par Marc Chirik
(intervention orale au 3ème congrès de Révolution Internationale,
1978, les militants comme équipe de foot avec un entraîneur efficace)
...C'est vrai qu'il y a une distinction qui se fait entre l'action de
l'organisation comme telle, et celle des militants. C'est vrai aussi
que le militant agit partout comme membre de l'organisation, mais là
se fait la distinction: c'est sur les plans où se situent ces
activités. C'est cela que ne voient pas ceux qui sont amenés à
dire que les militants doivent chercher à être les chefs dans les
luttes immédiates. Cette vision n'est pas tout à fait la nôtre. Ce
que nous cherchons, nous, ce n'est pas de demander sa confiance à la
classe pour qu'elle nous délègue la direction de ses luttes, mais
de faire en sorte que la conscience de la classe se généralise pour
que ce soit elle en tant que classe qui assume ses tâches. C'est là
notre tâche fondamentale.
Nous ne pouvons pas dire seulement "généralisation" des
luttes, les syndicats sont capables de récupérer ce mot d'ordre, on
l'a déjà vu. Nous devons en dire plus, ne pas limiter la
généralisation à l'espace, mais l'étendre au fond, allant des
luttes pour des questions partielles aux questions générales. Dans
les luttes nous devons toujours avoir présent à l'esprit trois
soucis:
- pourquoi est menée cette lutte ?
- qui la mène ?
- comment se mène-t-elle ?
La grève n'est pas en elle-même une panacée. Les syndicats peuvent
déclencher des grèves sur des revendications anti-prolétariennes,
on l'a vu en Italie avant 1914, avec des grèves qui préparaient les
ouvriers à la guerre. Nous ne sommes pas des "gréviculteurs".
Ce n'est pas un hasard si la question de l'intervention directe se
pose à nous aujourd'hui, cela révèle deux moments: celui du
développement des luttes ouvrières, et celui du développement de
l'organisation des révolutionnaires qui est de plus en plus
impliquée concrètement dans les luttes. Pour répondre à ce
problème, il faut souligner que:
- l'intervention des militants est toujours sous le contrôle de
l'organisation,
- le militant ne doit jamais exiger que la lutte dans l'usine atteint
une conscience globale pour y participer, pour en être un facteur
actif en intervenant. Nous devons absolument faire nôtre ce que Marx
disait dans le Manifeste sur les communistes qui sont les combattants
les plus décidés dans la lutte de classe.
- tant l'organisation que le militant n'ont pas à faire de la
surenchère, à être plus radicaux que les ouvriers; cette attitude
existe chez certains groupes parce qu'ils sont isolés, coupés de la
classe, comme le FOR.
- les militants de la classe ouvrière doivent mener la lutte locale
de la manière la plus effective et la plus efficace. Ce n'est ni un
sport, ni une fête, comme peuvent le penser les surréalistes ou les
situationnistes. Etre au sein des luttes, avec sérieux et
responsabilité, c'est le contraire de ce que font les anarchistes
qui font la "grève générale" tous seuls ou des "actions
exemplaires". C'est avoir la conviction d'une victoire partielle
possible et rejeter l'attitude du style "le capitalisme n'a rien
à accorder", défendre les positions des ouvriers contre les
atteintes du capital, et être avec eux décidés à faire aboutir la
lutte.
- Notre dénonciation des syndicats et courants anti-prolétariens
doit être la plus énergique possible; cela signifie qu'elle ne doit
jamais prendre des formes abstraites, plaquées sur la lutte, mais
être le démasquage concret, dans le faits, à travers les problèmes
pratiques, de leur nature anti-prolétarienne.
- Nous devons exercer une vigilance constante à l'égard des
manoeuvres anti-prolétariennes; si, au début de la lutte, il est
difficile de démontrer les manoeuvres syndicales, il faut s'assurer
de pouvoir les dénoncer immédiatement, au fur et à mesure du
développement de la lutte.
- à l'égard de toute tentative de formation de groupes au sein de
usines, il faut être conscient que de tels groupes, comme ceux qui
se réclamaient de l'autonomie ouvrière, sont des groupes politiques
qui entravent la formation de l'organisation politique de la classe.
Par contre, nous apportons notre soutien à tout surgissement réel
de groupes de réflexion dans les usines ou les quartiers et nous y
participons.
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