PAGES PROLETARIENNES

vendredi 25 février 2022

MOURIR POUR KIEV ?

 


« Bien entendu 
nous ne ferons rien ».

Claude Cheysson en décembre 1981 le jour du putsch de Jaruzelski en Pologne.

« Poutine veut rétablir l’ancienne Union soviétique et ses ambitions sont contraires à la situation dans laquelle se trouve le reste du monde actuellement. Nos sanctions seront «aussi dévastatrices que les tanks et avions russes». Nous essayons de réduire les capacités industrielles de la Russie pour les années à venir. Nous estimons que nous allons couper de moitié les capacités de revenus des Russes et leur capacité de développer leurs programmes militaires». Biden

« La Russie ne veut pas porter atteinte au système économique mondial, ni en être exclue (...), «La Russie continue de prendre part à l'économie mondiale, nous ne nous apprêtons pas à lui porter atteinte», «Il me semble que nos partenaires doivent comprendre et ne pas se fixer pour objectif de nous pousser en dehors du système». Poutine (jeudi dernier)

En 1939, un pacifiste bientôt pétainiste, avait fait sensation en s'interrogeant sur le fait de « mourir pour Dantzig » avec un point d'interrogation. La question était pertinente et reflétait le sentiment dominant dans la population européenne, sauf que la guerre totale n'était qu'une question de mois. Je suis le seul du mouvement maximaliste endormi dans l'espoir de grèves syndicales a avoir prévu que le conflit était inévitable. Je constate de nombreuses similitudes avec 1940, ce que décrivent les journalistes comme « les temps tragiques de l'histoire reviennent » : fuite éperdue de populations apeurées, massacres de civils pour imposer la terreur, provocations verbales, menaces nucléaires, etc.

Malgré la dramatisation calculée et obsédante du camp impérialiste occidental Poutine n'est pas Hitler. Certes comme Hitler il est arcbouté en faveur d'une guerre éclair, ce qui est d'ailleurs en train de se produire. L'Ukraine n'est pas l'Afghanistan, terre de tribus et territoire on industriel régentée par des clans islamistes pilotés par les services secrets des grandes puissances ; il est très peu probable que le conflit bientôt perdu en Ukraine dégénère en guérilla vu le niveau de conscience d'une population moderne, européenne et non musulmane belliciste 1.

La rapidité de l'invasion russe est d'ailleurs fondée d'une part bien sûr par l'impossibilité d'une intervention occidentale coordonnée (même les pays les plus dénonciateurs de Poutine ont trop de liens économiques pour lui faire la guerre, y compris la France), mais dans un camp comme dans l'autre l'invisible prolétariat est autrement plus rétif à toute guerre, fut-elle mondiale, pour ne pas s'élever en masse contrairement à 1940. La plupart des dirigeants capitalistes, comme le révèlent mes citations en tête, le savent parfaitement. De plus même en Ukraine ce qui domine c'est aussi la fuite éperdue des populations. En Russie de manière plus significative qu'en Occident des milliers, déjà excédés par des années de répression, ont manifesté contre la guerre de leur président) ce qui avait été impossible dans l'Allemagne de Hitler. Le président clown d'Ukraine n'a aucunement passionné lui les foules avec son appel à défendre la patrie.

REFUS DE LA GUERRE ET DANGER D'UN APPROFONDISSEMENT DE LA CRISE ECONOMIQUE

L'immobilité de l'Occident est mise par journalistes bourgeois et quelques mini-groupes révolutionnaires sur le dos de l'affaiblissement du leadership américain (ce que j'évoquais dans mon article du 25 janvier », ce qui n'est qu'une partie de la vérité, l'autre, plus cachée, est évidemment le niveau de conscience de la population mondiale et surtout du prolétariat. Même la propagande de l'idéologie écolo punitive inclut heureusement le rejet du nucléaire aussi au plan militaire, également la connaissance inoubliable des deux guerres mondiales précédentes. Or cette hostilité à une guerre se généralisant est bien prise en compte aussi par les Biden et Poutine, augustes représentants d'une bourgeoisie qui est tout sauf suicidaire. Le camp impérialiste occidental avec ses divers satellites (GB, France, Allemagne) avait vite compris que les carottes étaient cuites, tout en ne le constatant que par après :

« La Russie a une «supériorité aérienne totale» en Ukraine et veut masser «une force écrasante» autour de la capitale Kiev, a affirmé jeudi un haut responsable du renseignement occidental. «Les défenses aériennes de l'Ukraine sont maintenant éliminées et ils n'ont plus de force aérienne pour se protéger. Les Russes vont chercher dans les prochaines heures à masser une force écrasante autour de la capitale et la défense revient désormais aux forces terrestres et à la résistance populaire», a expliqué un responsable militaire.

Voyez donc la saloperie du campa occidental qui encourage les ukrainiens sans armes puissantes à aller au casse-pipe, sans prendre le risque d'y envoyer leurs propres troupes qui n'ont pas plus envie de mourir pour Kiev que moi ou les prolétaires français et immigrés.

Voyez la saloperie des manifestations pacifistes de la gauche et de l'extrême gauche bourgeoises, Paris comme à Madrid et Berlin : on dénonce la violence de Poutine (alors que les Mélenchon et Le Pen ne tarissaient pas d'éloge pour le dictateur comme ses amis Zemmour, Fillon et Depardieu), on appelle à ce truisme creux et mensonger de droit des peuples à disposer d'eux-mêmes (Poutou). Ce pacifisme en colère ne fait qu'exprimer un renouveau minable d'union sacrée mais derrière un Macron qui ne peut pas sérieusement entrer en guerre, sauf à provoquer un chambardement pire que celui des gilets jaunes. Mais l'ampleur éventuelle du mouvement mondiale de protestation peut aussi se propager en Russie... et permettre de sauver le concert capitaliste...

Deuxième élément fondamental de rétention (si je puis dire) de la guerre, le danger de faire supporter aux populations une paupérisation généralisée : hausses disproportionnées du pétrole, du gaz, des denrées alimentaires, plus d'une carence de blé, ets. Dans leurs argumentations foireuses, et même de la part du gouvernement français, les Poutine et Biden ont plusieurs fois tenté de rassurer les populations en disant « on se débrouillera » sans diminuer l'inquiétude généralisée ! Il suffit de lire les lignes suivantes :

Des hausses de prix sont possibles, a admis le patron de Bercy, ajoutant que l'engagement de gel du prix du gaz «sera respecté». Mais cela aurait alors un coût plus lourd encore pour les finances publiques. «Si la situation reste tendue et les approvisionnements de la Russie» vers l'Europe en gaz devraient être limités, «les prix pourraient augmenter à nouveau au troisième et quatrième trimestre» 2022, analyse Euler Hermes dans une note. «Cela aura forcément un impact sur l'activité économique» européenne, ajoute l'assureur-crédit. En résumé, le conflit entre l'Ukraine et la Russie pourrait bien avoir des répercussions à l'échelle européenne comme sur l'économie française. Mais celles-ci seraient avant tout ressenties sur les prix de l'énergie, déjà très élevés au moment du déclenchement de l'offensive souhaitée par Vladimir Poutine.

Enfin le plus lamentable parmi ces micro-groupes qui se disent révolutionnaires et représentants du prolétariat, c'est leur incapacité à analyser la gravité de la situation depuis des mois. Le plus dérisoire étant le CCI, incapable de voir venir, incapable de prendre position avec autre chose que quelques lignes déplorant « militarisme et décomposition »2, deux entités... sociologiques ! Attendant craintivement la suite des événements, en ne faisant rien...comme les hypocrites fauteurs de guerre occidentaux.

Le GIGC lui aussi aveugle, criant tous les jours au risque de guerre mondiale, n'affiche qu'une proposition abstraite et généraliste : « défendons nos positions de classe ». Sans analyser les vraies difficultés posées par cette guerre et finalement assez dangereuses pour le capitalisme lui-même.3



NOTES

1Mais pour parer à cette éventualité, le Kremlin a déployé aux frontières des unités de la garde nationale, une formation idéale pour le contrôle du pays conquis, pour l'occupation et… pour lutter contre les actes de résistance. Poutine maître du genre en ce qui concerne l'action terroriste – qui est mis en pratique en ce moment par l'infiltration de faux civils à Kiev – connaît bien son sujet.

2https://fr.internationalism.org/content/10713/militarisme-et-decomposition

3Le GIGC (www.igcl.org), 20 février 2022

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