PAGES PROLETARIENNES

samedi 27 octobre 2018

Prospective, Identité nationale et perspective communiste


«  D'autant plus qu'après la banqueroute des partis bourgeois, de nouvelles forces telles que l'intelligentsia bourgeoise et la petite bourgeoisie cherchent refuge dans le mouvement ouvrier et tentent de lui imposer diverses revendications sincères mais irréalistes, étrangères aux intérêts de classe du prolétariat. Si les partis socialistes n'azvaient pas de critère objectif our mesurer ce qui correspond aux intérêts de classe du prolétariat mais se laissaient guider uniquement par ce que certains estiment bon ou utile pour les ouvriers, le programme des socialistes serait un ramassis bigarré de desiderata subjectifs et parfois complètement utopiques ».
Rosa Luxemburg (La question nationale et l'autonomie, 1908)
«La conquête de la Lune ou la conquête de l'automobile; l'héroïsme de Gagarine ou l'héroïsme de Jean-Paul Belmondo, c'est la même chose. Pourvu qu'il y ait une conquête, pourvu qu'il y ait un héroïsme. Pourvu que ça se voit à la télé.»
Amadeo Bordiga ( «Dédié à un milliard de télé-imbéciles», Il programma communista, n° 15 (1963), dans (Dis)continuité, n° 2, (Dis)continuité, 1998, p. 123. )


«Ni les missiles, ni les fusées, ni les spoutniks ne feront de l'homme le “conquistador” de l'espace. Ces moyens-là ne relèvent que de la fantasmagorie des savants d'aujourd'hui qui sont toujours animés de l'esprit romantique et sentimental qui était celui du dix-neuvième siècle. L'homme ne parviendra à prendre possession de l'espace qu'à travers les forces terrifiantes, quoiqu'empreintes de paix, de la sensibilité. Il ne pourra conquérir l'espace – ce qui est certainement son plus cher désir – qu'après avoir réalisé l'imprégnation de l'espace par sa propre sensibilité.»Yves Klein, «Attendu que», Hôtel Chelsea, New York, 19611.




BILAN DES PEURS ACTUELLES


C'est par hasard, en fouillant à la librairie Boulinier face à la cité U que je suis tombé sur « L'an 2000, une anti-histoire de la fin du monde » présenté par André-Clément Decouflé. Cet auteur n'est pas n'importe qui ; non seulement il fût le principal concepteur en France de la prospective comme pseudo-science dans les années 1970, mais il sut s'en démarquer. Contrairement à ce brave Attali et au futurologue Herman Kahn qui, lui, persista à prédire la guerre nucléaire (pour avant l'an 2000) tout en continuant à collaborer au sein de l'armée US, Decouflé, estimant qu'il s'était trompé sur l'an 2000, voua la poursuite de son œuvre à de pertinentes analyses sur les avanies de l'exploitation salariée2. La prospective se démarquait de la prévision en cherchant à déceler les faits porteurs d'avenir qui annoncent des discontinuités. Elle tentait d'aborder des prévisions dans tous les domaines de l'ordre social, en particulier celles relevant du fantasme, et en particulier à la suite de Nostradamus, cet aventurier du 16ème siècle dont les prévisions, dites procédés divinatoires, combinent évidences et obscurités (comme la bible ou le coran d'ailleurs) est le référent de toutes les farces astrologiques avec sa marmelade de prédictions fantaisistes, mais même dans la pire des prophéties n'y a-t-il pas toujours un soupçon de vérité et toujours dans le détail accessoire cette petite précision qui fait véridique, et l'astuce de la répétition des mêmes situations impressionnantes inventées ou calquées sur les holocaustes du passé ? Un psy et un politicien vous le confirmeront.


Ce n'est un secret pour aucun citoyen que nombre de nos politiciens vont de temps à autre consulter médium ou chiromancienne, Mitterrand était preneur. Les bourgeois sont superstitieux en général, culpabilité enfouie ? Doutes sur la pérennité de leur domination ? Les mordus et médiums de Nostradamus, carabin bouffon d'une époque remplie d'obscurs charlatans, l'ont souvent crédité de cette omniscience de l'avenir – selon les interprétations fantaisistes des uns et des autres - une prédiction de nombreux événements dans l'histoire mondiale, incluant la Révolution française, l'apparition de Napoléon Bonaparte, la pagaille bolchevique, la bombe atomique, la prise de pouvoir d'Adolf Hitler, les Attentats du 11 septembre sur le World Trade Center. Ces braves prédicateurs, souvent en lisière des extrêmes droites, font régulièrement des réclamations semblables quant à chaque nouvelle crise mondiale comme il vient comme il y a une tendance de prétendre que "Nostradamus a prévu ce qui vient d'arriver.", comme pour conjurer chaos ou improbable nouvelle révolution prolétarienne mondiale. Cette obsession pour prédire ou anticiper à tout prix l'avenir de la société mondiale, assez ésotérique, carcactérise les fanges d'extrême droite de la bourgeoisie, limite féodales... encore inspirées par les fables du courant illuministe du 18 e siècle. C'est dans cette fange où le national-socialisme avait d'ailleurs mariné initialement, avec cet état d'esprit  fumeux des brutes des "corps francs", dans un no man's land entre politique et
LA ROUE SOLAIRE, soleil noir nazi
ésotérisme, où l'irrationnel coudoyait le plus sordide impérialisme. Au début de la
Deuxième Guerre mondiale, des prospectus avec des quatrains de Nostradamus (trafiqués et actualisés pour un but politique précis), prévoyant la défaite de la France, ont été lancés par des avions allemands sur les futurs champs de bataille terrestre. Il semble que cette opération ait été montée par le très mystique Rudolf Hess3 et que même Adolf Hitler croyait à ces quatrains de Nostradamus. Ultérieurement les Alliés ont également parachuté des quatrains de Nostradamus mais en leur faveur.

Decouflé, dans sa compil de prédictions nous en livre une assez saisissante pour notre actualité à propos d'une « inquiétante obsession », mais ne nous indique pas la date de rédaction ni le nom de l'auteur qui a parodié le charlatan carabin il y a cinquante ans. Sous l'intertitre, page 153 - « L'obsession des barbares » - Decouflé introduit ceci : « Tel autre croit pouvoir tirer de Nostradamus – toujours lui ! - des prédictions plus explicites encore et qui, pour n'être pas sans offrir des nuances d'interprétation avec les précédentes, n'en constituent pas moins un discours d'une inquiétante obsession » :
« Tous ceux d'Afrique du Nord feront prisonnier le roi du Maroc (fort probablement parce que celui-ci refusera l'entrée en guerre contre l'Europe), ceci vers l'an 1971. Venant de pays arabes, de loi mahométique, un chef puissant viendra envahir l'Espagne et l'Italie avec sa flotte. L'attitude des Arabes étonnera, ils s'en prendront à un pays plus fort qu'eux (« ancien parent », soit qui les avait aidés), mais ce grand pays par l'invasion de l'Allemagne révélera la véritable signification de l'attitude des Arabes. Selon toute vraisemblance, tactique secrète entre pays de l'Est et Arabes, un peu à la manière d'Hitler et de Staline pour la Pologne qu'ils se partagèrent.
De l'Orient viendra le conflit, aidé par une flotte venant de Libye, l'Italie sera frappée, assaillie. Les Iles dans ce secteur et pays riverains seront en fâcheux troubles.
L'Oriental envahira les pays voisins de la France en passant par les monts Appenins. Dans le ciel et sur mer auront lieu les principaux combats, personne ne sera épargné quel qu'en soit le lieu.
Par suite des erreurs et de la négligence de la France, le passage à la secte de Mahomet (Arabes) sera ouvert. Comme conséquence de ce qui aurait pu être évité la terre sera couverte de sang, ainsi que la mer . Le port de Marseille sera ceinturé par une flotte importante.
Assaut farouche en Chypre, de Byzance (Asie Mineure) viendra une grande flotte. Les deux de doctrines différentes (Arabes et pays d'où le soleil se lève), entre autres, , seront en lutte pour cette invasion méditerranéenne.
Celui qui, d'Afrique du Nord, de culture élevée, viendra tout enflammer pour imposer sa puissance, il prescrira le français comme langage.
La France aura à apporter son aide dans la lutte sur plusieurs points à la fois. L'Italie et l'Espagne seront victimes de cette invasion.
Les Arabes lors de l'envahissement de l'Espagne seront aidés par une trahison de quelqu'un de Cordoue (Espagne). Habitants de Toulouse, méfiez-vous de l'envahisseur venant du Sud, votre sacrifice serait inutile et vous subiriez les pires sévices.
L'Eglise, les temples et leurs représentants seront expoliés. Les mères pour pouvoir élever leurs enfants seront obligées de vendre jusqu'à leur chemise (grande misère). Les Polons (pays de l'Est) seront avec les Arabes alliés pendant ce conflit.
L'Empire du Croissant occupera l'Italie, il sera dirigé par un chef qui contrefera le sage pour mieux parvenir à ses fins. La secte des musulmans cachera de pointus poignards sous des paroles prometteuses. Elle occupera certaines villes et lieux avec l'aide de quelques uns sans scrupules.
Londres tombera et son Roi (ou gouvernement) enfermé après avoir été vu essayant de fuir. Le port sera fermé à la navigation pour éviter une invasion possible.
De l'Italie occupée par les Arabes (sauf une partie du Nord par les pays de l'Est) certains se réjouiront de cette victore et notamment ceux-ci, mais la plupart penseront différemment et organiseront la lutte (…). L'Angleterre par sa tardive entrée en guerre aura à subir beaucoup de pertes, ceci dans le sang des Anglais, Arabes et Français. Cela lui nuira plus que ses manœuvres cachées pour rester la plus forte. Le feu du ciel (bombardement) s'abattra sur les combattants et fera fuir certains. On réclamera de la France son aide.
Les ordres viendront de Fez à ceux de l'Europe, occupés par eux ils auront leurs cités envahies de toute part, avec partout de durs combats. Le chef de l'Asie, de son côté avec une très grande troupe par mer et par terre entrera en lutte ; beaucoup de morts, y compris les religieux qui seront pourchassés avec haine.
Par bombardements et armes terrestres la Grèce sera occupée, beaucoup de tribulations et pertes, les Arabes eux-mêmes auront beaucoup de tués sur mer.
Croisades
Toute la région d'Italie et les îles avoisinantes, dont beaucoup de gens auront été décimés, seront libérés des armées barbares (Arabes). Il y aura une bataille navale victorieuse, à laquelle participeront les Espagnols et les Français dirigés par le grand personnage (Henri Second). Ceux de Ptolon (Arabes) seront obligés de s'avouer battus.
Le tyran cruel, à barbe noire et crépue, subjuguera par son langage la race fière et cruelle des Arabes, et les entraînera dans la guerre. Celui qui sera Henri Second (le dernier descendant du Roi) le battra et libèrera tous les pays qu'il occupait et tenait en son pouvoir. En Provence aura lieu un grand combat, avec des pertes très élevées des deux côtés, l'envahisseur (l'Oriental) sera défait sans rémission. Rhodes demandera du secours, ayant été elle aussi par négligence peu armée, et peu préparée. Les pays de l'Occident lui prêteront assistance, et l'Empire arabe qui l'occupait sera rejeté hors de chez eux. L'Angleterre et pays voisins seront en guerre contre les Arabes et pays de l'Orient, mais par la suite ils repousseront ceux-ci jusqu'au plus profond de leurs forêts.
Quand tous les peuples les plus au nord s'uniront l'Orient sera effrayé, le nouveau Pape soutiendra l'effort commun. Dans les parages méditteranéens la lutte sera très dure et les pertes ennemies élevées. Devant l'union des peuples à lutter, avec les deux unis (France et Espagne), contre ceux de l'Afrique, l'envahisseur arabe sera effrayé et doutera de son destin, et son alliance avec d'autres pays plus à l'Est rompue.
Par deux fois supérieur par deux fois battu par l'Occident, l'Orient faiblira. Après plusieurs grands combats il sera complètement battu, il sera également chassé par mer si cela est nécessaire. Celui qui sera le Roi (chef français) de l'Europe entière viendra aidé par des pays situés plus au nord, conduisant une grande troupe. Ils lutteront contre ceux de Babilon (pays situé de l'autre côté de la Méditerranée. Ce chef arrivera tard, alors qu'une assemblée de quatorze membres aura déjà mis fin à la vieille entreprise créée par Rousseau (l'idéologie de la République). Le grand descendant de roi battra les Arabes qui se seront ruinés dans cette guerre. Ils regretteront, aussi bien dirigeants que dirigés (le peuple), de s'être lancés dans cette aventure.
Jusqu'en 1997 il y aura haine et envie chez les Arabes, même dans la période où ils auront l'apparence pacifique. Il y aura des rappels qui démentiront cet état somnolent de sécurité apparente de leur côté. Conflit barbare (Arabes) en Italie, les Etats voisins en trembleront. Ces sera en cet endroit que les combats seront les plus durs. Le secours viendra par la Lusitanie (Portugal), fort probablement de l'Amérique débarquant au Portugal, Israël obtiendra ce que jamais il ne put auparavant, son intégration dans l'église.
La débâcle définitive des « Arabes » aura lieu vers 1996-1997. Mais une invasion asiatique suivra à peu d'intervalle :
Se dirigeant vers le nord, une énorme masse d'hommes envahira les pays d'Europe, et presque tout l'univers sera occupé par ce peuple (Asiatiques, vers 1997). Grande hécatombe sur leur passage où peu de chose subsistera. En grand regret sera le peuple français, lui qui avait tout en abondance, de par son imprévoyance il connaîtra la famine. Il y aura une hécatombe de meurtres pour des raisons d'épuration du vice. Idées fausses propagées par les meneurs qui feront croire aux soldats envahisseurs, très prudes dans leur pays (Asie) qu'ils combattent le vice de la dépravation en accomplissant des actes barbares (« de tuer les peu vêtues », mode actuelle). Grande afflixion chez les mères, dont certaines se suicideront par désespoir. Pays où il faisait bon vivre (la France), et où l'abondance était agréable, ta ruine approche. Du ciel le pire fondra et réduira à néant tout ce qui était avant (ruine) pour te laisser presque aussi nu tel le rocher.
Bien peu après (pendant la translation de la terre, la phase la plus aiguë en 1999) mais déjà nettement avant, il ne sera que peu d'endroits habitables sur terre. La région de Provence et d'autres lieux verront que la prédiction, malheureusement peu heureuse, se déroulera comme prévu. Anthropophagie entre père et fils (famine extrême) fera que l'on sera obligé de manger les glands et les racines. Le feu du ciel sera mortel et s'étendra partout, beaucoup de victimes, bruits monstres, tout le monde sera atteint. Ni la classe ni l'argent ne protègera de cet état de choses ».
*


N'en déplaise à Nostradamus et à ses recopieurs, la peur des guerres intestines ou invasions
rampantes sous la menace de telle ou telle ethnie a non seulement varié au cours des siècles mais se joue en alternance au XX e et au XXI e siècles : au début des sixties c'étaient le « péril jaune » puis, surtout depuis les 90 les arabes musulmans en général et le terrorisme islamique en particulier, et il y a fort à parier que bientôt l'invasion islamiste sera à son tour débordée par le « péril jaune »... voire un retour du « péril soviétique ». Dans tous les cas il faut reconnaître que le capitalisme est blanchi, pardon multiculturé. Il faut nous pencher maintenant sur le fantasme. La notion de fantasme est un combiné de peur (anxiogène), de frustration sexuelle et d'un imaginaire obsessionnel, mais pas forcément complètement étranger à la réalité.
Et si l'islamisation au lieu d'être une présumée invasion planifiée par quelques fous de dieu planqués sous des chameaux n'était que la réponse (faible et caricaturale) à une exclusion généralisée des pauvres (et ou immigrés), sous de gentilles ovations d'accueils antiracistes, afin qu'ils restent ghettoïsés et ne se sentent aucunement membres du prolétariat ?
Une telle exclusion, reliant les derniers arrivés aux pôles d'exploitation à l’obscurité de « l'arrière » (comme en temps de guerre la « cinquième colonne » de jadis et non pas l'ennemi intérieur bourgeois), détruit la concsience de classe et impose une logique de l’inversion, de l'isolement et du repli musulman. La contre-révolution dominante depuis 19914, conformément aux valeurs du capitalisme multiculturaliste et laxiste, avance à rebours de toute dynamique de classe. Aux pauvres manifs syndicales épisodiques dans le secret des intérêts financiers, elle ajoute le projet d’imposer le retour aux forces de jadis. Cette réaction, qui vient perturber la constante reconstitution du prolétariat comme classe, pourrit la vie politique d’autant plus qu’elle opère à coups de leçons de morale et avec ses tribunaux gauchistes. Le politicien bourgeois, malgré la haine virulente qu’il suscite dans ses discours arrogants, parvient le plus souvent à dissimuler sa véritable identité. La menace d’une réapparition du projet communiste (présumé totalement annihilé) demeure un cauchemar d’une remontée en surface du « cloaque prolétarien » même s'il caricaturé comme émeutes de black blocks ou islamisation rampante. Les arabes, répandus dans les rues de la belle France, se mêleraient à la population pour accélérer la contagion musulmaniaque régressive. L'invasion infâmante non seulement pour la laïcité mais pour « les français » se répandrait comme un virus. Ce n'est pas tout à fait vrai mais pas tout à fait faux En effet à notre époque d'hymen complet entre anarchisme (incluant le gauchisme en général de Mélancon à Poutou) et libéralisme, la doxa universelle bourgeoise s'autocongratule : « au nom d'un pédantisme schématique dénué de tout sens commun et gonflé de bouffonnerie politique » (RL page 183). Bien avant la GCF et le CCI, Rosa identifia les « radicaux » comme nationalistes déguisés, avec cette formule : « phraséologie traditionnelle anarcho-nationaliste » (p.184).

Si les choses étaient simples, comme l'imaginent nos « internationalistes trotskistes », on ne pourrait qu'applaudir à leur suivisme « antiraciste » et à leur généreuse volonté utopique d'accueillir tous les migrants du monde. Ces béni-oui-oui du moralisme « républicain », « démocrate », du « communautarisme national » finalement sont tout (et tous) sauf marxistes. Nous allons le démontrer ici en suivant le raisonnement de notre chère Rosa Luxemburg5. Elle note que Marx constatait déjà que des fragments de groupes nationaux ne sont destinés aujourd'hui qu'à servir de soutien à la contre-révolution « en attendant une révolution ou une guerre mondiale » (p.36). Marx poursuit sur ces « débris d'une nation impitoyablement piétinée, comme dit Hegel, par la marche de l'histoire ». « Nation impitoyablement piétinée » fait penser évidemment à la post-colonisation qui a floué la plupart des pays « libérés » de toute réelle industrialisation et qui restent des nations flouées par les grands impérialismes. En effet on peut oser la comparaison avec cette masse d'immigrants qui reste fidèles non simplement à l'islam mais à leurs pays d'origine conçus, malgré leur hétérogénéité, comme « nation arabe ». Au lieu de se vivre comme travailleurs immigrés, sans patrie, ce qui était dans la logique de leur intégration au prolétariat international dans la première moitié du XX e siècle, cette masse travailleurs corvéables à merci pourtant et surexploitée n'est aucunement une armée en ordre de bataille de conquête mais, excusez du peu, des déchets de peuples... errant. Mais ils ne se contentent pas d'être cela, avec leurs exigences ou « droits » de religiosité, ils réclament (et obtiennent) les faveurs de la bourgeoisie ; c'est l'évidence criante de l'actualité n'en déplaise aux béni-oui-oui gauchistes : il vaut mieux s'appeler Mohammed que Jean, et chaque média possède désormais son quota de races. L'islamiste soft comme hard sont de fait des souteneurs de l'ordre existant. Marx n'y va pas par quatre chemins concernant les écossais, les bretons, les basques et les slaves : « Ces déchets de peuples deviennent chaque fois et restent jusqu'à leur totale extirpation ou dénationalisation les soutiens fanatiques de la contre-révolution, tout comme leur existence est déjà une protestation contre une grande révolution historique ».
Rosa qui n'a pas pu participer au grand débat de l'austro-marxisme sur la nature de la nation (esquissé en 1908 mais surtout développé en 1924)6, convient avec Kautsky que l'identité nationale se définit avant tout comme langue commune7. Elle cite Kaustsky qui esquisse le sort historique des nationalités comme intégration à une langue commune (qui peut toutefois devenir mixte) : « Nous avons vu que la langue est le moyen essentiel de la communication sociale. Dans la mesure où cette communication s'étend avec le développement économique, le nombre de ceux qui parlent la même langue doit également croître. Il en résulte la tendance de certaines nations à l'expansion, à l'absorption d'autres nations qui perdent leur langue et en adoptent une autre, soit celle de la nation majoritaire soit une langue mixte ». Selon Kautsky, ajoute-t-elle, trois grandes communautés de culture de l'humanité se sont constituées conjointement : la chrétienne, l'islamique et la bouddhique : « mais chcun de ces milieux culturels englobe une multitude de langues et de nations. Au sein de chacun d'entre eux, la majeure partie de la culture n'est pas nationale mais internationale. Mais la communication mondiale poursuit son extension... ». Rosa constate une évolution vers une langue unique, si dans l'Antiquité ce furent le grec et le latin, il y a fort à parier que l'anglais deviendra la religion universelle... on évoluera alors vers : « … une complète disparition des langues des petites nations, dans un premier temps ; puis du rassemblement final de toute l'humanité cultivée en une langue et une nationalité comme furent rassemblés dans l'hellénisme les peuples du bassin méditerranéen oriental après l'époque d'Alexandre de Macédoine et comme ceux du bassin méditerranéen occidental se sont fondus plus tard en une nationalité romaine ». Rosa est ravie que Kautsky montre aussi bien, et pour la première fois dans les écrits socialistes, cette tendance historique à l'élimination complète des différences nationales dans « le système socialiste »8 et d'une fusion de l'humanité civilisée en une nation ».
L'image d'une nation mondiale pour caractériser la fin de toutes les frontières nationales n'est pas très heureuse, mais notre Rosa serait probablement très horrifiée de voir partout de nos jours le culte de la nation, de la plus grande à la plus petite, si glorifié de nos jours, servir toujours plus de masque au capitalisme mais aussi au complément ou à la version islamique du capitalisme, car l'islam même prétendant à une culture mondiale reste un nationalisme et un nationalisme conquérant dans la pire tradition belliqueuse9. Rosa ne pensait pas que, dans sa phase de décadence, le capitalisme nous barberait encore en fonctionnant, au niveau idéologique – interdiction de blasphémer, condamnation des Etats qui interdisent le voile intégral, génuflexion devant la principale pompe à finances de cette idéologie à Ryad – comme au Moyen âge10 ; mieux que Nostradamus finalement notre Rosa prévoyait qu'avec ce possible retour en arrière serait abandonnée « le développement du grand capitalisme », ce qui explique pourquoi vous êtes tous muets devant ce nouveau capitalisme financier qui destructure tous vos anciens repères « de classe » !
Il faudrait tout citer, mais Rosa a admirablement décrit déjà et dénoncé l'hypocrisie des droits de l'homme11, des dites libérations nationales, des luttes parcellaires (féminisme, procréation assistée, etc.), de l'antiracisme et du particularisme multiethnique : « Il est significatif que la dernière manifestation de l'esclavage dans la société moderne ait cherché à se maintenir, comme le fait toujours la réaction, sous la bannière du particularisme et que l'abolition de l'esclavage ait été le revers de la médaille représentant la victoire du capitalisme centraliste ».
Elle se moquait de cette culture moderne qui est : « avant tout une culture de classe, bourgeoise et petite bourgeoise »(p.154) quand pour la classe ouvrière : « le savoir, c'est le pouvoir ». C'est pourtant ce « bâtard déshérité » de prolétariat – Rosa est ici la seule à avoir pleinement intégré la notion marxiste de dépossession12 - qui est le principal ardent défenseur du savoir et de l'art (certainement pas des arriérations islamiques) : « .. une affinité particulière entre la lutte prolétarienne et les intérêts de la culture dans son ensemble et engendre le phénomène apparemment contradictoire et paradoxal qui fait du prolétariat conscient d'aujourd'hui dans tous les pays, le porte-parole le plus ardent et le plus idéaliste du savoir et de l'art, de cette même culture bourgeoise dont il est aujourd'hui le bâtard déshérité » (p. 156).

Bon, déjà à l'époque ce n'est pas le prolétariat anonyme qui s'exprimait mais partis socialistes et
syndicats, mais aujourd'hui on se demande bien où est l'expression « ardente et idéaliste » du prolétariat atomisé et assommé par les bagarres d'identité ou de non identité.

Je conclurai à mon tour, toujours dans l'attente du rachat du genre humain par le prolétariat, avec les quatrains n°5 et n°8 de Nostradamus, dont je vous laisse à loisir interpréter d'éventuelles connotations avec la perspective communiste, la vraie, l'indispensable et encore introuvable :


De n'avoir garde seras plus offensé,
Le foible fort, l'inquiet pacifique.
La faim on crye, le peuple est oppressé :
La mer rougit le long fier & inique.


Huit, quinze & cinq quelle desloyauté
Viendra permettre l'explorateur maling :
Feu du ciel, fouldre, peur, frayeur, papauté,
L'occident tremble, trop serre vin Salin.
 






NOTES


1Citations repiquées à cet excellent article sur la prospective appliquée par le capital décadent : http://www.lyber-eclat.net/lyber/aaa/age_dor.html : l'auteur montre à son corps défendant que les situationnistes s'inscrivaient dans les rêveries prospectives cosmogoniques de l'époque, mais avec des concepts empruntés à l'avenir communiste dans la vieille conception « missionnaire » du mouvement ouvrrier. A l'échelle des planètes, quand 50 ans plus tard, l'humanité n'a pas encore décollé de la terre ni mis fin à l'exploitation capitaliste. L'article se fait l'écho de la supercherie du « grand pas pour l'humanité » - revanche face à l'assaut du ciel en spoutnik - qu'aurait constitué l'alunissage... tourné par la NASA dans le désert du Nevada, en l'intégrant indirectement comme une marche vers le contrôle totalitaire d'internet. La conquête de la lune n'aurait eu comme objectif que de faire oublier la sale guerre du Vietnam (et sans doute aussi l'assaut du ciel… communiste), avec le bien connu prétexte : « quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt ».

2On peut consulter ces textes sur les sites spécialisés sur le web. Tel celui-ci : https://travail-emploi.gouv.fr/publications/Revue_Travail-et-Emploi/aut/drs_aut_2_5687.htm

3Ancien membre de la fameuse secte de Thulé, Rudolf Hess reste présenté comme un illuminé par les historiens, et son vol solitaire « mystérieux » pour négocier un accord de paix avec Londres est décrit comme loufoque (il est emprisonné sans autre forme de procès), ce qui permet de masquer la plus probable réalité : une fraction de la bourgeoisie anglaise souhaitait s'allier avec Hitler mais avait été mise en minorité pour l'histoire sainte de l'antifacsisme.. Toute l'histoire de WW2 est à récrire en réalité. Le dilettante Zemmour a lui-même mis à mal la gloriole de De Gaulle : en vérité il n'y avait que deux camps : le parti des yes et celui des ya ; De Gaulle, tel un vulgaire politicien de LREM, voyant qu'il n'était point sur la liste des ministrables de Pétain, s'est vengé en filant rejoindre le camp impérialiste des yes ! Esotérique mon cher Watson !
4Je ne veux pas dire, comme le commun des trotskars les plus orthodoxes envers le stalinisme confraternel que la chute de l'URSS signifiait la fin d'une révolution, pour cela, il faut remonter 50 ans en arrière; les trotskiens auront été les plus abusés souteneurs du stalinisme, cf notre 3e citation en exergue, ils vantèrent sa supériorité par rapport au capitalisme libéral par le fait qu'il se lança le premier « à l'assaut du ciel » avec les premiers spoutniks, Gagarine avait juste précéde le cosmonaute tiersmondiste Guevara. Contre révolution au sens retour en arrière, voire destruction du mouvement révolutionnaire renaissant mais dans la mesure où il y avait eu une indéniable poussée de la classe ouvrière mondiale dans les années 1980, cette chute très opportune a pu équivaloir à une sorte de contre révolution préventive, bien utile à la survie du capitalisme libéral, autant que la pax americana de 1945. La définition d'une contre révolution est complexe. Voici la plus intéressante que j'ai trouvée : « La contre-révolution est un terme à géopolitique variable, qui s’applique à l’ensemble des actions et des opinions de ceux qui rejettent les mutations de tout ordre (politique, social, religieux) imposées par les assemblées révolutionnaires. La terminologie doit cependant être précisée : le révolutionnaire de 1789 (La Fayette, Barnave ou Mounier) peut être qualifié de contre-révolutionnaire lors de la seconde révolution de l’été 1792, l’émigration fournissant une piste. Il existe ainsi une stratification de la contre-révolution en fonction des ruptures : journées d’octobre, Constitution civile du clergé, fuite du roi, guerre, exécution de Louis XVI… Pour clarifier les contours d’un concept qui deviendrait tentaculaire au cours de la radicalisation de la Révolution, les historiens détachent de la contre-révolution les résistances de populations ponctuellement en révolte contre telle législation révolutionnaire, mais qui peuvent basculer d’un côté ou de l’autre, selon les circonstances et la propagande des uns ou des autres. La contre-révolution se développe au rythme de la Révolution, elle se nourrit de l’opposition à ses principes et à ses actes. Elle est probablement majoritaire dans l’ensemble européen, dès 1789 ». Complétée par celle-ci : « L'expression contre-révolution désigne non seulement l’ensemble des moyens mis en œuvre pour s’opposer à une révolution, mais aussi des courants de pensée opposés, jusqu'au début du XXe siècle, à l'héritage révolutionnaire des XVIIIe et XIXe siècles, puis, aux révolutions de type bolchevik qui ont secoué l'Europe, puis certains pays extra-européens à partir de 1917. Elle inclut tout ce qui, après la révolution, tente d’en annuler, ou d'en limiter tout ou partie des effets, et même bien longtemps après. Suite à la mise en place de régimes révolutionnaires plus ou moins durables, l'adjectif contre-révolutionnaire est aussi utilisé dans ces pays pour disqualifier des personnalités que les dirigeants souhaitent évincer.Tout d'abord, pour qu'il y ait une contre-révolution, il faut qu'il y ait, sinon une révolution, du moins une processus politique révolutionnaire. par révolution, on entend renversement de l'ordre ancien, qu'il soit politique ou économique. Dans ce cadre, les partisans de la contre-révolution sont avant tout ceux qui s'opposent à un processus révolutionnaire; ces partisans peuvent être actifs dans les domaines théorique (Joseph de Maistre), politique (le cordon sanitaire), militaire (Koltchak), économique (le blocus)... le terme de révolution ayant été galvaudé (on parle de révolution à chaque nouveauté technologique), le terme de contre-révolution a aussi connu une modification de sens et de ses acceptions. En effet, à partir de la révolution bolchevique, moment de scission important au sein des mouvements révolutionnaires, communistes, bolchevik, anarchiste, tout mouvement dissident du parti révolutionnaire, toute personnalité qu'on souhaite éliminer (au moins politiquement), est taxé de contre-révolutionnaire ». Mon vieil ennemi René Berthier, avec qui j'avais polémiqué dans mon livre sur l'Etat de transition et à la librairie Amelot, lorsqu'il se pique de travaux d'historien anarchiste, produit d'intéressantes études, sur la contre révolution on lira avec profit ce qu'il en dit avec une riche science : http://1libertaire.free.fr/RBerthier14.html Lire aussi un texte foisonnant des presses universitaires de Rennes : https://books.openedition.org/pur/28073?lang=fr


5CF. L'ouvrage « La question nationale et l'autonomie » présenté par Claudie Weil (ed Le temps des cerises, 2001). Pour Rosa le nationalisme des petits peuples est essentiellement un nationalisme plouc : « … le nationalisme lituanien, biélorusse et ukrainien à peine éveillé se fonde entièrement sur la population rurale et ses formes conservatrices d'existence, entreprenant de labourer, de façon tout à fait significative, ce champ national antique et vierge par la diffusion d'abécédaires et de l'Ecriture sainte dans la langue nationale et avec l'orthographe nationale ». De même l'islamisme aujourd'hui n'est qu'un nationalisme plouc.Pour Marx, la classe paysanne est en dehors de la culture (pas du sol) elle reste une « parcelle de barbarie ». De quoi révulser nos anarchistes intempérants !
6Cf. Otto Bauer et la révolution, textes choisis, présentés et annotés par Yvon Bourdet, Paris 1975.
7VOIR aussi les longs développement de Bordiga à ce sujet, extrait : « Une des thèses fondamentales de tous les textes marxistes sur cette question est que la revendication d'une langue nationale est une caractéristique historique de toutes les révolutions antiféodales. En effet, cette langue est indispensable à l'établissement de liens et à la communication entre les différentes places commerciales du marché national qui vient de se former, ainsi qu'à la circulation sur tout le territoire national des prolétaires arrachés à la glèbe et à la lutte contre l'influence des formes religieuses, scolastiques et culturelles traditionnelles qui reposent d'une part sur l'usage du latin comme langue savante, d'autre part sur l'émiettement de la langue populaire parlée en dialectes ».
Il reproduit deux citations, l'une de Marx : «Les hommes commencent à se distinguer des animaux dès qu'ils commencent à produire leurs moyens d'existence» ; l'autre d'Engels :
«
D'abord le travail, ensuite, combiné avec lui, le langage. Voilà les deux facteurs essentiels sous l'influence desquels le cerveau du singe est devenu aujourd'hui, peu à peu, le cerveau de l'homme».

8Dans la Seconde Internationale on ne parle pas de « perspective communiste » mais de « système socialiste ».
9Toutes les guerres de religion du passé ne furent que des guerres de rapine où le soldat étéit excité non par une foi idéaliste ou un engagement patriotique mais par la perversion du pillage et du viol. Ainsi comme on vient de nous le révéler tardivement, les embrigadés de daech et Cie ne sont pas de simples bigots mais bien des soldats primaires. Si on ne leur avait pas promis 72 vierges (yezidis) sur terre ici et maintenant ils n'auraient pas voulu bouger des tours où ils moisisssaient en banlieues... éloignées de la classe ouvrière !
10Cf avant dernier paragraphe page 41.
11cf. p.186 : « … les formes constitutionnelles des Etats modernes, les institutions démocratiques, les formes républicaines de gouvernement qui ne sont en fait que des formes développées de pouvoir bourgeois, comme par exemple les fameux « droits de l'homme et du citoyen », proclamés à l'aube du siècle précédent et qui, au cours de toute l'histoire sociale et politique du siècle écoulé, ont été réduits à leur seul contenu important : le droit d'exploiter et de dominer pour la bourgeoisie ». La première critique féroce de ceux-ci se trouve évidemment dans la première partie de La question juive de Marx, ce pourquoi ce texte est tant diabolisé par les plumitifs de l'actuelle bourgeoisie moralisatrice et « antiraciste ». L'antiracisme dans sa version officielle perverse étant un des meilleurs remèdes contre le communisme.
12Dont je ne cesse de démontrer dans ce blog sa réalité à travers la défense offusquée des « grands principes humanitaires », des migrants par les grands bourgeois, et leurs indignations sélectives avec la masse des militants et journalistes petits bourgeois et gauchistes divers.

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