Si j’étais un électeur croyant en la bondieuserie électorale je serais content du succès populaire du loft socialisme. Comment ne pas avoir envie de voir disparaître au fond d’un conseil d’administration le candidat des riches, le meilleur client du Fouquet’s, le blaireau qui a ridiculisé l’onction présidentielle ? Cette droite bourgeoise si arrogante, qui affecte tant d’irritation et de jalousie feinte pour ces « primaires » qui avantageraient l’appareil PS et qui fait aboyer n’importe comment le nouveau chien de garde Copé, remplaçant du pauvre Lefebvre, et aussi minable.
Il est sûr que des primaires à droite sont inenvisageables, son altesse Sarko Ier face au nul Morin, à l’asperge Villepin, au plouc Bayrou, à la grosse Marine, et au pâle Fillon. Vous imaginez le loft UMP ? A crouler de rire. On aimerait bien pourtant. On verrait alors se déployer un concert de louanges pour le caïd des riches pour deux des candidats prêts à se racheter (ou à se revendre) et trois autres se défouler avec élégance contre le blaireau qui se mettrait à tiquer frénétiquement et à taper des pieds…
Mais revenons au loft socialiste qui touche à sa fin et nous fera subir à partir de dimanche prochain en pole position du bazar médiatique (et pour des mois) la « solidité tranquille » d’un gugusse à bobos ou d’une notable de gauche sponsorisé par une campagne de marketing politique repiquée aux italiens, au nom de la « démocratie ». Démystifions encore l’entourloupe. Ces « primaires » sont comme les élections syndicales, c’est d’abord l’appareil qui ne fournit que ses propres candidats au choix « populaire ». Ce choix qui prétend s’adresser à tous (la règle démocratique) concerne surtout les couches moyennes et salariées ; sous le découpage électoral réside toujours les diverses couches sociales. Plus fort encore, avec le discret soutien de la droite au pouvoir, l’organisation de ces élections « pour rire » utilisant les mêmes moyens (TV, radio, web,etc.) que des élections normales, révèle que ce sondage en réel n’est donc pas démocratique puisqu’il ne propose que le choix entre membres d’un même parti ; élections du genre brejnéviennes sauf que le nombre n’y est pas, leur principal promoteur, le rigolo Montebourg, espérait près de 5 millions de participants, il y en eût deux fois moins. On reste discret sur les moyens financiers utilisés en se cachant derrière la joyeuse trouvaille de faire payer 1 euro à chaque électeur (jamais personne n’avait encore osé faire payer la participation à ce jeu de dupes, encore bravo aux organisateurs qui devraient persister dans ce projet pour les «élections régulières ») !
LA GAUCHISATION DU PS A-T-ELLE ETE TERNIE PAR PILE ET FACE ?
Il est sûr que les deux blancs bonnets sentaient encore le formol et qu’ils ont œuvré pour le faire évaporer avec l’éventail montebourgien. Mais ce qui était le plus patent chez nos deux notables ennemis, le plus visible à l’œil nu, non pas d’un électeur bobo fumant son shit écolo, mais de tout ouvrier conscient, était la faculté de mentir et de mentir considérablement, avec la faculté de le faire savoir pour le plus malin des deux, le sieur Hollande. Tout en se retranchant sous un décor de chiffres, de souci de l’économique national et du social, Monsieur Pile poil a bien voulu concéder des gâteries aux forcenés du travail et un peu moins aux grands parasites sociaux – ce qui fait gauchiste rose comme son sourire yaourt – mais sous-entendu que la gauche benêt n’est pas majoritaire et qu’après il faudra bien « recentrer » car la victoire se gagne au centre en France comme toujours, sauf quand les couches moyennes (cadres et aristocraties syndicales) sont mal loties. Ce fût la seule vérité qui pouvait sourdre pour un observateur non aliéné à la religion électorale. Tout le reste ne fut qu’empilement de mensonges comme les poupées russes qui s’emboitent les unes dans les autres. Suite à la « bombe » de Royal l’après-midi, offrant son soutien entier à son ex, chacun et chacune rivalisa de dénégation de quelconques arrangements de cuisine (quand chacun sait que le moindre "soutien"vaut portefeuille ministériel). Valls et Baylet m’ont apporté leur soutien sans aucun arrangement assura Monsieur Pilepoil. Moi c’est pareil renchérit Madame Facepoivre, et d’ailleurs les amis d’Arnaud et de Ségolène peuvent aussi bien voter pour moi car ils auront, je ne saurais trop souligner ce trait, la première femme présidente en France… argument de poids pour les électeurs « pour rire » et qui paye en plus, avec cette prime la présidence de la jupe à la place du pantalon.
L’électeur est vraiment le roi des cons avec ces primaires. On lui offre six notables bourgeois sans les clés de leur programme de promesses. Il doit en éliminer cinq. Chacun des cinq lui indique ensuite qui il doit choisir au cas où il n’en voudrait plus aucun. Et l’heureux élu décidera ce qu’il voudra, fondé sur la légitimé médiatique que lui aura conféré l’électeur bêta, pourtant non encadré dans ledit parti de notables bourgeois.
Le plus drôle de ces discours primaires restera leur côté simpliste, malgré les chiffrages fantaisistes à la Sarko auxquels se livrèrent les deux énarchiens de garde de l’Etat bourgeois démocratique et vélocipédiste qui veulent combler la dette à leur manière ; pas loin pourtant de la même méthode du bandit Sarkozy qui chante le célèbre couplet « les caisses de l’Etat sont vides ». Sus aux banques est en effet le discours à la mode du plus grossier notable au plus poilu des « indignés ». Il suffira de les brider ces salopes, de les fouetter un peu pour qu’elles recrachent les niches fiscales. La réforme de la fiscalité fleurait l’argumentaire à la Jacques Mesrine : « faut prendre l’argent là où il est ». Madame Facepoivre sembla parfois appuyer la délinquance dans les chaumières avec une argumentation qui frisait le hold up étatique. Monsieur Pilepoil faisait frissonner dans les palais les très riches arcboutés, les malheureux, sur leurs niches fiscales. Pédantesques saltimbanques, jamais un parti social-démocrate n’a touché ni ne touchera aux banques puisque son programme n’est qu’un énième programme de sauvegarde du capitalisme financier !
Le plus beau mensonge concerne le prétendu retour à la retraite à 60 ans. Les deux arsouilles se sont fichus royalement du monde en insistant sur le départ des plus éclopés, ce qui ne les différencie pas des mesures que l’actuel gouvernement prend. Mais la théorie du « cas par cas » est la même que la droite, et l’électeur qui pense que la gauche défera que la droite a si bien réussi avec l’aide des syndicats est un double con. On a noté combien au passage l’élite socialiste voue un amour inconsidéré aux traîtres professionnels syndicaux (qui ont essuyé un énorme échec pour leur JA « ça suffit l’austérité », preuve que la classe ouvrière n’a pas pardonné leur complicité avec le gouvernement Sarkozy. Mme Facepoivre a tout de même laissé à comprendre que les syndicats préfèrent négocier avec la droite bourgeoisie plutôt qu’avec la gauche bourgeoise…
Le recentrage de la gauchisation « primaire » du PS, s’accentue ensuite avec l’enrobement du « zéro licenciement » cher aux notables gauchistes Melenchon et Montebourg. Monsieur Pilepoil et Madame Facepoivre assaisonnent cette réforme non de la funeste (et tant honnie par la droite) autorisation brejnévienne de licenciement, ni d’un appel à des grèves de solidarité mais d’une juridicisation des conflits sociaux. Vous serez licencié, mais vous aurez droit à un « référé » (justice immédiate). La gauche de retour au pouvoir va donc « rétablir la justice ». Vous y croyez vous à la justice de classe ?
Enfin, comme pour les questions de sécurité, l’angélisme qui va aider la gauche à rester dans l’opposition et conforter le FN à 20%, est incontestablement la promesse de refiler le droit de vote aux immigrés, qui outre que le pauvre électeur immigré sera aussi manipulé que son conjoint autochtone (dans le choix entre notables bourgeois), a l’art et la manière de hérisser une partie de la population française contre des travailleurs qui ne sont pas responsables des massacres des coptes en Egypte ni des tortures policières qui n’ont pas cessé en Tunisie, et qui ne sont pas des fascistes islamistes.
En résumé, avec une analyse simpliste de la crise capitaliste, des promesses toutes aussi mensongères les unes que les autres, un mépris total du prolétariat , la gauche bourgeoise non seulement joue de la flûte pour ramener les prolétaires aux urnes truquées mais surtout aggrave la division et l’atomisation des prolétaires en leur promettant « plus de justice » et des réformes institutionnelles de papier.
La gauche bourgeoise peut renvoyer Sarkozy à ses dîners de riches cons, et une immense majorité de la population le souhaite en effet, mais son accession au pouvoir serait plus dramatique et moins durable qu’en 1981, parce que la crise capitaliste ne plaisante pas avec les fausses promesses. Et la classe ouvrière non plus.
La dynamique du mensonge rose de Monsieur Pilepoil et Madame Facepoivre ne risque-t-elle pas de capoter dimanche prochain si les naïfs votards ont pris du recul face à la représentation scénarisée ? A la fin d’un loft spectacle on connait surtout le gagnant, mais les jeux sont faits pour les spectateurs qui n’ont rien gagné eux et peuvent toujours aller se faire voir chez les grecs.
LES CAISSES DE L’ETAT SONT VIDES !?
PAR RONNY
La question qui se pose est donc de savoir si les caisses de l’Etat sont vides, si l’Etat est en faillite ou si on impose cette vision des choses à nos concitoyens.
Dans ce cadre, il faut revenir sur ce qui rentre et ce qui sort du budget. Ce qui rentre, c’est essentiellement le résultat de l’imposition directe ou indirecte ; ce qui sort, c’est le coût de fonctionnement de l’Etat. S’il sort plus qu’il ne rentre, le budget est en déficit, et l’on emprunte pour boucler les budgets, opération génératrice d’une dette... Il se trouve que les budgets de la France n’ont presque jamais été équilibrés au cours des vingt dernières années. Ceci a conduit à un accroissement global de la dette nationale, dette qui reste quand même inférieure à celle des pays de l’Union européenne, et très inférieure à celle de l’Italie ou du Japon (3). Il est cependant nécessaire de réduire cette dette, car le montant des intérêts (le service) est élevé, représentant en 2005 à peu autant que le rapport de l’impôt sur le revenu, autour de 50 milliards d’euros. Le service de la dette était d’ailleurs en 2005 le deuxième poste budgétaire de l’État, après celui de l’Education nationale et avant celui de la Défense. Avec une dette réduite, le service se réduit, et les sommes dégagées peuvent être utilisées à d’autres fins, par exemple à des fins sociales, une utilisation en contradiction avec la vision libérale de l’économie qui prévaut. En relation avec ceci, il est remarquable de constater que sur les quinze dernières années, la dette s’est généralement accrue sous des gouvernements de droite, et réduit ou stabilisée sous des gouvernements de gauche (4).
Il y a, de plus, de multiples façons de comptabiliser la dette, en valeur absolue, par rapport au PIB, et en tenant compte ou non de actifs de l’Etat, de ses immobilisations mobilières et immobilières. Un économiste de l’OCDE a réintroduit ces critères dans les calculs de dettes. Si l’on inclut les actifs (valeurs mobilières) de l’Etat tel que l’on devrait le faire dans un bilan, la dette tombe à 38,2 % du PIB seulement. Et, si sont prises en compte les valeurs immobilières (terrains, bâtiments), nous disposons alors d’un crédit représentant presque 38 % du PIB (5) ! Peut-être serait-il possible de céder certains de ces actifs (alors qu’il aurait fallu en conserver d’autres, tels EDF ou GDF) pour rembourser une partie de la dette... Tout cela démontre en tout cas qu’il faut être prudent en manipulant les chiffres et que la dette française, qui gagnerait à être réduite, n’est probablement pas le monstre que d’aucun ont voulu nous présenter (6). Signalons pour conforter ce point de vue que l’agence de notation financière Standard and Poor’s précise que, bien que la dette publique française se soit dégradée, l’assurance de paye et de recouvrement restait très solide, notée AAA, meilleure notation existante sur une échelle à 22 échelons.
Si l’on regarde du côté des recettes, on constatera que des disparités existent. Globalement, les contributions directes sont peu élevées, en revanche, les impôts indirects, souvent plus injustes (TVA, TIPP), le sont. On pourrait s’intéresser aussi aux niches fiscales multiples qui existent. Citons, par exemple, les faibles cotisations liées aux parachutes dorés et autres stocks options, ainsi que les « cadeaux fiscaux » faits au début du mandat de l’actuel président de la République à des concitoyens qui - dans leur très grande majorité - n’en n’avaient pas vraiment besoin. Coût pour la collectivité : 15 milliards d’euros, et utilité économique proche de zéro. Toujours en matière de recettes, il est intéressant de regarder le refus constant de taxer plus lourdement les transactions et les revenus financiers (7), idée qui fait se dresser les cheveux du libéral de base. On pourrait pourtant générer sur les seules transactions de 5 à 15 milliards d’euros en années pleines, avec un taux d’imposition très faible (0,5 %).
On pourrait aussi regarder de près le cas particulier des aides publiques aux entreprises. En 2006, un rapport de l’Inspection générale des finances, de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale de l’administration avaient remis au Premier ministre un rapport sur les aides publiques aux entreprises. Leur montant est estimé à 65 milliards d’euros. Citons des extraits très éclairants de ce rapport : « L’extraordinaire profusion des dispositifs ne permet pas aujourd’hui d’en cerner les interférences et les effets non escomptés... En conséquence, ce sont parfois les entreprises qui choisissent l’utilisation relative des aides qui leur sont destinées, réalisant ainsi de facto la régulation du système... Au total, le constat est largement partagé d’une situation très confuse, mal cernée et d’une absence quasi complète de régulation. Nombreux sont les rapports bien pensés et solidement documentés sur ce sujet sans qu’il en ait été tiré toutes les conséquences souhaitables » (8). Parmi ces rapports, celui de la Cour des comptes en 2004 évoquait un « dispositif incontrôlé », au coût « très élevé » et « à l’efficacité trop incertaine pour qu’on ne s’interroge pas sur la pérennité et l’ampleur du dispositif ». En terme choisi, les 65 milliards n’ont eu aucune utilité économique marquée.
L’argent a-t-il été perdu pour tout le monde ? Non, car 91 % des aides vont aux grandes entreprises, notamment celles qui font partie du Cac 40 et qui ont battu tous les records de profits et de valorisation boursière en 2006. Autant dire que les PME n’en voient que très peu la couleur. Pourtant globalement en France, les PME sont créatrices d’emplois alors que les grandes entreprises internationales sont destructrices d’emplois. On peut donc effectivement s’interroger avec la Cour des comptes sur « l’efficacité trop incertaine » de ces aides publiques.
Dans une société où les entreprises n’hésitent plus à proposer des reclassements au Brésil ou en Roumaine à leurs salariés tout en leur « offrant » un revenu divisé par quatre ou cinq, à un moment où le gouvernement s’apprête à supprimer les allocations chômage aux demandeurs d’emploi qui auraient refusé par deux fois des propositions leur faisant perdre jusqu’à 30 % de leur revenus et les éloignant à deux heures aller-retour de leur domicile, on peut se demander combien pourrait-on payer de salaires avec ces 64 milliards d’euros ? Le calcul est simple : avec 64 milliards, on peut financer plus d’un million et demi de salaires et leurs charges (1 700 euros nets /mois) et donc autant d’emplois (8).
On peut également rembourser la dette progressivement, avec une efficacité économique et sociale réelle... Rappelons à cet égard que 65 % des détenteurs de la dette de notre pays sont des résidents français qui « en profitent » via des entreprises d’assurances, des Sicav obligataires, des banques françaises... C’est par l’intermédiaire des dividendes versés aux souscripteurs, aux actionnaires des banques et des compagnies d’assurances, ou par les produits d’épargne émis par ces organismes que la couche la plus favorisée de la population s’enrichit (6). Visiblement, tout le monde n’a pas intérêt à voir cette dette disparaître...
Les caisses de l’Etat ne sont donc pas vides ! Simplement pour des motifs idéologiques, on affecte tout d’abord les « trop-pleins » à ceux qui en ont le moins besoin, ensuite on ne les remplit pas à la hauteur voulue et, enfin, on nous les présente comme vides...
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Notes et références
(1) Ces déclarations sont toutes disponibles sur la toile, via votre moteur de recherche préféré.
(2) Voir l’excellent papier du Monde diplomatique « Quand la droite américaine pensait l’impensable », de Serge Halimi (2002) et la définition précise sur Wikipedia.
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