LA REVOLUTION POURRA-T-ELLE ETRE ENCORE D’ACTUALITE AVEC LE CERCLE PERSPECTIVES INTERNATIONALISTES ?
(La vision de cette réunion par Candide)
Je suis blonde aux yeux bleus et je m’appelle Candide. Moi, prolétaire, j’ai assisté pour la première fois de ma vie à une réunion de maximalistes à l’AGECA à Paris, rue de Charonne.
Arrivant en retard, je fus surprise de trouver une assemblée d’une vingtaine de personnes autour d’une table qui me firent penser d’abord à une réunion d’employés de bureaux ou de parents d’élèves, chacun parlant à tour de rôle.
Le sujet de la réunion portait sur l’analyse de la crise capitaliste, et, malgré quelques interventions centrées sur des questions de boutique sur l’importance de la baisse tendancielle de profit ou de l’analyse de la limitation des marchés capitalistes, la discussion s’orienta naturellement sur des questions plus politiques. Quelques plaisanteries, lancées à droite et à gauche comme dans une cour de collège, affaiblissaient la discussion alors que je m’attendais à un certain sérieux par rapport à la gravité des problèmes de la classe ouvrière. Je pense que les problèmes du prolétariat ne vont pas se résoudre avec des réunionites comme celle-ci. L’ensemble des personnes présentes révélait une certaine expérience militante et des connaissances intellectuelles dans les domaines économiques et politiques. Je m’attendais à une réunion où on allait mettre en avant des propositions pour la période après la révolution, dite de transition, et de plus dans un minimum de sérieux. Et on ne rit pas bêtement, merci.
Michel Olivier, pour un groupe nommé BIPR, s’exprime avec beaucoup de « je pense ». Je sens qu’il manque de conviction. La classe ouvrière est au niveau zéro pour lui. Beaucoup de banalités de sa part sur le fait que la classe ouvrière serait différente des années 1960. On n’est plus certes en mai 68, ce n’est plus le même monde, mais les ouvriers sont toujours dans la merde. Il n’y a rien de nouveau. Michel ne m’apporte rien de nouveau dans son discours. Il a tort, à mon avis, de voir l’émiettement des révolutionnaires comme un simple miroir du désarroi de la classe ouvrière.
M.Lavoine a fait une analyse érudite sur la question économique avec le souci de réunir les opposants au capitalisme. C’est dommage qu’il ne s’exprime pas avec plus de passion parce que ce qu’il disait était intéressant.
Jean-Louis Roche a défendu que l’on ne pouvait juger du niveau de conscience de la classe ouvrière sur ses seules grèves, l’expression de cette conscience se traduit dans le refus de suivre les grèves bidons et, d’autre part, les commentaires sur le web en particulier, contre les grèves fantômes, sont très critiques des votations et autres consultations citoyennes de la gauche bourgeoise.
Dans le même sens, Guy Sabatier contredit Michel Roger en définissant la diversité du prolétariat moderne, avec ses couleurs différentes, ses cultures différentes, avec pas forcément les mêmes luttes que dans les années 60 et 70, mais avec cette volonté indéniable de mettre en commun des expériences plus internationalistes dans le sens de renverser le système.
Un camarade hollandais, dont j’avais du mal à comprendre le français, parla avec passion de la gravité de la situation, de la nécessité de réagir, d’arrêter de discourir.
Cela ronronnait cependant. On passait d’une personne qui parle à une autre, il ne se passait rien, il n’y avait pas vraiment d’échange. Certains posaient des questions justes mais chacun restait centré sur son propre discours. Tout le monde écoutait attentivement mais pas avidement. Certains semblaient dormir ou se satisfaire de ce qui se disait. Guy Sabatier avait parlé justement du fait qu’il n’y aurait plus d’alternative au capitalisme, soulignant qu’on voyait se développer une psychose avec le danger de désespoir et de suicides (pas seulement d’ingénieurs mais aussi de chômeurs) parmi les prolétaires et aussi des massacres comme on l’a vu en Guinée.
Un professeur semble par après focaliser l’attention à la suite de Guy par son témoignage sur le problème social généraliste et éducatif dans sa corporation où il pensait dévoiler une vision des jeunes comme ne respectant plus rien. Son discours montrait, d’une façon peu originale, que les valeurs ont changé. Il nous témoigna qu’un étudiant lui avait répondu : « mais pourquoi il ne veut pas être patron celui-là? ». Le professeur voulait signifier que nous n’étions plus à la même époque que par le passé. Ce qui était, selon moi, parler à nouveau pour ne rien dire. Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac. Il n’y a pas que des abrutis dans la jeunesse. De même qu’il n’y a pas que des abrutis dans les prolétaires. C’est une façon de baisser les bras dans la société actuelle. Et cela ne me surprend pas de la part d’un enseignant.
Sans avoir le courage de nommer Jean-Louis Roche, Raoul Victor a commencé à se moquer de ceux qui insistent sur la nécessité de revisiter le passé par l’écrit en disant que ces gens passent leur temps à remuer la poussière. Et puis il a sorti des âneries sur le logiciel libre. Ce à quoi le représentant du CCI lui a fait la remarque que, derrière le logiciel libre, il y a des sociétés qui se font beaucoup d’argent. Dans le même sens, Guy Sabatier a cassé ce discours sur la soit disant révolution technologique, complètement hors propos. Il a fait rire la salle en évoquant des cas de pannes de fibre optique qui avaient nécessité une journée entière de réparation. Michel Olivier s’est aussi démarqué des bêtises de Raoul sur le sujet.
La discussion d’une façon générale, à travers le questionnement sur une insuffisance de leçons tirées de l’effondrement du faux communisme à l’Est, a porté son insistance sur la nécessité de parler à nouveau, ou de se pencher sur la théorie de la transformation de la société, singulièrement abandonnée depuis longtemps. Il est temps d’y venir au bout de deux heures de bla-bla… Je suis déçue de voir que les personnes présentes se contentent de discourir aussi longtemps chacune mais ne cherchent pas plutôt à faire des réunions pour proposer une alternative. J’ai l’impression que ces discussions sont vouées à avorter. Pour moi, le travail de réflexion, de lecture pour la connaissance des problèmes du prolétariat devrait se faire en amont de manière à avancer et d’être à même de proposer des plans d’action. Raoul Victor et ses toiles d’araignée se moquait des questions de fond ; lui aussi il ne proposait rien. Il était mal venu de critiquer tous ceux qui apportent par leur contribution écrite le rappel des leçons de l’histoire.
Contrairement à Jean-Louis Roche, je n’ai pas perçu les participants à cette réunion comme des éclopés, mais comme des gens sincères mais marqués par un manque certain de dynamisme qui laisse un mauvais présage pour la défense de la cause du prolétariat.
J’ai apprécié la prestation de Rose qui a su, à la fin de la réunion, faire un compte-rendu de l’ensemble de ce qui avait été dit. J’ai été surprise de sa remarque concernant la psychose dans la classe ouvrière qu’elle semblait ne pas avoir comprise à travers l’intervention sensée de Guy Sabatier. Mais Guy Sabatier c’est quoi cette psychose ? Et laissons de côté cette notion psychologique. Il n’y a pas de séparation d’intérêts entre prolétaires actifs et prolétaires exclus de la production. Il faut prendre en compte le sentiment d’isolement des chômeurs qui ne sont pas opposés aux travailleurs, ni individualistes. Apparement personne dans cette salle n’avait été au chômage, et ne se rendaient pas compte de l’isolement et de l’exclusion du chômeur qui ne fait plus partie d’aucun groupe « social » ; il n’est plus reconnu socialement ni par les syndicats ni par l’Etat ni par personne. Il reste dans sa merde. Il n’est pas un émeutier professionnel comme les gauchistes altermondialistes. Il est temps aujourd’hui d’inclure les chômeurs dans le combat des prolétaires actifs, de les associer aux réunions. Tous les partis politiques actuels sont pourris mais pourquoi n’en fondez-vous pas un autre pour tenir le langage de la vérité? Quand serez-vous prêts à agir ?
Candide
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