PAGES PROLETARIENNES

mercredi 11 janvier 2023

LA FARCE DE LA LUTTE "UNIE" CONTRE LA LIQUIDATION DES RETRAITES

 

L'unité syndicale offensive



     
La farce de l’opposition « unie » de la gauche syndicalo-bobo aux attaques successives contre les retraites est une vieille tradition culinaire. Elle est un élément incontournable de la cuisine étatique. Sachant que l’absence de mémoire concernant les recettes sociales bourgeoises est une faille dans la conscience de classe, on ne peut que déplorer que les ouvriers soient considérés immédiatement comme une dinde farcie ou la poule aux œufs d’or. Pour accompagner la cuisson il suffit au gouvernement de balayer les critiques de manière infantilisante car cette question est affaire de spécialistes de la gestion étatique et d’économistes distingués. La farce syndicale est la meilleure alliée des accompagnements gouvernementaux. Plus original, en apéritifs manifestatoires, les farceurs syndicaux s’accorderont ce coup-ci à merveille avec les champignons bobo-fémino-écolos de la NUPES et des rouleaux de jambon de ce qu’il reste des scissions gauchistes besancenotiennes.

     Pourtant l’heure n’est pas à la plaisanterie. Je convie quiconque, y compris Mme Borne bornée, à venir visiter avec moi quelques cimetières de la région parisienne. Une chose frappe d’abord : certes nombre de tombes récentes comportent la dépouille de personnes entre 80 et 90 piges, tant mieux pour eux. Par contre, je suis effaré à chaque fois du nombre de fort probables prolétaires, nés vers la fin des fifties, enfouis sous le sol entre 40 et 64 piges ! Les chanceux, me direz-vous, au moins ils n’auront pas connu la retraite misérable que le gouvernement capitaliste prépare pour les jeunes générations !

     Et encore je n’ai pu visiter que quelques cimetières français mais partout ailleurs dans le monde, surtout en Amérique du Sud et dans les pays arabes, ce sont même des prolétaires trentenaires qui tombent dans la tombe très prématurément[1]. Les attaques sont menées et ont été menées surtout par des gouvernements « socialistes » (F.Hollande en dernier lieu), en France comme en Espagne par exemple. Mais surtout, en accompagnement des attaques gouvernementales de la bourgeoisie, la félonie syndicale est permanente.  En réalité, au-dessus de ce spectacle de forfaiture gouvernementale et de trahison permanente de la syndicratie, c’est la fin de la mystification de la retraite, et accessoirement d’une retraite heureuse ; jadis la retraite n’existait d’ailleurs pas, c’est la lutte centenaire du mouvement ouvrier qui avait fini par l’imposer[2].

Comme le notent les journalistes les plus honnêtes ce sont les ouvriers, ceux d’en bas qui sont le plus touchés… les couches moyennes (les cadres) sont encore protégés comme les flics et les militaires[3]Voici ce que j’en disais en 2010, en commençant par un extrait de Libé :

 « Les ouvriers paieront l’addition », ils l’ont toujours payé ; Rocard a dit un jour que les ouvriers payent la retraite des cadres :« Selon la Drees (Direction de la recherche), pour la génération née en 1950, l’âge moyen de validation du premier trimestre est proche de 17 ans pour les ouvriers hommes et de près de 20 ans pour les cadres. Si cet écart a tendance à se réduire au fil des générations (1,5 an pour ceux nés en 1970), il est hélas dû aux difficultés croissantes que connaissent les ouvriers pour s’insérer dans le monde du travail (sic !). Par ailleurs, à l’âge de 30 ans (pour la génération 70), les ouvriers hommes valident encore 10 trimestres de plus que les cadres masculins (soit 2,5 ans d’avance). Reculer l’âge de départ revient donc à pénaliser les ouvriers et employés, qui représentent près de 55% de la population active (respectivement 25% et 30%). Cet écart persistant, qui pourrait à nouveau s’aggraver en cas de baisse du chômage, se cumule avec une autre inégalité : l’espérance de vie. A l’âge de 55 ans, les cadres et professions intellectuelles supérieures (hommes) peuvent espérer vivre encore 29,2 ans, contre 25,5 ans pour les ouvriers et 26 ans pour les employés. Une différence de près de quatre ans en faveur des cadres, qui bénéficient en plus d’une meilleure santé une fois à la retraite »[4].


     Mes divers articles n’ont pas pris une ride et je pourrais probablement les publier sous la forme d’un bouquin, ce qui ne se fera pas car je n’ai plus les moyens de m’éditer et il n’y a plus que des merdes d’édition chez les vieillards de l’antique ultra-gauche en pantoufles. Je vous convie, pour raviver la mémoire des plus avisés de lire ma chronologie des attaques successives et « progressives » sur les retraites, ici : . https://proletariatuniversel.blogspot.com/search?q=retraite (que vous avez même plus de chance de trouver sur le site Lieux communs, puisque certains de mes articles sont repris par plusieurs sites : https://collectiflieuxcommuns.fr/?807-on-parle-de-nous

Je vous ressers quelques extraits choisis éclairants :

L’heureux temps de la retraite à 60 piges ? «  L’ordonnance du 26 mars 1982, le premier gouvernement François Mitterrand fixe à 60 ans l’âge légal de la retraite, au lieu de 65 ans. Selon Sarkozy, dernièrement, Mitterrand a gaffé. Du point de vue strictement économique bourgeois sûrement mais du point de vue tactique bourgeois, sûrement pas. La gauche ne devait pas parvenir au pouvoir au milieu de la crise. Or, étant donné le niveau des luttes ouvrières de la fin des 70 + les désillusions de couches entières de la petite bourgeoisie salariée (des avocats aux enseignants), il fallait lâcher du lest. Pompidou avait moins lâché en 68 que Mitterrand en 1982… on mesure là toute la trouille de la bourgeoisie et son intérêt à se débarrasser de travailleurs pas si vieux mais expérimentés. Il ne s'agissait pas alors d'une avancée sociale, comme cela avait été présenté mais d’un arrangement avec les entreprises en difficulté (incluant un paquet de pré-retraités contents de lâcher chagrin) et atténuer l'ampleur du développement du chômage. Cette concession à « l’accident électoral », plus les nationalisations, aggrava la situation économique de la bourgeoisie française, et le chiffre de 3 millions de chômeurs fût rapidement atteint, faisant sourire Mme Thatcher. Mais après tout, nous les pue-la-sueur on était content d’avoir obtenu la cuillère à 60 berges sans grève générale insurrectionnelle et sans morts sur le pavé « .

Quand les syndicats organisaient la défaite en 1993 : « Les syndicats organisent la défaite. C’est cette année-là qu’a lieu le débat entre Nicolas Sarkozy, secrétaire général du RPR, et Dominique Strauss-Kahn, ministre de l’Industrie et du Commerce, sur les acquis sociaux. Une large partie de ce face-à-face est consacré aux retraites. Sarkozy a du mal face au pontifiant professeur DSK mais, comme ils sont copains franc-mac, DSK ne le massacre pas trop. DSK peut encore jouer au malin « socialiste » contre une vilaine droite contre les « acquis sociaux » (mais ce mois-ci il a confirmé qu’il ne pouvait y avoir de différences « d’approche » entre lui et l’actuel président sur l’allongement de la durée de retraite… En cette année 1993, la majorité des syndicats signent en catimini les accords avec Balladur, après avoir tous appelés à cors et à cris à la mobilisation « contre les mesures scélérates du gouvernement », tout en divisant les ouvriers par corporation au sein du privé et en laissant le secteur public au repos ».

10 ans après l’attaque contre les prolétaires du privé c’est au tour du public : « 2003 : Arrive la réforme Fillon. Ministre des Affaires sociales dans le gouvernement Raffarin, Fillon est chargé de reprendre l’écheveau la réforme des retraites là où Balladur l’avait laissée. Fillon sait qu’il peut foncer 8 ans après l’échec de Juppé, en rabâchant que le public n’avait pas soutenu le privé en 1993 et en plaidant sur la gravité de la crise. Des grèves auront lieu mais bien moins importantes qu’en 1995 et avec des syndicats plus capables encore d’endiguer la protestation même si le 13 mai 2003, entre 1 et 2 millions de manifestants défilent dans la rue. Le Premier ministre, le madré Raffarin crâne : « C’est pas la rue qui gouverne ! ». La réforme Fillon, qui prévoit un allongement de la durée de cotisation et la mise en place d’un système de retraite par capitalisation, est adoptée à l’Assemblée nationale le 4 juillet 2003. Elle démantèle le régime spécial des postiers en particulier. Ce n’est qu’une étape, la réforme est encore jugée insuffisante pour assurer la pérennité du système. La CGT conteste avec Jean-Christophe LE DUIGOU, son spécialiste des retraites à la CGT face François Chérèque, chef bonze de la CFDT signataire de l’accord avec le gouvernement. Les syndicats se sont partagés la tâche pour laisser carte blanche au gouvernement grâce au bon (la CFDT), à la brute (CGT) et aux truands (les autres mafias désunies).

En 2008 ça passe en douceur : « Pour appuyer à leur façon la « fermeté du gouvernement » les syndicats planifient une journée nationale interprofessionnelle d’actions et de manifestations le 22 mai 2008, soutenue à grands cris d’appel à la « grève générale » par tous les gauchistes et anarchistes[5]. Et la JA fait plouf comme d’habitude. La réforme entre tranquillement en vigueur le 1er juillet 2008 pour les agents de la SNCF et de la RATP, a avalisé l’augmentation progressive de la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein, de 37,5 ans à 40 ans en 2012, soit la même durée que celle des fonctionnaires et des salariés du privé. Le 3 octobre, le ministre du travail Xavier Bertrand confirme à l’Assemblée nationale la suppression des régimes spéciaux de retraite (mais ce n’est pas vrai pourtant…où en tout cas cela ne reste pas clair, et qui ira vérifier dans chaque grande entreprise ?). Personne n’a oublié encore que la CGT a donné son accord en 2007 pour la réforme des régimes spéciaux, et, lors des grèves le chef CGT B. Thibault se fait copieusement huer, siffler, couvrir par les pétards en rafale, une véritable bronca pendant son discours par les « Conti » (Continetla-Clairoix) avec des cris : “Thibault démission” haut et fort repris par tous les premiers rangs. Lors du 49e congrès de ce syndicat il n’en menait pas large, se défendant d’être "affecté d’un sarkozysme aigu" comme le lui reprochent gentiment ses loyaux contestataires internes, mais néanmoins disciplinés. Le temps efface pourtant la mémoire des exactions syndicales puisqu’il n’y a que sur le site du CCI dans un article de l’époque qu’est rappelé la situation peu reluisante du sieur Thibault : « Ce que Bernard Thibault défend, ce n’est pas ce que les gens en bas attendent. Lors de la manifestation du 22 octobre (2007) dernier à Paris. Le 20 novembre, Bernard Thibault se fait siffler par les militants, on entendait scander « Thibault démission » (et c’est moi qui avait témoigné auprès des militants de ce groupe de ce que à quoi j’avais assisté: la fuite de la manif par un Thibault tremblant et entouré d’une escouade de policiers en civils) ; il reçut par la suite des menaces de mort à son domicile ».

     « Profitant du cirque médiatique autour des élections américaines, le gouvernement a fait passer en catimini lors du vote sur le budget de la Sécurité sociale, un amendement scélérat qui repousse pour les ouvriers du secteur privé, la mise à la retraite d'office de 65 à 70 ans. Autrement dit, au nom de la "liberté" de pouvoir vendre sa force de travail plus longtemps, l'Etat s'apprête à allonger le temps de travail pour prétendre à une pension de retraite. Les partis de gauche ont voté contre, soi-disant pour défendre la retraite à 60 ans, sans aucun doute, pour faire oublier leurs brillants états de service en matière d'attaques sur les retraites dans les gouvernements précédents. Les syndicats, eux, se sont offusqués, car ils n'ont pas été consultés, comme si leurs interminables négociations dans les salons feutrés de Matignon avaient déjà empêché des attaques contre nos conditions de vie. Comme en 1993, ce sont d'abord les ouvriers du privé qui sont visés par cet amendement, mais ensuite comme en 2003 et en 2007, cela sera le tour des ouvriers du public et des employés qui bénéficiaient des régimes spéciaux ».

     En 2009 la réforme scélérate « avance » comme un feuilleton : « Il faut continuer à avancer dans la « réforme » et défendre les gardes-chiourmes. M. Joffrin patron de Libé s’en charge, comme le rappelle R.I. : “Moi, je trouve que les deux principaux leaders syndicaux Bernard Thibault et François Chérèque font preuve d’un esprit de responsabilité remarquable […] ils s’emploient constamment avec une certaine habileté à canaliser le mouvement et à le laisser sur des rails syndicaux, à éviter la politisation excessive de la contestation.” Ce grand homme de “gauche” se met alors à nous expliquer comment le gouvernement Sarkozy doit œuvrer pour renforcer la crédibilité des syndicats et donc leur contrôle sur les rangs ouvriers par “une dialectique entre les manifs […] et la politique gouvernementale qui doit s’infléchir de manière à justifier la démarche de Chérèque et Thibault.” ! « (cf. RI de mai 2009). On peut conclure que le « problème » de la retraite est loin d’être réglé mais une chose reste sûre : « toutes les retraites vont baisser et ceux qui auront des petites retraites seront obligés de continuer à travailler pour pouvoir vivre".

En 2022 le plan d’attaque de Macron a été peaufiné 

     

Sur le plan structurel c'est une réforme clientéliste dérisoire, je promets à Paul de partir plus tôt, Bernard n'a pas la décote suffisante donc il attendra jusqu'à 67 ans, un effort sera fait pour Roger qui, vu ses années à porter des charges lourdes risque bien de crever vers 59 ans, alors on lui promettra une reconversion... Puis on a peaufiné d'avance sur le plan syndical (les apparatchiks syndicaux sont en lien permanent avec les ministres ad hoc) et surtout sur le plan politique. On se souvient des deux manifs séparées de la CGT et de LFI…contre la vie chère mais pas contre le capitalisme. La rivalité Martinez/Mélenchon avait fait sourire. J’avais d’ailleurs été interpeller Martinez en tête de son troupeau et je me trouvais avec les jeunes qui sifflaient les députés de la Nupes dans leur camion bâché à la Bastille en fin de promenade.

     Vous allez peut-être me trouver machiavélique ou diabolique, mais on ne pouvait pas sous-estimer cette rivalité et j’y ai réfléchi à deux fois, surtout avec l’affaire Quatennens. La cabale ridicule qui s’est acharnée sur ce jeune député, organisée par la police puis les journalistes aux ordres, avait clairement pour but de décapiter LFI ; de plus Macron a été largement aidé par les bourgeoises féministes de ce parti hétérogène et wokiste, preuve de plus de l’idéologie dissolvante et aliénée du féminisme bourgeois actuel, et de l’impuissance de cet organisme fait de bric et de broc et sans principes de classe.

     Cette campagne avec un doigt judiciaire point sadiquement sur le pauvre Quatennens et les coups de poignards dans le dos des folles féministes arrivistes, le parti de Mélenchon a été en effet affaibli. Et voici pourquoi. D’abord parce que ce parti était en passe de drainer un mécontentement général au niveau « politique », ce qui est bien plus gênant qu’au niveau syndical où les apparatchiks collabos sont très faciles à instrumentaliser. Non pas que la clique à Mélenchon représente la classe ouvrière, c’est un parti de bobos et de pouffiasses hystériques, ni qu’il constitue une alternative crédible au pouvoir bourgeois, mais qui pose quand même les problèmes à un niveau politique plus dérangeant, voire sujet à poser des question plus amples et plus inquiétantes qu’une procession syndicale ; je rappelle, ce que ne cesse de répéter, que le pouvoir aujourd’hui se donne tous les moyens pour empêcher de parler sérieusement politique, et oblige au règne des attaques personnelles et des scandales financiers ou de cul qui concernent tous ceux qui sont mis à l’index ; tout comme d’ailleurs Mélenchon et Cie s’attaquent surtout aux actionnaires et aux milliardaires mais pas au capitalisme.

     Enfin surtout l’équarrissage de LFI visait à affaiblir aussi LFI dans son enceinte de prédilection, car les lois sociales bourgeoises ne se décident pas dans la rue comme l’avait claironné un premier ministre de Chirac, mais dans l’enceinte de la principale chambre d’enregistrement bourgeoise, le palais Bourbon, vieille institution des classes dominantes successives depuis 1796 ; ce pourquoi il était donc utile d’affaiblir le principal noyau doryphore de la NUPES. En parallèle le RN avec son grand dadais Bardella, qui ne s’est risqué à appeler à manifester, jouera lui son rôle de claque conviviale dans l’hémicycle hémiplégique bourbonnesque pour ne pas dire royal pour ses mensonges et promesses.

La compétition a été gagnée par la CGT et ses confrères. LFI défilera au cul des syndicats le 19 alors que ce parti bobo misait défiler seul et en tête le 21.

LE VEHICULE LEGISLATIF IMPARABLE

La magouille de Macron est bien décrite par la radio d’Etat que je me contente de reproduire par après, et dévoile encore une fois combien le système gouvernemental bourgeois n’est ni démocratique ni humain avec un parlement qui ne sert à rien :

« L’attaque portée contre la clique disparate à Mélenchon visait donc à permettre d’ « enjamber l’obstruction parlementaire », en se fichant des dizaines de milliers d’amendements du noyau équarri de la NUPES, par la grâce des subtilités du PLFSSR, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificatif. Lequel, en imposant un processus d’adoption en 50 jours chrono, pourrait offrir la possibilité au gouvernement de s’en sortir sans 49.3. Si les députés n’avaient pas fini l’examen dans un délai de vingt jours, le texte partirait au Sénat dans sa version initiale, modifiée, si le gouvernement le souhaite, par les amendements votés à l’Assemblée (tant pis pour ceux qui n’ont pas encore été vus). En cas d’obstruction, en première lecture à l’Assemblée, il suffira à la majorité relative d’attendre la fin du sablier pour envoyer le texte au Sénat, et pas besoin de voter. D'un point de vue politique, la méthode permet au camp présidentiel d'assurer ses arrières : si l'accord avec LR venait à capoter, il pourrait toujours recourir au 49.3 librement, sans griller sa cartouche. En dehors des textes budgétaires, le gouvernement ne peut dégainer cet article qu'une fois par session parlementaire. Surtout, l'exécutif pourrait se saisir, selon plusieurs sources concordantes à franceinfo, d'un autre article de la Constitution pour accélérer le débat parlementaire : l'article 47.1 de la Constitution.Selon ce texte, "si l'Assemblée nationale ne s'est pas prononcée en première lecture dans le délai de vingt jours après le dépôt d'un projet, le gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours." D'autre part, "si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de cinquante jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance".

Et, cerise sur le gâteau, les complices syndicaux, comme en octobre dernier, nous refond le même coup de la grève "dure" à la veille des vacances de février... ce qui rassure sur la pérennité de l'immense mouvement de colère contre le "cercueil ou la misère" comme une poseuse de LFI s'est crue maligne de le postuler. L'annonce des BLOCAGES du secteur de la livraison de pétrole, est probablement le meilleur SABOTAGE des grèves éventuelles et de la protestation, confirmant le caractère artificiel et non démocratique des décisions des sergents recruteurs syndicaux, sans compter que c'est rassurer le gouvernement: au moins l'opinion sera indignée par ces mêmes méthodes utilisées l'an passé...pour irriter et diviser l'ensemble de la classe ouvrière. Avec de nouvelles queues aux stations service, plus l'opinion sera mécontente plus les apparatchiks pourront déplorer un ...manque de solidarité!

RESIGNATION OU EMBRASSEMENT SOCIAL ?

C’est la question naïve que posent tous les médias, faisant mine de s’inquiéter. Pourtant il n’y a pas de quoi. Même si « Révolution Internationale » va crier comme en 2008: « Ce n'est que par la lutte la plus unie et solidaire possible, ouvriers du privé, du public, des régimes spéciaux, chômeurs et retraités, tous ensemble, que nous pourrons faire reculer les attaques du gouvernement »[6].

     Or un tel généreux (et utopique) appel est hors de la réalité parce que tous les termes sont récupérés et dévitalisés par les défenseurs divers de l’ordre bourgeois. La « lutte unie et solidaire » c’est ce que proclame toute la gauche bourgeoise éclopée et extérieure à la vraie lutte de classe. La solidarité du privé et du public c’est une blague depuis le début du feuilleton pour flinguer les retraites (mais pas toutes) ; vous avez vu dans ma chronologie comment l’Etat bourgeois a procédé…secteur par secteur, et continue de le faire. Il peut tabler sur l’indifférence de la plupart des retraites sauvés de la réforme scélérate parce qu’ils y sont déjà, de même que tous ceux qui ont pu partir depuis ces dernières années avant que le couperet des 64 et 67 ne tombent (la réalité est aussi plus grave que l’attaque actuelle, c’est même déjà 67 annuités qui sont imposées pour tous ceux qui n’ont pas une carrière « pleine ») ; en gros la réforme scélérate est déjà passée avec un plus ! La solidarité avec les régimes spéciaux ? Nos révolutionnaires en herbe se mettent le doigt dans l’œil, même dans la classe ouvrière de plus en plus de gens sont indignés des « avantages » pour des métiers qui ne sont plus aussi pénibles qu’en 1945 ; à mon corps défendant je peux vous apprendre que les employés de l’EDF sont la corporation qui vit le mlus longtemps, même plus que les cadres surmenés ! Et les chômeurs et les migrants tout le monde s’en fout.

J’ajoute que malgré cette division et ces intérêts très différents, une possible explosion n’est jamais à écarter. L’ampleur de la crise économique aggravée par la guerre en Ukraine (avec des boulangeries qui font faillite) et les dernières grèves où ouvriers comme médecins s’organisent hors syndicats, sont de nature à inquiéter le pouvoir bourgeois. Mais au grand jamais il ne faut que les prolétaires entrent en lutte dans des combats pré-organisés, pré-digérés et planifiés par les généraux syndicaux, sauf à miser sur un débordement massif improbable à l’heure actuelle. L'unité syndicale (très corporative) affichée résolument au début n'est généralement que très provisoire et la farce se décompose ensuite en désaccords sibyllins sur l'intérêt de poursuivre la lutte; la division instaurée peut ainsi permettre de "terminer une grève", en la brisant.

     C’est pourquoi je pense que la provocation gouvernementale forcenée pour attaquer à nouveau les retraites est non pas une prise de risque mais une prévention pour déminer le terrain, en particulier en revalorisant le rôle des flics amicaux des syndicats, et en favorisant le spectacle indigné des rigolos de la NUPES. Après nous avoir fait le cinéma hier soir de leur détermination unitaire, les syndicats sabotent déjà l’unité présumée de la lutte fabriquée en haut lieu par généraux syndicaux et amiraux ministres. L’annonce d’une nouvelle grève « dure » à la RATP, pour les salaires paraît-il, deux mois après celle impopulaire de novembre, vient semer la zizanie pour les millions qui sont obligés de prendre des transports en commun bondés et dont les employés sont considérés comme des feignants (RATP = Reste Assis T’es Payé ) et des gens qui font grève n’importe comment et nocive pour la notion même de grève. Bonjour la solidarité public-privé ! Qui peut croire désormais à la mobilisation du secteur public ? Les employés d’EDF éclaté en plusieurs unités concurrentes, ceux de la Poste déjà émiettés, ou ceux d’une SNCF déconstruite ne sont même plus capable de présenter un front commun pour défendre ce qui était considéré comme des « avantages » par les autres prolétaires (et ils l’étaient pour des raisons qui remonte à la guerre), ces avantages ont été déjà décrété non avenus pour les jeunes embauchés ; en gros la noria des bobos de la gauche caviar propose de lutter contre du vent, les plus sales attaques étant déjà passées !

Plus que de résignation il faudra parler alors de consternation, laquelle, se gravant dans les mémoires, on la fera payer ultérieurement à tous les appareils d'encadrement de l'Etat:

LE JEU DE DUPES DE LA NUPES

  LFI nous avait bien rire l’an passé pour sa manifestation en rivalité avec la CGT avec le slogan des magasins Leclerc « lutter contre la vie chère » ; rebelotte avec le slogan « la réforme nuit à la santé », plus con tu meurs.

Quel embrasement aux ordres des clowns de la NUPES ? Tous ces petits bourgeois de la NULLE ils peuvent toujours rêver, eux ils sont sans doute encore plus impopulaires que la syndicratie et ne cessent de se ridiculiser. Peu après la déclaration unitaire des cowboys syndicaux, qui voit-on à l’écran ? La naine Sardine Ruisseau, la dingo féministe woke qui vient nous conter qu’il y a « un complot contre les pauvres » avec pour argumentaire cette connerie à bobo « une réforme climaticide » [7]! Quelle âne ! Ses pères en think tank avaient décrété la disparition de la classe ouvrière et cette idiote vient pour nous déconsidérer comme « pauvres ». Tout le monde sait le mal qu’elle a fait à son collègue Quatennens, preuve de l’absence de solidarité parmi les arrivist(es) des partis bourgeois. Pourquoi le staff de Mélenchon, décrié comme sectaire par la bande des individualistes Ruffin, Autain, le couple Corbière, le justiciable Coquerel et compagnie, a-t-il laissé ses brebis galeuses venir chanter une unité que chacun sait inexistante dans le marais de bobos inconsistants de la NUPES ? Mystère et boule de gomme ! Ce personnel hétéroclite et poseur s’est aussi encore plus ridiculisé en appelant… à marcher derrière la CGT. La seule explication de cet envoi au casse-pipe par leur guru Mélenchon est qu’il ne veut pas se dédire par rapport à sa stratégie de 2022 (cf. je suis le chef de la lutte pas le syndicalisme), et de plus ne croit pas à un succès des cowboys syndicaux. Donc si ça foire, il n’aura pas perdu ses billes et ses contestataires seront les couillons de l’histoire. Mélenchon n'est pourtant même pas une alternative politique crédible, n'est pas Mitterrand qui veut, et à droite y a rien non plus, même pas le père Noël Philippe avec sa barbe blanche de papy Mougeot.

EN CONCLUSION je peux reproduire ce que j’écrivais déjà en 2010 car, au fond, le sabotage discontinu des retraites ne trouvera son terme que si l’on fiche en l’air l’Etat capitaliste :

     « Pour les jeunes générations, l'obtention d'une pension de retraite "décente" va devenir un véritable parcours du combattant. L'allongement des études de plus en plus nécessaires pour intégrer un poste de travail, les difficultés pour avoir un travail plus ou moins fixe, les galères diverses par lesquelles il faut passer pour "s'installer" dans un boulot plus ou moins acceptable, les longues périodes de chômage, le travail à temps partiel qui a explosé dans les derniers temps, tout cela va rendre de plus en plus illusoire le "rêve" d'une fin de vie à l'abri du besoin. Un des principaux pans de ce qu'on appelle le "salaire social" est en train de tomber en miettes puisque la hausse des cotisations et la chute libre des pensions vont aboutir à ce qu'une grande majorité de ces dernières descendent en dessous du niveau du salaire minimum. Ainsi, il va arriver avec les retraites ce qui est arrivé dans tous les domaines de l'exploitation capitaliste : l'insécurité et la précarité s'installent. L'indécence du pouvoir capitaliste, quelle que soit la fraction de la bourgeoisie au gouvernement, de droite ou de gauche, a depuis longtemps présenté cette attaque comme "nécessaire pour sauvegarder le système de retraites" et "éviter un lourd fardeau pour les générations futures". En réalité, ces mesures n'ont d'autre cause que l'aggravation de la crise du système capitaliste qui oblige la bourgeoisie à porter des coups de plus en plus tranchants contre le "salaire social". ».

     « Le feuilleton syndical va continuer dans les mois à venir, mais la mobilisation n’a pas été terrible aujourd’hui, quoique le sujet reste « sensible » et « explosif ». On notera l’étrange commentaire de Libération « Le gouvernement échappe à une mobilisation massive » : « PARIS (AFP) - Le gouvernement a échappé à une mobilisation massive pour les premières manifestations sur les retraites jeudi, les syndicats annonçant tout de même un million de personnes dans la rue deux jours après la fin annoncée de la retraite à 60 ans. Les organisateurs (CGT, CFDT, CFTC, FSU, Unsa et Solidaires) ont atteint l'objectif de "faire mieux" que lors de la dernière mobilisation du 23 mars (800.000 manifestants selon la CGT, 380.000 selon la police, qui en a compté cette fois-ci 395.000). Mais ils n'ont pas franchi de palier et on reste loin des défilés de l'hiver 2009 (2,5 à 3 millions de manifestants selon la CGT) » ; et curieusement ferme la page des commentaires. Réussite gouvernementalo-syndicale cette manif n’a pas vu ni les ouvriers du privé ni la masse des cheminots.
Les syndicats vont planifier d’autres carnavals de rue à l’automne et rien ne reste clair. Ainsi il paraît que le régime des cheminots reste intact…On nous cache tout on nous dit rien. Pierre, Paul et Jacques ont ainsi des régimes différents. Jean qui rit ne va pas consoler Pierrot qui pleure. Encore bravo au gouvernement et aux syndicats ! Ils pourront continuer à négocier ce qu’ils veulent entre eux, à notre place ».

 

 

 



[2] J’explique cela en profondeur dans un article de 2013 qui n’a pas vieilli d’une ligne : https://proletariatuniversel.blogspot.com/search?q=retraite

 

[3] Préposés aux futurs affrontements armés même si le gouvernement a prétendu avoir récupéré toutes les armes en circulation…deux millions de fusils à pompe sont encore en liberté depuis l’interdiction de la vente d’armes.

[5] La gauche des éclopés avec le résidu du NPA récidive en 2022. Olivier Besancenot sonne l’heure de la «riposte unitaire». Pour le porte-parole du NPA Olivier Besancenot, «la riposte unitaire, sociale et politique commence maintenant», a-t-il déclaré quelques minutes après l’annonce par Elisabeth Borne de la réforme des retraites. «Tout augmente sous Macron, les prix, les profits des grandes entreprises, et même l’âge légal de départ à la retraite… Tout sauf les salaires et les revenus ! La riposte unitaire, sociale et politique, commence maintenant !» a-t-il écrit sur Twitter. Une remarque s’impose face aux illusions du CCI qui s’imagine que les luttes vont s’amplifier immédiatement. Un reflet d’une radicalisation de classe s’accompagne et s’est toujours accompagné dans l’histoire d’un gonflement des troupeaux gauchistes, or c’est le contraire qui se passe en ce moment avec la récente scission « moderniste » et wokiste du NPA et la réfraction stalinienne de LO.

 

[6] Il me faut tout de même signaler une bonne intervention du CCI dans des AG de cheminots avec une argumentation excellente applaudie par les ouvriers : « C'est pourtant l'union des travailleurs et pas seulement un "blocage" qui fait la force de la classe ouvrière. Le fétichisme du "blocage" est aujourd'hui la nouvelle tarte à la crème des syndicats pour empêcher toute réelle extension et unification des luttes et permettre au gouvernement de faire passer ses "réformes ». Ça vaut la peine de relever que, dans beaucoup de lieux de travail du secteur public (hôpitaux, ASSEDIC, etc.), les tracts syndicaux (notamment de le CGT) appelant à la grève et la manif du 20 novembre sont arrivés dans les services... le lendemain. En certains lieux, les panneaux syndicaux ont été nettoyés de tous les tracts sur la situation actuelle ».

". https://fr.internationalism.org/icconline/2007/cheminots_AG

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire