Naville et Trotsky |
Il est intéressant de
se pencher sur le passé du mouvement révolutionnaire, non pour faire
un travail d'archéologue, ou scolastique comme dirait Trotsky, mais
pour mesurer l'inanité et la futilité des raisons personnelles, des
histoires de clans dans les partis, plus particules que véritables
organisations, pour écarter la démarche des parasites du mouvement
ouvrier (ils sont toujours renaissants à chaque époque les bobos).
Comme l'a bien démontré le belge Vereeken, Trotsky a été roulé
dans la farine par ses divers interlocuteurs. Preuve qu'un homme,
aussi génial soit-il (et Trotsky avait du génie, un niveau de
conscience universelle indéniable, et un raisonnement toujours
passionnant malgré de lourdes erreurs d'analyse et un destin brisé).
Trotsky est incapable de constituer une alternative à une 3ème
Internationale moribonde parce que le moment historique est cruel,
dépasse toute espérance révolutionnaire. Derrière son
avertissement face à la montée du fascisme, Trotsky n'est pas un
« avertisseur démocrate » à la Wikileaks ni un anar
antifa lambda, il voit se profiler la guerre mondiale et il en
devient ...opportuniste, préférant soutenir la social-démocratie
bourgeoise partout en Europe et l'Etat bourgeois en Espagne. Il est
incapable dans cette sale période de joue rle rôle d'un rassembleur
principiel comme Lénine, il agglomère des aventuriers à la
Molinier, probable pervers narcissique qui le mène par le bout du
nez. Le voici confronté au « groupe juif ». Voilà qui
devrait faire taire tous les salmigondis fachos sur la manipulation
juive du monde.... Il y a en effet un groupe juif dans le premier
parti communiste comme il y aura des groupes nationaux arméniens ou
coloniaux. La 3ème Internationale a hérité de la Seconde des
catégories honorables, la jeunesse, les syndicats et les
nationalités qui n'ont pas encore de nations. Les maximalistes
italiens, dont Bordiga se choqueront de cette section « juive »
dans un parti communiste. Mais il faut savoir raison garder, une
telle catégorisation était inévitable à l'époque, plus tard elle
sera nommée MOI, main d'oeuvre ouvrière immigrée, hélas au
service du patriotisme stalinien. Le « groupe juif » est
un groupe d'ouvriers immigrés qui fait, comme vous le verrez, de
très pertinentes critiques à la direction Molinier-Treint. Le
« groupe juif » exprime un souci d'unité quasi utopique
et ambigu, plaidant lui aussi en faveur du capitalisme d'Etat en URSS
et d'une union des syndicats qui en font plus un allié de stalinisme
que de l'Opposition de gauche révolutionnaire combattant la
contre-révolution stalinienne. Comme le remarque Trotsky le « groupe
juif » est un peu à côté de la plaque par la barrière de la
langue et quelques chefaillons qui le manipulent, mais le texte du
« groupe juif » n'en est pas moins émouvant. Trotsky
mise curieusement sur une intervention vis à vis des travailleurs
étrangers comme fondamentale (comme nos trotskiens modernes
moralistes face à la marée migratoire) mais cela n'a nullement
réveillé l'internationalisme ni empêché la guerre. L'impuissance
de l'Opposition de gauche trotskiste comme l'intransigeance de la
fraction italienne n'ont pas réveillé la classe ouvrière.
Par contre nous savons
que notre regretté camarade Marc Chirik était membre du « groupe
juif » et que sa formation politique fût certainement aiguisée
dans ce milieu pas si coupé de la réalité prolétarienne que le
pensait Trotsky (Marc cotoya Treint puis rompit avec lui pour
rejoindre la fraction italienne). On remarquera le curieux c. à la
place de camarade, utilisé dans les correspondances d'époque, qui
est parfois ambigu, ne voulait-il pas dire parfois, sous la colère
de la polémique, ce … con de Trotsky ?
« Quelques
remarques à propos des divergences intérieures et des flottements
dans la Ligue »
par Léon
Trotsky
1°) Dans ma première
lettre circulaire, j'ai déjà écrit que le piétinement sur place
de la Ligue, les nouveaux conflits et scissions ont une cause
générale, le mouvement ouvrier français n'est pas sorti encore du
stade de reflux, l'affaiblissement général de l'aile
révolutionnaire du prolétariat entraine aussi l'Opposition de
gauche. Les événements apporteront avec eux les changements
nécessaires comme ils l'ont apporté en Espagne et en Allemagne.
Mais justement l'exemple de ces deux pays montre comme il est
important, dès avant le tournant révolutionnaire des événements,
d'avoir prêt une organisation autant que possible homogène et
soudée, passée à travers une sérieuse expérience de la lutte
intérieure. Dans sa création consiste maintenant la tâche en
France.
2°) La Ligue a surgi
comme un conglomérait de différents groupes et fragments. Cela
découlait de la situation en France, de l'existence ou de la vie
végétative de nombreux
groupes, du fait d'une certaine confusion dans tous les autres
groupes ; de l'absence d'un groupe qui aurait joui d'une
autorité vis à vis des autres groupes, et sur lequel on pourrait
s'appuyer avec complète certitude. L'hétérogénéité de la
composition de la Ligue définissait l'inévitabilité
ultérieurement, de la sélection et de l'épuration des rangs. Ce
processus s'est cependant prolongé pour des causes dans la
délibération desquelles je n'entrerai pas ici. Je dirai seulement
qu'à l'égard de certains groupes douteux ou d'origine étrangère,
on n'a pas adopté une politique suffisamment conséquente, qui
commence par les tentatives de collaboration loyale, pose l'élément
douteux à l'épreuve et sous contrôle aux yeux de tout le monde,
leur donne la possibilité de se corriger ou de se discréditer, et
dans ce dernier cas, se termine par leur élimination de
l'organisation.
En
tant cas, le temps est venu de tirer les conséquences
organisationnelles d'une expérience politique trop prolongée.
3°)
Toutes les discussions dans la Ligue tournent maintenant autour de la
« Fraction ». Je n'ai pas vu le texte de ces définitions,
mais je crains beaucoup que la lutte sur ce terrain apporte dans la
chose une bonne part de scolastique. Est-ce que nous sommes une
fraction du parti ou une fraction du communisme ? Formellement,
nous ne sommes pas une fraction du parti, car nous sommes en dehors
de ses rangs, et sous sa répression. D'autre part, la notion du
communisme est inséparable de la notion du parti. Dans notre
situation, il y a une contradiction créée non pas par les fautes de
la logique formelle, mais par des conditions historiques objectives.
Cette contradiction ne peut pas durer éternellement. Elle doit se
résoudre dans un ou dans l'autre sens. Il n'est pas probable que ces
exercices formels avec le mot « Fraction » puissent
approcher de la solution. Tout ce qu'il y a de fondamental dans ce
qui détermine notre rapport avec le Parti officiel et le Komintern
est dit avec une détermination suffisante dans les documents
fondamentaux de l'Opposition.
Il
n'y a pas de fondement pour changer ce qui est dit, parce que la
situation objective, dans ses traits fondamentaux, n'a pas changé
encore ni dans l'un ni dans l'autre sens. Nous luttons comme
auparavant pour la régénération de la 3ème Internationale et non
pour son remplacement par une 4ème.
4°)
La tentative de tracer la délimitation de la Ligue en partant
exclusivement des discussions nouvelles sur la « fraction »
ne me paraît pas juste, avant tout ne fût-ce que parce qu'elle
semble ignorer tout le passé de la Ligue et s'efforce de recommencer
l'histoire depuis le commencement.
Cependant,
une politique organisationnelle juste exige que la sélection dans la
Ligue s'opère sur la base de toute l'expérience, au plus haut degré
précieuse malgré ses dimensions restreintes, et non pas seulement
sur la base d'une discussion isolée, d'ailleurs dans une importante
mesure, scolastique.
4°)
Le camarade Treint se représente les choses ainsi, que d'une part,
il y a des « liquidateurs » le groupe juif, et à côté
d'eux les « conciliateurs » (Naville, Gérard). Et que
c'est pourquoi il faut maintenant diriger la politique vers
l'amputation des liquidateurs pour ensuite passer aux conciliateurs.
Une situation de cette sorte, il est vrai, n'est pas rare dans les
organisations, surtout les organisations de masse, quand la présence
d'une aile droite ou ultra-gauche s'affirme nettement, même à la
formation d'une couche intermédiaire, d'uen fraction conciliatrice.
Mais ce schéma général ne couvre aucunement ce qu'il y a dans la
Ligue. Les traditions et la ligne de développement du groupe Naville
n'ont pas le moindre rapport avec les traditions et la ligne de
développement du groupe juif. Dans le premier cas, nous avons un
groupe d'intellectuels petits bourgeois, de flâneurs de trottoirs
idéologiques. Dans le second cas, nous avons des prolétaires
nomades qui ont l'avantage et les défauts des émigrants
révolutionnaires. Un tel ou tel autre rapport entre les deux groupes
ne peut être que l'œuvre d'une combinaison personnelle ; ils
n'ont aucune racine commune. C'est pourquoi il est tout à fait
injuste de prendre la question Naville comme une fonction (fraction ?
Ndt1)
, c'est à dire comme un dérivé, comme une question dépendante de
la question du groupe juif.
6°)
Naville était primordialement sur le point de vue des deux partis,
et avec cela, il s'imaginait « son » Parti à la manière
de Paz et de Souvarine comme un cercle de discussion dominical où il
paraît comme un soliste. Ensuite Naville a passé sur la position de
la « Fraction indépendante » en faisant rentrer dans
cette notion le vieux contenu. Il a assimilé le point de vie de
l'opposition de gauche, mais seulement en paroles. Sa pensée reste
également petite bourgeoise, anarchique et sans parti, dans la même
mesure contre le parti officiel que contre la Ligue. Il reste notre
adversaire inconciliable.
Prenez
« La lutte de Classe ». Déjà après qu'on ait chassé
Landau de nos rangs, Naville a publié un article de lui dans la
revue, qu'il estime comme sa propriété privée (les petits
bourgeois anarchiques donnent une énorme importance à la question
de la propriété). Le dernier numéro de La lutte de Classe porte le
sous-titre suivant : « revue théorique de l'Opposition
communiste en France ». Sur la question de la transformation de
La Lutte de Classe en organe officiel de l'Opposition de gauche
(Ligue) a été mené durant plusieurs mois une lutte farouche. Et
puis quoi ? Naville montre de nouveau démonstrativement qu'il
ne veut pas identifier « son » organe avec cette
organisation à laquelle, paraît-il, il appartient. Est-ce que cela
seul ne suffit pas pour éliminer un tel homme nettement étranger et
hostile à ses rangs ? Cette circonstance que la Ligue et sa
direction n'ont jusqu'ici pas réagi à ces provocations révoltantes
est en sou un symptôme inquiétant. Car le premier trait du
révolutionnaire est la liaison ferme avec son organisation, le
patriotisme de l'organisation, la sensibilité à toute sortes de
tentatives contre le drapeau de l'organisation.
Comment
Naville définit-il aujourd'hui la notion de fraction ? Je
l'ignore et je l'avoue, je ne 'y intéresse pas trop. On peut donner
une définition juste de l'Opposition de gauche et en même temps,
chaque jour, fouler au pied son drapeau.
7°)
J'insiste depuis longtemps déjà sur ce qu'il faut lier
l'appartenance à la Ligue en général avec l'accomplissement d'un
travail déterminé et systématique. Cela est, à part tout le
reste, une loi exclusive contre les amateurs, contre les bavards,
contre les flâneurs, les parasites politiques. Certains d'entre eux
sont suffisamment adroits pour ne pas se laisser attraper sur une
formulation anti-communiste. Mais cela ne les empêchera pas, sous la
couverture des meilleures formulations, de mener un travail quotidien
de sabotage pour à un moment favorable, trahir l'organisation.
8°)
La situation du groupe juif, comme il est déjà dit, n'a rien de
commun avec la situation du groupe Naville. Quelles que soient les
combinaisons en haut, les membres du groupe juif sont liés par
l'unité de langue et la connaissance insuffisante de la France ;
cela permet à quelques dirigeants du groupe d'y jouer un rôle
exagéré et de cultiver une atmosphère renfermée et d'isolation.
Il y a quelques mois que Mill était déchaîné contre le groupe
juif, comme source principale des calamités. Maintenant, il aide
Félix à cultiver les traits négatifs d'émigrants du groupe et à
étouffer ses traits prolétariens positifs.
Il
est tout à fait évident que le groupe dans le passé a été trop
laissé à lui-même. Les dirigeants de la Ligue estimaient que
l'appui de ce groupe leur allait de soi. Ils se sont peu souciés de
tenir chaque membre du groupe juif au courant de tout ce qui se passa
dans la Ligue. Ce groupe est devenu la victime de ses dirigeants
actuels. Il m'est difficile de juger d'ici dans quelle mesure on peut
corriger le malheur causé par ces dirigeants. En tout cas il faut
tout faire pour aider le groupe à se libérer de sa direction
actuelle et conserver au sein de la Ligue tous les éléments sains,
prolétariens du groupe.
La
différence entre le groupe juif et le groupe Naville s'exprime d'une
manière tranchante dans le plan de notre travail pratique envers ces
deux groupes. Tandis que les partisans de Naville, qui ont pris ses
déclarations plus ou moins au sérieux, ont depuis longtemps déjà
quitté la Ligue et attendant en dehors de ses rangs que les éléments
révolutionnaires renoncent à ces chefs passagers et accidentels,
pour rester dans la Ligue. Dans ce sens tous nos efforts doivent être
dirigés.
9°)
Poser purement formellement la question de la Fraction en dehors de
tout le passé de la Ligue et indépendamment du contenu social et
personnel de chaque groupe, non seulement rend plus difficile la
délimitation d'avec les éléments étrangers, mais crée aussi le
danger d'un nouveau morcellement dans le noyau fondamental de la
Ligue. Je ne veux pas du tout nier d'avance et entièrement
l'importance théorique et politique de ces divergences qui sont
liées à la question de la « Fraction ». Mais il serait
criminel de forcer ces divergences en les arrachant à l'activité
politique de la Ligue. . Si sous la nuance de la définition de la la
« Fraction » se dissimulent vraiment deux tendances
différentes, alors elles doivent se manifester le mieux dans les
questions fondamentales du mouvement ouvrier international et avant
tout français. La Fraction se forme non en se définissant à chaque
pas, mais par l'action. Le besoin lui-même de polir à nouveau la
question de la Fraction est provoqué sans doute par la stagnation de
la Ligue. S'obstiner sans fin dans cette direction signifie faire
exploser le noyau fondamental et avec cela sur une ligne
accidentelle, dans une grande mesure scolastique.
Les
camarades dirigeants de la Ligue doivent, il me semble, se rendre
compte nettement d'une chose, une véritable scission sur le terrain
des définitions formelles, des prévisions et des prédictions
psychologiques compromettra ses groupements. La critique intérieure
est nécessaire autant qu'elle sert l'action. Là où elle se
transforme en but en soi, elle décompose l'organisation. La Ligue a
maintenant la possibilité d'éduquer ses rangs et de les multiplier
sur la base des questions grandioses de la politique européenne en
commençant par l'Allemagne. Il est indispensable de sonner
infatigablement l'alarme sur le danger fasciste à qui la direction
du Komintern trace le chemin.
La
question de la main d'oeuvre étrangère en France acquiert une
acuité toujours plus grande ; justement pour l'Opposition de
gauche s'ouvre ici un champ illimité pour l'action. L'acuité de la
question des réparations et des dettes donne la possibilité de
développer une agitation pour les Etats Unis d'Europe. En France,
vont avoir lieu des élections parlementaires qui, sous la pression
du chômage croissant, et en lien avec le tournant des événements
en Allemagne, peuvent revêtir une importance énorme dans la vie
politique du pays. Il faut à tout prix se tracer la voie vers les
éléments prolétariens frais pour réussir à renouveler et à
élargir la composition de la Ligue au moment du changement
inévitable de la situation politique. Sur d'autre voie, pas de
solution.
L/T/
REPONSE DU GROUPE JUIF
(1932)
A TOUTES LES SECTIONS
NATIONALES DE L'OPPOSITION DE GAUCHE, AU CAMARADE TROTSKY
Chers
camarades,
La
lettre du c. Trotsky du 22 décembre adressée à toutes les sections
nationales traite, entre autres, de la vie de l'Opposition française
et du groupe juif de la Ligue. Cela nous permet de nous adresser pour
la première fois aux camarades de l'Opposition Internationale pour
soumettre à leur jugement un tableau plus détaillé de la situation
réelle de la Ligue et des erreurs dangereuses de sa direction
Treint-Molinier. Les accusations extrêmement graves formulées
contre notre groupe par le c. Trotsky sont basées sur une
information défectueuse et unilatérale fournie par la direction
Treint-Molinier qui, dépourvue de tout crédit et de tout appui de
la Ligue même, n'a d'autres moyens de se maintenir à la tête de
notre organisation que par le mensonge grossier et déloyal par
lequel elle cherche à tromper le c. Trotsky et toutes les sections
nationales.
La
lettre du 22 décembre du c. Trotsky ne touche que les questions
strictement organisationnelles sans aborder le fond politique des
divergences qui opposent une grande majorité de la Ligue à la
direction Treint-Molinier. Le c. Trotsky cherche à dégager la
responsabilité de cette direction de l'état de désagrégation dans
laquelle se trouve la Ligue, en rejetant la plus grande part de cette
responsabilité sur le groupe juif. Nous considérons que ce n'est
que sur le terrain de la différenciation politique que l'état de la
Ligue française doit être examiné.
Nous
voulons examiner ici brièvement les accusations portées contre nous
par le c. Trotsky et exposer les divergences politiques existantes
qui sont, d'après nous, la cause principale de la crise dans la
Ligue. Pour permettre à l'Opposition de Gauche de juger en
connaissance de cause et d'apporter une solution radicale susceptible
de normaliser la vie de la Ligue, nous demandons la convocation d'une
Commission Internationale de Contrôle à laquelle nous soumettrons
en détail toute la documentation sur l'activité politique
organisationnelle de la Ligue et du groupe juif.
Le
c. Trotsky dit que : « la situation (de la Ligue) se
complique par le tibubement mortel et les fautes du groupe juif ».
Plus loin, le c. Trotsky ajoute : « ils ont changé leur
orientation au sein de la Ligue en faisant dépendre les
circonstances d'un caractère subjectif ». Or, voyons les faits
tels qu'ils se sont passés depuis plus d'un an et demi dans la vie
politique de la Ligue. Pendant la discussion sur le tournant du
P.C.F. En 1930 c'est le texte du groupe juif qui fût approuvé tant
par le c. Trotsky que par la majorité de la Ligue (avant la
Conférence Nationale) et qui donna l'orientation au travail de la
Ligue dans le P.C.F. Ensuite, c'est la position du groupe juif dans
la question de l'opposition unitaire qui fût également approuvée
par la majorité de la Ligue. Ce sont ces positions qui ont été
caractérisées par le c. Trotsky comme des positions de l'aile
marxiste de la Ligue.
Ce
n'est pas le groupe juif qui s'est rallié au groupe Molinier-Frank,
comme on veut le présenter maintenant, mais ce sont au contraire les
c.c. Molinier et Frank qui, n'ayant pas de positions politiques
fermes à eux, se sont ralliés, après maintes oscillations (comme
dans la question de l'O.U. À la première CE élargie) au groupe
juif. Le développement politique ultérieur des Molinier et Frank et
la facilité avec laquelle ces deux camarades ont abandonné nos
positions pour celles du c. Treint nous prouve aujourd'hui que
Molinier et Frank s'étaient ralliés au début aux positions du
groupe juif dans le seul but de se hisser sur les épaules d'un
groupe ouvrier pour s'emparer de la direction de la Ligue. Ce n'est,
certes, pas ces deux parasites politiques (Molinier et Frank) que le
c. Trotsky visait quand il qualifiait il y a un an le groupe opposé
à Naville-Gourget d' « aile marxiste ».
Dans
la question de l'unité syndicale qui s'est posée dernièrement avec
une acuité exceptionnelle devant les ouvriers français, quelles
furent les positions qui ont départagé la Ligue ?
Avant
la parution de l'article du c. Trotsky (avril 1931) sur la question
de l'unité, le c. Molinier trouvait possible de soutenir la position
ultra-gauchiste des étudiants2
contre toute unité syndicale. Ensuite, quand le camarade Treint a
commencé à donner son « orientation » à la politique
de la Ligue, les camarades Molinier et Frank furent seuls dans la
C.E. Pour adopter la position de Treint de « rentrée en bloc
dans la CGT réformiste » et de la liquidation de la centrale
syndicale révolutionnaire (C.G.T.U.). D'une position d'extrême
gauche anti-unitaire ces camarades se sont jetés à la position
brandlérienne et lovestonienne d'unité à tout prix. Peut-il y
avoir « titubement plus mortel » et plus grotesque que
ces oscillations de gens qui osent monopoliser la direction de
l'Opposition française ?
Cependant,
c'est encore une fois le groupe juif qui a pris l'initiative de de
combattre cette position dangereuse. Nous avons rallié la grande
majorité de la Ligue sur la résolution Félix qui affirme le
principe communiste pour l'unité syndicale et préconise le Congrès
de fusion entre les deux centrales syndicales.
La
discussion sur l'unité syndicale nous a permis d'aborder les
problèmes de la situation mondiale et en premier lieu les
perspectives de la révolution allemande et ses répercussions sur
les autres pays et notamment sur la France. Dans cette discussion le
c. Treint, développant les conceptions de 2ème parti condamnées
depuis longtemps dans l'Opposition internationale, déclara que :
« le centrisme est une fraction du mouvement ouvrier qui se
trouve déjà en dehors du communisme mais encore dans les rangs de
la révolution ». Il ajouta que l'Opposition doit dès
maintenant se diriger vers la constitution d'une « fraction
autonome » et, dans le cas de l'échec de la rév. Allemande
qui, pour Treint, est certaine, même vers la constitution d'une
nouvelle Internationale. Le c. Molinier qui trouve dans ces idées son
nouvel Evangile, dépasse son maître et affirme, devant la Région
parisienne, avec un zèle de néophyte, que le « centrisme est
contre-révolutionnaire » et qu'il « ne faut pas
s'enfermer dans les formules de « fraction », par rapport
au parti.
Le
groupe Treint-Molinier arriva à la conclusion, quant à la
perspective de la révolution allemande que, contrairement à ce que
suppose le cam. Gourov3
dans sa lettre du 20 juillet, il n'y a aucune possibilité que la
révolution soit victorieuse avec la direction centriste de Thaelmann
et que la révolution allemande est, par conséquent, condamnée
d'avance à l'échec. Cela est d'autant plus sûr que, selon les
affirmations du c. H.Molinier4,
autre membre du groupe Treint-Molonier, le prolétariat français ne
fera rien pour venir en aide à la révolution allemande.
En
face de ces affirmations que le c. Trotsky qualifie, à juste titre,
dans ses derniers articles, de défaitistes et de liquidatrices, le
groupe juif exprima bien avant l'arrivée des articles du c. Trotsky
l'idée que la révolution allemande peut, même avec la mauvaise
direction, être victorieuse ; que le P.C.A. doit s'engager
dans le combat et adopter une position d'offensive contre le fascisme
et que le prolétariat mondial soutiendra de toutes ses forces la
Révolution allemande (voir procès-ver., interv. Emile).
C'est
pour combattre ces positions que la direction Treint-Molinier forgea,
par le procédé zinoviéviste bien connu du triste temps de la
bolchevisation du P.C.F. L'accusation contre le groupe Juif selon
laquelle ce groupe est liquidateur et doit être éliminé des rangs
de l'O. de G.
Les
positions treintistes envers le centrisme ont amené le groupe
Treint-Molinier à adopter une attitude dangereuse envers l'URSS,
attitude qui n'a rien à voir avec celle de l'Opp. Intern. De Gauche.
Dans les articles de la « Vérité » (N 105-106) le c.
Treint découvre avec une légèreté inqualifiable des « difficultés
en URSS » (difficultés du maïs, arrêt de 35% de l'industrie
textile, etc.) qui n'ont rien à voir avec les difficultés réelles
du plan quinquennal.
Le
groupe juif s'est opposé contre une telle manière fantaisiste de
critiquer la politique économique de l'URSS qui ne peut que
présenter l'Opposition de gauche devant les membres du parti et
devant les ouvriers sympathisants au communisme comme l'ennemi décidé
de l'URSS. En opposition aux appréciations de la situation en URSS
données par Treint-Molinier, les camarades du groupe juif ont
affirmé dans la discussion que notre devoir est de mettre en lumière
les succès de l'économie socialiste par rapport à la crise et au
chômage qui sévit dans le monde capitaliste ; ce que nous
devons critiquer c'est que les difficultés réelles de l'URSS et
particulièrement sont celles qui sont engendrées par les erreurs de
la direction centriste, sans inventer des difficultés imaginaires.
A
cette position du groupe juif dans la question de l'URSS, la
direction Treint-Molinier n'a su qu'opposer une accusation arbitraire
de « liquidation des positions de l'Oppos. de Gauche »
(voir résolution dans bull. Intérieur de la Ligue, décembre 1930).
Avec
l'entrée du C. Treint dans la Ligue et sans la direction, des idées
Urbahnsistes sur le Thermidor en URSS ont commencé à pénétrer
notre organisation. Le bavardage sur le « danger de Thermidor
en URSS » est devenu une importante préoccupation de la
direction Molinier-Treint tant sur les échéance sde la C.E. que
dans les réunions de la Ligue. Ce sont encore une fois les camarades
du groupe Juif qui, sur la base du projet de plate-forme russe du c.
Trotsky ont démontré la différence principielle entre le danger
thermidorien dont les chances ont diminué « grâce à la
destruction de l'aile droite du Parti et la renonciation à la
plate-forme » (Projet de plate-forme L.D.T.) et le danger
bonapartiste qui est facilité par l'étouffement du P.C. de l'URSS
et par l'affaiblissement de la vigilance et du contrôle des
organisations de masse sur la politique de l'Union Soviétique.
La
discussion qui se déroula dernièrement dans la Ligue révéla la
tentative du groupe Treint de faire revenir la Ligie française sur
les anciennes positions du groupe « Redressement communiste »
sur les questions internationales aussi bien que sur les questions
françaises. Ainsi, on essaie de faire pénétrer dans la Ligue cette
idée que la tactiqur adoptée par la Ligue, au début de sa
constitution, envers les autres groupements oppositionnels (groupe
Paz, 15e rayon et groupe Treint) était fausse et sectaire. D'après
les camarades treintistes, la Ligue aurait dû, en janvier 1930,
accepter la collaboration avec ces 3 groupements qui se réclamaient
de l'Opposition et adopter leur proposition dans le domaine syndical
(travailler dans le Comité pour l'Indépendance du Syndicalisme
(gr.Monatte) pour l'influencer dans notre sens).
Dans
sa lettre à Treint du 22 septembre le c. Trotsky dit :
« ensuite vous ne pouvez pas ne pas comprendre que toute l'opp.
Française et internationale sera dans les questions litigieuses
concernant le passé entièrement unanime contre vous ». Oui,
toute la Ligue et le groupe Juif le premier s'est élevé contre
cette tentative de Treint de réviser notre histoire et notre
politique. Seul le groupuscule sans principe Molinier-Frank a suivi
Treint même sur ce terrain de révision du passé de la Ligue en
condamnant l'attitude ferme de la Ligue envers le confusionnisme des
membres du 15e rayon, l'opportunisme du gr. Paz et l'esprit de
conciliation entre ces 2 groupes du c. Treint. L'expérience
malheureuse du groupe Treint « Redressement communiste »
qui n'a fait que discréditer l'Opposition de gauche en France doit
être un avertissement sérieux à tous les camarades zinoviévistes
de la direction Treint appuyée par le groupe Molinier-Frank.
Dans
sa lettre du 22 décembre le c. Trotsky s'exprime ainsi en ce qui
concerne le travail pratique de notre groupe parmi les ouvriers
juifs : « Mais cette fonction (propagande parmi les
ouvriers juifs) ce groupe ne le remplit presque pas ». Or, le
nombre des travaux que nous énumérons plus loin et que la Comm.
Intern. De Contrôle pourra vérifier facilement démontre que le
groupe juif s'est occupé en plus de la politique de la Ligue aussi
de son travail spécifique parmi les ouvriers juifs.
Nous
avons édité 9 numéros du journal « KLERIEJT »5,
sans appui matériel suffisant. La vente à la criée donnait un
résultat de 250 exemplaires par numéro à Paris, chiffre qui
dépasse celui de la vente à la criée de la « Vérité ».
Nous avons organisé un cours d'éducation politique qui a été
suivi par 40 à 60 ouvriers, chose que la Ligue n'a jamais réussi à
réaliser pour les ouvriers français.
Notre
travail sur le terrain de la propagande parmi les ouvriers juifs fût
interrompu pendant un certain temps à cause de la situation
intérieure de la Ligue. Les camarades les plus actifs de notre
groupe furent appelés par la force des choses à intervenir d'une
façon immédiate dans les crises intérieures aiguës de la Ligue.
Nous croyons que cette intervention fût indispensable, et, en ce qui
concerne la clarification des questions politiques de la Ligue, cette
intervention fût aussi profitable pour toute l'organisation.
Depuis
plusieurs semaines un nouveau travail parmi les ouvriers juifs a été
entrepris. A défaut de moyens financiers pour continuer l 'édition
de la Klorkeit », nous éditons chaque semaine 1 ou 2 tracts
tirés à la Ronéo (hectographie) et qui sont lus par des centaines
d'ouvriers communistes. Les camarades de notre groupe ont dirigé
avec succès la grève des tricoteurs qui nous a permis d'élargir
notre influence parmi les ouvriers communistes et sympathisants. Il
faut souligner que seuls les camarade juifs de la Ligue font
effectivement du travail syndical. Les deux commissions syndicales
dans lesquelles travaillent les camarades de la Ligue sont : 1)
la commission synd. Des tricoteurs et 2) la comm. Synd. des
casquettiers – toutes les deux comprenant des camarades du groupe
Juif. Aucun autre travail syndical ne se fait effectivement dans
la Ligue. On peut affirmer avec certitude que si les camarades de
la Ligue pouvaient renoncer à leurs luttes intestines et faire au
moins autant de travail pratique que le groupe juif, la Ligue se
trouverait dans une situation plus enviable que celle d'aujourd'hui.
Quant
à l'accusation que notre groupe « est devenu l'appui de deux
ou trois camarades... », nous ne pouvons que rappeler le fait
suivant d'une telle accusation, qui fût déjà lancée à propos
d'un camarade (Mill) qui aurait entraîné, paraît-il, tout le
groupe à écrire la lettre à Rosmer malgré la présence en ce
moment dans le groupe d'une minorité hostile à cette lettre, le
groupe juif, tout entier, vota une résolution dans laquelle
il fût établi que l'initiative de cette lettre est partie de
l'assemblée générale du groupe et que rejeter la responsabilité
de cette lettre sur un seul camarade c'est considérer tous les
militants comme des mannequins. Le niveau idéologique du groupe juif
est, du reste, assez (ilisible) pour mener une politique personnelle
pas d'humeur passagère.
En
ce qui concerne les blocs que le groupe juif aurait fait tantôt avec
l'un, tantôt avec l'autre groupe de la Ligue, voilà ce qui en est
en réalité :
- Le bloc avec Molinier-Frank. Ce n'est pas nous qui avons fait bloc avec eux, mais comme nous l'avons démontré plus haut, ce sont Molinier et Frank qui se sont accrochés aux positions politiques de notre groupe dans le seul but de s'emparer de la direction de la Ligue.
- Le bloc avec Naville. Pour démontrer l'inexistence de ce bloc nous ne pouvons que citer l'appréciation du c. Treint de la position du c. Naville dans la dernière discussion : « Les positions du c. Naville sont beaucoup plus proches des nôtres que celles du groupe juif ». Nous ne pouvons rien ajouter à cette appréciation, assez juste, du c. Treint. En effet le c. Naville reprend toute sa position négative dans le tournant du P.C.F.(« le tournant mène à l'opportunisme »). Il accentue encore davantage cette position hostile au Parti. Il qualifie notre attitude dans le tournant du PCF de 1930 de « conciliation envers le centrisme », sans comprendre qu'en appuyant sur ce qui était positif dans le tournant nous nous réconcilions avec la base du Parti et non avec sa direction. Cette erreur constante du c. Naville est, aujourd'hui, largement dépassée par la tendance du 2ème Parti du groupe Treint-Molinier, mais il ne reste pas moins vrai que la conception du centrisme du c. Naville est beaucoup plus proche de celle de Molinier que de la nôtre. Où est alors notre bloc avec Naville ?
- En ce qui concerne notre bloc avec Rosmer, nous rappelons encore une fois à tous les camarade sde l'Opposition internat. que le groupe juif demandait à Rosmer (alors membre de la Ligue) une entrevue pour préciser « dans la clarté politique indispensable » un plan d'activité pour sortir la Ligue de sa situation catastrophique où l'a amené la direction Molinier-Frank . Nous devons encore rappeler que la direction Molinier-Frank envoya, elle-même au groupe de Rosmer après la Conférence Nationale, donc après l'exclusion de Rosmer de la Ligue, une lettre où elle l'invitait à discuter ensemble les questions politiques litigieuses. Faut-il dire pour cela que la direction Molinier-Treint a fait bloc avec Rosmer ? Depuis quand n'est-il plus permis dans l'Opposition de discuter en camarade avec les membres de l'organisation qui ne sont pas d'accord à 100% avec la direction sans qu'on soit accusé, comme dans le Parti, de tous les péchés d'Israël et sans qu'on soit « classé » dans le bloc avec ces camarades ?
Le
groupe juif n'a jamais mené la lutte politique dans la Ligue autour
d'une personne quelconque. La lutte pour ou contre Molinier est
dépourvue de tout contenu politique. Le groupe juif s'oppose
vigoureusement aux oscillations sans principes de Molinier et il
s'opposera toujours à l'activité aventurière de sa direction.
Le
c. Trotsky donne toujours raison, sans réserve, au groupe Molinier
parce que ce groupe, paraît-il, fait le plus de travail pratique.
Nous espérons que la Comm. Int. De Contrôle pourra constater
facilement que le travail pratique de ce groupe donna beaucoup moins
de friots üar, o öes pivroers (?!?)français que le travail fait par
nous parmi les ouvriers juifs. Elle pourra même constater que le
travail du groupe Molinier était tout simplement néfaste par ses
résultats. Mais ce qui est indispensable pour éclaircir la
situation dans la Ligue c'est de se placer sur le terrain des
questions politiques.
Nous
considérons que le camarade Trotsky qui a toujours pris une part
très active dans la vie intérieure de la Ligue doit se prononcer
sur les questions politiques qui départagent aujourd'hui la Ligue.
Le
groupe Treint-Molinier conclut ses accusations contre nous par la
proposition « d'exclure messieurs les liquidateurs ».
Cette proposition est-elle approuvée par le cam. Trotsky ?
De
la réponse du cam. Trotsky à cette question dépend dans une large
mesure la normalisation de la vie de la Ligue ou l'amputation de
notre organisme du seul groupe ouvrier sain et homogène et l'abandon
de la Ligue à la gangrène la plus infecte qu'est la direction
Molinier-Treint.
Nous
attendons avec sérénité la réponse de toutes les sections
nationales et du camarade Trotsky.
LE
GROUPE JUIF DE LA LIGUE COMMUNISTE en
France
L'original
de cette lettre, envoyé au camarade Trotsky, est signé de tous les
membres du groupe juif.
NOTES
1Le
texte tapuscrit est truffé de fautes et de mauvais termes en
français.
2Le
groupe de Jean Prader.
3Pseudo
de Trotsky. Bilan se moqua : « Gourov s'est gouré pour
la période ».
4Frère
de Molinier tué lors de l'insurrection nationale de Paris, à
laquelle les trotskiens ont prêté leurs concours.
5Clarté.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire