargée de contrôler l'ensemble des milices qui n'ont pas de rôle actif au front mais à l'arrière, mais qui restent puissantes et indépendantes : dissolution du CCMA (c'est un peu le fouillis dans les dates de dissolution des CC des milices, y en avait-il par région?)
- 4 novembre : entrée au gouvernement de Garcia Oliver et Federica Montseny
- 12 novembre : la CNT quitte le gouvernement
Et revoilou l'article du 21 nov 2014
ET SI ON COMPARAIT AVEC LES BRIGADES INTERNATIONALES DE 36 EN ESPAGNE...
"L'essence d'une nation est que tous les individus aient beaucoup de choses en commun, et aussi que tous aient oublié bien des choses".
"L'essence d'une nation est que tous les individus aient beaucoup de choses en commun, et aussi que tous aient oublié bien des choses".
Ernest Renan
Depuis plusieurs mois, voire même plus, la population mondiale est "informée" au quotidien sur des faits de guerre maquillés en simple exhibition d'égorgements où d'Ukraine en Syrie la barbarie serait à nos portes si nous hésitions à désigner le seul ennemi qu'on nous pointe du gros doigt médiatique (1). Par une simplification grossière l'attention est centrée sur les frasques de "l'Etat islamique", nouvelle connotation obligée du "terrorisme international", quand sont passées sous silence les horreurs militaires en Ukraine. Bruits de guerre mondiale managée au long court? Cela mérite une sérieuse comparaison avec la guerre d'Espagne.
Depuis plusieurs mois, voire même plus, la population mondiale est "informée" au quotidien sur des faits de guerre maquillés en simple exhibition d'égorgements où d'Ukraine en Syrie la barbarie serait à nos portes si nous hésitions à désigner le seul ennemi qu'on nous pointe du gros doigt médiatique (1). Par une simplification grossière l'attention est centrée sur les frasques de "l'Etat islamique", nouvelle connotation obligée du "terrorisme international", quand sont passées sous silence les horreurs militaires en Ukraine. Bruits de guerre mondiale managée au long court? Cela mérite une sérieuse comparaison avec la guerre d'Espagne.
Dans cette saga militariste, chaque épisode apporte
de "nouvelles révélations" sur "la progression"
de la barbarie de "l'islam radical". Les zooms télévisés
vont emmène là où vous pensiez être épargné par les risques de
contagion de la barbarie. Qui l'eût cru? Champigny sur Marne, une
médiocre banlieue parisienne projetée en pleine vitrine mondiale où
un obscur Mickaël Dos Santos (ex-portugais au prénom de vedette de
feuilleton US comme tous les prénoms d'enfants portugais)
"... apparaît, barbe drue et en uniforme
militaire, dans la vidéo diffusée dimanche par le groupe jihadiste,
mettant en scène la décapitation de 18 soldats de l’armée
syrienne faits prisonniers par EI et de l’otage américain Peter
Kassig. «L’homme concerné est connu par son engagement
terroriste en Syrie et son comportement violent revendiqué sur les
réseaux sociaux», a déclaré mercredi, sans le nommer, le
Premier ministre, Manuel Valls. En fin de journée, le parquet de
Paris a confirmé son identité, sur la base d’«indices précis
et concordants». Dos Santos affiche un profil similaire à
celui du Normand Maxime Hauchard (lire Libération de mercredi),
lui aussi filmé dans la même vidéo de propagande. Même âge,
même conversion à l’islam à la fin de l’adolescence, même
radicalisation express, via notamment des sites extrémistes. Né à
Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne) de parents d’origine portugaise
aujourd’hui séparés, Mickaël Dos Santos déménage ensuite
dans la très résidentielle commune voisine de
Saint-Maur-des-Fossés, avant de revenir vivre avec sa mère à
Champigny. Ils habitent dans un petit immeuble de quatre étages, au
cœur d’un quartier pavillonnaire des bords de Marne. En 2009, il
est naturalisé français. C’est à cette époque aussi qu’il
devient musulman, avant de s’engager en quelques mois sur la voie
d’un islam radical. «Avant, c’était un jeune normal,
explique un habitant se présentant comme un "ami".
Il jouait au foot, allait au lycée, draguait les filles".
Questionnements,
supputations, on est perdu en conjectures et conjonctures. On fait
appel aux spécialistes pour tenter de nous aider à comprendre cet
engagement inattendu, poignant voire suicidaire de jeunes récemment
barbus. Tiens prenons le plus bête, Filiu, dont j'ai eu l'occasion
de me payer la tête (de con) à l'université populaire d'Arcueil
devant 500 profs retraités. Filu piaffe d'impatience de faire un
coup éditorial à la pouffe Trierweiler; depuis deux ans, ce
franc-mac des Amis de la Syrie dont F.Hollande est aussi membre,
peaufine un futur ouvrage possiblement intitulé "la fin du
régime Assad", lequel ne se résout point à disjoncter.
Peut-être est-ce en préparation du dernier chapitre qu'il a lancé
la mode de la "sectarisation" chez les journaleux pour
comprendre ces petits paumés bien de chez nous qui vont se sacrifier
au profit des ennemis de la civilisation occidentale. Ces djeuns
déclassés un jour, paumés un autre, seraient embrigadés dans des
sectes avant de partir au front. Tout s'éclaire enfin, et surtout
pas besoin de raisonner politique ni social. Le fanatisme, comme
chacun sait conduit au meurtre, au meurtre là-bas et à la
destruction de réputation ici. Heureusement notre télévision
démocatique peut nous servir un repenti chargé d'aller catéchiser
les banlieues glauques: "À
19 ans, Mourad Benchellali s'est laissé embarquer en
Afghanistan dans
un camp d'entraînement d'al-Qaida.
C'était en 2001, et très rapidement, le gamin de Vénissieux est
tombé aux mains de l'armée américaine, vendu par l'armée
pakistanaise. Trente mois à Guantánamo, avec son lot de tortures et
d'humiliations, puis dix-huit mois à Fleury-Mérogis... Benchellali,
condamné, avec quatre autres Français de Guantánamo, pour
"association de malfaiteurs en relation avec une entreprise
terroriste", est ressorti traumatisé de ces cinq ans de tunnel.
Aujourd'hui, Mourad Benchellali a changé de combat. À 33 ans, père
de famille et toujours vénissian, il a entrepris une bataille contre
le djihad, à la rencontre des jeunes, dans les écoles, les clubs de
sport, les associations, pour les dissuader de partir rejoindre les
islamistes en Syrie". Le repenti devenu collabo vient rassurer
polices et gouvernants: "Je comprends ce qui peut se passer dans
leurs têtes" "Je leur raconte simplement mon parcours et
les conséquences que ça a eues sur ma vie", résume
Benchellali". Il ne comprend rien du tout et vient simplement
servir lui aussi la soupe idéologique du camp militariste
occidental.
Un autre journaleux, fervent fan de l'impérialisme
US, et également franc-mac dans les hautes sphères vient gaffer
dans le point avec son arrogance coutumière du mec qui sait tout,
dans l'hebdo pro-US Le Point:
"Alexandre Adler
: C'est-à-dire... il faut se mettre à leur place, toujours. Les
islamistes font la distinction entre les convertis qui restent des
espions des États-Unis
- le travailleur humanitaire (Peter Kassig), qui était converti à
l'islam, était en fait quelqu'un qui essayait d'infiltrer de
l'intérieur l'islam - et, par contre, les bons, les vrais convertis
qui, eux, n'hésitent pas à donner de leur personne et à combattre
dans les rangs de Daesh (Maxime Hauchard). Et, c'est le symbole
qu'ils ont peut-être voulu, ici, mettre en scène. En réalité, il
s'agit d'une démonstration propagandiste - une de plus - pour dire
"Voyez notre combat est le bon, un certain nombre
d'Européens, parmi les plus conscients, nous rejoignent, et ce sera
inexorable !" .
Adler comme Filiu nous assurent qu'en fait c'est parce que le djihadisme est affaibli et qu'il n'en a plus plus longtemps, exactement comme on a expliqué à nos millions d'ancêtres sacrifiés pour le capital il y a un siècle que c'était "la der des der".
L'hémorragie
nationaliste islamiste est à tempérer néanmoins plaide un autre
intoxicateur public, Libération:
"Fin 2012, trente Français étaient
« concernés » par les filières
irako-syriennes. Sous cette désignation, les autorités regroupent
ceux qui sont sur place, ceux qui sont revenus, ceux qui sont en
transit, ceux qui préparent activement leur départ mais aussi les
recruteurs ou ceux qui font des faux-papiers. Ils étaient 500 début
2014, ils sont 1136 aujourd’hui. C'est une centaine de plus qu'il y
a trois mois : un nouveau cas tous les jours en moyenne. Ce chiffre
est encore supérieur lorsqu'on inclut ceux qui pourraient vouloir
partir ou qui inquiètent en tout cas suffisamment leurs familles
pour qu'elles appellent le numéro de signalement mis en place par le
ministère de l'Intérieur. Cette plateforme est informée de 3 à 4
nouveaux cas par jour. Mais signalement n’est pas pour autant
synonyme de départ systématique. Sur les 650 signalements reçus
depuis sa création il y a six mois, le numéro Vert a recensé 110
départs. Ce nombre souligne que le phénomène est toujours bien
réel. « Le mouvement de départs vers la Syrie ne se tarit
pas » assure le préfet Pierre N’Gahane, responsable du
volet prévention dans le plan gouvernemental de lutte contre la
radicalisation et les filières jihadistes dans un entretien au
Figaro, ce mardi. Marque-t-il néanmoins une inflexion ?
Selon les chiffres du procureur de Paris, ce sont actuellement 376
Français qui ont rejoint les groupes extrémistes de Syrie et
d'Irak : une dizaine de plus qu'il y a un mois. Ce nombre est à
mettre en parallèle avec un autre : l’été dernier, les
services de renseignement disaient perdre alors trois personnes
surveillées par jour. Des chiffres sur un mois ne permettent pas de
dégager une tendance et, faute de recul, difficile d’en analyser
les raisons. Mais du côté des autorités françaises, la réponse à
ce phénomène commence à s’organiser. Il faut du temps pour
adapter le Code pénal, faire voter une loi. Le juge antiterroriste
Marc Trévidic le reconnaissait sur RFI : le combat entre des
groupes armés et une démocratie est inégal. Le gouvernement a
d’abord renforcé ses contrôles dans les aéroports : les
jeunes partants seuls ou en petit groupe vers la Turquie sont plus
régulièrement interrogés sur le motif de leur voyage. Sans avoir à
légiférer, le ministère de l’Intérieur a aussi pu mettre en
place, le 1er mai dernier, son numéro Vert de signalement. Il permet
aux familles inquiètes de se manifester, d'obtenir des conseils et
éventuellement de faire surveiller leur proche qu'elles soupçonnent
de vouloir partir.
Puis, la loi défendue par Bernard Cazeneuve est
entrée en vigueur vendredi dernier. Elle prévoit notamment une
interdiction administrative de sortie du territoire mais elle crée
aussi un délit d'entreprise individuelle terroriste : deux
mesures très attendues par les magistrats anti-terroristes qui se
sentent désormais mieux armés pour combattre le phénomène.
L’arsenal répressif s’est donc étoffé et c’est désormais
sur la question de la « déradicalisation » que
les efforts se portent. Cet aspect-là de la lutte anti-terroriste
n'en est qu'à ses débuts. Le gouvernement a entamé, l'été
dernier, une formation des hauts fonctionnaires : préfets et
recteurs d'académie en tête".
DES PERSONNES EN RUPTURE AVEC LA SOCIETE?
"Il faut ensuite former les échelons du
dessous - services sociaux, enseignants, conseillers d'éducation...
- pour pouvoir détecter ces personnes en rupture avec la société
et répondre à leur malaise. Et pouvoir contrer aussi le discours
radical alors que les recruteurs expliquent à leurs recrues que les
efforts faits pour les retenir sont des épreuves d'Allah sur le
chemin de la vérité. Se pose enfin la question de ceux qui
parviennent totalement à dissimuler leur évolution religieuse et
qui ne sont donc pas détectés. Pour les toucher et contrer le
discours extrémiste, l'une des pistes étudiées est le recours à
l'arme des groupes jihadistes : les réseaux sociaux".
Ouf Big brother est à l'oeuvre pour nous protéger.
Le gaz sarin apparaît comme un conte pour enfant face à ce
conditionnement planétaire et plantaire qui semble se choquer de
l'embrigadement militaire plus que religieux de nos bambins
"extrémistes", quand, de façon pachydermique c'est un
embrigadement massif préparatoire à un engagement tout aussi
barbare que les populations prolétaires (majoritaires) sont conviées
subliminalement et minablement.
Décryptons d'abord par le petit bout de la
lorgnette au niveau de Trifouillis-les-Oies ce que nous comprenons
face à l'hystérique propagande militariste bourgeoise, pétrolifère
et financière.
DES PRENEURS D'OTAGES PRIS EN OTAGES
Permettez entre parenthèses que je fasse allusion à
mon blog annihilé par les instances secrètes et étatiques de
Google. Big Gogolito agit comme toujours agissent les polices
secrètes des Etats depuis e Préfet Lépine et l'Okhrana (police du
tsar). Ils ne s'intéressent pas prioritairement aux groupuscules
maximalistes ou anarchistes qui pratiquent la langue de bois ou la
même dénonciation sempiternelle de la guerre impérialiste avec la
même langue de bois que les bolcheviks ou Kropotkine. Lisez les
ouvrages qui racontent les histoires des barbouzes, ils expliquent
que la police n'est pas idiote et flique surtout ceux qui pensent et
écrivent hors des sentiers battus, même isolés ou sans influence
notable, mais qui approfondissent ou mettent le doigt où ça fait
mal à l'idéologie dominante. Quelqu'un parmi eux a certainement
attiré l'attention sur ma petite personne, car ce que j'écris est
étudié ou consulté régulièrement par des gens de l'extrême
gauche à l'extrême droite, sans évidemment en référer jamais à
votre serviteur. Je pourrais retrouver telle déclaration de
Besancenot conforme à une de mes remarques; s'il y est parvenu tout
seul avec son CC tant mieux. Lorsque j'ai rédigé un billet sur la
prise de position va-t-en guerre de l'OCL aux côtés de l'armada US,
j'ai pu constater l'écho, en particulier chez les bordiguistes qui
ont ensuite rédigé un article très profond et qui tape juste
contre l'avachissement historique répétitif du courant anarchiste.
Le CCI qui professait il y a peu la nécessité d'un banquet en voie
de nouvelles tentatives d'épousailles avec l'anarchisme s'est tenu quoi et se
contente de radoter que le capitalisme est en décomposition ou à la
veille de sa mort. Mais tant mieux si certains trouvent matière en
me lisant, même à d'autres fins. Je pense que deux de mes articles
ont dérangé la convivialité impérialiste dominante:
"Une propagande de guerre qui vous prend à la
gorge, derrière la mise en scène des égorgements islamistes la
trouille de l'impérialisme américain" et "Dans la peau d'un
égorgeur islamiste (et le chapitre: le facteur clé de l'anonymat).
Peut-être peut-on me
prendre pour un égocentrique, ce que je ne serai jamais, mais en
tout cas, il est plausible que des djihadistes me lisent aussi, ou en
tout cas les formateurs au djihad de la CIA. Peu importe, j'ai souri
au vu du renversement de tendance – où ils ont pris la mesure de
leur ridicule avec ces cagoules de tueurs lâches. Il est convenu à
présent d'exhiber les tueurs dévoilés, bédouins de souche ou
français naturalisé, avertissement et prise d'otage pour les
impétrants tenté ultérieurement de retourner sauver leur peau en
Europe.
Voici, dans ce dernier
article l'explication que je fournissais:
"Comprendre la
psychologie du tueur anonyme ne peut se situer au niveau du simple
examen du type frustré par une société cynique et inégalitaire.
Il faut saisir à quel moment et comment le futur tueur ou égorgeur
peut passer à l'acte débarrassé de tout sentiment humain.
Le premier moment
d'insensibilisation est le port de l'uniforme. Doté d'une tunique
commune à une foule d'autres individus, l'impétrant ne s'appartient
plus. Il ne peut plus obéir à une conscience de classe ou même à
une simple conscience individuelle cartésienne. Il est
dé-sindividualisé. C'est cette dés-individualisation qui le rend
violent sans remords. Il agit pour tous et au nom de tous en raison
de l'honneur qui lui est confié d'exécuter la besogne (sale de
préférence). Son sentiment des responsabilité individuelle est
quasiment dissous. Est altérée la conscience normale de tout
individu en temps de paix civile. Ses comportements sont conditionnés
par les circonstances de la situation immédiate, qui est souvent
très simple: sauver sa peau. Car si vous n'obéissez pas dans la
foule en uniforme vous êtes cuit, aux ordres d'un Durruti comme aux
ordres d'un quelconque djihadiste barbu. C'est ce bon Gustave Le Bon
qui avait parfaitement identifié le mécanisme: "dans la foule,
tout sentiment, tout acte est contagieux", "La qualité
mentale des individus dont se compose la foule ne contredit pas ce
principe. Cette qualité est sans importance. Du moment qu'ils sont
en foule, l'ignorant et le savant deviennent également incapables
d'observation". A cet égard il n'est pas étonnant que des
adolescents, qui ont vécu en Europe riche au milieu de bandes,
régies par le même principe de contagion suiviste, filent s'enrôler
dans les zones de combat (impérialiste masqué), vues comme moments
révolutionnaires. On retrouve le même phénomène dans les émeutes
primaires qui culminent dans des lynchages. Le spontané est vite au
second plan de l'explosion. Les individus les plus actifs, les plus
cruels (donc les plus "radicaux") sont en situation de
précarité économique et sociale. Les brutes épaisses et les
dictateurs sont en général des déclassés ou des arrivistes
bafoués. Sous le régime de Vichy en France, comme en Allemagne sous
Hitler, les pires tortionnaires pervers se retrouvèrent promus aux
postes de commandement des organismes policiers et militaires. Le
développement du phénomène terroriste n'est donc pas le propre de
la seule religion d'Allah (traditionnellement belliqueuse) mais
intrinsèque à la guerre moderne dès lors qu'on ne peut plus
trouver de justification crédible pour les millions de prolétaires
internationalistes. Les individus paumés, sans identité collective,
en trouve une lorsqu'ils sont embrigadés. Il y a leur groupe, leur
camp, leur troupe militaire et le reste du monde. L'esprit de corps
est une source puissante de désinhibition comportementale, porte
ouverte à l'acte de tuer, comme affirmation de la force du groupe.
On remarquera enfin que
l'uniforme est le même chez les super flics dits ninja comme chez
les tueurs de l'Etat islamique. Et au passage la gradation en terme
d'Etat pour des cartels hétéroclite de pillards, qui confirme
"l'état" du monde à feu et à sang, officialisant des
bandes armées telle une entité nationale officielle. Les
"combattants" de l'Etat démocratique comme ceux de l'Etat
islamique sont masqués. On ne sait plus qui est le chef dans les
bandes d'assassins armés comme on ne sait plus qui sont les
financiers qui ordonnent des manoeuvres économiques criminelles.
Pour un peu on dirait qu'il le faut pour ne plus avoir à se regarder
devant la glace. Au fond, cet anonymat est pourtant bien symbolique
de la guerre moderne capitaliste: elle doit masquer des combattants
sans vergogne et sans autre but que la jouissance de violer et tuer
l'autre".
Et pire, je ridiculisais
cette engeance terroriste qui veut se faire passer pour
révolutionnaire; notez bien qu'à une autre dimension du champ de la
guerre mondiale larvée le spot de recrutement des "brigades
internationales" pro-Poutine d'Ukraine défile ses numéros de
téléphone avec la tronche de Guévara en toile de fond. Je
rappelais simplement l'idée fondamentale de Marx "la lutte de
classe ne peut se dérouler qu'à la lumière du jour":
"LE PROLETARIAT
LUTTE LUI A VISAGE DECOUVERT
Tout autre est le
comportement de la "foule prolétarienne". Si elle est
capable de discipline, elle s'oppose férocement aux actes
délictueux, quoique dans son enfance le mouvement ouvrier n'ait pas
toujours su discerner des actes de violence normaux contre les
institutions d'actes déplorables contre des personnes. On peut
regretter des exécutions sommaires pendant la Commune de Paris et en
Russie en 1917, mais on ne fut pas capable d'égaler à ces époques
la cruauté qui régit les guerres inter-capitalistes actuelles.
Mieux les exactions regrettables furent sanctionnées par la défaite
des révoltes et révolutions de la foule prolétarienne, et
obligèrent à tirer des leçons fondamentales sur les limites de la
violence, alors que la bourgeoisie de nos jours, non seulement
démultiplie des actions de ses bandes armées, mais opère de mille
façons pour continuer à les "masquer", ou à en faire
porter la responsabilité aux mercenaires d'en face. (3
septembre 2014)
Le système
d'embrigadement dans les guerres de la bourgeoisie n'a pas varié
depuis un siècle, il n'est en rien original chez les djihadistes,
faussement humanitaires chez les grandes puissances, et toujours
binaire avec un ennemi diabolique désigné où tous les pharisiens
de la bourgeoisie font mine de se choquer du choix d'un camp
belliciste par tel ou tel individu isolé. C'est justement parce que
la plupart des individus, prolétaires surtout, sont isolés,
atomisés qu'il est compréhensible qu'ils puissent être la proie
d'un camp de la résistance, de la "revanche", de la
"libération de l'oppression".
Les vieux partis
staliniens sont exemplaires pour celer la supercherie. Ainsi l'actuel
dit parti communiste espagnol s'est positionné publiquement pour la
défense armée du Dombass face aux "fascistes ukrainiens".
Javier Parra (le bien nommé) secrétaire général de la fédération
de Valence de ce parti défend la lutte armée des pro-russes de
l'Est ukrainien. Est-il financé comme au temps de l'or de Moscou par
les "réseaux européens" de Poutine? . Le PCE,
ex-européiste, y va fort:
"Là
où le fascisme attaque, le peuple doit se défendre comme il sait le
faire. En Ukraine, les nazis se sentent forts, ils sont arrivés à
la tête du gouvernement, ils ont interdit le Parti communiste et
massacrent avec leurs armes les habitants de l’est. Évidemment,les
habitants de l’est doivent défendre la paix les armes à la main,
c’est la seule voie possible, comme cela s’est passé en Espagne
en 1936. Ce qui se passe en Syrie et au Venezuela sont également des
exemples, chaque pays avec ses propres spécificités., mais le
fascisme s’étend de plus en plus dans plusieurs pays. Plus que
jamais, il est indispensable de créer une grande alliance
antifasciste mondiale".
Les PC tiennent à
confirmer que la bourgeoisie mondiale peut compter sur eux pour le
futur embrigadement généralisé! Surtout le PCE qui a tant à se
faire pardonner sur la fausse révolution espagnole, tout en gommant
littéralement l'histoire; il n'existe aucun livre sérieux en
Espagne, exeptés les brûlots des Amis de Munis et une ou deux
brochures des Cahiers Spartacus, pour approcher un tant soit peu la
vérité de cette terrible guerre civile, mythifiée et mystifiée un
peu partout dans le monde. Le dernier Goncourt attribué à Lydie Salvayre
perpétue la mystification en jouant à aligner le camp "fâchiste" sur
"l'innocence anti-fâchiste" où le père Bernanos sert de passerelle.
Cette terrible guerre où furent harponnés tant d'ouvriers ne supporte cependant pas la comparaison avec les bandes armées terroristes djihadistes,lesquelles pratiquent plutôt les sinistres méthodes de l'ombre des résistances nationalistes. Un jour les véritables historiens reconnaitront l'apport fondamental et le courage de la revue de la Gauche communiste maximaliste, BILAN.
Cette terrible guerre où furent harponnés tant d'ouvriers ne supporte cependant pas la comparaison avec les bandes armées terroristes djihadistes,lesquelles pratiquent plutôt les sinistres méthodes de l'ombre des résistances nationalistes. Un jour les véritables historiens reconnaitront l'apport fondamental et le courage de la revue de la Gauche communiste maximaliste, BILAN.
Tout semble concourir
avec la pachydermique propagande de tous les partis officiels
coalisés dans un mensonge universel pour plaquer le déroulement de
la guerre non civile d'Espagne de 36 à 39. Tout comme en Espagne
meurtrie par Franco, on invoque partout l'engagement "international"
de jeunes volontaires. Des grecs et des français combattent dans les
rangs de la "République populaire d'Ukraine". Sur
facebook, la référence pour une majorité de jeunes de tous les
pays, on apprend avec spots à l'appui que: "L'unité de
partisans anarchistes Batko Makhno est parvenue à intercepter un
groupe du bataillon Donbass (Pro-Kiev) en route pour Novoazovsk"!
Les anarchistes ont toujours à l'avant-garde des troupes bourgeoises
au dernier moment, même pour la figuration, comme ceux, anarchistes
espagnols, qui ont libéré Paris en 1944, assis sur les premiers
chars des bataillons Leclerc.
LA PANTALONNADE DE LA
"GUERRE REVOLUTIONNAIRE" EN ESPAGNE
Comme toujours, après la
tragédie, la farce. Ce revival de "brigades internationales"
révèle des similitudes confondantes avec 1936, mais des similitudes
seulement, car c'est en connaissant bien la supercherie des
engagements impulsifs de cette année-là et l'aboutissement du
sacrifice de tant de naïfs qu'on pourra réellement dénoncer ce que
trament les élites mondiales du capitalisme depuis n bon moment et
les généraux avant tous.
L'Etat islamique n'est
pas le gouvernement républicain de 1936. La démocratie occidentale
n'est pas le nazisme au pouvoir. La démocratie impérialiste
actuelle n'est pas une victime d'un nouveau stalinisme. L'Etat
islamique n'est pas un gouvernement révolutionnaire de la classe
ouvrière. Les engagements sont picrocholins comparés à 1936.
En 1936, les partis
staliniens du monde entier recrutent: "La passivité des pays
démocratiques indigne les antifascistes du monde entier". La
première opération de recrutement du premier noyau de "brigades
internationale" débute le 1er octobre 1936. Ils seront plus de
trente mille à accourir d'Europe et d'Amérique pour "sauver la
révolution espagnole".
Rémi Skoutelsky écrit:
"Les études
récentes menées sur les contingents nationaux des Brigades
convergent sur un point: c'est une majorité écrasante d'ouvriers
qui s'engagent en Espagne, dans une proporion bien plus importante
que dans le mouvement ouvrier politiquement organisé. Pas
particulièrement jeunes (29 ou 30 ans de moyenne d'âge), ils militent
pour la plupart dans les organisations communistes, mais des milliers
d'entre eux ne sont pas dans ce cas. Solidarité ouvrière et
antifascisme, auxquels peuvent être mêlés des aspirations
révolutionnaires, résument les motivations de ces hommes. Enfin,
dernier élément totalement effacé de la mémoire collective: en
raison des problèmes de recrutement (sic), de plus en plus
d'espagnols intégrèrent les brigades internationales. A el point,
qu'à partir de l'automne 1937, et à la suite des pertes énormes
subies par les étrangers, on doit parler d'unités espagnoles à
encadrement international. Là aussi une image faussée a été
véhiculée: la guerre d'Espagne ne fut pas l'épopée romantique de
"L'Espoir" ou de "Pour qui sonne le glas?" C'est,
toutes proportions gardées, dans l'enfer de Verdun que les
volontaires se trouvèrent plongés".
Cet historien
extraordinaire avait-il lu BILAN? En tout cas son mémoire est
extrêmement éclairant (cf. L'Espagne après l'Espagne, la mémoire
des Brigades internationales, sur le site Persée). Il décrypte
magnifiquement l'instrumentalisation de l'histoire, en référant
aussi aux Brigades de Tito en 1949 (soutenues par les trotskiens de
l'époque), et aux appels (vains) à en fomenter de nouvelles en
Bosnie il n'y a pas si longtemps à la veille du génocide de
Sarajevo. Il rappelle aussi que c'est une forte immigration politique
qui s'est chargée d'organiser l'enrôlement et l'acheminement de
dizaines de milliers d'hommes. Plus récemment aussi, il rappelle
l'utilisation cinématographique du mythe espagnol par des artistes
anarchistes et trotskiens comme Ken Loach avec le navet "Land
and Freedom"; j'avais rédigé un article dénonçant ce film à
sa sortie, mais qui avait été refusé par la rédaction de R.I.
"En définitive,
pendant des décennies, les brigades internationales, dans les
ouvrages historiques, étaient fréquemment instrumentalisées. Elles
constituaient, selon la couleur politique des auteurs, un aspect de
la trahison de la République (qui voulait vendre l'Espagne aux
"rouges") et de celle de l'URSS (qui avait détourné les
aspirations sincèrement révolutionnaires des volontaires pour les
mettre au service de la contre-révolution stalinienne). Chez les
communistes, elles servaient à accuser les démocraties
occidentales, et selon les périodes, les sociaux-démocrates, au
sujet de la politique de non-intervention".
"La mémoire de
l'Espagne est restée vivace chez beaucoup d'anciens brigadistes.
Parce qu'ils étaient jeunes, parce que c'était leur premier combat,
parce qu'aussi – et cela n'est pas négligeable – ils se
déroulaient au grand jour. Autant de différences avec les combats
de la résistance, où l'on se retrouvait souvent isolé, caché".
Les historiens Broué et
Témine explique un mode de recrutement qui demeure individuel
(typiquement d'actualité!) et nuances les propos de Rémi Skoutelsky
qui n'y voit que des ouvriers indifférenciés: "les engagements
sont reçus dans les permanences installées aux sièges des
organisations syndicales ou des partis de gauche -, c'est le parti
communiste qui contrôle l'ensemble de l'opération. (...) Au
lendemain d'une crise économique qui a bouleversé l'Europe et dont
les séquelles subsistent en dépit d'une repris économique que
stimulent les fabrications de guerre, il existe encore en France un
lumpen-prolétariat qui s'engagera en Espagne pour des motifs pas
toujours désintéressés". Malraux témoigne des conflits entre
"volontaires" majoritaires dans cette armée mexicaine face
aux "mercenaires".
Les émigrés allemands,
italiens sont en grande partie des "cadres" des partis
staliniens, voire officiers de carrière. Le centre de recrutement
d'Albacete est sous le contrôle des chefs staliniens français en
lien avec les militaires espagnols. Le massacre des volontaires
internationaux sera énorme.
Même avec des
explications différentes, la plupart des historiens contemporains,
bien après les courageuses prises de position de la Gauche
communiste (Bilan et la fraction italienne et française) ont
reconnu que la guerre d'Espagne fût une répétition de la toute
prochaine guerre mondiale. La délimitation en deux camps
belligérants dans tous les pays, divisant donc même le prolétariat
exclu de l'équation, se manifeste par l'existence d'autres brigades
internationales, ainsi que l'a bien souligné Sylvain Roussillon. Les
légions étrangères venues secourir Franco comptèrent presque
autant de membres que les Brigades mythifiées: russes blancs,
troupes allemandes, italiennes, marocaines, irlandais (avec le
célèbre Eoin 0'Duffy, héros de la lutte nationaliste
irlandaise),anglo-saxons, roumains,portugais, juifs immigrés et
français, la "Bandera Jeanne d'Arc" avec le fils de
Bernanos, ainsi qu'en témoigne Sygmunt Stein. S.Roussillon explique
dans une interview que les nombreux combattants arabes n'étaient pas
spécialement des mercenaires mais obéissaient à un engagement
politiquement très conscient; ils avaient quitté à leurs risques et
périls les zones sous contrôle français (Maroc, Algérie,
Tunisie); la Bandera phalangiste comptait près de 4000 hommes.
200
nationaux-syndicalistes portugais s'étaient également enrôles dans
les milices phalangistes.
Roussillon ajoute: "Pour
les russes, comme pour les italiens et les allemands, l'Espagne a été
un cjamp d'expérience. L'épreuve, ici, a été surtout matérielle.
Ils ont pu obtenir de précieux renseignements sur la valeur de leurs
armes par rapport à celles des puissances fascistes, des Ratos
russes par rapport aux Messerschmitt par exemple. Ils ont tiré de
sérieuses leçons de l'expérience de la guerre: utilisation massive
de l'artillerie, nécessité de manoeuvres en profondeur adaptées
aux nouvelles techniques du combat, utilisation des partisans contre
une armée organisée. Bon nombre de cadres militaires russes ont
fait en Espagne un stage plein d'enseignements".
Les historiens Pierre
Broué et Témine dans leur excellent ouvrage ajoutent: "L'Espagne
n'est pas seulement le terrain d'expérimentation des armes neuves,
elle fournit aussi le moyen de liquider à bon prix le vieux matériel
qui encombre les parcs militaires. Il ne faut pas oublier que ce
trafic a un aspect commercial. Pas plus que l'Allemagne à Franco,
l'URSS ne donne ses armes à la République; dès les premières
négociations, il a été prévu que l'or de la Banque d'Espagne
financerait les fournitures".
Déniaisement de l'aide
"communiste" aussi, ajoutent ces auteurs: "On doit
également tenir compte de l'action de la propagande franquiste qui a
systématiquement "gonflé" l'aide soviétique. Même si on
néglige certaines énormités, il n'est pas rare d'entendre parler,
du côté nationaliste, de milliers d'hommes envoyés en Espagne. Ce
qui est au contraire remarquable, c'est la faiblesse des troupes
russes en Espagne. Dès 1939, Brasillach et Bardèche estiment qu'ils
n'ont jamais été plus de cinq cents. D'autres, comme Krivitsky ou
Catell, admettent des chiffres un peu supérieurs; les russes en tout
cas, n'ont jamais été plus de mille, essentiellement des
spécialistes,tankistes et aviateurs, conservant, comme les allemands
du côté nationaliste, leur commandement et leurs installations
propres, tenus à l'écart de la population".
La tragique guerre
d'Espagne témoigne aujourd'hui encore finalement de la supercherie
de toute ces "guerres révolutionnaires" qu'on nous ressert
tous les 30 ou 50 ans. Il n'y a pas plus de guerre révolutionnaire
en Ukraine que de djihad révolutionnaire en Syrie, mais un massacre
sans fin pour ceux et celles qui auront été harponnés pour une
libération frelatée qui n'a rien à voir avec l'insurrection
prolétarienne et l'armement du prolétariat. Il nous intéresse plus
de savoir les nombreux réfractaires à tout embrigadement des deux
côtés en Ukraine, comme de saluer les nombreuses désertions
partout où sévit la guerre en Afrique et au Moyen Orient, mais pour
réaffirmer que la solution, l'interdiction des guerres, suppose une
révolution internationale qui ne peut commencer sur les lieux des
massacres ni dans les immenses camps de réfugiés, ni dans les
barques fragiles des boat-people.
La responsabilité du
prolétariat des grandes puissances est clairement posée, avant
qu'on ne le soumette lui aussi à un embrigadement pervers.
(1) Sur un blog du Le Monde, le docteur Pierre Barthélémy nous apprend que la mort par égorgement ne prend que 7 secondes, ouf! (article: que ressent une personne exécutée?):
(1) Sur un blog du Le Monde, le docteur Pierre Barthélémy nous apprend que la mort par égorgement ne prend que 7 secondes, ouf! (article: que ressent une personne exécutée?):
"On ne sera pas surpris de
constater que les procédés les plus archaïques sont aussi ceux qui font
le plus souffrir les personnes exécutées. Ainsi, la lapidation
entraîne-t-elle la mort la plus lente, d'autant qu'elle manifeste
clairement une intention de torture. Harold Hillman cite dans son étude
un article des lois pénales islamiques en vigueur en Iran en 1980,
consacré à la taille des projectiles utilisés : "Les pierres ne
doivent pas être trop grosses, pour empêcher que la personne meure après
avoir été atteinte par une ou deux d'entre elles." L'idée est donc
que le supplice dure. La mort est obtenue par une hémorragie massive
extra et intra-crânienne puisque, dans une lapidation en règle, le ou la
condamné(e) est enterré(e) jusqu'au cou et que seule sa tête dépasse du
sol.
Je ne vais pas entrer dans les détails de chaque modus operandi mais
ce travail d'Harold Hillman a le mérite de mettre sur la table ce
qu'est, essentiellement, une peine capitale : un moyen de stopper le
fonctionnement du cerveau en coupant son approvisionnement en oxygène.
Passer devant un peloton d'exécution (qui vise en général à la poitrine)
détruira votre cœur ou les gros vaisseaux qui lui sont connectés ; la
version chinoise (une balle dans la nuque) a pour but de détruire le
bulbe rachidien où sont régulés la respiration et le rythme cardiaque ;
la pendaison se terminera par une asphyxie, que l'on vous rompe les
vertèbres cervicales ou pas ; la chaise électrique, mise au point à la
fin du XIXe siècle pour trouver un mode d'exécution plus
"humain" que la pendaison, n'a pas forcément fait beaucoup "mieux", car
elle tue plus en portant le cerveau à très haute température et en y
détruisant le centre de la respiration qu'en arrêtant le cœur.(...) Si le chercheur britannique Harold Hillman fait une exception pour
l'injection létale, qui est désormais le mode d'exécution principal aux
Etats-Unis, c'est parce qu'elle est censée anesthésier le condamné avant
de le tuer. Toutefois, la mise en pratique de ce protocole laisse
parfois à désirer, ce qui peut transformer l'exécution en séance de
torture, comme l'a montré en avril le cas de Clayton Lockett dans
l'Oklahoma : la sédation ayant été ratée, l'homme a agonisé pendant 43 minutes
avant que son cœur ne s'arrête. En juillet, l'exécution, dans
l'Arizona, de Joseph Wood a elle aussi tourné à l'horreur, le condamné
ne succombant à l'injection qu'au bout de deux heures, après avoir
grogné et haleté durant 90 minutes". Le docteur Patrick Pelloux nous
révèle que Jésus en croix, pendu à bout de bras a mis une heure pour
clamser (On ne meurt qu'une fois et c'est pour toujours).
RépondreSupprimerMerci pour l'article passionnant sur Munis, et les autres contributions très précieuses (le procès de Bordiga, les textes de Lucien Laugier...). Concernant ce passage :
"« Le Front populaire, pouvoir politique de la bourgeoisie, put se maintenir, vaincre les travailleurs et faciliter la voie à Franco, parce que les organisations ouvrières d'extrême gauche, l'anarchisme et le POUM ne surent pas (?) guider les masses vers la conquête du pouvoir politique. La trahison va d'une extrémité à l'autre de la gamme politique. Aucune de ces organisations ne sera capable demain de garantir la victoire de la révolution. La guerre civile espagnole a été leur tombe ».
J'ai mis un point d'interrogation sur le « ne surent pas » - car j'ai des doutes sur la traduction des anars de L'esclave salarié qui ont traduit ce texte – sans oublier l'incompétence politique de Coleman. J'aimerais savoir quel fût le verbe utilisé en espagnol, car le raisonnement ici de Munis est sortir des oeillères trotskystes, et signifie plutôt que les « organisations traîtres » n'étaient plus à même d'indiquer ou diriger quoi que ce soit au nom du prolétariat révolutionnaire."
Le verbe est bien "supieron", à en croire ce pdf trouvé sur le web ; donc la traduction est exacte si cette source est correcte :
https://bataillesocialiste.files.wordpress.com/2014/06/guillamon-docsegunda.pdf
bataillesocialiste.files.wordpress.com
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