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mardi 4 avril 2023

Me Too féminisme au service de l'injustice bourgeoise

Rosa Luxemburg

"Chacun sait que le cœur du propos de Me Too et de Time's Up1 est essentiel et réel et que nous devons nous en préoccuper davantage mais il y a un manque de crédibilité qui vide le cœur du problème l'hypocrisie" des porte-parole de ces mouvements ». Sean Penn


LE RIDICULE COMBAT FEMINOPHILE contre la domination occidentale-blanche-hétéro-patriarcal

Les diverses associations féministes avec dénomination punchy à l'heure hashtag de l'humanité font de la dénonciation publique, juridique et en meute2 du « mâle criminel », « à l'intérieur du capitalisme », le must du combat pour une présumée libération des femmes de la violence des hommes, en en gros ce combat apolitique serait le numéro 1 de la société moderne qui devrait nous mobiliser incessamment, à condition que la catégorie homme plus ou moins passive, mais aussi fautive, reste en retrait. Avec comme pire illusion et compromission de faire croire que LA JUSTICE BOURGEOISE, corrompue et avide de fric, POURRAIT DEFENDRE ET SAUVER LES FEMMES !

A la suite de l'affaire Weinstein - ce producteur de cinéma américain, pervers accusé puis condamné pour viols et diverses agressions sexuelles sur des femmes - a émergé en quelques semaines ce qu'un anthropologue a décrit comme un « mouvement social féminin du XXIe siècle, qui sait user des outils technologiques de l’époque pour faire apparaître un point de vue non pris en compte à la mesure de sa réalité massive et tragique ».

Mensonge de première ! On n'avait pas attendu les cris d'orfraie des milieux peu nets du cinéma pour savoir que des millions de femmes sont l'objet depuis toujours de persécutions et de violences, que le problème reste dans l'ensemble insoluble, malgré une juridiction de classe bourgeoise qui se veut moraliste et punitive, avec cette nouveauté inventée par la charia féministe désormais de croire automatiquement...ce que dit la victime.

Ces néo-féministes semblent croire qu’elles ont tout inventé. À les entendre, #MeToo a été l’an I du féminisme: la «première remise en cause sérieuse du patriarcat». Tout cela en oubliant, par exemple, que ce sont les féministes des années 1970 qui ont milité pour la criminalisation du viol. Ce fantasme de Tabula rasa explique le caractère indigent de leurs discours, et leur violence en roue libre: une «Révolution culturelle», revendiquée. On sait ce que cela signifie (mais elles, non, visiblement): l’élimination de ceux que l’on décrète être des ennemis politiques, à dénoncer, châtier, rééduquer.

Voilà des consoeurs à l'envers des gardiens de la révolution nazislamique en Iran. Les statistiques depuis des années n'ont pas eu besoin des sunlights des vedettes américaines. Les statistiques parlent d'elles-mêmes. En France, chaque année des milliers de plaintes sont déposées pour coups et blessures volontaires, et aussi pour violences sexuelles diverses. D'autres statistiques sont elles bien connues : en 2022, il y a eu 121 féminicides en France, et 27 depuis le début de l'année 2023, selon le collectif féministe Noustoutes .

Sans oublier qu'avec des statistiques on peut tout faire sauf augmenter les salaires ou empêcher les meurtres. Heureusement la «déconstruction» des hommes avance en Espagne avec la série Machos Alpha, sur Netflix. Le gouverne-ment français si soucieux d'obliger des millions à se taper deux années supplémentaire d'exploitation salariée a promis des mesures efficaces. Il y a toujours eu depuis des décennies des femmes déménagées et plaquées par les services de police pour éviter qu'elles soient tuées par leurs maris tarés (j'en ai été témoin) mais aujourd'hui s'est devenu tellement exponentiel que même les bourgeoises s'en émeuvent. Le gouverne-ment avait, en mars dernier, dévoilé un plan pour l'égalité hommes - femmes et contre les violences, crédité d'un budget de 420 millions d'euros. Un projet de loi de lutte contre les violences sexuelles et sexistes -instaurant un délit d'outrage sexiste- a été adopté cet été, mais avait suscité la déception des associations mobilisées, par rapport aux intentions initiales affichées. Le délit d'outrage sexiste c'est comme la suppression du mot race dans la constitution, c'est une insulte à l'illettrisme.

Le gouverne-ment a, au début du mois, annoncé une série de mesures: campagne de télévision, subvention supplémentaire au 3919, instauration d'une plate forme de signalement en ligne des violences sexistes et sexuelles, pour faciliter les plaintes, outil de géolocalisation des places d'hébergement d'urgence et mise en place de "contrats locaux contre les violences" (partage territorial d'informations entre professionnels et associations), interdiction à la vente de jouets genrés3 . Entre temps ces mesures ont été effacées par les violences policières contre les manifestants un peu partout en France (ou il semble que l'égalité hommes-femmes ait été respectée pour les coups de matraques) ; on ne sait pas si les CRS ont été crédités de 420 millions d'euros, avec des contrats locaux contre les violences.

LE FEMINISME A L'AVANT-GARDE DE LA DECOMPOSITION CAPITALISTE

Pour #MeToo, le fait que les victimes, exhibées au premier plan soient bien plus célèbres auprès du grand public que les accusés a joué un rôle indéniable dans la propulsion de cette nouvelle idéologie dominante. En réalité quel impact sur la réalité du fléau ? La rapidité à laquelle les protestations en ligne se sont organisées après le tohu-bohu de MeToo, est aussitôt retombée parce que malgré les tonitruantes et menaçantes déclarations des politiciennes de la gauche bobo il y a autant de meurtres de femmes, et leur sort n'en reste traité qu'au niveau fait divers. Et cette engeance de passer à l'ordre du jour tout aussi hypocritement. Puis épisodiquement, la leçon de morale wokiste et féministe ressurgit, on fait même croire que ce souci de délation des affreux hominidés serait partie prenante de la lutte sociale, comme l'ont prétendu des cheftaines de la gauche bobo au cours des manifs contre l'attaque sur les retraites. Sans se placer sur le plan de la division avant tout parmi les couches opprimées, la classe ouvrière, Sean Penn disait une autre vérité en septembre 2018 sur la chaîne NBC : "La tournure prise par ce mouvement, c'est la division entre les hommes et les femmes (...) Je suis très suspicieux vis-à-vis d'un mouvement sur lequel tout le monde se jette, sans aucune nuance. Et même lorsqu'on cherche à en parler de manière nuancée, ces nuances elles-mêmes sont critiquées".

A toutes les époques on a connu des chasses aux sorcières, et maintenant ce sont donc des sorcières en chasse de bouc-émissaires « mâles », nouvelle dramaturgie wokiste du bien féministe contre le mâle !

Le Figaro vient confirmer que le sexisme ne recule pas dans la société française. Malgré la sensibilisation qu'a provoquée le mouvement Me Too, malgré «des avancées incontestables en matière de droits des femmes», le sexisme perdure en France, notamment avec des «réflexes masculinistes» chez les jeunes hommes. La situation est «alarmante», déplore dans un rapport rendu lundi 23 janvier le Haut Conseil à l'Égalité. Celui-ci s'appuie sur un sondage mené par l'institut ViaVoice, auprès de 2.500 personnes. Pourtant, comme Sean Penn, j'ai plutôt tendance à voir une féminisation de la société, sans que les hommes ne portent encore des escarpins comme Tony Curtis dans le film « Certains l'aiment chaud » ; quoique l'employé de la RATP au guichet me rende la monnaie avec ses ongles peints. Sans doute un trans à qui je n'ai pas osé dire monsieur. Ce qui n'empêche que MeToo a fait des petits. #MeTooLesbien, le mouvement dénonce les violences entre femmes. Dans le milieu BDSM qui revendique une culture du “safe word” et du respect, des témoignages d’abus interrogent aussi les pratiques. Les hashtag Me Gros, Me Laid, Me vieux, Me Noir, Me Dentiste... vont-ils se multiplier ? La « libération de la parole » va-t-elle devenir une vraie cacophonie...sociétale ?4 Apolitique et aussi puante que la notion de justice avec ses corbeaux profiteurs ?

L'idéologie féministe dominante, qui sert de credo au capitalisme décadent, est un sacré panier de crabes irrationnel, maccarthiste, frauduleux et vulgairement autoritariste5 ;

« Derrière l’unité de façade qu’avait provoquée la révolution #Me Too, les divisions du néoféminisme éclatent au grand jour. Deux concernent le fond: le rapport à la question trans et le rapport au voile. Sur ces sujets, on assiste à l’explosion du paradigme central du néoféminisme: l’intersectionnalité. L’intersectionnalité postule une convergence des luttes entre LGBT, femmes et minorités «racisées» contre le mâle blanc hétérosexuel occidental.

L’alliance entre féministes et LGBT, centrale dans les années 1970, bute désormais sur la question transgenre, certaines féministes restant attachées au fondement biologique de la différence des sexes. Elles dénoncent le fait qu’on puisse désormais définir ce qu’est une femme par le simple ressenti. La créatrice d’Harry Potter, J.K. Rowling, victime d’une cabale ultra-violente au Royaume-Uni pour avoir dit qu’il existait une différence des sexes biologique, en a fait les frais.

L’alliance entre la minorité musulmane et les féministes se heurte quant à elle à la question du foulard. Comment être féministe et défendre le port d’un objet d’oppression patriarcale? Comment se battre à la fois pour les jeunes Iraniennes qui brûlent leurs tchadors et les tiktokeuses françaises qui expliquent comment contourner l’interdiction du voile à l’école? Les tenantes de l’universalisme républicain se fâchent avec les néoféministes identitaires et postcoloniales.

Dans le sillage du mouvement #MeToo, certaines féministes exigent désormais que la parole des femmes soit crue a priori, et, face aux défaillances de l’institution judiciaire à traiter le phénomène des violences sexuelles, veulent y substituer le tribunal médiatique ou des outils de justice privée. Déjà dans une tribune publiée dans Le Monde en 2018, un collectif de 100 femmes, parmi lesquelles l’actrice Catherine Deneuve dénonçait une «vague purificatoire» qui «ne sembl(ait) connaître aucune limite». Julien Bayou en a été la victime. Le responsable d’EELV persiste à y voir non pas un «excès» du féminisme mais un «dévoiement». Il pose là une question intéressante. Où se situe la rupture entre féminisme et néoféminisme? Quand est-ce que les choses ont commencé à dérailler? ».6

La croisade contre le « male chauvinisme » est en tout cas une juteuse affaire, comme le révèle un article de Charlie Hebdo : LE BUSINESS DE LA DEFENSE DES FEMMES BATTUES par Laure Daussy (Charlie n°1600)

« La médiatisation des violences faites aux femmes a fait apparaître sur le devant de la scène des avocates devenues des « stars » dans ce domaine. Mais plusieurs de leurs clientes réalisent aujourd'hui que leur vulnérabilité aurait été exploitée financièrement, avec des honoraires très élevés. Nous avons recueilli le témoignage de victimes qui se sont ruinées, dépensant plus de 70.000 euros en frais d'avocat. Ce qui, au passage, bat en brèche l'idée que ces personnes porteraient plainte pour de l'argent. Elles dénoncent des procès ratés, des dossiers bâclés. La relation d'une victime à son avocat est un sujet dont on parle peu, qui s'ajoute aux problèmes d'une machine judiciaire souvent défaillante pour prendre en compte les violences conjugales.

« Si Laura en est arrivée à de telles sommes, c'est que Me Tomasini pratique des honoraires élevés : 500 euros TTC de l'heure. Ce qui fait que, pour une seule audience, les victimes doivent envoyer une provision de 4000 euros. (…) même les notes de taxi et d'hôtel de l'avocate doivent être payées par Laura ». Cet autre, pour une demande pour sortir de prison de son compagnon à Noël, reçoit un mail pour une audience sous 5 jours mais à condition de verser 3500 euros. Alizé victime de violences conjugales d'un conjoint gendarme se voit demander 6000 euros pour le juge des affaires familiales. Me Tomasini débarque aux assises avec un sac Hermès, à côté de femmes qui ont vendu leur voiture pour payer ses honoraires. Enfin soutenir des femmes battues sans gros moyens financiers c'est mal vu par le profession, ce n'est pas prestigieux, c'est une position traditionnellement moins valorisée par la profession ».

LE FEMINISME N'EST NI UNE TRADITION DANS LE PROLETARIAT NI UNE DEUXIEME VOIE POUR SA LIBERATION SOCIALE

On ne va pas épiloguer ici sur les suffragettes d'antan – vu ce qu'es devenu le droit de vote - ni sur le culte outrancier de la mère Beauvoir, grande prêtresse de l' "engagement" pour radio Vichy puis Moscou, romancière indigeste et vedette mondiale pour sa phrase stupide « on ne naît pas femme, on le devient ». Vente à la criée, ridicule, de La cause du peuple, torchon maoïste en 1968.

Cette prétendue initiation intellectuelle à la « libération » (surtout sexuelle) de la femme a fait partie des nouveaux jouets idéologiques dans la période réactionnaire de la dite Libération. Ces messieurs-dames les intellectuels de Saint-Germain des prés batifolaient en littérature pendant que les milliers de femmes au milieu des hommes pointaient à l'usine, sans oser, certes encore demander une éventuelle égalité de salaires, qui n'existe même pas chez les hommes. Les questions de Mme Beauvoir relevaient, et relèvent toujours de l'oeuf et de la poule, dont on se fiche de qui précède l'autre. Le seul livre qui m'a intéressé d'elle n'est ni le deuxième ni le troisième sexe, mais l'étude qu'elle a menée dans un hospice à Nanterre, « La vieillesse ». Pour le reste son apport comparé à celui, mettons, de Rosa Luxemburg, est que dalle7 ! On n'allait pas célébrer dans les années 1940 la principale tête du prolétariat allemand, mais les petits intellectuels jouisseurs du quartier latin et leurs hobbies idéologiques : et aussi quand la prof Beauvoir servait de rabatteuse pour le nain Sartre de ses lycéennes.

FACE A LA GUERRE LE FEMINISME REVELE SA NATURE BOURGEOISE

Le moment de vérité qui montre le contexte et la raison de la bataille de la gauche de la Deuxième Internationale contre le féminisme est survenu avec la Première Grande Guerre mondiale. Les suffragettes demandèrent alors aux gouvernements bourgeois d’incorporer les femmes dans l’effort de guerre et le carnage guerrier et elles ont activement collaboré au recrutement de soldats en faveur de la boucherie de 1914-1918. En récompense, en 1918, le gouvernement britannique a accordé le droit de vote aux 8 millions de femmes des familles aisées, encore loin du suffrage universel. C’est ce que la presse célèbre aujourd’hui comme « la conquête du vote des femmes » en oubliant de dire qu’il n’y en avait peu qui avaient obtenu ce droit à l'époque.

En 1966, John Peter Nettl écrira, dans la monumentale biographie qu’il consacrera à Rosa Luxemburg, qu’elle ne « s’intéressait pas aux luttes pour les droits de la femme, contrairement à son amie Clara Zetkin ». L’historien et sociologue Yvon Bourdet abondera dans son sens, avec l’étude « Rosa Luxemburg et le marxisme anti-autoritaire », affirmant que l’on irait bien vite en besogne en enrégimentant Luxemburg dans le combat féministe. Pour quels motifs ? Elle ne jurait que par la révolution, n’hésitait pas à glorifier la virilité, à railler les « bonnes femmes » cloîtrées chez elles et à donner libre cours à leur coquetterie comme à leur profond désir de maternité… En cela elle reste très moderne, plus que ces féministes lesbiennes qui veulent procréer en semble. Roas était déjà au-dessus de ces midinettes de la bobologie : pourquoi une femme serait-elle destinée à faire automatiquement des enfants ? Rosa Luxemburg qui a toujours évité, dans son parti, les « questions féminines » dont on voulait la charger. « Je suis économiste », protestait-elle.

Comme les luttes nationales, le féminisme lui paraissait à ce stade potentiellement diviseur. Si elle défendait tout de même le suffrage féminin, elle l'acceptait d’abord comme un facteur d’unification politique de tous les travailleurs mais se méfiait des illusions qui en découlaient, cette idée d'un choix libre personnel dans « l'isoloir ».

DES TENTATIVES POUR RECUPERER ROSA DANS L'IDEOLOGIE FEMINISTE

Plusieurs intellectuelles bourgeoises s'y sont essayées, tout en déplorant qu'elle ne leur facilite pas la tâche. Ainsi Christine Delphy, commentant l'ouvrage étrange de Claudie Weill « Rosa Luxemburg ombre et lumière » ; Weill ne comprend rien à la nouveauté et spécificité des Conseils et ne voit pas que les femmes ne sont pas encore pénétrées de l'identité ouvrière (on vient de les embrigader massivement à cause des besoins de guerre), puis elle oppose deux humanités à la manière féministe petite bourgeoise :

« L’autre aspect est celui de l’expérimentation balbutiante du système des conseils […]. » Les femmes en sont quasiment absentes, leur présence est un « saupoudrage ». On peut invoquer l’origine militaire des conseils – ce sont les soldats qui les initient – ainsi que le rôle prépondérant des partis ; les femmes ne sont que faiblement représentées dans les organisations ouvrières, et certainement pas au prorata de leur importance dans les usines. Pourquoi a-t-on cet étrange sentiment de « déjà vu » ? Sauf que le « déjà vu » se situe non pas avant, mais après. Ce sentiment de « déjà vu », c’est la confirmation que « plus ça change, plus c’est la même chose ». La République allemande, à peine proclamée, rétablit les législations « protectrices » des femmes, puis les exclut tout bonnement de l’industrie, puisque les hommes revenus du front ont besoin des emplois. Pourtant, les femmes ont été massivement présentes dans les révoltes de la faim pendant la guerre, dans les grèves de 1918, dans les combats de rue de 1919 à Berlin, contribuant à défendre les éphémères républiques des conseils. En dépit de leur rôle dans les événements révolutionnaires, « Clara Zetkin […] contribue à organiser la grève générale au Wurtemberg au printemps 1919 », le nombre de femmes au premier congrès des conseils est infime. Luxemburg ne veut pas militer elle-même, « son aspiration à l’universalité [faisant] obstacle à une spécialisation dans les revendications spécifiques ».

 « C’est sans doute là que les féministes (?) sont en droit de se demander comment et pourquoi le sort d’une moitié de l’humanité est vu comme universel, et le sort de l’autre moitié comme « spécifique », comment l’image de l’ouvrier qui porte des culottes en arrive à effacer celle de l’ouvrière. En tous les cas, c’est ainsi : Luxemburg pense qu’il faut faire de la propagande pour le socialisme parmi les femmes, mais se repose pour cette tâche sur Clara Zetkin. Et dans le projet de conseils qu’elle élabore en 1918, les femmes ne sont pas présentes sinon en tant qu’électrices. L’une de leurs cadettes, élabore des projets de « conseils de femmes », conseils qui ne verront pas le jour. Ainsi, ce n’est pas en raison de son féminisme que Luxemburg est devenue une icône pour les féministes allemandes (moins cependant que Clara Zetkin), mais comme « pôle d’identification des femmes ouvrières […] en raison de son opposition à la guerre […] elle acquiert toute son importance de grande figure féminine », comme résume Weill dans le dernier article, où elle compare le destin de Luxemburg avec celui de Flora Tristan et d’Anna Kuliscioff »8.

La philosophe libérale hippie Raya Dunayevskaya — auteure, en 1982, de l’essai Rosa Luxemburg, Women’s Liberation, and Marx’s Philosophy of Revolution — prétendra mettre en évidence l’« étroite collaboration » qui unissait Luxemburg et Zetkin, et évoquant stupidement la « dimension féministe » de sa pensée alors que pour Rosa le socialisme et le féminisme étaient deux « compartiments séparés ». Zetkin n'a jamais été considérée comme une lumière politique, et ces intellectuelles historiennes traficantes biaisent avec la vérité. Zetkin est partout encensée comme une figure du proue du féminisme, pour son rôle d'organisatrice de plusieurs congrès, en fait elle n'a pas la hauteur de vue de Rosa, manque de confiance en elle et a peur de tomber...dans le féminisme »9.

La gauche de la Deuxième Internationale, avec Rosa Luxemburg, avait été opposée à l'idée d'un Front uni des femmes des deux classes antagonistes. Les féministes souhaitent des réformes, comme nos néo-féministes actuelles croient pouvoir « réformer la violence » (la punir dans l'absolu et l'abstrait) violence faite aux femmes (quand ce sont le plus souvent les plus paupérisées qui sont victimes) quand nous, aujourd'hui comme hier, nous voulons la révolution sociale et politique.

 Au Congrès de la IIe Internationale à Stuttgart, la gauche avec Rosa avait mené la lutte non pas contre « le patriarcat mâle occidental » mais contre des groupes féministes de certains partis comme le Parti de Belgique, qui avait adopté à son congrès une motion pour soutenir l’extension du suffrage aux femmes des classes supérieures.

 La bataille idéologique devient de plus en plus intense au fil des années. Rosa Luxemburg dans sa correspondance parle de l’aspect « moral et spiritualiste » des féministes et des invocations qu’elles font en faveur « du rejet du rôle attribué à la femme » quand il était en fait question pour les féministes d’égalité entre les hommes et les femmes des couches supérieures pour accéder au pouvoir.

 Pour Rosa Luxembourg, il est évident que « la femme » n’est pas un sujet historique au-dessus ou en dehors des classes sociales, comme est fallacieuse la réclamation d’un prétendu « droit des femmes » qui serait bénéfique indistinctement aux femmes des deux principales classes sociales, comme si le système présent pouvait vraiment réduire injustices, inégalités et humiliations pas seulement entre femmes et hommes mais des hommes entre eux.

Le néo-féminisme wokiste actuel est non seulement indigent politiquement mais inutile pour la défense de la femme en général, laquelle se retrouve toujours, même si elle est bourgeoise, seule, humiliée par ses agresseurs et la justice bourgeoise. Moi aussi, le jeu miteux de Me Too et ses avocates, me fait pitié.



NOTES


1Mouvement féministe créé en 2018 contre le harcèlement sexuel par des vedettes d'Hollywood, en France fut créé aussi balancetonporc à la suite de Me Too, les modes wokistes et bobo-féministes provenant en général tout droit depuis les Etats-Unis.

2Il me faut ici citer toute la déclaration de Sean Pennn, avec laquelle je suis complètement d'accord : "Personne n'a le droit d'agir de cette façon, en meute. La plupart, et je ne dis pas toutes car il y a des exceptions, mais la plupart des actrices célèbres qui ont sauté dessus (sauté sur l'occasion de dénoncer les violences faites aux femmes, NDLR) n'avaient jamais rien dit sur le fait que nos impôts servent à bombarder des enfants au Yemen, elles n'avaient jamais rien dit pendant des années. Mais là, il y avait l'occasion de se jeter en meute et aussi des gens à détruire. Certaines de ces personnes méritaient d'être détruites, car personne n'a le droit de nuire à une femme de cette façon ni d'abuser de son pouvoir. Mais personne n'a le droit non plus, qu'il s'agisse d'un homme, d'une femme, d'un enfant, blanc ou noir peu importe, d'agir de cette façon en meute sans remettre en question ni reconnaître ses propres actions."

3Pour changer les mentalités, le HCE '(Haut Conseil pour l'égalité homme femme)recommande d'interdire la publicité pour les jouets genrés et de conditionner le versement d'argent public à une contrepartie en termes d'égalité, par exemple en termes de formation, pour les entreprises. Toutefois, les Français accordent globalement plus de confiance dans les médecins et associations spécialisées, qu'envers le gouvernement et ses flics pour prévenir et lutter contre le sexisme. Et le chemin est encore long, dans un pays où 15% de la population «ne voit pas très bien ce qu'est ''Me Too''», et que 14% n'en ont même jamais entendu parler.

4Sean Penn dit mieux : « cannibalisme sociétal ».

5L’art n'échappe pas à ce maccarthisme féministe sous «female gaze» («regard féminin»), pour reprendre leur rhétorique, qui envisage toute production artistique à travers la grille de «l’oppression de genre», dans le but d’en finir avec la «culture du viol» (avec Ronsard par exemple, et tant d’autres) et de promouvoir un «art féministe». On corrige Agatha Christie et tous les grands auteurs qui ont tenu des écrits sexistes...Cela selon des critères analogues à ceux édictés par Jdanov pour établir les règles impératives du «réalisme socialiste». Un «art» au service de la Cause, un outil de rééducation idéologique qui bannit toute plongée dans la complexité humaine. Cela donne des œuvres d’une platitude absolue, et surtout fausses, car elles échouent à «dresser un portrait de l’humanité avec tous ses particularismes», pour utiliser les mots de Philip Roth définissant la tâche du romancier (cela vaut évidemment pour le cinéma).

6Eugénie Bastié: «Genre, voile, méthodes... Cinq ans après #MeToo, la grande fracture du féminisme» (lefigaro.fr) On peut lire aussi ce qu'elle ajoute : «Le privé est politique», d’abord. Ce slogan féministe des années 1970 est devenu un programme: la politique de l’intime qui consiste à faire entrer l’État et l’opinion publique dans la sphère familiale et privée. À cet égard aussi bien le communiqué auto-accusatoire publié par Adrien Quatennens sur les réseaux sociaux faisant l’inventaire de ses fautes comme un catholique au confessionnal que le déballage effectué par Sandrine Rousseau sur le divorce conflictuel de Julien Bayou mettent mal à l’aise. Nous commettons tous des choses répréhensibles dans le secret de nos foyers, notre vie intime est traversée par des conflits et si nous nous mettions à les avouer publiquement, jusqu’où cela irait-il?

«Le néoféminisme de #MeToo n’est pas émancipateur: il est éradicateur» (lefigaro.fr)

7Au début des années 1970, dans le milieu politique loin de la contestation gauchiste on aimait bien les jeux de mots comme Althusser = Al tu sers à rien. Pour Beauvoir c'était Si conne du Bavoir, en particulier de la part de la Revue Actuel et de Patrick Rambaud avec qui j'entretenais  une correspondance.

9J'ai toujours entendu Marc Chirik dire : « Zetkine était une connasse », elle a d'ailleurs finie girouette de Staline.

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