Robert Michels fut un
élève de Max
Weber. Il s'installa en Italie, à Turin, où il continua de
militer au sein du parti socialiste. Il fut proche des idées du
syndicalisme
révolutionnaire et fut en contact avec Georges
Sorel et Hubert
Lagardelle ; il publiait des article sen leur compagnie dans
la revue française Mouvement socialiste.. Dans les années 1910, il
évolua vers la droite et finit par adhérer au fascisme.
. Le parlementarisme participe au processus d'oligarchisation
(spécialisation des tâches, commissions, etc.), rend le leader
indispensable, est routinier (le leader peut faire usage de ses
capacités techniques acquises). Le parlementarisme donne plus
d'opportunités au leader pour s'automatiser. La caste des leaders
(oligarchie) se clôt sur elle-même afin d'éviter l'apparition de
nouveaux leaders issus de la masse (trust oligarchique).
La seule chose que peuvent faire les masses c'est
de remplacer un leader par un autre. C'est pourquoi les leaders
maintiennent un lien avec les masses. Les vieux leaders font appel à
la discipline, ce qui réduit la liberté d'expression des masses.
« L'organisation est ce qui donne lieu à
la domination des élus sur les électeurs, des mandataires sur les
mandants, des délégués sur les délégants. Qui dit organisation,
dit oligarchie. »
La démocratie serait un meilleur système que le
système héréditaire pour la sélection d'oligarchies. En 1911,
Michels parle encore de la démocratie comme d'un moindre mal.
Si ce prof sociologue ultra-médaillé (voir sa
photo) pour services rendus à l'Etat borgeois, nous intéresse c'est
pour mieux comprendre comment à partir de prémisses justes, mais
hors classes, il est tombé dans l'idéologie fasciste.C'est
certainement après cette critique psychologique et très anarchiste
de la Iième Internationale et du soi-disant autoritarisme de Marx
qu'il a ...glissé par dépit, mais la critique de l'auguste SD
allemande est impitoyable, elle sera aussi un modèle pour le nazisme
et le stalinisme.
« Le témoignage le
plus irréfutable de la vitalité inépuisable du parti socialiste
allemand a été précisément ce fqit qu'il sut prendre, malgré
toutes les lois contre les socialistes, la direction du mouvement
ouvrier international ». C'est ainsi que s'exprime, non sans
raison, Franz Mehring, dans son histoire du parti socialiste
allemand. C'est la social-démocratie allemande qui,
presqu'exclusivement, pendant de longues années, a eu la direction
du socialisme international.
Déjà, l'ancienne
Internationale fut, dans un certain sens, dirigée par les
socialistes allemands. Il est vrai qu'à ce moment, le mouvement
socialiste en Allemagne n'était pas plus unitaire, plus ordonné,
plus clair au point de vue théorique, et n'en imposait pas plus que
le mouvement ouvrie de la plupart des autres pays. Il jouait, au
contraire, sous tous les rapports, un rôle beaucoup moins important
que les sections françaises, italiennes, suisses et belges ;
mais les grandes personnalités allemandes de Marx et Engels, non
seulement par leur science et par leur action, mais aussi par leur
énergie et leur autoritarisme, surent s'élever au-dessus de toutes
les autres personnalités socialistes allemandes et imposer dans le
Conseil Général la
prépondérance de l' « influence allemande », dont ils
étaient si fiers. Ils doivent être considérés comme les pères du
patriotisme social-démocrate allemand, c'est à dire de l'amour
passionné, même agressif, de la forme allemande du socialisme.
Cette prépondérance de l' influence allemande » - appelée
par l'indomptable amour-propre de Karl Marx « science
allemande » - devint bientôt l'objet des critiques et des
attaques de presque tous les partis socialistes non-allemands, qui
voyaient dans cette influence un orgueil anti-socialiste, une
intolérance et un despotisme dangereux ; et cela d'autant plus
que, par la concentration de tous les pouvoirs de l'Internationale
dans le Conseil général de Londres, qui n'était que Marx lui-même,
l'hégémonie prenait une forme légale. Le socialisme allemand
réussit finalement à mettre un terme à toute opposition contre
lui. On fit la vie amère aux Jurassiens, à Bakounine et à sa
faction italo-espagnole, si bien que les uns durent partir et les
autres furent expulsés. Peu de temps après, les disputes avec les
blanquistes français et les chefs du mouvement ouvrier anglais
prirent un caractère tellement violent, que le « socialisme
allemand » resta isolé : c'est alors qu'il se réfugia en
Amérique. Le Conseil général fut transféré à New York, et ainsi
disparût de la scène cette branche de l'Internationale. L'autre
branche, qui s'était constituée autour de Bakounine, végéta
encore quelque temps, pour mourir elle aussi, quelques années après.
Quatre
lustres durant, le socialisme international resta internationalement
inorganisé. Ce n'est que vers la fin de 1880, qu'on commença à
faire de timides essais pour établir des rapports plus intimes entre
les partis socialistes de tous les pays. Mais la Nouvelle
Internationale n'imita pas sa
devancière dans l'organisation qu'elle se donna. Adoptant le
principe d'Engels, que « les masses ne peuvent être mises en
branle que dans la voie qui correspond à chaque pays et à des
circonstances particulières » - une vois qui est assez souvent
un détour -, elle n'était plus une organisation qui ne tient pas
compte des frontières, des races et des traditions : elle ne
constituait plus une masse soumise à un salut unique et disciplinée
par un programme unitaire. Elle ressuscita sous forme de partis
nationaux, complètement autonomes, tant au point de vue de la
théorie qu'au point de vue de la tactique, et dont la vie commune se
réduisait principalement à l'organisation de congrès
internationaux. Bien que, par cette nouvelle forme d'organisation, la
dictature d'un Conseil général fut devenue impossible, et qu'au
congrès on ne votât plus par tête, mais par nation – d'où
l'impossibilité de la prépondérance d'une nation sur les autres –
toutefois, dans la Nouvelle Internationale aussi, le triomphe du
socialisme allemand, quoique sous une autre forme, était assuré. Il
est hors de doute que le parti socialiste allemand, grâce surtout à
sa forme d'organisation et d'esprit, servit de modèle à la plupart
des autres partis socialistes. Domela Nuiwenhuis n'hésite pas à
considérer, non sans reproche, les autres partis socialistes, dont
l'arme de lutte est le parlementarisme, comme les ramifications de la
social-démocratie allemande, comme des partis qui prennent pour
modèle le parti socialiste allemand, dont ils sont les succursales
qu'on ouvre et ferme à volonté. Oui, il est vrai que les partis
socialistes étrangers ont imité servilement le parti allemand. Oui,
il est vrai que le parti allemand a été considéré et adoré comme
une idole, dont la moindre critique constituait un crime de lèse
socialisme. En Autriche, en Italie, en Espagne, en Hongrie, la plante
allemande fut souvent greffée sur les arbres indigènes, avec
lesquels elle n'avait aucune parenté.
En
Hollande, c'est grâce à l'argent allemand que fut implantée la
forma allemande du parti (le parti social-démocrate actuel) et cela
contre la forme nationale (sociaal-demokratische Bond). Le respect
déjà grand pour la social-démocratie allemande s'accrut encore,
lorsque les lois d'exception furent abolies. Cette abolition des lois
d'exception fut représentée, dans l'exagération diplomatique,
comme une victoire éclatante dûe exclusivement à la puissance
extraordinaire du parti, qui avait vaincu la bête sauvage qu'était
Bismark. Au premier congrès qui eut lieu après l'abolition de ces
lois, du 12 au 18 octobre 1890, à Halle, les députés socialistes
des partis des autres pays avaient l'air de petits écoliers qui
présentaient leurs hommages au maître qui venait de créer une
œuvre immortelle. Le parti socialiste allemand l'emporta sur les
autres partis socialistes de l'Europe. Sa force morale était
tellement grande qu'il était sûr de la victoire, dans les Congrès,
même quand il s'agissait d'erreurs de tactique. Le social-démocrate
allemand joua partout, même dans les pays étrangers, le rôle de
professeur né du prolétariat. En Amérique, les allemands fondèrent
un parti propre, dont la tactique, selon un écrivain anarchiste,
était une imitation servile et ridicule de la social-démocratie
allemande, et dont la décadence, survenue, selon an autre écrivain
social-démocrate, à cause de son ridicule confusionnisme théorique,
de son arrogance et de son fanatisme pour Lassalle, a été un vrai
bonheur. C'étaient des caricatures involontaires, qui prouvaient
combien était grande la nécessité de reconnaître le parti
socialiste allemand comme maître et de l'égaler par tous les
moyens. La social-démocratie allemande a eu le sort de toutes
institutions allemandes après la guerre, de l'organisme militaire
comme de la structure étatique, de la législation comme de
l'enseignement, c'est à dire de servir de modèle aux institutions
analogues des autres pays.
Dans
le camp des adversaires du socialsme allemand, dans le socialisme
international, surtout parmi les anarchistes, ces « bêtes
noires » des historiens socialistes et les premières victimes
des « procédés » du parti dans les Congrès
internationaux, on expliqua cette prépondérance évidente par le
fait que la social-démocratie terrorisait les congrès
internationaux. Elle a été accusée d'avoir donné des mandats à
quelques éléments dociles de petites et très petites nations, et
de s'assurer ainsi les votes de ces pseudo-nations, qui, ne disant
toujours que oui, aidèrent ainsi la social-démocratie allemande à
remporter une victoire facile. On a dit qu'elle s'est emparée,
brutalement et par des intrigues, d'accord avec quelques amis de
France et de Russie, qui formaient « la famille Marx »,
de la présidence et des places de traducteurs, en en tirant profit,
d'une manière honteuse, pour leurs buts particuliers. Dans toutes
ces accusations, il y a un grain de vérité. Ce n'est pas en vain
qu'au Congrès de Londres, des hommes comme Edouard Vaillant et
Marcel Sembat, Keir Hardie et Bernard Shaw et E. Vandervelde, qui au
fond étaient de leur côté, s'élevèrent énergiquement contre la
prépondérance des allemands. Qui lit attentivement les lettres
d'Engels adressées à Sorge, ne peut pas ne pas remarquer la finesse
et la solidité des fils tissés pour maintenir au pouvoir la
« famille Marx », et la manière inouïe et arrogante
dont ils prétendaient avoir le droit moral à la direction de
l'Internationale. Cependant, malgré l'unanimité des critiques
socialistes sur la manière éhontée de la social-démocratie
allemande, et malgré la jsutesse de ces critiques, on ne peut pas
admettre que cela soit une explication suffisante de cette hégémonie
même. Au contraire, le fait que la social-démocratie allemande ait
réussi, même par des intrigues et des habiletés diplomatiques, à
s'empare de la direction réelle des Congrès internationaux, nous
détermine plus que jamais à en rechercher les véritables causes.
Par des intrigues seules, on ne peut pas dominer, pendant vingt-cinq
ans, un mouvement gigantesque. Donc, encore une fois : Quelles
sont les causes de l'hégémonie allemande dans le socialisme
international ?
Si
nous faisons abstraction de la littérature, inspirée par la haine
justifiée des anarchistes, qui, grâce à la social-démocratie, ont
été définitivement exclus de l'Internationale – et nous ne
parlons pas des individualistes, mais des autres, des socialistes
antiparlementaires – nous ne trouvons, dans toute la littérature
socialiste non allemande, que des hymnes de louange et d'admiration
pour le socialisme allemand. Même des hommes doués d'esprit
critique en parlent avec la plus grande considération. Bertrand
Russel en admirait son organisation magnifique et « master
piece of ingenuity and efficiency », Antonio Labriola son
enthousiasme conscient, Guglielmo Ferrero sa forte critique des
conditions présentes de l'Allemagne, Filippo Turati son énergie et
sa fermeté. Il n'y a pas une qualité qui contribue à la gloire
d'un parti politique, qui n'ait pas été attribuée à la
social-démocratie allemande par les hommes les plus autorisés. Même
l'hypercritique Arturo Labriola admirait sa tactique sincère dans la
question de la monarchie et déplorait que le parti socialiste
italien ne prit pas pour modèle le parti allemand. Presque jamais la
moindre critique dans ce choeur dithyrambique d'admirations !
Ainsi, par exemple, un critique italien, parlant du programme
agraire, qu'une fameuse commission avait présenté au parti
socialiste allemand à Breslau, et le considérant comme dépassé et
tout à fait réactionnaire, le justifiait pourtant en disant qu'un
grand parti a le droit, en face d'un adversaire résolu, de passer
sous silence la moitié de ses vues et de faire du vieux jeu
diplomatique. Même ces critiques bénignes ne sont que des
exceptions ; en général, l'admiration est sans réserve. IL ya
des ouvrages, qui nous charment comme le cantique des cantiques. Le
jaurésiste Edgard Milhaud, professeur d'économie politique à
l'université de Genève, a écrit presque 600 pages de louanges en
l'honneur du socialisme allemand, sans qu'il y ait la moindre
critique sérieuse. Cet ouvrage d'ailleurs de talent et de
persévérance, conclut par une apothéose, où il exprime la
conviction que, quels que soient les obstacles que le socialisme
allemand va rencontrer sur sa route, il saura toujours les surmonter
facilement !
Toutes
ces manifestations font preuve d'une absence absolue d'esprit
critique. Mais cela est de grande importance comme témoignage de
l'énorme considération que les socialistes étrangers avaient pour
la social-démocratie allemande.
À
suivre...
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