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dimanche 16 décembre 2018

RIC-RAC : critique de l'ideologie citoyenniste bourgeoise des gilets jaunes. Piège fatal ?



« Le concept de "citoyenneté" offre un succédané identitaire là où la communauté ouvrière a été détruite par le capital. La citoyenneté est la qualité du citoyen, un être doté du droit de vote dont les adversaires semblent n’être ni le capital, ni l’État, mais plutôt les vieux partis majoritaires et la corruption, les grands obstacles au sauvetage administratif de la classe moyenne reléguée ».(moderniste anonyme)


C'est dès les débuts de la révolution française que la bourgeoisie tenta de noyer la classe ouvrière dans « le peuple »1. Cette notion est devenue depuis deux cent ans le point cardinal de tous les oripeaux de la domination bourgeoise qu'elle soit démocratique ou qu'elle fut facsiste ou stalinienne. La révolte des « gilets jaunes », partie effectivement de petits entrepreneurs ruinés par les taxes et d'une partie du prolétariat2 qu'on dit périphérique » ou « assistée », a été jusqu'ici une lutte « des » classes où la partie ouvrière a poussé toujours pour ses revendications économiques quand les bobos entrepreneurs se battaient pour une reconnaisance avant tout politique ; c'est pourquoi d'ailleurs une de leurs chefs de file, ou fille de chef, Marine Le Pen, si fan du mouvement, s'était toutefois prononcée contre une hausse du SMIC qui « fragiliserait les petits patrons ». Macron avait d'ailleurs écouté Mme Le Pen sur ce dernier hic, se contentant de revaloriser à moins de 100 euros la prime d'activité pour smicard et en annulant la CSG pour les retraites inférieures à 2000 euros. Preuve de plus que le RN n'est pas fasciste mais une des branches de la bourgeoisie, c'est pourquoi je les nomme « droite profonde » ou « France profonde » quand Macron n'est que le frêle peuplier qui voulait cacher la forêt des branchages de droite, de demi-droite, de gauche et d'extrême gauche.

Participant dès la première heure aux barrages dans le Pas-de-Calais j'ai vu tout de suite les bobos de province, catégorie artisans, commerçants ou fonctionnaires, ou même catégorie « femmes libérées »3 s'emparer de la direction des opérations de blocage, et nulle démocratie s'exercer sur la base d'AG ; à la première que je n'avais cessé d'exiger, on m'arracha le micro des mains. Rétroactivement on peut considérer que la lutte pour les revendications économiques, portées par non pas cette confuse « classe moyenne » (effectivement représentée par ses épiciers en faillite) mais la « basse classe  provinciale », d'ailleurs innommable et inommée partie de la classe ouvrière, poussa le mouvement à son durcissement et à la généralisation du soutien de la population. Les grimaces et chamailleries des bobos provinciaux contre les taxes amusaient la galerie mais le plus important pour les « vrais pauvres» restait le pouvoir d'achat donc des revenus décents, pas de savoir si c'était bien ou mal de payer des taxes (souci des ploucs arriérés), d'autant que la plupart n'en payent pas, et que c'est la couche au-dessus de la classe ouvrière qui raque, en effet avec la couche moyenne des épiciers et autres fonctionnaires (personnels des services publics dégoûtés des syndicats et des grèves corporatives, aide-soignants, infirmières etc.).
Contrairement aux ouvriers pauvres, privés de l'espoir du socialisme par tant d'années de socialisme gouvernemental et de dictature syndicale du parti stalinien, les bobos provinciaux ont toujours eu en vue « leur propre intérêt » de « libre entrepreneur », de « créateur d'emploi ». Sur les barrages la présence du petit patron et de ses deux salariés n'était pas synonyme d'égalité politique, le premier posant au directeur de conscience citoyenniste, et les seconds, souvent limités par une faible scolarité, enclins à voir le salut dans moins de taxes pour leur employeur et un petit coup de pouce pour leurs salaires.
Malgré cet aspect disparate, pas si protéiforme qu'on l'a dit – deux classes étaient simplement mélangées au fond : prolétaires et petits bourgeois – les différences radicales de revendication étaient masquées par le « Macron démission » et menaces du « grand soir », sans oublier les menaces physiques, toutes méthodes typiques des traditionnels poujadistes pour ne pas dire de l'extrême droite profonde et arriérée (je n'utilise pas la facilité de qualification de « fasciste » lui préférant « droite profonde »). Le « A bas l'Etat » que l'on entendit ou cette volonté têtue de se payer l'Elysée par les jeunes ignorants à casquette retournée n'était pas le slogan d'une classe ouvrière faible ou quasi inexistante mais celui des bobos provinciaux relayés par la noria parisienne ringarde et néo-pétainiste. Seuls des anarchistes intellectuels ont cru pouvoir enfourcher ce cheval de bataille de la droite profonde, oubliant que nos poujadistes n'ajoutent jamais le mot « capitaliste » à ce slogan radical comme une carotte, rouge à l'extérieur mais blanc en dedans.

ATTRACTION FATALE D'UNE IDEOLOGIE A DORMIR DEBOUT ?

Les promesses télévisuelles de Macron ni sa flagornerie à Strasbourg n'ont inversé sa popularité en chute libre. Nous sommes bien dans une grave crise politique pour tout l'encadrement politique bourgeois, partis, syndicats mais aussi l'ensemble de sa propagande médiatique. ET c'est bien ce qui différencie ce mouvement, pourtant très encadré par les bobos provinciaux, du mouvement petit bourgeois des « nuit debout », en termes de résonance et d'avenir. Cependant l'incapacité à se structurer – ce qui n'est pas non plus le cas, le mouvement fonctionnant à travers de multipes « clans » dont aucun de nos soit disant lanceurs, les Maxime et Priscilla, ne nous dit auquel ils appartiennent – ou plutôt à fonctionner réellement en réelles AG avec délégation révocable, finit par jeter le doute. En particulier avec l'émergence de la revendication tartuffe du "RIC" dont les journalistes prétendent, de façon « neutre » que, enfin, sortant du fatras des multiples revendications, celle-ci serait claire4. Je pense qu'à l'étape présente il faudra combattre nous aussi les infiltrations bourgeoises et bourgeoises-profondes par des slogans brefs, c'est pourquoi je propose RIC-RAC. Cette expression populaire possède plusieurs significations ; je laisse de côté la 50/50 pour « un peu juste pour se faire avoir » et « Ala maison, c'était ric-rac, surtout en fin de mois ».

Le rejet des partis politiques de gauche comme de droite et des syndicats traîtres en permanence avec leurs négociations cachées, c'est une chose. Mais la défiance envers toute organisation en est une autre. Il n'est pas étonnant que tous ces perpétuels vieux royalistes que sont les poujadistes et les gens du RN fassent référence à la révolution fraçaise et imbibent les manifestations du drapeau BBB ? Ce fût une révolution bourgeoise où le premier geste politique de la jeune bourgeoisie fût d'interdire aux ouvriers de s'associer. Ce qui explique ce soit disant refus de s'organiser et de se faire représenter c'est le fait que nos bobos provinciaux empêchaient et empêchent toute véritable AG. De soit disant AG ont lieu, mais ce ne sont que votes rapides « pour l'action », « pour tel lieu plutôt qu'un autre » et sans véritable discussion. Le fonctionnement "sans organisation" est ce qui permet finalement le fonctionnement oligarchique, d'ailleurs de la même façon que le RN ou LFI. 1789 est avant tout la loi Le Chapelier qui interdit aux ouvriers de s'organiser. Ce qui va comme un gant, j'allais dire un gang, aux attroupement aux ronds-points.

A la fois viol de la véritable histoire de 1789 mais surtout travestissement de ce que peut être une révolution moderne sans cette imagerie stupide de guillotines et de bonnets phrygiens avec lequel les femen sont venues se ridiculiser une fois de plus.
Je vous parlerai plus tard plus amplement des ridicules de cette « droite profonde » qui servit si bien à l'élection de Macron comme à présent elle doit servir aussi à sauver les meubles et à empêcher que la pression énorme, souterraine et non reconnue de la classe ouvrière n'émerge. Je reste interdit de la naïveté de cette jeune militante de Lutte Ouvrière qui me soutenait samedi que mai 68 reste supérieur avec quand même 9 millions d'ouvriers en grève générale. Oui, répondis-je, mais c'était à la fin et là on en n'est qu'au début, un début plus long que le seul mois de mai 68, et en 68 la grève généralisée (pas générale) signifia la fin du mouvement, parce que les ouvriers riaient de leur force fugace et ne prenaient pas au sérieux la perspective de renversement du capitalisme.
Venons-en à ces étranges clairvoyants anarchistes ? Quoique ramassis d'esthètes étrangers à la lutte de classe.

OU LES ANARCHISTES VOIENT MIEUX QUE LES MARXISTES

Je vais vous fournir un collage de ce qu'on peut trouver de mieux sur le web comme déshabillage de l'idéologie citoyenniste qui semble à la mode pour coiffer et ridiculiser le mouvement des gilets jaunes. Nuls politiquement, les anarchistes peuvent être très bons pour des analyses sociales et sociologiques plus fines. Et des analyses pertinentes bien antérieures à l'apparition des gilets jaunes. Le tract du GARAP contient l'essentiel, avec une capacité de synthèse dont j'eusse été incapable, mais marqué par un vieux fond d'hystérie anarchiste immédiatiste : Tract du garap http://garap.org/communiques/communique72.php en train de plonger comme nuits debout http://mondialisme.org/spip.php?article2479

Par après je vous fournis aussi l'analyse de la bourgeoisie et les dessous du mythe du vote blnac.

L'espace public impose une pacification politique et sociale. l'idéologie citoyenniste permet de désamorcer les conflits sociaux.

« L’espace publie renvoie au « rêve impossible d’une classe moyenne universelle et sûre d’elle-même, aspirant à vivre dans un monde fait de consensus négociés et d’échanges communicationnels purs entre êtres éclairés, en accords et responsables, un monde sans convulsions ni incidents », analyse Manuel Delgado. Cette société pacifiée permet de gommer les inégalités sociales avec une bonne conscience citoyenne. Le conflit, la lutte et la dissidence doivent être éradiqués. Le vivre ensemble citoyen doit remplacer l’affrontement entre les intérêts opposés »5.
"L’espace public repose sur le consensus. « Il devient une avant-scène sur laquelle on aimerait que se déploie une masse ordonnée d’êtres libres et égaux utilisant cet espace pour aller travailler et consommer et circulant, pendant leurs moments de loisir, en toute tranquillité au milieu d’une oasis de courtoisie », ironise Manuel Delgado. Le processus de gentrification s’accompagne du contrôle de certaines rues et places. Les opérations de promotion immobilière imposent la pacification et la sécurité.
Le discours sur l’espace public provient de la philosophie politique. Il désigne la sphère publique, avec la réunion pour l’exercice du pouvoir et les affaires qui concernent la vie en commun. Désormais, l’espace public impose une morale de « bonne conduite citoyenne ». Il permet une rationalisation démocratique de la politique. L’espace public correspond à l’idéologie citoyenniste, « ce refuge doctrinal où se nichent les derniers restes de gauche de la classe moyenne, et une bonne partie des restes du mouvement ouvrier », précise Manuel Delgado ».

"La démocratie n’est plus considérée comme une forme de gouvernement, mais comme une manière de vivre. L’espace public correspond à la social-démocratie qui souhaite harmoniser le capitalisme pour atteindre la paix sociale. L’exploitation doit alors perdurer, mais en limitant ses effets négatifs et les révoltes sociales. L’Etat doit ainsi encadrer le capitalisme pour limiter ses « excès ».
Cette idéologie occulte les classes sociales et les individus ne se rassemblent pas selon leurs intérêts mais selon leurs jugements moraux approbateurs ou désapprobateurs. L’Etat, considéré comme neutre, peut s’élever au-dessus des affrontements entre intérêts antagonistes. Cette médiation vise à camoufler la relation d’exploitation. L’Etat peut ainsi masquer sa défense des intérêts de la classe dominante. La violence et la répression ne sont plus le seul moyen de la domination de classe, qui s’appuie désormais davantage sur le consentement ».

"La sociologie met également en avant le concept de public. Durkheim tente de trouver une troisième voie entre socialisme et libéralisme. Il valorise la médiation de l’Etat et des institutions. Tarde, Le Bon ou Dewey insistent sur la notion de public et sur la pacification d’une agitation sociale menée par les masses urbaines. Les sociologues dénoncent la « populace » et l’anomie urbaine. La psychologie des masses, incarnée par Le Bon, dénonce une foule infantile, criminelle, bestiale et primitive ».

« John Dewey insiste sur l’importance d’un public raisonnable qui soumet ses convictions à l’épreuve du débat et de la délibération. Cette philosophie propose une démocratisation et une pacification des foules urbaines. La pédagogie, l’éducation et le « civisme » doivent imposer les bonnes conduites citoyennes. « Un dispositif pédagogique est déployé dans ce but, concevant l’ensemble de la population, et pas uniquement les plus jeunes, comme des apprentis permanents de ces valeurs abstraites de citoyenneté et de civilité », souligne Manuel Delgado.
L’anonymat, la distance et la séparation caractérisent les relations sociales dans l’espace urbain. Les individus se soumettent à des règles de socialisation. « Ils doivent savoir comment se comporter, comment gérer les relations d’autrui et répondre aux attentes de l’interaction », observe Manuel Delgado. L’ordre public devient indispensable à la vie sociale. Les concitoyens doivent vivre ensemble en ordre. « Le citoyennisme comme idéologie politique devient le civisme ou la civilité comme ensemble de conduites appropriées dans les domaines du bien public », précise Manuel Delgado. Le consensus prédomine, encadré par des autorités administratives considérées comme neutres ».

« Les nouveaux mouvements sociaux se caractérisent par une spécialisation et une séparation des luttes. Un nouveau militantisme regroupe « des individus ou des collectifs qui se réunissent et agissent au service de causes hyper-concrètes, à des moments ponctuels et sur des scènes spécifiques, en renonçant à toute organicité ou structuration durable, à toute affiliation doctrinale claire ou à tout projet transformation ou d’émancipation sociale qui aille au-delà d’un vitalisme plutôt flou », analyse Manuel Delgado. Cet activisme sans réflexion politique se conforme à l’individualisme consumériste. Le réseau est valorisé, à travers l’addition d’individus séparés et le règne de l’immédiateté ». (dixit facebook…)

« La contestation se développe dans l’espace public. Les manifestations se déroulent en centre ville. Les luttes de quartier permettent aux habitants d’agir sur leurs conditions de vie. L’urbanisation récente se caractérise par la construction de grands ensembles pour loger une importante population dans des immeubles qui se délabrent rapidement. Cette planification de la ségrégation s’apparente à des « bidonvilles verticaux ». Mais ces logements peuvent également devenir des espaces de rencontre et de vie collective qui favorisent la mobilisation pour la lutte sociale.
Il faudrait préciser qu’il s’agit surtout d’une petite bourgeoisie intellectuelle. Les cadres, les ingénieurs, les enseignants, les journalistes, les communicants véhiculent cette idée d’une société pacifiée. La politique se réduit à des discussions entre gens de bonne compagnie. Surtout, cette petite bourgeoisie intellectuelle se confond avec la classe d’encadrement. Elle regroupe les managers et les petits chefs dans les entreprises mais aussi les travailleurs sociaux. Ces professionnels ont pour fonction de désamorcer toute forme de conflit social. L’idéologie citoyenniste leur correspond bien ».

Les chômeurs, les précaires mais aussi les employés et les ouvriers restent réticents à se fondre dans un citoyennisme frivole. Pourtant, malgré quelques explosions spontanées, la conscience de classe semble disparaître. C’est peut-être la plus grande force de l’idéologie citoyenniste.

« La petite bourgeoisie intellectuelle, qui contrôle aussi les syndicats et la gauche, ne se contente pas de défendre ces intérêts propres. Elle impose son discours et fait passer ses intérêts spécifiques pour l’intérêt général. Le citoyennisme brouille les clivages de classe. Mais l’expérience vécue du chômage, de la précarité, du mal logement permettent aux classes populaires de se tenir à distance du bavardage citoyenniste. Lorsque la résignation et la séparation disparaissent, l’espace public permet la propagation de la révolte »6.


« La classe moyenne, qui se trouve au centre de la fausse conscience moderne, ne peut donc pas se contempler en tant que telle, selon elle, sa condition est générale. Elle voit tout selon sa propre optique particulière exacerbée par la crise, ses intérêts sont ceux de toute la société. Sociologiquement, tout le monde appartient à la classe moyenne, ses idéologues s’expriment dans le langage en papier mâché de Negri, Gramsci, Foucault, Deleuze, Derrida, Baudrillard, Bourdieu, Zizek, Mouffe, Lordon, etc. Selon eux, le "grand événement", la faillite du régime capitaliste, est une chose qui n’arrivera jamais. La révolution est un mythe auquel il vaut mieux renoncer en faveur d’une contestation réaliste qui fomente la participation citoyenne à travers les réseaux sociaux, c’est-à-dire la rabâchée "dialectique de contre-pouvoir", mais qui ne doit pas stimuler le changement révolutionnaire. Politiquement, tout le monde est citoyen, donc membre d’une communauté électrovirtuelle d’électeurs et en conséquence, doit se passionner pour les élections et les nouvelles technologies. Crétinisme idéologique postmoderne d’un côté, crétinisme parlementaire technologiquement assisté de l’autre, mais crétinisme qui croit au pouvoir. Sa conception du monde l’empêche de contempler les conflits sociaux comme lutte des classes, pour elle, ceux-là sont un simple problème de redistribution, une question d’ajustement budgétaire dont la solution est du ressort de l’État, et qui, par conséquent, dépend de l’hégémonie politique des formations qui la représentent. La classe moyenne postmoderne reconstruit son identité politique en opposition, non pas au capitalisme, mais à la "caste", en d’autres termes, à l’oligarchie politique corrompue qui a fait de l’État son patrimoine. Les autres protagonistes de la corruption, banquiers, entrepreneurs et syndicalistes, restent au second plan. La classe moyenne est une classe couarde, tenaillée par la peur, ce qui fait qu’elle cherche à se faire des amis plutôt que des ennemis, mais avant tout elle cherche à ne pas déséquilibrer les marchés, l’ambition et la vanité apparaîtront avec la sécurité et le calme que dispensent le pacte politique et la croissance. En se constituant sujet politique, son ardeur de classe se consume en entier devant la perspective du parlementarisme, la bataille électorale est la seule qu’elle pense livrer, et celle-ci se déroule dans les medias et dans les urnes »7 .

REFEXIONS DE LA BOURGEOISIE


● La voie référendaire, une réponse possible à la crise politique
Mais, avec leur proposition d'un RIC, les «gilets jaunes» interviennent dans un moment de crise politique très particulier. «Le problème aujourd'hui est qu'une part croissante de la population considère que la démocratie représentative ne l'est plus. À côté des revendications sociales, c'est une crise sourde mais profonde que l'on a vu apparaître dès 2013 en Italie avec le Mouvement Cinq Étoiles , partisan d'une démocratie directe», analyse Jacques de Saint-Victor. Pour l'historien du droit, le danger de la démocratie directe, particulièrement fort avec les possibilités offertes par les réseaux sociaux, est de «représenter un jeu à somme nulle»: «On ne parvient pas à imposer pacifiquement les lois de la majorité. On a l'impression que les 51% oppriment les 49%. D'où l'intérêt de la démocratie représentative, qui n'est pas tant la loi de la majorité que celle de la discussion entre des représentants qui font émerger une majorité».
Jacques de Saint-Victor estime néanmoins que les référendums d'initiative populaire peuvent être une bonne idée: «Il s'agit d'un mécanisme semi-direct, compatible avec une démocratie représentative, à l'image de l'Italie où il existe depuis 1945. Dans le contexte actuel, cela peut permettre de trouver un compromis entre les ‘gilets jaunes' et le système politique, fragilisé». «Conseillé par le juriste René Capitant, De Gaulle se méfiait du ‘parlementarisme absolu', raison pour laquelle il a réintroduit le référendum en 1958. Il me semble donc que la Ve République pourrait être adaptée à un RIC, à condition de l'encadrer pour ne pas créer d'instabilité». 

● Le danger d'un mandat impératif
Cette logique, en revanche, ne serait valable que dans le cadre des référendums législatifs. Le référendum révocatoire, qui permettrait d'écarter un élu, est une tout autre affaire. «Nous tomberions dans les dangers de la démocratie directe. C'est l'idée du ‘mandat impératif', chère à Rousseau. Dans ce modèle, les élus ne sont pas des représentants du peuple, mais de simples messagers. Or, si on prive le représentant de sa liberté de voter ou de penser, il ne peut pas y avoir de délibération démocratique», met en garde Jacques de Saint-Victor. La Constitution de 1958 est d'ailleurs très claire. «Tout mandat impératif est nul», dispose l'article 27. Si le référendum d'initiative populaire destiné à voter des lois existe sous des formes différentes dans de nombreux pays (Italie, Hongrie, Suisse, Pays-Bas, entre autres), le mandat révocatoire est beaucoup plus rare. Existant à l'échelon local dans certains États américains, il a surtout été institué par le dirigeant vénézuélien Hugo Chavez en 2004.
Alors que plusieurs candidats à l'élection présidentielle de 2017 s'étaient déclarés en faveur d'un RIC - Jean-Luc Mélenchon (seul à l'étendre à sa dimension révocatoire), Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan, François Asselineau - et que plusieurs élus des Républicains se sont depuis prononcés en sa faveur, notamment le député du Vaucluse, Julien Aubert, nul doute que ce thème restera d'actualité avec les «gilets jaunes» et la perspective d'une révision constitutionnelle souhaitée par Emmanuel Macron, mais reportée l'été dernier à la suite de l'affaire Benalla.

LES DESSOUS DU MYTHE DU VOTE BLANC

La revendication de la "reconnaissance" du vote blanc, aussi inoffensive dans son inutilité qu’elle puisse paraître, n’est qu’une couverture lui permettant de masquer son véritable but : la propagation d’une idéologie néo-fasciste.https://renverse.co/Voter-Blanc-mouvement-citoyenniste-neo-fasciste-1800

« Pour comprendre la véritable idéologie de Voter Blanc, il faut comprendre celle de son fondateur et seule "tête pensante" : Thomas Wroblevski.
Dans les divers entretiens et conférences qu’il a pu donner, il expose sa vision d’une union des "citoyens" (aussi appelés "le peuple") contre "l’élite" égoiste, cupide et déconnectée. Le but affiché étant de remplacer le système politique actuel par un système horizontal.
En plus de médias régionaux/nationaux, Thomas Wroblevski s’est entretenu avec plusieurs figures de la nébuleuse "dissidente" suisse comme :
  • Le blog néo-fasciste genevois LaPravda.ch (proche des néo-fascistes d’Egalité et Réconciliation et de l’UDC)
  • Le néo-fasciste rouge-brun neuchâtelois David L’Epée (proche d’Egalité et Réconciliation)
Il a participé à une conférence sur le vote blanc avec le confusionniste Etienne Chouard, proche d’Egalité et Réconciliation (le tout rediffusé sur la page Youtube de Voter Blanc). On remarque que Chouard est cité très tôt comme une influence majeure du mouvement. (Chouard souvent invité sur les plateaux TV comme « gilet jaune »)

Au vu de tous ces éléments, il n’est plus possible d’y voir un simple mouvement citoyenniste/populiste, brouillon et grossier, la réalité est toute autre. On nage en fait en plein confusionnisme soralien. En effet, le projet de Thomas Wroblevski d’une union en dehors des clivages politiques d’un "peuple" fantasmé contre des "élites" corrompues pour créer une société nouvelle est une caractéristique classique du fascisme (qui prône la réconciliation des classes à travers la "Nation"). Si le remplacement des "élites" par un dictateur censé "incarner" la volonté du peuple est souvent prôné dans ces milieux, certains néo-fascistes s’accommodent parfaitement d’un système horizontal tel que celui prôné par Thomas Wroblevski (même si on peut douter de son attachement à l’horizontalisme au vu de son admiration pour Poutine).
Le vote blanc n’est qu’un prétexte, Wroblevski avoue lui même ne croire ni aux élections ni au vote. Il ne s’agit que d’une stratégie confusionniste, un moyen pour lui de cacher sa véritable idéologie et d’attirer les déçus du système politique suisse pour mieux les orienter vers le néo-fascisme en brouillant les références. Il compte d’ailleurs présenter une liste de candidats pour les éléctions fédérales de 2019 »8.




NOTES

1« Dès le début de la tourmente révolutionnaire, la bourgeoisie française osa dépouiller la classe ouvrière du droit d'association que celle-ci venait à peine de conquérir. Par une loi organique du 14 juin 1791, tout concert entre les travailleurs pour la défense de leurs intérêts communs fut stigmatisé d'attentat « contre la liberté et la déclaration des droits de l'homme », punissable d'une amende de 500 livres, jointe à la privation pendant un an des droits de citoyen actif.
Ce décret qui, à l'aide du code pénal et de la police, trace à la concurrence entre le capital et le travail des limites agréables aux capitalistes, a survécu aux révolutions et aux changements de dynasties. Le régime de la Terreur lui-même n'y a pas touché. Ce n'est que tout récemment qu'Il a été effacé du code pénal, et encore avec quel luxe de ménagements ! Rien qui caractérise ce coup d'Etat bourgeois comme le prétexte allégué. Le rapporteur de la loi Chapelier, que Camille Desmoulins qualifie de « misérable ergoteur», veut bien avouer que le salaire de la journée de travail devrait être un peu plus considérable qu'il l'est à présent... car dans une nation libre, les salaires doivent être assez considérables pour que celui qui les reçoit, soit hors de cette dépendance absolue que produit la privation des besoins de première nécessité, et qui est presque celle de l'esclavage. Néanmoins il est, d'après lui, « instant de prévenir le progrès de ce désordre », à savoir « les coalitions que formeraient les ouvriers pour faire augmenter... le prix de la journée de travail », et pour mitiger celle dépendance absolue qui est presque celle de l'esclavage. Il faut absolument le réprimer, et pourquoi ? Parce que les ouvriers portent ainsi atteinte à la liberté « des entrepreneurs de travaux, les ci-devant maîtres », et qu'en empiétant sur le despotisme de ces ci-devant maîtres de corporation - on ne l'aurait jamais deviné - ils cherchent à recréer les corporations anéanties « par la révolution ». Le Capital (livre premier)


2Pour une question de rapidité et un refus de tout pinaillage, je me contente aujourd'hui de vous resservir la définition du prolétariat par wikipédia, qui n'est pas si mauvaise que cela : « Le prolétariat est, selon Karl Marx notamment, la classe sociale opposée à la classe capitaliste. Elle est formée par les prolétaires, également désignés couramment comme travailleurs. Le prolétaire ne possède ni capital ni moyens de production et doit donc, pour subvenir à ses besoins, avoir recours au travail salarié. Le prolétariat ne se réduit donc pas au stéréotype de l'ouvrier en blouse bleue ni du travailleur souillé des mines, mais recouvre l'ensemble des êtres humains qui doivent se soumettre à un travail salarié, quels que soient leur niveau de vie et le niveau de leur salaire ».
3 Une femme n'a-t-elle pas tous les droits maintenant même d'autoriser les pires entubages ou manipulations du fait de son expoloitation millénaire ? Idem pour la représentation journalistique ou syndicale, on voit apparaître de plus en plus de noms arabes, certes français de souche, pour dénoncer le terrorisme ou le patronat, aussi en gilet jaune bien sûr pour assurer que le système n'est pas raciste (et sortir les discriminés de leur ghetto communautaire) pour en faire de vrais citoyens français !
4 Une mesure existe déjà appelée «référendum d'initiative populaire», en vigueur dans plusieurs pays européens et qui était déjà une revendication récurrente lors de la Révolution française encadrée par un organisme indépendant de contrôle où les gens pourront faire une proposition de loi. Si cette proposition de loi obtient 700 000 signatures alors cette proposition de loi devra être discutée, complétée, amendée par l'Assemblée nationale qui aura l'obligation (un an jour pour jour après l'obtention des 700 000 signatures), de la soumettre au vote de l'intégralité des Français.»
Mais que recouvre exactement ce RIC? Quatre choses si l'on en croit une vidéo visionnée depuis mardi dernier par plus de 600.000 internautes. Les «gilets jaunes» demandent: un RIC abrogatoire qui permettrait au peuple d'abroger une loi ; un RIC révocatoire, qui permettrait au peuple de «révoquer n'importe quel responsable politique, aussi bien le président, qu'un ministre, un député ou n'importe quel élu» ; un RIC législatif, qui permettrait au peuple de proposer un texte de loi ; un RIC constituant qui permettrait d'amender la Constitution (voire d'en changer?).
Les «gilets jaunes» estiment que ces RIC sont le seul moyen pour le peuple de «reprendre sa souveraineté». «Il n'y a rien à négocier en termes de mesures avec le gouvernement. Ce qui doit nous importer tous, c'est de reprendre le pouvoir (...) Il faut aller absolument au cœur du problème, ne pas réfléchir avec les logiciels du système».Donc ça ne sert à rien de « renverser Macron ». Donnez-nous notre...RIC-RAC !
5http://www.zones-subversives.com/2016/08/espace-public-et-democratie.html, consulter aussi sur mondialisme.org l'article de Coleman : Attraction fatale.

6Source : Manuel Delgado, L’espace public comme idéologie, traduit par Chloé Brendlé, CMDE, 2016
8https://www.revue-ballast.fr/benjamin-sourice-citoyennisme-posture-naive/

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