"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

vendredi 4 mars 2022

CRISE DE LA GUERRE (suite 6)

 


POURQUOI TOUTES LES CONDITIONS SONT REUNIES POUR LA DER DES DER (la troisième) ?

« Une voiture ukrainienne croise des tanks russes à l’arrêt. Le conducteur stoppe sa guimbarde et, par la fenêtre, demande aux soldats ce qu’il se passe. «Plus d’essence», répondent, un rien honteux, les ankistes. «Vous voulez que je vous ramène en Russie?» leur lance l’Ukrainien. Une seconde de silence, puis un éclat de rire général » (blague ukrainienne).

LE PROLETARIAT RUSSE EST LACHE ET SOUMIS

J'ai déjà fourni deux explications : terreur intérieure et pérennité du nationalisme stalinien. Mais cette lâcheté est relative et pas destinée à durer1. On peut en ajouter un troisième, l'engagement des braves soldats du pays pour défendre les populations russophones de l'Est de l'Ukraine :

« Sur place, les petits noyaux de contestation s'agrandissent de jour en jour, en témoignent les arrestations. Dans les faits, les Russes ne s'attendaient pas à une attaque massive contre son voisin ukrainien, mais à des opérations ciblées sur l'Est du pays pour venir en aide aux populations russophones.

"L’espace informationnel russe est de plus en plus en vase clos. Ce ne sont pas les mêmes informations qu’en Europe, c’est beaucoup plus opaque et le conflit se concentre sur l’Est de l’Ukraine, ils n’ont pas les mêmes images", confirme Lukas Aubin ».
Le peuple russe est encore plus lâche que le peuple allemand en 39-45, au moins pouvait-on considérer que celui-ci avait vu son prolétariat décapité après 1919 et était excusable de subir la terreur hitlérienne. Il y a une autre raison à cette impuissance que j'évoquerai par après, et qui renvoie à la crise de la guerre et comment la bourgeoisie a innové pour l'encadrer. Son armée ne fait pas dans la dentelle, on tue des civils systématiquement et on tire aussi sur les centrales nucléaires, après avoir reproché au camp occidental de vouloir une guerre nucléaire! Or jouer à renouveler un nouveau Tchernobyl équivaudrait à un suicide de la soldatesque russe, elle-même. Que ces tarés en kaki en crèvent tant mieux, mais sans nous !
La soldatesque en réalité ne dispose pas spécialement d'un matériel modernisé, comme l'affirment nos pitres généraux sur les plateaux télé, mais encore des vieilleries nommées « orgues de Staline » qui tirent dans tous les sens, manquent la cible envisagée (usines, hôpitaux!) et tuent les cibles collatérales, c'est à dire les civils ; c'est pourquoi, les ukrainiens connaissant bien cet armement minable, fuient en masse ; et ce dépeuplement massif retourne le monde entier contre les saloperies ininterrompues du criminel de guerre du Kremlin.
Une interprétation militaire (pro-occidentale) veut que la Syrie servi de terrain d’entraînement à l’armée russe, et que l'Occident a fait preuve de faiblesse2. Des armes nouvelles y auraient été testées. "Plus de 300", se vantait même en juillet dernier le ministre russe de la défense : drones, missiles anti-char, missiles sol-air, avions de combats, équipements de vision nocturne, etc. 60 000 militaires russes y sont passés ces dernières années, pour acquérir de l’expérience de terrain. Et puis c’est en Syrie encore que la Russie a développé le recours à des forces armées clandestines – les mercenaires de Wagner, qui débutent en Syrie, se développent en Afrique, reviennent aujourd’hui en Ukraine. "De Damas à Kiev, c’est la méthode Poutine", résume un journal libanais. Pourquoi la Russie a-t-elle dû décamper en Afghanistan, pas seulement à cause d'un arsenal vieillot ?
Cela va nous permettre de démolir l'interprétation militaire. Le camp occidental n'a en effet rien fait pour punir la Russie qui utilisa armes chimiques, des millions de mines antipersonnel, et pratiqua sans vergogne la tabula rasa. Les généraux russes arguèrent déjà moderniser leurs matériels (dont l'emploi des hélicoptères Mil Mi-24 Hind à partir du milieu de la guerre qui fera (provisoirement) pencher la balance côté soviétique jusqu'à l'arrivée des FIM-92 Stinger, aussi efficaces aujourd'hui en Ukraine) adoptant également une certaine autonomie au sein des unités, ce qui permettait toutes les exactions. Mais l'armada russe allait vers une défaite inéluctable, d'abord sur le terrain après avoir mis en place une présumée « armée gouvernementale afghane » de 302 000 hommes, mais chaque année après 1986, 32 000 soldats désertaient, et surtout vu le coût économique de la guerre. Enfin c'est la colère montant en Russie, avec le retour des milliers de cercueil, qui oblige Gorbatchev (pas débile comme Poutine) à retirer la soldatesque. Cette défaite russe ouvre la boite de pandore de l'islamisme...
DES EXPLICATIONS COMPLEMENTAIRES ET VICIEUSES...
Venant probablement d'un des réseaux de la gauche bourgeoise pacifiste, la Syrie sert aussi à une autre interprétation (dans la catégorie antiraciste) : les européens accueillent volontiers les « migrants » ukrainiens (vaccinés et blancs) alors que les syriens étaient refoulés. D'abord ce n'est pas vrai, ils ont été accueilli en nombre, en particulier par l'Allemagne, ensuite ce n'est pas la même civilisation, ce genre de réfugiés est le vecteur d'un islam politique impérialiste ; si l'islam n'était qu'une simple religion... Ensuite les ukrainiens sont des voisins. Pourquoi les syriens voisins de l'Egypte et de l'Algérie n'ont-ils pas été se réfugier chez leurs voisins ?

Le pitre Jean-Pierre Le Goff fait partie de ces sociologues confus qui considèrent que la guerre en Ukraine « constitue un coup de massue qui marque la fin d’une époque et, j’espère, de ses illusions »3. D'abord, les guerres n'avaient pas cessé avant, la seule différence est qu'elles se sont rapprochées. Nullement une nouvelle époque (à moins qu'il ne nous appelle lui aussi à la défense patriotique dans un cadre « mondialiste » et pas internationaliste. Mais il fait partie aussi de cette ribambelle de penseurs à la noix qui considèrent que le djihadisme passe à la poubelle. Faux c'est la même chose islamisme et néo-stalinisme. Poutine a été programmé pour penser en nationaliste totalitaire et ne saurait être un rempart contre l’islamisme et le multiculturalisme puisque s’ils n’emploient pas les mêmes moyens. Leurs objectifs sont voisins les islamistes ayant été élevés dans la haine de l’Occident et rêvent de détruire laïcité et mode de vie sans contraintes au quotidien. Le fractionnement des Nations pour obtenir par la menace et la violence leur soumission à leurs croyances et à leur pouvoir en font des copies conformes .

Le soutien militaire russe avait permis au dirigeant syrien fantoche de se maintenir au pouvoir au terme d’une guerre sans pitié contre la rébellion. La Russie était intervenue en Syrie, pays sans prolétariat organisé et limité par la pensée islamique, pour tenir à bout de bras un régime dit allié, alors qu’en Ukraine elle intervient pour restaurer son empire disparu dans une guerre forcément transparente dans une Europe où on n'est pas habitué aux exactions guerrières su proches.

Un prolétariat désarmé par la nouvelle tactique bourgeoise

A un peu plus de deux heures de route commence l’Ukraine en guerre, où 120 000 militaires russes affrontent 90 000 ukrainiens, selon les chiffres de l’Etat-Major français. C'est très près de nous qui croyions il y a peu que nous ne risquions rien, vu les conflits impérialistes éloignés. L'horreur, les destructions, les meurtres de civils et en particulier d'enfants sont le fait du criminel de guerre Poutine.

Contrairement à l'inaction du camp occidental en Syrie, la bourgeoisie européenne, même avec l'inaction de la bourgeoisie américaine, a réagi fermement, étonnant même le criminel de guerre Poutine. En décidant de sanctions économiques à l'échelle mondiale - du jamais vu, même si des relations commerciales vitales sont maintenues comme dans toutes les guerres hypocrites4 (gaz et pétrole pour l'Allemagne) – la bourgeoisie européenne désarme le prolétariat. Pourquoi me direz-vous avec vos yeux étonnés de marxistes ringards ? Parce qu'elle ôte ainsi la principale arme du prolétariat en temps de guerre : la sanction économique par la grève totale, généralisée ou générale si vous voulez. C'est comme cela que le prolétariat italien en 1943 a préparé la chute de Mussolini ! Ce sont les grèves en Russie en 1918 qui donnent corps au slogan si peu révolutionnaire pourtant « la paix et le pain ».

Ce désarmement idéologique explique que, paradoxalement d'une part, il serve à accroître le nationalisme des ouvriers russes – qui vont être privés de denrées alimentaires plus hausse des prix – et que d'autre part les ouvriers des pays industrialisés restent tétanisés par ce mensonge pacifiste, alors que notre hypocrite bourgeoisie prétend ainsi ne pas être belliciste. Si qu'elle est belliciste avec ces mesures, si qu'elle est belliciste en refilant des armes au nationalisme ukrainien. Si que les prolétaires ukrainiens ne pouvaient rien faire, comme nous en 40, face à une guerre éclair !

LE PACIFISME EST SURTOUT UNE ARME BOURGEOISE CONTRE LE PROLETARIAT

Le pacifisme prétend à une union des classes protestant contre la guerre sur un plan humanitaire qui est violé partout. Il réussit en générale à dissoudre les prolétariats dans ses pleurnicheries démocratiques bourgeoises et accompagne en définitive, les mains liées du prolétariat, jusqu'au dénouement militaire et fratricide. Extrême gauche et extrême droite pétainiste-poutinienne s'affichent résolus défenseurs de la carte pacifiste, de Mélenchon au NPA qui soutient « les forces sociales et politiques qui, en Ukraine, se battent à la fois contre le mépris poutinien du droit à l’autodétermination, contre la privatisation de leur pays par des oligarques et contre leur régime antidémocratique », aux côtés donc des nationalistes ukrainiens. Ces trotskiens sont aussi lamentables que leurs pères en 1940.

Lutte Ouvrière est moins lamentable que les trotskistes wokistes, avec un discours en apparence de l'ordre de l'internationalisme classqiue :

« Biden, Macron et leurs semblables voudraient nous embrigader. Il faut refuser l’union sacrée derrière eux. Cette guerre n’est pas la nôtre ! (…) Comme le proclamait Jaurès avant la Première Guerre mondiale : « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». C’est toujours vrai et c’est pour cela qu’il faut le renverser ! ».

Mot d'ordre généraliste mais creux, sans prolétariat reconnu et agissant. Le CCI, du milieu maximaliste ne peut pas dire autre chose et c'est bien dommage. Mais l'absence de véritables groupes révolutionnaires sérieux, constatables avant chaque guerre mondiale, renvoie à l'inexistence actuelle du prolétariat. Et, à la place de la bourgeoisie, je ne me gênerai pas pour lancer la crise finale, vu l'inconscience du prolétariat russe et la niaiserie du prolétariat européen.



NOTES

1Dans ce genre de situation, inaction du prolétariat face aux massacres, on comprend que Rosa Luxemburg ait eu envie de se suicider, et qu'elle constata par après que le seul être humain n'était plus que l'agent de police au coin de la rue.

2« Comme si la Syrie avait servi de laboratoire à Vladimir Poutine pour tester sa politique d’expansion, pour tester ses moyens militaires, pour tester aussi sa marge de manœuvre face aux Occidentaux. "On retrouve la même rhétorique russe, les mêmes mensonges, la même propagande éhontée, estime Karim Bittar, comique chercheur en science politique. Vladimir Poutine ne fait que répliquer en Ukraine les stratégies, les techniques de guerre qu'il a utilisées en Syrie pendant des années. Les armes russes ont été testées en Syrie, ainsi que les limites de la patience occidentale." "Le fait que les Etats-Unis n'aient pas été en mesure de le faire reculer en Syrie a conduit Vladimir Poutine à penser qu'il pouvait envahir l'Ukraine sans susciter la levée de boucliers à laquelle il est confronté aujourd'hui ».

3Le Goff fait aussi écho aux explications psychologiques des journalistes et du CCI, l'irrationnalisme : « Le discours poutinien diffère des délires politico-religieux des islamistes et nous confronte à une autre forme de déraison. Il est marqué par le «mensonge déconcertant» issu du communisme totalitaire. L’énormité des propos et le renversement éhonté entre l’agresseur et l’agressé déstabilisent la raison et le sens du réel. C’est véritablement «le monde à l’envers» dans une idéologie et une propagande où ce qui est blanc est noir, où la guerre, c’est la paix, où l’agression est synonyme de libération des peuples. Pour des nouvelles générations qui n’ont pas connu le communisme et la guerre froide, cette logique est difficilement pensable ». Non le discours de Pouline n'est pas différent de celui des islamistes, ce sont les mêmes idéologies arriérées du capital en décomposition.

4La bourgeoisie américaine en 1940 continua à commercer avec l'Etat nazi en matière d'armement...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire