PAGES PROLETARIENNES

dimanche 30 juin 2013

L’ANTIFASCISME INFANTILE




 Autant les problèmes d’interprétation du fascisme et du nazisme continuent à diviser les historiens – qui en débattent sans s’entretuer - comme le souligne Ian Kershaw, autant dans le domaine public régi par la propagande médiatique bourgeoise dominante, le milieu intellectuel des élites de gauche et leurs suivistes militants de tous les gauchismes et de la diversité libertaire, reste hémiplégique. Le fascisme agité comme épouvantail reste une abstraction fumeuse qui fonde un schématisme à répercussion électorale, favorisant le goût de la disqualification par l’insulte, l’amalgame systématique, une sorte d’archaïsme politique simpliste et le culte de la démocratie actuelle. On fait comme s’il existait une explication commune et universelle, généralement admise, du fascisme, de son passé et de son présent supputé ou maquillé[1].
La mort du « freluquet » (cf. Libération) Clément Méric, dans une « tragique altercation » (Le Canard Enchaîné ») a agité un temps toute la sphère intello gauchiste parisienne et leurs succursales dans les grandes villes de province avant de retomber comme un soufflé avec le lancement de la mascarade cycliste du Tour de France. Avant que le procès de « l’assassin fasciste » ne redonne primeur ultérieurement à ce dramatique fait divers récupéré comme soi-disant combat politique par toutes les factions politiques rivales françaises, il convenait de réfléchir aux manières et aux origines de cette hystérie antifasciste étrange, autant qu’étrangère à la réalité, qui mélange un antiracisme idéaliste à une vision simpliste du danger figuré par un groupe de catcheurs de rue, apaches tatoués aux « valeurs » de la France bourgeoise, « nazillons » au front bas, « nervis » prêt à tuer nos chères têtes frisées et blondes complices[2].

Politique et faits divers

Je suis bien moins préoccupé par les grenouillages du milieu dit d’extrême droite, avec son pôle officiel soft électoral (le FN), ses sectes de gros bras racistes et ses originaux pipoles (Soral et Dieudonné)[3] que par la fixation exagérée de l’idéologie de gauche (gouvernementale et gauchiste) sur ce marais présenté systématiquement comme l’ennemi n°1, et échelle de mesure dans le diabolisme contemporain qui serait figuré principalement par cette droite « extrême » et ses « fachos » de base. Je reviendrai sur l’errance idéologique de ce milieu et son impuissance à parodier le « fascisme populaire » des débuts, il y a plus de 80 ans tout de même, et sa disparition comme force bourgeoise « autorisée » en 1945, bien qu’il ait été maintenu longtemps encore en Espagne, pays secondaire et hors de la guerre mondiale, jusqu’au milieu des années 1970[4].
Je ne vais pas le redévelopper ici[5], mais, contrairement à Ian Kershaw, je n’hésite toujours pas sur la caractérisation du fascisme comme produit du capitalisme, même si toutes les fractions bourgeoises italiennes et allemandes n’étaient pas favorables à cette seule alternative politique[6]. Kershaw concède qu’il n’y a pas eu opposition entre nouvelles et anciennes « élites » : « … loin de les supplanter, les nouvelles élites politiques ont coexisté avec les anciennes, pour finalement s’y fondre. Les chasses gardées, telles que la grande industrie, la fonction publique et l’armée, ont continué à recruter la plupart de leurs cadres dirigeants dans les mêmes couches sociales qu’avant 1933. Le système scolaire et universitaire est resté majoritairement dominé par les classes moyennes et moyennes supérieures. L’organisation du parti la plus puissante, la SS, recrutait essentiellement dans les couches supérieures de la société. Si les anciennes classes dirigeantes ont effectivement dû entrouvrir leurs rangs à des parvenus de basse extraction jouissant des faveurs du pouvoir, ce n’était là qu’une légère accélération d’un phénomène déjà perceptible sous la République de Weimar »[7].
Fascisme et nazisme ont été des phénomènes autoritaires sans fard (tous les moyens sont bons) pour permettre à la bourgeoisie d’aller à la guerre. Pour aller (retourner, reprendre… à 1918) à la guerre, la bourgeoisie devait avoir d’abord vaincu le prolétariat ; c’est fait avec la sale besogne de la social-démocratie dès 1919 et surtout en 1923 en Allemagne ; c’est fait également avec la social-démocratie en Italie dès 1921. Le fascisme « finit le boulot » certes par sa violence particulièrement ciblée sur la classe ouvrière, mais une violence assortie d’une théorie « socialisante ». La théorie des « faisceaux de combat » de Mussolini, si elle est articulée sur les anciens combattants de la guerre professe une théorie néo-socialisante. Idem pour les premiers théoriciens du « national-socialisme » du « parti national socialiste d’Allemagne ».

GAUCHE DU TRAVAIL ET DROITE DES VALEURS

Ce rappel du moment de l’apparition du fascisme/nazisme et sa caricature du socialisme réduit à néant évidemment l’épithète de fasciste concernant le FN de 2013 en France, parti électoraliste dont le programme n’est pas bien différente de nombre de partis « légalistes » de la droite traditionnelle. Le seul groupuscule qui pourrait être qualifiable de néo-fasciste est celui d’Alain Soral : Égalité et Réconciliation (E&R) est une association politique, créée en juin 2007, ancien militant au Parti communiste français (années 1990), et ancien membre du comité central du Front national (2007). Conchiant carrément toute lutte des classes,  la maison mère de tous les vieux schnoques de l’Algérie française additionnée aux multiples électeurs invisibles et aigris par l’électoralisme classique joue un rôle plus en prise sur la réalité de la lutte des places dans les diverses institutions bourgeoises, sans que le FN puisse prétendre à une solution autre que celles de la droite dite régulière, que la bouillie idéologique invraisemblable de Soral et ses amis avec leur addition d’une lutte de classe corporative néo-pétainiste et le poujadisme du FN qui réunirait finalement salariés et petits profiteurs des PME.
Cette secte autour d’un individu pipole qui se proclame « nationaliste de gauche » (ou « néo-nationaliste », voire « alter-nationaliste ») et « transcourant » n’est pourtant aussi qu’une association de rigolos plein de plumes comparée aux premiers clans fascistes et nazis. Soral, c’est la version « travail, partouze, fratrie ». Guru omnipotent avec site vidéo-narcissique, il revendique comme prétention de « rassembler » les citoyens qui font de la patrie (terme désuet) le cadre déterminant de l'action politique et de la politique sociale (termes contradictoires) un fondement de la Fraternité, lubie imaginaire de « l'unité nationale ». Il a inventé ce truisme : « la gauche du travail et la droite des valeurs ». Soral brode sur une peu originale conception éclectique prétendant marier l'union de la « gauche du travail » (marxisme) et de la « droite des valeurs » (nationalisme et patriotisme) contre la mondialisation capitaliste sur le modèle du Cercle Proudhon, qui réunissait syndicalistes anarchistes et maurrassiens. Comme le fascisme, l’anarchisme lointain fît aussi l’objet d’une récupération de droite dans les années 1930, mais finalement assez déliquescente de nos jours avec ce genre de pitre raide, plus pipole raté, dragueur impuissant que roue de secours crédible pour une bourgeoisie chaotique.
Une assoc anarchiste a publié une brochure pour dénoncer le FN comme « pire ennemi des salariés » (sic quelle bourde de bobo petit blanc bien nourri !) pas des chômeurs !), destinée aux « conscientiseurs » professionnels syndicaux mais inévitablement financée sans doute par le gouvernement, ce dernier ennemi des travailleurs ![8]

DU FAIT DIVERS AU CRIME POLITIQUE 

Incontestablement  « l’altercation tragique » de Clément Méric relève initialement du fait divers, comme il s’en produit malheureusement presque chaque samedi soir en France à la sortie d’un bal quelconque. Un coup de poing et celui qui tombe à terre est brisé à jamais. Comme il se doit, la meilleure manière de déguiser le fait divers dramatique n’a-t-elle pas été de le transformer en « combat politique » ? Pointer pour la clientèle des intellos parisiens et des suiveurs provinciaux les « connivences » des extrêmes droites a été le nerf (financier) du Canard Enchaîné aux magazines et sites socialisants (Nouvel Obs, Hufington machin, Huma financée par Lagardère, blogs anarcho-gauchistes, etc.)[9]. Le Canard, instrument bien connu des barbouzes et régal hebdomadaires pour ces mauvais jeux de mots pour une masse de lecteurs en maisons [10]. La victime a été mise en scène comme la plus honorable victime qu’il soit, et, quoique bon élève de grande école bourgeoise, un ardent défenseur de la démocratie financière.
gériatriques a publié la photo du gros Ayoub et de l’assassin Esteban, souriant face à face lors d’une manif des sectes dites « fachos »
Pour le pôle récupération, et avant d’en venir à celui-ci, je reprends un argument de plusieurs commentateurs sur les articles un peu trop innocents dans la forme de toute la presse bourgeoise ; objection très pertinente et éclairante : Pourquoi ne pas avoir manifesté pareillement contre l'assassinat d'enfants juifs ainsi que les deux soldats par le « fasciste » Merah ?[11] Un lecteur avoue « sa stupeur à la lecture des articles de ce matin à propos du fourre-tout idéologique des antifas interviewés. Sans faire le vieux con, je n'ai pas souvenir à l'époque (je suis un ancien lutteur contre un FN autrement dangereux) d'avoir mélangé dans ma sphère idéologique la lutte contre les fachos et la défense des femmes voilées! Comment se déclarer antifasciste et défendre le fascisme, qu'il soit brun, noir ou vert, toute idéologie qui prône la violence ou la mort à celles et ceux qui ne suivent pas sa doxa est un fascisme? j'aimerais bien qu'on m'explique, je suis sans doute ringard ou stupide ». (ce commentateur se fait évidemment traiter de… facho et de vieux con par les anars anonymes en embuscade sur leurs claviers).

LE SYLLOGISME ANTIFA

"Il s'enfonça dans la nuit et un clou dans la fesse droite." (Pierre Dac, 1893-1975)

Un syllogisme est un raisonnement formel qui déduit le particulier du général. Le syllogisme est composé de trois propositions (la majeure, la mineure et la conclusion) et telles que la conclusion est déduite de la majeure par l'intermédiaire de la mineure. Majeur et mineur sont les prémisses. Le syllogisme antifa, comme son confrère gauchiste en général est à la fois une tapinose du tapin dominant, un truisme de l’idéologie bourgeoise…
En logique aristotélicienne expliquée par Wikipédia, le syllogisme est donc un raisonnement logique à deux propositions (également appelées prémisses) conduisant à une conclusion qu'Aristote a été le premier à formaliser. Par exemple, Tous les hommes sont mortels, or Tous les Grecs sont des hommes, donc Tous les Grecs sont mortels est un syllogisme ; les deux prémisses (dites « majeure » et « mineure ») sont des propositions données et supposées vraies, le syllogisme permettant de valider la véracité formelle de la conclusion.
La gauche et son extrême anarcho-trotskienne apparaissent sans s’en rendre compte dans la manip médiatique quotidienne comme enfermées dans leurs vieux schémas poussifs et décalés hors de la réalité. Mais pour les décrypter vraiment il ne suffit pas de lister leurs âneries, et c’est pourquoi il faut en déceler le syllogisme comme mode de raisonnement sous-jacent. Le schéma le plus bête en politique est bien sûr traditionnellement le syllogisme. Le bouddhisme en est un utilisateur fréquent jusqu’à l’écoeurement ; c’est pourquoi je me suis moqué des antifas en parodiant les préceptes bouddhistes dans l’article précédent.
Le canon des règles du syllogisme ne produit qu’une série de sophismes, la théorie des logiciens bouddhistes est un idéalisme[12],  des idées purement subjectives, conformistes, incapables d’effectuer une synthèse supérieure, le jugement bouddhiste a un caractère défectueux, il s’adapte au monde sensible sans s’élever : ex : Si ma fenêtre est fermée, ainsi que je le constate, non seulement je ne constate pas de fenêtre ouverte, mais il est absolument certain que ma fenêtre ne peut pas ne pas, hic et nunc,  être fermée » ; le nihilisme radical du bouddhisme a totalement était assimilé par la bourgeoisie. Et ses gauchistes autorisés.
Exemple actualisé: l’extrême droite a dit (aussi) que le meurtre de Méric était un fait divers, or tous ceux qui ont dit la même chose sont donc (aussi) des fascistes. Le syllogisme gauchiste peut être aussi un syllogisme inférieur, du type déduction plate : Le Pen a dit que la voiture qui roule devant toi est verte, puisque tu dis que la voiture est verte, tu es d’accord avec Le Pen.
Jadis pour justifier l’Union nationale, le syllogisme chauvin était :
-          En 1914 : tous les soldats allemands sont des boches, or tous ceux qui s’opposent à la guerre sont donc des amis des boches.
-          En 1939 : tous les antifascistes sont pour la défense nationale or la défense nationale est antifasciste, donc  tous ceux qui sont contre sont des fascistes.
Les couches moyennes et leurs progénitures modernes sont « antifas » car sans cela il leur manquerait le supplément d’âme  pour se vivre comme citoyen sans rôle décisionnel, et ils risqueraient plutôt de glisser vers la remise en cause du capitalisme, lequel système glouton a plus assimilé que dévoré le fascisme[13]. On prouvera ici que le syllogisme est de nature stalinienne, est la dialectique stalinienne bornée. L’antifascisme new look officiel n’a plus rien à voir avec l’historique de son père historique stalinien, il est un compost d’antiracisme, de tolérance des religions arriérées, de fantasmes écran contre l’histoire passée (enseignement républicain où lycéens et étudiants sont complètement lobotomisés). Et c’est bien à un historique de l’antifascisme que nous nous livrerons par après au final, pour rendre ce caméléon d’union nationale relookée, de chauvinisme body buildé pour bobo missionnaire.

FLORILEGE DES RECUPERATEURS POLITIQUES

« La mort de Clément Méric n’a rien d’un fait divers. Un véritable assassinat politique a été commis, hier soir, en plein Paris. Quoi de plus triste et sinistre que de mourir à 18 ans pour ses idées. Il est temps d’interdire tous ces groupuscules. La police et la justice doivent les empêcher de se reconstituer. Ce meurtre a eu lieu alors que les violences perpétrées par des éléments issus de l’extrême droite se sont multipliées au cours de ces derniers mois, notamment à l’encontre de nos militants. Le climat créé autour des manifestations contre le Mariage pour tous a encore accentué la sensation d’impunité chez ces groupuscules qui apparaissent aujourd’hui dans plusieurs villes de France ».  (Martine Billard du parti des 75.000 malmenés par la « peste fasciste » immémoriale)
« L’agression de Clément est un acte politique. Si Clément a été assassiné, c’est clairement parce qu’il était engagé dans cette mouvance. Il n’était pas militant du Parti de gauche, mais beaucoup connaissaient son engagement dans la lutte antifasciste. C’est parce qu’il avait cet engagement du refus de l’extrême droite qu’il a été reconnu comme tel et passé à tabac. Il y un dimension politique, ce n’est pas un fait isolé, ni une altercation et un fait divers. C’est un acte politique très violent. J’appelle tout le monde à prendre position très clairement ». (Alexis Corbière, Secrétaire du PG)
« Parler de fait divers, reviendrait à banaliser ce qui vient de se passer. Or un jeune homme est mort, cela n’a rien de banal. Il s’agit d’une bagarre qui a très mal tournée entre extrémistes des deux bords. Manuel Valls est dans la récupération politique lorsqu’il évoque une «parole» qui se serait «libérée». A ce moment-là, comment qualifie-t-il tout ce qui se passe à Marseille ? De quelle «libération» s’agit-il là-bas ? Il se fout de la gueule des gens, monsieur le ministre ! En outre, ces groupuscules d’extrême droite sont surveillés en permanence par la police, Manuel Valls sait donc très bien de quoi il retourne. La France est un Etat de droit. Il faut attraper le ou les coupables et les juger. Le gouvernement peut dissoudre ces groupuscules s’il le souhaite mais il sera toujours difficile d’empêcher un certain nombre de fendus de se regrouper pour mal agir politiquement. ( Louis Aliot, vice président du FN).
« C’est un fait politique. Deux groupuscules politiques extrémistes se sont affrontés comme trente ans en arrière. L’affrontement ne concerne cette fois plus le communisme contre le monde libre, mais l’anthropologie du genre et du choix de vie contre le maintien d’un semblant de collectif. L’idéologie nouvelle est cette idéologie du genre. » (Frigide Barjot)[14] .
Un journaliste de radio, pourtant je ne prise guère cette espèce, a parfaitement résumé la situation du point de vue honnête, celui de tout maximaliste sur les positions du prolétariat et non indifférentiste :
« La mort de Clément Méric est un fait divers tragique, banalement sinistre, entre un type d’extrême gauche et un type d’extrême droite, absolument abruti. Mais ce genre de drame aurait pu se produire il y a six mois, un an, cinq ans ou vingt ans. Cela traduit seulement la montée inquiétante de la violence dans les zones urbaines en France. Les bagarres au coup de poing américain ne sont pas si rares et c’est à la fois épouvantable, crétin, médiocre, violent et radical.  Avec toute la prudence que l’on doit utiliser dans cette affaire, je suis assez habitué depuis trente ans à constater, à chaque fois qu’il y a une agression comme cela ou un phénomène terroriste, que l’opinion publique, les journalistes et les politiques accusent l’extrême droite. Et, en France, c’est très rarement l’extrême droite. Je me méfie donc beaucoup et je ne crois pas à la théorie de groupuscules organisés que l’on a évoquée au départ, c’est-à-dire à un geste délibéré de skins qui, au nom de la race blanche, auraient voulu s’en prendre à un jeune syndicaliste étudiant. (…) La violence militante d’extrême droite est un leurre. Les accusations en direction du front national et de Marine Le Pen sont exaspérantes, il faut rester factuel. La violence militante d’extrême droite n’est pas une réalité en France, c’est un leurre. A titre de comparaison, lors des débordements en marge de la manifestation pour tous aux Invalides, on a accusé des militants probablement nationalistes et violents. Or, les interpellations ont démontré qu’il s’agissait plutôt de fils de bourgeois et de jeunes des Hauts-de-Seine qui s’en prenaient aux forces de l’ordre et qui n’ont pas cassé une seule vitrine de commerçant. Je n’excuse absolument pas ces comportements stupides mais on peut dire qu’ils étaient mal placés pour renverser la République. C’était bien moins radical que ce que l’on a, par exemple, vu au Trocadéro au moment de la victoire du PSG. Le scénario du renouveau d’une violence d’extrême droite est peu envisageable et, surtout, ceux qui l’accréditent sont de mauvaise foi. Avec l’idéologie qui règne aujourd’hui au Front National je n’imagine pas une seconde ce genre de choses. Ce Parti est pétri de défaut mais que ses militants fassent cela me paraît peu concevable ». (Eric Brunet animateur de RMC).

DE L’INSTRUMENTALISATION DU FAIT DIVERS

Sarkozy et le fait divers : Trois faits divers pour un discours
« Dans l’histoire de l’utilisation de faits divers à des fins politiques, la mécanique enclenchée par Nicolas
Sarkozy pendant l’été 2010 restera dans les annales comme le franchissement d’un nouveau palier. Un moment prévisible, tant le recyclage d’événements de ce type est depuis longtemps habituel dans la pratique politique en France, et ce particulièrement chez l’actuel président. On ne compte plus en effet les mesures législatives adoptées à la suite de faits divers mis en avant dans les médias : par exemple la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, est la réponse politique directe du meurtre d’une joggeuse, Nelly Crémel ; la loi du 10 août 2007 instaurant des peines-planchers pour les récidivistes, et la loi du 25 février 2008 créant la rétention de sûreté, suivent toutes deux l’affaire Evrard ; la loi du 2 mars 2010 réprimant l’appartenance à une « bande », est adoptée après des bagarres violentes au sein de deux établissements scolaires d’Île-de-France, en 2009.
Puis, au printemps 2010, une conductrice en niqab est verbalisée, et une escalade rhétorique reprise lors du discours de Grenoble mène à l’extension des conditions de déchéance de la nationalité. Enfin, au cours de ce même discours de Grenoble, deux autres événements médiatisés au creux de l’été sont l’occasion, pour le président de la République, de remettre en avant les thèmes sécuritaires. La mort d’un homme poursuivi après un braquage, à Grenoble, et les violences qui ont suivi et entraîné le remplacement du préfet de l’Isère ; et une émeute provoquée par des gens du voyage réagissant à la mort de l’un des leurs lors de sa tentative de forcer un barrage de gendarmes. De ces événements est donc issu le discours de Grenoble qui, sans que l’on puisse en comprendre la logique, fait le lien entre ces événements et « 50 années d'immigration insuffisamment régulée qui ont abouti à un échec de l'intégration », mais en tire aussi la décision de « mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms », faisant par là une accumulation d’amalgames entre délinquants, immigrés, gens du voyage et Roms. La technique de grossissement des faits divers  est devenue évidente au moins depuis la campagne présidentielle de 2002, à travers l’affaire « papy Voise ». Trois jours avant le premier tour de l’élection présidentielle, les télévisions consacrent alors l’essentiel de leurs journaux à l’agression d’un retraité apparemment sans histoire, roué de coup à Orléans par des jeunes non identifiés, qui incendient sa masure et prennent la fuite. Le motif apparemment purement crapuleux de l’agression participe au scandale qui naît de cet événement insignifiant, dont le poids sur le scrutin, et sur le score de l’extrême-droite bien plus haut que ne le laissaient penser les sondages, est rapidement évoqué. Mais l’enquête menée sur ce fait sordide n’a pas abouti depuis, et n’a pas permis d’élucider les motifs réels de l’agression, peut-être liée à la personnalité ambiguë de la victime, condamnée quelques années avant de ses propres dires pour « un problème sexuel » lié aux jeunes du quartier qu’elle fréquentait, et qu’elle aurait parfois hébergés.

 LE FAIT DIVERS UN FAIT DE GOUVERNEMENT

L’annonce de la découverte de deux vidéos contredisant la thèse d’un assassinat du fragile Méric programmé par l’extrême droite n’est faite que le lundi suivant l’élection à Villeneuve le Lot d’un candidat de droite par défaut d’un candidat de gauche coulé par les frasques financières du prédécesseur Cahuzac. La présentation autorisée par la police du gouvernement des deux vidéos avant la fin de la consultation électorale eût donné plus de chances encore au candidat FN d’être élu. Parfait exemple de manipulation de l’opinion électorale et des gauchistes, ce décalage voulu dans la désinformation attient son but : il calme le jeu, renvoie les gauchistes antifas excités à leurs suppositions et récupération politique marginale. Hollande s’était déjà emparé dans la foulée de l’émotion limitée suite à la mort de l’étudiant Méric, d’un autre fait divers. Il avait « réagi » au décès du nouveau né dans le Lot. Alors qu'il s'exprimait devant le congrès de la Mutualité française réuni à Nice, le président de la République a affirmé qu'il avait demandé à la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, de «diligenter une enquête administrative pour tout connaître des conditions de ce drame». Il rappelait aussi l'engagement qu'il avait pris durant sa campagne: «Aucun Français ne doit se trouver à plus de 30 minutes de soins d'urgence». Un drame, une réaction. Deux drames deux réactions. Hollande avait pourtant promis durant sa campagne de ne pas marcher dans les pas de son prédécesseur et de ne pas s'emparer des faits divers, aussi tragiques soient-ils. Près de six mois après son élection, alors qu'il est en difficulté dans les sondages, le voilà qui au contraire reprend les recettes sarkozystes et investit le champ de la sécurité. Certes, il aurait été difficile à Hollande de passer sous silence les conditions de la mort de ce nouveau-né alors qu'il intervenait devant la Mutualité française. Mais, fallait-il que ce soit lui, le président de la République, et non le premier ministre Jean-Marc Ayrault de plus en plus impopulaire, qui demande à Marisol Touraine de «diligenter une enquête administrative» et qui le fasse savoir. «Moi, président de la République, je ne serai pas président de tout», avait-il pourtant promis le 2 mai, entre les deux tours de la présidentielle, lors de son duel avec Nicolas Sarkozy.
Fin 2012, Hollande avait multiplié les entorses et les renoncements au code de bonne conduite qu'il s'était fixé quand il était candidat. Ainsi s'était-il rendu à Échirolles (Isère) au début du mois d'octobre, trois jours après un meurtre à l'arme blanche de deux jeunes tués dans des conditions atroces. «Justice sera faite», avait-il lancé aux habitants du quartier. «Je reviendrai, je reviendrai», avait-il promis. Il avait encore profité de son déplacement à Nice pour rencontrer, en compagnie du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, la famille du gendarme fauché à Peille, près de Nice et décédé. À l'issue de sa rencontre avec l'épouse du gendarme, le président retrouvait caméras et micros. Il faut, a-t-il dit, «poursuivre le combat pour la sécurité des Français». À défaut de rebondir dans les sondages, François Hollande semble décidé à rebondir sur les faits divers.

diversion et EFFET VARIABLE du fait divers

Le 3 octobre 1980, l'attentat de la rue Copernic.  Une bombe explose devant une synagogue et fait quatre morts à huit mois de la présidentielle, que remportera François Mitterrand. Quel rôle a joué cet attentat dans la première victoire de la gauche à une présidentielle? Il a coûté cher à la droite hautaine qui tapinait déjà avecl’extrême droite présentable. Valéry Giscard d'Estaing ne s'était pas rendu sur place, et son Premier ministre, Raymond Barre, avait bien gaffé: "Cet attentat odieux voulait frapper les israélites, il a frappé des Français innocents." 
Le 4 mai 1988, l'assaut de la grotte d'Ouvéa. C'est un fait divers pour les journalistes accrédités qui méprisent la lutte indépendantiste comme ringarde. Le 22 avril, à deux jours du premier tour, des indépendantistes kanaks prennent d'assaut la gendarmerie de Fayaoué en Nouvelle-Calédonie avec comme objectif de garder en otage des forces de l'ordre jusqu'au second tour de la présidentielle. L'épisode survient en pleine cohabitation. Le Premier ministre de l'époque, Jacques Chirac dépêche des troupes sur place et privilégie l'intervention des forces de l'ordre pour libérer les otages retenus dans la grotte d'Ouvéa. François Mitterrand demande à être informé en temps réel. Il autorisera finalement l'assaut, très risqué. Dix-neuf Kanaks et deux militaires sont tués. François Mitterrand est réélu deux jours plus tard parce qu’il réussit à faire porter le chapeau du massacre au seul Chirac. 
13 mai 1993, prise d'otage dans une maternelle à Neuilly. Ce fait divers bizarrement mené n'a eu aucun impact sur la campagne présidentielle en cours, mais a boosté un Sarkozy, avide d’occuper la place suprême. Le 13 mai 1993, une classe de maternelle est prise en otage par Érick Schmitt qui se fait appeler "Human Bomb" durant deux jours. Le RAID délivre les enfants en tuant le preneur d'otage. Nicolas Sarkozy, alors maire de Neuilly-sur-Seine, détient la place de Zorro dans les négociations, n'hésitant pas à sortir lui-même des enfants de l'école, sous l'oeil des caméras. Ce fait divers contribuera à construire son image de politique volontaire et hyper-actif.  
27 mars 2002, fusillade au conseil municipal de Nanterre.  A l'issue du conseil municipal à Nanterre, un homme, Richard Durn tire dans la foule: il tue huit élus et blesse dix-neuf personnes. Arrêté, il parvient à se suicider dans les locaux de la police judiciaire le lendemain. Le fait divers pèsera peu dans la campagne, la presse ayant résumé et clos l’affaire à un dérapage de « forcené » déséquilibré.  
18 avril 2002, l'agression de "Papy Voise". A priori un fait divers comme un autre, mais celui-ci survient après un long débat sur l'insécurité en France et à trois jours du premier tour. Largement relayées à la télévision, les images du visage tuméfié et les pleurs de Paul Voise bouleversent la France entière et provoquent une vague d'indignation face à la délinquance. Moins à l'aise sur ce terrain, Lionel Jospin est emporté dès le premier tour par un vote FN que personne n'imaginait d'une telle ampleur, plus comme protestation contre sa gestion anti-ouvrière que pour l’insécurité des papys.
28 octobre 2006, l'incendie d'un bus à Marseille.  Cinq ans plus tard, nouvelle présidentielle et nouveau fait divers. Le 28 octobre 2006, huit mineurs incendient un bus à Marseille. La conductrice, Mama Galledou, manque d'y périr, brûlée vive. Le 30 novembre, le candidat UMP Nicolas Sarkozy y fait directement référence pour réclamer la fin de l'excuse de minorité pour les criminels de 16 à 18 ans.  
27 mars 2007, émeutes de la Gare du Nord. Puis, quelques semaines avant le premier tour, le 27 mars 2007, la gare du Nord est le théâtre de violents affrontements entre plusieurs centaines de jeunes et des policiers. Nicolas Sarkozy accuse dès le lendemain ses concurrents Ségolène Royal et François Bayrou, d'être "du côté des fraudeurs" et "des émeutiers". Nicolas Sarkozy, qui avait instrumentalisé plus d'une fois des faits divers en tant que ministre de l'Intérieur, assure ce jour là être "du côté de tous ces honnêtes gens qui [payent] leur billet". 
20 juin 2010, le jeu de mot sur le « Kärcher ». Il y avait eu exactement cinq ans, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, s’était rendu à la barre Balzac au lendemain de la mort du petit Sid-Ahmed, 11 ans. Pris dans une fusillade, l'enfant avait été touché par deux balles qui ne lui étaient pas destinées alors qu'il nettoyait la voiture de son père au pied de l'immeuble, un dimanche après-midi. Nicolas Sarkozy était venu rendre une visite inopinée à la famille de l'enfant, annonçant le prochain nettoyage de la cité "au kärcher". Si c'est désormais celle dont on se souvient le mieux, cette visite d'un ministre aux 4000 après la mort d'un enfant ou d'un adolescent tué par balle n'était pas la première.
Le 19 mars 2012, en pleine campagne présidentielle hargneuse, le meurtre de trois jeunes enfants juifs et d'un adulte à Toulouse par le fasciste Merah (qui se dit djihadiste)  a créé une onde de choc considérable que les candidats de tous les bords politiques doivent désormais prendre en compte. La campagne est gelée mais Sarkozy qui croyait tirer les marrons du feu ne peut s’en servir pour revenir sur Hollande qui le distance de plus en plus dans la course. Les antifas et divers anarchistes se taisent.

RETOUR SUR L’UTILISATION POLITIQUE DU FAIT DIVERS

A la lecture des archives du journal Le Monde, on est frappé de voir combien certains articles vieux de quarante ans semblent encore d'actualité. Frappé aussi de la similitude des faits et des déclarations quelle que soit l'époque. Les visites sont ainsi toujours "impromptues", ou "surprises", et permettent à l'intéressé de prendre "enfin" conscience des problèmes. Frappé enfin de constater qu'en 1971 déjà, moins de dix ans après sa construction, le quartier des 4000 connaissait déjà de nombreuses difficultés. Voici quelques extraits, choisis parmi de nombreux autres.
Le 8 mars 1971, James Sarazin, dans Le Monde, évoque un fait divers :
Une trentaine de policiers avaient ce samedi matin, remplacé les gendarmes mobiles qui, pendant toute la nuit, ont monté la garde dans la cité dite "des 4000 logements", avenue du Général-Leclerc à La Courneuve (Seine-Saint-Denis). On craignait en effet que les jeunes du quartier ne mettent à exécution leur intention d'organiser une expédition punitive contre le café-tabac Le Narval, où un de leur camarades, M. Jean-Pierre Huet, dix-sept ans, est mort vendredi après avoir été atteint de deux balles tirées par le patron du bar, M. Louis Gasq, quarante et un ans. (...)
A l'occasion de cette affaire, les habitants de la cité dénoncent leurs conditions de vie dans ce très grand ensemble où vivent quinze mille à dix-huit mille personnes. (...) Une de ces dizaines de villes-dortoirs qui entourent la capitale, sans chaleur et sans âme (...) Depuis plusieurs années, les vols, les agressions, les déprédations de tout ordre, sont devenus monnaie courante. On a peur le soir et même le jour pendant le week-end. (...)
Quelques mois plus tard, Albin Chalandon se rend sur place. Le ton de l'article du Monde du 7 octobre 1971 est assez savoureux :
Les ministres seraient-ils aussi des naïfs ? Périodiquement, ils expriment leur étonnement face à des situations connues de tous, excepté peut-être de leur entourage. Il est permis d'exprimer, une fois encore, quelque surprise en apprenant que M. Albin Chalandon, responsable de la politique du logement depuis trois ans, a effectué, "pour la première fois", selon sa propre déclaration, la visite d'un grand ensemble, le 5 octobre, à La Courneuve.
"Les problèmes sont très complexes", a indiqué le ministre à l'occasion de cette visite "impromptue". En fait, depuis que les grands ensembles existent, de nombreuses études ont été publiées à leur sujet, mettant en relief la monotonie de leur urbanisme, les lacunes de l'entretien des immeubles et de leur environnement, l'absence d'équipements socio-culturels, la non-participation des locataires à leur gestion (...) Le ministre pouvait-il ignorer tout cela ? (...) "La Courneuve est une véritable miroir grossissant des problèmes généraux qui se posent dans beaucoup de grands ensembles" a souligné M. Chalandon. Certes, mais encore faut-il regarder à temps le miroir pour soigner, au moment opportun, les maux qu'il fait apparaître.
A l'issue de sa visite, il annoncera l'ouverture de pourparlers avec l'office HLM de Paris, propriétaire des 4000, pour améliorer la vie des locataires. Une décennie plus tard, un nouveau fait divers met un nouveau coup de projecteur sur la situation aux 4000. Il est relaté par Roger Cans.
Le Monde du 12 juillet 1983 :
Dans l'appartement du deuxième étage, c'est la désolation, Mme Khadoudja Ouannes (...) pleure son petit dernier dont la photo trône sur le buffet. Alignées sur les chaises du salon, la soeur et les voisins assistent sans mot dire au spectacle de cette femme recroquevillée au sol, éplorée mais silencieuse, après une nuit d'insomnie. (...) Le petit Toufik devait partir avec son frère pour une colonie de vacances en Bretagne. Mais ce samedi 9 juillet, peu avant 21 heures, il a rencontré son destin, absurde. Avec quatre camarades algériens plus âgés, il fait exploser des pétards. (...) Un résident (...) passe la tête par la fenêtre pour protester (...) Inopinément, un coup de feu part, couvert par le bruit des pétards. Touché à l'épaule mais ignorant qu'il s'agit d'une balle, le petit Toufik veut rentrer chez lui, à 30 mètres de là. Pris d'un malaise, il se couche dans l'entrée de l'immeuble et meurt avant l'arrivée des secours.
Deux semaines plus tard, le 26 juillet 1983, le président de la République François Mitterrand visite plusieurs villes de la banlieue parisienne et s'attarde longuement aux 4000, près de la barre Renoir devant laquelle Toufik est mort.
Le Monde du 28 juillet 1983 :
Le déplacement du président de la République dans la banlieue parisienne, mardi 26 juillet, s'est fait de façon impromptue, les journalistes étant seulement invités à rencontrer le chef de l'Etat à la fin de la matinée (...) Ces dispositions ont facilité les contacts de M. François Mitterrand avec la population, notamment à La Courneuve (Seine-Saint-Denis) où le président de la République, parcourant la cité des "4000" a pu accepter l'invitation d'un couple de locataires, M. et Mme Haccoun, à visiter leur appartement et à y prendre l'apéritif. (...)
Ils habitent, avec leurs dix enfants, un F5, dont le loyer est de 2000 francs. M. Mitterrand a pu observer le mauvais état de leur logement et des parties communes. (...) M et Mme Haccoun escomptent une amélioration de leur situation, après la visite du chef de l'Etat. Selon eux, la sécurité a été renforcée dans la cité, depuis l'assassinat d'un enfant algérien, le 9 juillet dernier. Un groupe de jeunes gens, immigrés pour la plupart, ne semblaient pas partager cette opinion. "Ce n'est pas parce qu'il est venu ici que cela va changer quelque chose", disaient-ils.(...)
Le gouvernement lancera durant l'été 83 une opération "prévention été 1983" dite aussi "anti-été chaud" avec notamment le financement d'activités sportives et de découvertes pour les jeunes. François Mitterrand annoncera la réhabilitation de vingt-deux quartiers dégradés comme un des grands projets de son septennat. En 1984, la ville de Paris cédera à l'office HLM de La Courneuve les immeubles des 4000.
En 1988, il y aura la mort de deux jeunes qui circulaient sans casque en moto, tués dans un accident alors qu'ils fuyaient une voiture de police. En 2003, un jeune de 13 ans victime d'une balle perdue sera paralysé à vie. Le 19 juin 2005, Sid-Ahmed trouvait la mort en bas de Balzac. Le lendemain, la journaliste Marion Van Renterghem se trouvait chez ses parents quand surgit Nicolas Sarkozy.
Le Monde du 22 juin 2005 :
La famille et les amis sont rassemblés dans le séjour de l'appartement, face à face, sur les banquettes disposées le long des murs. (...) Des voix de talkie-walkie surgissent soudain de la cage d'escalier. Le bas de l'immeuble grouille de voitures et de policiers, les rues du quartier sont bloquées. L'ascenseur est en panne, comme d'habitude, et on a le temps d'identifier les visiteurs qui montent à pied le long des murs taggés, dans des odeurs pénibles. "C'est Sarkozy" annonce quelqu'un. (...) Le ministre de l'intérieur entre, serre les mains, s'assied. (...) "Qu'est-ce que je peux pour vous ?" demande Nicolas Sarkozy, royal, à ses hôtes. "C'est trop tard. Ça ne me rendra pas mon fils !" sanglote la mère de Sid-Ahmed. (...) Le ministre essaie d'amadouer la soeur de la victime, Baïa, 9 ans, noyée dans les sanglots : "Tu sais que j'ai un fils de 8 ans ?" Puis autoritairement annonce "trois choses" à la petite assemblée :
1. "Les coupables seront retrouvés et punis"
2. " Dès demain, on va nettoyer au Kärcher la cité des 4000. On y mettre les effectifs nécessaires et le temps qu'il faudra, mais ça sera nettoyé. Dans un second temps seulement, on parlera de prévention. La police de proximité sera renforcée, avec 20 ou 30 policiers".
3. "J'imagine que vous n'avez plus envie de vivre là. On va vous reloger ailleurs, vous serez mieux."
Dix jours plus tard, il promettra le renforcement des effectifs du commissariat, 257 propositions d'embauches dans des grandes entreprises, 150 000 euros pour les associations, un tutorat d'élèves de grandes écoles pour les lycéens, la signature d'une convention sciences-po avec un lycée de la commune. Nous reviendrons sur ces promesses prochainement.
Le 23 mai dernier, une mère de famille a pris une balle perdue dans la jambe en bas du Mail. Elle a été gravement blessée. Aucun ministre ne s'est déplacé. Le lendemain, un jeune homme de 28 ans est mort d'une balle dans le coeur en bas de Balzac. On a parlé de trafics, de guerre de territoires... Aucun ministre ne s'est déplacé[16].

Polygamie : comment un fait divers devient une controverse politique[17]

 « Le gouvernement va-t-il à nouveau légiférer, à la suite d'une affaire particulière et fortement médiatisée touchant un Français musulman ? Eric Besson, lundi 26 avril, a annoncé une possible "évolution législative" sur les conditions de déchéance de la nationalité, après un week-end marqué par la controverse autour du cas d'un Nantais soupçonné de polygamie. Décryptage de cette affaire, où l'opposition dénonce une "manipulation", au moment où la droite essaie de reconquérir son électorat le plus radical après le fiasco des régionales.
Comment l'affaire est-elle passée de la femme à son conjoint ? L'affaire débute, vendredi 23 avril, quand une jeune femme de 31 ans, résidant à Rezé, près de Nantes (Loire-Atlantique), a organisé une conférence de presse pour contester une contravention de 22 euros, ayant sanctionné, le 2 avril, une conduite automobile, "dans des conditions non aisées", en raison du port d'un voile intégral. Le soir, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, alerté par la préfecture, adresse un courrier à Eric Besson, ministre de l'immigration et de l'intégration, lui demandant d'examiner les conditions dans lesquelles le conjoint de cette femme, Liès Hebbadj, présent lors de la conférence de presse, pourrait être déchu de sa nationalité française, en raison, notamment, de soupçons de polygamie. Une pratique interdite en France.
Qu'est-il exactement reproché à M. Hebbadj ? Le ministre de l'intérieur reproche plusieurs choses à M. Hebbadj, âgé de 35 an : d'appartenir à une "mouvance radicale" de l'islam, le "tabligh", de "vivre en situation de polygamie avec quatre femmes dont il aurait eu douze enfants". Chacune de ces femmes, en outre, "bénéficierait de l'allocation parent isolé", ce qui constituerait une fraude. M.Hortefeux demande à M.Besson de "bien vouloir faire étudier les conditions dans lesquelles, si ces faits étaient confirmés, l'intéressé pourrait être déchu de la nationalité française".
Lundi 26 avril au matin, aucune poursuite judiciaire n'avait encore été ouverte à l'encontre de M .Hebbadj. La préfecture de Loire-Atlantique était toujours en train de réunir les éléments à charge, selon le directeur de cabinet, Patrick Lapouze. Le procureur de la République de Nantes, M. Ronsin, a confirmé n'être pour l'heure saisi d'aucune plainte de la part de la caisse d'allocations familiales "concernant d'éventuels soupçons de fraude".
"La seule procédure que nous avons pour l'instant concerne l'affaire du timbre-amende de l'automobiliste", poursuit M. Ronsin. Selon nos informations, le ministère de l'intérieur aurait aussi été averti de fréquents voyages de M. Hebbadj dans des pays soupçonnés d'accueillir les activités de militants islamistes. Est-il possible de déchoir M. Hebbadj de sa nationalité ? Les conditions pour "déchoir" une personne de sa nationalité sont très strictes et régies par l'article 25 du code civil. En l'occurrence, seul un crime ou un délit tel que l'atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou le terrorisme peuvent le permettre. Il est toutefois possible de "perdre" sa nationalité, s'il est démontré qu'elle a été obtenue par "mensonge ou par fraude", conformément à l'article 27-2 du Code civil. C'est ce dernier article qui semble le mieux approprié aux soupçons pesant sur M. Hebbadj. Natif d'Algérie, il pourrait "perdre" la nationalité française qu'il aurait acquise par mariage avec la femme verbalisée, en 1999, s'il est démontré qu'il a menti à l'administration française à cette époque, ne révélant pas qu'il était déjà marié civilement à d'autres femmes.
Pour sortir de l'incertitude juridique, M. Besson a indiqué lundi 26 avril sur RTL, qu'il envisageait une "évolution législative" sur les conditions de déchéance de la nationalité. Cela pourrait se faire via son projet de loi relatif à la nationalité et à l'intégration, adopté en Conseil des ministres le 31 mars.
Dimanche 25 avril, lors de l'émission "Internationales", sur TV5, en partenariat avec RFI et Le Monde, il avait précisé que "la procédure de déchéance de la nationalité française ne pourrait avoir lieu qu'après une éventuelle condamnation par la justice".
Dans quel contexte intervient cette polémique ? Cette affaire de niqab et de soupçons de polygamie et de fraude aux allocations intervient en plein débat sur l'interdiction du voile intégral en France. Nicolas Sarkozy a tranché, mercredi 21 avril, en faveur d'une loi d'interdiction générale sur le territoire. Le gouvernement doit élaborer un projet de loi qui pourrait être présenté à la mi-mai en conseil des ministres.
Que reproche la gauche au gouvernement ? Jean-Marc Ayrault, le maire (PS) de Nantes, s'étonne que le gouvernement fasse mine de découvrir, à propos de M. Hebbadj, une situation, selon lui, "connue depuis longtemps par les services de l'Etat". "Le gouvernement avait annoncé qu'il voulait parvenir à un consensus autour du projet de loi visant à interdire le port du voile intégral. Là, il arrive à l'effet inverse. Il [veut] faire diversion alors qu'il y a de gros dossiers comme les retraites et l'emploi qui sont en souffrance. C'était la même chose avec le débat sur l'identité nationale qui n'avait qu'un seul objectif: conquérir l'électorat du Front national", estime M. Ayrault.
Pour François Hollande (PS), il s'agit d'un "fait divers, qui mérite qu'on aille jusqu'au bout des investigations". Pour lui, "le ministre de l'intérieur a voulu faire de la politique". Selon Julien Dray (PS), il s'agit "d'un scénario de dramatisation d'une situation". "Que la droite joue avec ça, n'est pas une bonne méthode", juge de son côté Manuel Valls (PS). Marie-George Buffet, la secrétaire nationale du PCF, dénonce, elle, "une opération politicienne du plus mauvais goût". Que répond la droite ? L'initiative de M. Hortefeux est défendue par de nombreuses personnalités de droite. Pour M.Besson, "ce qui a déclenché l'affaire ce n'est pas la demande que m'a adressée Brice Hortefeux vendredi mais le fait que cette dame ait choisi, avec son mari, son compagnon, de faire une conférence de presse pour contester la contravention qu'elle a reçue". Xavier Bertrand, le secrétaire général de l'UMP, estime que "ce qu'a dit Brice Hortefeux est frappé au coin du bon sens et rappelle qu'en France, il y a des droits et des devoirs". "Brice Hortefeux a raison de mettre les pieds dans le plat", juge Jean-François Copé, le patron des députés UMP. M. Hortefeux a aussi reçu le soutien de Jean-Marie Le Pen (FN): "Les caisses sociales françaises sont pillées littéralement par des milliers, des dizaines de milliers de gens qui profitent indûment de nos législations ».

LA POUTRE DU MORVEUX GAUCHISTE DONNEUR DE LECONS

« Potins et chiens écrasés se partagent les projecteurs de l’information de masse, écrit celui-ci. Elle est partout, cette « info » traitée à la sauce sensationnaliste pour produire de l’audience et des émotions. Dur d’en décrocher puisqu’elle vous traque. On a beau éteindre sa télé ou comme moi la reléguer à la cave, il reste l’ordinateur : Google Actus et ses improbables colonnes où cascadent des titres tapageurs.(…). L’information est partout, elle hurle, elle fait peur, et c’est bien le but. Il sent bon, il sent bon mon chien écrasé ! ».
Le spectateur est  réduit au rôle de spectateur certes. La peur diffusée sert à conforter le grognement « que fait la police ? », mais le gauchiste critique oublie l’essentiel, la propagande en général, dont le fait divers est désormais partie intégrante et vénérable, vise à pousser à CHOISIR. Subliminalement, le spectateur va choisir un camp politique comme il choisit une marque de lessive, l’émotion en plus. Le gauchiste voit en l’utilisation des faits divers un vecteur de l’extrême droite : « Et cela se vérifie pour la plupart des faits divers, puisque les trolls d’extrême-droite sont invités par leurs organisations à distiller leur venin au bas de tous les faits divers ». Il voit la poutre dans l’œil en face (avec bandeau…) mais pas la poutre, sa participation à l’interprétation des faits divers à sa manière (ou à leur négation hautaine si ils contredisent ses orientations ou ficelles politiques). L’altercation dramatique pour Méric est la poutre de l’observateur gauchiste donneur de leçon.
Mais il est un autre aspect que ne voit pas le donneur de leçon d’antifascisme. Le fait divers juridique. Pas un jour sans qu’un député, un sénateur, un DSK, un Tapie, un Berlusconi, un Sarkozy, un Tron ne soit interpellé, placé en GAV, mis en examen. La plupart des puissants échappent au final à toute condamnation sérieuse contrairement au blaireau du quartier lointain qui déborde dans les prisons étroites de la république. Le fait divers juridique sert à faire croire à une véritable justice qui, bien qu’imparfaite, limiterait les injustices, les détournements financiers, etc. Enfin qui prouverait qu’il n’y a pas besoin de se faire justice soi-même ni surtout qu’une classe, le prolétariat, pourrait avoir la prétention à demander « justice », « historiquement » et « violemment ».

LA POLITIQUE N’EST-ELLE PAS SIMPLEMENT TOMBEE AU NIVEAU DU FAIT DIVERS ET DU CANIVEAU DES FACTIONS BOURGEOISES ?

« A Corbeil-Essonnes, deux règlements de comptes perpétrés en moins de trois semaines ont relancé les spéculations sur un système d'achat de votes lors des dernières municipales de 2010, bousculant une vie politique locale où plane la figure de l'ex-maire, Serge Dassault. Le 19 février, à l'heure du déjeuner, F. H., 32 ans est atteint de trois balles de calibre 38 en plein centre-ville. Grièvement blessée, la victime, un boxeur amateur au parcours de demi-sel, connaît le tireur qui a agi au su et à la vue de nombreux témoins. Il s'agirait d'un chef d'entreprise au passé de voyou, connu comme une "grande gueule" à Corbeil. Actuellement en fuite, cette "figure locale" qui a su nouer des amitiés politiques dans tous les camps mais qui fut surtout proche de M. Dassault, selon des sources concordantes, aurait pris la direction de l'Algérie, bien que la rumeur lui prête le souhait de se rendre, pour protéger sa famille. Moins de trois semaines auparavant, cette ville de banlieue dont certains quartiers sensibles comme les Tarterêts ont acquis une réputation nationale, avait déjà été le théâtre d'une fusillade. Pris dans un guet-apens au volant de sa voiture, Rachid Toumi reçoit près d'une vingtaine de plombs au niveau d'une épaule après avoir été pris pour cible par un homme armé d'un fusil. Depuis son agression, ce trentenaire connu des services de police, assure se déplacer avec un gilet pare-balles. Mais surtout, dans une interview accordée au Parisien, il affirme que ces règlements de compte sont la conséquence d'un système présumé d'achat de votes mis en place par le sénateur UMP Serge Dassault et l'actuel maire de la commune Jean-Pierre Bechter. Au coeur de cette escalade de la violence, selon lui: un imbroglio autour du non-paiement d'une forte somme d'argent promise à des jeunes de cité pour services rendus lors des dernières municipales. "Corbeil, c'est devenu un système mafieux. L'argent de Dassault a tout pourri", lâche-t-il dans une vidéo, le visage caché. Contacté par l'AFP, M. Bechter a réfuté toute fraude électorale. Une enquête préliminaire sur des achats de votes présumés est néanmoins en cours depuis 2010 à Paris, à la suite d'un signalement par l'agence anti-fraude Tracfin. "A Corbeil, j'ai toujours vu des gens toucher de l'argent pour ça (être payé pour inciter des gens à voter, ndlr). (...) Aujourd'hui chacun veut sa part. Comme la justice n'a jamais rien fait, pour nous, c'était légal. C'est un travail", selon M. Toumi. "Bechter a fait des promesses. Il ne les a pas tenues. Et aujourd'hui, on est en train de s'entretuer", ajoute le trentenaire. Jean-Pierre Bechter a affirmé à l'AFP ne pas connaître Rachid Toumi et mis ces déclarations sur le compte "d'une pré-campagne électorale". "Il est manipulé", a affirmé l'élu. "En 2008, il se baladait avec un mégaphone dans une cité pour dire des insanités sur Serge, a rapporté M. Bechter. Tout ça, c'est du baratin, c'est du n'importe quoi". Interrogé, l'entourage commun du maire et de l'avionneur met ces fusillades sur le compte de "vieux conflits" entre "ex-voyous" des cités et parle des "fantasmes" suscités dans les quartiers par la fortune de Serge Dassault, estimée à 9,9 milliards d'euros par le magazine Challenges.
"Quand dans certains départements les tentatives d'homicide sont le fait de trafic de drogue ou de corruptions diverses et variées, à Corbeil-Essonnes ce sont les dons d'argent des édiles en place qui en sont à l'origine", dénonce sans ambages, Bruno Piriou, le principal opposant (PCF) à la majorité municipale. "On a un système en train de s'auto-détruire. Cet argent rend fou", observe l'ex-première adjointe de M. Dassault, Nathalie Boulay-Laurent. Comme M. Piriou, cette ex-élue Modem demande que la justice "passe" à Corbeil. L'enquête sur les deux tentatives d'homicide ont été confiées par le parquet d'Evry à la brigade criminelle de la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) de Versailles. A Paris, outre l'enquête préliminaire sur des achats de votes présumés, une information judiciaire pour appels téléphoniques malveillants et tentative d'extorsion de fonds et une enquête préliminaire pour extorsion en bande organisée ouverte après des plaintes des enfants Dassault ont été ouvertes.
En 2009, plusieurs personnes dont F.H. avaient témoigné par écrit au Conseil d'Etat sur des dons d'argent, dont elles accusaient Serge Dassault. Elles s'étaient finalement rétractées. En juin 2009, le Conseil d'Etat avait invalidé la municipale de 2008 ».
(Auteur AFP)

Ah bon on peut acheter les votes en système « démocratique » !? Mais il y a de quoi devenir « fasciste » ! En tout cas concédez, chers idéalistes antifas, que le fascisme dominant c’est bien le capitalisme en décadence capable de tous les trucages et de tous les détournements dont votre propre naïveté et inconséquence !


AUX SOURCES DU FANTASME de L’ANTIFASCISME INFANTILE

L’antifascisme a une histoire, tortueuse, non linéaire, comme l’anticommunisme. Il est en général aussi anticommuniste que l’anticommunisme, autant que le stalinisme était un anticommunisme. Cette idéologie devenue fantasme politique fumeux est en réalité depuis les années 1930 un des plus sinistres héritiers du stalinisme, courant conservateur bourgeois déguisé en rouge.
Les premiers lutteurs contre le fascisme italien et allemand ont été les ouvriers italiens et allemands et leurs politiques maximalistes. De magma informe de prétentions sociales et de culte de la violence, le fascisme est devenu le principal vecteur belliciste de bourgeoisies qui n’acceptaient pas leur défaite de 1918. D’organisme politique mensonger et répressif, le fascisme est devenu en peu de temps un enjeu impérialiste qui dépassait les contradictions nationales internes. L’antifascisme a suivi le même chemin. Il s’est mondialisé en quelque sorte. Parallèlement à l’échec du bolchevisme, le stalinisme s’est emparé de la rhétorique antifasciste, non pour s’en servir comme tactique pour favoriser l’hégémonie du prolétariat ou lui gagner les couches intermédiaires, mais comme instrument politique et diplomatique au service de la défense nationale de l’URSS.
Michel Roger cite longuement la revue de la Gauche italienne en exil Bilan et décrit comment l’antifascisme a participé à la préparation en vue de la Seconde Guerre mondiale, et notez surtout la remarque géniale de Bilan (le fascisme ne s’universalise point) qui fiche par terre toute argumentation antifasciste infantile : « Dans cette période (années 1930), le fascisme, en faisant naître « l’anti-fascisme », a renforcé la tendance vers la guerre mondiale. Cette polarisation fascisme-antifascisme s’est révélée très utile dans la mobilisation idéologique en vue du futur conflit mondial. C’est pourquoi les prolétaires doivent relever le drapeau du « communisme contre le capitalisme » et de ne pas marcher derrière l’alternative »démocratie contre dictature » :
« Nous constaterons par exemple, à l’heure actuelle, après quatorze années de fascisme en Italie, qu’au cours d’une situation de contrastes inter-impérialistes très aigus, le mouvement fasciste ne s’universalise point et, par contre, la course des événements qui nous conduiront à la guerre se fera sous l’enseigne de l’antifascisme en France, ou de l’absence totale de toute base pour le fascisme et pour l’antifascisme en Angleterre, un des pays les plus riches d’empires coloniaux. L’expérience prouve chaque jour que la diversité des régimes dictatoriaux, ou fascistes, permet de faire surgir sur le front des luttes inter-Etats le dilemme « dictature-démocratie », qui deviendra la drapeau sous lequel les masses ouvrières seront mobilisées pour le nouveau carnage mondial ». (…) « Non contents d’avoir permis le renforcement de l’Etat, au nom de l’antifascisme, socialistes et centristes (cf. les staliniens) préparent la guerre : en 1935, Staline déclare « qu’il comprend et approuve pleinement la politique de défense de la France »[18].

Au début de la guerre, le PCF n’est plus antifasciste mais une sorte de parti national de l’étranger. Fidèle à la ligne d’alliance du pacte Staline-Hitler, il va demander gentiment la demande de reparution de l’Humanité auprès des « fascistes » qui occupent Paris. En 1941 le PCF clandestin trouve « réconfortant » que des travailleurs français picolent au bar du coin avec des soldats allemands, quand quatre ans plus tard il criera « à chacun son boche ».
Il redevient antifasciste avec son virage terroriste avec le crétin Fabien pour faire oublier le tournant néo-fasciste précédent.
Premier parti des 75000 fusillés à la Libération (en réalité il y en eût moins de 5000 et plus par inconscience
et incompétente criminelle des petits chefs clandestins), il n’y a pas plus « antifasciste» que le PCF, surtout pour faire trimer les ouvriers à la reconstruction du pays. Tout gréviste est un possible restaurateur du fascisme. Toute allusion aux goulags est forcément une invention fasciste. EN 1948, Tito est un fasciste au pouvoir en Yougoslavie : « Tito est un nouveau Doriot. Et Doriot a fini comme Hitler » (Duclos) ; « Tito a rejoint la troupe des Trotsky, des Doriot et des Mussolini » (Courtade)[19].
Lorsque les chars russes envahissent la Hongrie en 1956, le stal antifasciste de service André Stil assure que les troupes soviétiques ont mis fin aux « atrocités fascistes ». La bourgeoisie française inféodée à l’américaine soutenant la RFA durant la guerre froide, le PCF dénonce ceux qui s’acharne à « redonner vie à un cadavre qui aurait des yeux weimariens et une haleine hitlérienne ». Les soldats américains stationnés en France sont les « nouveaux nazis ».
Les émeutes à Sétif en 1945 ont été un « complot fasciste ».
Lors du complot dit « des blouses blanches » en 1953 en Russie, le journal Ce Soir du PCF soutient le régime avec des arguments très… antifascistes limite antisémitisme garanti : « révélations sur l’organisation américaine juive Joint qui est un instrument de « La grande finance juive » qui a soutenu le nazisme » !
Au début du mois de mai 1968, l’antifascisme agite encore l’intelligentsia parisienne, dont les enfants gauchistes voient du fasciste partout, mais la force de l’agitation sociale fait vite repasser au second plan le fantasme « fachiste ». Il reste présent dans les années 1970 toujours principalement colporté par le principal parti « fachiste » survivant, le PCF. La droite bourgeoise lui glisse cependant de plus en plus de peaux de bananes sous les pieds en milieu scolaire et universitaires où elle favorise une mainmise croissante de la version antifasciste gauchiste, version trotskienne et maoïste. L’antifascisme caméléon du PCF se restreint peu à peu aux sonneries au mort dans ses municipalités. Un antifascisme démocrate, certifié américain va dominer la scène de la fin des années 1970 à la chute du mur de Berlin, autour de la révélation contestée des chambres à gaz, puis sa confusion avec l’antiracisme jusqu’à nos jours, jusqu’à devenir une chose pleine de bruit et de fureur et qui ne signifie rien.

L’antifascisme infantile a les mêmes mots, les mêmes insultes, les mêmes syllogismes débiles que la doxa stalinienne. C’est probablement le dernier bâtard du stalinisme décomposé, piaffant au milieu des troupes de bobos petits blancs du parti de Mélenchon, au milieu  des étudiants bcbg nuls en histoire, au milieu des petits aventuriers excités de la CNT française, au milieu des pigistes et des maraudeurs de la presse gouvernementale. L’antifascisme infantile n’est pas révolutionnaire, ni contre-révolutionnaire. Idéologie bourrée de cortisone antiraciste, trop souvent reliftée, cette théorie maquillée de la longue contre-révolution elle a du mal à reprendre la place du grand-père, elle sonne faux et sert à amuser la galerie des sinistres politiciens au pouvoir.


[1] Confondant d’aveuglement fantasmatique, le site des antifas, Action Antifasciste, contient des textes de Bordiga et de la Gauche communiste, plus que critiques sur l’antifascisme. Soit ils ne lisent pas, ne les comprennent pas,  ne les voient pas, soit ils restent butés sur une vue partielle et infantile de la réalité du combat politique. La deuxième hypothèse me semblant la plus probable et dommageable pour leur éventuelle sortie de ce crétinisme antifa.
[2] Un commentateur a fort bien résumé le rôle contre-productif des « antifas », pour leur propre cuisine politique idéaliste, et comme élément du spectacle hémiplégique qui sied si bien au gouvernement : « « En entendant Serge Ayoub ce matin sur France Info, je me suis dit que l'action des anti-fa était parfaitement contre productive: grâce à ce fait-divers ils ont donné un micro aux idées fascistes qu'il était sensé combattre. Ayoub se régale: il peut dire qui s'y frotte, s'y pique, faut pas pleurer si vous venez vous en prendre à plus forte partie que vous! Il peut se victimiser dans la foulée: "regardez les méchants qui veulent nous interdire et qui nous agressent". Etc. A travers sa propre mort Clément Méric a fait de son corps l'estrade des fascistes qu'il combattait. Je ne peux pas cautionner ça ».


[3] Le Canard Enchaîné indique que «des JNR on assuré la sécurité rapproché des Le Pen père et fille lors du défilé du 1er-Mai 2012». Et de rappeler que les personnalités du Rassemblement mariniste ont déjà été invitées au Local, le bar associatif de Serge Ayoub, monté avec l’aide d’Alain SoralPaul-Marie Coûteaux, Robert Ménard... ou encore Marine Le Pen, présente à une soirée en l’honneur du site Fdesouche, comme le montre un reportage de Rue89, y sont passés. Ce décryptage de grenouillages et collusions plus ou moins avérées  du « milieu facho » flatte la clientèle gériatrique du Canard, sert de base idéale pour la théorie complotiste des gauchistes pour « politiser » l’altercation subite, et dope les ventes.

[4] Les dictatures sud-américaines (Argentine, Chili) ont été longtemps dénoncées comme « fascistes » par les gauchistes simplistes, bien que ne se réclamant ni de Mussolini ni de Hitler, mais de la protection de la… démocratie US !
[5] Voir mon livre : Le fascisme et son ombre sur le siècle (Spartacus 2001).
[6] J’agrée à la remarque de Kershaw : « les nazis représentaient pour ainsi dire, le dernier espoir plutôt que le premier choix de la plupart des industriels soucieux de voir s’instaurer une forme d’Etat apte à défendre leurs intérêts » (p. 96 de Qu’est-ce que le nazisme ? (poche folio).
[7] Cf Kershaw p. 271-272.
[8] L’association VISA a publié une brochure intitulée : « FN, le pire ennemi des salariés ». Son but est d’aider les militants syndicaux à expliquer et démonter le discours du FN qui trompe les salariés au moment où ces derniers, fragilisés par la crise, le chômage, la précarité... peuvent facilement se faire piéger (19 % des ouvriers et 16 % des chômeurs ont voté FN aux régionales de 2010 !).  Vous pouvez feuilleter ladite brochure en cliquant ici :


[9] Même le milieu ultra-gauche vieillissant s’est emballé pour le texte lamentable du dénommé Gavry (ex LO et ex CCI) saluant le combat du jeune Méric, porteur d’avenir… Quand les vieux coucous démocrates de l’ultra-gauche montrent leur tête chenue de has been c’est pour s’aligner derrière l’antifascisme infantile, présumé nouvel élixir de jeunesse ! Gavry souhaitait-il nous faire pleurer en évoquant la « sensibilité libertaire » de Méric ? Sachant qu’il avait appartenu à la CNT, une secte dont l’histoire pleine de mensonges et de vols est digne du parti stalinien avec lequel elle continue à flirter dans les grèves manipulées ! Le blog Controverses de Belgique, ayant publié cette merde, je leur ai demandé des explications, aucune ne me parvint. A l’autre extrémité d’un milieu maximaliste décati, un antidémocrate comme Camoin, vieux rival de Gavry, par son culte de la violence (aspect majeur du fascisme) ne craint pas d’apparaître comme un fasciste qui s’ignore ;
[10] Etrange épilogue que l’autodissolution du cercle des 20 gros musclés du JNR Ayoub (ils n’ont plus ni l’air jeunes ni révolutionnaires), avant l’annonce  de dissolution par  (je ne suis pas un ) Ayrault – qui ne fût fracassante qui si le volume de votre radio était à fond. Une certaine presse s’était faite l’écho des policiers qui regrettaient cette dissolution car elle leur ôterait la possibilité de suivi et d’écoute de cette mouvance. Etait louée aussi la capacité d’Ayoub  à modérer ce genre d’individus paumés… quand on sait la vogue des loups solitaires… Etait aussi évoquée l’idée que Ayoub serait en tout bien tout honneur une « balance » de la même police… De là à ce que nos bobos antifas infantiles dénoncent la police comme fasciste, il n’y a qu’un pas qui est franchi allègrement sur plusieurs blogs d’excités nanarchistes.
[11] Tous les clans gauchistes ont hurlé contre le tabassage, certes honteux, de deux femmes voilées (dont un cas semble être une manip des fachos intégristes) ; par contre, silence quand , en plein centre d’Argenteuil, alors que des policiers, procédant au contrôle d’identité d’une provocatrice en tchador intégral, se font agresser par une meute d’une soixantaine de cailleras du coin ; toutes les sectes anarchistes se taisent pour ne pas favoriser … l’islamophobie. Or, si les policiers ne peuvent pas faire ce louable travail, d’autres provocatrices voilées, qui font le malheur de leurs consoeurs en pays à folklore musulman dominant, risquent d’être encore victimes des excès de « crânes rasés ». La cata de la candidature voilée du pauvre NPA ne leur a pas servi de leçon, il faut à tous ces bobos soutenir les nouvelles chemises noires (certes qui ridiculisent la place de la femme dans la société), tout comme le stalinisme avait marché dans les mêmes grèves que les syndicats nazis… Même si je pense que la comparaison n’est pas raison ni historiquement plausible, je peux rappeler que la négligence des soldats vaincus (mais qui ne pouvaient se considérer comme tels) en Allemagne par la gauche électorale socialiste et les communistes maximalistes a été une des raisons du succès du nazisme, quand aujourd’hui « les assistés » et autres « petits blancs » des quartiers ouvriers « qui votent le Pen » sont systématiquement invectivés par le personnel gauchiste et leurs guides journalistes de gôche comme « abrutis ».

[12] Cf. critique de la philosophie orientale de M.Ledrus  (1933) sur le site Persée.
[13] Professeurs antifas ! Veuillez disserter SVP dans les collèges sur la citation suivante de Bordiga : « en 1945 le fascisme a gagné ».
 [14] Frigide la comique laconique a raison finalement, le fait divers finit par devenir politique tant il est instrumentalisés, et politique de bourrage de crâne.  La théorie du genre, reprise à Siconne du Bavoir (« on ne naît pas femme, on le devient »), est ici une allusion à la théorie qui fait fureur en milieu gauche bobo pour justifier le mariage homo, dont je n’ai que foutre, qui ne peut devenir la règle et qui n’est pas progressiste du tout concernant la PMA mais un bricolage absurde digne tout au plus des manipulations génétiques… bientôt ils vont demander que la science permette au bipède mâle de procréer lui-même ! Par contre la théorie du genre en politique est évidente : on ne naît pas fasciste, on le devient, on ne naît pas trotskien, on le devient.
[15] © 2010 AFP - (2) © Indymedia

[16] Tous ces éléments ont été repiqué sur le blog d’Annie Leclerc.
[17] LE MONDE | 26.04.2010  Par Pierre Jaxel-Truer et Elise Vincent.

[18] Cf. Les années terribles (1926-1945) de Michel Roger , ed ni patrie ni frontières, page 195 et suivantes.
[19] « Heil De Gaulle, histoire bréve et oubliée du stalinisme en France de Goulemot et Lisky (ed la librairie Vuibert 2011), et voir mon interview sur ce blog concernant le terrorisme stalinien du colonel Fabien.

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