Il faut se rendre compte de l'originalité et de l'intérêt
d'une telle démarche en nos temps de désarroi et de dégoût du politique,
évidemment pour ce qui nous concerne, c'est à dire l'approche et la conscience
de l'utilité des cercles et groupes qui se réclament d'une classe ouvrière
révolutionnaire et portent l'exigence ancienne et obstinée d'une nécessaire
révolution prolétarienne contre l'ordre existant. Pas d'à priori, pas de
menaces terroristes dans l'affirmation des opinions, pas d'anathèmes
précipités, pas de morale gauchiste comme argument politique, tous ces éléments
concourent à oxygéner n'importe quel débat
pour éclaircir la conscience de classe, et ainsi échapper à la chape de
plomb des médias et de la plupart des groupes politiques officiels. Il n'est
pas étonnant qu'une telle démarche soit issue de camarades venus de Lutte
Ouvrière, groupe trotskien léniniste le plus éloigné des modes gauchistes,
secte hermétique à leurs modes confusionnistes de type antiracisme,
antifascisme de pacotille et luttes « libératrices » des diverses
catégories sociologiques. Le genre a toutefois ses limites comme on le verra
dans ma tentative de résumé, objective et subjective, de cette étonnante
réunion ; il est incontestable que nombre de ces camarades passé à la
moulinette trotskienne durant des années conservent des réflexes de pensée que
je dirai de type caméléon (on s'adapte en fonction de la radicalité de
l'intervenant) donc opportuniste, ce qui signifie qu'ils font partie, eux, tout
de même du combat révolutionnaire au sein du prolétariat.
Après un tour de table, trois sujets furent choisis pour
rythmer notre journée de débats :
–
la situation internationale
–
bilan des luttes sociales en France
–
la question de la laïcité.
Je fus choisi comme président de séance, moi qui me considère
plutôt comme un yéti, mais j'ai su habilement me délester de cette tâche
ingrate en cours de journée, pour la refiler à la jeune garde montante
canadienne.
LA GUERRE EST-ELLE LA CAUSE PREMIERE DE LA CRISE DES
MIGRANTS ?
Ma présentation de la situation internationale fût centrée
sur la question de la guerre et des migrants. J'ai dit que l'essentiel pour
comprendre le moment de la propagande d'Etat était la phase de négociation pour
le partage des champs pétroliers entre Obama et Poutine, sur le dos de l'Europe
qui se débat avec le merdier de la crise des migrants. J'ai à ce titre salué le
titre du tract de Voix des travailleurs : « Ils brandissent les
migrants pour nous tromper »[1].
J'ai ensuite développé ce que je dis sur mon blog concernant
l'utilisation des migrants (même si cela n'eût pas l'air de plaire à tout le
monde), le fait qu'il y a un grand nombre de bobos parmi eux, que la bande à
Merkel a été irresponsable de prétendre les accueillir massivement, que c'est
la dénonciation de l'impéritie des gestionnaires capitalistes qui prévaut plus
que de se soumettre aux diverses opérations de charité publique.
Evoquant les toutes proches élections en Grèce, je me suis
attaché à souligner que la soit disante compétition gauchiste pour prendre le
pouvoir, avait trouvé là son épilogue ; pendant 50 ans les gauchistes en
pointe (les trotskiens puis souteneurs de Syriza) nous avaient raconté qu'on
allait voir ce qu'on allait voir (leur fond de commerce restant le capitalisme
d'Etat et ses nationalisations), mais une fois au pouvoir tout se dégonfle, ils
ne peuvent tenir aucune promesse sérieuse, à part échelonner les dettes des
pauvres ou comme dans le programme adjacent de Varoufakis proposer des bons de
nourriture aux pauvres, c'est à dire un programme de malnutrition de guerre. Le
parti Syriza aura servi à illusionner quelques mois le prolétariat grec (très
fractionné et divisé, avec une majorité d'immigrés qui se tapent le sale
boulot) avant retour à la case départ.
La discussion s'engagea avec une contestation de la guerre
comme causalité première de la crise des migrants de la part des camarades de
VDT (Voix des travailleurs) [2].
En premier lieu, Robert Paris remarqua que la planète connaissait la guerre
partout depuis longtemps. Partout la bourgeoisie s'efforce de mobiliser
nationalement. Il a évoqué le Patriot Act, puis il a développé ce qu'il estime
être dialectique, une confrontation permanente de la bourgeoisie et du
prolétariat dans chacun des événements marquants de ces dernières années. Ainsi
lorsque Saddam Hussein fût en passe d'être renversé, c'était parce que le
prolétariat en Irak étant dans une situation potentiellement révolutionnaire.
On avait assisté au début des troubles en Syrie, c'était comme partout ailleurs
dans les soulèvements du « printemps arabe », à des manifestations
ouvrières pacifistes de masse. Par conséquent si on ne voit pas en permanence
les orientations de la bourgeoisie dans chacun de ses engagements comme un
combat contre le prolétariat, on n'est pas marxiste. N'y a-t-il pas des
contradictions au sein de chaque classe ? De même il n'y a pas de
séparation entre la lutte de classe, la guerre et les migrants. L'ouverture
soudaine et chaleureuse aux migrants n'est pas autre chose qu'une attaque
contre le prolétariat, sans se soucier de qui les a fait fuir. Tout cela a été
fait exprès. Les bourgeois ne sont pas en guerre avec eux-mêmes mais incapables
de gérer la planète. Il y a de plus en plus une limitation du capital à
accumuler davantage. Nous vivons une situation nouvelle. Quant à
l'extrême-gauche, elle est victime de sa perte de confiance dans le
prolétariat ; elle n'a plus confiance dans les capacités du prolétariat,
elle le voit uniquement comme démoralisé. Pourtant la bourgeoisie a de bonnes
raisons d'avoir peur du prolétariat.
Pour l'un des camarades du GIGC il faut placer les questions
au niveau historique. Il n'y avait pas de capacité alternative du prolétariat
en Irak. Il brossa le tableau des cycles de défaite et du cours historique
avant la Seconde Guerre mondiale, pour insister sur le fait que le capitalisme
n'a que la guerre comme solution à sa crise de surproduction. Bien sûr que la
crise des migrants est due à la guerre. Plusieurs éléments expliquent pourquoi
la guerre mondiale n'a pas encore eu lieu. D'abord il n'y a pas encore eu
constitution de blocs qui sont indispensables dans une confrontation
généralisée. Ensuite la menace
prolétarienne demeure, même si le prolétariat est encore globalement soumis à
l'idéologie bourgeoise, il n'est pas complètement soumis ; de plus, il
faut faire la comparaison qui s'impose : il n'est plus autant
« encadré » qu'il le fût dans les années 30. Depuis 2008 on assiste à
un développement des luttes ouvrières dans le monde. On a vu aussi des luttes
importantes en Grèce. La bourgeoisie mène une attaque à la fois économique mais
aussi politique. Elle se doit partout d'infliger une défaite idéologique au
prolétariat. Enfin le camarade estima qu'il ne faut pas en rester au
niveau de la simple discussion, mais se poser à terme la question du
regroupement des révolutionnaires, saluant la réunion organisée par VDT.
Plusieurs camarades de VDT se sont succédé, témoignant de
leur combat en entreprise, de leur lutte contre la défaite organisée des
syndicats, de leur capacité à favoriser les discussions, de leur conscience que
les travailleurs ne baissent pas les bras... la chute de la Bourse en Chine est
aussi révélatrice... on peut sortir de l'étau : ou blanc-seing à l'Etat ou
charité (Max). Appuyant l'intervention de R.Paris, un autre camarade estima que
le camarade Juan avait embrouillé, que le capital étant toujours en guerre, ce
ne pouvait pas être une nouveauté que de la fournir comme explication première,
et qu'on n'est pas à la veille d'une 3 ème Guerre Mondiale. Du point de vue du
prolétariat, on n'en est plus aux espoirs vains des journées d'action, certains
se posent le problème de qu'est-ce qu'on va mettre à la place du capitalisme,
faire des comités, etc. (Efraim). Les guerres impérialistes sont des rivalités
de classe, selon Borak[3].
Il répondit au camarade du cercle Robin Goodfellow – qui avait fait circuler
une série de graphiques illustrant l'effondrement économique – que les
statistiques n'expliquent pas tout, que même dans les périodes d'effondrement
économique, le capitalisme est capable de s'en sortir.
LES GAUCHISTES PAUVRES VICTIMES DE LA DEMORALISATION DE LA
CLASSE OUVRIERE OU ASPIRANTS MENEURS ?
Pour ma part, revenant sur les affirmations de R.Paris, je
contestai que les motivations impérialistes soient en permanence calquées sur
les désidératas du prolétariat. La bourgeoisie entoure c'est vrai toujours ses
préparations militaires de campagnes sur « l'opinion », mais ce qui
la détermine d'abord c'est la compétition entre fractions rivales, et dans les
pays en guerre il n'y a pas de prolétariat développé à embobiner. J'ai récusé
la formulation de R.Paris « l'extrême-gauche victime de sa perte de
confiance dans le prolétariat ». Les gauchistes font partie de la
bourgeoisie politique depuis longtemps, ce n'est qu'une variété de politiciens
arrivistes qui ne partent pas des besoins ou objectifs politiques de la
bourgeoisie, mais des leurs ; dans la Gauche Communiste dès la fin des
années 40 ils sont nommés « aspirants meneurs » par Mousso. J'ai lu
ensuite sur mon smartphone un extrait du texte de la Gauche communiste de
France (Internationalisme 1947) qui les caractérisait bien avant notre
naissance – j'étais le plus vieux de la salle - ainsi :
« Les ouvriers sont invités à participer à ce travail
inutile ; toute la gauche bourgeoise – SFIO, staliniens, trotskistes – les
entraîne à pallier quotidiennement à la crise du système bourgeois. Pour les
uns, la grande pénitence, la ceinture au dernier cran est la solution réelle
contre la famine ; c'est une façon de combattre le mal par le mal »
(signé Mousso).
Une occasion au passage de rendre hommage à notre tradition
de la « Gauche communiste », pas celle dont vous parle la télé, les
Mousso, Chirik et Goupil.
R.Paris considéra enfin qu'il n'y avait pas de désaccords sur
l'analyse des contradictions économiques du capitalisme, mais il prit pour
exemple la guerre de Corée où, selon lui, la Russie ne fût pas impliquée.
Reprenant l'erreur de la GCF (Gauche Communiste de France/revue
Internationalisme) – la venue de la guerre mondiale en 1950 – il estima que la
Gauche communiste avait renoncé à la dialectique dans l'espoir d'une révolution
pure.
Je ne me souviens plus des détails de ma conclusion de cette
discussion, mais j'ai probablement encore insisté sur le problème de la guerre
et l'absence de prise de position de la plupart des groupes qui se réclament de
la révolution prolétarienne (probablement parce que la question des migrants
vient rendre confuse la « préférence immigrée » de certains ou la
théorisation simpliste de la classe ouvrière comme « classe
immigrée ». Dans les couloirs un camarade de VDT me fît remarquer que
c'était plus de la sociologie de ma part et que la plupart des migrants étaient
des prolétaires. Nous convînmes qu'une bonne partie d'entre eux ne finiraient
même pas prolétaires mais retour à la case départ ou misère absolue.
LA BOURGEOISIE NE FAIT PAS CE QU'ELLE VEUT
En introduction au troisième volet de la série de débats –
les luttes sociales en France – R.Paris s'efforça de démontrer que la
bourgeoisie faussait la réalité de celles-ci et que le prolétariat est craint
par la classe des dirigeants. Intégrant les syndicats dans cette « classe
des dirigeants » il s'appuya ensuite sur des exemples à Radio France, dans
les hôpitaux où les syndicats officiels se dépêchent de prendre les devants
pour créer des comité hadhoc, parce qu'ils sont constamment sous la pression
des gens. C'est loin d'être une sinécure pour les appareils. Les hospitaliers
leur criaient : « on ne négocie pas ». Les interventions par
tracts de VDT leur ont permis de s'adresser à un éventail plus large de
« gens ».
Le président de séance regrettant que la présentation ne se
soit pas attachée à parler des luttes au niveau international, cette déficience
allait être comblée par les intervenants suivants. Ils se prononcèrent tous en accord
avec le constat que le prolétariat reste un danger pour la bourgeoisie. Juan
rappela l'importance du prolétariat allemand, sa lutte cheminote et dans les
ports. Il rappela quelques-unes des principales luttes en France des 30
dernières années pour souligner l'importance de l'implication des militants
dans ces luttes, leur participation active même lorsque les luttes sont
chapeautées par les appareils syndicaux de la bourgeoisie. Il considéra qu'il a
toujours un aspect politique dans les luttes ouvrières, comme l'avait formulé
Rosa Luxemburg, et que la classe doit avoir la capacité à assumer ce combat
politique contre les syndicats, en même temps que le rôle des minorités
révolutionnaires est indispensable.
Pour le camarade D. de Robin Goodfellow, indéniablement il
existe une frilosité de la bourgeoisie à monter ses attaques, ce qui n'empêche
qu'elle en prépare de violentes, par exemple une attaque contre le droit de
grève en Italie. Il affirma son accord avec l'importance toujours actuelle du
prolétariat allemand. Il examina ensuite les conflits plus particuliers à
Amazone et celui de Telefonica en Espagne, infos qu'il tenait d'une rencontre
avec le leader de la grève. Des assemblées sont maintenues dans les provinces.
Ils discutent sur la possibilité ou pas de recréer un syndicalisme de base. Il
faut réfléchir particulièrement à l'explosion programmée du groupe ouvrier, une
régression sociale qui éparpille les ouvriers en précaires. Comment pourra-t-on
faire la révolution avec une classe aussi atomisée ? JLR a en partie
raison de comparer avec les IWW. La centralité du prolétariat européen demeure
bien que ce soit une classe beaucoup recomposée. On ne peut pas dire pourtant qu'il n'y aura pas de leçons à
recevoir du prolétariat de la périphérie, des pays émergents, comme celui du
Brésil.
Une partie de la discussion fût consacrée aux oppositions
classiques sur le travail à faire dans ou hors des syndicats. Les camarades de
Robin Goodfellow estimant qu'un syndicalisme de classe est possible dans les
pays émergents, et les camarade de VDT restant partisans d'un travail militant
interne et externe à ces organismes, ce qui les opposaient au GIGC et à votre
serviteur.
Un camarade de VDT fût d'accord avec moi, contre l'avis de
Juan, que tout n'est pas politique, même si Rosa l'a dit, et avec cette formule
que j'approuvai : « faire de la politique ce n'est pas s'occuper des
grèves » (R.Paris). J'ai eu l'occasion d'insister à plusieurs reprises sur
le fait que la grève ne peut pas être considérée comme le nec plus ultra de la
lutte de classes qui a d'autres formes d'expression, manifestations,
rassemblements, discussions en comités indépendants, réunions publiques de
groupes révolutionnaires, sans compter que nombre de grèves sont totalement au
ras des pâquerettes et complètement dirigées ou liquidées par la bourgeoisie.
L'expérience de la grève joue pour la formation de la conscience de classe
collective, mais elle n'est pas la seule voie d'accès à la conscience de
classe, ni en soi réflexion politique aboutie. Mais l'ensemble des participants
convinrent qu'on ne peut rien prédire, qu'un mouvement important peut se
déclencher pour des questions accessoires ou dérisoires en temps ordinaire et
révéler ce vase qui déborde soudainement d'une conscience trop longtemps comprimée
par le mensonge déconcertant dominant. Discussion tout à fait fraternelle,
comme le remarqua le président de séance, content de lui.
MALAISE DANS LA LAICITE
Présenté par un des camarades de Robin Goodfelow –
présentation reflétant un certain malaise sur la question religieuse – la
discussion ne se voilà (ce con d'ordi maintient l'accent) pas la face ni les
cheveux. Comme le formula l'un d'entre nous (D.) : les marxistes avaient
cru la question réglée, mais peau de balle !
Le débat fût un peu décousu entre RG qui avait mal embarqué
le débat en faisant référence à un manque de respect des lois, celle de 1905 –
ce qui souleva l'ire des partisans de VDT (on va pas se battre pour les lois
bourgeoises!) - entre une question charitable pour les braves croyants :
posons la question « y a-t-il une oppression spécifique ? »
(Efraim) ; et bibi qui ne cachait pas son rejet de la modification
téléguidée par l'Etat bourgeois du paysage culturel (foulards et minarets,
cantine scolaire à mets séparés, salle de prière en usine, écoles
confessionnelles) quitte à passer pour une passerelle de l'extrême-droite qui
s'y connaît en viaduc et colimaçon. Je ne fus pourtant pas qualifié de
xénophobe ni de racisme primaire.
Il était inévitable que cet autre qui avait sorti :
« le voile est un signe ostentatoire, et la loi interdisant le voile n'est
pas appliquée » ne pouvait s'attirer les bravos. A l'origine du thème, les
camarades de Robin Goodfellow, au vu d'une prégnance renouvelée de la religion,
estiment que le combat pour la laïcité du point de vue prolétarien est encore
d'actualité. Pas du tout répondit R.Paris : « il y a eu une religion
de la laïcité, un combat exclusivement bourgeois », et d'invoquer 1789 où
la religion n'a pas été abolie, au contraire. La religion peut être détournée
comme instrument politique, mais elle reste un problème social auquel on ne
peut pas répondre dans l'abstrait.
Revenant à la charge d'autres membres de VDT assénèrent des
affirmations aussi discutables que :
–
la religion est apparue en même temps que les
classes
–
si une femme veut porter le voile, elle est
libre.
Soit des inventions historiques, soit des connotations
complices de la « tolérance » islamo-gauchistes, les interventions
traduisaient à mon sens plus le malaise, l'incertitude et les attentes face à
un sujet savonnette et pas du tout abstrait (ou au moins autant que le bon
dieu) pour ceux qui suivaient R.Paris. Il était objecté à tout cela que le
combat pour la laïcité, contre les curés exploiteurs a été aussi un moment du
combat pour le prolétariat – le jeune Marx n'avait-il pas dit la première
critique est celle de la religion ? - le premier décret de la Commune
n'avait-il pas été la séparation de l'Eglise et de l'Etat.
Ensuite, mi-angélique mais pas évangélique, j'ai posé la question
qui tue : lors de l'intronisation des salles de prière en usine sous
Jospin, qu'auriez-vous pris comme position :
1.
OK c'est bien c'est la tolérance
2.
ce n'est pas une revendication de classe, nous
sommes opposés à la confessionnalisation des lieux de travail.
La plupart furent en peine de se prononcer précisément. Il me
semble que c'est Juan qui apporta la meilleure réponse. Considérant que la
présentation avait fait une erreur de méthode, il considéra que seule la
dictature du prolétariat permettra en supprimant les inégalités de tendre à
faire diminuer les croyances religieuses, pas forcément à les faire
disparaître. Il considéra qu'on n'avait pas à discuter des questions
religieuses en AG, ni à accorder des salles de prière, plus de pauses peut-être.
La religion sert à pousser à l'idéologie guerrière. On ne peut vraiment aborder
ces questions que dans la dynamique de la lutte des classes. Il n'y a pas de
recettes.
UN INCIDENT SECONDAIRE EN MARGE DE LA REUNION
Avisant un militant du cercle « Mouvement
communiste » qui passait par là, je me fais engueuler par icelui qui me
reproche de les avoir qualifié de « terroristes », ce qui peut aider
la police. Je réponds que je les ai qualifiés de « terroristes
rouges » en référence à leur ancienne théorie, commune à presque tous les
gauchistes et ultra-gauches, repiquée à Trotsky et à la révolution française,
nullement en les assimilant au terrorisme islamique. Il est vrai que parfois
mon clavier a pu fourcher, mais je ne dénonce personne, je me moque d'une théorie
caduque pour gagner le prolétariat à la révolution. Si tel a été le cas, c'est
parce qu'on m'a informé que ce groupe avait sorti une brochure où ils
annonceraient avoir abandonné le marxisme-léninisme et l'exemple de la
révolution russe ; ce que je trouvais fort le café pour un groupe assez
arrogant et ventripotent de verbiage intellectuel violent pour rameuter les
masses. Renseignement pris, la brochure est introuvable auprès du libraire qui
m'en avait parlé, et qui est devenu évasif sur le sujet ! Invention d'un
ex-concurrent maoïste ? A suivre.
Revenons aux textes même du « mouvement
communiste », sponsorisés comme textes classiques sur le fascisme par le
révérend Yves Coleman, procureur anti-raciste à ses heures, et pourfendeur de
la xénophobie des « souchiens » et du FN qui serait un parti
« fâchiste ». Le texte des MC est hyper-gauchiste confus,
complètement étranger à la tradition de la Gauche communiste. On y voit poindre
le nazisme derrière chaque pet de la démocratie bourgeoise. L'infantilisme navrant
sourd de phrases redondantes et potaches et de curieuses
conceptions :
–
nous allons vers « une militarisation
rampante du rapport social de production (…) vers un national-socialisme à la
française ».
–
le fascisme s'appuie sur toutes les couches de la
société
–
sa base prolétarienne est constituée par des
chômeurs, des prolétaires, des paysans en uniforme démobilisés et déclassés.
Des notions qui fleurent bon un modernisme mâtiné de
marxisme-léninisme gratiné fleurissent un peu partout dans un discours hallucinant
de menaces et d'affirmations outrancières. C'est quoi « la communauté du
prolétariat mondial » ? C'est où « gagner la guerre contre le
fascisme? ». C'est pas fasciste l'affirmation suivante : « le
prolétariat ne doit pas s'encombrer donc de la défense de la démocratie contre
le fascisme ». Toutes les formules sont ambiguës, semblent plagiées sur
Bordiga, mais là où Bordiga exprimait un point de vue, souvent avec humour et
doute, on assène ici des dogmes sectaires, avec l'argument de « l'autorité
du parti », du « devoir ». Très militaire tout cela... Le
révérend Coleman et ses rudes combattants de la phrase radicale, pionniers
d'une analyse du fascisme comme produit de la classe ouvrière, ne seraient-ils
pas nos nouveaux fascistes, en herbe ?
Je ne veux pas les accabler d'épithètes, il me font pitié, je
regrette simplement de les avoir cités il a 15 ans dans mon livre sur
l'histoire du nazisme (Cahiers Spartacus) comme référence parmi les groupes
politiques plus clairs sur la nature du nazisme. Ils ne sont pas clairs du
tout.
AJOUTS SUBSIDIAIRES HORS DE LA REUNION :
La collusion avec l'expansion de la joyeuse tolérance à
l'expansion de l'islam est ouvertement chantée par Y.Coleman dans sa dernière
revue. On fait semblant d'oublier que les pays colonisateurs se sont sentis
floués après la décolonisation, non seulement de la privation de matières
premières, mais de prolétaires, c'est pourquoi il a fallu revoir les politiques
d'immigration et arrangements qui vont avec (accompagnement et financement des
aliénistes religieux).
Listant les concessions religieuses faites l'Etat bourgeois néerlandais, qu'ils estiment
insuffisantes, Y .Coleman nous fournit la liste de ces
« victoires » de la démocratie :
–
les musulmans hollandais sont mieux organisés puisqu'ils
contrôlent 206 moquées sur 453 (n'en déplaise aux islamophobes et aux
racistes!)
–
prise de jours de congé pour motif
religieux ;
–
égorgement rituel seulement (sic!) une fois la
semaine ;
–
enseignantes autorisées à porter le voile dans
les écoles publiques tout comme les gardiennes de prison ;
–
droit de prier sur le lieu de travail pendant le
ramadan ;
–
droit de construire des moquées (plus facilement
qu'en France (sic) ajout de YC)
–
droit au nom de la liberté d'expression pour les
imams de tenir des discours homophobes, la justice néerlandaise considérant ne
pas avoir à se mêler des questions...religieuses :
Le procureur immigrationniste YC dénonce à cet égard
« l'intolérance du hollandais de souche », et un « racisme
institutionnel » qui seraient les causes du retour à la religion. Le
multiculturalisme estime obligatoire de développer les mosquées pour
« libérer les musulmans ». La politique de l'Etat hollandais reste un
mélange de concessions sournoises et de répression « raciste » selon
le révérend YC.
Il déplore certaines mesures « outrancières » à son
goût, telle celle de la municipalité d'Utrecht ait décidé de supprimer les
allocations chômage aux porteuses de la burqa. A côté de son étalement de
compassion pro-islamiste, YC se veut en même temps critique, surtout de la
religion catholique... : « Les religions évoluent, ce qui ne les rend
pas moins nocives » ; il se veut rassurant, contre la tendance
générale : « la plupart des sociétés sont en voie de sécularisation ».
Puis, pape moralisateur, antéchrist antiraciste primaire, le voila-t-il pas
qu'il fait la leçon aux anarchistes et aux marxistes : « nous ne
vivons plus au temps de Galilée ». Dans les deux cas, chez le doux
révérend Coleman (ex-chefaillon de LO) et nos rudes insurrectionnalistes du verbe,
c'est la même hyper violence pathétique contre des ennemis imaginaires, et dans
le cas de l'hypocrite révérend, complètement dans les voiles de l'Etat
bourgeois.
[1][Après lecture ce tract m'apparût le meilleur qui ait
été produit en date du 15 septembre parce que centré justement sur la question
de la guerre, meilleur même que celui du groupe « Révolution ou
guerre » (GIGC groupe international de la gauche communiste) : Exode
massif sur tous les continents : ce sont nos frères de classe que le
capitalisme assassine, le 5 septembre ; qui est critiqué sur ce blog)].
Néanmoins ce genre de tract contient un défaut : il est cloné sur les
bulletins de boite de la maison mère LO (aïe les droits d'auteur...), il est
personnalisé à chaque entreprise où il est diffusé, avec au dos des
« échos de la boite » où il est diffusé, celui-ci porte l'en-tête
« Hôpital public », concession sans doute au néo-bolchevisme
trotskien qui veut assurer qu'il est bien implanté dans la classe ouvrière, ou
qui se donne l'illusion qu'il aura ainsi plus l'oreille des masses de la
corporation indiquée comme marque de lessive en chapeau de tract ; et vous
imaginez la joie de l'ouvrier neuneu de base : « ouah un tract
révolutionnaire qui parle de MA boite d'un côté et de l'autre de la situation
internationale » !
[2]Ce qui
m'apparut ultérieurement contradictoire avec le contenu (très bien) de leur
tract, dénonçant la responsabilité des puissances occidentales.
[3]En
entendant cette intervention assez externe au marxisme – les guerres
impérialistes sont des compétitions entre grands Etats ou blocs rivaux – je
repensais à cette autre hérésie, celle de Vercesi/Perrone (le grand animateur
de BILAN) qui pensais que en 39-45 le prolétariat avait disparu ! Deux
dérapages opposés en quelque sorte. Je réfléchissais au cour de cette réunion
au fait que la question des réfugiés, de l'aide aux réfugiés peut conduire à la
compromission politique. Le grand théoricien intransigeant de la Gauche
italienne en Belgique (alors que Bordiga ronflait dans l'île où Mussolini
l'avait emprisonné) Perrone, en se portant à la présidence du comité pour
l'aide aux réfugiés italiens à la fin de la guerre en Belgique, fût salué par
la presse bourgeoise comme un grand homme, dans l'union nationale charitable et
pleurnicheuse.
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