Ah vieillesse
ennemie ! « La vieillesse est un naufrage » disait le grand
Charles qui resta un homme sans âge, mais lucide, plus porté sur le pouvoir que
sur la sexualité, jusqu’au bout en
jouant sa destinée aux cartes plus que sur les films pornos. Passé quarante ans
on est déjà considéré comme vieux en entreprise. Et hors entreprise. Ce qui
n’empêche pas les « vieux » quadras de juger comme très vieux les
quinquas, les sexagénaires et au-delà. Out les vieux quoi ! Comme le dicte
le dicton : « les jeunes avec les jeunes, les vieux avec les
vieux ». Les jeunes ne pouvant s’amuser qu’entre eux et les vieux croupir
dans les maisons gériatriques ou dans les aléas de leur mariage fané convivial,
admis communément et légal à souhait.
La vieillesse
un naufrage pour qui ? Pour ceux qui sont aigris et qui ne tolèrent pas
les outrages du temps ? Pour ceux qui, en bonne santé, imaginent qu’ils
peuvent disposer de la même considération des autres sexes du genre humain plus
tard nés sur cette terre, des mêmes capacités intellectuelles, des mêmes
capacités sexuelles, voire plus si éternité ? Etre vieux est-ce limité au
physique ?
Trotsky
postulait que, dans le communisme enfin réalisé, avec le concours d’une science
améliorée et d’une humanité humaine, on vieillirait moins laid. Fourier avait
été bien plus loin dans les possibilités infinies pour les sexes de tout âge
avec le matériel donné, handicap ou ridé. C’est pas demain la veille qu’on sera
comestible avec l’âge avec l’inévitable hérédité génétique et les habitudes
alimentaires imposées aux classes. Et que vaudrait une humanité où tout le
monde serait beau (selon quels critères ? Grec, fasciste ou
publicitaire ?), svelte, musclé, avec des hommes sans bide et dotés d’une
chevelure abondante, des femmes sans mamelles pendantes et sans bourrelets
disgracieux. Un monde où une masse de clones humains, ultra modélisés depuis la
naissance par un savant dosage génétique des meilleures espèces afin qu’aucun
homme ne soit chauve et bedonnant et toute femme avec un éternel ventre plat et
une foufoune non dégarnie après la quarantaine. Une telle vision s’apparente à
la génétique fasciste, voire à une conception adolescente attardée. On y
reviendra en conclusion abrupte.
Le problème
n’est pas dans l’apparence ni dans les affres de l’âge, mais dans le culte
démagogique de la jeunesse, catégorie fuyante et éphémère, dans le capitalisme.
Le capitalisme, dirigé par des vieux croutons inamovibles, se rêve
éternellement jeune. Le capitalisme préfère embaucher des « jeunes ».
Le jeune n’est-il pas plus malléable ? Plus âpre à la reconnaissance et à
l’obéissance ? La ou le jeune prolétaire n’est-il pas plus baisable ?
Plus présentable pour l’entreprise ? Hors turbin, ne vaut-il pas mieux
avoir autour de soi des copines et des copains jeunes, gage d’évolution, de
séduction et de rires sans fin ? Les vieux il faut les supporter dans les
réunions familiales obligatoires, en attendant qu’ils refilent l’héritage.
LES VIEUX
RESPONSABLES DE LA CRISE DU CAPITALISME
Le capitalisme
est très préoccupé par le vieillissement de la population. Pensez au surcoût
pour l’entretien de la santé flageolante des vieillissants et à l’endettement
que cela représente pour l’Etat. Statistiquement, contrairement à une croyance
répandue, ce ne sont pas les mineurs silicosés ni les ouvriers de l’amiante qui
sont la charge la plus lourde pour le système de « protection de la
santé ». Les surcoûts « sociaux » sont surtout le fait des
classes bourgeoises et petites bourgeoises qui grèvent le budget de la sécurité
sociale par leurs systématiques bilans de santé et leurs corrections
esthétiques maquillées ; source toutefois d’enrichissement pour la
corporation bourgeois médicale. Je connais de grosses pouffes qui se font
offrir chaque année des « cures » tous frais payés en thalasso ou à
la montagne, alors qu’elles n’en ont nul besoin et que cela n’a aucun effet
pour diminuer la graisse. Mais, m’objecterez-vous, il faut bien que le
personnel des stations thermales, les masseurs et les moniteurs de haute
montagne disposent d’un emploi garanti toute l’année. Ne parlons même pas de
l’industrie touristique française et tunisienne qui, sans les vieux retraités,
serait en faillite. Il est vrai que le PNB national souffre des restrictions de
ces salauds de retraités qui, indifférents à la crise – la France
sarkozo-hollandaise pâtit du bas de laine égoïste – n’achètent plus de bagnoles
neuves ; les anciennes immatriculations sont légions et heureusement que
le lobby écologique rame pour la suppression des vieux tacots. La France pour
ne prendre qu’elle, dans la généralité évidente, est endettée à 90%, autant
dire qu’elle a consommé tout son revenu de l’année à venir. Situation
fantastique qui oblige l’Etat à se comporter en pillard effronté pour
« sauver le pays ».
Alors les
« jeunes » agneaux
(prolétaires) et leurs jeunes loups (chefs arrivistes) doivent
contribuer en acceptant la flexibilité, gage d’obéissance véritable, de
soumission contrite. Alors les « vieux » (prolétaires) doivent être
jetés de la production avant terme pour assurer la « rotation des
générations », car les vieillissants ne marchent plus dans la combine et
n’espèrent plus rien des promesses entrepreneuriales, sans compter que tout est
fait pour qu’ils doutent de leurs capacités (adaptation aux nouveautés).
Quoique le gouvernement hollandais, dans sa course opaque à supprimer lui aussi
la retraite viagère et privilégiée, les encourage à débloquer leurs
« actions » pour relancer l’industrie automobile ; cela avait en
partie marché en 2008 sous Sarkozy l’arrogant, mais pas trop. Les vieux n’ont
pourtant pas un capital immense dans leur bas de laine.
DISTRAIRE DES
IMPERATIFS ECONOMIQUES BOURGEOIS
La bourgeoisie
ne règne pas simplement pour le culte du profit mais diffuse l’idéologie d’un
bonheur « partagé » convivialement démocratique et sexuellement
tolérant dans un cadre strict. Comment distraire jeunes et vieux
prolétaires ? Car si le pain est garanti (pas totalement, une directive
européenne vient de criminaliser la restauration du « cœur »), le rêve ou un monde
heureux doit être « organisé » ou mythifié : du sport et du sexe
comme il faut. Succédant aux jeux antiques et aux contes près de la cheminée des
anciens, la télévision a joué et continue de jouer un rôle plus considérable que
la religion et le cinéma pour la « détente sociale ». Pour le système
« travail, famille, patrie » le mariage (hétéro et homo) reste un gage de stabilité des mœurs et de la
tranquillité politique. Il repose sur une distraction pépère, fidélisante
chaque soir. Combattre l’ennui quotidien d’une vie répétitive a toujours été
déterminé par l’exposition de faits anormaux (hors du commun légalement
consenti et de cette ancestrale peur d’être « hors la loi »). Au
dix-neuvième siècle, pour ne pas allonger avec les nombreuses autres
distractions des siècles antérieurs (pendaisons et mutilations
publiques), les faits divers servaient déjà à alimenter l’effroi populaire
intéressé à apprécier et commenter ce qui sortait de « l’ordinaire ».
Dans les chaumières et les châteaux on était ravi de ne pas avoir été
directement concerné tout en étant perclus de pitié pour les victimes. On était
satisfait de retourner aux champs ou à l’usine où ce n’est pas tous les jours
qu’on risque la mort ou la torture.
Les journaux
télévisés et la presse, obligée d’être désormais gratuite sur le web, n’auraient
aucun intérêt s’ils n’étaient consacrés qu’aux déclarations des divers
politiciens, sauf lorsqu’ils sont compromis dans des affaires financières ou
sexuelles. Les faits divers permettent un pic de l’audimat. Les pantins
journalistes comme les spectateurs en raffolent.
« L’indépendance »
de l’information au bon prolétariat suppose une multiplicité de centres
d’intérêt, outre les décisions de l’Etat et les réglementions ordinaires pour
les automobilistes, les locataires, les conditions de travail, les dates de
vacances scolaires, le changement d’horaire et la météo hexagonale (cette
obsédante subliminale délimitation idéologique de la température de la vie
quotidienne). Les résultats sportifs sont incontestablement la meilleure
illustration de l’idéologie de compétition capitaliste. Supérieurs à l’intérêt
de classes d’âge, au-dessus des concerts des saltimbanques du milieu des pop
stars sirupeuses, la compétition footbalistique ou cycliste, génère un
engouement frénétique devant l’écran à cristaux liquide (il vaut mieux
l’observer depuis son clic-clac que dans les parages hurlants du stade). Toutes
générations confondues chacun est fasciné par les as milliardaires du ballon
rond, le club adulé, la marque du maillot (à 150 EUROS pièce), les champions
nationaux (le foot féminin, plus cool, plus brillant, est carrément méprisé). Du
flic moyen au prolétaire malgré lui, le sujet est de rigueur au lendemain du
match. Avec les habituelles histoires de cul qui distraient de la morosité
quotidienne. Et, dans la solitude du soir, les milliards de masturbations grâce
au web.
LE TRISTE
TEMPS DE REPOS ET DE LA PAIX SOCIALE PORNO
Voici le
weekend. Les mariés vont amener les gosses au cirque ou en promenade ou en
conclave familial. Les célibataires vont surfer sur les sites de rencontre ou
aller en boite dansante ou échangiste. Ou promener le chien dans l’espoir d’une
rencontre. En réalité il ne se passe rien. Le type marié fantasme sur une autre
vie ou d’une promotion dans l’entreprise ratée à cause d’un concurrent
injustement choisi, ou rêve d’une autre nana moins grosse (et se branle sur le
net pendant qu’elle dort), et elle d’un type qui la prenne à la levrette et pas
en chien couché (et peste si elle le surprend sur Gonzo movies). Le ou la
célibataire ronge son frein. Les enfants s’emmerdent avec les projets des
parents pour leur faire plaisir alors qu’ils voudraient avoir passé le weekend à
« s’éclater » avec leurs copains du même âge infantile (et en matant
avec eux le porno sur l’ordi de papa parti dans sa résidence secondaire).
La distraction
sous le règne du capitalisme est compensation illusoire, or la compensation ne
remplace pas la vraie vie.
Dans les
villes de province, la « boîte » est le fantasme le plus répandu. Là
est envisagée la possibilité de sortir de « l’ordinaire », la
possible rencontre de l’homme ou de la femme de sa vie, du mec ou, plus extra
de la nana qui va permettre « l’aventure », la transgression pour le
VRP ou la bourgeoise en manque. Culan, le bourg (masculin de bourre) auvergnat bien nommé est le nec plus ultra de
la rencontre sans lendemain pour femmes esseulées ou mal mariées et
contremaîtres EDF en vadrouille, sous prétexte de stage.
Le quotidien
est si nul qu’il faut espérer que la musique et la danse vont transcender
l’ennui. Peau de balle. Aucune rencontre n’est réelle dans l’absence de
communication verbale sous le bruit tonitruant orchestré par le DJ tombeur de
toutes les pétasses du coin. Il ne faut pas boire outre mesure. Les commerçants
des boites veillent à ce que le whisky ne soit composé que d’un quart de ce
breuvage anglo-saxon (existe aussi en canadien et français) et aux trois quart
de coca inoffensif, pour préserver les points des danseurs automobilistes.
A décharge des croyants aux seuls
méfaits de l’alcool nombre de régions de province du sud sont bordées de panneaux
sinistres indiquant le fantomatique nombre des jeunes tués dans les virages ou
bouquets de fleurs en plastiques déposés par les parents éplorés pour
l’éternité de la révolution automobile du fils qui se prenait pour Fangio.
La libido est
si prégnante dans le capitalisme agonisant qu’il faut à la fois la masquer, la
judiciariser, tout en lui laissant libre cours comme les carnavals licencieux
d’antan. Le gouvernement de gauche hollandaise a fort heureusement décidé
d’abroger le dit délit de racolage passif – pénalisant les prostituées et les
clients paumés pénalisés pour renflouer
les caisses de l’Etat – quand les saunas bcbg prospèrent comme toujours sous
les Chirac et Sarkozy. Le sauna, équivalent de la cure remboursée par la SS,
est un lieu où tous les solitaires et les vielles obèses, ou abîmées par la
nature (et les vieux hommes) peuvent jouir par procuration. Il faut exclure les
clubs échangistes de cette hypocrisie car ils sont plus honnêtes permettant au
mari de jouir à la vue de sa « grosse » sautée par des étrangers,
sans que nul sentiment ne soit bafoué. Un car de retraités est garé près de la
station thermale, déjà utilisée par les Romains, ces cochons antiques.
Nous sommes tous là avec nos bourrelets, nos
excroissances adipeuses à barboter sous les jets d’eau glacée et froide, à
végéter dans l’espace sensoriel ou à suer dans le hammam sous l’œil torride du
voisin ou de la voisine. Puis il y a la piscine avec jets puissants à
différents niveaux.
Personne ne
semble se voir. Les regards sont absents, comme on dit. Les jets souterrains de
la piscine sont destinés officiellement à remuscler, à raffermir les peaux
avachies. Un premier jet puissant (bonjour la facture d’ERDF) me masse
efficacement les dorsaux mais aussi le bide. En face de moi, il me semblait
bizarre que des femmes âgées, opulentes, restent depuis aussi longtemps
positionnées au-dessus d’autres jets souterrains. Je me rends au même endroit
une fois celles-ci parties. Quelle n’est pas ma surprise de constater que le
jet, non seulement éjecte le slip, mais masse violemment le trouduc et, par
con-séquent le deuxième orifice féminin. Ainsi les grosses et moches – ou même
de jolies cougars - en public, et sans
rien y laisser paraître (regard absent), peuvent bénéficier d’un orgasme pour
le prix de l’entrée au sauna. Le capitalisme peut être jouissif à condition
d’acquitter son billet d’entrée au sauna. Très bien mais triste comme la
véranda du sauna.
J’aperçois une
grosse mémère qui sort, rouge comme pivoine d’une salle de massage, accompagnée
par un homme noir musclé et bien bâti. J’apprécie la révolution sexuelle cachée
d’une contrée arriérée, dont je tairai l’endroit. J’en deviens persuadé que la
télé, internet, la musique pop et le football ne sont pas suffisants.
M’étant encore
égaré de l’institutionnel, je reviens donc au sujet initial de cet article, le
thé dansant, ce ghetto social et excluant. Pour les vieillissants ignares de
l’informatique non initiés à l’arnaque des sites de rencontres à prélèvement
obligatoire et incontrôlable, trop fauchés pour recourir aux dernières agences
matrimoniales obsolètes et ringardes, sans relation amicale ni professionnelle,
il reste donc le « thé dansant » de la deuxième Guerre mondiale. Il
se tient d’ordinaire l’après-midi, les retraités disposant d’un temps libre
étranger aux 35 heures qui offusquent la droite caviar. Du temps de mon
activité salariale j’ai vu souventes fois rencontré tel pauvre retraité se
bichonnant, se pomponnant, se parfumant, s’épilant, se noircissant les maigres
poils du caillou dégarni pour se préparer au bal des anciens pour séduire
l’éventuelle Dulcinée blanchie sous le harnais, laquelle exigeant dûment une
salle de bains ou des chiottes doubles avant de convoler aux agapes tardives
pour ne pas dire terminales.
Il faut subir
l’accordéon. Cet instrument, qui fût un opium prolétaire mais vous flanque
désormais un chagrin nostalgique de la misère de nos parents et de leur musique
ringarde assommante, qui aurait dû
disparaître depuis la révolution de la guitare électrique vers 1960 avec Elvis
et l’ado Hallyday, mais non, il sévit encore dans nos campagnes. Quiconque d’un
peu connaisseur de l’histoire des générations eût pu supputer qu’avec la
disparition des générations de l’époque renversante de la révolution russe
(1917-1923), et quelques tolérances pour les accrocs d’Yvette Horner des
fifties, que cet infâme instrument dépressif n’animerait plus que quelques
maisons de retraite. Et que non, il sert à faire chavirer quelques couples
bouseux, fidèles à en mourir depuis le mariage de la dinde et de l’écurie.
Aucun mépris de ma part, j’ai toujours envié le jeu de jambes des
septuagénaires au son d’une valse accordéonique, ou d’un tremblant passo doble
– avec toutefois un total dédain raciste
des connards ascètes du tango argentin. Dans le « thé dansant » il faut
« savoir danser ». Danser c’est mimer l’amour platonique. Le slow
c’est pour les ignares. La génération du twist et autres fariboles pour merdeux
qu’on pas connu la guerre et Charles Trenet, caca boudin. Les soixante-huitards
sans éduc et sans capacité à virevolter classique, puff… des marginaux
dégarnis !
S’il n’existe
aucun endroit pour se rencontrer passé cinquante piges – les boites à danser
sont réservées aux merdeux de 18 à 29 ans – il reste les boites à accordéon.
Veuf, célibataire, divorcé , ne vous plaignez pas, ayez recours à la branlette.
Le plaisir solitaire voilà bien la plus grande conquête du capitalisme.
La leçon de
cette analyse pornographique et hors
norme ne dépend pas des envies, fantasmes, faux besoins secrétés par le
capitalisme, mais d’un avenir communiste où la femme et l’homme ne seront plus
considérés à l’aune de critères esthétiques de forme et d’allure basés sur la
compétition, la concurrence, la supériorité sur l’autre, mais sur l’humain et
les besoins véritables, et un besoin naturel fondamental qui est INTERIEUR et
rétif à toute comparaison ou jalousie possessive.
Je suis parti
en courant du « thé dansant », j’ai encore de bonnes jambes musclées
et un appareil encore apte à bien fonctionner..
Mais je suis
probablement au rang des utopistes maximalistes et rêveurs d’avenir.
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