par Lou Soliterre
Ils ont osé. Le premier
documentaire de propagande nous prend par la main pour nous promener
dans les allées du pouvoir. Presque minute par minute on reste pendu
aux basques des grands organisateurs de la lutte anti-terroriste,
moins avant qu'après, les mousquetaires Valls, Cazeneuve et Le
Drihan, la figurante Taubira n'étant là que pour le décor. Tel
d'Artagnan, le président Hollande décrit ponctuellement son état
d'esprit aux différentes étapes ; ou bien ce sont ses
mousquetaires qui en rendent compte. Le scénario est si bien léché
que pratiquement n'apparaît jamais l'effet de surprise indubitable
des crimes islamo-terroristes sur le personnel gouvernemental et la
tétanisation des services policiers de l'Etat, que tout le monde a
ressenti en France.
Les deux massacres, celui
de janvier et celui de novembre, qui se sont déroulés dans un
affolement évident des services de l'Etat, sont collés bout à bout
de façon obscène d'autant que les questions posées par le premier
massacre n'ont reçu aucune réponse crédible avec l'explosion des
suivants, tout comme la reproduction du massacre massif encore plus
odieux du Bataclan (qui eût été pire au stade de France) n'a
aucunement été freinée ou conjurée par les centaines de milliers
de « je suis Charlie » et leur compassion envers la
sauvegarde des « valeurs de la république » dans
l'attente d'une série d'homélies funèbres pour « combattre
le terrorisme ».
Aucune explication ni
politique, ni géopolitique, ni internationale n'est fournie pour
expliquer les divers attentats, leurs origines diverses ou cachées,
réelles ou fausses ; un saupoudrage de généralités parsème
un récit plus attaché au style fait divers et aux prévenances
auprès du PN Sarkozy . Quoi de commun entre l'attentat de janvier
contre un journal satirique qui se moque du symbole number one des
armées de l'islamisme mondialiste, le prophète d'un autre temps, et
ceux de novembre qui pouvaient trouver leur justification face à
l'intervention impérialiste française1 ?
Pourquoi toujours cette volonté de présenter un terrorisme unique,
immanent, voire maintenant action toujours téléguidée par les
seuls cinglés de Daech quand l'Etat français soutient des
résidus d'Al Qaida en Syrie?
Daech sert trop bien de
couverture généraliste au bourbier moyen-oriental, direz-vous, et
évite de mettre en cause de bons clients de l'industrie militaire
française comme la dictature saoudienne, comme de tacler les
responsabilités impérialistes de la bourgeoisie française, en tout
cas de son principal délégué politique, le gouvernement Hollande.
Du cinéma propagandiste
sans talent et incrédible, voilà ce qui nous fût servi. Voici
d'Artagnan et ses mousquetaires mis en scène comme un quarteron de
généraux pondérés qui depuis leur QG enterré gèrent la crise
avec lucidité et détermination. On ne nous rappelle pas qu'en
janvier, le premier souci de la propaganda n'était pas les victimes
mais les croyants musulmans, car l'immigré ou le migré depuis
longtemps est un meilleur supplétif électoral que les racistes de
souche. Le scénario du docu tombe dans l'affabulation en faisant
dire post-festum au ministre de l'intérieur que les mousquetaires
gouvernementaux s'inquiétaient de possibles représailles contre les
musulmans ! On n'est pas au Pakistan ni en Iran ! Cazeneuve
en rajoute : « on savait que l'extrême droite était en
embuscade ! ». Le commentaire off répète à plusieurs
reprises que le gouvernement « se devait d'agir vite »...
pour ne pas risquer de sauter ! Or, pour nous qui avons vécu
devant nos postes de télé les massacres successifs, jamais la
république bourgeoise, ni le gouvernement n'ont été en danger ;
jamais non plus aurait-on pu voir Marine Le Pen défiler avec une
petite moustache sur les Champs Elysées suivie par une troupe de
morts-vivants du 6 février 1934 et d'une bande de l'OAS ressuscitée.
HOLLANDE
L'HOMME QUI AVAIT PEUR DE DECIDER... et un Etat réduit au rôle de
médecin urgentiste
Dans le téléfilm de FR3
voici un Hollande olympien, il pose au Clemenceau – photos
certifiées à l'appui - sans moustache, ou plutôt avec cet air
grave d'Obama au milieu de ses sous-fifres attendant l'élimination
de Ben Laden2.
Notre « chef de guerre » - plus intérieure qu'extérieure
- « consulte » ses subordonnés mais tranche toujours
avec panache, photos à l'appui, l'air « grave mais
déterminé » ; confirmation des mousquetaires et de
lui-même : « il a pas dormi de la nuit et avait les yeux
rougis ». Avec ce Hollande régénéré sur le ton de la
confidence au coin du feu à l'Elysée avec sérénité comme s'il
était un témoin d'un drame qui aurait eu lieu il y a cinquante ans,
un Valls dans la posture du matador qui se prend pour le shérif Gary
Cooper dans Le terroriste sifflera trois fois, et le second couteau
Cazeneuve en praticien policier omniscient, le téléfilm de la
première partie commémorative est autant rébarbatif que moraliste
– avec ce multiculturalisme comme meilleure antidote au vieil
internationalisme3
– mais avec des perles comme celle-ci : « Les frappes
aériennes (bombardements « décidés » par le maréchal
Hollande) ont eu un effet limité, mais elles frappent l'opinion ! ».
En tout cas ces frappes-là ne causent pas de morts dans l'opinion
française.
L'incroyable conjonction
des assassinats au magasin casher et la course poursuite des
assassins à Dammartin laisse pantois. Il a fallu deux jours pour les
retrouver et une semaine pour déduire qu'ils étaient potes avec le
petit tueur Coulibaly. Aujourd'hui encore deux ou trois complices des
tueurs du Bataclan courent toujours un mois après4.
Rien n'est rappelé de l'incroyable irresponsabilité des
journalistes en janvier qui se permettent de divulguer des infos très
dangereuses pour les otages au magasin casher et dans l'imprimerie de
Dammartin-en-Goële. Rien non plus sur la précipitation policière
désordonnée dans l'intervention dans le bled du côté de Roissys
(je crois être le seul à m'en être indigné), c'est une cascade
d'irresponsabilités coalisées : c'est Coulibaly en abattant
les premiers otages à Paris qui déclenche l'intervention qui
lanternait stupidement depuis le matin à Dammartin (Hollande
retrouvant son célèbre naturel hésitant ou les grands flics
tergiversant?). Et les journalistes de continuer à informer
n'importe comment du côté des frangins Kouachi, enfin trouvés,
alors que leur pote Coulibaly peut tout entendre à la radio, enfin
les « autorités » qui trouvent le moyen de faire sortir
les gosses des écoles du bled au nord de Paris pour les faire monter
dans des cars (alors qu'on les avait fait poireauter toute la
journée) au moment où ça commence à tirer dans tous les sens ;
les balles à longue portée des frangins tueurs et des flics pouvant
largement atteindre les enfants des lycées environnant ou qu'une
décision stupide a fait sortir hors des bâtiments pour aller vers
les cars... au pire moment.
Le congrès organisé en
novembre à Versailles pour les deux chambres des élites bourgeoises
équivaut au couronnement de Napoléon. La preuve de la sauvegarde de
l'Etat et de la légitimité de Hollande, poursuit notre servile
commentateur Voix off, c'est que tout le monde s'est levé et a
chanté la Marseillaise. Faux, seule Taubira ne la chanta point,
comme d'hab, car elle est une fan de Benzema (certifié par moi au
vu des images vues plusieurs fois).
Quoiqu'il en soit, la
voix-off de l'Etat conclut sans fard : « Un an s'achève,
il faudra s'habituer à ces scènes de guerre en ville » !?
Ben mon colon... Et el matador Valls d'en rajouter une couche :
« il y en aura d'autres...les français doivent vivre avec ».
Ah bon, mourir dans la loterie des attentats ciblés pour pouvoir
continuer à vendre des armes à l'Arabie Saoudite ou à Israël ?
Jamais. Dernière petite note sentimentale et subjective pour ses
maîtres, le Voix off termine par une pirouette enfantine et
servile : « Hollande l'optimiste et Valls le pessimiste ».
Deux fumistes de l'impérialisme patriotique et nationaliste oui.
LES
VISAGES DE LA TERREUR
Le deuxième téléfilm
reportage, quoiqu'il n'aborde pas vraiment les questions
géopolitiques ni ne mette en cause la diversité ou l'ambiguïté
des motivations politiques des tueurs, ni non plus le contenu
clairement belliciste et éradicateur de l'islam, est très
intéressant sous ses airs sociologiques et sur les trajectoires des
tueurs, filmés, connus et répertoriés, mais qui sont carrément
laissés libres de leur mouvement « au bénéfice du doute »
(tradition démocratique); on les emprisonne, puis en les relâche ;
les plus grands tueurs qui n'ont pas écopés de la peine de mort
dans la rue, ne subissent que 5 à 6 années d'emprisonnement, puis
peuvent reprendre du service après l'école islamisante de la
prison.
Ce téléfilm est bizarre
parce qu'il ne prend en compte que les tueurs de janvier et prétend,
avec le sensationnalisme propre à ce genre de reportage ras du HLM,
nous faire découvrir « ce qu'ils avaient dans la tête ».
L'intérêt de s'attacher cette fois-ci aux basques des petits tueurs
est très pervers car s'adressant à plusieurs publics, en laissant à
fond de cave les manipulations et les commanditaires d'Etats masqués
au profit de la théorie aléatoire du loup solitaire, reconfigurée
pour l'heure (tardive) de cette deuxième partie, en bande
solitaire ! Les frères Kouachi et leur pote Coulibaly, une
bande de solitaires ! fallait l'entendre sur FR 3 !
Partant du louche mais
convenable « ni rire ni pleurer mais comprendre » du
célèbre philosophe batave et juif, l'explication sociologique
fournie lourdement peut tout à fait faire passer nos petits tueurs
de la « guerre révolutionnaire islamiste » pour des
héros. L'émission peut faire pleurer le spectateur gentil mais en
faire rire beaucoup d'autres, et pas précisément les amis de la
république bourgeoise multiculturelle et islamophile. Mais pour des
marxistes pas fossilisés, nombre des éléments de ce reportage,
comme je vais le montrer, confirment que les petits tueurs ratés
sont bien les produits de la société bourgeoise française et non
pas de cet islam dont chacun sait désormais qu'il ne s'agit que d'un
décor idéologique dont ils ne sont que la parodie superficielle et
débile.
Beaucoup de tautologies
typiques et simplistes des émissions de propagande d'Etat à la
Hitler : « les tueurs avaient rejeté les valeurs de la
nation avant de la rejeter » ; remplacez tueurs par
communistes... Les mannes de Beauvoir et Sartre planent sur la pensée
officielle : « que se passe-t-il dans les âmes glacées
des terroristes ? » ; « on ne naît pas
terroriste mais on le devient ».
Voici la jeunesse des
frères Kouachi et le témoignage d'oncle Mohamed. Début des années
1990, à Paris de la place Stalingrad aux Buttes Chaumont c'est la
fin de la convivialité prolétarienne, le quartier est miné par le
trafic de drogue, quand les frérots Kouachi sont encore bambins. Ils
sont rapidement orphelins du père puis de la mère. Fin 1994, tonton
Mohamed, qui fait la prière cinq fois par jour, est en tôle pour
délit mineur. Les gamins sont en fugue, puis vont se retrouver dans
un foyer au fin fond du Limousin.
Excusez la digression
suivante. L'état d'urgence (qui limite les dites libertés
publiques) est considéré comme normal par la plupart des
prolétaires – les sondages ont confirmé la popularité de notre
« chef des armées » qui est passé maître dans l'art du
pathos d'estrade - quand cet Etat urgentiste est dénoncé
gentiment donc valorisé par les pitres écologiques qui veulent se
faire passer pour subversifs avec leur réformisme radical et leur
soutien à l'islamisme soft ; alors qu'il ne sert quasiment à
rien quand la filière terroriste a été quasiment éliminée, et
qu'il faudra certainement du temps pour que les obscurs
commanditaires ne reconstituent d'autres équipes de tueurs drogués5,
sujet esquivé par les deux téléfilms de la propagande
commémorative. Effacer l'histoire en la refondant dans l'explication
officielle réchauffée très peu de temps après alors que rien n'a
été réglé, que l'ennemi n'est même pas clairement identifié,
que tout reste flou en attendant les prochains massacres, que le
principal des ministres répète sans cesse comme aussi inévitables
que s'ils étaient déjà advenus. Substitution qui a pour but
d'effacer comme le ramdam fait hier et avant-hier autour d'une
cassette porno distribuée sur les réseaux sociaux non réservés
à la masturbation universelle privée, tournée par deux types et
une jeune femme qu'on dit violée – laisse au second plan le crime
de Rouen très gênant concernant le poisseux débat sur la double
nationalité. L'ougandais sans papier qui a étranglé le jeune
couple après avoir violé la femme, était en instance d'expulsion
mais le gouvernement ougandais n'en voulait pas. Que faire de ce
tueur ? La solution sera trouvée par miss Taubira, il sera
condamné en France et sera entretenu pendant des années aux frais
de la princesse ; comme le tueur du petit Ilan et le gourou
Djamel Berghal il pourra se recycler islamiste radical derrière les
barreaux et prendre du service à la suite des « héros »
du monde interlope les Merah et Coulibaly, une fois sa peine écourtée
pour bonne conduite. Preuve de plus que la polémique sur la double
nationalité est de la foutaise6 :
les pays européens sont des vaches à lait qui n'ont pas le droit de
fabriquer des apatrides, dit-on – ce que sont pourtant désormais
la plupart des réfugiés qui fuient une guerre où tous les Etats
sont partie prenante, poussés vers le nord de l'Europe par le très
humanitaire Erdogan qui se vante d'avoir liquidés 3000 kurdes et ne
bouge pas le petit doigt pour empêcher les noyades incessantes.
Je me permets de rappeler
que, malgré les largesses d'estrade de la mer Merkel, obtenir la
nationalité, même au grand nombre, est un véritable chantage et
parcours du combattant ; aux Etats Unis c'est seulement après
avoir endossé l'uniforme et être morts au combat contre Al Qaida
que les mexicains pouvaient obtenir la « double »
nationalité américaine à l'ère des Bush! Le véritable problème
ne sera jamais attaqué à la racine : comment en finir
définitivement avec les frontières et l'inégalité criante de
répartition des richesses sur cette putain de terre de douleur. En
outre le déplacement massif de populations effarées n'a rien à
voir avec la théorie de la libre circulation des gauchistes
complices mais signe la marche vers la guerre mondiale comme dans les
années 1930, parce que le capitalisme est devenu ingérable,
irresponsable tout en prétendant être humanitaire dans des
situations qui empirent et sont sans solution ; un deuxième
camp va être institutionnalisé à Calais, puis il y en aura un
troisième puis un quatrième, comme dans n'importe quel pays du
tiers-monde.
La gabegie bourgeoise se
drape dans l'humanitaire, en accusant les prolétaires d'Europe
d'indifférence criminelle, pour mieux voiler les causes de la
misère, non seulement la guerre, qui n'est qu'une expression de la
compétition économique, mais la marche à l'abîme du monde
capitaliste dans une destructuration de tous les rapports humains.
Avec cette prétendue lutte contre le terrorisme comme dans la
porosité des frontières européennes - au contraire de celles des
Etats Unis, de la Chine et de la Russie - les Etats européens sont
débordés et prétendent « contrôler ». La bourgeoisie
parvient encore à atténuer son impuissance au nom de l'anti-racisme
et d'une ouverture « généreuse » des frontières grâce
à cet antiracisme, philosophie officielle de l'Etat qui génère
d'autant plus tous les racismes et ridiculise l'internationalisme
communiste qui avait des visées « sans patrie ni frontières »,
quoique pas dans un monde en guerre et en vases communiquant de
populations de toute façon considérées « en trop »,
même si Merkel prétend rajeunir les exploités en Allemagne et
maîtriser le débordement des réfugiés. La vérité de la crise
capitaliste ne sera pas une intégration des millions de réfugiés
au travail – déjà rareté sociologique – mais la généralisation
de camps de la misère comme en France, en attendant le big clash.
HELLO
GRIGNY
Revenons à l'analyse
sociologique au ras des pâquerettes de la banlieue apache, qui
permet de dissoudre les responsabilités politiques de l'Etat
bourgeois dans sa faconde de médecin urgentiste, dont P.Pelloux, le
survivor de la bande à Charlie, a été l'illustration
pleurnicharde.
Saïd l'aîné cherche
déjà un « réconfort » dans le religion quand le
benjamin Chérif est un bambaucheur de première. Simultanément, le
cinéma de la chaîne de gauche gouvernementale permet le suspense,
Coulibaly se fait les crocs à la célèbre Grande Borne de Grigny,
où quelques années auparavant un architecte taré a inventé des
cages à cailleras. La Grande Borne est légendaire : échec
scolaire garanti, piège social assuré pour cinquante nationalités.
Le commentateur est ici aussi sidérant de multiculturalité
productrice de ghetto religieux ; il déplore : « les
parents tentaient d'inculquer les valeurs musulmanes 7» !
Les pauvres, quoique Saïd en ait retenu quelque chose même sans
parents. Plus saisissant on apprend que le père de Coulibaly a
« fait le regroupement familial » (sic)... avec ses dix
enfants ! Pas mal, surtout en milieu ouvrier ou, chez les
parents évolués, on a compris depuis 1945 qu'une progéniture
nombreuse était la meilleure source d'échec scolaire et social,
puis de tremplin vers la marginalisation!
Tout s'accélère pour
l'ado Coulibaly qui est « pris dans l'engrenage »,
comprenez : travailler c'est trop dur, cambrioler c'est plus
excitant. Mais dérapage, cerné par les flics lui et son pote de
l'époque, collègue de la cambriole, sont coincés. Le pote est tué.
L'affaire est écrasée et la police des polices même pas consultée
à l'époque mais grandes échauffourées à la Grande Borne, les
premières de cette importance nous assure la voix off (icielle). La
poésie entre par la fenêtre et fait rêver un instant les
spectateurs des barres absurdes, la parole est à un avocat du
verbe : « l'ordre politique affronte le sentiment
d'injustice ». L'exclusion sociétale justifie tout. Nulle
remontrance de la violence symbolique de nos « jeunes hommes »
cambrioleurs – qui rimeraient presque avec gentleman cambrioleur -,
la voix off a pris partie pour celui qui va pleurer son ami en
purgeant un an et demi de tôle. Là on est presque tous avec
Coulibaly et on aurait envie d'exprimer notre haine (gauchiste) du
gouvernement ( raciste). Voix off nous apprend qu'il est naturel
que ces jeunes veuillent être des stars, avoir de l'argent,
« réussir notre vie quoi ». Sacrée conscience
religieuse... du capitalisme. On en reparlera.
Miracle de la
cinématographie gouvernementale, nous revoici avec les autres héros
de l'histoire des loups solitaires en bande, les frères caïds.
Chérif le benjamin est renvoyé de son école-club de foot.
Humiliation. Exclusion quand tu nous tiens. Saïd l'aîné suivait
une formation de cuisinier, mais travailler ne le branchait pas trop.
Comme le confie son seul pote français de l'école : « il
n'aimait pas les français » (curieuse contradiction que Voix
off ne relève pas : Saïd n'était-il pas français lui-même?
Il agitait le drapeau français lors du match houleux contre
l'Algérie...). Le grand frérot tance sévèrement sa sœur de ne
pas épouser un français. Que voilà un bon début de
« radicalisation », je dirais même d'éradication
racaille voire de répudiation de la communauté... gauloise.
Saïd part à Paris en
2000 et se met à porter la jupe et la barbe pendante et clairsemée8
(ce qui horripile tonton) ; il ne va pas tarder à s'attribuer
un non de guerre islamiste. Il fréquente la bande de la Butte
Chaumont où quelques-uns se vantent déjà du désir de mourir pour
la terre d'islam, font des prières de rue à une dizaine et sont
cornaqués par un jeune imam auto-proclamé, Farid qui laissera
tomber tout cet attirail pour rentrer dans le rang quelques années
plus tard comme infirmier rangé des kalachnikofs9.
Toujours pour s'adresser
aux spectateurs gentils musulmans, Voix off va ensuite justifier la
« radicalisation » des futurs tueurs en plaidant contre
l'armada américaine lors de son invasion de l'Irak, images
affreuses, Guantanamo, etc. Cette incursion superficielle pour
« expliquer » le présumé romantisme révolutionnaire
islamiste, fonderait les deux mamelles de la « radicalisation » :
l'idée d'un complot contre les musulmans et une répression
planétaire de ces mêmes mahométans. Ce n'est pas entièrement
faux, et Olivier Roy, qui dit souvent des choses très intéressantes
pour éclaircir les causes de ces embrigadements subits et
suicidaires, en déduit que ces événements internationaux
confirment l'exclusion sociale et que la « victimisation »
(musulmane) fait son chemin ». Et après ? Reprenons le
scénario.
Comme dans tout bon
story-board, nous voici au milieu du film, au croisement de la
rencontre des héros, ces humiliés et offensés dans leur désir de
gloire et de fortune, dans un lieu très français et très protégé :
la prison. C'est là que Saïd Kouachi rencontre le petit Coulibaly
(qui est en effet très petit et complexé au point de s'être
sculpté des muscles de taureau). Saïd s'est donc « endurci »
en prison où il n'y a pas que les salles de gym qui endurcissent les
muscles. Plusieurs images nous montrent un Coulibaly phénomène de
foire médiatisable. Il aura même serré la main au blaireau Sarkozy
lors d'une célébration des talents des cités, genre de cérémonie
aussi utile à la diminution du chômage qu'une sex-tape à la
carrière de Benzema. Le petit Coulibaly a réalisé un film
clandestin sur la dureté et la saleté de la prison dont TF 1 ne
voulut pas – probablement le meilleur reportage sur les conditions
de détention en France - qui demeurera, si dieu le veut, surtout une
référence intégrée dans la propaganda de Daech.
Saïd, une fois sorti de
prison, reste dans son ghetto mental religieux, sa femme est voilée
et son fils sera terroriste comme papa. Revoilà Olivier Roy qui nous
explique doctement ce qu'il faut comprendre du mal absolu : « le
salafisme coupe complètement de la société ». Pas leur
religion en général car le salafisme n'est qu'une pustule sur le
bout du nez ? Pas l'organisation de la ghettoïsation
généralisée par le capitalisme ?
Roy résume la fixation
sur le seul phénomène religieux radical en parlant de tentation
identitaire accolée à un vernis de connaissances religieuses. En
effet, il y a toujours des gourous pour combler l'ignorance des
petits tueurs en stage d'apprentissage, orphelins de l'ascenseur
social et admirateurs des milliardaires du foot ou des navets
d'Hollywood. Ce sera Djamel Beghal, assigné dans un bled paumé du
Cantal. Beghal, auréolé de sa légende de terroriste certifié10,
apprend aux frangins Kouachi la charia, le mode de vie policée et
les arcanes du complot mondial contre les musulmans. En prison ils
trouvent enfin quelqu'un qui leur redonne l'estime de soi et au
surplus une cause. Olivier Roy, sur son nuage hors du monde
capitaliste, nous décrit la modernité des organismes de
l'islamo-terrorisme, non seulement une grande capacité à utiliser
de malins spécialistes de la communication informatique mais à
intégrer des femmes à leurs délires ou celles-ci, même
intégralement voilées (sauf les violées de guerre) sont de
véritables passionarias11.
On est subjugué par tant de sagacité. Mais Roy va plus loin encore
dans la révélation : les salafico-terroristes c'est des
faibles ! Cette version mature bourgeoise du traditionnel
« c'est leur faute » qu'on crache à la gueule des
échoués du système scolaire démocratique et républicain.
Rien ne change, déplore
notre spécialiste, les gourous ne font que manipuler des gens
faibles, qui cumulent une tronche d'adolescents et restent des ados
attardés ; avec tout ce que signifie cet état :
impulsivité, intolérance à la privation, volonté de puissance,
désir de s'enrichir très vite, de dézinguer du français.
Enfin on comprend
pourquoi une bande d'attardés scolaires a tué tant de gens
innocents : la vengeance. Ce concept a quelque chose de
rassurant, même les victimes peuvent le comprendre. Je suis un raté
social donc je me venge en tuant à l'aveugle. Normal quoi. Rien à
voir avec l'aimable communauté musulmane si pieuse et pacifique,
ajoute notre poète de la sociologie apolitique ; rien ou
presque, sauf que les enfants prodiges lui reprochent, à cette
communauté de croyance soumise, d'être molle comme nous jeunes
soixantehuitards avons reproché à nos parents de ne pas avoir été
de vrais résistants au capitalisme, sauf que notre « radicalité »
n'a jamais incliné en faveur d'un embrigadement « révolutionnaire »
comme soldats du crime islamo-terroriste... qui ne s'en prend jamais
aux capitalistes ni aux résidences secondaires des milliardaires
saoudiens à Neuilly.
Suit une envolée lyrique
où le poète sociologue nous instruit sur la conduite dite
suicidaire des petits tueurs issus de la banlieue exclue : « la
mort est pour eux une consécration ». Pas sûr. Nul doute que
l'arriération religieuse ne laisse qu'un chapelet de prières pour
tout paradis, mais le simplisme de ce poète esquive le fait que la
plupart ont tenté de fuir après leurs forfaits criminels. La thèse
du suicide émancipateur sert à prolonger le silence de l'Etat sur
les nombreux blessés et les familles des tués qui n'ont tous qu'une
volonté : en buter quelques uns pas seulement en Syrie mais
leurs collègues entretenus en prison. Il esquive aussi, ce que
confirment la plupart des rescapés : on avait affaire à des
types drogués, insensible à la douleur inouïe de ces jeunes (comme
eux) qui pleuraient, suppliaient. Roy parsème quelques vérités au
milieu d'un discours focalisé sur de petits exécuteurs de basses
besognes mais, curieusement autonomes sans lien direct avec les
cinglés de Daech. Où se sont-ils procuré les armes ? En
France, et c'est bien connu, pour trouver des armes il faut en
acheter aux vieux grigous pétainistes ou aux derniers vieillards de
l'OAS. Un héritier de cette mouvance fût arrêté, soupçonné
d'avoir revendu des ferrailles à Coulibaly, puis on le relâcha et
on n'en entendit plus parler. Résumé de la motivation des petits
hommes de main sans uniforme visible, pas dignes d'être considérés
comme des soldats puisqu'ils tuent lâchement des civils sans armes :
« de petits paumés deviennent des héros en vengeant un
musulman abstrait ».
Les
péchés du Kapital...
Personne n'est capable
subitement de lister les 7 péchés capitaux : l'Orgueil,
l'Avarice, l'Envie, la Colère, La Luxure, la Gourmandise et la
Paresse. Les 7 péchés capitaux sont immémoriaux et attribués
communément à la « nature humaine » si imparfaite ou
perfectible grâce à dieu, dont il n'est même pas sûr qu'une
société communiste paradisiaque se débarrasse. A moins que la
vengeance ne soit inclus dans le registre de la colère, plaçons la
comme huitième péché du Kapital. Or la vengeance, qui reste de
tout temps un plat qui se déguste froid, ne peut pas être un
critère ni de justification sociale ni de compensation de la misère.
Elle est surtout un critère de type religieux du genre « œil
pour œil, dent pour dent » dans un conflit inter-individuel.
On la trouve exhalée ou exaltée dans toutes les révolutions et
parmi celles du mouvement ouvrier, sentiment compréhensible mais
brut de fonderie, quand il n'est qu'un oxymore. Une société qui
succède à une autre ne venge pas la précédente. Les critères de
type moral ou psychologique n'expliquent pas l'histoire.
Posons la question
autrement : de jeunes paumés ont la haine contre une société
injuste – tout le deuxième reportage montre très bien en effet
que ces paumés sont des produits ready made de la société
bourgeoise française et pas de l'islam abstrait – mais qu'est-ce
qui justifie qu'ils aient transmué leur vengeance ou mécontentement
extrême en désir de meurtre de leurs semblables et non pas en
conscience socialiste ou communiste de la nécessité non de tuer des
gens qui pensent autrement ou qui ont un niveau de vie décent mais
de détruire les institutions de l'injustice capitaliste ?
Certainement pas la
charia moyenâgeuse ni une foi au paradis invraisemblable de
béatitude stupide.
Tout est dit dans le
deuxième reportage pourtant, à qui sait lire et comprendre sous le
vernis du discours focalisé et focalisant sur le seul islam :
on a affaire à de purs produits du capitalisme actuel et du cynisme
généralisé avec ces jeux vidéo mis au point par les militaires
américains, de petits arrivistes avides de gloire et de fric comme
les vedettes du foot qu'ils envient ( péché notoire du Capital,
nommé aussi jalousie)12.
Il n'y a pas en ce sens de radicalisation mais cette bonne vieille
aliénation qui a toujours caractérisé le lumpenprolétariat :
refus du travail, jouissance immédiate, traiter les autres et celui
qu'est pas de ma bande comme de la merde. Même la séduction de ces
héros-racailles n'est pas nouvelle, ni islamique (l'islam n'a jamais
rien inventé). Du seizième au dix neuvième siècle, en Angleterre
, la punition sévère des malfrats et criminels avait la prétention
d'être exemplaire ; en réalité elle en faisait des héros
pour la working class. En France, Cartouche, truand minable et
balance, comme Landru PN raffiné tueur de femmes, furent l'objet
d'un culte comparable à celui de nos voyous milliardaires du foot.
Hitler est toujours l'objet d'un culte que peut lui envier Mahomet,
au point que (pour répondre à la demande) on republie son brouet
imbitable Mein Kampf mais pas le Manifeste communiste.
Qu'une bande d'ados
attardés (au visage d'enfant, dixit voix off) exécutent d'aussi
sales et monstrueuses besognes ne peut nous enfermer dans la seule
indignation pleurnicharde. Les clichés gagnant-gagnant de la
propagande mensongère sont très bien résumés par le rabbin
Cukierman aujourd'hui : « on ne peut pas laisser faire les
fous d'Allah contre notre mode de vie avec cette barbarie
moyenâgeuse ». A mon humble avis, téléphones portables et
kalachnikovs n'ont rien de moyenâgeux, notre mode de survie n'est
pas enviable et il n'y a pas vraiment de fous d'Allah (ce qui serait
insulter icelui) mais surtout des mercenaires manipulés. Les hôtes
préférés des médias passent leur temps de parole à dénoncer
sentimentalement ou sociologiquement des crimes islamo-terroristes
qui relèvent de politiques bellicistes encore très embrouillées et
obscures qui dépassent les petits paumés exécutants, qui sont
drogués comme l'étaient les kamikazes japonais, n'en déplaise à
la presse et la police qui se mettent à le nier en période de
commémoration ou comme par hasard on ne parle plus d'esprits faibles
mais d'individus déterminés. A qui l'ont a fait bien trop d'honneur
à les comparer aux brigades internationales dans l'Espagne de 1936.
L'islamo-terrorisme n'est pas un projet de société mais un gimmick,
une invention pour faire peur, un prétexte idéologique (en même
temps totalement criminel) pour une guerre qui ne dit pas son nom, ni
son moment de croissance.
Pour ne prendre que le
terrorisme d'Etats faibles (dits Etats voyous), au cours des années
70 et 80, ce qui reste remarquable est : la seule manière de
pouvoir se faire entendre du « village mondial » était
de tuer le plus de gens possible. Ce terrorisme était au service de
la cause nationaliste tiers-mondiste en façade, et en arrière-fond
une bagarre entre les deux anciens blocs impérialistes. On ne
s'interrogeait guère sur les motivations des tueurs à la Carlos.
Ils étaient staliniens, un point c'est tout. On ne s'interroge pas
pourquoi le tueur Carlos a mué de stalinien en islamiste convaincu.
Le stalinien terroriste
pouvait faire passer ses crimes pour un noble combat d'une cause
« patriotique » et « anticapitaliste ». La
nouveauté et révélation de nos nouveaux tueurs de masse n'invoque
même plus une noble cause car celle que ces demeurés invoquent –
le djihad et la société voilée et sans auto-radio – est
repoussante et synonyme de massacres perpétuels. Comme paradis le
communisme faisait mieux.
Se vérifie donc une
« progression » dans la barbarie du capitalisme. Nous ne
sommes plus à Cordoue au temps de la « civilisation arabe »,
ni en voie d'être islamisés ou arabisés. Le terrorisme n'est qu'un
prétexte - et une forme de mobilisation des populations prolétaires
consternées et tétanisées - aux bagarres entre grandes puissances
pour le contrôle géopolitique et géo-pétrolier du monde.
L'islamo-terrorisme, comme son frère ennemi l'anti-terrorisme,
servent à faire oublier les causes de la guerre et à éradiquer
toute idée de lutter contre les guerres des capitalistes. Mieux
encore ils servent à habituer les populations toutes catégories
confondues à l'idée de la guerre en permanence et mieux encore à
une guerre plus grande encore pour « en finir ». Les
capitalistes ne sont pas suicidaires eux mais ne sont pas dérangés
par le fait que leur système voue à l'assassinat de masse des
civils que la loterie du système13
a programmé et accessoirement au suicide inévitable et guère
déploré des petits paumés assassins.
Si le multiculturalisme
et la morale antiraciste incessante dissolvent les classes, le
terrorisme complète la dissolution en agrégeant un patriotisme
ringard, toujours aussi puant, qui reste encore une potion peu
magique, amère et contre-indiquée tant que le prolétariat est
rongé par la déprime du doute sur la réalité du mal présumé
qu'on lui agite chaque jour sous le nez.
LA
SEULE COMPARAISON GENANTE AVEC LES 2 MASSACRES parisiens de 2015 est
un certain 17 octobre 1961 !
On a comparé
l'engagement islamiste à celui des brigades internationales, cocues
de l'histoire avec la résistance en France, à l'embrigadement de
paumés désoeuvrés dans les bandes islamo-terroristes. Etrange
oubli de la période « terrorisante » de la guerre
d'Algérie ! Est-ce pour éviter d'enrichir la propagande de
daech, à laquelle hélas je vais inévitablement contribuer par
devers moi. Hé hé les amis, il eût été bien plus éclairant de
comparer avec la période de la fin de la guerre coloniale d'Algérie
en France. J'ai relu l'ouvrage de Jean-Luc Einaudi – La bataille de
Paris – pour comparer utilement. Comparons ensemble.
Les nationalistes
algériens ne s'adressent pas à des petits voyous arrivistes ratés,
mais à des prolétaires qui triment dur et vivent dans des
conditions insalubres. Ils ne sont pas chômeurs mais généralement
manœuvres dans le bâtiment. La plupart subissent une cotisation
mensuelle forcée par le FLN : 3000 francs. Ils sont isolés
dans leur bidonville. Leurs camarades de travail français ne les
invitent pas chez eux. Les cotisations forcées sont la principale
source de revenus des nationalistes qui s'adressent à ces
prolétaires sous les termes de « nos frères musulmans ».
Le terrorisme de masse est le fait de saint De Gaulle. Il y avait eu
les milliers de massacrés à Madagascar en 1945, il y aura un
millier de morts parmi les tunisiens le 26 juillet 1961 et bientôt
un nombre inconnu d'algériens en plein Paris le 17 octobre 1961 sous
le commandement du préfet nazi Papon14.
La lecture rétroactive
par la bien-pensance de gauche caviar et du gauchisme bobo des
meurtres policiers de prolétaires otages du FLN dans l'inévitable
manif au casse pipe d'octobre 1961, oublie de rappeler que des
dizaines de policiers en uniforme étaient abattus et que, par
conséquent la plupart des « français » assistaient aux
« ratonnades » dans l'indifférence. A un toubib qui lui
pose la question – à quoi cela sert-il d'abattre un policier qui
garde un édifice public ? - un des terroristes de l'époque
répond : « c'est un salaud, un tortionnaire ». A ce
même médecin qui lui rétorque que cela ne peut que monter encore
plus l'opinion contre les nationalistes algériens, il répond qu'il
s'en fout, qu'il veut incendier la France. Cette attitude provoque
l'indignation jusque parmi les meilleurs « porteurs de valise »
du FLN. A l'époque « l'opinion » et celle des policiers
n'est pas pour une simple déchéance de la nationalité mais pour la
peine de mort sans discussion et publiquement tous les musulmans
étaient mis dans le même sac15.
Les algériens pris dans les rafles sont systématiquement renvoyés
en Algérie dans « leurs douars d'origine » mais plus
souvent internés dans des camps. En 1961 Le Monde fait savoir le
mécontentement de la population (on ne la formate pas encore avec
les sondages) et de la police devant « la faiblesse des lois en
matière de répression du terrorisme »16.
Au lendemain du massacre
de la manifestation pacifique et sans armes, même pas un canif avant
la découverte, tenue sous le boisseau, de nombreux cadavres dans la
Seine, Jean Ferniot désapprouve la manifestation de la veille
(remplacez De Gaulle par Hollande, FLN par Daech et OAS par Marine
Le Pen, sans les gauchistes au rang d'extrémistes vu qu'ils se sont
fondus dans la gauche caviar antiraciste, et vous aurez le même
discours de l'élite d'aujourd'hui) : « En fin de compte,
les manifestations parisiennes d'hier, et les raisons qui les ont
provoquées, risquent de servir les extrémistes des deux camps. Pour
le général De Gaulle, alors que l'OAS multiplie ses provocations et
que le FLN étend le théâtre de la violence, le chemin est très
étroit qui, pour mener à un règlement, doit éviter les écueils
dressés par ses adversaires et, parfois, par des serviteurs trop
zélés » (page 219). Ce n'est pourtant pas l'OAS qui a
massacré le 17 octobre ni le FLN qui a tiré dans la foule des
ouvriers endimanchés et mains nues !
Exemple pour des
générations de journalistes soumis et suivistes, Jacques Fauvet
nous révèle comment il a fait école jusqu'à nos jours : « Le
FLN ne manquera pas d'exploiter les sanglants incidents de Paris (…)
Pourtant il en porte la responsabilité puisque ici et là c'est le
terrorisme musulman qui est à l'origine de ces drames (…) Les
lâches attentats commis au hasard contre les agents de police ont
amené à prendre des mesures, qui sont peut-être critiquables, mais
qui visent à
assurer autant la
sécurité des musulmans que celle des agents en évitant aux
premiers d'être des victimes, comme cela est arrivé, de
mitraillades de nuit » (page 220). Etrange qu'il ne nomme pas
les auteurs des « mitraillades de nuit » ?
Le plus comique est
l'appel aux français du FLN du 20 octobre avec des idées
communistes (peut-être Daech va-t-l s'en inspirer après lecture de
mon rappel : « fraterniser partout dans les usines, les
chantiers, les quartiers, les universités, avec les travailleurs et
tous les émigrés algériens » (…) annulation du couvre-feu
raciste », assurant que jamais le FLN n'a exécuté un policier
« uniquement parce qu'il est policier. Aucune exécution n'est
ordonnée sans que le coupable ait été jugé criminel (sic »17.
Inutile d'étayer plus la
comparaison. Même s'il existe des similitudes, la situation mondiale
est totalement différente. Les libérations nationales, nécessaires
certes comme étape historique, se sont révélées être de
nouvelles supercheries d'un capital découpé en blocs mais aussi en
multiples rivalités de ce qui fût appelé les pays non-alignés.
Les pays dits libérés n'ont pas pu procéder à une
industrialisation et à un développement d'un prolétariat laïc
comme au XIX ème siècle en Europe.
Ce qui me frappe le plus
chez le racketteur du FLN est qu'il a tout de même un projet
politique concevable ( la mise à bas du colonialisme). Il se paie
sur le dos des travailleurs qu'il est chargé de rançonner sinon
torture ou peine capitale ; Einaudi ne parle pas des cadavres
dans la Seine avant le 17 octobre et sans doute pas exécutés par la
police ni de certains corps coulés dans le ciment de chantiers au
bénéfice d'héritage pour un compatriote... Le racketteur du FLN
dépend de la cotisation forcée de ces mêmes travailleurs. Nos
petits paumés de l'islamo-terrorisme sont rétribués par un tas
d'intermédiaires de l'Arabie Saoudite, de la Turquie, de l'Iran
(bien avant-hier) et ne croient qu'au pognon ou à la possibilité de
jouir de meurtres et de viols, comme tout guerrier sous uniforme.
Dans cette situation, a
plusieurs tiroirs, cela peut durer longtemps comme le répète le
premier des ministres donneur de leçon de patience et d'impuissance.
Or, le terrorisme du tout début des sixties reste relativement
limité en France et touche beaucoup plus d'uniformes que de civils,
contrairement à aujourd'hui. Il va être rapidement dissous par deux
actions. L'une, imparable de la partie immigrée de la classe
ouvrière. Les racketteurs et exécuteurs de basse œuvre du FLN sont
mis en garde par les moins fous d'entre eux. Comme la source de
revenu principale est la cotis des travailleurs, il faut y aller
mollo pour les attentats en France et les réduire sous peine de se
retrouver au chômage, car, même encore dans cette période de
contre-révolution et donc d'absence de soutien des prolétaires en
général, les ouvriers immigrés en ont de plus en plus marre de
cotiser pour des maquisards d'un pays qui ne va ni leur donner du
boulot ni améliorer leur situation d'émigrés. L'autre action,
celle de De Gaulle, sous pression américaine, parvenant à régler
intelligemment la question algérienne. Probablement que la lenteur
de la bourgeoisie française à décoloniser et ce massacre d'octobre
61 ont été au fondement du réveil de la classe ouvrière un
certain mois de mai 68.
Sans préjuger d'un
nouveau réveil, il est évident que seule la classe ouvrière pourra
à nouveau mettre fin au terrorisme, non par les gesticulations de
l'antiracisme, ni une collaboration avec la police elle même
dépassée par le phénomène, mais en luttant vraiment contre la
cause centrale : la guerre dont personne ne parle et qui finira
par faire sortir les soumis « consumateurs » de leurs
gonds.
La conclusion du téléfilm
gouvernemental fait à nouveau dans le poétique tout public. A
propos de « ces âmes perdues de la république en quête
d'action », on finit en queue de poisson :
« saurons-nous allumer les contre-feux de la culture, de
l'histoire et de l'éducation » ;
La culture élitaire,
l'histoire trafiquée et l'éducation excluante auraient-elles
empêché l'arrivée d'Hitler au pouvoir ? Ou empêché la
Seconde Guerre mondiale ? La lutte des classes qu'un patron
reprochait la semaine dernière à Hollande de ne pas avoir éradiqué,
aura-t-elle le dernier mot ?
1Je
dis bien « pouvaient trouver leur interprétation », car
autant on pouvait concevoir la légitimité des attentats du FLN
pour libérer l'Algérie de l'occupation française, à une époque
où les terroristes s'efforçaient encore de ne viser que les
militaires du camp d'en face – où ceux-ci payaient de leur poche
comme la plupart des ouvriers algériens racketté en métropole –
autant les tueurs de l'islam dit radical ne sont que des mercenaires
sans foi ni loi. J'y reviens ne conclusion.
2Qui
passait ses journées cloîtré à mater des cassettes pornos comme
la CIA nous en a « informé ».
3Le
pouvoir de la bourgeoisie c'est de détenir l'exclusivité des
leçons de morale et de la défense armée. L'effet est paralysant
pour tout ennemi du système, surtout pour celui qui se qualifie de
communiste. Mais pire inertie que dans les autres attentats de
l'histoire du terrorisme moderne lorsque celui-ci ciblait des
représentants politiques ou du personnel étatique en uniforme, on
en est réduit à espérer que police et militaires finissent le
travail sans pitié puisque le terrorisme ne fait plus la
différence, à la façon des deux guerres mondiales contemporaines
entre soldats et civils ! (j'y reviens sur la période des
attentats FLN/OAS).
4Je
me suis plu à imaginer comment le chef d'Etat Lénine aurait géré
cette simultanéité. Je reconnais que ce n'est pas facile même
avec l'ultra surveillance des services de l'Etat bourgeois moderne.
Lénine eût une partie de la réponse minimale après les meurtres
des cinglés anarchistes terroristes : razzia et pelotons
d'exécution. Cela ne risque pas d'arriver avec nos Etats faibles
non tant de leurs faiblesses (ils n'ont pas légitimité pour
défendre l'humanité) mais parce qu'ils ont besoin du terrorisme et
de l'entretenir pour nous conter la balance entre le bien et le mal.
5Ce
mardi 5 janvier commémoration et poses de plaques de souvenir des
crimes des 7 et 9 janvier 2015, les médias informent que les
tueurs n'auraient pas été drogués à l'amphétamine captagon.
Très douteux comme personne n'aura les moyens d'aller vérifier les
6 attentats déjoués dans l'année selon Cazeneuve. Plus on
s'enfonce dans les détails et péripéties plus le pouvoir peut
escamoter les nombreux dysfonctionnements (mais plus encore
l'incurie policière et judiciaire dans la gestion de
l'anti-terrorisme) qui ont envoyés au casse-pipe des gens comme le
policier Brinsolaro comme s'en indigne encore sa femme. Et cette
vérité élémentaire : nous ne sommes pas protégés par
l'Etat et sa police ; leur fonction est surtout de protéger
l'Etat des riches, et les riches en second lieu même si certains
peuvent être victimes de balles perdues.
6Le
cas d'un certain, mais pas improbable, Djamel Berghal est le plus
significatif de cette foutaise (lire sa bio sur wikipédia).
7Les
valeurs sociétales du type françaises cela fait réac, ou civiques
c'est encore pire car c'est « se moquer des exclus ».
Les femmes de terroristes enterrés à l'ombre de « l'islam
radical » sont claires sous le voile : « on n'a
qu'une loi à respecter, celle du coran ».
8Qui
vous libère immédiatement une place assise lorsque vous entrez
dans une rame de métro.
9Cet
individu reste une énigme pour les médias qui se sont un temps
inquiétés qu'un ancien « formateur » de nos petits
assassins de 2015 ait pu demander à travailler à l'Assistance
publique. Or il est du même type que les sergents recruteurs de
tous les temps : envoyer les autres au casse-pipe et s'éloigner
à petit pas.
10Voir
sa bio édifiante sur wikipédia de la façon dont les services
secrets et les magistrats peuvent être bluffés et la déchéance
de nationalité tournée en dérision. Ce type, inspirateur d'un des
plus grands crimes de masses commis en France ne purge que dix ans
de taule dans une prison de province, nourri et logé aux frais du
contribuable mécréant, même déchu d'un versant de sa double
nationalité, et pourra « reprendre du service » à sa
sortie, avec remise de peine s'il se tient bien sage.
11Comparaison
outrancière avec Dolorès Ibarruri , dite la passionaria parce
qu'elle squattait les micros anti-fascistes pendant que ses potes de
parti zigouillaient opposants et anarchistes ; elle au moins
n'était pas voilée ni investie de la folie d'Allah et de son petit
télégraphiste.
12Tare
perverse qui n'est pas l'expression d'un idéal élevé ou
désintéressé mais – propre des PN – signifie : « tant
mieux si je peux te tuer pour te piquer ton bien ».
13Le
choix d'un vendredi 13 avril par les conseillers dans l'ombre des
tueurs n'a pas fait matière à exégète, tout comme les inventions
successives de Daech calculées pour être très choking par
gradation avec un sens aigu du marketing terroriste :
destruction de monuments antiques, filmage dans une cage du bien
léché martyre du pilote libanais, égorgement d'otages par de
véritables petits paumés européens, annonce de l'autorisation de
prélèvement d'organes sur les otages, etc. Des finasseries de
tortionnaire cartésien voire très … occidental, très
« modernes » comme dirait le poète Olivier Roy !
14Ce
zélé sous-fifre pétainiste et ami du jeune ministre Mitterrand,
au service de De Gaulle comme à celui des « socialistes »
Guy Mollet et Robert Lacoste en Algérie, est soucieux de fournir
de la main d'oeuvre manquante en Allemagne pour l'organisation Todt
et le grand chantier du mur de l'Atlantique, une sorte de mur contre
envahisseurs américains... Il a obtenu in extremis une carte
« d'ancien combattant volontaire de la résistance ». Il
est coauteur de la création de la BAV – brigade des agressions et
violences – qui succède à la brigade nord-africaine d'avant
guerre connue pour avoir fourni de zélés exécuteurs de la
Gestapo, du même type que nos petits paumés terroristes « qui
ont réussi ...à tuer » mais sans avoir besoin d'argumentaire
islamiste ou fasciste, c'était un bon gagne-pain et un moyen de
spolier des victimes sans défense comme les juifs en 40 et les
arabes après 45.
15Il
y a des similitudes incontestables entre toutes les formes de
terrorisme et la place de l'immigration : « Un brigadier
a été tué en attendant l'autobus alors que c'était un gars connu
comme n'ayant pas du tout de sentiments racistes, bien au contraire.
Il a été abattu aveuglément (…) René Bellanger (secrétaire de
la CFTC police) habite à Argenteuil. Le matin, quand il prend
l'autobus en tenue, il est souvent le seul métropolitain parmi les
travailleurs nord-africains ». (page 85).
16Roger
Frey, ministre de l'Intérieur à l'époque tient un discours que
Hollande n'a eu qu'à recopier en remplaçant FLN par Daech :
« Ces derniers (les travailleurs musulmans et leurs familles)
ont soif de paix et de tranquillité. J'ai pour eux la plus grande
estime et aussi la plus grande pitié, car ils sont les victimes des
exactions du FLN (…) L'essentiel est d'assainir le climat le plus
vite possible et de prendre toutes les dispositions utiles pour que
ne tombent plus, sous des coups meurtriers, les meilleurs
fonctionnaires de police (…). Les travailleurs musulmans
comprennent parfaitement la nécessité où je suis non pas
seulement de protéger la police, mais encore de les protéger
eux-mêmes contre le FLN. » (page 102).
17L'appel
est lisible en page 270, c'est une maïeutique à la Tariq Ramadan,
sous des airs pacifiques et « de classe » est défendu
l'inadmissible crime terroriste aveugle.
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