LE MARIAGE DE LA CARPE
ET DU LAPIN
« Une des principales causes de la dégénérescence en Italie est cette mauvaise et vieille habitude de mélanger la morale aux questions politiques et de classe ».
Histoire de la Gauche communiste (tome I bis)
Voici un épisode que Cervantès était loin d’imaginer. Dans l’entreprise chevaleresque de « Controverses », le chevalier Michel Olivier (ex ponte du CCI) et Sancho Sabatier (anti-léniniste acharné) s’associent pour une belle imposture titrée « Thèses sur la Révolution d’Octobre et sa dégénérescence ». Brûler le passé révolutionnaire, voici l’heure de la synthèse bilanesque. Aujourd’hui, le noyau de la folie révisionniste touche le niveau de la conscience, cela coïncide avec l’extraction du marxisme d’un monde dont le capitalisme est caillassé. Il ne s’agit pas d’un retour au monde du temps de la chevalerie du regroupement des révolutionnaires convaincus et disparus, mais pour Don Olivier de rester assis sur la rossinante du parti, même si Sancho, malin comme une teigne, est prêt à le cueillir par terre. Sancho Sabatier, qui pense avant tout à être publié, tout en profitant de l’accueil aimable de l’aubergiste Marc Lavoine, n’est pas illuminé et pense bien agir en faveur des opprimés et aider Don Olivier à retrouver la bonne destinée « prolétarienne ».
Don Olivier à la manque s’obstine à ne plus être seulement membre de la première secte venue, fût-elle italienne (TCI…), mais à être celui qui baguenaude pour entrer dans ce monde parallèle de la bonne conscience qui fait feu de tout bois et vivre une nouvelle vie, une vie qu’il croit militante. En noble chevalier, l’idéaliste il se bat contre les moulins à vent de feu la révolution russe, il croit prendre aux rets du parti imaginaire le brave Sancho avec ses hallucinations sur le traité de Brest-Litovsk[1]. Le valet semble pourtant avoir plus les pieds sur terre que le maître. Le duo lénino-conseilliste, allié et adversaire aurait-il résisté au temps ?
Leur roman à quatre mains retrace les voyages et les aventures de la dialectique en toc. Don Olivier est obsédé par la chevalerie des « communistes de gauche » dont il pense qu’ils possédaient la science infuse ou le remède anti-bureaucratique interne. Le premier est un chevalier errant et illuminé du maximalisme qui part combattre le mal à travers la Belgique désunie sur un vieux cheval : Rossinante Parti. Le second, tout en se remplissant la panse, sait que son maître est fou mais décide de l’accompagner quand même tellement il s’ennuyait dans sa ferme. Auberges-châteaux, guerres révolutionnaires, paysans bolcheviques, moulins étatiques, amour-regroupement, prolétaires, inquisition : le roman ne manque pas de péripéties, mais Don Olivier semble rester fidèle à Rossinante et ne cède pas. Sauf à la fin, où vaincu, il rentrera chez lui, malgré les suppliques de Sancho Sabatier. Il abandonnera ses lectures communistes chevaleresques, retrouvera la raison et mourra entouré et aimé des siens.
« Les thèses… » seront sans doute considérées par la poignée de lecteurs de « Controverses » comme le premier roman moderne, en rupture avec la tradition stalinienne et sectaire. Les nombreux virages du roman délivrent une étude idéaliste de la Russie de l’époque héroïque. Il sera considéré comme un roman comique par les lecteurs les plus sérieux restés fidèles à la tradition maximaliste.
Le début du livret à quatre mains commence par la publicité pour une douzaine d’œufs donquichotesques : « Saluons les prolétaires russes qui sont partis en février, puis en octobre 1917, « à l’assaut du ciel ». Nous revenons sur cet événement qui « ébranla le monde » suite à nos travaux (voire note) qui vont de la création d’une Gauche bolchevik en 1917 à celle du Groupe ouvrier en 1923, et jusqu’à la formation du Parti communiste ouvrier de Russie en 1928 (à Moscou), précédant celle de la Fédération des communistes de gauche quelques temps après. Il nous apparaît nécessaire de synthétiser sous la forme d’une douzaine de thèses un certain nombre d’étapes du mouvement ouvrier. Celles-ci se rapportent au cycle de luttes de classes qui se déroulèrent entre 1917 et 1923, dans le monde russe et à l’échelle internationale. Il est évident que nous n’écririons pas aujourd’hui tout à fait exactement de la même façon que l’ont fait les gauches communistes à l’époque… »[2]. Peu à peu Sancho Sabatier semble opérer lui une métamorphose, et du lourd conseilliste qu’il était, il se transforme en un être plus éduqué, pouvant susciter même par sa clairvoyance et la finesse de son jugement l’étonnement du prolétariat qu’il vénère. Don Olivier, quant à lui, reste invariablement fidèle à Rossinante, il ne cède à aucune pression extérieure, il brave les archers du CCI qui sont à ses trousses depuis qu’il a libéré les archives. Quoique séduit par les thèses anarchistes de Sancho sur Brest-Litovsk, Don Olivier pense ramener au parti un Sancho qui le supplie de ne point l’abandonner (lui pas le parti) : il lui suggère de garder le rôle de berger, souvent mis en scène dans les éditions bucoliques Smolny. Les deux compères pensent vivre ensemble beaucoup de découvertes, même en provoquant souvent de nombreux dégâts dans la théorie marxiste. Le clou du spectacle est la trame historique reconstituée par nos deux compères qui exaltent la théorie controuvée de la plus grande mystification politique du XXe siècle, la guerre de partisans, chanson de tous les nationalismes, reprise aux anarchistes et socialistes-révolutionnaires russes :
« Il ne s’agissait pas de mener une guerre classique comme le fera Trotski en créant une Armée rouge avec d’anciens officiers tsaristes et en rétablissant la hiérarchie militaire. Il fallait essayer de développer une guerre de partisans plus propice au succès dans un vaste territoire difficilement contrôlable par les armées régulières des puissances impérialistes. Pas d’autre solution…. à moins de quitter le pouvoir comme l’ont envisagé les communistes de gauche pour éviter que la pourriture de la dégénérescence ne retombe sur le prolétariat de l’avenir. Ce combat de partisans n’était pas une solution idéale mais c’était la moins mauvaise. Pour le prolétariat en armes, mieux vaut périr pour éviter les fausses solutions puis les mauvaises leçons (l’identification d’un capitalisme d’État avec le socialisme) et pour que le Phénix prolétarien renaisse plus fort et plus conscient de ses cendres ».
Entré en résistance dans les bois de Sibérie, on imagine fort bien les partisans bolcheviks faisant le coup de feu avec Makhno contre l’Etat stalinisé et finissant aussi lamentablement que les divers Che Guevara… Pour l’anecdote en passant, il faut savoir qu’en des temps lointains, lors de la parution de l’ouvrage enluminé de Sancho Sabatier, c’est votre serviteur (JLR) et Don Olivier qui avaient été délégué par le CCI pour aller porter la contradiction à cet auteur, encore membre d’un cénacle nommé PIC, et lui indiquer que nulle part, dans le camp des défenseurs de l’expérience en Russie les plus lucides ne considéraient le traité de Brest-Litovsk comme le « coup d’arrêt de la révolution » dite prolétarienne dont l’extension n’a jamais dépendu d’une guerre de partisans anarchistes ou blanquistes. Théoricien de la fin de la mystification de la « guerre révolutionnaire », je dois avouer modestement que je dois cet approfondissement théorique d’abord à la grande Rosa Luxemburg et ensuite au groupe Révolution internationale qui m’avait permis de comprendre que toutes les dites « luttes de libération nationale » étaient de la foutaise tout au long du XXe siècle ; je n’ai eu qu’un pas supplémentaire à accomplir pour en tirer les conclusions pour le prolétariat… mais cela avait déjà été conçu bien avant ma petite personne.
Déjà dans L’Avanti du 25 mai 1918, les compagnons de combat socialiste du jeune Bordiga dénonçaient une méthode « anti-maximaliste » : « La tactique de la « guerre sainte » aurait au contraire creusé l’abîme entre les deux peuples et lié le peuple allemand au char de ses dirigeants, posant d’insurmontables difficultés au développement historique à venir de la révolution russe ; et elle aurait troublé la totalité du processus social d’éliminations des institutions capitalistes, préparant la voie à un néo-nationalisme russe qui aurait asphyxié le socialisme ». (…) La révolution contrainte à la guerre : c’est le triomphe commun des tendances contre-révolutionnaires tant des Empires centraux que de l’Entente. La guerre est la fin certaine d’une révolution ouvrière parce qu’elle tue le contenu vital de la politique socialiste et asphyxie son économie politique » (…) « Ce truc, la guerre révolutionnaire doit être éventé ».
Dans la trame romancée de banalités bien connues sur les causes de l’échec de la révolution, nos deux lascars – en fait sous l’influence dominante de l’écuyer Sancho – font passer le parti futur pour la vieille Rossinante bolchevique, et c’est le rédacteur en chef de « Controverses » qui les remet fort justement en place : « Rappeler que des révolutions ont été possibles sans l’intervention d’un parti dont l’action fut décisive comme en Octobre 1917 n’enlève en rien à l’idée du caractère crucial de celui-ci pour maximiser la réussite d’un processus révolutionnaire, mais ce caractère doit se fonder sur une argumentation pertinente, et non pas sur l’exhortation de la nécessité du parti en soi. Or, assez paradoxalement, il y a plus d’exemples de révolutions (ou de quasi révolutions) sans influence significative d’un parti… (Russie 1917, Espagne 1936) ».
Marc Lavoine se moque aussi correctement de l’apologie, dans la tradition maximaliste de la gauche italienne, de la « guerre sainte » par Don Olivier qui brandit sa lance en bois et Sancho Sabatier qui le tient par les étriers :
« La troisième thèse développe une position sur les événements de Brest-Litovsk (1918) qui est propre aux rédacteurs de ces thèses et qui n’a correspondu à aucune de celles en présence à l’époque. Elle affirme que la seule politique correcte face à l’offensive militaire allemande
eut été de « gagner ou périr comme la Commune de Paris en avait donné l’exemple » : « Il fallait essayer de développer une guerre de partisans ». Les rédacteurs de ces thèses affirment même qu’il n’y avait « Pas d’autre solution», que « Ce combat de partisans n’était pas une solution idéale mais c’était la moins mauvaise ». Or, la gauche communiste russe à cette époque avait avancé une position qui était tout à fait pertinente : « à moins de quitter le pouvoir comme l’ont envisagé les communistes de gauche pour éviter que la pourriture de la dégénérescence ne retombe sur le prolétariat de l’avenir ». En effet, lorsque le rapport de force est en défaveur de la classe ouvrière, que ce soit dans une grève, un processus révolutionnaire, ou sur le plan militaire, mieux vaut battre en retraite et reconstituer ses forces que de sacrifier ses meilleurs éléments dans un combat perdu d’avance, combat qui tient plus alors d’une vision militaire et sacrificielle de la révolution que de la véritable nature du projet communiste : l’héroïsme ‘jusqu’auboutiste’ relève avant tout d’une conception bourgeoise ou petite-bourgeoise de la lutte émancipatrice. Dans une configuration défavorable à la classe ouvrière, seule la retraite constitue la moins mauvaise des solutions car elle permet de regrouper ses forces, de tirer les leçons, et de se préserver pour la prochaine tentative, et cela sans risquer de trahir les principes de la révolution. Ce dernier aspect nous paraît particulièrement crucial car toutes les révolutions où ses acteurs ont transigé sur les principes au nom de l’efficacité, pour gagner du temps, par expédients tactiques, … tous ces épisodes ont peut-être permis de grignoter quelques mois de répits, mais : a) ils ont finalement tous mené à la défaite ; b) ils se sont retournés contre la classe ouvrière au final ;
De deux choses l’une : si le parti bolchevik était déjà « en dehors du camp prolétarien » dès «les grèves ouvrières de Petrograd et … Cronstadt », alors il ne peut pas passer une seconde fois à la bourgeoisie en 1925 ou en 1928 ! encore thèse CCI
Certes, le parti Bolchevik a fait de très graves erreurs dès le lendemain de la révolution, erreurs qui ont notablement accéléré la contre-révolution : répression des grèves, constitution de la Tcheka, relégation au second plan et substitution au pouvoir des soviets, répression de Cronstadt, etc., cependant, ce n’est que lorsque les Bolcheviks abandonnent le principe de l’internationalisme prolétarien que l’on peut dire qu’ils quittent définitivement le camp de la révolution ».
Marc Lavoine démonte par après la corruption idéologique de Don Olivier :
« La thèse 9 affirme que : « Seule la Gauche communiste internationale … porte le devenir des leçons révolutionnaires au niveau mondial comme en Russie ». Cette idée est à nouveau soulignée dans la douzième thèse où l’Opposition Internationale de Gauche de Trotski est purement et simplement rejetée aux oubliettes : « C’est pourquoi, l’opposition de gauche n’avait plus rien à dire ni à faire dès le milieu des années 20. […] Seule la Gauche Communiste ouvrière qui était présente parmi les ouvriers a sauvé l’honneur du communisme ». Ceci est en contradiction flagrante avec l’esprit des courants historiques de la Gauche Communiste. Ainsi, Bilan ne se concevait que comme une des gauches parmi toutes celles critiquant la dégénérescence de la révolution d’Octobre, et non pas comme « la seule » ! Lorsque la Fraction italienne s’adressait aux autres forces révolutionnaires, elle affirmait clairement qu’elle « n’entend pas se prévaloir de ses précédents politiques pour demander des adhésions ».(…) « Si Bilan considérait que le courant autour de Trotski n’avait plus rien à dire dès le milieu des années 1920, on se demande alors dans quelle galère la Fraction italienne a été se ferrer en discutant avec l’Opposition Internationale de Gauche, en espérant élaborer une plateforme commune avec elle, en proposant que sa revue soit celle de tous les groupes de l’Opposition, etc. L’on ne peut d’avantage soutenir que « l’opposition de gauche n’avait plus rien à dire ni à faire dès le milieu des années 20 » puisque l’analyse de la nature de l’URSS de Bilan partagera encore pendant longtemps bien des aspects avec celle de Trotski ! A bien y regarder aussi, la position que Bilan développera sur « La décadence du capitalisme » vient en droite ligne de Trotski. Il en va de même concernant la position sur « L’impossibilité de réformes réelles et durables en décadence » que reprendront ses héritiers de la GCF. Dès lors, gardons-nous de ce triomphalisme consistant à crier haut et fort que «SEULE la Gauche Communiste internationale… » ![3]
SANCHO SABATIER DROIT DANS LE MUR DE L’ARGENT
Pour ne pas en rester à une seule hérésie anti-maximaliste, Sancho en rajoute sur son maître. Il fait sienne la théorie du cartel des gauches bourgeoises en 1924 en se livrant à un cocasse survol journalistique des « murs » du XXe siècle, imaginant (théorie fabuleuse) que les prolétaires, en particulier, auraient été à l’origine de la chute du mur de Berlin :
« En novembre 1989, tout implosa et les prolétaires berlinois du secteur/est cassèrent des pans entiers de la Muraille qui leur obstruait l’horizon. Ce fut une véritable liesse populaire avec les ouvriers de l’ex-secteur/ouest. Mais les dirigeants d’alors : R.F.A./Bloc occidental d’un côté, R.D.A./Bloc oriental de l’autre, tentèrent une ultime récupération. Peine perdue. Autant en emporte le vent. La R.D.A. implosa à son tour ainsi que le bloc de l’Est deux ans après (effondrement de l’U.R.S.S., comme un château de cartes, en 1991). Les ouvriers de l’ex - R.D.A. et de l’ex-Berlin/Est ne parvinrent pas à intégrer facilement le marché « libre » du travail de l’Allemagne réunifiée dont le territoire fut délimité à l’Est par la ligne Oder-Neisse. Ils eurent même une certaine nostalgie (traduite par exemple dans le film : Goodbye Lénine) d’une vie « protégée » des aléas (baisse des salaires, chômage, manque de logement…) qu’ils avaient connue sous l’ancien régime de capitalisme d’État baptisé « socialisme ».et par les ravages sociaux de la crise économique (chômage massif, immigrations de toutes sortes…), le prolétariat du monde entier assista, impuissant, à l’histoire qui se déroulait sans lui et se replia dans des luttes revendicatives, corporatistes. Il fut à nouveau repris en mains par les syndicats et les partis politiques de toute obédience ». Seuls des mouvements sociaux (en cas de radicalisation politique comme en Iran) pourront troubler le jeu inter-capitaliste dans les pays de toute la zone moyenne-orientale, en dépassant le cadre de simples émeutes de la faim. S’ils parvenaient à poser leurs intérêts de classe au-delà des sirènes nationalistes, ce Mur symbole de la misère sociale et humaine tomberait avec fracas : il laisserait alors place à une unité prolétarienne dépassant le pouvoir des États en les détruisant de fond en comble. »
Du mur de Berlin, notre berger Sancho, à dos de mulet, nous balade ensuite vers le Mur de Nicosie (Chypre) entre la Turquie et la Grèce. Noyé sous un bla-bla littéraire théâtral allié à une méconnaissance crasse de la structure sociale et des particularités de la Grèce et du cas de Chypre, il chevauche cette cuistrerie de « mur de l’argent » (théorie gauchiste moderne) en oubliant de faire un véritable travail d’historien : les murs, celui de la « France libre » (1941), celui de Berlin (1945-1991), celui d’Israël, etc. ont toujours eu pour fonction de casser en deux le prolétariat. Là est la leçon principale, pas de s’enferrer dans ces histoires invraisemblables de « mur de l’argent ». Le mur de Nicosie c’est tout autre chose que ce bla-bla sur l’histoire antique grecque mais un jeu impérialiste multiple où la bourgeoisie US a damé le pion à sa consoeur anglaise (je l’ai déjà expliqué dans un vieil article). Sancho se perd ensuite dans les délires gauchistes sur les « potentialités » présumées de la lutte de classes en Grèce, où il n’y a qu’une très faible classe ouvrière, et où chaque jour apporte la preuve que la bourgeoisie internationale enferme les Grecs dans l’ornière nationaliste, un peu comme le traité de Versailles pour l’Allemagne de Weimar (et cela suppose donc une toute autre analyse sur laquelle je reviendrai).
Avec autant de fausses analyses historiques, on peut ensuite s’emballer sur ce nouveau masque de l’hydre « mondialisation » en ridiculisant le maximalisme révolutionnaire :
« Le Mur de l’argent sera un adversaire coriace jusqu’à l’instauration du communisme. Pour abolir le marché mondial et tous les États, les Conseils ouvriers devront prendre le pouvoir politique à l’échelle internationale. Pour lutter contre le développement inégal hérité du mode de production capitaliste, c’est une période de transition qui s’ouvrira alors pour se débarrasser de tous les antagonismes de classes et établir une société fondée sur la satisfaction des besoins humains, donc sans comptabilité prisonnière de l’équivalent argent. Même, si cette lutte risque d’être longue, ce n’est pas une raison pour baisser nos bras nus et abdiquer notre pensée critique ». Avec toujours la même vision grèvegénéraliste simpliste typique d’une ultra-gauche radoteuse :
« Seule une prise en main des luttes par la classe ouvrière elle-même et une extension à tous les secteurs pourraient créer un rapport de force en mesure de faire reculer la bourgeoisie et ouvrir une autre perspective. Cette solidarité, les ouvriers ne peuvent la construire qu’en prenant confiance en eux-mêmes à partir du développement de leurs propres luttes et au moyen de leurs propres formes d’organisation (assemblées générales, délégués élus et révocables…), et non en les laissant dans les mains des syndicats et des organisations traditionnelles de gauche, ou en regardant à la télévision les bombes placées par des éléments qui ne cherchent qu’à présenter les travailleurs comme des terroristes, à discréditer la lutte des classes, et à faire croire que celle-ci n’a pas d’autres perspectives à offrir que l’anarchie et la violence ».
Il est minuit pour les minorités réduites au musée d’Alzheimer,mais pourquoi ne pourraient-elles pas parader encore, s’exclame le grand chambellan Sancho montrant ses moulins à vent:
« Dans ce combat qui s’engage, les minorités révolutionnaires ont et auront un rôle important à jouer malgré leurs faibles forces. Leurs responsabilités sont énormes et nous appelons tous et chacun à être à la hauteur des enjeux ».
Nous examinerons ensuite dans un troisième volet les lectures fécondes d’un autre preux chevalier bedonnant, Maxime le preux, de ce vieux conte à dormir debout si ancien et si décalé par rapport à la réalité d’un monde défragmenté où certains vont chercher dans les antiquités mirifiques des solutions à leurs errements actuels.
[1] Dont il nous est livré une publicité sans critique : « Traité de Brest-Litovsk, coup d’arrêt à la révolution », Spartacus ; 1977. Ajouté à cette oeuvrette anarchiste, sous la responsabilité de Don Olivier, est annoncée laTraduction intégrale des 4 numéros de la revue Kommunist, Éditions Smolny (à paraître). Quant aux deux œuvres majeures de Don Olivier elles existent à compte d’auteur sous forme de libelles depuis 2009 : La gauche bolchevik et le pouvoir ouvrier, 1919-1927 et Le Groupe Ouvrier du Parti communiste russe, 1922-1937. J’ai démonté les affabulations du livre de Sabatier et de l’anarchisme impuissant dans un ouvrage en 2005 : « La guerre révolutionnaire de Robespierre à Lénine ». A l’époque je n’avais pas encore connaissance des deux tomes de l’histoire de la Gauche communiste d’Italie, qui décrypte si bien les âneries de la « guerre sainte » ou « guerre de défense » qui a toujours mené à la défaite, y compris à celle de la Commune de 1871. Cet ouvrage lumineux m’avait été offert par un ami, avec cette dédicace : « René Girard écrit que c’est toujours comme tombeau que s’élabore la culture ». Tu es la preuve vivante du contraire. Tes ouvrages, ton œuvre politique est là pour nous prouver le contraire. Puisse ta retraite te permettre de continuer à écrire. A nous instruire et à nous aider à nous orienter dans une époque et un monde de plus en plus illisibles ». Pour moi qui ne suis jamais l’objet de félicitations ni d’encouragements, cette dédicace reste une belle preuve d’amitié et de confiance.
[2] Traduit de l’espagnol : « En un lugar de la Mancha, de cuyo nombre no quiero acordarme, no ha mucho tiempo que vivía un hidalgo de los de lanza en astillero, adarga antigua, rocín flaco y galgo corredor. »
[3] M.Lavoine pose par contre, d’une façon marxiste et cruciale une question à laquelle il faudra répondre mais qui dépasse le cadre de ma réponse polémique aux dérives anarchistes des deux compères : « Mais alors se pose le problème théorique et pratique suivant : si le prolétariat détient le monopole de la violence et qu’il est le seul à pouvoir la mettre en oeuvre, alors, de fait, il assume une des attributions essentielles de l’État. Or, la GCF affirme que le prolétariat ne peut s’identifier à l’État. De fait, cette position contient une contradiction de fond qu’il est nécessaire de résoudre, car, si les conseils ouvriers exercent le monopole de la violence, ils assument inévitablement un des rôles essentiels de l’État, ils s’identifient à l’une de ses fonctions principales ».
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