"La suppression de la propriété privée... suppose, enfin, un processus universel d’appropriation qui repose nécessairement sur l’union universelle du prolétariat : elle suppose « une union obligatoirement universelle à son tour, de par le caractère du prolétariat lui-même » et une « révolution qui (...) développera le caractère universel du prolétariat ».
Marx (L'idéologie allemande)

«Devant le déchaînement du mal, les hommes, ne sachant que devenir,
cessèrent de respecter la loi divine ou humaine. »

Thucydide

mercredi 3 juillet 2024

LE RACISME DE CLASSE DE LA BOURGEOISIE


Les révélations des législatives pourries

« Ce sont des gens bien, du bon côté de la vie, et il s’agit d’en faire part à la France entière. On a le sentiment qu’il ne s’agit pas seulement de partager un avis réfléchi (aucune argumentation n’émane de leurs propos), ni d’émettre une opinion personnelle (qui n’intéresse qu’eux-mêmes), mais de se grandir moralement au point de se hisser directeurs de conscience et maîtres dans l’exercice d’exhortation. Ces prédicateurs de vertu se voient soudainement investis d’une mission : évangéliser la bonne parole. Car penser bien revient à penser comme eux ».

Julia de Funès


UNE CLASSE OUVRIERE RACISTE PARCE QU'ELLE VOTE POUR UN PARTI RACISTE ?

Le racisme existera probablement toujours. Il existe dans toutes les sociétés d'hier et d'aujourd'hui. L'accusation de racisme à tout bout de champ de nos jours est singulière car, d'une part, possède une fonction attrape-tout sans avoir à se justifier, mais surtout du point de vue la gauche bourgeoise remplace ou supplante un peu partie le qualificatif fasciste, passe-partout sérieusement élimé. Ce deuxième tour de piste de la comédie électorale fielleuse use et abuse du qualificatif. Je crois pourtant que tout le monde à un moment ou un autre peut être raciste , volontairement ou involontairement. Prenons mon cas. Si je vois un jeune français arabe qui double ma queue au supermarché je vais me dire instinctivement : encore une incivilité de musulman, puis rationnellement en retrouvant ma lucidité : encore un petit connard. Cela c'est dans la vie quotidienne, pas dans le charivari politique officiel où l'accusation de racisme tient plus de la morale que d'argument politique de fond.

La focalisation sur la notion de racisme n'est pas anodine, elle sert depuis des décennies à nier la lutte des classes au nom d'une morale humaine républicaine (décolonisée) qui dépasserait les couches sociales et qui, comme cette autre morale, l'écologie, constituerait une sorte de consensus moral universel, signifiant l'enfer pour celui qui émettrait des doutes sur la priorité de cette messe comparée au si grand nombre d'infamies du capitalisme. Comme je l'ai déjà dit dans mes récents articles, la réaction épidermique et odieuse des fractions de la gauche du capital alliées désormais sans honte à un parti présidentiel « antiraciste », expose au grand jour le mépris de classe qui fonde et encadre le cirque électoral ; comme l'a si bien résumé un journaliste sportif (?) : 12 millions de fils de pute ont voté Bardella !

Cette focalisation principale sur le racisme, comme tare politique numéro un, trouve ses racines dans la destruction pendant des décennies de toute nature et indépendance de classe du prolétariat par les successifs gouvernements de la gauche bourgeois, les idéologies féministes et écologistes qui ont fleuri post 1968, et les inventions des think tank inventés depuis les USA, financées par les plus grandes entreprises et grandes banques comme celle des Rothschild, comme on le rappellera plus loi. Ce n'est pas n'importe quel sociologue qui décrit le bouleversement mais l'Encyclopédia Universalis :

« Non seulement les organisations ouvrières ont perdu, en déclinant, leur socle sociologique ouvrier mais elles ont également abandonné cette marque dans leur discours. Les partis politiques ont cessé de faire de la classe ouvrière une cible prioritaire ; ils se sont tournés vers les chômeurs, les habitants des quartiers, les « sans ». Par conséquent, le débat public délaisse la question sociale au profit de « problèmes », comme l'« immigration » ou les « exclus », reflétant surtout les préoccupations des gouvernants et des experts.

Sans « nous » collectif, la classe ouvrière tend à être réduite à une simple donnée statistique. Elle perd la singularité idéologique dont elle était porteuse pour être appréhendée comme une catégorie socioprofessionnelle parmi d'autres, voire secondaire puisqu'elle est statistiquement en régression. La principale caractéristique contemporaine de la classe ouvrière est ainsi son invisibilité. Une invisibilité reproduite par les intéressés eux-mêmes puisque la revendication d'appartenance à la classe ouvrière est en nette diminution, surtout pour les jeunes, les salariés du privé et les individus les plus inscrits, familialement, dans les mondes ouvriers. L'évolution des dénominations indigènes est un signe de cette évolution : le terme « opérateur » déclasse progressivement celui d'ouvrier dans les propos des intéressés eux-mêmes, en particulier des jeunes ».

Difficile de ne pas reproduire la suite qui démontre que la classe ouvrière ne disparaît pas !

« Parallèlement à cet affaiblissement idéologique et subjectif de la classe ouvrière, la pertinence scientifique du concept de classe sociale est remise en question dans les années 1970-1980 alors même qu'il était auparavant une référence centrale. La notion d'individu a souvent remplacé celle de classe comme principale grille de lecture de la réalité sociale. Dominent alors des représentations d'un monde social atomisé, fonctionnant en réseaux et mobilisant des acteurs sociaux, où l'exclusion et non l'exploitation constitue l'enjeu social central. Or les situations d'invalidation sociale que l'on appelle exclusion correspondent à l'expérience collective de groupes ; la pauvreté d'assistance s'inscrit dans une continuité avec la précarité au travail. Plus généralement, de nombreux travaux soulignent aujourd'hui l'existence de fortes inégalités, du poids des contraintes liées à l'origine sociale et de la permanence de rapports de domination depuis la fin des années 1970. Les formes de mobilité sociale permises par la forte croissance de l'après-guerre se réduisent en temps de crise. Le phénomène dominant reste la reproduction sociale : derrière les changements affectant la condition ouvrière, la position des ouvriers reste celle de dominés au sein des différentes hiérarchies. Cependant on ne peut pas s'en tenir là au seul constat désabusé de « la fin des classes sociales » ou de l'essor de l'individualisme. Il faut aussi évoquer la fragilisation de la culture de classe qui résulte notamment des nouveaux modes de fonctionnement du travail et de la dispersion géographique du groupe ouvrier. Les clivages sociaux restent forts, simplement ils n'ont plus la même lisibilité[...] ».

Or rien n'étant automatique ni spontané, il faut se poser la question du pourquoi la bourgeoisie mondiale a créé un peu partout ces cercles de réflexion nommés think tanks qui essaimèrent un peu partout au cours des décennies suivantes. Répondons tout de suite : bien sûr du fait de l'inquiétude soulevée par la réapparition spectaculaire du prolétariat sur la scène mondiale à la fin des sixties.

On se souvient encore vaguement de ce think tank français Terra Nova qui dans son rapport de 2011 disait adieu aux ouvriers. En 2011, Terra Nova, présenté comme laboratoire d’idées proche du PS, fait paraître une note qui préconise de dire « adieu » aux ouvriers et employés afin de se tourner vers une nouvelle majorité électorale urbaine dans le but de (re)conquérir le pouvoir. Une décennie plus tard, le document charrie toujours un parfum de scandale, tandis que beaucoup y voient seulement la matrice originelle du macronisme, alors que de la gauche à l'extrême gauche ce révisionnisme avait depuis longtemps triomphé au profit des catégories féminisme, antiracisme, écologisme, immigrationnisme, wokisme, etc.

C’était une note de 82 pages sobrement intitulée : « Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ? » publiée le 10 mai 2011. Pour que la gauche l’emporte en 2012, ses signataires préconisaient de se tourner vers un nouvel électorat urbain comprenant « les diplômés »« les jeunes »« les minorités des quartiers populaires » et « les femmes ». Dans ce blog, je fais la remarque suivante en avril 2018 : Il est significatif que, à aucun moment, le rapport de Terra Nova ne s’interroge sur la responsabilité des partis de gauche, et singulièrement du PS, dans le désenchantement politique des classes populaires. Ce cercle, de type franc-mac, très obscur, attire alors des gens de tous les bords politiques de l'élite de la classe bourgeoise (y compris du RN) : Rocard, Cohn-Bendit, Mathilde Androuët (députée RN), Delanoë, des violeurs comme PPDA, et tant de personnages louches de la dite société civile.

La note présentait trois différents choix possibles de stratégie électorale. Dans le principal des trois choix possibles, était soulignée une « nouvelle coalition » électorale de gauche émergente : « la France de demain », jugée « plus jeune, plus diverse, plus féminisée » que les précédentes et « unifiée par des valeurs culturelles, progressistes ».  Mai 68 aurait causé « une première rupture entre la gauche et la classe ouvrière »  et entraîné la première vers un « libéralisme culturel », sans étayer cette affirmation, en soulignant que les derniers sondages d'opinion placaient le Front national en tête du vote ouvrier, catégorie jugée en « déclin démographique », d'où l'obsolescence d'un « discours politique de gauche ouvriériste », selon cette note, qui proposait de s'y adapter en mettant plutôt en valeur les jeunes, femmes et immigrés. En gros un résumé du programme girouette petit-bourgeois de la LCR qui se succédera avec le fémino-populiste NPA1.

Dans un premier temps c'est la stupeur, même chez les chefs de la gauche bourgeoise. Le strauss-kahnien Pierre Moscovici fustige une « erreur ontologique, éthique, politique, de renoncer à la classe ouvrière ». A droite, le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé fustige à son tour le « cynisme électoral », les « intérêts électoraux et de « marketing » des socialistes ; et le Front national  stigmatise leur "abandon des classes populaires". Lors de la campagne présidentielle 2012 qui suit, le lambertiste Jean-Luc Mélenchon 2 « réhabilite la classe ouvrière que le club Terra Nova voulait disqualifier hors du champ politique » en prétendant vouloir « la ramener en pleine lumière », souligne le journal L'Humanité » et son parti s'engageait à « fracasser Terra Nova ».

Mais c'est Terra Nova qui fracasse Mélenchon dans sa réponse, et que le comportement de la couleuvre Mélenchon vérifie aujourd'hui. Terra Nova répond lors de la présidentielle suivante que Mélenchon ne se livre en fait qu'à « une opération rituelle de purification » et que le changement de régime qu'il veut est empreint de « grossières contradictions, qui le rendent tout à la fois nébuleux et dangereux ». Plus tard, avec Hollande on y définira une « dimension arabo-orientale de la France »3.

La démographe Michèle Tribalat, vue comme une sorcière facho par la gauche du capital républicain, conteste l'affirmation comme nouvelle classe révolutionnaire de l'immigration, estimant que les populations immigrées sont en réalité conservatrices et difficilement prêtes « à accepter les gentilles réformes sociétales défendues par la gauche » notamment le "mariage pour tous". Sans compter que l'analyse de Terra Nova s'inscrit dans les luttes symboliques qui mobilisent les figures du « beauf » et du « bobo », le second apparaissant alors comme le « cœur de cible » de l’électorat visé par la fraction« sociale-libérale » du PS. La corruption successive des cliques de gauche et de droite a détruit toutes les vieilles illusions de générations d'électeurs de tout bord et surtout d'une masse d'ouvriers et d'employés croyant à l'éternité du réformisme de la reconstruction. Le prolétariat invisibilisé n'avait donc plus de parti ni de syndicat pour le représenter. Même son dernier coup de butoir en 1995 était miné.

Un affaiblissement du prolétariat déjà ficelé par le populisme en 1995

Bien avant le début des années 2000 des sociologues comme André Gorz avaient souligné les modifications dans le monde du travail, souligné la réduction des bleus face à la montée des cols blancs, mais généralement pour en théoriser une disparition de cette classe ouvrière, sans comprendre que cette masse de nouveaux cols blancs, en particulier en informatique, qu'on allait mystifier sous les termes de classes moyennes, restent aussi parties du prolétariat.

Il faut revenir sur le mouvement social de 1995 qui, contrairement à nos analyses (dans le CCI à l'époque) avait été sensé rivaliser avec mai 68. Le plan Juppé visait à aligner le régime des retraites et la couverture maladie des fonctionnaires sur les salariés du secteur privé. C'était un mouvement de défense de l'aristocratie ouvrière dont déjà les salariés du privé se sont trouvés exclus d'un conflit avant tout sectoriel (comme le sera aussi de manière plus voilée la sérénade sur les retraites). La prétention de cette majorité de salariés du public, défendant leurs intérêts propres, d'être des avant postes de toute la classe ouvrière apparut pour ce qu'elle étai aux autres travailleurs des PME : du pipeau. Ce sentiment d'abandon peut expliquer par la suite le mouvement décentré, périphérique et petit bourgeois individualiste des gilets jaunes.

A l'époque les Perrineau et Wieviorka qui virent très bien l'aspect sectoriel et non politique de la protestation (contrairement à nos minorités excitée par toute grosse démonstration) , mirent en avant l'absence de généralisation réelle, domination d'une forme de poujadisme syndical. Is rappelèrent qu'un vrai mouvement social ne peut se contenter d'en rester au niveau économique mais doit se placer au point de vue politique universel.

Le mouvement des gilets jaunes n'a pas autant d'intensité que le mouvement de 1995, malgré une couverture médiatique exagérée et sans véritable débat public politique. Son échec, surtout sous la violente répression et mutilations perverses des manifestants vont par contre donner des ailes aux populismes de droite et de gauche.

Comme pour toutes les autres questions (faits divers banalisés ou occultés, immigration, Europe, guerres) les électeurs (le peuple...)4 ont fait le choix, sans consignes, depuis des années de « voter contre » ; même si les hâbleurs magouilleurs des butés du front ne le reconnaîtront jamais, ce vote contre est le même dans les deux camps populistes de Bardella comme de Mélenchon ; c'est pourquoi l'alliance honteuse « front de pute » et putes macronistes risque de réserver des surprises...des électeurs de la clique à Mélenchon pouvant, de colère, voter Bardella lors du second tour de piste ce dimanche.

LES OUVRIERS FRANCAIS SONT-ILS DEVENUS DES FACHOS RACISTES ?

A part le CCI, hors sol, tout le monde sait qu'au moins la moitié des prolétaires, employés de bureaux, fonctionnaires, profs votent RN5. Plus de quatre ouvriers sur dix votaient hier Le Pen. Pas par adhésion à une quelconque idéologie nazie. Le célèbre et pertinent Jérôme Fourquet l'explique très bien comme le rapporte le très huppé OBS :.

Cette observation faite en fonction du niveau de diplôme a évidemment une traduction politique puisque les moins diplômés sont cantonnés, beaucoup plus qu'auparavant, dans les métiers les moins en vue et les moins bien payés. «Tout se passe, écrit Fourquet, comme si le parti lepéniste avait progressivement capitalisé sur le ressentiment et le sentiment de relégation culturelle et sociale des publics les moins diplômés au fur et à mesure que le niveau éducatif moyen était rehaussé.» Le résultat électoral de ce mouvement socio-culturel est l'augmentation considérable sur un peu plus de trente ans de la part des ouvriers et des employés votant pour le FN/RN.

QUAND L'HYSTERIQUE ANTIFA LIBERATION TENTE DE SE RAISONNER

« Un électeur sur trois a de nouveau voté pour un candidat RN ou allié pour ces législatives, soit presque deux fois plus que le record de 2022. Qui est-il ? Plus seulement un homme, ouvrier ou employé, peu diplômé et vivant dans un trou paumé : ce peut être une femme, gagnant bien sa vie après un bac + 3, urbaine et catholique pratiquante, détaille Brice Teinturier, le directeur général délégué d’Ipsos, sur la base d’une enquête réalisée avant le premier tour des législatives et baptisée «Sociologie des électorats». Mais pour le sondeur, «c’est aussi parce que la gauche s’est concentrée dans les grandes villes et les banlieues et a déserté» le rural que le RN a pris souche : il n’est fort que de la faiblesse de la gauche et de l’absence d’une offre politique adressée à l’électorat populaire.

Question à un nommé Peterzen : Pouvez-vous nous dresser le portrait-robot de l’électeur RN ?

« Il y a quelques années, c’était avant tout un ouvrier ou un employé, habitant moins le rural qu’une zone désindustrialisée, peu diplômé et globalement insatisfait de sa vie. Ce socle demeure mais il s’est élargi depuis deux ans. D’abord, toutes les classes d’âges sont concernées, les moins de 35 ans comme les retraités. Et ce ne sont plus seulement massivement des ouvriers ou des employés, mais également des professions intermédiaires, la classe moyenne. Un peu de cadres, beaucoup moins que la moyenne. (…) Depuis des années, le vote Rassemblement national se nourrit d’une colère sociale et identitaire et d’un sentiment de déclin, couplés à une xénophobie grandissante, sur fond d’un délétère confusionnisme entretenu par une droite au discours extrémisé et par des irresponsables politiques diabolisant la gauche radicale ».

Mais les analyses moins débilitantes des journalistes de la gauche du capital se concluent toujours par la damnation du pire :

« D’heure en heure, la France se colore de brun » hurle le journal de la gauche Neuilly-Passy l'OBS : « L’absence de réponses du gouvernement à la crise des « gilets jaunes », puis aux mobilisations contre la réforme des retraites, aux déserts médicaux et aux difficultés de l’hôpital public y a contribué. Et le NFP n’en a pas profité. Mais, dans une campagne éclair, difficile d’argumenter sur le fond pour tenter de séduire ces classes populaires qui ont fait défaut. Eviter le pire. Pour la majorité de nos concitoyens qui se refusent à voir leur pays gouverné par un parti d’extrême droite xénophobe et pro-Poutine, c’est désormais un impératif catégorique. Tout reste possible. Une cataclysmique consécration du lepénisme comme un sursaut républicain pour empêcher une régression populiste » Nota bene : l'OBS use du terme lepénisme pour résumer le programme du RN, ce qu'il ne peut pas être.

« Quelle est la taille des couleuvres qu’on doit être prêt à avaler ? » : le cas de conscience des diverses parties de la classe ouvrière en cas de victoire du RN?

Bien entendu nous ne sommes pas en 1940, et l’extrême droite d’aujourd’hui n’est qu'une droite populiste, pas spécialisée dans la défense des ouvriers, ou prétendue telle comme se l'arroge la gauche du capital écologique. Pourtant, sans doute au niveau des questionnements sur l'immigration incontrôlable, Parmi les ressorts qui ont conduit à ce que le vote RN [Rassemblement national] irrigue désormais l’ensemble des classes sociales, partant des classes populaires pour entraîner une partie significative des professions intermédiaires et cadres du public comme du privé, se trouve la question du travail : sa rémunération bien sûr, mais aussi sa perception, son intérêt, et ce sentiment qu’il perd de son sens, et même qu’il nous échappe.

La perte d'influence des bureaucraties syndicales montre le dégoût des encadreurs bureaucrates payés à rien foutre, mais aussi leur nullité politique et sociale qui espère se régénérer en se glissant dans les listes de la gauche du capital écologique. Cette impression de n’être plus compris ni défendu par personne dans l’entreprise alimente largement le sentiment de déclassement et de dépossession des salariés, et fonctionnera pour un long moment hélas comme un carburant du vote RN, promettant fallacieusement à tous les « citoyens-travailleurs » de reprendre le contrôle de leur vie ; vieillerie autogestionnaire creuse de la CFDT .dans les années 1970.

Néanmoins, deuxième aspect positif de la situation, après le freinage des va-t-en guerre Macron et Glucksmann, le peuple et les prolétaires ont renoncé à se sentir citoyens pour leur voter "un rien à foutre", sachant que les élections ne changent rien parce qu'elles sont truquées au final par les combinaisons d'appareil et ne changent rien en général à l'ordre existant. 

Laissons-nous piquer le slogan de 68 « le pouvoir est dans la rue ». Il ne faut jamais oublier les capacités d'adaptation des fractions de l'arc en ciel bourgeois. Naguère ils phagocytaient les termes socialisme et communisme, comme ils phagocytent aujourd'hui la notion d'internationalisme pour justifier leur immigrationnisme irresponsable. Après ce dimanche électoral qui leur fait un pied de nez, nul doute qu'ils vont encourager à nouveau des émeutes « dans la rue » qui font croire aux jeunes ignares bobos qu'ils font la révolution en brisant des vitrines et en insultant les flics. 

Dénoncer hystériquement et violemment (comme les rappeurs tarés) le nouvel Hitler Bardella c'est se mettre au service d'un système dominant considéré comme un moindre mal bourgeois et écolo mais aussi contribuer à le faire durer sur le dos des millions de prolétaires. Agitation débile avec pour seul but de brûler les voitures des « ouvriers racistes » !

La lutte de classe se déroule pour l'essentiel hors du carcan électoral et pas dans les émeutes. Si vous voulez plus de précisions, écrivez-moi.

A sa connerie Macron ajoute le chaos:

« Il ne s’agit plus tant de barrer la route de ce dernier par le fait majoritaire que d’organiser l’ingouvernabilité du pays, en empêchant le RN et ses alliés de disposer d’une majorité absolue, sans pour autant être en mesure de proposer une majorité alternative à cette hypothèse ».

ARNAUD BENEDETTI



NOTES



1cf. voir mon article de l'époque : « Comment le NPA a laissé tomber la défense de la classe ouvrière ».

2Le jeune Mélenchon fût formé dans le pire secte trotskiene, l'OCI lambertiste, secte macho,  aux méthodes violentes de type staliniennes, et sous un apparent rigorisme marxiste, opposée par exemple aux délires féministes de la secte LCR (voir mon histoire du trotskysme en 2002 : « les trotskiens » p48 et suivi ; aujourd'hui lambertiste et pabliste, Mélenchon et Besancenot s'embrassent sur la même tribune réactionnaire populiste !

3En 2010, j'écrivais ici : Quand la droite bourgeoise accuse la gauche d’avoir favorisé par ses laxismes la montée de l’intégrisme, elle oublie de rappeler qu’elle était au pouvoir lorsque ses patrons ont négocié avec les imams les premières salles de prière pour « fidéliser » ces prolétaires coupés de leurs racines et voués à cette vie morne « métro-café de l’usine-usine-dodo dans un meublé », qui tendaient à s’enfuir régulièrement. Ainsi, en 1979, est tolérée avec bienveillance la création de l’Association Islamique de Billancourt, qui obtient même des locaux municipaux pour ses réunions. Peu après, succédant à la droite patronale bienveillante, les technocrates de la gauche au pouvoir se rendent compte à leur tour que l’entreprise doit rester le lieu essentiel d’intégration, moyennant des concessions religieuses pour tenir les nouveaux principaux forçats d’un usinisme de plus en plus rejeté.

4PEUPLE UNE NOTION RETROGRADE? Avais-je rédigé au moment des gilets jaunes:

 Un journaliste a considéré que le président avait fait une erreur de parler du « peuple français ». En effet c'est une erreur pour la novlangue (ou un complot de gilets jaunes...), comme l'a affirmé dimanche Cohn-Bendit « les français ça n'existe plus » :  « Le terme "peuple français" est une abstraction dont l'imaginaire a été appauvri par des politiques européennes dont le sens échappe aujourd'hui à la plupart des millions de prolétaires en Europe. Les gilets jaunes ne sauraient se réduire à la somme de ses parties. Tout au plus, nous pourrions parler de "tribus de gilets jaunes ». Si les termes "gilets jaunes" n'ont jamais été prononcés par le Président de la République, comme pour nier leur existence, c'était surtout pour les noyer dans cette notion de peuple dont ils se réclament sans se rendre compte de la vacuité du terme. 

Le terme peuple peut être un fourre-tout, Marx l'emploie souvent, et pas péjorativement même quand il met en avant la spécificité du prolétariat Pour les marxistes bègues, peuple = nation. Archi faux. Nous ne sommes pas obligés, comme les gauchistes ignares et obéissants, de croire que la notion de peuple et de culture d'un peuple est forcément nationaliste. Des peuples ont une histoire précise, qui a plus pesé que d'autres dans l'histoire de l'humanité. Il y a, chacun avec leur apport, des peuples français, africain, allemand, italien, japonais, chinois, arabe, grec, dont seuls de fieffés staliniens ou incontinents mondialistes écologiques peuvent affirmer qu'ils se dissoudront dans une vaste entité universelle spongieuse. Les internationales du mouvement ouvrier n'ont jamais prétendu dissoudre les personnalités des peuples mais conduire l'émancipation universelle avec les mêmes méthodes de classe pour abattre le capitalisme. Le véritable internationalisme ne peut pas faire table rase des cultures ni prétendre en conserver les plus arriérées au nom du respect des “différences”.

L'internationalisme féodal, élitaire et multiculturaliste des Macron, Cohn-Bendit et autres coquins n'est qu'une bouillie de chat pour justifier le mépris des modes de vie des peuples réels et la fuite en avant d'un système aux abois qui ne peut même plus se sauver par le repli nationaliste ; mais où, dans la tempête, ces cuistres se rabattent à nouveau, parce qu'ils veulent contribuer à abuser les peuples par des concessions « populaires », sur la notion étroite de peuple et donc de la nation assiégée.

 


5Le corps enseignant a également été marqué par les menaces de mort proférées à l’encontre du proviseur du lycée Ravel, qui avait demandé à une élève de retirer son voile dans la cour en mars 2023. Par ailleurs, le nombre de contestations du contenu des enseignements est en hausse. La fonction publique aurait, le 30 juin, massivement voté pour l’extrême droite. D’après les données analysées pour le Cevipof par Luc Rouban, plus d’un tiers des agents interrogés comptaient donner leur voix au Rassemblement national (RN), au RN allié aux Républicains, ou à Reconquête : 34 % dans l’Etat, 35 % dans la territoriale et 38 % dans l’hospitalière (Acteurs publics, 27 juin 2024).

1 commentaire:

  1. « La lutte de classe se déroule pour l'essentiel hors du carcan électoral et pas dans les émeutes. Si vous voulez plus de précisions, écrivez-moi. »

    Je vous écris donc. Où se déroule, actuellement, et mettons depuis 50 ans, la lutte de classe selon vous ? Merci d'avance.

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