PAGES PROLETARIENNES

vendredi 14 octobre 2016

LES PRIMATES DE LA DROITE BOURGEOISE


Ce fût un régal. Niveau « Questions pour un champion », le jeu pré-électoral fut captivant de bout en bout. Les journalistes furent excellents, pugnaces et serviles comme seule la chaîne des beaufs sait en produire : toutes les questions pipoles ayant trait aux ennuis judiciaires de ces mannequins en cravate Macron furent posées laissant croire à une totale liberté de la parole journalistique, sauf que l'envers du décor, les menées impérialistes de la bourgeoisie française – par exemple : est-ce que vous allez continuer à bombarder comme l'incorrigible Hollande – ne vint pas à la lumière des sunlights audiovisuels.
Je m'apprêtais cette nuit à user de la métaphore journalistique, hélas tout la presse s'est jetée dessus ce matin. Je peignais déjà un Hollande en Raymond Domenech lors de la malédiction de Knysna, ancienne EDF en voie de remplacement par l'entraîneur Deschamps-Juppé, l'avant-centre Benzéma-Sarkozy, l'ailier d'extrême droite Aurier-Poisson, la charnière centrale Pogba-Lemaire, l'arrière droit Koscieny-Fillon, l'arrière gauche Kurzawa-Copé, et une préraphaélite (jeu de mot imprévu) entrée par mégarde sur le terrain électoral pipé.
Il ne me restait que l'anaphore, trop usée, dont je décidai de me passer, sans doute par admiration pour les dérapages heureux du président François. J'aime finalement ce petit bonhomme rond qui se moque de la fonction présidentielle contrairement à son prédécesseur qui la ridiculisait ; sa sortie sur les magistrats, même liée à l'épisode de la défense clanique de Taubira, est un régal, oui les magistrats sont des lâches et des salauds1, pas seulement Mornet mais les actuels juges cyniques qui s'acharnent contre les faibles et les femmes ; sa sortie sur le cerveau d'huitres des footeux, excellent quoiqu'il ait oublié les fans. Et les sans dents, superbe image du mépris de l'élite rose. Ce président est exemplaire lorsqu' il faut montrer comment se tirer une balle dans le pied, il y a du Macron et du Sacher-Masoch chez lui, sans oublier les rebondissements de la Vénus à la fou-rire Trivamachine.

Reprenons depuis le début du jeu télévisé. D'emblée ils se tirent tous eux aussi une balle dans le pied. Alors que la presse nous jurait que cela allait être un carnage, les champions n'ayant guère de différence de programme (moins d'impôts, moins de fonctionnaires, moins de 35 heures, plus de réduction des salaires, recul éternel de la retraite, plus de flics, plus de menées impérialistes, plus de justice de classe, plus de prisons), patatras : la main sur le cœur ils ont aussitôt déclaré se désister les uns pour les autres. Complices toujours, pourris aussi.
Au fur et à mesure du questionnement précis et limité en thème franchouillard des fonctionnaires de TF1, on comprit aisément l'unité autour du programme futur des challengers de la droite Neuilly-Passif-Bygmalion :
vider les poches de la classe ouvrière pour diminuer le chômage en embauchant plus de flics, de militaires et de parasites des fonctions régaliennes de l'Etat bourgeois !

Le match fut nul dans l'ensemble. Dans ce « au théâtre ce soir », théâtre de marionnettes, ils avaient tous cette allure de cadres compassés dans séminaire d'entreprise ronronnant, où les tics de Paul Bismuth n'enrayèrent pas les rebuffades de Copé et de son meilleur ennemi Fillon. Libé a apprécié le multiculturalisme heureux de papy Juppé comme Le Figaro l'a crédité de meilleur homme de main,

pardon de demain. Lemaire s'est fait tâcler comme un gosse qui ne peut pas répondre aux questions qu'on lui pose, pourtant il n'y avait rien du voyou chez lui, les voilées devront faire gaffe à leurs fesses. Le Poisson joua sur son physique de rugbyman pour gagner la sympathie du public avec cet alliage de l'eau et du feu : l'opposition au mariage pour tous et la liberté de s'accoutrer en Belphégor dans nos rues (les centristes bourgeois sont des caméléons comiques). La préraphaélite NKM réussirait sans nul doute une meilleure carrière dans les films d'épouvante érotique que dans son imitation politique faiblasse et snob d'une femme politique qui se prendrait pour Ségolène ou Hillary.
Tous nous ont promis non pas moins de terrorisme mais plus de surveillance, plus de répression, plus de freinage à l'expansion musulmane, (plus de guerre in fine) et, fin du fin, les comptes d'Etat apurés en fin de mandat. Le Graal européen. L'ancien président des riches faisait pitié en reprenant un concept soixante-huitard gaulliste, se pavanant comme plus sûr porte-parole de la majorité silencieuse sans dents (des dentistes seront-ils promus ministres?). L'ancien repris de justesse n'eût pas de mots assez durs pour fustiger un paltoquet (qui déshonore la fonction suprême en haut de l'élite bourgeoise) en prenant la défense des corbeaux noirs de la république qu'il a où mes poules ont l'oeuf. Difficile pour son colistier Copé de faire plus décomplexé, quoique qu'il ne soit pas loin de proposer le coran comme papier pq. Je me suis dit que Hollande l'incorrigible gardait toutes ses chances, avec lui au moins on rigole bien.

Se sont-ils vraiment jeanmarisés ou déshollandisés ? L'avenir nous le dira.

Tout à fait Thierry.


PS: les notes de Pascal Praud: Lemaire: 3, Juppé: 6, NKM: 0, Sarkozy: 4, Copé: 3, Poisson: 2,
Fillon: 5.

1 Qui ne se souvient de la lâcheté de la justice dans le spectacle qu'elle a donné lors du procès de Pétain : le Procureur André Mornet avait prêté serment à Pétain et participé à l'élaboration du "statut des juifs" en France. C'est le même salaud qui est en poste à la Libération. Et son passif est exemplaire. Entre 1914 et 1918, il a envoyé devant le peloton d’exécution nombre de rebelles, de déserteurs, soldats fusillés pour l’exemple. En 1917, il est le substitut du procureur qui expédiera en trois jours l'espionne Mata-Hari vers le peloton d'exécution. Retraité, il est néanmoins président honoraire de la Cour de cassation en 1940. Il est nommé directeur de la Justice militaire en mai de la même année. En septembre 1940, il devient vice-président de la commission pour la révision des naturalisations, qui est chargée de priver en particulier les juifs de la nationalité française3 et élabore le statut des juifs4 « voté » le 3 octobre 1940. En novembre 1944, il est appelé comme procureur général près la Haute Cour de justice. À ce titre, il est partie prenante des procès de Philippe Pétain et Pierre Laval, pour lesquels il réclame et obtient la peine de mort. Pendant le procès de Pétain, durant lequel il sera pris à partie par l'un des avocats de l'accusé, Jacques Isorni, sur son attitude durant l'occupation, il déclare, afin de faire cesser la clameur de la foule, « J'invite la cinquième colonne à cesser ses manifestations ». Le procès Laval terminé, il insiste pour que le condamné soit réanimé après sa tentative de suicide, le matin de son exécution.
En janvier 1948, il est admis définitivement à la retraite et est nommé en 1952 procureur général honoraire près la Haute Cour de Justice et procureur général honoraire de la Cour de Cassation. Lors de l'insurrection de juillet 36 en Espagne on l'aurait fusillé avec plaisir.

jeudi 13 octobre 2016

LES GAUCHISTES ONT DES SOLUTIONS NATIONALES ET HUMANITAIRES A LA GUERRE EN COURS

 Sur face book l'absence de débats fait rage sur la question politique subsidiaire des migrants. J'y suis traité de bon gros nationaliste de gauche (mélanchonien?), voire victime des idées nauséabondes de Marine Le Pen (même si la diablesse honteuse pose des questions qui fâchent quoique avec des réponses nationales étriquées sur le même plan que l'extrême gauche, elle, généreuse pour peau de balle). Les insultes gauchistes et leurs multiples tentatives de déstabilisation psychologique sont de la vieille bière stalinienne, chantage à la pétition (comme le Nouvel Obs avec son dessin: les migrants vous concernent tous), appel au recrutement pour prier dans la passivité sentimentale. La question des migrants est subsidiaire - sauf à entraîner à des enculages de fourmis - car la principale question: la guerre et le cynisme de ses différents "animateurs" n'est ni sérieusement analysée ni engagé un réel combat de classe contre sa persistance et son extension. Franchement ce n'est pas la lutte en quenouille contre la loi travail qui en aurait été un début, contrairement à ce qu'un groupe d'un seul maximaliste nous a seriné. La lutte contre la guerre ce n'est pas à partir de l'esprit corporatif ou de la préservation des acquis des ouvriers français qu'elle pourrait être menée.
La focalisation sur la question des réfugiés, à Calais ou en Grèce, et l'appel gauchiste à tous les accueillir (par qui? par les autorités bourgeoises qui les trient et en rejette les plus démunis? en les accueillant chez soi comme le souhaite Mme Hidalgo?), est un bobard du même ordre que l'appel stalinien à envoyer des armes en Espagne en 1936, en adoptant humanitairement les enfants espagnols orphelins: soumettre les prolétaires à un camp de la guerre. Il suffirait que le gouvernement Hollande soit plus accueillant pour recevoir le soutien trotskiste? quand ce délégué politique de la bourgeoisie française participe au massacre!
La situation des réfugiés n'est pas à mettre sur le plan classique de l'immigration, ils sont surtout comparables à des prisonniers de guerre, lesquels ont toujours posé problème à gérer par leur amplitude et l'impréparation des territoires encore épargnés par la guerre à les recevoir provisoirement ou les intégrer (des milliers de prisonniers de guerre allemands ont été en fermés dans des camps de travail pendant les années d'après guerre en France et en Allemagne et esclavagisés dans des travaux pénibles et dangereux). Quand les gauchistes humanitaires marchent derrière Angélique Merkel et se prétendent internationalistes, ils sont en réalité les porte-voix de la supercherie qui vise à dévier des véritables questions politiques posées par la guerre et la paralysie de la classe ouvrière mondiale. Ils prétendent la mobiliser avec les arguments de l'abbé Pierre, ce qui est idéaliste, ce qui est méprisable quand le terrorisme, qui est un aspect de la guerre (un pied de la guerre en Europe) sert à ramener les masses dans le giron "protecteur" de l'Etat bourgeois. Le terrorisme c'est la grosse Bertha qui vient justifier le foyer impérialiste en Syrie. Les gauchistes jouent aux infirmiers, et dans l'ensemble, n'en sont pas, et laissent aux organismes ad hoc le boulot.


Un prof géopoliticien plus clair... que le NPA qui veut que la France accueille tous les réfugiés - ce qu'ils appellent "solidarité internationaliste solide" de la sale guerre mondiale limitée et laissent croire à une lutte "démocratique" là-bas: "Malgré le tableau très noir de la situation en Syrie, on voit l’émergence de nouvelles perspectives de résistance populaire et démocratique contre toutes les forces impérialistes et contre-révolutionnaires. Elles ont besoin d’une solidarité internationaliste solide, ce qui lui a manqué jusqu’à aujourd’hui. Les autorités françaises, qui elles-mêmes ont du sang sur les mains, ont peut-être fait les gros yeux mais restent prêtes à recevoir Poutine, un des plus sanguinaires bouchers des peuples" (https://npa2009.org/…/internat…/syrie-poutine-de-grozny-alep). En restant sur la simple dénonciation "humanitaire" du génocide en cours (Obama n'intervenant pas copie ses collègues de 39-45 qui ont laissé les juifs crever) le NPA joue du violon en renvoyant la balle protestataire aux bombardés et ne fait qu'égratigner la gauche 100% au gouvernement. En des temps lointains les véritables partis du prolétariat appelaient à une grève générale contre la guerre dans les pays développés, quoique projet trahi au dernier moment. Tendez bien l'oreille nos gauchistes appellent à la grève générale pour la moindre grève corporative mais pour la guerre génocidaire qui fait fuir des milliers de réfugiés, on reste pieusement sur le terrain humanitaire secouriste!
Exemples de slogans réformistes radicaux débiles: aucun licenciement (en régime capitaliste), un salaire minimum pour tous (en régime capitaliste), régularisation de tous les sans papiers (en régime capitaliste en guerre), ouverture des frontières (c'est pourtant le cas...mais pas pour un quelconque internationalisme mais un accueil au compte-goutte d'otages de guerre en fuite).

http://www.lefigaro.fr/…/31002-20160929ARTFIG00111-alep-pou…

mercredi 12 octobre 2016

mardi 11 octobre 2016

L'Ancienne hégémonie du Socialisme Allemand (I)


par Roberto Michels (1911, in Revue du Mouvement socialiste en France)

Robert Michels fut un élève de Max Weber. Il s'installa en Italie, à Turin, où il continua de militer au sein du parti socialiste. Il fut proche des idées du syndicalisme révolutionnaire et fut en contact avec Georges Sorel et Hubert Lagardelle ; il publiait des article sen leur compagnie dans la revue française Mouvement socialiste.. Dans les années 1910, il évolua vers la droite et finit par adhérer au fascisme. . Le parlementarisme participe au processus d'oligarchisation (spécialisation des tâches, commissions, etc.), rend le leader indispensable, est routinier (le leader peut faire usage de ses capacités techniques acquises). Le parlementarisme donne plus d'opportunités au leader pour s'automatiser. La caste des leaders (oligarchie) se clôt sur elle-même afin d'éviter l'apparition de nouveaux leaders issus de la masse (trust oligarchique).
La seule chose que peuvent faire les masses c'est de remplacer un leader par un autre. C'est pourquoi les leaders maintiennent un lien avec les masses. Les vieux leaders font appel à la discipline, ce qui réduit la liberté d'expression des masses.
« L'organisation est ce qui donne lieu à la domination des élus sur les électeurs, des mandataires sur les mandants, des délégués sur les délégants. Qui dit organisation, dit oligarchie. »
La démocratie serait un meilleur système que le système héréditaire pour la sélection d'oligarchies. En 1911, Michels parle encore de la démocratie comme d'un moindre mal.
Si ce prof sociologue ultra-médaillé (voir sa photo) pour services rendus à l'Etat borgeois, nous intéresse c'est pour mieux comprendre comment à partir de prémisses justes, mais hors classes, il est tombé dans l'idéologie fasciste.C'est certainement après cette critique psychologique et très anarchiste de la Iième Internationale et du soi-disant autoritarisme de Marx qu'il a ...glissé par dépit, mais la critique de l'auguste SD allemande est impitoyable, elle sera aussi un modèle pour le nazisme et le stalinisme.


« Le témoignage le plus irréfutable de la vitalité inépuisable du parti socialiste allemand a été précisément ce fqit qu'il sut prendre, malgré toutes les lois contre les socialistes, la direction du mouvement ouvrier international ». C'est ainsi que s'exprime, non sans raison, Franz Mehring, dans son histoire du parti socialiste allemand. C'est la social-démocratie allemande qui, presqu'exclusivement, pendant de longues années, a eu la direction du socialisme international.
Déjà, l'ancienne Internationale fut, dans un certain sens, dirigée par les socialistes allemands. Il est vrai qu'à ce moment, le mouvement socialiste en Allemagne n'était pas plus unitaire, plus ordonné, plus clair au point de vue théorique, et n'en imposait pas plus que le mouvement ouvrie de la plupart des autres pays. Il jouait, au contraire, sous tous les rapports, un rôle beaucoup moins important que les sections françaises, italiennes, suisses et belges ; mais les grandes personnalités allemandes de Marx et Engels, non seulement par leur science et par leur action, mais aussi par leur énergie et leur autoritarisme, surent s'élever au-dessus de toutes les autres personnalités socialistes allemandes et imposer dans le Conseil Général la prépondérance de l' « influence allemande », dont ils étaient si fiers. Ils doivent être considérés comme les pères du patriotisme social-démocrate allemand, c'est à dire de l'amour passionné, même agressif, de la forme allemande du socialisme. Cette prépondérance de l' influence allemande » - appelée par l'indomptable amour-propre de Karl Marx « science allemande » - devint bientôt l'objet des critiques et des attaques de presque tous les partis socialistes non-allemands, qui voyaient dans cette influence un orgueil anti-socialiste, une intolérance et un despotisme dangereux ; et cela d'autant plus que, par la concentration de tous les pouvoirs de l'Internationale dans le Conseil général de Londres, qui n'était que Marx lui-même, l'hégémonie prenait une forme légale. Le socialisme allemand réussit finalement à mettre un terme à toute opposition contre lui. On fit la vie amère aux Jurassiens, à Bakounine et à sa faction italo-espagnole, si bien que les uns durent partir et les autres furent expulsés. Peu de temps après, les disputes avec les blanquistes français et les chefs du mouvement ouvrier anglais prirent un caractère tellement violent, que le « socialisme allemand » resta isolé : c'est alors qu'il se réfugia en Amérique. Le Conseil général fut transféré à New York, et ainsi disparût de la scène cette branche de l'Internationale. L'autre branche, qui s'était constituée autour de Bakounine, végéta encore quelque temps, pour mourir elle aussi, quelques années après.
Quatre lustres durant, le socialisme international resta internationalement inorganisé. Ce n'est que vers la fin de 1880, qu'on commença à faire de timides essais pour établir des rapports plus intimes entre les partis socialistes de tous les pays. Mais la Nouvelle Internationale n'imita pas sa devancière dans l'organisation qu'elle se donna. Adoptant le principe d'Engels, que « les masses ne peuvent être mises en branle que dans la voie qui correspond à chaque pays et à des circonstances particulières » - une vois qui est assez souvent un détour -, elle n'était plus une organisation qui ne tient pas compte des frontières, des races et des traditions : elle ne constituait plus une masse soumise à un salut unique et disciplinée par un programme unitaire. Elle ressuscita sous forme de partis nationaux, complètement autonomes, tant au point de vue de la théorie qu'au point de vue de la tactique, et dont la vie commune se réduisait principalement à l'organisation de congrès internationaux. Bien que, par cette nouvelle forme d'organisation, la dictature d'un Conseil général fut devenue impossible, et qu'au congrès on ne votât plus par tête, mais par nation – d'où l'impossibilité de la prépondérance d'une nation sur les autres – toutefois, dans la Nouvelle Internationale aussi, le triomphe du socialisme allemand, quoique sous une autre forme, était assuré. Il est hors de doute que le parti socialiste allemand, grâce surtout à sa forme d'organisation et d'esprit, servit de modèle à la plupart des autres partis socialistes. Domela Nuiwenhuis n'hésite pas à considérer, non sans reproche, les autres partis socialistes, dont l'arme de lutte est le parlementarisme, comme les ramifications de la social-démocratie allemande, comme des partis qui prennent pour modèle le parti socialiste allemand, dont ils sont les succursales qu'on ouvre et ferme à volonté. Oui, il est vrai que les partis socialistes étrangers ont imité servilement le parti allemand. Oui, il est vrai que le parti allemand a été considéré et adoré comme une idole, dont la moindre critique constituait un crime de lèse socialisme. En Autriche, en Italie, en Espagne, en Hongrie, la plante allemande fut souvent greffée sur les arbres indigènes, avec lesquels elle n'avait aucune parenté.
En Hollande, c'est grâce à l'argent allemand que fut implantée la forma allemande du parti (le parti social-démocrate actuel) et cela contre la forme nationale (sociaal-demokratische Bond). Le respect déjà grand pour la social-démocratie allemande s'accrut encore, lorsque les lois d'exception furent abolies. Cette abolition des lois d'exception fut représentée, dans l'exagération diplomatique, comme une victoire éclatante dûe exclusivement à la puissance extraordinaire du parti, qui avait vaincu la bête sauvage qu'était Bismark. Au premier congrès qui eut lieu après l'abolition de ces lois, du 12 au 18 octobre 1890, à Halle, les députés socialistes des partis des autres pays avaient l'air de petits écoliers qui présentaient leurs hommages au maître qui venait de créer une œuvre immortelle. Le parti socialiste allemand l'emporta sur les autres partis socialistes de l'Europe. Sa force morale était tellement grande qu'il était sûr de la victoire, dans les Congrès, même quand il s'agissait d'erreurs de tactique. Le social-démocrate allemand joua partout, même dans les pays étrangers, le rôle de professeur né du prolétariat. En Amérique, les allemands fondèrent un parti propre, dont la tactique, selon un écrivain anarchiste, était une imitation servile et ridicule de la social-démocratie allemande, et dont la décadence, survenue, selon an autre écrivain social-démocrate, à cause de son ridicule confusionnisme théorique, de son arrogance et de son fanatisme pour Lassalle, a été un vrai bonheur. C'étaient des caricatures involontaires, qui prouvaient combien était grande la nécessité de reconnaître le parti socialiste allemand comme maître et de l'égaler par tous les moyens. La social-démocratie allemande a eu le sort de toutes institutions allemandes après la guerre, de l'organisme militaire comme de la structure étatique, de la législation comme de l'enseignement, c'est à dire de servir de modèle aux institutions analogues des autres pays.

Dans le camp des adversaires du socialsme allemand, dans le socialisme international, surtout parmi les anarchistes, ces « bêtes noires » des historiens socialistes et les premières victimes des « procédés » du parti dans les Congrès internationaux, on expliqua cette prépondérance évidente par le fait que la social-démocratie terrorisait les congrès internationaux. Elle a été accusée d'avoir donné des mandats à quelques éléments dociles de petites et très petites nations, et de s'assurer ainsi les votes de ces pseudo-nations, qui, ne disant toujours que oui, aidèrent ainsi la social-démocratie allemande à remporter une victoire facile. On a dit qu'elle s'est emparée, brutalement et par des intrigues, d'accord avec quelques amis de France et de Russie, qui formaient « la famille Marx », de la présidence et des places de traducteurs, en en tirant profit, d'une manière honteuse, pour leurs buts particuliers. Dans toutes ces accusations, il y a un grain de vérité. Ce n'est pas en vain qu'au Congrès de Londres, des hommes comme Edouard Vaillant et Marcel Sembat, Keir Hardie et Bernard Shaw et E. Vandervelde, qui au fond étaient de leur côté, s'élevèrent énergiquement contre la prépondérance des allemands. Qui lit attentivement les lettres d'Engels adressées à Sorge, ne peut pas ne pas remarquer la finesse et la solidité des fils tissés pour maintenir au pouvoir la « famille Marx », et la manière inouïe et arrogante dont ils prétendaient avoir le droit moral à la direction de l'Internationale. Cependant, malgré l'unanimité des critiques socialistes sur la manière éhontée de la social-démocratie allemande, et malgré la jsutesse de ces critiques, on ne peut pas admettre que cela soit une explication suffisante de cette hégémonie même. Au contraire, le fait que la social-démocratie allemande ait réussi, même par des intrigues et des habiletés diplomatiques, à s'empare de la direction réelle des Congrès internationaux, nous détermine plus que jamais à en rechercher les véritables causes. Par des intrigues seules, on ne peut pas dominer, pendant vingt-cinq ans, un mouvement gigantesque. Donc, encore une fois : Quelles sont les causes de l'hégémonie allemande dans le socialisme international ?
Si nous faisons abstraction de la littérature, inspirée par la haine justifiée des anarchistes, qui, grâce à la social-démocratie, ont été définitivement exclus de l'Internationale – et nous ne parlons pas des individualistes, mais des autres, des socialistes antiparlementaires – nous ne trouvons, dans toute la littérature socialiste non allemande, que des hymnes de louange et d'admiration pour le socialisme allemand. Même des hommes doués d'esprit critique en parlent avec la plus grande considération. Bertrand Russel en admirait son organisation magnifique et « master piece of ingenuity and efficiency », Antonio Labriola son enthousiasme conscient, Guglielmo Ferrero sa forte critique des conditions présentes de l'Allemagne, Filippo Turati son énergie et sa fermeté. Il n'y a pas une qualité qui contribue à la gloire d'un parti politique, qui n'ait pas été attribuée à la social-démocratie allemande par les hommes les plus autorisés. Même l'hypercritique Arturo Labriola admirait sa tactique sincère dans la question de la monarchie et déplorait que le parti socialiste italien ne prit pas pour modèle le parti allemand. Presque jamais la moindre critique dans ce choeur dithyrambique d'admirations ! Ainsi, par exemple, un critique italien, parlant du programme agraire, qu'une fameuse commission avait présenté au parti socialiste allemand à Breslau, et le considérant comme dépassé et tout à fait réactionnaire, le justifiait pourtant en disant qu'un grand parti a le droit, en face d'un adversaire résolu, de passer sous silence la moitié de ses vues et de faire du vieux jeu diplomatique. Même ces critiques bénignes ne sont que des exceptions ; en général, l'admiration est sans réserve. IL ya des ouvrages, qui nous charment comme le cantique des cantiques. Le jaurésiste Edgard Milhaud, professeur d'économie politique à l'université de Genève, a écrit presque 600 pages de louanges en l'honneur du socialisme allemand, sans qu'il y ait la moindre critique sérieuse. Cet ouvrage d'ailleurs de talent et de persévérance, conclut par une apothéose, où il exprime la conviction que, quels que soient les obstacles que le socialisme allemand va rencontrer sur sa route, il saura toujours les surmonter facilement !
Toutes ces manifestations font preuve d'une absence absolue d'esprit critique. Mais cela est de grande importance comme témoignage de l'énorme considération que les socialistes étrangers avaient pour la social-démocratie allemande.

À suivre...

lundi 10 octobre 2016

NOTES SUR LE MOUVEMENT DES COOPERATIVES (2e partie)

En Allemagne comme en France, à la veille de la guerre le débat n'est pas vraiment concluant, même si la fraction maximaliste du socialisme international semble faire des concessions sur l'utilité des coopératives, elle reste très critique quand les tenants de cette soi-disant préparation des ouvriers à la gestion socialiste tentent l'alliance avec l'aile réformiste des syndicats... L'expérience des coopératives n'aura été que le premier pas du supermarché moderne récupéré par le commerçant Leclerc et les trotskiens qui avaient fondé la FNAC, nullement un apprentissage du socialisme ni du communisme. Donc.


Enquête : la coopération et le socialisme par Louis Bertrand, député au Parlement belge (1911)

En 1881, Edouard Bernstein considérait la coopération avec mépris. Louis Bertrand pensait que la ccopération réduirait « la puissance du commerce privé », « par la suppression des intermédiaires ».
Von Elm déporait le manque d'intérêt du parti :
« Le parti est neutre vis à vis de la création des coopératives, supposant existantes des conditions préalables nécessaires, comme propres à apporter quelques améliorations dans la situation économique de leurs membres ; il voit encore dans la création de coopératives, comme dans toutes les organisations des ouvriers destinées à la défense de leurs intérêts, un moyen efficace à l'éducation de la classe ouvrière pour diriger elle-même ses affaires ; mais il n'accorde à ces coopératives aucune valeur décisive pour l'affranchissement du prolétariat du joug du salariat. »

La résolution du congrès socialiste de Berlin stipulait contre divers congrès syndicaux que les coopératives ne sont pas à même « d'influer sur les conditions de production capitaliste ou d'améliorer la situation de la classe ouvrière ». Pour Von Elm : « le secret du succès réside dans la ssuppression du bénéfice du commerçant » ; en Angleterre et en Allemagne : « le grand nombre de consommateurs est intéressé dans une proportion beaucoup plus grande à la prospérité des entreprises coopératives, que les clients d'une affaire capitaliste privée, à celle-ci ».
Une pression croissante de la municipalisation et de la socialisation pourrait seule « amener à la coopération les grandes industries capitalisées ».
Ernst Lenz appuie la même conception : « Le mouvement coopératif est devenu une partie du mouvement social si important et si fertile pour la classe ouvrière que le parti ne peut plus se borner longtemps à le regarder favorablement ou à le laisser aller où il va (…) Il faudrait se rappeler la parole de Lassalle sur le lamentable manque de besoins des ouvriers. Est-il possible que le prolétariat regarde indifféremment comment ses organisations vont dans des mains étrangères et ne sont pas dirigées dans son esprit et qu'il tolère qu'on lui dise que le mouvement coopératif a ses lois particulières de développement et n'a rien de commun avec le mouvement social ».

En juin 1910 au septième congrès des coopératives allemandes sont énumérés les devoirs coopératifs des syndiqués par rapport aux sociétés d'achats en gros :
« Le congrès syndical....... recommande aux ouvriers et ouvrières organisés dans les syndicats, la décision prise au congrès syndical de Cologne (1905) de soutenir le mouvement coopératif, par leur entrée dans les coopératives et par la propagande des idées coopératives ».

J.Barth croit bon de conclure : « Il est indéniable que les décisions du congrès de Munich exerceront une profonde influence sur le mouvement ouvrier allemand, dans sa double forme coopérative et syndicale. Cette union des coopératives et des syndicats, effectuée malgré des divergences de nature, de terrain et d'activité, et malgré aussi une ancienne rivalité entre coopérateurs et synicaux, marque un pas énorme dans la voie de l'organisation de la classe ouvrière allemande. Le prochain congrès syndical l'affirmera, à son tour, en confirmant les décisions du Congrès coopératif ».

Le mouvement copératif français avait début au début des années 1880, sociétés dispersées et non fédéralisées. Pendant de la Bourse du travail de Paris, une Bourse coopérative des Sociétés ouvrières de consommation avait été créée en 1895 et fixé ses statuts. En 1900, premier congrès de la Bourse des Coopératives ouvrières de consommation.
En France, à la même époque le mouvement coopératif semble fusionner avec le syndicalisme comme s'en félicite G.Boudios :
« Au Comité confédéral de mai, notre Comité refusait d'entrer en pourparlers avec l'Union Coopérative. Depuis, une controverse s'est établie dans le Bulletin entre adversaires et partisans de l'Unité. (…) Sous la poussée des difficultés de la vie, devant le cynisme de spéculateurs, la C.G.T. A été amenée à inviter ses membres à combattre en partie les influences néfastes de l'agiotage, en apportant leur puissance de consommation à la coopération.
Enfin, nous ne verrons donc plus dans nos syndicats, d'un côté les syndicalistes coopérateurs et, de l'autre, des syndicalistes anti-coopérateurs. Les efforts patients des syndiqués coopérateurs ont obligé la fraction la plus révolutionnaire du syndicalisme à convenir que ceux, que jadis, ils couvraient de quolibets, avaient raison puisque la Confédération Générale du Travail a officiellement invité tous ses membres à devenir coopérateurs.
Allons, vieux coopérateurs syndiqués, ayons la victoire modeste, réjouissons-nous de voir nos camarades de travail entièrement d'accord avec nous sur la question coopérative.
Nous constatons également que, d'une manière officielle, le Parti socialiste, après avoir reconnu l'autonomie de la Coopération à Paris dans son congrès national, et à Copenhague dans son congrès international, invite ses membres à venir grossir les rangs des coopérateurs déjà groupés. Sous la poussée des événements, les capitaliste sont travaillé pour nous, en spéculant sur les denrées nécessaires à la vie. (…) Nos adversaires voient d'un mauvais œil la force sans cesse accrue de notre mouvement coopératif, et surtout de notre service d'achats et de production en commun, le Magasin de Gros.

« A l'origine, l'épicerie coopérative est incomplète, mais elle devient peu à peu un magasin confortable muni de provisions de marchandises considérables et variées. Puis elle se ramifie. La Société ouvre des succursales dans les différents quartiers de la localité, le nombre des magasins qui viennent se grouper autour de son administration centrale et de son entrepôt principal augmente continuellement. Le petit commerce coopératif est devenu un grand établissement de distribution de denrées alimentaires.
Mais là ne se borne pas son extension. Aux denrées alimentaires viennent s'ajouter peu à peu d'autres objets de première nécessité, pour lesquels il faut créer bientôt des services spéciaux ayant leur administration et leurs établissements propres. Ce sont les services de combustibles, des chaussures, des eaux minérales, etc., auxquels viennent s'ajouter les boulangeries, les laiteries, les boucheries. Des magasins spéciaux fournissent aux sociétaires les ustensiles de ménage et de cuisine, et les vêtements. Cette extension grandissante conduit parfois à la création de grands magasins coopératifs, où le sociétaire peut aller s'approvisionner de toutes les marchandises dont il a besoin, y compris les meubles, les instruments de tous genres et les articles de maroquinerie. (…)
L'espérience a démontré que leur activité est capable d'embrasser toute le domaine de la civilisation, et qu'il n'existe pour ainsi dire plus aucun domaine d'intérêt général auquel la Société de consommation ne soit capable de collaborer ».

Les sociétés de consommation doivent-elles s'affilier à un parti politique.

« La Coopération de consommation n'est pas un mouvement de classe. L'intérêt économique que les Sociétés de consommation et leurs Fédérations défendent et cherchent à faire triompher dans l'économie sociale, c'est sans contredit l'intérêt des consommateurs.
Or, comme toutes les classes de la société se composent de consommateurs, l'intérêt des consommateurs est de fait l'intérêt général commun de tous les membres de la société. En d'autres termes : toutes les classes, tous les peuples sont solidaires en tant que consommateurs, comme tels, les hommes ne connaissent pas d'intérêts opposés et par conséquent, ils n'ont aucun motif à se livrer à des luttes de concurrence et de classe et à des guerres entre peuples. L'intérêt des consommateurs est une unité supérieure qui fait disparaître tous les intérêts opposés sociaux et nationaux. (…)
La Coopération de consommation aide à créer les fondements économiques d'une civilisation sociale de l'humanité exempte de l'exploitation indigne de l'homme par l'homme ».

LA POSITION DE GUESDE AU CONGRES DE PARIS : si l'atelier prépare l'ouvrier à la lutte collective, la coopérative peut préparer à ce même titre le paysan... mais d'autres orateurs contestent cette dernière idée.

Gaston Lévy fournit un excellent résumé de la dernière discusion au congrès :

« … Mais par contre, si on lit les deux discours de Guesde et de Héliès, on aperçoit distinctement les deux thèses. Guesde, se plaçant au point de vue théorique , déclare : « La Coopérative n'a de valeur que par l'usage qu'on en fait ; elle peut être socialiste, comme patronale ou chrétienne. Seul compte, pour le prolétariat, son parti de classe, qui l'affranchira par la conquête du Pouvoir. On jugera donc la valeur socialiste de la Coopérative à l'appui qu'elle apportera au Parti Socialiste. Les coopératives resteront autonomes, oui, mais elles ne seront pas socialistes pour cela et, en fait, le principe même de la Coopérative n'est qu'une forme d'association évoluant dans les cadres de la société bourgeoise, et par conséquent ne pouvant les dépasser. Des individus se rassemblent pour acheter en commun ou produire en commun, et pour répartir leurs produits ou leurs achats ; mais ils ne s'arrêtent pas là ; ils font du commerce et touchent des bénéfices. Et même si les ouvriers profitent du bon marché des produits, en se généralisant, est-ce que les coopératives, diminuant le prix de la vie, n'abaisseront pas le taux des salaires, et cela d'autant plus qu'elles peuvent contribuer à déposséder les 1.500.000 petits commerçants qui viendront grossir l'armée des sans travail ? La preuve, c'est que le pays où les salaires sont les plus bas et les coopératives sont les plus répandues : c'est la Belgique, dont les travailleurs émigrent en masse et viennent abaisser le taux des salaires dans nos provinces du Nord. Dans les campagnes, on peut dire que réellement, les coopératives font œuvre d'éducation, dans le fait qu'elles transforment la mentalité paysanne dans le sens collectif ; mais dans les villes, ce n'est pas la même chose et c'est l'atelier lui-même qui prépare et contient tous les germes d'une société socialiste ». Et en tout cas, termine-t-il, il est impossible à des socialistes de reprocher aux coopératives du Nord de verser des fonds au Parti, puisque ce sont les mêmes reproches qui nous sont adressés par M.Motte et ses amis.

Ce discours, dont la forme était parfaite, et la séduction qui se dégage toujours de la parole de Guesde, produisirent une grosse impression sur le Congrès : elle ne pouvait guère être renforcée par les arguments de ceux qui appuyaient ce point de vue, même quand c'était, soit Bracke avec son érudition, soit Sanson avec la compétence particulière que lui donne sa qualité de secrétaire de la Fédération des Coopératives du Nord.

Compère Morel, lui, se contenta d'insister encore sur les Coopératives agraires, tout en faisant remarquer que les paysans qui y viennent, y vont par intérêt plus que par idéal.
L'autre thèse, qui était représentée par la motion de la Seine, fut défendue vigoureusement par Héliès, qui répondit victorieusement aux arguments de Guesde et eut un gros succès. Sa situation de directeur du Magasin de gros des Coopératives de France lui permettait d'apporter une documentation précise à l'appui de sa théorie, et il n'y manqua point.
Il signala tout d'abord, l'importance du mouvement coopératif international et français, puis démontra que la coopération a par elle-même une valeur sociale, d'abord en ce sens que son développement permet la réglementation du marché des denrées et empêche l'augmentation de la cherté de la vi, puis au point de vue éducatif, en associant la feme et l'enfant au grand désir de revendication sociale, et en assurant plus de bien-être.
Héliès insista sur l'action de la Coopération pour l'apprentissage de l'administration. « Ce qui créera, dit-il, la société socialiste, c'est la capacité de la classe ouvrière dans l'organisation et la production et de la répartition des produits ; mais, pour cela, il nous faut une autonomie complète des Coopératives, qui sont des organismes de la classe ouvrière et qui d'ailleurs s'organisent et se fédèrent selon le principe même que ses délégués ont admis au Congrès de Monthermé. Et d'ailleurs, toute son action est empreinte d'un caractère socialiste . L'Humanité y a trouvé son appui, toutes les grèves sont soutenues par les coopératives. La production elle-même est en partie touchée, mais ce ne sont plus des petites coopératives autonomes devenant la propriété de quelques individus ; ce sont des organismes de production possédés par l'ensemble des consommateurs fédérés par le M.D.G. Le chiffre d'affaires des magasins de gros est déjà considérable, mais, malgré tout, les coopératives ne suffisent pas, et le rôle des socialistes qui y pénètrent est de le faire comprendre aux coopérateurs. Mais on ne peut pas non plus faire dépendre la révolution sociale seulement de la prise du pouvoir politique et la classe ouvrière, majeure dans ses organismes, prépare elle-même sa libération.
« Les coopératives réclament leur autonomie ; nous n'avons pas à faire peser sur elles cette suspicion, qui consiste à ne leur reconnaître une valeur socialiste que si elles subventionnent le parti politique qui est créé pour servir la classe ouvrière et non pour s'en servir ».
Vaillant insista, en termes heureux, sur le fait que, partout où la classe ouvrière se rassemble pour une action commune, elle répand un stimulant de la force socialiste et ce sont les actions de masse de la classe ouvrière qui sont les véritables actions socialistes.
Tarbouriech, défendant une motion similaire à celle de la Seine, rappela toute la valeur socialiste des coopératives du Jura, qui, comme celle de St-Claude, n'ont pourtant jamais admis les versements au parti politique.
Albert Thomas et Poisson étaient également intervenus chaleureusement en faveur de la motion de la Seine, qui fut adoptée par 202 voix contre 142.
De cette discussion, qui a terminé le congrès, on ne peut pas conclure que le Parti ait affirmé réellement qu'il devrait se passer des subsides des Coopératives. Les uns les réclament ouvertement, les autres les admettent possibles, soit sous une forme soit sous une autre ; et l'on paraît encore assez éloigné d'une forme de coopérative communiste, d'où tout bénéfice serait banni, et qui serait simplement la répartition des produits achetés ou fabriqués en commun. Peut-être aussi est-ce incompatible avec le développement des Coopératives ? ».

Et la guerre de 1914 arriva...

Les appelations de queqlues coopératives françaises :
L'économie sociale (Neufmanil, Ardennes) ; La Ruche (Monthermé-Laval-Dieu, Ardennes) ; La Laborieuse (Troyes, Aube) ; L'avenir du Prolétariat (Trélazé) ; Coopérative syndicale de consommation (Lure) ; L'Alliance des travailleurs (Montceau les mines) ; L'économie parisienne (Paris 3e) ; La nature pour tous (Paris, rue de Bretagne) : La famille nouvelle (Paris, 173 bd de la Villette) ; La ménagère (Paris, rue de la Jonquière) ; Restautant coopératif de Belleville (19 rue de Belleville) ; L'abeille ( 57 av des Batignolles) ; Chez nous (Puteaux) ; « L'émancipatrice » (Choisy le roi) ; L'Union d'Amiens.

PS : je n'ai pas retrouvé le chapitre sur le travail des coopératives dans les prisons. Et Rosa ne semble pas avoir goûté du débats sur les coopératives réformistes et anarchistes-réformistes...