Lorsque je lis l'encart suivant, je me laisse abuser en croyant
qu'une AG inter-catégories va se dérouler immédiatement dans la
foulée de la manif promise « intercatégorielle ». J'ai
lu trop vite, l'AG n'est programmée qu'à 18H30, Bourse du travail,
place de la République, non loin des zoos de Nuit debout, et une
fois les manifestants dispersés. Les syndicats radicaux n'ont rien à
inventer par rapport à leurs grands frères des syndicats officiels
de l'Etat capitaliste, ils n'ont qu'à imiter.
Trajet / parcours : rendez-vous à 13h30 à la gare MontparnasseGare Montparnasse > Rue du Départ > Rue de Rennes >Bd Raspail > Bd St-Germain > Ministère des Transports
Rassemblement devant la Gare Montparnasse à partir de 13h30
Arrivée vers 15h30, rassemblement devant le Ministère des Transports, dispersion vers 17h
Manifestation déposée par la fédération SUD-Rail.
Appelée aussi par l'AG inter-luttes et les "enseignants debout".
Soyons ingouvernables !
Manifestation jeudi 02 juin à 14h00 Gare Montparnasse
Rassemblement devant la Gare Montparnasse à partir de 13h30
Arrivée vers 15h30, rassemblement devant le Ministère des Transports, dispersion vers 17h
18h30 AG de lutte à la Bourse du travail de République, salle Croizat
Manifestation des cheminots
http://paris.demosphere.eu/rv/48217Trajet / parcours : rendez-vous à 13h30 à la gare MontparnasseGare Montparnasse > Rue du Départ > Rue de Rennes >Bd Raspail > Bd St-Germain > Ministère des Transports
Rassemblement devant la Gare Montparnasse à partir de 13h30
Arrivée vers 15h30, rassemblement devant le Ministère des Transports, dispersion vers 17h
Manifestation déposée par la fédération SUD-Rail.
Appelée aussi par l'AG inter-luttes et les "enseignants debout".
Soyons ingouvernables !
Manifestation jeudi 02 juin à 14h00 Gare Montparnasse
Rassemblement devant la Gare Montparnasse à partir de 13h30
Arrivée vers 15h30, rassemblement devant le Ministère des Transports, dispersion vers 17h
18h30 AG de lutte à la Bourse du travail de République, salle Croizat
A 13H30 il y a énormément
de gens sur les quais de la gare Montparnasse, je me dis qu'on ne
peut pas les confondre avec les manifestants. Ces derniers sont déjà
sur le parvis face à la tour : drapeau CGT, SUD-Rail, NPA. Pas
la foule mais déjà un zigoto qui s'amuse à cramer le goudron avec
un fumigène. Je m'aperçois que je ne suis jamais seul lorsque je
viens à une manif à Paris, et que je connais plein de gens même si
tous ne me reconnaissent pas. Je vais tailler la bavette avec de
vieux chefs de LO retraités, qui persistent à ne voir dans le terme
du conflit qu'un deal entre la CGT et le gouvernement, façon :
tenez-compte de notre syndicat ou on fait un malheur ; ce que je
considère comme une fable à journalistes. On croise des vendeurs
d'un petit canard « bolchévik », des vieux chenus avec
« Lutte Ouvrière », plus loin flottent au vent de la
tour des drapeaux noir et rouge.
Mais voici mon quart
d'heure de gloire, un journaliste de la BBC et son caméraman
demandent à m'interviewer.
- en anglais ?je vous préviens je ne possède qu'un anglais de caserne...
- no no en français.
- Vous êtes solidaire de ce mouvement ?
- Tout à fait, c'est la principale attaque contre la classe ouvrière depuis la guerre mondiale, par un parti qui se disait socialiste, qui nous avait accordé les 35 heures pour partager le travail, et qui maintenant veut qu'on partage les salaires... là on veut plus !
- que pensez-vous que vont pouvoir faire ces milliers de visiteurs étrangers pour l'Euro de football si les grèves continuent ?
- C'est pas grave ils viendront jouer au football dans les manifs avec nous.
- Vous êtes célèbre en France ?
- Oui
- quel est votre nom ?
- Jean-louis Rock
- Jean-louis comment ?
- Rock : r.o.c.k.
- Merci de votre témoignage.
Apercevant une autre
vedette, je vais la saluer. Philippe Poutou arbore le sourire
rayonnant du type que vous avez certainement vu à la télé au moins
une fois, ce qui titille toujours votre histrionisme personnel. Je
lui rappelle mon erreur de lui avoir conseillé de rester calme le
jour de son passage à l'émission de Ruquier face à la bourgeoise
Pulvar, qui s'était moqué de son absence de diplôme :
- voilà c'est de ta faute, dit-il avec son sourire éclatant.
- Mais merde il faut savoir s'énerver parfois, tu n'aurais pas dû m'écouter ! Allez bonne manif.La manif démarre, comme vous le voyez sur mon film sur face-book, précédée par la camionnette de Sud-rail avec son animateur gogol qui fait crier ses slogans simplets par la foule (1500 ou 2000 à mon avis). La manif vit si on sait se déplacer à l'intérieur. Elle tangue. Elle danse. On y croise d'ex-militants. On apprend que certains ont été emportés par le cancer, même des qui croyaient plus à l'orga ni au communisme. C'est moche quand même de claquer à la cinquantaine. La foule est mélangée, des vieux machins chaloupent au milieu de jeunes lycéennes au cul rebondi. On se croirait presque en boite de nuit quand le gogol de service animation sud-rail cesse de hurler ses slogans anti-capitalistes très corporatifs pour alterner avec de vieux tubes pop ou un rap sauvage. On gigote des hanches et des bras. On salue les ouvriers immigrés dans les étages des immeubles en construction. Ils saluent aussi et leurs portables flashent le passage des syndicalistes radicaux. Je peste au carrefour qui indique le Sénat à trois cent mètres, je crie « tous au Sénat », mais l'encadrement syndicaradico-cheminot continue à entraîner le troupeau chantant et dansant vers la Seine comme le joueur de flûte du conte allemand. Vers une dispersion ridicule.
Boulevard Montparnasse je
viens tenir une large banderolle flageolante, en partie abandonnée
par une des porteuses, je l'agrippe et marche aux côtés des autres
porteurs, ce qui permet une sympathique discussion. Je leur dis :
vous savez, nous on a beau être retraités on est avec vous. Le
jeune à catogan me répond : c'est normal on est ouvert à tous
à nuit debout. Je lâche la banderolle et je vais me placer devant
pour voir ce qui est inscrit dessus : « DEBOUT CONTRE LE
49.3 : Etudiants, chômeurs, sans papiers, précaires,
retraités ». J'ai été flashé plein de fois par des
photographes, pas grave mais je sais maintenant pourquoi moustache,
un ex du CCI me faisait les gros yeux. Je vais me mêler d'une
algarade entre manifestants qui empêchent des cagoulés de péter la
vitrine d'une banque, je suis du côté des manifestants anti-casse.
La balade corporative
sera pourtant très courte, quoique animée de sautillements et de
courtes cavalcades. Elle est déjà dissoute au niveau de
Sèvres-Babylone et de l'hôtel Lutecia ».
Pas de meeting, ni
d'orientation intelligente. Le zozo de Sud Rail demande aux
manifestants s'ils veulent se payer Hollande, la foule répond :
ouiiiii ! Et ajoute : savez-vous qu'il est à la Porte de
Versailles ? Nonononon... Et bien nous allons aller le retrouver
là-bas, vous pouvez descendre à la bouche de métro juste en face
de vous... on se retrouve là-bas.
Désarroi d'un groupe de
lycéns : qu'est-ce qu'on fait ? Je m'approche d'eux. Ils
vont m'entourer, ce sera une ...mini AG. Je vais leur tenir des
propos que j'aurais jugés réacs à leur âge.
- c'est la nasse, la dispersion à la manière classique des grands syndicats. Vous savez, depuis 50 ans toutes les manifestations syndicales sont organisées pour qu'il n'y ait surtout pas d'AG à la fin pour réfléchir ensemble, pour laisser aux appareils « quelle suite donner au mouvement »... Pas la peine d'aller à la Porte de Versailles, Hollande n'y sera plus et les cars de police vous attendront un à un.
- oui mais les flics là-bas.... qui bloquent le boulevard Raspail...
Un des gamins salive à
l'idée d'aller se faire un CRS. Et les autres sourient, d'un air
entendu. Ils n'ont guère plus de quinze ans et sont plutôt minus
physiquement.
- laissez tomber ! Combattre le capitalisme c'est pas taper sur un CRS. En plus vous faites pas le poids, et sachez qu'un seul coup de pied contre un flic coûte très cher. Y a un jeune ouvrier qui s'est pris huit mois ferme à Lille. Dans ce cas, vous êtes seuls face à la justice de classe, plus un ami ni un syndicat pour vous défendre... les vrais flics sont les syndicats et le discoureur que vous venez d'entendre...
- mais monsieur vous pouvez pas aller prendre la parole au micro pour dire ça ?
- Sans problème, j'ai déjà parlé devant des milliers de personnes mais ils ne vont pas me passer le micro. Sachez que, lorsque vous serez dans la vie active il faut imposer des AG et des décisions collégiales contre les appareils qui décident à notre place...
- ouais ça c'est vrai monsieur c'est « ferme ta gueule je décide à ta place » !
- mais m'sieur l'émeute fait aussi partie de la révolution ?
- Oui mais ce n'est pas son niveau le plus intéressant.
- oui, objecte un autre, faudrait que les syndicats soient unis...
- non observe bien, après guerre on a créé FO pour diviser l'avis des ouvriers ou les empêcher d'échapper dans la nature au syndicalisme pourri du syndicat unique stalinien CGT... et tu vois bien qu'ils prennent des avis différents lors de chaque conflit, non il faudra créer nos propres organisations... la révolution c'est dans la tête pas jeter des cailloux sur les CRS, si votre pote veut se dérouler, faites un match de foot dans la cour du lycée...
Ils s'éloignent
finalement vers le métro. L'un d'eux lance : j'espère qu'on se
reverra m'sieur !
Voilà pourquoi je peux
mourir heureux. Comme m'avait dit Christian le moustachu, ex du CCI,
au début de la manif: ton blog ne se renouvellera pas lorsque tu
seras mort et on ne le saura même pas, que tu es mort, on n'est que
de passage.
Pas vraiment honteux
d'avoir porté le slogan de la banderole « nuit debout »,
je n'irai pas apporter l'eau de mon moulin à leurs débats de
cuistres, et puis République c'est trop loin pour mes pieds
meurtris.
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