PAGES PROLETARIENNES

mardi 1 septembre 2015

Les mystères de la glorification des réfugiés et des cris des dames patronnesses de la bourgeoisie

LES MYSTERES DE SYRIE
suivi de: charité et marxisme

«Vous voulez les pauvres secourus, moi je veux la misère supprimée.»
Victor Hugo  (Quatre-vingt-treize)


«Pour faire une bonne dame patronnesse
C'est qu'il faut faire très attention
A ne pas se laisser voler ses pauvresses
C'est qu'on serait sans situation
A ne pas se laisser voler ses pauvresses
C'est qu'on serait sans situation»

Jacques Brel



Qu'est-ce qu'ils nous gonflent! Plusieurs fois je l'aurai entendue cette remarque de "gens d'en bas" qui en ont marre du récit répétitif des "infaux". Jamais on n’aura vu la bourgeoisie mondiale, européenne et française en particulier, s’indigner autant du sort des peuples jetés dans un exode risqué et en rendre responsables «les gens», les «égoïstes de pays riches et pas surpeuplés». L’exode d’une grande majorité de syriens chrétiens ferait plutôt penser à la débâcle en 1940 en France où des milliers furent tués sous les bombes allemandes sans que personne ne puisse leur offrir un havre de paix; l’organisation de la fuite à Dunkerque et à Marseille fût catastrophique et réservée à une minorité. Les «réfugiés» syriens ou autres fuient aussi la guerre mais aucune de nos dames patronnesse de Médiapart ou de Libé-Rotschild ne nous dit de quelle guerre il s’agit et pourquoi.

Jamais lors des famines de la deuxième moitié du XXe siècle en Afrique, ou pendant les guerres raciales (mais en surface car les mystères des confrontations impérialistes germano-américano-franco-russe lors du dépeçage restent entiers) en ex-Yougoslavie on n’avait autant entendu retentir la leçon de morale; même les gesticulations humanitaires d’un Kouchner en début de carrière ne prétendaient pas faire honte au prolétariat de ne pas vouloir accueillir toute le misère du monde ou au moins la partager comme le travail; à quand les 20 heures par semaine pour partager avec les «migrants» ou les «réfugiés» par milliers d'un flux incessant?
Un certain Alain Cotta, dans son livre "Les Hordes", conseillait un capitalisme à visage humain sous peine de voir les pauvres se rassembler en hordes non contrôlables, qui mettraient ainsi en péril la pérennité du système social.
L'aide humanitaire de jadis n’était pas seulement rentable matériellement, elle l'était aussi sur un plan idéologique. Avec des médicaments ou des céréales, les anciennes puissances coloniales exportaient aussi la supériorité de leurs sociétés prétendues "démocratiques" qui prodiguaient leurs surplus médicamenteux, leurs ordis pourris et leurs vieux portables aux sous-développés.

Les nouvelles dames patronnesses de la bourgeoisie débordée par les hordes de migrants exaltent la «nécessaire" solidarité, faisant comme si cette notion effaçait ce trouble remake de la charité religieuse, interclassiste et féodale. Parler de fraternité avec les populations en fuite face aux massacres de soudards catéchisés, ex-délinquants issus de l’immigration flouée (lire «Les territoires perdus de la république" de Emmanuel Brenner), est totalement périmé car plongé dans les eaux glacées de la religion stupide.
Au début de ce XXIème siècle il ne restait du passé que l’individualisme libéral et une vague croyante électorale socialiste, maintenant il n’y a plus que le discours moralisateur antiraciste, qui esquive tout, permet tout et noie le poisson de la lutte des classes.

Alors que tous les partis politiques et leurs charlots de premier plan se sont affolés à la vision de l’exode des populations victimes de la compétition économico-politique du capitalisme et de leurs mâitres financiers, les journalistes de la gauche caviar bondissent à la rescousse pour sauver le système pervers et opaque de la charité déguisée en solidarité fictive. Dans la rubrique désintox Libération fournit un raisonnement simpliste:

«INTOX. Quand il s’agit de parler d’immigration, les hommes politiques français de droite comme de gauche se plaisent à citer la fameuse phrase de Michel Rocard (phrase dont nous avons raconté la véritable histoire dans ces colonnes) sur la France et la «misère du monde». Invité mercredi 25 août au 20 heures de TF1, le candidat à la primaire LR Alain Juppé n’a pas dérogé à la règle, se laissant aller à une version plus continentale : «L’Europe ne peut accueillir toute la misère du monde.»

«DESINTOX. L’Europe ployant sous la misère du monde ? De fait, il n’en est rien. Un exemple permet de le mesurer : selon un rapport publié en juin 2015 par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), la Turquie, le Pakistan et le Liban ont accueilli chacun plus de réfugiés que l’ensemble des vingt-huit Etats membres de l’Union européenne en 2014. L’afflux vers l’Europe, d’une importance inédite depuis plusieurs années, est bien réel. Selon les derniers chiffres du HCR, plus de 300 000 réfugiés principalement venus de Syrie, d’Afghanistan et d’Irak auraient rejoint l’Europe par la Méditerranée depuis janvier 2015. Mais il ne peut être isolé d’un mouvement qui touche d’autres pays bien davantage encore. «Le nombre augmente mais pas seulement vers l’Europe», explique Céline Schmitt, porte-parole du HCR, «les Syriens fuient d’abord vers les pays voisins. C’est également le cas en Irak». Ainsi sur les quatre millions de Syriens en exil, près de la moitié se trouve actuellement en Turquie».

Par ce tour de passe-passe - car personne ne pense que l’Europe ou la France puissent accueilllir toute la misère du monde ni même une partie - le cire-pompe évacue la question de la guerre, de ses causes et de nommer ses protagonistes. De plus il ne s’agit pas de quelques réfugiés en voyage économique mais de masses apeurées dont le nombre est plus faramineux que la capacité de jugement d’un millier de gauchistes charitables; il s’agit du plus important exode de populations depuis la guerre en ex-Yougoslavie, sans remonter jusqu’à 39-45 où ce fût plus grave encore. L’intox est donc bien assurée par la rubrique «libé-désintox» tous les jours car ce que ces cuistres professionnels veulent au fond c'est que l'Europe contribue à son tour après le petit Liban  à LA FORMATION DE GRANDS CAMPS DE REFUGIES POUR ABRITER A BAS PRIX TOUTE LA MISERE DES GUERRES!

Autant la bourgeoisie allemande s’affole, malgré les déclarations démagogiques de sa chancelière - c’est même près d’un million ou plus de réfugiés qui seraient attendus - et appelent «à partager le fardeau", autant les petits clercs de Mediapart stigmatisent à la manière trotsko-stalinienne cette Europe «forteresse inhumaine". Arjna, préposé à l’indignation, ne pousse pas que des cris et passe un peu vite sur une part de la réalité:

«La vague de migrants qui tentent au péril de leur vie de rejoindre l'Europe n'est pas une crise européenne, mais bel et bien une crise mondiale. Ces millions de désespérés jetés sur les routes et les mers des cinq continents, qui fuient quotidiennement leur villes et leurs villages pour essayer d'échapper à la guerre, à la famine, à la misère, aux épidémies, aux dictatures, aux persécutions nous disent à quel point le monde est devenu invivable. Des zones entières de la planète sont dévastées par la guerre, par les crises climatiques et par un néolibéralisme meurtrier. Les souffrances et le désespoir de ceux qui parviennent à s'enfuir sont tels qu'ils prennent tous les risques et d'abord celui d'y perdre la vie. Encore ne sont-ils qu'une minorité à pouvoir partir (sic). Pas une région du globe qui ne soit épargnée».

Pas une région non plus sans vastes camps de réfugiés!

«Si cette crise n'est pas européenne, elle nous en apprend beaucoup sur la réalité de l'Union Européenne. Mesquinerie, hypocrisie, inhumanité. Voilà le tryptique qui qualifie la réaction des gouvernants et des institutions européennes. Non, la barbarie n'est pas à nos frontières, elle est parmi nous. Elle se prélasse sous les ors des palais nationaux, elle se répand dans les media, elle se confortent dans les institutions. C'est elle qui organise et justifie les drames et les humiliations que subissent les migrants en route vers l'Europe. Non assistance à peuples en danger. L'union européenne la zone la plus riche et la moins peuplée de la planète est celle qui accueille le moins de réfugiés. Et dans quelle conditions! Certes si on a essayé de nous faire croire à une Europe sociale, personne n'a essayé de nous faire croire à une Europe solidaire du reste du monde. Mais ce qui se passe actuellement relève de la même inhumanité que les crimes de la traite et du colonialisme».

Cela dérape vite vers le n’importe quoi, du fait d’une inculture politique crasse, mais l’injonction stalinienne n’est pas loin, du même ordre que les sergents recruteurs pour la guerre civile espagnole en 1936, des embrigadés internationaux à la renverse en quelque sorte:

 «Il n'y a pas une minute à perdre pour ceux qui se pressent aux frontières, ceux qui se lancent à travers la Méditerranée, ceux qui sont chassés de toute part et espèrent trouver en Europe, un refuge et une vie normale. Il n'y a pas une minute à perdre pour sauver notre propre humanité».

Néantissime énième appel au firmanent des étoiles filantes gauchistes. A chaquee fois ces agitateurs, ces nains à moustache stalinienne comme leur petit chef ou des caméléons tout azimut à la kouchner, braillent à tout va dans le vide, méprisant autant les sans abris d’ici que les futurs sans abris de là-bas, mais portant beau dans les cocktails avec cinéastes et écrivains... enragés.

Lautealin en remet une couche en insultant la terre entière: "Accueillir toute la misère du monde", mais qui demande cela ? La formule, tant reprise par des millions d'idiots en France et ailleurs met l'accent sur la lâcheté qui pèse dans la classe politique depuis Rocard. C'est pratique car cette expression ne veut rien dire. Pour le commun des mortels, aussi lâche que les politicards de "gôche" et de droite, cette formulation leur évite de réfléchir sur le fond à la question de l'immigration et surtout de faire le lien, pourtant simple, entre crise économique, chômage et immigration». A défaut d’expliciter ce qu’il vient d’évoquer, il pointe un doigt vengeur contre le fonds de commerce du FN, esquive la question des guerres et donne une consistance bourgeoise à la fuite éperdue de réfugiés (mais pas encore réfugiés), une alternative une seule, la voici: « Ils n'ont qu'une seule alternative, fuir ! Fuir vers ceux qui leur tiennent un discours sur les valeurs humanitaires qui fondent nos sociétés modernes, la démocratie, la fraternité. Quelle déception. Les eldorados ne sont pas aussi accueillant qu'ils le croyaient, loin s'en faut. Des milliers de témoins gisent au fond de la Méditerranée. Qui de nous et d'eux est le plus responsable des guerres dans ces régions. Rappelons-nous comment Bush a pris prétexte pour envahir l'Irak et comment il les a laissé tombé après avoir foutu un bordel monstre dans toute la région. Qui paie les pots cassés si ce ne sont les peuples».

Le discours auto-culpabilisateur du gauchiste lambda, fils d’un vieux porteur de valises des despotismes libérés, finit lamentablement dans l’espoir que les peuples (cette notion godiche) pourraient se libérer eux-mêmes... par la démocratie bourgeoise et leurs récipiendaires, non simplement hypocrites, mais vendeurs d’armes et de larmes: «Cela dit la responsabilité des Nations, de leurs élus,  des organisations internationales est de faire face et donc de créer les conditions de l'accueil des populations».


L’ange Merkel

Pour remercier la chancelière de l’accueil que lui avait réservé l’Allemagne en janvier, une Ghanéenne a décidé de prénommer sa petite dernière, née en février, Angelamerkel. Une initiative acceptée par les services sociaux de la ville d’Hanovre où la famille est hébergée.

Après avoir dû faire face à plus de 200 000 demandes d’asile en 2014 – un record depuis 1993 –, l’Allemagne s’attendait initialement à un doublement de ce nombre cette année. En fait, selon de nouvelles estimations fournies mercredi 19 août par le ministre de l’intérieur, Thomas de Maizière, ces prévisions seront très largement dépassées. Il évalue à 800 000 le nombre de migrants qui pourraient cette année tenter leur chance en Allemagne. Si un grand nombre vient de Syrie, d’Irak ou d’Afghanistan, une part importante – plus de 80 000 au premier semestre – vient des Balkans.

Les Etats-régions, qui doivent accueillir ces réfugiés selon une clé de répartition élaborée il y a plusieurs décennies, sont débordés. « Chaque jour, 500 réfugiés arrivent dans le Bade-Wurtemberg. Nous devons chaque jour construire un immeuble pour les héberger », résume Bilkay Öney, la ministre (sociale-démocrate) chargée de l’intégration dans ce Land du sud-ouest du pays. Après avoir reconverti certaines casernes, les Etats-régions multiplient les acquisitions de containers spécialement aménagés mais peuvent de moins en moins éviter d’héberger des réfugiés dans de simples tentes.

Thomas de Maizière a provoqué une polémique en proposant que les réfugiés venant de pays sûrs qui, durant un trimestre, perçoivent 143 euros d’« argent de poche » par mois, reçoivent désormais des prestations en nature, moins incitatives. Une suggestion contre laquelle s’est insurgée sa collègue sociale-démocrate chargée de la famille, Manuela Schwesig. Dimanche 16 août, dans son interview de rentrée accordée à la chaîne ZDF, Mme Merkel a jugé que l’afflux des réfugiés et les questions humanitaires, mais aussi diplomatiques et géostratégiques qu’il soulève « vont nous occuper bien davantage que la question de la Grèce et celle de la stabilité de l’euro ». A ses yeux, « le thème de l’asile pourrait être le prochain grand projet européen ». Jugeant la situation actuelle « absolument non satisfaisante », la chancelière a dit en avoir parlé à Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne. Décision a été prise de réunir dans l’urgence tous les Etats de l’UE... dans 15 jours!

En juillet, les caciques bourgeois Européens s’étaient mis d’accord pour réinstaller 22 500 réfugiés syriens vivant actuellement dans des pays du Proche-Orient (Liban, Jordanie). Ils ne sont pas cependant parvenus à s’entendre que sur la répartition volontaire de 32 256 demandeurs d’asile arrivés en Grèce et en Italie, deux pays qui n’arrivent plus à faire face à la situation. Un chiffre dérisoire face à l’ampleur des arrivées. La chancelière voudrait qu’au moins l’Union européenne se mette d’accord sur une liste des « pays sûrs » dont les citoyens ne seraient pas admis à obtenir un droit d’asile dans l’Union européenne. Le débat est très sensible en Allemagne. En 2014, le pays a jugé que trois Etats des Balkans (Serbie, Macédoine et Bosnie-Herzégovine) étaient « sûrs ». La CDU voudrait également classer le Monténégro, le Kosovo et l’Albanie dans cette catégorie mais les politiciens Verts, dont l’accord est indispensable, s’y refusent pour l’instant.

UN PLAN DU GOUVERNEMENT FUMISTE FRANCAIS

Le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, qui s’est remis de son malaise cardiaque, a indiqué mardi quatre sujets qui pourraient constituer les grands axes d’un plan franco-allemand. Il s’agirait tout d’abord de créer des « points d’enregistrement » (hot spots) là où les réfugiés arrivent. Certains pays comme l’Italie ou la Hongrie sont soupçonnés de ne pas tout mettre en œuvre pour accomplir ces formalités. De son côté, la Grèce semble réellement incapable de faire face à cette responsabilité (mais on ne lui en voudra pas autant que pour ses dettes).

Deuxièmement, des procédures accélérées devraient être mises en place afin que ceux qui n’obtiennent pas l’asile repartent effectivement et rapidement (Médiapart et Kouchner sont d’accord, vu le risque de «loups solitaires» terroristes). En Allemagne, Mme Merkel a reconnu qu’on ne pouvait plus travailler en « mode normal », mais elle a fait croire au monde entier à la générosité de l’Allemagne financière et bourgeoise, et se plaint maintenant que chacun ne prenne pas une quote-part. On mobilisera des retraités, pas pour le front, mais pour venir en aide aux services d’immigration. Troisième axe : aider les pays de transit sur la route de l’UE à lutter contre les filières clandestines, même si la plupart des migrants se passent des passeurs dans leur fuite éperdue. La France pense surtout à la Libye et au Niger, l’Allemagne aux Balkans; chacun sa zone d’influence post-coloniale. Quatrième axe : à plus long terme, aider au développement des pays de départ afin de tarir le flux à la source, pour ceux qui croient encore au Père Noël.

L’exode se poursuit:

(AFP) - La Hongrie a de nouveau empêché mardi les migrants de rejoindre en train l'Autriche ou l'Allemagne, confrontées à un afflux record, alors que l'Europe reste divisée face à sa plus grande crise migratoire depuis la Deuxième guerre mondiale. Plus de 350.000 personnes ont risqué leur vie depuis le début de l'année en traversant la Méditerranée, et 2.643 personnes sont mortes en mer pour avoir voulu rallier l'Europe, a révélé par ailleurs mardi l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), donnant la mesure du phénomène. A Budapest, les autorités ont fait évacuer la gare de Keleti après que quelque 500 migrants eurent tenté de monter, dans le chaos, à bord du dernier train qui devait partir pour Vienne à 07H10 GMT. La gare a pu rouvrir mais a été interdite d'accès aux migrants, sans indications sur la pérennité de cette mesure. L'évacuation, encadrée par plusieurs centaines de policiers, a provoqué une manifestation spontanée de 200 personnes devant la gare criant "Allemagne, Allemagne!", et "Nous voulons partir !", brandissant pour certaines leur bébé à bout de bras.

La veille, les autorités hongroises avaient fini par autoriser les candidats à l'exil à quitter leurs camps improvisés près des gares de la capitale. Conséquence : 3.650 migrants, dont beaucoup sans visas, sont arrivés lundi à Vienne, un record cette année pour une seule journée.

Un grand nombre d'entre eux ont passé la nuit de lundi à mardi dans la principale gare de Vienne, espérant poursuivre leur voyage vers l'Allemagne, qui a renoncé à renvoyer les Syriens vers leur point d'entrée dans l'UE, s'engageant du même coup à traiter leurs demandes d'asile.

D'autres migrants ont pu monter dans des trains à destination de la ville autrichienne de Salzbourg ou de Munich, dans le sud de l'Allemagne. Selon la police allemande, 3.500 demandeurs d'asile sont passés d'Autriche en Bavière entre lundi matin et mardi après-midi, un record pour cette région.

Leur arrivée, au terme d'un périple épuisant, a déclenché une vague de solidarité avec des dizaines de Munichois apportant habits, nourriture, eau et couches, au point que la police a demandé aux habitants de cesser leurs dons faute de pouvoir les gérer. Cet afflux de populations fuyant la guerre, les persécutions et la pauvreté au Moyen-Orient et en Afrique constitue "le plus grand défi pour l'Europe pour les années à venir", a estimé mardi le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy à Berlin.

L'Autriche traque les passeurs à défaut de traquer les marchands de canon:

Mardi encore, l'Italie a annoncé avoir secouru 221 migrants massés dans deux bateaux gonflables au large des côtes libyennes. Plus au nord, la Belgique a enregistré un flux sans précédent d'arrivées et un campement s'est improvisé près du principal centre d'enregistrement des réfugiés à Bruxelles.

En Suède, l'Agence des migrations a indiqué mardi que le nombre de demandes d'asile dans le pays avait approché la semaine dernière son record historique. "Toute l'Europe se trouve désemparée", a commenté une analyste de cette administration.

Mais les 28 pays membres de l'Union européenne restent divisés, avant une nouvelle réunion d'urgence prévue le 14 septembre. Plusieurs responsables occidentaux ont récemment fustigé les pays de l'Est membres de l'UE pour leur manque d'empressement à accueillir des migrants, mais aussi les institutions européennes. La Hongrie, critiquée par la France pour la clôture érigée à sa frontière et par l'Autriche pour sa "négligence" dans la mise en oeuvre des règles européennes sur l'asile, a convoqué les ambassadeurs des deux pays pour obtenir des explications.

"Nous devons maintenant travailler à réussir la mise en place d'une politique d'asile commune (...) et non pas nous accuser les uns les autres, nous devons changer les choses", a jugé dans ce contexte mardi la chancelière Angela Merkel, pas en retard d’une promesse pour confirmer son rôle de première dame patronnesse de l’Europe capitaliste et rentière et militante pour la construction de camps de toile de réfugiés avec ses amis Valls et Hollande.
"La priorité de l'Europe reste d'empêcher les migrants de perdre la vie en tentant de rejoindre l'Europe", a déclaré mardi le président du Conseil européen Donald Tusk, en visite à Zagreb, rivalisant de charité, sans se prononcer sur l'organisation concrète de l'accueil, comme tous les lecteurs de Médiapart et de Rue 89.

L'ex-président eurosceptique tchèque Vaclav Klaus a de son côté estimé que l'Europe commettait un "suicide" en accueillant les migrants, au moins a-t-il dit que ce n’était pas un crime. Les personnes se rendant par la route de Hongrie en Autriche devaient quant à elles continuer mardi à patienter dans de gigantesques bouchons près de la frontière. La police autrichienne arrête chaque camion, fourgon ou voiture, dans le but de mettre la main sur des passeurs. Mais les "passés" n'en sont qu'au début d'une immense débâcle des démocraties bourgeoises à endiguer la misère produite par leurs guerres géopolitiques et pétrolières; le bordel va s'amplifier pire que le blocage de l'Eurostar cette nuit à Calais.


Ces mesures dans l'affolement ont été mises en place dimanche soir, trois jours après la découverte d'un camion abandonné près de la frontière avec la Hongrie, avec 71 cadavres de migrants en décomposition. Sept personnes ont été arrêtées en Hongrie et Bulgarie, dont quatre Bulgares et un Afghan.
«La Turquie et le Liban sont des terres d’accueil mais qui ont besoin d’aide. Au Liban, le nombre de réfugiés représente presque un tiers de la population. Les ressources de ces pays s’amenuisent et poussent les réfugiés à traverser la Méditerranée pour se rendre en Europe. Au Haut-commissariat pour les réfugiés, nous appelons à la solidarité avec ces Etats», déplore Céline Schmitt. Mais surtout à Décathlon.

CHARITE ET MARXISME

L’état de dénuement où sont plongés ceux qui cherchent à se réfugier dans la «forteresse-passoire» Europe nous renvoie à la notion de pauvreté. La plupart ont en effet tout perdu, mais cela n’en fera pas pour autant des révoltés. Les réfugiés n’ont en général pas le luxe d’être révolutionnaire; on ne leur demande que la reconnaissance et la soumission. Il n’y a que les intellos trotskiens à la Mickel Löwy pour croire à la réincarnation communiste à partir des galéjades de curé tiermondistes tel dom Helder Camara («Aussi longtemps que je demandais aux gens d’aider les pauvres, on m’appelait un saint. Mais lorsque j’ai posé la question: pourquoi y a-t-il tant de pauvres? On m’a traité de communiste». Même sous la révolution française les curés défroqués n’ont jamais fait de bons communistes.

Intéressons-nous plutôt aux conceptions littéraires du jeune Marx, qui se moqua si bien de ceux qui ne voyait dans la misère que la misère mais pas son aspect révolutionnaire; non pas que la révolution provienne en soi de la misère mais de ce qu’elle signifie et de ce qu’elle est comme menace; en ce sens le sort réservé, cruel et innommable aux fuyards des guerres impérialistes, doit être l’objet de notre réflexion, pas simple indignation, sur ce qui attend les prolétaires des pays encore préservés, demain: une même fuite éperdue face aux horreurs de la guerre, par ex. si la guerre en Ukraine s’aggravait...
C’est avec cette démarche, en partie encore inconsciente, que le jeune Marx va se passionner pour l’oeuvre dEugène Sue, Les mystères de Paris, publiée en feuilletons entre 1842 et 1843. Le feuillettonniste n’a été que le porte-plume d’un phénomène de société où tous les ingrédients et ressorts lui furent fourni par les lecteurs, de plus en plus ouvriers alors que l’ouvrage se destinait au début à un lectorat bourgeois, qui proposèrent des variantes au roman publié en feuilleton, dont les épisodes figuraient même au Journal des débats... parlementaires.
 Les Mystères de Paris racontent les exploits de Rodolphe de Gerolstein, grand-duc allemand qui se fait passer pour un ouvrier afin de se mêler aux populations des bas-fonds parisiens et de récompenser les pauvres vertueux. Au cours de ses expéditions, il rencontre une myriade de personnages, dont Fleur-de-Marie, jeune prostituée, et le Chourineur, ancien criminel devenu boucher. Le roman rencontre un succès inattendu, et de nombreux lecteurs issus de couches sociales défavorisées se reconnaissent dans cette représentation inédite du peuple. Sue glisse ainsi progressivement, au fur et à mesure de la rédaction, vers une idéologie socialiste, à tendance fouriériste, offrant ainsi l’exemple très rare d’une conversion politique d’un auteur par sa propre œuvre. C’est à cette idéologie, explicitée dans le roman à travers de longues digressions que Marx s’attaque dans La Sainte Famille.
Eugène Sue voulait «informer» les riches des conditions de vie misérables de prolétaires afin de favoriser le développement de la charité. L’auteur entretient des liens épistoliers avec des philanthropes bourgeois dont Marx se gausse comme de sa première chemise. Marx l’attaque sur ce terrain de la charité. Il montre que le socialisme dont Rodolphe serait l’incarnation n’est qu’une forme de paternalisme qui repose sur des présupposés de classes et une hiérarchie des individus de la société. Sans s’en rendre compte, Rodolphe a dévoilé le principal mystère: la misère humaine elle-même, l’infinie déchéance (du réfugié...) qui doit non seulement accepter l’aumône mais aussi servir de passe-temps à l’aristocratie de l’argent (les ministres du l’UE) et de la culture (les primitifs de Médiapart), satisfaire leur amour-propre, chatouiller leur arrogance, les amuser.
Le jeune Marx condamne donc ce socialisme paternaliste d’élite (on peut dire de nos jours le réformisme radical et antiraciste), de même qu’il ridiculise le projet de «banque des pauvres» (variété de produits que nous ont servi un temps les altermondialistes anars); il s’agit d’une utopie spéculative au même niveau que la Caisse d’Epargne, avec cette différence que ce n’est plus l’ouvrier seul qui perd ses intérêts mais la banque qui perd son capital.

On voit dans le chapitre 8 de La Sainte Famille que Marx s’emballe un certain moment pour la destinée de Fleur-de Marie, comme si celle-ci n’était pas seulement un personnage du roman de Sue mais existait réellement et était même l’une de ses proches, nous verrons qu’en dépit de ses réserves à l’encontre du genre, dans lequel il diagnostique une forme particulièrement nocive d’endoctrinement contre-révolutionnaire, il n’est pas resté lui-même insensible à cet aspect de son fonctionnement, et qu’il est, si on peut dire, entré dans le jeu de la fiction feuilletonesque, qui a fini par le rattraper, tant l’intrigue était bien menée.

Marx consent à créer à son tour une Fleur-de-Marie abstraite de son devenir romanesque, et une Fleur-de-Marie potentiellement épargnée par l’aliénation de l’idéologie bourgeoise que lui inculque Rodolphe. Marx semble goûter cet exercice, puisqu’il le répète au chapitre V de La Sainte Famille au sujet de Rigolette, personnage de la grisette libérée :

«C’est « une fort jolie grisette ». Eugène Sue lui a prêté le caractère charmant, humain de la grisette parisienne. Seulement, par dévotion pour la bourgeoisie et sous lʼeffet de sa propre exaltation, il lui a fallu idéaliser moralement la grisette. Il lui a fallu émousser ce qui fait la pointe de sa vie et de son caractère, à savoir son irrespect du mariage formel, ses rapports naïfs avec lʼétudiant ou lʼouvrier. Cʼest précisément par ces rapports quʼelle offre un contraste vraiment humain avec lʼépouse hypocrite, mesquine et égoïste du bourgeois, avec tout le milieu bourgeois, cʼest-à-dire avec tout le milieu officiel.» (La Sainte Famille, op. cit., p. 506.)

Marx appréciait les jolies femmes de Paris mais n’en usa pas comme le sémillant Friedrich Engels qui en fréquenta quelqu’unes et en qui les deux amis voyaient une figure du prolétariat doublée d’une figure féminine.

Ce long détour romanesque nous a apparemment éloigné du sujet, mais pas vraiment. La charité est une notion religieuse surannée, même si elle se voile du terme faux-cul de solidarité proclamé par tous les politiciens indifférents à la misère du monde comme à celle du prolétariat sur une planète de guerres où il n’y a plus aucune solution nationale ni démocratique. Les incroyables revenus des puissants, des roitelets du pétrole aux gros financiers français avec leurs retraites chapeau, qu’ils montrent l’exemple en versant à la corbeille des démunis des guerres... mais ils laissent crever des gens par milliers et ils disent «nous» comme si nous étions complices de leur exploitation et de leurs guerres.
Mais, nous, du prolétariat, nous reprenons les paroles de Robespierre:
«Quel est l’objet de la société? C’est le maintien des droits imprescriptibles de l’homme. Quel est le premier de ces droits? Celui d’exister. La première loi sociale est donc celle qui garantit à tous ses membres d’exister».
Robespierre à la tribune de la Convention, 2 décembre 1792.

Mais c'est plus compliqué qu'au temps de Robespierre.

PS: une sélection des migrants très problématiques suivant les enjeux... impérialistes de chacun.  à Calais, Manuel Valls  a déclaré que les européens devaient "établir une liste de pays sûrs". Une liste permettrait d'établir les nationalités prioritaires pour l'asile. En quelque sorte c'est une sélection "a priori", car les ressortissants des pays inscrits sur cette liste seraient presque disqualifiés d'office pour obtenir l'asile. En France, l'Ofpra utilise déjà ce système mais son application à l'échelle européenne est plus problématique. Cela posera des problèmes d'ordre diplomatique et de politique internationale car tous les pays ne vont pas forcément être d'accord sur la composition de la liste.

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