Supermarché
tu dois tout aux coopératives ouvrières !
NOTES
SUR LE MOUVEMENT DES COOPERATIVES OUVRIERES
(aux origines de la société de consommation moderne)
Le Mouvement coopératif
depuis ses balbutiements utopistes au début du XIXe siècle a posé
les jalons d'une alternative à la société bourgeoise, d'abord de
façon immédiate par des expériences locales visant à concrétiser
une solidarité populaire sans interférer sur la politique d'Etat ni
poser le problème du changement entier du fonctionnement de la
société. Les expériences des phalanstères et sociétés de
secours mutuel furent des tentatives qui jetèrent les bases de la
pensée socialiste.
Plus que le babouvisme,
les intellectuels de l'utopie ont permis l'accouchement de la classe
ouvrière (développer sur l'eschatologie millénariste et L'union
ouvrière de Flora Tristan (1842) et le Voyage en Icarie de Cabet
(1844, écarté par Marx comme « communiste grossier »)),
Agricol Perdiguier, etc.
Les théoriciens
socialistes du début du XIXe siècle, les Buchez, Pecqueur, Louis
Blanc, Prodhon préconisaient l'association coopérative de
production. En 1831 Philippe Buchez pensait résoudre la question
sociale par le développement de l'association de production, dont le
capital social, s'accroissant chaque année du cinquième des
bénéfices réalisés, serait inaliénable et appartiendrait à
l'association qui serait déclarée indissoluble.
Louis Blanc, dans son
« Organisation du travail », défendit aussi
l'association ouvrière de production, comme moyen de résoudre le
problème de la misère, mais il ne la croyait viable que si elle
était subventionnée par l'Etat.
Marx et Engels,
réagissant tardivement à ce mouvement, et encore eux-mêmes en
phase de maturation politique, le considérèrent d'abord d'un œil
positif avant de modifier radicalement leur point de vue. Déjà dans
le Manifeste de 1848, ils prenaient pour cible « la réalisation
expérimentale » des « utopies sociales » hors de
l'organisation de la production de la société.
La révolution de 1848
avait éclaté comme conséquence d'une crise économique grave
entraînant un chômage massif inattendu où apparaît la formule
« droit au travail », formule ambiguë face à la suite
du désespoir apparu lors de la fermeture des Ateliers nationaux.
Cette formule est vivement critiquée par les utopistes, et Mars la
prolonge : « Derrière le droit au travail, il y a le
pouvoir sur le capital, derrière le pouvoir sur le capital
l'appropriation des moyens de production, leur subordination à la
classe ouvrière associée, c'est à dire la suppression du capital,
du salariat et de leurs rapports réciproques ».
Sur l'héritage de
Saint-Simon, développer : Il y
eut au moins quatre familles, qui se sont développées après la
mort de Saint-Simon : la branche mystique et mystico -érotique des
disciples formant la communauté 14 de Ménilmontant, et qui évolua
ensuite en branche entrepreneuriale, où prit naissance la plus
grande partie des entrepreneurs de banque et de réseaux (navigation
maritime, canal de Suez, chemins de fer) du Second Empire et des
débuts de la IIIème République ; la postérité féministe, avec
Flora Tristan, Jeanne Deroin, Pauline Roland, plus proche de l'utopie
coopérative parce que ces militantes, dont le rôle important est
une caractéristique jamais renouvelée des années 1840-1850, ont eu
une influence décisive dans l'éclosion del'associationnisme ouvrier
sous toutes ses formes ; la branche socialiste, illustrée en
particulier par Pierre Leroux, le génial Leroux disait Marx à
Feuerbach en 1843, et Philippe Buchez et ses élèves ; à la
jointure de la 1ère
et de la 3ème , un
saint-simonisme échappant de justesse, après y avoir succombé, aux
extravagances de Ménilmontant sans pour autant se convertir au
capitalisme pur et dur...
Dans ses écrits du début
des années 1850, au moment où les associsations de producteurs
commencent à se multiplier, Marx présente ce mouvement comme l'une
des conséquences de la défaite de l'insurrection de juin 1848 :
« Pour une part, il
se jette dans des expériences doctrinaires, banques d'échange et
associations ouvrières, c'est à dire dans un mouvement où il
renonce à transformer le vieux monde, mais cherche tout au
contraire, à réaliser son affranchissement, pour ainsi dire, dans
le dos de la société, de façon privée, dans les milites de ses
conditions d'existence, et, par conséquent, échoue
nécessairement ».
En résumé, sans
renversement de la bourgeoisie, les formes coopératives de
production et de consommation sont vouées à l'échec, et pire,
menacent de détourner le prolétariat de la perspective fondamentale
de la prise du pouvoir. Marx s'attaque en fait déjà aux racines du
réformisme.
Marx modulera cependant
sa critique face à l'essor du mouvement coopératif dans les années
1850, car elles participent comme les premières trade unions à la
constitution du prolétariat en classe ; certaines sociétés
coopératives adhérant à l'AIT. Dans l'Adresse de 1864 il présente
l'expérience coopérative comme une preuve indéniable de la
capacité du prolétariat à supplanter la bourgeoisie :
« … il y avait en
réserve une victoire plus grande encore de l'économie politique du
travail sur l'économie politique du capital. Nous voulons parler du
mouvement coopératif et surtout des manufactures coopératives,
montées, avec bien des efforts et sans aide aucune, par quelques
bras audacieux. La valeur de ces expériences sociales ne saurait
être surfaite. Par des actions et non par des raisonnements, elles
ont prouvé que la production sur une grande échelle, et en accord
avec les exigences de la science moderne, peut marcher sans qu'une
classe de maîtres emploie une classe de « bras » ;
que les moyens de travail pour porter fruit n'ont pas besoin d'être
monopolisés pour la domination et l'exploitation du travailleur ;
et que le travail salarié, comme l'esclavage, comme le servage,
n'est qu'une forme transitoire destinée à disparaître devant les
travailleurs associés qui, eux, apporteront à leur tâche des bras
bien disposés, un esprit alerte, un cœur réjoui. En Angleterre les
graines du système coopératif ont été semées par Robert Owen.
Les travailleurs du continent ont tenté des expériences qui
donnaient une conclusion pratique à des théories qu'on n'a pas
inventées en 1848 mais qu'on a alors préconisées bien haut ».
Une résolution sur le travail coopératif va dans le même sens :
« Nous
reconnaissons le mouvement coopératif comme une des forces
transformatrices de la société présente, fondée sur l'antagonisme
de classes. Son grand mérite est de montrer pratiquement que le
système actuel de subordination du travail au capital, despotique et
paupérisateur, peut être supplanté par le système républicain de
l'association des producteurs libres et égaux ».
Le mouvement coopérateur
a alors une valeur démonstrative et une portée anticipatrice des
capacités de la classe ouvrière à régenter une autre société.
Ce salut au mouvement coopératif est cependant assorti d'une mise en
garde : « Il y a une autre chose que ces expériences
faites entre 1848 et 1864 ont établi sans doute possible : pour
excellente qu'elle soit dans ses principes, et si utile qu'elle
apparaisse dans la pratique, la coopération des travailleurs, si
elle reste circonscrite dans un cercle étroit, si quelques ouvriers
seulement font des efforts au petit bonheur et en leur particulier,
alors cette coopération ne sera jamais capable d'arrêter les
monopoles qui croissent en progression géométrique ; elle ne
sera pas capale de libérer les masses, ni même d'alléger de façon
perceptible le fardeau de leur misère (…) Donc, la grande tâche
des classes travailleuses, c'est de conquérir le pouvoir
politique ». La socialisation coopérative généralisée est
donc renvoyée après l'insurrection. Marx et Engels tirent à vue
sur faux radicaux les Proudhon, Buchez (et son journal l'Atelier) et
Lassalle. Il réplique à ce dernier en 1865 :
« l'aide aux
sociétés coopératives de la part du gouvernement royal prussien –
et quiconque est au courant des conditions de la Prusse en sait
d'avance l'insignifiance – est égale à zéro en tant que mesure
économique, cependant qu'elle aggrave le régime de tutelle,
corrompt une fraction de la classe ouvrière et émascule le
mouvement ouvrier ». C'est à cette occasion que Marx, dans sa
lettre à Schweitzer de février 1865, lance sa fameuse formule :
« l'honneur du parti ouvrier exige qu'il repousse de telles
chimères, avant que l'expérience n'en ait démontré l'inanité. La
classe ouvrière est révolutionnaire ou elle n'est rien ».
On n'est pourtant qu'au
tout début des capacités de l'économie bourgeoise à absorber des
échanges commerciaux artisanaux et dispersés avant de fondre cette
cacophonie dans le grand marché moderne qui portera le nom de
société de consommation et d'inventer cette catégorie massive de
petits sous-offs d'industrie et du commerce, les cadres (cf. le
système fouriériste « participationniste » qui opère
la transition de l'artisan et du plouc en cadre cravaté).
Ce mouvement de
coopération ne peut déboucher que sur des pratiques de secte, et
Marx est impitoyable en 1871 : « Les ouvriers veulent
instaurer les conditions de la production coopérative à l'échelle
de la société et tout d'abord à l'échelle nationale. Ce fait ne
signifie qu'une chose : les ouvriers travaillent au
bouleversement des conditions de production actuelles, elles n'ont de
valeur qu'autant qu'elles sont des créations autonomes des
travailleurs et ne sont protégées ni par le gouvernement ni par les
bourgeois ». Mais l'avenir n'est pas à la généralisation
d'une mosaïque d'entreprises autogérées (dont se moqua Bordiga)
mais à la mise en commun du travail et des richesses sans qu'ils ne
puissent plus appartenir à une classe ; Marx et Engels
utilisent le terme de nationalisation dans le sens de dépossession
et non pas dans celui chauvin et étriqué de la gauche bourgeoise
moderne :
« Transférer la
terre à des travailleurs agricoles associés, ce serait livrer toute
la société à une classe particulière de producteurs. La
nationalisation de la terre (c'est à dire la propriété du sol et
son affermage aux coopératives) opérera une transformation complète
des rapports entre le travail et le capital, et elle éliminera enfin
la production capitaliste dans l'industrie, aussi bien que dans
l'agriculture. C'est alors que seulement que les différences entre
les privilèges de classe disparaîtront, en même temps que la base
économique sur laquelle ils reposent, et la société se
transformera alors en une association de « producteurs ».C'est
une des leçons les plus méconnues que Marx tire de la Commune de
Paris :
« … ceux des
membres des classes dominantes qui sont assez intelligents pour
comprendre l'impossibilité de perpétuer le système actuel, - et
ils sont nombreux – sont devenus les apôtres importuns et bruyants
de production coopérative. Mais si la production coopérative ne
doit pas rester un leurre et un piège ; si elle doit évincer
le système capitaliste ; si l'ensemble des associations
coopératives doit régler la production nationale selon un plan
commun, la prenant ainsi sous sa propre direction et mettant fin à
l'anarchie constante et aux convulsions périodiques qui sont le
destin inéluctable de la production capitaliste, que serait-ce,
messieurs, sinon du communisme du très « possible »
communisme ? ».
Marx fait toujours
confiance à la spontanéité créatrice de la classe ouvrière et
récuse toute recette « pour les marmites de l'avenir ».
L'expérience des coopératives ne pouvait être qu'une des formes de
transition entre le mode de production capitaliste et le système
d'association des industriels bourgeois. Ses colères successives
visaient à récuser la précipitation à recommander la coopération
comme remède miracle sans renversement de l'Etat : « le
socialisme critico-utopique ne peut qu'émousser la lutte des
classes ».
Dans les Gloses marginales au programme du
Parti Ouvrier allemand, Marx fustige :
Après la « loi d'airain du salaire » de
Lassalle,
la panacée du prophète. D'une manière digne on « prépare
les voies ». On remplace la lutte des classes existante par une
formule creuse de journaliste : la « question sociale »
, à la « solution » de laquelle on « prépare
les voies ». Au lieu de découler du processus de transformation
révolutionnaire de la société, « l'organisation socialiste
de l'ensemble du travail résulte » de « l'aide de l'Etat »,
aide que l'Etat fournit aux coopératives de production que lui-même
(et non le travailleur) a « suscitées » . Croire qu'on peut
construire une société nouvelle au moyen de subventions de l'Etat
aussi facilement qu'on construit un nouveau chemin de fer, voilà qui
est bien digne de la présomption de Lassalle !
Par un reste de pudeur, on place « l'aide de
l'Etat »... sous le contrôle démocratique du « peuple des
travailleurs ».
Tout d'abord, le « peuple des travailleurs »,
en Allemagne, est composé en majorité de paysans et non de
prolétaires.
Ensuite, demokratisch est mis pour l'allemand
volksherrschaftlich. Mais alors que signifie le « contrôle
populaire et souverain (volksherrschaftliche Kontrolle) du
peuple des travailleurs » ? Et cela, plus précisément pour un
peuple de travailleurs qui, en sollicitant l'Etat de la sorte,
manifeste sa pleine conscience qu'il n'est ni au pouvoir, ni mûr
pour le pouvoir !
Quant à faire la critique de la recette [1]
que prescrivait Buchez [2]
sous Louis-Philippe par opposition aux socialistes français et que
reprirent les ouvriers réactionnaires de l'Atelier [3],
il est superflu de s'y arrêter. Aussi bien, le pire scandale
n'est-il pas que cette cure miraculeusement spécifique figure dans
le programme, mais que, somme toute, on abandonne le point de vue de
l'action de classe pour retourner à celui de l'action de secte.
Dire que les travailleurs veulent établir les
conditions de la production collective à l'échelle de la société
et, chez eux, pour commencer, à l'échelle nationale, cela signifie
seulement qu'ils travaillent au renversement des conditions de
production d'aujourd'hui; et cela n'a rien à voir avec la création
de sociétés coopératives subventionnées par l'Etat. Et pour ce
qui est des sociétés coopératives [4]
actuelles, elles n'ont de valeur qu'autant qu'elles sont des
créations indépendantes aux mains des travailleurs et qu'elles ne
sont protégées ni par les gouvernements, ni par les bourgeois ».
L'UTOPIE COOPERATIVE
BROUILLONNE ET SES VIES ULTERIEURES
Elle est à l'ordre du
jour de la plupart des congrès socialistes tant en France qu'en
Allemagne
(1876,1878, 1879... et aussi en 1910 à Magdebourg sur
lequel je développerai). En France Jules Guesde est très féroce
sur cette idéologie de la coopération : « la voie
mensongère de la coopération » opposé à Charles Gide et à
Jaurès dans son article La Dépêche de Toulouse (24 juillet 1900)
où il développe sa position centriste qui imagine possible la
fusion de la coopération et du socialisme (texte en annexe, Jaurès
à le verrerie ouvrière d'Albi, soutenu par l'ex-communard
réformiste Allemane). Les congrès du POF de Guesde condamnent la
coopération à partir de leur 3ème congrès (1879) ; en 1880
les coopérateurs dont scission.
Le congrès CGT d'Amiens,
c'est le syndicat qui doit être le cadre de production et de
répartition « base de la réorganisation sociale ». Le
syndicat révolutionnaire rejette l'utopie coopérative (mais dans
son inféodation ultérieure à l'Etat bourgeois, le syndicalisme en
gardera les « séquelles » : comités d'entreprise,
camps de vacances, cogestion de la SS, etc.).
Comme l'a écrit un
auteur, la Iie république « a commencé par institutionnaliser
la subversion ». Les hauts fonctionnaires ont tout fait pour
apporter une aide bienveillante aux coopératives, comme moyen de
détourner la classe ouvrière des « dangereuses séductions du
socialisme »... mais aussi comme instrument d'intégration ou
resocialisation en donnant parallèlement accès à une instruction
publique et la possibilité de grimper socialement, de promotion
individuelle, pour ce qui allait être nommé une dizaine d'années
plus tard les collaborateurs, puis après 1940, les cadres.
L'idéologie bourgeoise rattrapait ainsi les coopératives sur le
terrain de la gestion de l'entreprise.
(développer sur
l'entreprise rationnelle et l'utopie cléricale, jusqu'à l'idéologie
de l'entreprise participative)
Aboutissement de
l'idéologie consommationniste interclassiste dans les années 1920
avec Charles Gide et Bernard Lavergne.
Fin de la créativité
ouvrière ?
L'Almanach de la
coopération socialiste (1911) citer le nombre faramineux de
coopératives et l'argumentation clairement réformistes de leurs
tenants (rapport de Hans Muller au congrès iternational coopératif
de Zürich, extraits :
« A l'origine,
l'épicerie coopérative est incomplète, mais elle devient peu à
peu un magasin confortable muni de provisions de marchandises
considérables et variées. Puis elle se ramifie. La société ouvre
des succursales dans les différents quartiers de la localité, le
nombre des magasins qui viennent se grouper autour de son
administration centrale et de son entrepôt principal augmente
continuellement. Le petit commerce coopératif est devenu un grand
établissement de distribution des denrées alimentaires.
Mais là ne se borne pas
son extension. Aux denrées alimentaires viennent s'ajouter peu à
peu d'autres objets de première nécessité, pour lesquels il faut
créer bientôt des services spéciaux ayant leur administration et
leurs établissements propres. Ce sont les services des combustibles,
des chaussures, des eaux minérales, etc ., auxquels viennent
s'ajouter les boulangeries, les laiteries, les boucheries. Des
magasins spécaiux fournissent aux sociétaires les ustensiles de
ménage et de cuisine, et les vêtements. Cette extension
grandissante conduit parfois à la création de grands magasins
coopératifs, où le sociétaire peut aller s'approvisionner de
toutes les marchandises dont il a besoin, y compris les meubles, les
instruments de tous les genres et les articles de maroquinerie.
(…)
Plusieurs sociétés de
consommation (sic) ont même déjà dépassé le cercle d'activité
que nous venons de retracer, en s'intéressant à la question du
logement, afin de satisfaire dans ce domaine les besoins de leurs
membres. Ou bien elles construisent des habitations qu'elles gèrent
elles-mêmes, ou bien elles accordent des prêts à leurs membres
pour leur faciliter la construction d'habitations propres. Ainsi
quelques sociétés de consommation ont même entreprise la fondation
de nouvelles villes par la construction systématique d'habitations
sur un terrain plus vaste, en régie et avec la collaboration d'un
bureau d'architecture et de construction leur appartenant en propre.
(…)
Nous osons donc affirmer
que tous les efforts qui tendent à améliorer le régime alimentaire
et l'habitation des populations, à relever leurs conditions
matérielles, à cultiver leurs besoins intellectuels, à ennoblir
les moeurs et les habitudes, ont trouvé des champions dévoués dans
les Sociétés de consommation.
L'expérience a démontré
que leur activité est capable d'embrasser tout le domaine de la
civilisation, et qu'il n'existe pour ainsi dire plus aucun domaine
d'intérêt général auquel la Société de consommation ne soit
capable de collaborer. Il est donc complètement faux de dire que les
Sociétés de consommation ne sont que des associations coopératives
qui ont pour but de satisfaire l'estomac de leurs sociétaires à des
conditions un peu meilleur marché.
Il est vrai toutefois,
que beaucoup de Sociétés de consommation en sont encore toujours à
leur premier degré de développement, qu'elles se bornent à
exploiter les magasins d'épiceries ; et d'ailleurs, il n'est
pas permis non plus de méconnaitre que le mouvement coopératif de
consommation, pris dans son ensemble, n'est pas encore sorti de
l'enfance.
Bien que son histoire
soit vieille de 60 ans et même plus, la Coopération en est sans
contredit encore aux débuts de son développement. Elle n'a pas
encore atteint le point culminant de sa force et de son expansion,
pas même en Angleterre, ni en Ecosse, ni partout où elle est la
plus avancée.
(…)
Les adversaires de la
Coopération cherchent à amener sur le terrain de la politique, la
lutte qui s'est engagée autour des Sociétés de consommation. Aussi
sommes-nous obligés de les suivre.
Il ne peut donc y
avoir d'abstinence politique complète pour nous. Mais
il ne s'ensuit pas non plus que la Coopération de consommation doive
prendre le caractère d'une espèce de parti politique, se donner un
programme politique à elle. Il suffit pour qu'elle puisse prospérer
qu'on la laisse en paix et qu'on ne porte pas préjudice aux droits
civiques des consommateurs. (..) C'est dans ce sens que nous pouvons
dire de notre mouvement qu'il est au plus haut point un élément de
conservation de l'Etat.1
à suivre...
Où vous découvrirez ce
qu'était un « magasin de gros », des « syndicalistes
coopérateurs », les analyses du député belge Louis Bertrand
sur les ambiguïtés de la coopération, le 7e congrès des
coopératives allemandes et le travail des prisons, l'attachement des
chefs réformistes à la Coopération et la parfaite indifférence de
Rosa à ce genre de sujet.
1On
est en 1911 et avant cette débâcle, l'esprit ouvrier animait
encore par exemple la coopérative nommée « L'avenir du
prolétariat » en 1903 à Trélazé, rue de l'Union :
« Le magasin d'épicerie a été transformé et de nouveaux
rayons ont été établis, car nous tenons essentiellement à ce que
tous les camarades s'écartent complètement du commerçant. La
buvette a été également installée et les bénéfices qui en
découlent servent à alimenter les caisses de chômage et de
maladie ». (cf. Almanach de la Coopération socialiste,
illustré, 1911, imprimé par L'EMANCIPATRICE (imprimerie
communiste).
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