PAGES PROLETARIENNES

mercredi 13 juillet 2016

Nous ne sommes pas des "gréviculteurs"


par Marc Chirik

(intervention orale au 3ème congrès de Révolution Internationale, 1978, les militants comme équipe de foot avec un entraîneur efficace)

...C'est vrai qu'il y a une distinction qui se fait entre l'action de l'organisation comme telle, et celle des militants. C'est vrai aussi que le militant agit partout comme membre de l'organisation, mais là se fait la distinction: c'est sur les plans où se situent ces activités. C'est cela que ne voient pas ceux qui sont amenés à dire que les militants doivent chercher à être les chefs dans les luttes immédiates. Cette vision n'est pas tout à fait la nôtre. Ce que nous cherchons, nous, ce n'est pas de demander sa confiance à la classe pour qu'elle nous délègue la direction de ses luttes, mais de faire en sorte que la conscience de la classe se généralise pour que ce soit elle en tant que classe qui assume ses tâches. C'est là notre tâche fondamentale.
Nous ne pouvons pas dire seulement "généralisation" des luttes, les syndicats sont capables de récupérer ce mot d'ordre, on l'a déjà vu. Nous devons en dire plus, ne pas limiter la généralisation à l'espace, mais l'étendre au fond, allant des luttes pour des questions partielles aux questions générales. Dans les luttes nous devons toujours avoir présent à l'esprit trois soucis:

- pourquoi est menée cette lutte ?
- qui la mène ?
- comment se mène-t-elle ?

La grève n'est pas en elle-même une panacée. Les syndicats peuvent déclencher des grèves sur des revendications anti-prolétariennes, on l'a vu en Italie avant 1914, avec des grèves qui préparaient les ouvriers à la guerre. Nous ne sommes pas des "gréviculteurs".
Ce n'est pas un hasard si la question de l'intervention directe se pose à nous aujourd'hui, cela révèle deux moments: celui du développement des luttes ouvrières, et celui du développement de l'organisation des révolutionnaires qui est de plus en plus impliquée concrètement dans les luttes. Pour répondre à ce problème, il faut souligner que:

- l'intervention des militants est toujours sous le contrôle de l'organisation,

- le militant ne doit jamais exiger que la lutte dans l'usine atteint une conscience globale pour y participer, pour en être un facteur actif en intervenant. Nous devons absolument faire nôtre ce que Marx disait dans le Manifeste sur les communistes qui sont les combattants les plus décidés dans la lutte de classe.

- tant l'organisation que le militant n'ont pas à faire de la surenchère, à être plus radicaux que les ouvriers; cette attitude existe chez certains groupes parce qu'ils sont isolés, coupés de la classe, comme le FOR.

- les militants de la classe ouvrière doivent mener la lutte locale de la manière la plus effective et la plus efficace. Ce n'est ni un sport, ni une fête, comme peuvent le penser les surréalistes ou les situationnistes. Etre au sein des luttes, avec sérieux et responsabilité, c'est le contraire de ce que font les anarchistes qui font la "grève générale" tous seuls ou des "actions exemplaires". C'est avoir la conviction d'une victoire partielle possible et rejeter l'attitude du style "le capitalisme n'a rien à accorder", défendre les positions des ouvriers contre les atteintes du capital, et être avec eux décidés à faire aboutir la lutte.

- Notre dénonciation des syndicats et courants anti-prolétariens doit être la plus énergique possible; cela signifie qu'elle ne doit jamais prendre des formes abstraites, plaquées sur la lutte, mais être le démasquage concret, dans le faits, à travers les problèmes pratiques, de leur nature anti-prolétarienne.

- Nous devons exercer une vigilance constante à l'égard des manoeuvres anti-prolétariennes; si, au début de la lutte, il est difficile de démontrer les manoeuvres syndicales, il faut s'assurer de pouvoir les dénoncer immédiatement, au fur et à mesure du développement de la lutte.

- à l'égard de toute tentative de formation de groupes au sein de usines, il faut être conscient que de tels groupes, comme ceux qui se réclamaient de l'autonomie ouvrière, sont des groupes politiques qui entravent la formation de l'organisation politique de la classe. Par contre, nous apportons notre soutien à tout surgissement réel de groupes de réflexion dans les usines ou les quartiers et nous y participons.




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