Une critique des camarades belges
concernant la position contenue
dans le rapport Vercesi
sur les “revendications partielles”
(traduction:JP Laffitte)
Les numéros 7 et 8
de “Comunismo”, l’organe de la Fraction belge, contiennent une étude de la
situation en France intitulée : “Les convulsions de la décadence
capitaliste dans la France du Front populaire”. Nous conseillons aux camarades
de suivre les publications de la Fraction belge ; et, dans ce numéro de
“Seme”, nous ne pouvons que nous limiter à mentionner les parties de cette
étude qui sont destinées spécifiquement à critiquer les positions contenues
dans le rapport Vercesi sur la question des revendications partielles.
« Si nous
examinons maintenant les répercussions économiques que les Accords de Matignon
ont eues sur les salaires ou sur la situation dans les entreprises, il est
avant tout évident qu’elles ont été un coup dur pour ces dernières, et ce
d’autant plus que – nous l’avons déjà indiqué – leur capital est en général de
composition moyenne, c'est-à-dire d’équilibre entre le capital constant et le
capital variable, et que les fluctuation des salaires se répercutent plus
sensiblement sur le taux d’exploitation des forces de travail que dans les
grandes usines à machinisme développé. Rappelons
qu’à capital égal, les grandes entreprises bénéficient normalement d’un
taux d’exploitation supérieur. Mais, dans un cas comme dans l’autre, il n’en
est pas moins vrai que toute augmentation des salaires réels fait baisser
automatiquement le taux d’exploitation, étant donné que le salaire et la
plus-value sont les deux éléments constitutifs de la journée de travail et que
l’augmentations de l’un réduit inévitablement la part de l’autre, et
inversement. En conséquence, quand les camarades italiens (dans “Bilan” n° 43, p. 1405) nous disent que « le
capitalisme parvient à élever le taux d’exploitation des ouvriers tout en
procédant en même temps à des augmentations de salaire », il ne peut
s’agir que d’une erreur provoquée par leur désir de conférer la force d’une
preuve à la thèse qu’ils défendent et sur laquelle nous reviendrons dans le
second chapitre (voir la suite des extraits de l’étude – Ndr). Ce qui est
exact, c’est que l’augmentation du profit (et aussi de son taux – en pourcentage – Ndr) peut parfaitement se
conjuguer avec celle des salaires dans une phase d’expansion de la production,
quand le capital constant se répartit sur une plus grande quantité d’unités
produites, comme lorsque la masse de plus-value augmente. Dans le cas
concret, en France, ni l’une, ni l’autre de ces éventualités ne s’est réalisée
dans une mesure équivalente à une reprise. ».
L’on peut en
revanche affirmer que les augmentations de salaire (en moyenne de 10%),
combinées avec l’application des lois sociales, ont fait baisser temporairement
le taux d’exploitation du travail à un niveau tel qu’il n’assurait plus (à
l’exception des grandes entreprises) la rentabilité capitaliste. L’erreur
consistait dans le fait de considérer que ce qui avait été concédé sous la
poussée des masses pouvait s’incorporer définitivement dans le programme du
capitalisme. La vérité est que le Front populaire a vu sa théorie de
l’augmentation du pouvoir d’achat des travailleurs consacrée par les faits, et
ce malgré lui : c’est ainsi que son crédit auprès des masses s’en est
trouvé renforcé, ce qui constituait pour le capitalisme le gain politique
qui compensait la perte économique subie en raison des Accords de Matignon.
Ceux-ci étaient les conséquences que le capitalisme payait pour le
rétablissement de l’ordre et la consolidation de l’Union sacrée. Mais le fait
que, au lieu de pouvoir “diminuer” ses dépenses de production, comme la
situation le lui imposait, la bourgeoisie ait été obligée de les augmenter et
d’hypothéquer le profit prévu portait déjà préjudice à l’attitude qu’elle
aurait prise à l’égard des réformes quand les circonstances lui seraient
redevenues favorables, attitude qui s’est précisée après le dernier Conseil des
ministres de Rambouillet.
La dictature
capitaliste pouvait tolérer de grandes réunions populaires : cortèges,
meetings, serments collectifs, et même des grèves de masse, à condition que
cela se produise dans la confusion, dans une ambiance politique qui étoufferait
les tout petits embryons de conscience prolétarienne susceptibles de devenir
les éléments constitutifs d’une Fraction de gauche. La dictature démocratique
comprenait qu’elle ne pouvait pas empêcher l’éclatement des conflits sociaux,
mais il était toutefois d’une importance capitale pour elle de les encadrer
dans le Front populaire et de les réabsorber, y compris au prix de concessions
économiques temporaires au sein de l’Union sacrée des classes, laquelle ne
pouvait pas trouver d’autre issue en dehors de la guerre impérialiste.
À notre avis,
quelques précisions s’imposent ici parce qu’il semble que les formules énoncées
par nos camarades italiens, préoccupés qu’ils sont de situer avec exactitude
les luttes partielles dans le cycle des conflits impérialistes – qui ouvrent
une nouvelle phase du capitalisme –, ont quelque peu embrouillé, plutôt
qu’éclairci, les positions de la lutte prolétarienne dans la nouvelle
situation.
Nous croyons
pouvoir résumer l’opinion de ces camarades (Bilan, numéros 41-43 : Thèses
de Vercesi) à peu près de la manière suivante : la nature prolétarienne de
la grève revendicative ne garantit pas l’orientation ultérieure des événements
vers des solutions prolétariennes : de plus, la lutte pour des revendications
partielles ne traduirait plus réellement la contradiction entre la bourgeoisie
et le prolétariat parce que l’évolution des situations aurait modifié la substance
de cette contradiction. En d’autres termes, l’antagonisme social aurait été
transféré de la sphère des grèves revendicatives dans la sphère supérieure des
luttes pour le pouvoir.
Ceci se
justifierait par le fait que les luttes partielles s’intègrent actuellement à
un processus économique orienté essentiellement vers la production de guerre et
que les succès revendicatifs conditionneraient en quelque sorte la
collaboration des ouvriers à l’organisation et au fonctionnement de l’économie
de guerre et, par conséquent, également
leur adhésion à la politique d’Union sacrée qui les précipite dans le massacre
impérialiste ; la production intensive des armements rendrait ces succès
possibles, et c’est ainsi que certaines concessions économiques du capitalisme
(augmentation des salaires, 40 heures, congés payés, etc.) ne seraient plus
incompatibles avec l’existence d’une société bourgeoise en déclin, comme les
communistes l’affirmaient jusqu’au début de la période actuelle. Pour ce qui concerne
la lutte partielle en soi, il est certain que, malgré le caractère inaltérable
de sa nature de classe, elle n’a jamais contenu des vertus capables d’assurer
le développement de la conscience de classe du prolétariat, mais uniquement des
possibilités d’un tel développement.
Quand nous
constatons par exemple que les succès économiques des ouvriers, en mai 1936, qui
ont été obtenus incontestablement sous la pression des grèves, ont réalisé en
contrepartie la victoire politique du capitalisme, nous n’enregistrons pas du
tout un phénomène particulier à l’époque présente, celle de l’expansion de
l’économie de guerre. Cette contradiction, nous la retrouvons par exemple à
l’époque de “stabilisation” capitaliste de 1924-1928 et, plus en arrière, dans la phase
“coloniale” du capitalisme, environ vers 1880-1900 ; les “succès
revendicatifs” sont à la base de l’opportunisme de la II° Internationale et ils
n’ont pas du tout développé automatiquement un progrès dans la conscience de
classe.
Sans tomber dans
le paradoxe ou dans l’arbitraire, l’on peut dire que le prolétariat a souvent –
si ce n'est toujours – tiré de plus grands enseignements de classe de ses
défaites que de ses victoires. Ceci se produit également dans le domaine
revendicatif.
Pour un marxiste,
la réforme sociale n’a jamais représenté “un morceau de socialisme” – même
quand celle-ci se manifestait sous les formes les plus radicales de la “socialisation”
comme en Espagne, en juillet 1936 – pour l’excellente raison qu’il s’agissait
d’une expression de la vie capitaliste évoluant dans le cadre du système
capitaliste et que, donc, par nature, elle était incapable de menacer les bases
de ce système ; la réforme sociale est à la dictature bourgeoise ce
qu’est la transformation sociale à la dictature du prolétariat. D’où
l’opposition fondamentale entre Octobre 1917 en Russie et Juillet 1936 en
Catalogne. Ceci ne signifie pas que, même dans le cadre bourgeois, la réforme
sociale ne se heurte pas à des limites historiques pour être finalement écrasée
dans les convulsions décadentes de l’évolution capitaliste. Mais quand nous
interprétons cette situation comme étant une caractéristique du déclin impérialiste,
nous n’avons pas l’intention d’énoncer une notion absolue, mais plutôt de souligner
une tendance plus importante, que certaines conjonctures peuvent
conserver ou bien renverser temporairement.
L’on peut donc
affirmer que les succès ouvriers dans le domaine économique n’ont jamais
enfreint les lois de la production bourgeoise, mais qu’ils ont plutôt tendu à
“régulariser” le fonctionnement de la loi de la valeur et du salaire. En
revanche, les étapes du développement du prolétariat, en tant que force
idéologique et politique indépendante, ont représenté autant de coups de
pioche dans l’édifice de la domination capitaliste et c’est bien pour cela que
la bourgeoisie, si elle a souvent consenti à des compromis économiques, n’a
jamais admis de transiger quand se posait la question du pouvoir.
Dans une telle
éventualité, c’est la violence qui tranche le nœud gordien de la lutte,
c'est-à-dire le rapport des forces en présence et non pas la volonté des
révolutionnaires.
De manière
analogue aujourd'hui, si nous devons rattacher les manifestations primitives de
la lutte de classe (grèves revendicatives) à la réalité de la situation
internationale, laquelle pose en termes aigus l’alternative de la guerre ou de
la révolution (l’objectif central et permanent des marxistes consiste dans le
fait de relier les réactions de classe aux situations réelles), nous devons
le faire en nous rattachant nous-mêmes à la réalité du rapport de
classe existant en définitive. Dire que la contradiction de classe s’est déplacée
de la lutte revendicative vers la lutte pour le pouvoir et que, par conséquent,
la revendication immédiate des ouvriers ne s’exprime pas dans la
première, mais dans la seconde, c’est, par rapport au présent, se
confiner dans le numéro gagnant.
C’est le travail
central des communistes, lequel inspire toute leur activité immédiate et ultérieure,
que de poser le véritable enjeu de la situation actuelle, à savoir sa chute
inévitable si le prolétariat ne parvient pas à briser les liens de l’Union
sacrée qui l’asservissent à l’État capitaliste : de souligner que, comme
les prolétaires d’Espagne et de Chine doivent opposer leur défaitisme de classe
à la guerre antifasciste, ceux des autres pays doivent agir de manière analogue
par rapport au processus économico-politique qui les entraîne à leur tour dans le
cycle de la guerre impérialiste, localisée ou générale. Il s’agit donc de
directives générales qui traduisent la situation en langage communiste et qui
font partie de la propagande politique de l’avant-garde. Mais il reste alors à
les incorporer dans la lutte ouvrière afin de l’orienter vers l’autre issue de
l’alternative : la révolution.
Le problème
concret n’avance donc pas d’un pas parce que l’on affirme que l’antagonisme de
classe ne se manifeste pas aujourd'hui entre patrons et ouvriers, mais entre
capitalisme et communisme. En effet, l’opposition entre ces deux types de
société révèle la nature de la contradiction fondamentale qui s’affirme
en permanence, mais aussi objectivement depuis le moment où la
production bourgeoise est en déclin. D’autre part, la lutte partielle, si elle
n’est plus qu’une forme (la moins élevée) de la lutte historique entre
la bourgeoisie et le prolétariat, elle demeure toutefois une expression de la contradiction
de classe et elle ne peut pas être autre chose.
Pour les
communistes, la revendication partielle n’est pas un objectif en soi, mais un
moyen, un point de départ. Le fait que, à l’époque de la décadence capitaliste,
lorsque la lutte ouvrière se limite à l’action revendicative, cela
affecte toujours de manière défavorable son résultat, c’est l’ABC du marxisme,
mais la lutte partielle revêt une importance capitale quand les ouvriers
utilisent leur arme spécifique : la grève, que le capitalisme vise
précisément à détruire. Dans certaines conditions, la grève est la seule action
qui donne au prolétariat les possibilités de s’opposer à l’appareil
d’oppression économico-politique du capitalisme et d’ouvrir un cours qui
débouche vers le renversement des situations. Étant donné que nous vivons
encore dans une phase profondément réactionnaire de la lutte de classe qui
révèle que le prolétariat n’existe pas en tant que force politique
indépendante, il est impossible de faire effectuer un saut à la lutte de
classe en substituant comme objectif immédiat la lutte pour le pouvoir à
celle qui incite les ouvriers à défendre leur pain. C'est dans la bataille
revendicative que les communistes doivent démontrer aux ouvriers qu’ils doivent
rattacher leurs actions à des objectifs supérieurs débouchant sur la phase
révolutionnaire. Il ne s’agit pas de mettre la revendication partielle au
premier plan, mais il s’agit simplement de ne pas oublier que c’est elle
qui détermine tout le développement ultérieur et que c’est dans ce sens qu’elle
est immédiate.
Sinon, l’on en
revient à la position de Trotski qui, sur la base d’une analyse de la
situation en France (avril 1935) et après avoir dénoncé le néo-communisme (sans
la grève) des centristes, en arrive à conclure que « la plus immédiate de
toutes les revendications était de revendiquer l’expropriation des
capitalistes et la nationalisation,
la socialisation des moyens de production, mais que, puisque cette
revendication était irréalisable sous le domination de la bourgeoisie, il
fallait conquérir le pouvoir ! ».
*********
Idéalisme ou matérialisme ?
« Il y a toujours
eu des faits, et des événements, visibles et tangibles pour tous (termes
non soulignés dans le texte) et non pas seulement par certains prophètes
privilégiés, qui imposent, de par leur évolution, des solutions de plus en plus
claires et progressives, toujours dans l’esprit d’ “un pas en avant des
masses” ».
Ce passage se
trouve à la page 50 de SEME n° 4. Le renvoi aux faits, aux événements, n'est
pas suffisant pour masquer le contenu antimarxiste de cette pensée.
Je dis
antimarxiste, parce qu’idéaliste :
1°) Le terme
“tous” détruit la notion de l’avant-garde qui doit être conçue du point de vue
matérialiste, à savoir, par conséquent, en prenant comme comparaison le
cerveau, qui secrète la pensée, et qui correspond à une “matière” plus élevée
que ce que peut être l’autre, c'est-à-dire celle que tous, sous l’impulsion
brutale des événements, peuvent concevoir.
2° Les mêmes tous,
sans toucher et sans voir, savent par exemple qu’il y a aujourd'hui la guerre
en Chine, mais pas tous cependant et même très peu savent que, en Espagne,
c’est une guerre impérialiste qui y est menée, et tous ces gens qui ne savent
pas cela en ce moment même paient de leur vie cette impossibilité de leur part
de pouvoir s’élever au-dessus du toucher et du voir, et de comprendre la trame
sanglante de l’embuscade tendue par l’ennemi.
Un philosophe
idéaliste des années 1700 disait à peu près ceci : « Si tous les gens
présents lors d’un certain fait qui a eu lieu s’accordent à dire la même chose
après avoir vu, senti, touché, il est évident que cette pensée est
juste ». Eh bien la Fraction, à elle toute seule, sans
“toucher”, sans “voir”, a pu donner par exemple une réponse aux événements
d’Espagne, une réponse qui, par la suite, a eu une confirmation si
retentissante que même ses adversaires (les plus sincères) doivent reconnaître.
Avec ceci, je ne veux pas dire qu’il est nécessaire d’être éloigné des
événements pour pouvoir bien les comprendre, non, mais je veux seulement
démontrer que ce n'est pas la présence pure et simple lors de certains
mouvements qui permettent d’arriver à une compréhension, de même que ce n'est
pas non plus lorsque les faits sont saisis par tous que l’avant-garde
s’exprime, puisque son rôle n’est confirmé qu’à la condition qu’elle sache
indiquer les symptômes d’une tendance en mouvement.
Cette condition idéaliste,
que je trouve chez Bianco, pointe dans cet autre passage, page 52 du SEME n° 4 : « Il y a
celle du moindre effort qui substitue aux faits, à la vie, qui
semblent arrêtés, des solutions idéales (les termes ne sont pas
soulignés dans le texte) construites de manière cérébrale avec la
pensée ».
Il est évident que
l’on défend ici l’idée selon laquelle la pensée n’est pas le fruit de la
matière, c'est-à-dire que la pensée peut être élaborée en dehors des faits,
finalement de la vie ; l’on détruit ainsi la thèse fondamentale de la
conception matérialiste qui proclame que la pensée est le produit du cerveau,
lequel n’est rien d’autre qu’un organe bien “matériel” fonctionnant en tant
qu’attribut de la réalité extérieure.
Et c’est toujours
sur la même base idéaliste, à propos du rôle des militants communistes dans les
syndicats, que Bianco s’exprime à la dernière page n° 56 du SEME n°
4 : « Le militant communiste dans le syndicat participe à toutes
les manifestations, quelles qu’elles soient, qui sont organisées par les
syndicats, il accomplit en cela la fonction d’un thermomètre qui enregistre la
température. Son cerveau ne peut pas en être déréglé étant donné qu’il
se trouve en dehors du milieu où se déroule la manifestation et que les fils régulateurs
sont à l’extérieur, dans le parti qui lui se trouve dans le milieu historique
déterminé et en opposition ouverte avec celui de la manifestation
(termes non soulignés dans le texte). ».
Il est clair
qu’ici aussi pour Bianco, le cerveau n’est pas un organe qui agit en reflétant la
réalité, et c’est la raison pour laquelle celui-ci peut croire qu’il peut
rester relié au parti tout en se trouvant dans le milieu historique en
opposition ouverte à celui de la manifestation, même si lui, Bianco,
demeure dans le milieu de la réalité ennemie, de sorte que pour Bianco, le
militant qui est tel, puisqu’il est le fruit du milieu du parti, peut se
détacher de ce milieu et agir sur un terrain qui n’a aucun lien avec la
finalité que le parti lui-même se propose.
Et il ne faut pas
croire que Bianco veuille répéter une notion ancienne et juste quand il est
question d’agir sur un terrain spécifique de classe, non, il ne dit pas cela,
bien qu’il écrive de manière très claire ceci : opposition ouverte à la
manifestation ; c'est-à-dire que le parti se trouverait en opposition
ouverte et que l’on pense que cette opposition n’a été appliquée par la Fraction
que quand il s’agit d’organismes passés à l’ennemi. C'est pourquoi il est clair
qu’il s’agit de la conception caricaturale du léninisme qui nous fait voir le
bolchevik présent dans tous les lieux où la masse est présente et, quand
l’heure sonne, crac, les “dirigeants” sont présents ; mais certainement
que Bianco ne veut pas dire cela parce que, si c’était vrai, il aurait élargi
le plan “stratégique” et proposé une pénétration de toutes les administrations
de l’État par les militants ; et alors, qu’est-ce que cela veut
dire ?
Pour autant que je
le sache, la Fraction s’est trouvée en lutte contre tous sur les trois points
suivants : 1°) pour la destruction et non la pénétration des syndicats
fascistes ; 2°) contre la
participation à la guerre impérialiste et pour le défaitisme et
la transformation de cette guerre en guerre civile ; 3°) désertion et
dénonciation des manifestations, y compris celles qui sont organisées par les syndicats
sur un terrain d’union sacrée, prélude à la guerre impérialiste et lien
direct avec elle. Bianco se trouvait-il peut-être en désaccord avec la Fraction
sur l’un de ces trois points ? C’est impossible car ils sont unis par un
lien si indissoluble que, si l’on en rejette un, cela revient à détruire les
autres.
En définitive,
s’il existe l’indépendance individuelle dans le domaine de la pensée vis-à-vis
du parti, à l’intérieur de celui-ci, il n’est pas possible d’accepter
l’indépendance du militant sur le terrain extérieur où l’organisme agit avec
une physionomie organique et centralisée. D’autre part, le parti doit maintenir
son indépendance au sein de la classe et il doit lutter toujours sur le terrain
de classe, y compris quand celle-ci est la proie de l’ennemi. Le cours
parallèle qui se déroule entre la classe prolétarienne et le parti n’a pas lieu
parce qu’il existe une coïncidence entre les deux éléments, étant donné que, si
l’on concevait les choses ainsi, l’on oublierait que le parti est également un
fruit expérimental historique qui lui permet de rester sur les voies de classe
en toute situation (et quand le parti dégénère, la Fraction apparaît en tant
que continuité révolutionnaire).
Lier le parti aux
conditions que l’ennemi parvient à donner au prolétariat équivaudrait à réduire
l’avant-garde au même niveau que les organismes de masse, qui représentent un
stade inférieur de la lutte historique de la classe prolétarienne, laquelle, au
contraire, s’exprime par le biais du produit supérieur qu’est le parti.
Le terme de
“synthèse” prend la place du concept démagogique ouvriériste que l’opportunisme
est parvenu à faire triompher, afin de mieux trahir ce même prolétariat dont il
voulait défendre “l’honneur” en déclarant que le parti est une partie
intégrante de la classe. Dans la pratique, le concept en question est réalisé
avec la transformation du parti en cellules, base décisive pour la destruction
de la notion de parti. La formule de la synthèse exprime au contraire
très clairement l’élément parti avec les points suivants : 1°) la notion
d’indépendance du parti vis-à-vis de la classe, et bien que la marche des deux
éléments soit parallèle, aille dans la même dircetion, il n’existe pas de
solubilité des deux éléments ; 2°) la nécessité d’un apport scientifique
historique qui ne peut provenir que des déserteurs de la classe ennemie(*) ;
3°) le caractère spontané des adhésions individuelles qui, en triomphant de
tout particularisme, sont disposées à tous les sacrifices pour un organisme
issu de la même volonté politique de ses membres, et, à leur tour, ces membres
sont le fruit des conditions mêmes qu’ils ont créées.
Évidemment, si
l’on accepte que le militant soit un produit du parti et que, d’autre
part, la théorie nous enseigne que
l’individu ne peut être conçu qu’en tant que produit social et non isolé, en
lui donnant une investiture divine (et c’est ce que Bianco fait) il n’est pas
possible – à moins il ne s’agisse d’un phénomène inconnu de la science – que
Bianco reste et agisse matériellement sur un terrain bien défini et concret,
c'est-à-dire sur le terrain qui représente le cours qui est à l’opposé de
l’autre cours révolutionnaire, celui où se trouve et agit cet organisme dont il
est le produit.
Quand Bianco
affirme que son cerveau ne se dérègle pas parce qu’il est attaché au parti
« avec des fils », il fait encore une fois une erreur. Si l’on peut accepter
que Bianco maintienne l’indépendance de son propre cerveau “individuel” (et,
encore une fois, il ne s’agit pas de concevoir l’individu isolé, mais il s’agit
ici d’un militant qui veut lutter pour la révolution dans le camp ennemi),
et cette possibilité d’indépendance est très relative, le cerveau qu’est la
cellule du parti est cependant immédiatement détruit. Si cela n’était pas
vrai, toutes nos positions intransigeantes à l’égard de la méthode manœuvrière,
érigée en principe par le centrisme, le trotskisme, etc., seraient erronées.
Seraient alors justes toutes les manœuvres qui ont entraîné tant de défaites
pour le prolétariat ; serait alors juste tout le bagage opportuniste à
partir duquel, en tant que son opposition brutale, notre Fraction est née ;
et enfin on verrait la destruction de la thèse historique fondamentale de
l’impossibilité absolue de pénétration et de coexistence de la classe
prolétarienne au sein de la classe capitaliste. Après le réformisme de la II°
Internationale, après l’expérience de la dégénérescence de l’État prolétarien,
et enfin après la dernière expérience des socialisations tant proclamées de la
Catalogne, ce postulat historique représente l’un des points décisifs sur le
chemin de l’émancipation de la classe prolétarienne, sur la route qui mène à la
conscience de pouvoir opposer à la société existante l’autre société qui,
abstraitement, se trouve au sein de la classe ouvrière et qui, concrètement, se
forme et se réalise au sein de l’avant-garde, et ceci n’est possible qu’en
opposition extrême à tout ce qui tourne autour de la société actuelle qui est
mourante.
Une autre thèse,
exposée à la page 54 du SEME n° 4, démontre la manière de penser
antidialectique du camarade Bianco : « Les communistes ont toujours su et
affirmé que les syndicats ont toujours représenté de fait l’Union sacrée en
temps de paix et en temps de guerre. Ils savent que les syndicats ont toujours
représenté, dans tous les pays, l’instrument fondamental, la soupape de
sécurité, destiné à maintenir le lien du capitalisme avec le prolétariat et
son contrôle sur lui ».
En admettant a
priori un fait qui s’est conclu par l’évolution contradictoire d’années dont
les révolutionnaires ont pu prévoir et dénoncer la tendance, mais dont il ne
pouvait pas constater la conclusion sans tomber dans le ridicule, c'est-à-dire avant
que la quantité de facteurs dégénératifs ne se soit transformée en qualité
réelle de trahison, Bianco non seulement détruit la conception du saut,
étant donné que, si la chose existait, la nécessité du déclenchement fait
défaut, et qu’elle est même est impossible, mais encore une fois, avec ce
raisonnement, il parvient au renversement de l’idéologie matérialiste qui admet
le mouvement de la matière. De cette manière-là, dans le domaine des sciences
naturelles et physiques, si l’on suit le concept de Bianco, l’on pourrait
affirmer par exemple que l’être humain a toujours existé alors qu’il est prouvé
que, avant l’homme, il existait des animaux, et que, encore avant, la planète
se trouvait en pleine combustion volcanique.
La méthode
dialectique permet au contraire, dans une certaine mesure, de concevoir et de
mettre en œuvre des perspectives parce qu’elle donne la possibilité de repérer
les différents éléments qui composent un mouvement donné, mais c’est seulement
quand les conclusions se présentent concrètement qu’il est possible de prendre
position sur la nouvelle orientation que les situations prennent à chaque étape
conclusive.
En déclarant, face
à la réalité objective actuelle de l’union sacrée, que celle-ci a
toujours existé, Bianco exclut la possibilité d’évoluer dans les nouvelles
situations, étant donné que la pensée marxiste ne peut progresser que sur la
base concrète des faits. Il n’est pas possible de suivre l’évolution des
situations sans avoir des points d’appui bien clairs. Bien qu’étant la négation
de la logique formelle, la pensée dialectique n’en renonce pas pour autant à la
proclamation de la vérité logique objective qui consiste à dire par
exemple que nous sommes aujourd'hui dans une situation de guerre
impérialiste. Cette constatation objective permet l’élaboration d’une pensée relative
à une perspective à venir ; si, au contraire, l’on dit que la situation de
guerre, d’union sacrée, a toujours existé, c’est la renonciation totale au
progrès de la pensée et la pétrification de l’organisme qui, pour être
révolutionnnaire, doit se trouver sur le “halte qui va là” des situations sous
peine de se fossiliser.
Bien qu’étant un
facteur de volonté, le parti agit dans les situations sur la base d’une
possibilité d’action, et le croisement qui se produit entre la volonté et la
situation objective représente la capacité du parti d’avoir une connaissance
exacte de la situation extérieure. La capacité de la part du parti (ou de la
fraction) de savoir déserter le terrain de l’union sacrée et dénoncer son
action : la guerre, etc., c’est aussi la capacité d’intervenir demain dans
les situations de la lutte révolutionnaire. Nous tromper en gravant la réalité
du devenir dans sa propre caractéristique est une erreur relative, mais c’est
une erreur fatale quand au contraire l’organisme est incapable de répondre au
caractère immédiat de la situation. Si la capacité de juger la situation qui se
présente fait défaut, c’est alors l’incapacité de savoir saisir le moment
suprême, celui que Lénine, seul, en octobre 1917, a su indiquer et qu’il a fait
triompher au sein de la Centrale du parti, c'est-à-dire le moment d’une
situation, bien que se caractérisant comme révolutionnaire, pour laquelle la
question insurrectionnelle ne se posait pas indépendamment de la présence de
facteurs dont le contrôle demandait une extrême sensibilité à tous les
mouvements de la matière incandescente. Le fait que la capacité du parti en ce
moment-là se soit concentrée en un seul individu était peut-être inévitable,
comme il était inévitable que le triomphe de la nécessité de l’insurrection
soit acceptée à l’unanimité et cela non pas en raison d’un esprit “papiste”,
mais parce que Lénine a pu s’élever au niveau du contrôle de la situation étant
donné qu’il était le produit d’un milieu dont l’extrême sélection politique
comportait une grand capacité de laquelle devait inévitablement naître une
unité de vues.
Dire que le fait
que les syndicats aient été la proie de la classe ennemie a toujours existé,
c’est céder au pur fatalisme. Ce qui est certain et qui a toujours existé depuis
que les organisations syndicales existent, c’est que deux orientations se
présentaient à elles : l’orientation révolutionnaire ou celle de
l’incorporation dans la classe ennemie ; la capacité marxiste, c’est la
capacité de savoir surveiller et dénoncer là où l’incorporation se
produit ; ne pas se préoccuper de cela, c’est concevoir que la lutte dans
les syndicats doit toujours être menée les yeux fermés, même quand ces
organismes ne sont plus sur un terrain prolétarien, cela veut dire mettre la
conception marxiste au rancart, ne pas savoir distinguer ou ne pas chercher à
distinguer les deux terrains : le terrain prolétarien et le terrain
capitaliste ; voilà une belle méthode d’analyse digne de ceux qui pensent
que la terre est immobile.
Il n’est pas possible
non plus d’affirmer qu’il existait déjà un fait concret, dans sa formation,
même minuscule, d’incorporation, du moment que les syndicats se trouvaient
à la merci d’un ensemble de facteurs qu’il n’est pas possible de vouloir les
comparer à la situation actuelle.
Avoir voulu
affirmer dans le passé que tel ou tel facteur représentait les éléments
définitifs de la trahison et de l’union sacrée aurait été du pur
fatalisme ; ce qui en revanche est évident, c’est que le poison ennemi
était présent et que le syndicat ne pouvait l’éviter qu’en empruntant la voie
opposée, celle de la révolution. Ce poison était représenté par ces tendances
contrerévolutionnaires qui agissaient bien sur un terrain de classe
prolétarien, mais que la fraction n’hésitait pas quand même à dénoncer dans
leur activité, parce que celle-ci, avec la maturation des situations, aurait
amené le prolétariat dans les bras de l’ennemi.
On peut dire,
après les déclarations de Staline et le 14 juillet 1935, que l’unité syndicale représente
la conclusion victorieuse du capitalisme. C'est une unité qui s’effectue avec
l’accord réciproque des deux organisations pour “l’indépendance syndicale” et
l’interdiction de la liberté de fraction. Ne luttions-nous pas continuellement
pour l’unité syndicale ? Eh bien la réalisation de cette unité a coïncidé
avec la destruction de l’unique
élément qui représentait l’espoir d’une
orientation de classe : la fraction syndicale ; c’est sur cette unité
que le capitalisme a réalisé les conditions pour une phase inévitable dans le
parcours de sa décadence.
« Dans les
périodes de “vide” qui coïncident presque toujours avec l’absence physique
de l’avant-garde révolutionnaire, les éléments qui apparaissent sur la scène
comme dominants, ce sont les antagonismes et la rivalité entre les différentes
castes qui demeurent les acteurs principaux ».
Ce passage dénote
une fausse vision de ce que représente la lutte de classe. Comme tous les
prolétaires décapités, Bianco est transporté par la nébuleuse de la manœuvre de
la bourgeoisie et il voit la situation à travers les lunettes que l’ennemi a
imposées aux masses. Est-ce que ce sont les castes “rivales” qui luttent entre
elles ? Ou bien est-ce la classe capitaliste, laquelle se présente sous
les divers masques qui vont du fasciste au trotskiste, etc., qui se trouve dans
les différents points qui correspondent à la place exacte occupée par la
fonction d’empêcher le véritable ennemi (le prolétariat) de voir clair ?
Il est sûr que les castes “rivales” luttent entre elles, mais c’est pour
trouver la meilleure façon de massacrer le prolétariat, et c’est pour cela que
la lutte de classe continue ; elle ne continue pas cependant sur le
terrain d’hier, mais plutôt là où l’on assiste aujourd'hui à la destruction du
prolétariat, que ce soit dans la guerre armée ou que ce soit dans la phase
inférieure de l’union sacrée et de l’économie de guerre, et c’est dans ce
secteur de la guerre que le prolétariat doit lutter pour faire irruption sur le
terrain révolutionnaire, car c’est là qu’il est cloué. Un jour viendra où le
prolétariat rira au nez de ceux qui indiquaient le sentier tortueux au fond
duquel ne se trouvait pas le début de sa libération, mais plutôt la chaîne des
fronts impérialistes et de l’économie de guerre.
Et de nouveau
apparaît ici la fausse notion du concept marxiste : périodes vides,
lutte de caste. Sans certainement le vouloir, Bianco annonce l’arrêt de
la lutte de classe. Au contraire, la pensée marxiste nous enseigne que la
matière est en mouvement perpétuel. Et si l’histoire trouve porte close sur le
terrain du progrès économique, quelle est l’issue que le marxiste doit prévoir
à propos de cette matière qui ne s’arrête jamais ?
Peut-être Bianco
croit-il que ce sont les “castes” qui peuvent arrêter le mouvement ?
Impossible, puisque la réalité extérieure existe indépendamment de la volonté
humaine. Ce que peut faire Mussolini par exemple, c’est de fournir une
orientation au mouvement, vers l’Éthiopie, vers l’Espagne, et le Front
populaire ne fera rien de différent, c'est-à-dire canaliser le mouvement vers
le secteur de l’économie de guerre. Mais est-ce que ceci pourra durer ?
Non, impossible, et c’est pourquoi il faut que l’organisme puisse se trouver au
point où la matière débordera et qu’il puisse savoir lui donner une
orientation.
Et il est normal
que, quand l’on ferme les yeux devant la situation de guerre et que ces yeux
sont bien ouverts pour constater la lutte entre les “castes” en tant que
facteur dominant, l’on ne puisse pas accepter l’indication qui correspond à la
forme brutale dans laquelle la lutte de
classe se manifeste.
Les castes
auxquelles Bianco fait référence ne peuvent pas lutter entre elles parce qu’il
n’existe pas un abîme de classe qui les sépare ; toutes ces castes sont
le fruit direct de la base économique sous-jacente qui se nourrit des
chairs des prolétaires, elles sont le moyen de diversion que la bourgeoisie
crée consciemment ou inconsciemment par lequel Bianco se fait brouiller
la vue, de même que malheureusement tous les prolétaires ont la vue
brouillée.
Les communistes au
contraire, bien que surveillant les feux d’artifice qui éclatent entre les
différentes castes, vont à la source réelle de la caractéristique de la
situation, c'est-à-dire de la matière de base, et c’est pourquoi ils peuvent se
permettre d’indiquer au prolétariat une voie de sortie qui, bien qu’elle ne
soit pas acceptée immédiatement par les prolétaires, représente de toutes façons
et inévitablement l’issue qui les rassemblera spontanément sous l’impulsion de
situations finales.
« Les
revendications partielles : là comme ailleurs, le progrès est synonyme
d’une extrême confusion. Pour rétablir certaines notions élémentaires sur
ce problème, il est utile de préciser la signification que la question des
revendications immédiates a toujours eu pour les communistes » (termes non
soulignés dans le texte). Page 54 du SEME n° 4.
Bianco commence en
disant que le terme de “progrès” est synonyme de confusion extrême, mais, après
avoir fait cette déclaration, il ne répond pas au problème et il se transporte
au contraire sur l’autre terrain, celui de l’orientation que les communistes
doivent donner aux revendications : ce qui démontre que Bianco crée un dualisme
entre les revendications de classe : soit un élément qui naît des
contradictions de la société capitaliste en mouvement continu (ce qui ne veut
pas dire seulement progrès car, dans la phase actuelle, le mouvement est
orienté vers la régression (destruction)) et l’autre élément, celui du parti,
qui (comme cela est dit dans une autre partie de l’article), indépendamment du
fait qu’il agisse en se fondant sur la réalité immédiate de la lutte de classe,
contient en lui une capacité et une conscience de l’expérience historique qui,
ajoutées au facteur volonté, le fait se retrouver à l’avant-garde aussi bien
des situations contingentes que de la phase historique. Dans la période
progressiste du capitalisme, les revendications, en tant que facteur en soi,
représentaient une poussée du progrès social historique, même si elles ne
trouvaient pas immédiatement leur débouché sur le terrain politique. C'est le
bernsteinisme et rien d’autre qui devait être le facteur contrerévolutionnaire,
et pourquoi pas le réformisme ? Parce qu’il pouvait réellement s’appuyer
sur des réformes qui n’étaient pourtant pas menées par magnanimité puisque la
phase se caractérisait par la multiplication continuelle de l’exploitation
économique fondée sur l’extension de la production et par la marche qui
s’ensuivait vers le socialisme. Au lieu du socialisme, l’on a eu la
guerre ; celle-ci était inévitable en raison de l’absence d’un organisme
fondé sur la véritable interprétation de l’idéologie marxiste qui aurait su se
servir du contenu progressiste des revendications et les orienter vers la
conquête du pouvoir politique. Ceci démontre que les réformes, les
revendications, etc., n’étaient pas en contradiction avec le cours révolutionnaire
et que, jusqu’à un certain moment, il et elles marchaient du même pas.
Mais il vaut mieux
passer immédiatement à la situation actuelle (en négligeant la période de
reconstruction) laquelle pourrait être désignée comme l’extrême opposé de la
phase indiquée ci-dessus, étant donné que, aujourd'hui, l’économie est fondée
sur la production de guerre, c'est-à-dire non pas sur la multiplication, mais
sur la destruction, de richesses, et donc sur la régression avec l’augmentation
de l’exploitation.
L’élément
politique contrerévolutionnaire de cette période ne peut pas être le réformisme
classique ; pour transférer le prolétariat sur le terrain où il se trouve
actuellement, il était absolument nécessaire qu’intervienne un élément capable
de masquer l’exploitation terrible des masses à l’aide de la démagogie révolutionnaire,
en particulier quand la situation se trouve déjà dans l’engrenage de la guerre.
Pourquoi le centrisme et non pas le réformisme ? La réponse à cette
question est fournie par l’importance actuelle de l’économie et logiquement des
revendications.
Dans une autre
partie de son document, dans SEME n° 4, Bianco tente de faire du tapage en se
référant à Lénine, et mal lui en prend quand il veut citer le Que faire ?, son ouvrage “monumental”,
parce que, en citant ce chef d’œuvre, il se trouve dans l’impossibilité de
reproduire certains passages qui ne représenteraient pas une attaque contre
ceux qui parlaient de « mouvement ouvrier pur », de « surestimation
de l’idéologie », ou encore « d’ouvriers pour les
ouvriers », contre ceux qui voulaient justifier la « soumission
servile » à la spontanéité. Enfin, dans son livre, Lénine entre en lutte
ouverte contre tout ce qui est périmé, contre ceux qui voulaient réduire
le parti à un trade-union, contre ceux qui voulaient étouffer l’organisme
(qu’il a su gagner en 17) sous le poids d’une phase dépassée, et, pour conclure
son livre tout en répétant le titre : que faire ?, Lénine répondait :
« liquider la troisième période ».
Liquider la phase
primitive de l’évolution de l’organisme, ouvrir la voie vers le parti en renforçant
le bagage expérimental grâce aux dernières expériences décisives, jeter les
bases des liens internationaux, pousser les recherches à travers des
perspectives générales, ne pas perdre de vue le maillon le plus faible, telle est
la réponse de la Fraction.
Gigi
Le problème
soulevé par le camarade Bianco dans le n° 4 du SEME est, je le crois
personnellement, d’une très grande importance, et non pas parce que Bianco
voudrait fournir une réponse à la situation actuelle avec des reflets de
situations historiques qui ont évolué, mais il est important parce qu’il touche
à une question de fond inhérente aux “critères marxistes d’analyse des
situations” ; une tentative de clarification de ces critères serait, à mon
avis, un grand pas en avant de la part de la Fraction sur la voie de
la transformation en parti. Mais, pour avancer dans cette dircetion, il
est nécessaire d’éviter que la polémique demeure restreinte à deux éléments, et
c’est pourquoi l’entrée en piste d’autres camarades ouvriers entraînerait
l’élargissement de la vision compréhensive d’un problème aussi important.
G.
*********
Résolution
sur la question du fonds
Il résulte de
l’analyse et de la discussion qui s’est ensuivie de l’article (le seul) publié
dans le n° 4 du SEME signé Nino une série d’affirmations théoriques qui
dénaturent la fonction politique de notre Fraction, et qui se contredisent les
unes les autres.
Il n’y a pas
d’ébauche de clarification de ce problème sérieux et épineux. Les positions de classe
se confondent avec celles des rapports avec les masses. Les
principes, les bases organiques, sur lesquels l’action des communistes doit se
fonder, deviennent des conditions circonstancielles.
L’on refuse la
présence de la classe dans les syndicats, mais on la retrouve sur le front de
la guerre impérialiste. L’unique argument solide contre la résolution du
groupe de Marseille serait l’absence de sérieux dans la partie polémique parce
que l’on se réclame de la fonction de la Croix Rouge. Mais l’on fait silence
sur les principes qui y sont exprimés.
Toute la tendance
reste sur la tentative de justifier la position en occultant la notion centrale
qui, bien qu’elle soit ancienne, ne cesse pas d’être ce qu’elle est.
Tout demeure
conditionné par les bonnes intentions de la C.E. et non pas par l’harmonisation
des positions politiques exprimées par la Fraction au regard de la guerre
impérialiste.
Étant donné que
notre Fraction est l’expression historique de la finalité de la classe
prolétarienne, toutes les positions prises sont nécessairement des positions de
classe, même quand elles sont d’énormes erreurs (voir la question syndicale).
La réunion décide
de présenter des conclusions nécessaires à la clarification des positions
opposées sur le fonds :
1°) Elle réaffirme
son adhésion totale aux positions contenues dans la résolution présentée par la
groupe de Marseille.
2°) Elle demande à
tous les camarades de la Fraction de s’exprimer sur la question qui est arrivée
à un point tel qu’elle compromet toute activité conséquente de notre
organisation.
3°) Elle engage la
C.E. à rédiger une résolution définitive sur le problème en discussion.
et 4°) d’organiser
ensuite dans la Fraction un référendum sur les deux positions en présence afin
de ne pas traîner la question jusqu’au congrès, ce qui équivaudrait à l’arrêt
de toutes nos activités relatives à la situation espagnole, et ce
qu’aucune mesure disciplinaire ne pourrait modifier et encore moins résoudre.
2 janvier
1938 Voté par les
groupes de Marseille, de La Seyne et de Lyon
Un
vote contre
Procès-verbal de la réunion
du groupe de Chambéry
avec la présence d’un camarade de
Lyon
On ouvre la
discussion sur la question de la solidarité, sur la base de souscriptions, pour
toutes les victimes de la guerre impérialiste d’Espagne.
Le camarade de
Lyon demande que la Fraction ne parle pas de souscriptions et qu’elle reprenne
sa position initiale de ne pas intervenir par de l’aide dans la guerre
d’Espagne, tout en considérant que, bien que cette guerre réponde à tous les
caractères de la guerre impérialiste, elle présente et elle conserve un
caractère tout à fait particulier. En réfléchissant sur les recommandations de
la Fraction concernant toutes les victimes de la guerre, il se demande si ce
n'est pas exactement le même sujet (l’aide) qui se présente également pour les
volontaires fascistes de la guerre impérialiste éthiopienne. Puisque la
Fraction soutient qu’en aidant une partie l’on prolonge la guerre, en aidant
l’une et l’autre, sa durée sera doublée.
Deux camarades de
Chambéry : si la C.E. avait bien interprété l’esprit de la lettre de
Chambéry, ses reproches auraient été mineurs ou nuls. L’on y affirmait la complète solidarité politique avec la
position de la Fraction. Il était donc compréhensible que cette ligne politique
serve de base de discussion (position déjà prise et défendue par ces camarades
avant votre communication), tout en soutenant en même temps que la Fraction ne
serait intervenue en Espagne que pour aider les saboteurs de la guerre
impérialiste. C’est seulement à ces victimes d’un camp et non de l’autre
qu’elle exprimait et offrait sa solidarité politique, morale et si possible
matérielle. Ils n’ont pas eu l’intention de faire une rébellion politique en
refusant de faire circuler les fiches telles qu’elles sont remplies mais, en
toute franchise, ils ont dit non au lieu de oui (en ne faisant
rien) quand ils reconnaissaient l’impossibilité de mener à bonne fin
l’initiative que vous avez prise, comme vous-mêmes vous vous efforcez de le
faire comprendre en affirmant que plus que la quantité d’argent récolté, c’est
la solidarité morale qui émane de cet acte hautement classiste. Nous avions
dit : il est impossible de faire circuler ces fiches parce qu’autrement
même le peu de travail politique que nous pouvons effectuer ferait défaut. Vous
n’entendez pas la chose ainsi. Nous au contraire, nous affirmons et nous
considérons comme très utile à toutes fins de dire résolument non quand ceci reflète,
comme dans ce cas, le sens de l’impossibilité.
*********
Fédération
du Sud –
Réunion élargie du Groupe de Marseille
Ordre du jour :
1°) a) communications - b)
cas Bacco
2°)
Lettre du Bureau de Paris
3°)
Situation internationale et les origines de la guerre
Communications et
autres : l’on examine la situation financière des groupes et autres
questions de détail.
Cas Bremond :
Romano, Tullio et Pataro (La Seyne) demandent que soient prises des décisions
sur l’attitude de ce camarade qui ne répond plus aux convocations du groupe. La
décision est prise.
Lettre du Bureau
parisien : Romano donne à nouveau lecture de la réponse d l’U.P.P., Tullio
explique comment le Comité a été chargé de rédiger un schéma de réponse étant
donné que la teneur ambiguë des conclusions des camarades de Paris avait
soulevé un ensemble de considérations de caractère politique, mais, étant donné
la présence d’un délégué du groupe de La Seyne, la lettre sera lue après la
discussion.
Pataro : « Notre
groupe a discuté de la réponse de l’UP ».
Alfredo s’est
exprimé totalement contre, il dit que l’on ne répond aux questions que de
manière incomplète ou complètement négative. Pataro dit que, pour lui, la
question la plus brûlante est la question syndicale ; elle resurgit en
plein dans ses contradictions
précédentes, en particulier après le projet Chautemps sur le “Code du travail”.
Milanese :
« Malgré les contradictions créées par l’industrie de guerre, les bases
essentielles des mouvements de masse demeurent les revendications partielles.
Si l’on veut rester des communistes, défendre des positions de classe, il faut
éviter de se poser “préventivement” le
problème de l’inéluctabilité de notre exclusion des organisations syndicales ;
sur le fond, la Fraction a pris des responsabilités politiques. La lettre fait
de l’ironie sur la question, mais ce qui reste, c’est la tentative de vouloir
infiltrer dans la Fraction des idéologies “nouvelles” et tout aussi
dangereuses. Si l’on insiste encore à vouloir tout renvoyer au congrès, nous
devrons insister à notre tour sur la tenue rapide de celui-ci ».
Piccolo :
« La première question à l’ordre du jour, c’est le fonds. Il est
nécessaire de la résoudre parce qu’elle a pour nous une grande importance
politique et qu’elle est aussi un problème d’activité communiste ; il est
étrange que l’on cherche à l’éliminer en la rejetant au second plan pour ne
plus en discuter. De toute façon, l’on devra rendre compte des décisions de nos
groupes. “Question syndicale” dit que l’on veut appuyer sur le point faible,
celui de la position sur les émigrés, mais il existe des positions de principe
qui peuvent être défendues et porter leurs modestes fruits dans la lutte de
classe ; tout le méfait est et reste dans le super-confusionnisme
théorique qui culmine dans la position dangereuse : “il faut se faire
exclure des syndicats”. Également sur notre proposition de faire venir un
camarade, l’U.P.P. veut la résoudre de la manière la plus bureaucratique. En
dehors de la presse qui est désormais devenue une normalité, il n’est pas
possible de faire autrement, l’on méconnaît toute l’importance d’un minimum de
travail politique, et l’effort des camarades qui voudraient le faire est refusé
sous des prétextes financiers. ».
Romeno :
« Refuser que l’on puisse défendre les positions de classe de la Fraction
relative aux syndicats, c’est méconnaître l’utilité du travail parmi les
masses. Même si l’on tient compte de notre position de soi-disant étrangers,
cela ne peut cependant pas faire obstacle aux questions de principe qui sont
notre fondement, et que personne d’entre nous n’a jamais pensé à abandonner,
comme on le prétend, pour faire quelque chose. Cela ne dépend certainement pas
de nous si la situation évolue dans une direction favorable au capitalisme, car
ici intervient une série de facteurs que nous avons examinée et que nous
continuerons à examiner. ».
Eugenio :
« J’insiste particulièrement sur la question du fonds, nous avons fait un
effort pour clarifier la position qui nous semble juste et le centre n’a pas le
droit de renvoyer la conclusion à l’infini ». Romano réplique que cela
fait des mois qu’au lieu d’éclaircir le débat, on l’embrouille, et qu’il est
nécessaire de pousser la discussion jusqu’à son point maximal.
Tullio : « Je
souligne que l’on fait un effort pour régler différentes questions à l’amiable.
Il y a un abîme entre les thèses syndicales proposées à l’époque et le dernier
article de fond du journal. S’il est vrai que l’on n’a pas pris des positions
publiques sur la nouvelle “orientation”, du moins sur l’orientation syndicale,
la question de l’arrêt du peu de travail péniblement entamé a été un fait que
personne ne peut démentir. Les camarades n’ont qu’à examiner la situation
complètement opposée de nos groupes par rapport aux contacts avec de petits
groupes d’ouvriers syndicalistes et en tirer les conclusions. Toutes les
“nouvelles” questions sont la conséquence de cette analyse de la situation
internationale. Il est urgent d’approfondir les problèmes qui sont débattus
dans la Fraction, et certains camarades se sont déjà opposés à l’exagération de
l’évaluation donnée aux manifestations particulières, mais qui n’ont, à mon
avis, rien de nouveau. C'est pour ces raisons-là que le groupe a décidé de
reprendre la discussion sur le nœud de l’affaire embrouillée : la
situation internationale et les origines de la guerre. ».
Romano donne
lecture de la copie d’une réponse à l’U.P.P., laquelle est approuvée par le
groupe.
Pataro déclare que
le groupe de La Seyne décidera lors de sa réunion la réponse conforme aux
conclusions des camarades.
Étant donné
l’heure avancée, la discussion sur la situation internationale est renvoyée à
la prochaine réunion.
À la suite d’une
explication que l’on a eue avec le camarade Bacco, le groupe a décidé d’annuler
la candidature dudit camarade. De plus amples informations seront transmises au
centre dans la lettre qui suivra. Par voie de conséquence, suspendez l’envoi de
la correspondance au susdit.
Saluts fraternels
Tullio
*********
Résolution présentée par le camarade
Martin
à la suite de la réunion de la
Fédération (9 janvier)
et approuvée par deux membres du C.F.
de paris
Le camarade
Balilla écrira ce qu’il pense de ce problème.
---------
Pour résumer la
discussion qui a eu lieu dans la Fédération sur la constitution du Bureau
international, le C.F. déclare qu’il existe un accord entre le C.F. et
l’ensemble de la Fédération sur le fait de constater que la constitution du
B.I. représente la réponse marxiste à la conclusion de la situation,
conclusion qui s’exprime objectivement dans la guerre de par le monde entier,
même si on ne la fait pas dans tous les secteurs, étant donné que l’économie
qui exprime la maturation de la situation de guerre dans ces secteurs, où les
contradictions sociales se trouvent encore à évoluer, se situe dans le domaine
qui voit la manœuvre du capitalisme pour faire déboucher la situation dans le
conflit armé lequel n'est rien d’autre qu’une conséquence directe des caractères
économiques fondés de manière éminente sur la production d’engins de
destruction qui représentent pour le moment en soi la destruction de richesse
dans l’attente de la destruction du potentiel humain.
Le C.F. constate
qu’il existe une évolution dialectique des positions prises dans le passé sur
la question des rapports avec le mouvement international.
La constitution du
B.I. par la C.E. et par la Fraction belge est la réponse communiste à la
situation actuelle ; la réponse marxiste pour ceux qui pensent être
l’avant-garde et le guide des luttes prolétariennes de demain.
Ce n’est ni par
hasard, ni par caprice de sa part, ni par sa volonté de faire quelque chose,
que la C.E. a créé le B.I., et encore moins pour compléter le troisième angle
d’un triangle. L’histoire nous enseigne que toutes les situations qui se créent
ne sont qu’une continuité de la lutte historique entre deux ennemis de classe, c'est-à-dire
que les situations résultent des contradictions du régime bourgeois et que les
solutions procèdent de l’avant-garde prolétarienne ; les événements
historiques ne sont qu’une chaîne d’événements qui se succèdent l’un entrelacé
avec l’autre, et les solutions communistes à toutes ces situations sont aussi
une suite de solutions dont l’une complète l’autre, c'est-à-dire qui
s’entremêlent en créant un bagage idéologique communiste qui nous permet de
fermer l’anneau de la chaîne idéologique marxiste ; que ceci soit un
triangle ou un carré, nous laissons aux géomètres d’en décider. Avec ceci, bien
entendu, il n’est pas exclu qu’un crochet de la chaîne puisse être mal soudé et
qu’il ne brise momentanément la bonne continuité de la ligne marxiste.
Pour ceux qui
pensent que, du fait de l’isolement de la Fraction par rapport aux masses (et c’est
pour cela qu’ils sont opposés à la constitution du B.I.), l’on ne peut pas
donner une réponse marxiste à la situation
parce que la Fraction est isolée, que ses mots d’ordre ne sont pas
entendus, ces camarades sont de fait dans l’autre camp ; en effet, nos
ex-amis de l’ex-minorité, avaient exactement la même réponse concernant
l’Espagne : « Ceux qui ne voulaient pas aller se battre en Espagne avec la
masse prolétarienne étaient des traîtres et des gauchistes de bistrot, ou des
gens qui vivaient dans les nuages » (parole qui était très chère à
l’ex-minorité), mais rester sur la terre, c'est-à-dire aller là où est
la masse, ne pas se détacher d’elle, voulait dire ne pas donner une réponse
communiste à tous les problèmes. Nous n’hésitons pas à affirmer qu’il vaut
mieux vivre dans les “nuages” que rester sur “terre” et se rendre de ce fait
responsables du massacre. Il semble juste de penser pour ceux qui ne répondent
plus de manière marxiste à la situation, en raison du fait que les masses ne
nous entendent pas, mais au contraire approuvent le criminel qui trucide ses
meilleurs défenseurs, que nous vivons hors du monde réel, mais que nous sommes
convaincus, ou du moins nous nous y efforçons, que lors du réveil des masses,
celles-ci nous trouveront sur la “terre”, bardés de l’idéologie communiste qui
conduira à la victoire, et non pas dans le camp de ses bourreaux. Les erreurs
de Lénine sur la question de la constitution de la III° Internationale et des
partis, le 1923 allemand, toujours sur la base de la thèse selon laquelle
l’on ne doit pas se détacher des masses, doivent nous enseigner à répondre aux
problèmes que la situation nous impose : non pas du point de vue de l’influence
numérique, mais de l’autre point de vue marxiste qui correspond aux intérêts
finaux du prolétariat.
C’est
la raison pour laquelle la réponse fournie par la C.F. à la situation,
avec la création du B.I., correspond à la nécessité de sauver la classe du
tourbillon dans lequel elle se trouve, à savoir celui de la guerre.
Avec la parution
de “Bilan”, la Fraction a donné à l’avant-garde du monde entier les directives
pour la constitution de groupes ainsi que la possibilité de le faire, grâce à
une clarification idéologique indispensable, en vue de la création de la
Fraction dans tous les pays, et si aucun groupe ne s’est constitué autour de
ces directives, la situation impose à la Fraction de ne pas attendre cette
création, mais si elle se retrouve seule, ou presque, la réponse à donner n'est
que le corollaire marxiste pour les besoins historiques des masses.
Et donc la
création du B.I. correspond pleinement à la réalité actuelle en vue du
sauvetage des énergies prolétariennes et de permettre à celles-ci de créer
l’organisme marxiste en tant qu’unique garantie de la victoire de demain.
D’autre part, la
création du B.I. établit aussi la nécessité pour l’activité de la Fédération de
faire apparaitre les conditions de sa création par la gauche en France, et
cette activité doit être effectuée par la direction révolutionnaire et contre
toutes ces formations politiques qui crient pour réclamer dix sous de plus pour
le salaire et des armes pour l’Espagne. Soutenir aujourd'hui en France, et
faire croire aux ouvriers, que les luttes partielles sont une victoire de
classe, sans promouvoir dans le même temps la lutte contre la guerre, c’est
permettre qu’ils ne trouvent pas le chemin de classe, c’est se rendre complice
de l’Union sacrée.
Janvier 1938
(*)
« Le
porteur de la science n'est pas le prolétariat, mais les intellectuels
bourgeois : c'est en effet dans le cerveau de certains individus de cette
catégorie qu'est né le socialisme contemporain, et c'est par eux qu'il a été
communiqué aux prolétaires intellectuellement les plus développés, qui
l'introduisent ensuite dans la lutte de classe du prolétariat là où les
conditions le permettent. Ainsi donc, la conscience socialiste est un élément
importé du dehors dans la lutte de classe du prolétariat, et non quelque chose
qui en surgit spontanément. ». (Citation de Kautsky dans le Que faire ? de Lénine).
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