Eclats du dernier grand-papa du trotskisme français
http://lequenne.michel.free.fr/Telechargement/ContreRevolutionDansRevolution.pdf
« La prise du pouvoir par les maximalistes...
la masse des troupes maximalistes marche derrière Lénine et Trotsky
vers une seconde révolution ». Plékhanov à Sadoul
96 ans et toutes ses dents ! Jamais nous n'atteindrons une telle
longévité. Quelle verdeur ce Michel Lequenne ! Quel tonus !
Le moins connu mais toujours vivant des principaux personnages en
France de ce qui fût une internationale d'opérette, la IV e
symphonie … gauchiste « pabliste », vient nous offrir
un excellent panégyrique de la révolution d'Octobre, gratuit et
accessible sur le web. Merci Michel pour cet effort malgré les
critiques qui vont suivre. J'en recommande vivement la lecture.
L'écriture est claire. Les explications de l'empirisme inévitable
des gouvernants bolcheviques, compréhensible et tout à fait
honorable, font voler en éclats les tonnes de mensonges des
anti-bolcheviques primaires du faussaire « livre noir du
communisme ». Pas étonnant que Lequenne n'ait été publié ni
par Gallimard ni par les éditions Houria La Fabrique, caténaires
and Co. Mais que d'esquives et d'oublis!
« Contre-révolution dans la révolution », je n'aime pas
ce titre, bien qu'il soit subtil, trop subtil pour un trotskiste de
base NPA. Oui la contre-révolution n'est pas venue de l'extérieur
mais de l'intérieur ; et elle est venue aussi des immenses
couches paysannes contrairement à ce que pense l'interclassiste
Lequenne. Mais ce ne sont pas les trotskistes d'aujourd'hui ni même
pour la plupart ceux d'hier qui ont compris cela. Les trotskistes
première manière, pourtant encore à considérer comme véritables
révolutionnaires, ont toujours soutenu l'armée rouge, ce mythe
miteux1,
face à la contre-révolution extérieure. La bourgeoisie est rentrée
par la fenêtre sur cour. Pas de Thermidor mais un nouveau cheval de
Troie. Ce constat est venu des communistes de gauche, de Lénine
lui-même dans ses fulgurances sur ses diverses définitions
approximatives de l'Etat, si peu prolétarien. Ce qui rapproche le
théoricien trotskiste de son frère stalinien est donc bien de
gommer de l'histoire le courant maximaliste de la Hollande à
l'Italie qui dénonça, bien mieux que les intellos anars et les
libéraux bourgeois, la confusion de l'Etat et du parti, sans
confondre goulags staliniens et visée révolutionnaire universelle.
Lequenne, pourtant si cultivé et affable, fait semblant de ne pas
connaître ce qui reste pour tout sectateur trotskien une poubelle de
l'histoire : le gauchisme ultra-gauche, vrai maximalisme qui, de
Luxemburg à Bordiga a su dès le départ dénoncer les dérives
opportunistes qui allaient mener au stalinisme et à son bâtard, le
trotskisme, ce souteneur impavide du capitalisme d'Etat.
Lorsque j'avais été l'interviewer chez lui à Paris il y a près de
vingt ans, en 2001, pour la rédaction de mon ouvrage sur l'histoire
du trotskisme modernisé en France - « Les trotskiens » -
j'avais été frappé par la disponibilité et l'affabilité du
personnage, pas du tout du genre vieux comploteur trotskien à la
Lambert ni magouilleur syndicaliste NPA, ni sectaire vieux gardien du
temple. Un type très cultivé, mémoire crédible sur les avanies du
courant trotskiste depuis la guerre, bien que membre de l'école
«pabliste », courant éclectique girouette théorisant depuis
1945 tout ce qui bouge comme révolutionnaire, enfin courant notoire
le plus emblématique du caméléonisme trotskiste.
Son accroche pour susciter l'envie, comme aurait dit Johnny, de lire
une nouvelle mythologie à la sauce trotskienne, est de s'appuyer sur
de prétendues nouvelles révélations prétendant confirmer l'aspect
fallacieux et contre révolutionnaire de l'insurrection (anarchiste ?
Policière?) de 1921 à Cronstadt. On verra qu'il n'y a aucune
nouvelle révélation et que la question n'est pas tant dans le
déroulement de « l'erreur tragique » dans le massacre de
Cronstadt que dans la conception caduque de la « guerre
révolutionnaire » et dans l'identification du parti avec
l'Etat pas du tout prolétarien. Qu'on ne s'attende donc pas à une
critique du révisionnisme trotskiste moderne, ils sont tous restés,
toutes sectes confondues, incapables de justifier leur soutien
« critique » un siècle durant au stalinisme même si
celui-ci est tombé après un banal concert de rock.
LES OEILLERES TROTSKISTES INDELEBILES
Toute révolution passe par le parti, est intrinsèquement guidée
par le parti, n'existe pas sans parti, « l'absence du parti »
expliquerait tous les échecs selon le gourou Trotsky âgé. Lequenne
en rajoute sur la mythification du parti bolchevique : « il
était né trop tard ». Notre antique « pabliste »
n'a des yeux de Chimène au début que pour les soviets « ouvriers
et paysans », quoiqu'il soit plus circonspect ultérieurement
sur les desideratas hétérogènes voire contre révolutionnaire de
la masse paysanne. Lénine est encore présenté comme deus ex
machina : « Les bolchéviks sans Lénine restaient en
sectaires à la porte ». La revisitation de l'histoire de la
révolution d'Octobre se fait sur le mode de penser actuel du
gauchisme trotskien ; les bandes antisémites sont caractérisées
comme fascistes alors que le fascisme n'existe pas encore.
Ponctuellement des annotations sonnent justes contre une mythologie
anarchiste : « La faiblesse de la grève générale est
que les travailleurs y épuisent leurs ressources si elle ne dépasse
pas ses objectifs premiers dans l'insurrection ». Lénine joue
un rôle mineur en 1905 et, apparaît à plusieurs reprises en
décalage face à la réalité contrairement à Trotsky. A force de
vouloir exhiber Trotsky comme prima donna, Lequenne oublie d'analyser
ses contradictions et son incapacité, comparé à Lénine, à être
un véritable organisateur. Sa théorie de la révolution permanente
où le prolétariat est sensé accomplir, préventivement à ses
propres transformations socialistes, la finition des tâches
bourgeoises non réalisées, n'est pas confirmée par Octobre 17, ou
alors il faut comme certains bordiguistes la considérer comme une
révolution double, à la fois bourgeoise et prolétarienne. Cette
théorie fantasque servira surtout à justifier quarante ans plus
tard toutes les supercheries de la décolonisation impérialiste.
Lequenne, qui n'a jamais participé à un véritable débat dans la
gauche maximaliste européenne sur les exigences de la période de
transition, pratique l'esquive qui permet de passer à la trappe les
conceptions trotskistes opportunistes qui ont ouvert la voie aussi au
stalinisme. Il dit : « l'organisation spécifique de la
dictature du prolétariat c'est le soviet ». C'est pas vrai !
Pendant 50 ans staliniens comme trotskiens nous ont radoté que la
dictature est celle du parti.
La révolution ne peut se dérouler et éventuellement se renforcer
que par la dynamique de la classe et des conseils ouvriers plus que
des soviets (interclassistes). Les organes dont la révolution se
dote ne sont pas préalables à la lutte comme le veut la conception
trotskienne dégénérée, où chaque secte dispose de divers
fabricants de comités préliminaires pour « prendre la tête
des masses », ou prendre la tête aux masses... Certes, le
soviet, en Russie comme en Allemagne, n'est pas fiable car il est en
mutation constante. D'ailleurs, sans en tirer toutes les
conséquences, Lequenne note à plusieurs reprises que les soviets
sont à majorité paysanne ; cela ne gêne pas le vieux pabliste
qui dort encore en lui puisqu'il croit encore les paysans
révolutionnaires à l'égal de la classe ouvrière. Alors par dépit
il le caractérise de « faux soviet » ; non c'était
un vrai soviet représentatif des couches non exploiteuses de la
population mais plus confus que les conseils ouvriers et qui ne
pouvait que s'identifier à l'Etat transitoire.
Le parti en général est inexistant ou en retard, et même s'il
existe plus tôt il est si rempli de comitards et de manoeuvriers
qu'il ne peut que s'opposer à la dynamique révolutionnaire, comme
le montre la lourdeur du parti socialiste russe pourtant soit disant
aguerri par des années de clandestinité. La plupart des membres du
parti, pas encore nommé parti communiste, sont plus proches des
positions mencheviques conciliatrices, et Trotsky lui-même est
encore un menchevique non dénué de contradictions, que Lequenne
passe sous silence parce que les staliniens en ont rappelé quelques
unes à charge de revanche. Les mencheviques justifient encore la
guerre comme « défensive », dans le droit fil de
l'idéologie cramée de la « guerre révolutionnaire ».
Lequenne ne montre pas vraiment que les « Thèses d'Avril »
sont un coup de tonnerre, qui liquide en même temps la fable de la
théorie de la révolution permanente. Pas besoin d'en passer par une
république bourgeoise. La situation de double pouvoir a été très
courte. La fondation du bolchevisme comme « pédagogie
politique », ainsi que le note Lequenne n'est qu'une fleur de
rhétorique néo-stalinienne, qui accompagne tous les stages de
bourrage de crâne dits « écoles de formation au trotskisme ».
La révolution et la lutte de classe ne s'apprennent, elles se
vivent.
Je me rappelle les premières années de la fête de LO en France où
toutes les chapelles trotskistes glorifiaient un Lénine très
oecuménique, unitaire et antifasciste (?) évitant de se baser sur
les Thèses d'Avril, trop prolétariennes sans doute pour les papas
de nos bobos militants actuels. Lénine est en effet isolé et
conspué, Lequenne fait bien de le rappeler. Lequenne ne nous dit
rien sur les positions de Trotsky à ce moment et se contente de
boucher les trous en le citant comme auguste historien. Sur le fond
Lénine a compris que la révolution est en train de s'affirmer par
haine de la guerre, qui est l'aiguillon qui permet de démasquer la
plupart des partis qui se disent socialistes (l'utilisation des
termes droite et gauche ne rime à rien dans cette situation2).
Lénine comprend aussi que l'opposition croissante à la guerre ne
contient pas encore la volonté de renverser le pouvoir bourgeois.
Lénine a pu penser, comme le suppose Lequenne, que la révolution ne
pouvait pas être immédiatement prolétarienne face à la masse des
paysans, et nous assure que ce n'était pas le cas de Trotsky avec
son inénarrable « révolution permanente » en escalier.
Il semble bien que Trotsky ait vu plus nettement venir la révolution
prolétarienne mais elle ne confirma pas ses thèses3.
Lénine était possiblement moins dogmatique que Trotsky, très
surestimé comme personnalisation de la révolution où, nous apprend
avec stupeur Lequenne : « prolétaires et soldats
bolchevisaient la société » ; vision mythique très
trotskienne quand ce sont les masses qui « bolchevisaient »
le parti !
Lequenne nous entraîne dans son historique de la révolution en
montrant bien qu'elle n'est pas un dîner de gala ni un coup d'Etat,
ce que je partage complètement. Sur le putsch de Kornilov, notre ami
Lequenne opère à un nouveau gommage des interprétations courantes
des diverses chapelles trotskiennes. S'il décrit bien la réaction
immédiatement offensive des prolétaires et des soldats, il fait
silence sur la théorisation « front unitaire » du
courant trotskiste des 70 qui avait ainsi maquillé un épisode où
il ne s'est agi aucunement d'une alliance avec la bourgeoisie et son
Kerenski. Car la pression des masses était si forte qu'elle n'eût
pas besoin de coopérer ni de prendre des engagements avec l'aile
libérale bourgeoise.
Qu'on me permette aussi de douter de cette affirmation, non démontrée
ni référencée en note : « Trotsky n'en pensait pas
moins que le parti ne devait pas prendre le pouvoir lui-même »
(p.41). Pourquoi fût-il le principal chef du comité
insurrectionnel ? Pour le remettre ce pouvoir... à un parti
unique ?
Lequenne se plante pour une raison toute simple, comme ses congénères
il ne voit la révolution d'Octobre que comme un produit de
l'arriération de la société russe, alors qu'elle éclate dans un
contexte de guerre mondiale, totalement différent des conditions du
19 e siècle, et pose la question d'une révolution internationaliste
pas d'un socialisme dans un seul pays avec des étapes de
« révolution permanente ». Cette théorie ouvrait plutôt
la voie à l'impérialisme stalinien et à ses conquêtes déguisées
en « libération nationale » dont on sait les avatars et
que le courant « pabliste » feint d'avoir oublié en se
réfugiant dans un antiracisme très chrétien.
UNE « DIRECTION » MYTHIQUE BIENTOT DANS LA NASSE DU
POUVOIR
On n'en était qu'à l'introduction, passons au coeur du livre. Nous
restons d'accord sur un point avec Lequenne, ce ne fût pas un coup
d'Etat blanquiste. Le génie des Lénine et Trotsky est
incontestable, l'époque produisit naturellement de telles
personnalités à dimension mondiale et non pas simplement russe. Les
formules de Trotsky historien ne nous enchantent pas autant que cela,
après coup. Il raisonne trop souvent en général et contribue à la
mythification du parti avec son disciple Lequenne qui reprend des
formules carrément fausses : « En février, les
bolcheviks n'étaient encore que la direction de l'avant-garde du
prolétariat des grandes villes ». Il y aurait donc eu des
couches hiérarchiques successives : une direction, une
avant-garde, un prolétariat et des habitants des grandes villes ;
« les paysans fournissant l'essentiel des troupes ».
Lequenne croit déceler une fusion paysans-ouvriers ; encore un
fantasme « pabliste » ?
Lequenne je ne le conseillerais point s'il n'avait lui aussi des
fulgurances de vérité contre les mensonges des historiens de
gouvernement. Il démontre bien que les bolcheviques n'ont pas voulu
gouverner seuls, mais il se prend immédiatement les pieds dans le
tapis : « le parti unique au pouvoir c'est la sélection
par la claire (?) conséquence de la logique révolutionnaire » ;
si je croise Lequenne dan la rue il faudra qu'il m'explicite ce
charabia.
Voyons à présent comment Lequenne va se servir du chaos inévitable
pour justifier l'empirisme et les petites trahisons des gouvernants
bolcheviques. Tiens il s'aperçoit que les soviets des campagnes sont
très hétéroclites, composés de pillards, qu'au Front c'est la
débandade même si cela déplaît au général Trotsky, que les
fonctionnaires, ces fayots de l'ancien régime font de l'obstruction
permanente (mais pas la révolution en permanence).
Sur Brest Litovsk, comment Lequenne va-t-il sortir son épingle
(trotskiste) du jeu ? D'abord à l'aide d'une tautologie
trotskienne, qui confond guerre et révolution, révolution et
guerre : « Les bolchéviks avaient sous-estimé que la
guerre mondiale en elle-même représentait une grande victoire
contre le prolétariat ». C'est mal dit, si la guerre a lieu
c'est que le prolétariat est défait, mais comme la révolution
commence à un bout de l'Europe, on ne peut pas parler de défaite du
prolétariat. Mal débuté. Alors il va s'efforcer de ridiculiser les
communistes de gauche, des « puristes », sur une
« position gauchiste ». Il se méfie de leurs radotages
sur la guerre révolutionnaire4,
concédant que ses deux héros, Lénine et Trotsky, croyaient eux
aussi encore aux vertus de la guerre révolutionnaire néo-girondine ;
arrêtée momentanément lors du traité contraint de Brest, elle ne
connaîtrait qu'un répit de courte durée, et prolétaires et
paysans pourraient être renvoyés au casse-pipe généralisé.
Lequenne-Ho Chi Minh en profite pour tout mettre sur l'inaction du
prolétariat européen, qui, en effet, ne met pas crosse en l'air,
cajolé en Europe de l'Ouest dans les limbes d'une prétendue
victoire. Et puis, et ce n'est pas moindre pour un conservateur du
léninisme étatique, les conditions allemandes à Brest ne mettaient
pas en cause « la survie du régime soviétique ».
Lequenne ne remet pas en cause la théorie de la guerre
révolutionnaire pour étendre une révolution à coup de canon et de
massacres, mais je ne lui disputerai pas les arguments contre les
communistes de gauche qui étaient en effet puristes et
irresponsables, alors que leurs critiques aux camarades dans leur
gestion du nouvel Etat furent plus conséquentes.
Sur la mise en place de la terreur rouge (p.41) même si on
désapprouve un peu, Lequenne explique bien cette tragique nécessité
et ridiculise tous les historiens à gages qui n'incriminent que les
bolcheviques mais qui sont les premiers à s'associer aux campagnes
antiterroristes mensonges des actuels Etats capitalistes
sur-développés et surarmés.
Concernant l'affaire de Tsaritsyne, où le commandant Staline
s'illustra par sa cruauté contre les populations, Lequenne reste
flou et il est regrettable qu'il ne démontre pas plus la rectitude
de Trotsky contre les exactions de Koba, ni ne rappelle les
hésitations de Lénine à sanctionner.
Sur ladite révolution allemande, il n'y a rien de nouveau dans le
jardin trotskien, tous les échecs se résument à l'absence de
« direction » du parti (= crise de l'humanité) :
« Le groupe Spartacus n'avait pas l'implantation du parti
bolchevique ». Ah que l'implantation est fleurie quand elle est
trotskienne ! Surtout quand on se rappelle que le parti en
Russie à la veille de la révolution restait au trois quart
conciliateur menchevique et va-t-en guerre.
C'est sur le gênant débat sur la place des syndicats sous le nouvel
Etat « prolétarien » que Lequenne va tricher à nouveau.
Certes la révolution est isolée. On est en 1921, et il nous a dit
que la révolution avait dégénéré de 1924 à 1934, il nous faudra
revenir sur cette curieuse tranche. Lequenne esquive carrément
d'exposer vraiment la position du maréchal Trotsky (qui a pris du
galon pendant la guerre civile) : il faut militariser les
syndicats. Bon ne soyons pas honteux ni bégueule envers Trotsky, il
n'est pas sur ce point très éloigné de la position du courant
maximaliste pour qui il faut carrément supprimer des organes de
collaboration d'Etat, mais cela ne signifie point que dans la période
intermédiaire, entre capitalisme et communisme, il n'y aurait plus
besoin d'organismes de défense immédiate de la classe. Et que
l'expérience russe a montré de plus que l'Etat du coin, certes
autonome mais pas complètement du marché mondial, n'est pas
vraiment un ami des ouvriers. Lequenne nous dit que le propos de
Trotsky a été déformé par « une légende stalinienne »
(p.145), mais sans source de référence. Donc nulle et non avenue.
Le vrai problème est que le ministre maréchal Trotsky s'identifie à
un Etat qui a désormais des objectifs étrangers de plus en plus et
au quotidien des prolétaires et à l'avenir communiste. C'est cet
attachement national sentimental qui fonde son stupide « soutien
critique » éternel refilé à ses ouailles perroquets.
Le plus inquiétant n'est pas Trotsky, dont on peut comprendre la
confusion, mais Lequenne qui lui défend l'idée de syndicats
étatisés : « ils ne doivent pas s'opposer à l'Etat
« prolétarien » mais « devenir des organes
économiques de la grande production industrielle » (p.147). Il
est plus trotskien que le maître, c'est à dire bon néo-stalinien
conservateur du pays des soviets sans Tintin Lénine, et devrait nous
ébaubir à nouveau avec spoutniks et chiffres truqués de la
production industrielle cosaque. L'Opposition ouvrière, en défendant
l'autonomie syndicale, ne comprend que la moitié de la chose, et
n'en tire aucune réflexion subséquente : pourquoi y aurait-il
nécessité d'organes de défense des ouvriers à l'époque d'un Etat
bienveillant à l'égard de ces mêmes ouvriers, c'est donc que cet
Etat n'est pas un ami sincère ; et, par extension, si l'Etat
récuse l'existence d'organismes représentatifs des ouvriers c'est
qu'il serait en toutes circonstances le défenseur de la seule classe
ouvrière ! Or cela même est impossible comme la célèbre
définition historique de l'Etat par Engels le démontre.
La vérité de base du trotskysme est qu'il reste enfermé, via ses
derniers éléphants, dans une conception nationale stalinienne de la
période de transition. Les Lequenne, Krivine, Besancenot et Cie
n'ont jamais sérieusement discuté de leur vie de la période de
transition. Ils ne connaissent rien, sous leur armature de carnaval
trotskien, des débats dans la Gauche italienne (Bilan), la GCF
(internationalisme), le CCI (Révolution internationale) ni des
apports des Appel, Pannekoek et tant d'autres combattants anonymes du
but final.
À suivre...
NOTES
1Malgré
l'impasse de la « lutte armée » (tiers-mondiste) , qui
n'est condamnée au début des années 70 que par Gérard Filoche en
voie de social-pacification (cf. p.54 de mes « trotskiens »),
le dernier grand-père du trotskisme français montre à nouveau sa
foi en la « lutte armée » sans principes citant les
incongrus écrits militaires du ministre (capitaliste d'Etat) de la
guerre, Trotsky ; il fait le sale boulot de n'importe quel
général, fusiller les déserteurs, envoyer les milliers au
casse-pipe, etc. Nos actuels révolutionnaires en chambre qui
mythifient ce commandement militaire, comme révolutionnaire,
s'imaginent à l'avenir beaucoup plus comme officiers
révolutionnaire mais de l'arrière contrairement au spadassin à
l'avant ! Lequenne annoblit le général Trotsky : « D'une
masse vacillante et hésitante, sortit une véritable armée » !
Merci pour l'Etat capitaliste d'Etat ! La même armée qui,
deux décennies plus tard, sera sacrifiée par millions pour sauver
le capitalisme d'une destruction totale.²²²²²²²²²²²
2Ainsi
des « forces de droite » et des « masses à gauche
du parti »... on n'était pas sous le règne du gouvernement
d'union de la gauche mitterrandienne !
3En
page 41, un peu plus loin, Lequenne ne se rend pas compte qu'il
invalide la théorie de la révolution permanente puisque « la
bourgeoisie est incapable de réaliser la révolution
démocratique », et ce ne sont ni Lénine, ni Trotsky, ni
Staline qui la réaliseront la révolution démocratique !
4Lequenne
a dû lire mon livre sur cette fable ou ceux de Philippe Riviale.
Jean Louis Roche écrit des livres sur Trotsky, mais dégueule sur la théorie de la "Révolution permanente" dont il n'a toujours rien compris, comme un bon vieux stalinien.
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