PAGES PROLETARIENNES

samedi 18 mai 2013

Pérou : un ancien syndicaliste exotique tape sur la classe ouvrière au nom des intérêts de l’Etat « plurinational »




« Nous gagnons 280 euros mensuels et nous allons toucher environ 140 euros pendant notre retraite », explique Ninoska Aramayo, employée à la Caisse nationale de la Santé. « Personne ne peut vivre avec ça ! Nous demandons donc une retraite équivalente à 100 % de notre salaire après 35 années de cotisation », ajoute-t-il.
Attaquer les retraites, surtout celles des ouvriers, est contagieux au niveau international. Le pote de feu Chavez, Juan Evo Morales Ayma ex leader syndical promu homme d'Etat depuis sa victoire présidentielle de 2005, à l’instar du noir Obama, avait joué démagogiquement de son ascendance amérindienne en prétendant relayer les revendications culturelles et sociales des populations indigènes, mais celles du prolétariat hérissent son sens de l’Etat bourgeois. Le plus exotique dans l’exotisme nationaliste qui règne au pouvoir du Pérou est cette invention de la bande à Morales (MAS), nouveau déguisement du chauvinisme local : l’Etat plurinational !

La grève pour la revalorisation des retraites, qui durait depuis plusieurs jours, vient d’être déclarée illégale le vendredi 17 mai. Par conséquent elle devient conflit politique, mais un conflit politique douteux. Evo Morales (président exotique dit de gauche) a accusé la Centrale ouvrière bolivienne (COB) de vouloir fomenter un coup d'Etat – contre l’Etat plurinational - et a appelé ses partisans à "défendre la démocratie". Ce qui est un euphémisme comique. Des affidés de Morales ont déjà défilé quand d’autres sont appelés au zèle patriotique à La Paz, le 23 mai, au risque de provoquer des affrontements avec les grévistes. La COB n’est pas plus un syndicat de type européen que ma grand-mère le portrait d’Alain Delon.

C’EST POURTANT PAS LE GRAND SOIR MEME SI PETE LA DYNAMITE !

Une véritable alternative « de classe » existe encore moins que dans une grande puissance industrielle dans un tel petit pays, non pas que la lutte soit amoindrie par son aspect spectaculaire et « généralisé », ni parce qu’il n’y a pas de solution locale autre qu’un gouvernement bourgeois d’austérité. Il faut connaître les données particulières à la Bolivie, les ronds de jambe des intellectuels de l’Etat « plurinational » et ne pas calquer le schéma des « partenaires sociaux » bien connu en Europe. Le titre du journal véreux Le Monde peut laisser penser au naïf ignorant (et aux anars gnangnan) qu’un pas qualitatif de la lutte de classe, passant du syndical au conflit politique, serait en voie de s’épanouir (pourquoi pas en révolution oh hé hein bon !). En réalité, des conflits sociaux divers n’ont pas cessé depuis des années dans ce pays, parfois très violents, sans poser vraiment une alternative de classe révolutionnaire. L’an 2000 avait été marqué par une mobilisation sociale massive contre la privatisation de l’eau. En 2003, lors du soulèvement contre le gouvernement néolibéral de Sanchez de Losada, les mineurs s’étaient battus dans les rues de La Paz à la dynamite contre l’armée. Puis, en 2006, des affrontements qui avaient causé plus d’une dizaine de morts avaient opposé le nouveau gouvernement à plus de 4000 mineurs, qui obtinrent gain de cause et furent incorporés comme salariés de la mine nationalisée
L’arrivée au pouvoir du MAS en 2006 avait conduit dans un premier temps à la promotion-cooptation des chefaillons syndicalistes. Mais, depuis la « rebelión fabril » de 2010, soulèvement des ouvriers des industries et des manufactures qui a réussi à faire abroger la réforme du code du travail et l’augmentation du prix de l’essence, Morales ne cesse de perdre peu à peu sa « clientèle sociale » :  ouvriers conçus comme catégorie corporative ou « secteurs », travailleurs de la santé, enseignants, mais aussi indigènes de la région du TIPNIS. Le « secteur » considéré comme le plus avancé par les trotskiens locaux  contre le MAS (simple parti mono-gouvernemental) est celui des mineurs de Huanuni où les trotskiens tiennent le manche et sont à l’origine de la récente fondation d’une nouvelle mafia politique : le Parti des Travailleurs[1]. Ces politiciens ont plus ou moins ralliés des syndicalistes, de la COB, éjectés du gouvernement. Nombre de dirigeants de la COB sont pourtant devenus infréquentables du fait de leurs compromissions ou soumission aux gouvernements successifs. Le nouveau parti est divisé, comme le syndicat COB, entre ceux qui veulent « un parti comme le PT de Lula », c’est-à-dire un parti électoraliste qui leur permette de mieux négocier des miettes avec le gouvernement, de continuer à faire des accords avec le MAS et de marginaliser les tendances d’extrême gauche, et cette dernière au programme capitaliste d’Etat. Ce parti reste le théâtre d’une foire d’empoigne entre sous-marins du parti gouvernemental MAS et les divers chefs syndicalistes arrivistes.
C’est avec l’accord de la COB peu fiable que les mineurs, traditionnellement en pointe dans les mouvements revendicatifs, auraient entraîné dans la grève les enseignants, le personnel hospitalier et des ouvriers de l'industrie. Les grévistes demandent une pension de retraite égale à leurs derniers salaires, alors qu'elle s'élève actuellement à 70 %, ainsi que pour des augmentations salariales supérieures aux 8% promises par le gouvernement. Le mouvement s'est durci lorsqu'ils ont appris que les militaires sont les seuls à toucher une pension égale à 100 % de leur dernière paie. Plus de 5 000 travailleurs des mines de Huanuni se sont rendus à La Paz. Comme d'habitude, ces mineurs manifestent bruyamment, en faisant exploser des petits bouts de bâtons de dynamite. La place Murillo, où se trouvent le palais présidentiel et le Congrès, était bloquée par la police, qui éloigna les grévistes à coups de gaz. Durant ces quatre derniers jours de grève, 367 personnes ont été arrêtées, à ce jour 300 ont été libérées et 37 "remises à la justice", quant aux 30 autres, on n’en sait rien. Le gouvernement bolivien a appelé mercredi les mineurs à reprendre le travail, le blocage de la mine  causant selon lui "des pertes quotidiennes de 500.000 dollars" au pays. Il s’est également adressé au dirigeant de la COB, Luis Delgado, pour discuter des modalités d’une "proposition qui ne mette pas en péril le système de pensions de retraite ".
La grève est en particulier suivie par les 5 000 mineurs de la principale mine d’étain de Bolivie, celle de Huanuni, dans la région d’Oruro, laquelle est contrôlée par les trotskiens. Des barrages routiers avaient par ailleurs été installés dans tout le pays, des centaines de grévistes bloquant en particulier la route reliant La Paz  aux villes d’Oruro et de Cochabamba.
Evo Morales dénonce des motifs politiques derrière le mouvement de grève. Il appelle ses partisans à le défendre.  « Mouvement subversif », « déstabilisation politique », « scénario de conspiration » : ce sont les mots choisis par le ministre bolivien de l’Intérieur pour qualifier l’actuelle protestation sociale. Carlos Romero en veut pour preuve une tentative de prise d’un aéroport au nord du pays, et la saisie de centaines de tonnes de dynamite dans plusieurs convois de grévistes, qui ont par ailleurs fait sauter un pont à l’explosif au début du conflit.
Des accusations rejetées par la COB, la Centrale ouvrière bolivienne, qui accuse à son tour le gouvernement de « trahir le peuple » et de chercher par tous les moyens à décrédibiliser le mouvement de grève. Le centre-ville de La Paz a connu jeudi 16 mai son troisième jour consécutif de paralysie totale et de manifestations violentes, alors que les blocages de routes au niveau national feraient perdre l’équivalent d’environ 6 millions d’euros par jour au pays.
Les braves représentants de l'ONU à La Paz ont dénoncé mercredi les « actes de violence » et ont appelé grévistes et gouvernement à entamer un « dialogue franc ».
Pour le gouvernement bolivien, les demandes de la Centrale ouvrière bolivienne (COB) sont impossibles à satisfaire. « Nous ne mettrons pas en danger l’économie du pays. Nous ne mettrons pas en danger le système de financement des pensions pour les gens qui gagnent le moins dans le pays », a ainsi déclaré le ministre de la Présidence, Juan Ramon Quintana. Par ailleurs, le gouvernement a annoncé avoir saisi 400 tonnes de dynamite et autres explosifs dans un convoi de mineurs. Juan Ramon Quintana dénonce une tentative de déstabilisation du pouvoir : « Nous avons entendu des dirigeants syndicalistes dire qu’ils allaient chasser du pouvoir le président Evo Morales de la même manière qu’ils l’y avaient installé. Ça, c’est un langage de coup d’État, c’est un langage anti-démocratique. »
Des accusations balayées par Octavio Urquizo, de la COB. « Le gouvernement devrait au contraire nous remercier. Nous nous sommes battus contre les dictatures, contre les gouvernements de droite. Et c’est grâce à ces batailles, à ces guerres, qu’existe le gouvernement actuel. Nous pensions que ce gouvernement allait justement œuvrer pour le peuple bolivien et pour les travailleurs. Au lieu de cela, il nous accuse de comploteurs quand nous ne faisons que manifester pour des revendications sociales », dénonce-t-il.
Résumons, si la colère des travailleurs boliviens est totalement compréhensible face à un gouvernement bourgeois « plurinational », exotique et amérindien certes, quelles perspectives sont possibles avec le syndicat COB ? Aucune. Rien de rien. Comme la plupart des mafias syndicales sud-américaines, la COB n’a pas de projet politique clair. Ce genre de syndicat soutient épisodiquement tel ou tel politicien doté d’un vague programme de nationalisation et d’assistance sociale.

L’EROSION DU « BLOC NATIONAL-POPULAIRE »

C’est sous cette dénomination que Morales avait prétendu fondre éternellement les « couches de la nation », mais la grève a fait réapparaître les clivages de classe. Autrefois membres à part entière du MAS gouvernemental, les enseignants exerçant dans les campagnes (maestros rurales) qui prenaient part à la grève de la COB ont ainsi fait l’objet d’une répression organisée par les syndicalistes paysans acquis au gouvernement  ; le 16 avril dernier, à Cochabamba, la fédération locale donnait l’ordre à ses affiliés d’exclure les professeurs grévistes de leur communauté au terme d’un délai de 48 heures. La contestation sociale, en grande partie ambiguë et clientéliste derrière la COB, est criminalisée :  mi-février déjà, le vice-président Álvaro García accusait les dirigeants trotskistes à la tête des syndicats de l’éducation et de la santé de constituer «  l’avant-garde politique de la droite […], l’extrême droite camouflée  ». Le 8 mai dernier, c’était au tour du président Morales de juger que la COB était «  un instrument du néolibéralisme  » en raison de ses revendications «  irrationnelles  ». Les trotskiens n’en sont pas moins eux aussi, à leur manière (façon NPA franchouillard) des fossoyeurs de la nature distincte du prolétariat, vu comme clientèle égoïste et assimilé au syndicat pourri dominant: « En dépit de sa visibilité médiatique, la COB est quant à elle paradoxalement prisonnière de son propre corps militant, essentiellement composé de salariés, dont les préoccupations demeurent somme toute distinctes d’autres catégories pourtant majoritaires au sein de la population, tels les travailleurs de l’économie informelle, les paysans et les indigènes ».
Mais rien ne vaut le charabia de l’intellectuel de gouvernement en service pour Le Monde Diplomatique, pour goûter la phraséologie sirupeuse du « socialisme sud-américain » - que vous me permettrez de citer longuement - le sieur Alvaro Garcia Linera, sorte de défenseur d’un Etat « prolétaro-exotique » - l’Etat plurinational (sic) -,  qui éjacule le raisonnement suivant, crucifiant vertueusement le « corporatisme prolétarien » au nom de l’universalisme… bourgeois retoqué « bolivarien »  ou « néo », ou « néant »:
« La deuxième tension créatrice oppose l’ampleur du processus révolutionnaire — qui découle de l’incorporation croissante de différents groupes sociaux ainsi que de la quête d’alliances larges — et la nécessité d’en cimenter la direction indigène, paysanne, ouvrière et populaire, laquelle garantit l’orientation politique. L’hégémonie du bloc national-populaire exige la cohésion des classes travailleuses. Elle implique également le rayonnement de leur leadership (historique, matériel, pédagogique et moral) sur le reste de la population afin de s’assurer son soutien. Certes, il y aura toujours un secteur réticent à l’hégémonie indigène et populaire, agissant à l’occasion comme courroie de transmission des pouvoirs étrangers. Mais la consolidation de la direction prolétarienne exige que l’ensemble de la société considère que sa situation progresse lorsque ces classes travailleuses dirigent le pays. Cette nécessité contraint un pouvoir de gauche à tenir compte d’une partie des besoins de ses adversaires. Une troisième tension créatrice s’est manifestée avec beaucoup d’intensité depuis un an. Elle vient de la confrontation entre l’intérêt général et celui, particulier, d’un groupe, d’un secteur ou d’un individu. Entre la lutte sociale, commune et communiste et les conquêtes individuelles, sectorielles et privée
« Le dépassement de cette contradiction proviendra du renforcement de la portée universelle de notre projet. Si le particularisme corporatiste venait au contraire à triompher, la perte de dynamisme de la révolution marquerait le point de départ d’une restauration conservatrice. Cette tension entre revendications universelles et particulières au sein du peuple a toujours existé. C’est d’ailleurs le propre des révolutions : de sujet fragmenté et individualisé — aspect dominant —, le peuple est progressivement amené à se constituer en instance collective. Mais nous abordons de toute évidence une nouvelle étape de la mobilisation, comme le suggère le récent conflit entre deux fractions de la Centrale ouvrière bolivienne (COB) , l’une alliée au pouvoir, l’autre non. En avril 2011, des professeurs d’école membres de la COB se sont mis en grève avec pour principale revendication le relèvement des salaires. Depuis 2006, l’administration Morales a pourtant augmenté les traitements des travailleurs de la santé et de l’éducation de 12 % net d’inflation. Dans le même temps, d’autres branches de l’administration publique (ministères, par exemple) ont vu leurs salaires gelés. Ceux du vice-président, des ministres et des vice-ministres ont, eux, été réduits de 30 à 60 %. La baisse a été encore plus importante pour le président. On peut concevoir que les fonctionnaires de la santé et de l’éducation réclament de nouvelles augmentations, mais elles ne peuvent provenir que d’un accroissement des revenus du pays.
La politique menée par le président Morales vise en effet à améliorer les conditions de vie des plus démunis et à centraliser les ressources issues des nationalisations et des entreprises d’Etat. Il s’agit de créer une base industrielle dans le domaine des hydrocarbures, des mines, de l’agriculture et de l’électricité de façon à générer une richesse durable et à utiliser les ressources du pays pour améliorer la qualité de vie des travailleurs, tant à la ville qu’à la campagne ».

Taisez vos revendications et retroussez vos manches pour « l’industrialisation » !

Le même suce-boule AGL : « On nous reproche de ne pas avoir procédé à une « véritable » nationalisation des ressources naturelles et de laisser des transnationales s’emparer d’une partie des richesses du pays. Mais nous passer des sociétés étrangères impliquerait de maîtriser les technologies dont elles disposent : celles liées à l’extraction, mais également à la transformation des matières premières. Ce n’est pas le cas. Il ne peut donc y avoir de nationalisation totale des ressources naturelles sans phase d’industrialisation. Le gouvernement a pris la décision d’édifier une industrie du gaz, du lithium, du fer et de certaines réserves d’eau. Des intellectuels ont interprété ce processus de construction d’entreprises publiques comme l’émergence d’un capitalisme d’Etat, contraire à la consolidation d’une vision « communautariste » et communiste. A nos yeux, le capitalisme d’Etat des années 1950 a placé les grandes entreprises au service de clientèles particulières : bureaucratie, groupes patronaux, grands propriétaires terriens, etc. En revanche, l’utilisation des excédents générés par l’industrialisation que la Bolivie encourage désormais donne la priorité à la valeur d’usage, pas à la valeur d’échange : la satisfaction des besoins avant le profit. C’est le cas des services de base (eau, électricité, etc.), élevés au statut de droits humains et donc distribués parce qu’ils sont jugés nécessaires, et non pas rentables. C’est aussi le cas de l’achat de produits agricoles par l’Etat, qui vise à garantir la souveraineté alimentaire du pays et la disponibilité de denrées vendues à des prix « justes » : fixés de façon à ce que les produits soient accessibles aux consommateurs, ils n’évoluent pas en fonction de l’offre et de la demande.
La plus-value issue de l’industrialisation offre ainsi à l’Etat la possibilité de mettre en cause la logique capitaliste de l’appropriation privée. La génération de telles richesses provoque néanmoins un ensemble d’effets néfastes pour l’environnement, la Terre, les forêts, les montagnes. Et quand la nature se trouve agressée, les êtres humains souffrent, en bout de course. Toute activité industrielle comporte un coût environnemental. Mais le capitalisme a subordonné les forces de la nature, en a abusé, les plaçant au service des gains privés, sans tenir compte du fait qu’il détruisait ainsi le noyau reproductif de la nature elle-même. Nous devons éviter le destin auquel un tel cours nous conduit.
Les forces productives du monde rural et l’éthique professionnelle des agriculteurs portent sur nos rapports à la nature un regard opposé à la logique capitaliste. Elles nous proposent de voir la nature comme partie d’un organisme vivant, total, auquel l’être humain et la société appartiennent aussi. Selon cette vision, l’utilisation des capacités productives naturelles doit se faire dans le cadre d’une attitude respectueuse de cette totalité et de sa reproduction.
« Humaniser la nature et naturaliser l’être humain », prescrivait Karl Marx (2). C’est le sens de notre projet : utiliser la science, la technologie et l’industrie pour produire des richesses — comment faire autrement pour construire les routes, les centres de soins, les écoles qui nous manquent et pour satisfaire les demandes de notre société ? — tout en préservant la structure fondamentale de notre environnement. Pour nous, mais aussi pour les générations futures.
Les tensions créatrices qui tiraillent le bloc national-populaire au pouvoir en Bolivie caractérisent les dynamiques de transformation sociale : les révolutions ne sont-elles pas des flux chaotiques d’initiatives collectives et sociales, d’élans fragmentés qui se croisent, s’affrontent, s’additionnent et s’articulent pour de nouveau se diviser et se recroiser ? Autant dire que rien n’y est défini par avance ». (Alvaro Garcia Linera : Vice-président de l’Etat plurinational de Bolivie. Auteur de Pour une politique de l’égalité. Communauté et autonomie , dans la Bolivie contemporaine, Les Prairies ordinaires, Paris, 2008).
Entre l’Etat « plurinational », la compétition entre les rackets trostkiens et le sermon dégoulinant de marxisme de pacotille des intellos de gouvernement, le prolétariat bolivien a peu de chance de sauver sa peau, et encore moins ses retraites. Et son combat, même avec bâtons de dynamite, n’a rien d’exemplaire pour le prolétariat universel. Les prolétaires sont là les dindons d’une farce qui les dépasse, et leur colère est hélas
vissée dans une robuste cocotte-minute. A chacun ses mystifications continentales, aux prolétaires sud-américains les bisbilles entre fractions bourgeoises capitalistes d'Etat, aux prolétaires européens les écuries électorales et le syndicalisme d'Etat.


(1) Le scrutin de décembre 2009 fait suite à une période de déstabilisation politique 
 (2) Karl Marx, Manuscrits de 1844, Editions sociales.



[1] Les 7 et 8 mars derniers, dans la ville minière de Huanuni en Bolivie, en présence de 1300 délégués représentants 100 organisations différentes, était fondé le Parti des Travailleurs (PT). Son programme de gouvernement inclut des mesures aussi avancées que la nationalisation sans indemnisation des hydrocarbures, des mines et de l’ensemble des ressources naturelles, l’expropriation des grandes propriétés terriennes, la nationalisation des banques, l’ouverture des livres de comptes pour que les travailleur-se-s puissent en prendre connaissance et le contrôle ouvrier sur la production. Cette initiative exceptionnelle a été impulsée par la très combative Fédération Syndicale des Travailleurs des Mines de Bolivie (FSTM), et soutenue par les principaux dirigeants de la Centrale Ouvrière Bolivienne (COB).(ce bla-bla dithyrambique et servile est la prose du préposé trotskien sur le web)

vendredi 17 mai 2013

L’APOLOGIE DE LA PERVERSION ELECTORALE PAR LA HAUTE BOURGEOISIE



"Dans la vie, pour réussir, il faut posséder la fortune, ou une situation élevée. Il faut pouvoir dominer ceux qui sont passibles de vous causer des tracas et leur imposer votre volonté".
Sur cette lancée, le fameux criminel docteur Petiot se présente aux élections municipales, sous l'étiquette socialiste. Avec 800 voix sur 1 000, il est élu. Il a vingt-huit ans.


Le Figaro, organe primaire de la haute bourgeoisie explique comment les électeurs sont devenus pervers à leur tour (surtout les riches de la droite caviar), comment ils jouent le jeu pour faire battre n’importe quel candidat de la gauche, qui sont donc très nombreux à voter Le Pen quand les sondeurs arnaqueurs sont payés pour faire croire que ce sont les ouvriers qui s’abaisseraient pour le parti national-naze. Parmi les truands qui ont le culot de se représenter SANS VERGOGNE, le lèche-botte Figaro oublie involontairement les Sarko, Pasqua Tron (lavé par la justice de classe) et tutti pourri. Comme quoi la bourgeoisie, sans avoir besoin de psy, est en droit d’étaler son total mépris et un cynisme sans limite face au bétail électoral.
« La mise en examen de Jérôme Cahuzac pourrait ne pas l'empêcher d'être candidat à sa propre succession au poste de député du Lot-et-Garonne. L'occasion pour des psychanalystes, spécialistes de la tromperie, d'expliquer pourquoi les électeurs peuvent voter pour des hommes politiques qui ont triché.
Légalement, Jérôme Cahuzac pourrait être candidat à sa propre succession au poste de député du Lot-et-Garonne, lors de l'élection législative partielle de juin prochain. Après sa mise en examen pour blanchiment de fraude fiscale d'avril dernier, il pourrait surtout regagner la confiance des électeurs. Les sondages le laissent supposer. Comme Patrick Balkany ou Jacques Mellick avant lui. Des hommes politiques réélus après avoir triché: le paradoxe ne surprend pas Alice Massat. Cette psychanalyste s'est penchée, dans son livre Le Succès de l'Imposture (éditions Odile Jacob), sur les méthodes des imposteurs. Pour elle, les déboires juridiques et autres condamnations peuvent même parfois jouer en la faveur de ces hommes politiques qui ont triché: «il y a un côté voyou, arnaqueur, qui peut finir par les rendre sympathiques».
Alice Massat file la métaphore: «pour les citoyens, les politiques peuvent être comme les méchants des films ou des séries pour les spectateurs». Ils ont beau être fraudeurs, ils «dégagent quelque chose de séduisant». Une «empathie» qui rapproche ces tricheurs des électeurs. Ce que confirme Roland Gori, psychanalyste marseillais, professeur de psychopathologie clinique à l'Université d'Aix-Marseille. Il a consacré un récent ouvrage à l'imposture, La fabrique des imposteurs (éditions Les liens qui libèrent). «Dans le cas de Jérôme Cahuzac, les gens vont plutôt admirer son audace, la façon dont il a cherché à s'en sortir, dit-il. C'est la même fascination que pour les sportifs qui gagnent, qu'ils trichent ou pas». Ou celle pour Bernard Tapie, condamné pour fraude fiscale ou dans l'affaire du match de football truqué Olympique de Marseille-Valenciennes... mais toujours populaire.
L'étonnante amnésie des électeurs
Au-delà de l'affaire Cahuzac, trop récente, Alice Massat et Roland Gori avancent, pour expliquer que des électeurs glissent dans l'urne un bulletin portant le nom d'un tricheur, «l'amnésie». Un oubli des faits, qui, selon Roland Gori, s'expliquerait par le «flot d'informations» proposé au public. «Cela place les gens dans l'instant, et les empêche de se constituer une mémoire», poursuit-il. D'où la rapidité à tourner la page… Les deux psychanalystes évoquent aussi le mea culpa télévisé de Jérôme Cahuzac. Une confession, inédite en France, qui évoque plutôt celle de Bill Clinton à la télévision américaine. Cette «belle performance», sourit Roland Gori, révèle, selon lui, que «les gestes comptent davantage que la parole». Et ils s'oublient bien plus rapidement que les mots. Surtout ceux des hommes politiques, dont la «parole est dévaluée», estime-t-il. Pour Alice Massat aussi, Jérôme Cahuzac devant les caméras, «cela a beaucoup joué». Sa confession, l'a, poursuit-elle, «assimilé à un acteur». Une mise en scène, qui, dit-elle encore, «place le public dans une position de spectateur». Et les gens qui y assistent ont «l'impression d'être devant quelque chose d'un peu surréaliste, entre la fiction et la réalité». Ce qui met de la distance et, surtout, «aide à tourner la page».
Autre explication: oublier, c'est parfois pardonner. En tournant la page, les électeurs, avance Alice Massat, ont parfois l'impression d' «absoudre» le fraudeur. «Ils se disent qu'en pardonnant à celui qui a triché, ils se pardonnent à eux-mêmes de petites transgressions. Cela peut-être griller un feu rouge, ou tricher sur un C.V.».

Je n’attends rien des idéologues de la haute bourgeoisie, voici ce que j’écris concernant la psychologie électorale en introduction à mon dernier livre : « La religion électorale).
« Le lecteur croyant qui cherchera ici des raisons de voter en connaissance de cause, dans le cadre de la démocratie représentative bourgeoise, n’en trouvera point, mais que celui qui est persuadé de l’inutilité de participer au cirque électoral se garde de penser qu’il pourrait garder une conscience tranquille après ce qu’il va lire, qu’il se détrompe, voire cesse sa lecture ici même. Je n’ai pas plus d’estime pour l’électeur croyant que pour l’abstentionniste athée, tous deux ne sont que des bêtes à concours simplet d’un ordre qui se fiche d’eux. Ils croient l’un comme l’autre au « libre-arbitre » individuel : l’un a pour dieu l’Etat et l’autre son nombril. Or tout est décidé d’avance, l’individu civil n’existe pas et tout le reste n’est que propos de bistrot. L’électeur est aussi moutonnier que l’abstentionniste est élitaire, autant dire qu’ils ne gênent personne. L’électoralisme apparait comme une question de personnes quand il est géré d’une manière étatique ultra-organisée, compartimentée et, très opaque, ultra financée. Je ne chercherai point à convaincre quiconque de ne pas ou plus aller voter. Je m’en fiche. Les séances rituelles de la démocratie représentative sont comme les moments de la météo : on n’y peut rien et on est bien obligé de subir la pluie quand le soleil est caché derrière les nuages. La mystification électorale a été tant de fois démontrée sans jamais convaincre ses millions de fidèles, toujours prosternés qu’il faut se poser la question : pourquoi des arguments simplement rationnels, chiffres et scandales à l’appui (même hors période électorale) laissent de marbre « démocratique » tant de gens, voire les hérissent quand ils ne se mettent pas à vous insulter et à vous vouer aux gémonies, autrement dit à vous accabler de ce mépris antique pour infidélité à la croyance dire républicaine ? A Rome, les gémonies étaient l’escalier sur lequel on exposait aux outrages du public les corps des condamnés qui avaient été étranglés dans la prison; de là, on traînait ces corps avec des crocs dans le Tibre. De nos jours capitalistes, en Europe comme en Afrique du Nord, comme en Russie terroriste, comment comprendre la précipitation des foules lors du pontifical dimanche électoral malgré et avec le traditionnel bourrage des urnes, parabole moderne des gémonies, quand, spectacle outrageant, les puissants s’étranglent de rire, en catimini.
L’explication est simple : parce qu’ils sont inconscients.
Inconscient (de in-, préfixe privatif, et conscient, composé du préfixe con-, « avec », et de scientia, « le savoir »)  est un adjectif qui manifeste un manque de réflexion ; il est en outre depuis la fin du XIXème siècle un concept de psychologie qui désigne l'activité psychique se déroulant hors de la sphère consciente dans l'esprit de tout bipède humain. Le concept est rarement utilisé en politique. Marx en fût pourtant un des inventeurs oubliés… et ses analyses sont plus souvent qu’on ne s’en aperçoit une psychologie des profondeurs abyssales des mystifications politiques dominantes.
Le célèbre psychiatre Lacan lance, le 17 mai 1967, la phrase provocatrice « L’inconscient, c’est la politique1», il ne se situe pas simplement dans la lignée freudienne, contrairement à l’interprétation courante et étriquée. Il reprend les géniales anticipations de Marx. Ce dernier, dès 1844 entrevoit que l’histoire de l’industrie a ouvert grandes les forces essentielles de l’homme : « la psychologie humaine devenue matériellement perceptible ». Pour J.Gabel, Marx est un des fondateurs de la « psychologie politique ». Marx est le premier à définir le travail comme « aliéné » mais pas seulement en tant que servitude, mais aussi comme « dépossession ». A l’époque, dans la vie courante du prolétaire, comme au moment des élections démocratiques aujourd’hui : « l’ouvrier se dépouille de son individualité »[1].
Malgré tous les efforts oratoires et municipaux des léninistes, des staliniens et des trotskystes pendant des décennies pour défendre la « tribune parlementaire »[2], celle-ci n’est plus depuis des décennies qu’une coquille vide, une arène pour politiciens qui n’empêcha ni une Deuxième Guerre mondiale, et qui ne favorisa en rien l’affirmation « politique » et « sociétale » du prolétariat depuis, qui ne laissa en général que des strapontins pour pantins impuissants à conjurer la victoire de la contre révolution stalinienne, la victoire du nazisme et l’embrigadement républicain dans la guerre mondiale. Les années passèrent (un demi-siècle jusqu’à l’an 2000) sans que la tribune parlementaire ne fasse entendre une véritable voix révolutionnaire ou ne lui serve d’écho tangible. Le mythe de la tribune parlementaire servit cependant pleinement, tel un récurrent rocher de Sisyphe, à communiser, pardon communier dans l’attraction céleste des masses à la religion représentative, formidablement remise en selle par la victoire des « Alliés » sur le nazisme puis par l’effondrement du « bloc totalitaire » vers la fin du siècle des plus belles entourloupes politiques planétaires et, permettez-moi de le répéter, démocratiques.
Entretemps il y eût l’invention de la télévision qui devint, elle, la véritable tribune de la classe dominante. La télévision et les multiples canaux médiatiques du pouvoir bi-séculaire de la bourgeoisie mondiale prirent la place dévolue aux parlements de jadis qui n’ont plus été le centre de l’intoxication-désorientation-mystification. La psychologie de la télévision et des médias en général fût depuis lors bien plus prégnante que les religions compartimentées quoique toujours ergoteuses et sous-jacentes au pouvoir d’Etat ...




[1] Manuscrits de 1844.
[2] Le pape du marxisme Kautsky prétendait qu’il fallait utiliser la voie parlementaire pour mettre l’appareil d’Etat « au service de classes exploitées » ;

jeudi 16 mai 2013

LES RETRAITES VONT REMONTER C’EST SÛR !




 
Et la comédie de boulevard syndical aussi! Le gouvernement réfléchit aux moyens de résorber le déficit des retraites... Vous avez déjà vu un gouvernement bourgeois réfléchir? Le candidat François Hollande avait promis, revêtu de son petit costume gris anthracite et d’une cravate bleue turquoise « le rêve » et autant que possible la retraite à 60 ans pour au moins 70.000 personnes. Il n’a pas menti pour les 70.000 personnes repêchées, par contre il n’avait fait rêver personne, tout le monde avait bien vu que c’était du bla-bla, et qu’il s’agissait de virer le nul Sarko et sa bande de malfrats, personnellement incapables tous autant qu’ils étaient, pour parodier l’idiot de service, Copé, dont la sale gueule nous est imposée à nouveau par l’ensemble de la presse médiocre et servile au petit déj tous les matins. Si on vous sert pas le débile Copé, d’autres objecteront qu’on est en plein régime stalinien, et qu’il faut laisser l’opposition respirer, même si elle a mauvaise haleine et qu’elle est chauve.
C’est une réforme explosive à laquelle va s’attaquer l’exécutif, disent-ils tous comme les autres fois avant  de nous la mettre grosse comme çà leur réforme ininterrompue. Songez que selon les dernières prévisions, le déficit du régime général des retraites devrait atteindre plus de 20 milliards d’euros à l’horizon 2020 ! Continuant sur la lancée de la réforme Fillon (un personnage important ce zigue, un franc-mac de premier plan vu ses états de service à deux reprises pour faire passer la pilule des retraites inégales et diversifiées) en 2010. Pour préparer le terrain (c a d le scénario), Jean-Marc Ayrault a reçu ce lundi à Matignon les organisations syndicales et patronales, chacune séparément, avant la conférence sociale des 20 et 21 juin qui doit mettre sur les rails la réforme discontinue des retraites.

« Personne ne sera épargné » (comprenez, chaque patriote versera son obole au secours national)

Au début du mois, la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine a confirmé dans un entretien au Figaro, qu’«un effort sera nécessaire, auquel devront participer tous les Français». Au lieu de jouer sur l’âge légal de départ, qui sera de 62 ans en 2017, le gouvernement devrait toucher à l'allongement de la durée de cotisation, aujourd’hui fixée à 41,5 ans pour le régime général. Selon les informations d’Europe 1 (comme BFM, radio de Neuilly-Trocadéro), elle pourrait atteindre 44 ans à l’horizon 2035. En clair, puisque le premier CDI étant signé en moyenne à 26 ans, pour avoir une retraite à taux plein, tout prolétaire devra travailler jusqu’à 70 ans! Autant crever avant si c’est pour jouir du farniente sur chaise roulante. Le Medef de son côté préconise d’allonger la durée de cotisation à 43 ans d'ici 2020 et de repousser l'âge légal de la retraite à au moins 65 ans à l'horizon 2040. Qui dit mieux ? Le prochain président de la république dans quatre ans ?

Mobilisation syndicale et mon cul

Dans tous les cas, le gouvernement préside déjà comme lors des enterrements précédents, à la mobilisation des syndicats. La CGT prédit déjà des manifestations d’ampleur et on peut lui faire confiance pour rameuter tous ses vieillards privilégiés déjà rangés des autoroutes corporatives. Son de cloche similaire du côté de Force Ouvrière. Son patron, Jean-Claude Mailly a estimé ce lundi matin sur Canal + qu’il «n'y a aucune raison qu'on augmente encore la durée de cotisations. Elle est déjà en hausse et elle est trop forte selon nous», mais en clair pas de raison qu’on fasse pisser le sang au populo pour empêcher les ajustements impondérables. De son côté, la CFDT prône esthétiquement «une réforme de fond, c'est-à-dire plus juste, un système plus lisible». «Est-ce que vous trouvez normal qu'aujourd'hui la retraite des femmes soit en moyenne autour de 900 euros, et celle des hommes autour de 1.600 euros?» a demandé Laurent Berger en suggérant de «remettre à plat et regarder où sont les inégalités» : ledit bonze ment sur la moyenne des retraites qui est bien inférieure pour les deux sexes, et où nombre de femmes de l’encadrement ou qui on sût coucher au moment où il fallait disposent de pensions confortables. Mais la comédie de la lutte pour l’égalité de traitement hommes/femmes n’est-elle pas un pitoyable enfumage à ranger au niveau des augmentations égales pour tous du gauchisme décati ?
Les retraités actuels ne seront pas non plus épargnés, mais pas massacrés non plus, on ne pourra pas arracher plus d’un dentier par retraité de base. François Hollande pourrait être tenté de revaloriser un panachage  des pensions à un niveau inférieur à l’inflation, comme viennent de le décider les « partenaires sociaux » (cf. les putes syndicales) pour les retraites complémentaires soit une perte moyenne de 150 euros par an dans le cas d’une revalorisation d’un point inférieur à la hausse des prix actuelle proche de 1,5%, mais faut pas dramatiser le retraité de base sans dentier ne se fera pas arracher sa moumoute.
Clairement, les retraités sont les victimes de M. Hollande», dénonce déjà l’ancien tueur de retraités Xavier Bertrand. Monsieur « resto du cœur » de l’UMP a cité «un monsieur qui vient me voir à ma permanence et me dit: ‘Complémentaire santé, cuve de fuel: tout augmente, mais si ma pension de retraite n'augmente pas, je m'en sors comment?» Avec «un impact sur la consommation beaucoup plus important qu'on ne pense», c'est «une erreur économique sans pareille», a résumé l'ex-ministre du gouvernement Fillon sur Europe 1 qui a toujours défendu la retraite le plus tard possible et le mépris des vieux à l’embauche.
Toujours d’après la station de Passy/Neuilly/Trocadéro, l’Elysée réfléchirait aussi en parallèle à aligner la CSG des retraités sur celle des actifs passant ainsi de 6.6% à 7.5% soit 140 euros de moins par an sauf pour les petites retraites inférieurs à 900 euros.
Les syndicats non représentatifs de la classe ouvrière dans son ensemble ne parlent pas d'une même voix sur ce sujet, contrairement aux mafias patronales, et heureusement parce que quand ils parlent d’une même voix c’est encore pire. Il y a d'abord ceux qui rejettent l'utilité d'une évolution des paramètres. À l'instar de la CGT qui, en guise de «réforme structurelle», exige une hausse des salaires et le retour de la croissance. «Si on allait vers un salaire minimum à 1700 euros, on n'aurait pas de problème de retraite», justifie Thierry Lepaon, encore plus con que Playmobil. Jean-Claude Mailly, contractuel chef de FO, a quant à lui «planté les banderilles» des lignes rouges à ne pas franchir, ce qui a émoustillé toute la racaille lambertiste dans ses rangs. À savoir une désindexation des pensions, un allongement de la durée de cotisation ou un nouveau recul de l'âge légal de départ.
Avant même le début des discussions, un consensus semble déjà impossible. Mais le gouvernement est lui-même sous une double pression qui lui interdit toute demi-réforme : celle du déficit des retraites, mais également celle des Bruxelles. Car ce n'est qu'à condition de profondes réformes structurelles que la Commission européenne a donné à la France un répit de deux ans pour ramener son déficit à moins de 3%. 
Rester uniquement sur le principe des retraites par répartition n'est pas tenable compte tenu du vieillissement de la population et des carrières du privé qui de plus en plus comprennent et comprendront un retard au premier emploi et des périodes de chômage. En alternative à la retraite par capitation, il serait possible d'étudier une retraite complétée par les impôts exactement comme pour les fonctionnaires qui en fait sont payées par les impôts de tous. Ne jouer que sur la durée des cotisations ou l'âge légal de départ ne serait qu'un exercice temporaire et injuste étant donné la précarité dans le privé et la grande difficulté des seniors à rester employés par les entreprises après 50 ans). Le financement des retraites devrait s'inscrire dans le cadre d'une grande réforme fiscale.  Bien sûr, ceux qui choisiront de travailler plus longtemps, par goût et car leurs entreprises les maintiennent pourraient avoir des bonus. Bref inciter, plutôt que sanctionner, pour travailler plus longtemps quand c'est possible. La bourgeoisie a le droit de rêver même si c’est un cauchemar pour ses élites lorsqu’il leur vient à l’esprit que çà va leur péter à la gueule.
METRO BOULOT TOMBEAU
LA QUESTION DES RETRAITES est au cœur de la crise du système capitaliste. Grave question qui aura révélé tout au long de l’année 2010, mieux que quantité de grèves « trahies », la collusion du syndicalisme et de l’Etat. La « résignation » du salariat véhicule autant la vérité dérangeante sur les limites du capitalisme que la « résignation » des foules syndicales. Entité multiforme la retraite est le serpent de mer de tous les égoïsmes de castes, promesse de havre de paix dans le turbulent capitalisme tout autant que terre d’ennui et chaise longue avant le cimetière. Les capitalistes au sommet des hiérarchies managériales sont sur le sujet plus émancipés que nos révolutionnaires amateurs modernes : ils la méprisent. Un Lagardère est mort à 75 ans en pleine fonction managériale. Journalistes, personnel politique bourgeois et aristocrates syndicalistes ne cessent jamais leurs activités. En face, la retraite est légitime au plus tôt pour en finir avec des boulots de merde, pour en finir avec le mépris hiérarchique et la théorie fasciste de la jeunesse éternelle. Mais qu’on ne dise pas qu’elle est le but de l’existence ! Ou le but de la société ! (cf. Chapitre VI de mon livre L’aristocratie syndicale)
ET MA CONCLUSION DU DERNIER AVATAR DU MERDIER DES RETRAITES EN 2010 (puisque la bourgeoisie peut se poiler que la population ouvrière ait autant de mémoire qu’un piaf)
UNE ANNEE DE RESIGNATION PLANIFIEE
La réforme 2010 des retraites, présentée par le ministre du travail Eric Woerth relève de 60 à 62 ans l'âge de départ et de 65 à 67 ans l'âge de la retraite à taux plein. Elle est suivie aussitôt de l’ordonnancement d’une série de Journées d’Action  soigneusement planifiées par les aristocraties syndicales régulièrement réunies dans une intersyndicale secrète – auto-intronisée - connue du public seulement par ses communiqués. En mars, une grève est bradée dans les raffineries de pétrole TOTAL : « Après les menaces, la CGT siffle la fin de la grève » (20 minutes, plus réac en général, se contentait de : « Les syndicats ont-ils lâchés les salariés de Dunkerque? »). La presse note aussi que  la plupart des grèves font l’objet d’un traitement direct depuis l’Elysée avec le conseiller social du président, Raymond Soubie. « Au septième jour de grève dans les six raffineries du groupe Total, la CGT a appelé hier soir à la suspension du mouvement. Eloignant le spectre d’une pénurie d’essence qui aurait bloqué la France entière à la veille d’élections régionales déjà périlleuses pour la majorité. A condition que les salariés sur le terrain, ce matin, ne désavouent pas la consigne nationale. Que s’est-il donc passé pour que le syndicat passe si vite d’un appel enflammé à la population, lundi, exhortant celle-ci «à créer la pénurie» de carburant dans le pays, à cette quasi-reddition décidée en raison des «avancées significatives» obtenues après une journée de négociations avec la direction du groupe ? A-t-il obtenu la réouverture de la raffinerie des Flandres (près de Dunkerque) à l’origine du conflit ? Eh bien non. A l’issue d’une journée entière à négocier avec le directeur des ressources humaines au siège de Total, à Paris, les syndicats n’ont obtenu que la confirmation de ce qui était grosso modo sur la table depuis deux jours : l’engagement du pétrolier qu’«au-delà du projet d’évolution de l’établissement des Flandres, il n’y aura ni fermeture, ni cession de ses raffineries françaises au cours des cinq prochaines années» ; la garantie que chaque salarié de Dunkerque aura un emploi chez Total correspondant à ses compétences ; l’organisation, avant fin mars, d’une table ronde portant sur les perspectives économiques du bassin dunkerquois (avenir de la raffinerie des Flandres, impact sur l’emploi…) et, au deuxième trimestre, d’une table ronde sous l’égide du ministre de l’Industrie consacrée à l’avenir du raffinage ».
Long fleuve tranquille, jamais impétueux, le « courant social » de protestation de centaines de milliers de « salariés », fluidifié par d’épisodiques journées… d’inaction - à moins que les marches syndicales soient pour les pieds une façon de voter sans offusquer le gouvernement - aura innové avec ces « JA » interminables (sans fin), dont aucun manifestant ne s’est demandé pourquoi il n’y eût aucun bilan. Pas besoin, me direz-vous, puisque la « fin » du gouvernement était atteinte : l’adoption de la réforme dans les Chambres bourgeoises !
14 janvier 2010 : vœux à la presse de Fillon et présentation de la réforme des retraites.
25 janvier : gaffe de Sarkozy qui annonce que la réforme passera à l’été mais se reprend «avant la fin de l’année ».
16 février : les aristocrates syndicaux annoncent que la riposte sera importante
12 avril : ouverture de la concertation gouvernement/syndicats
23 mars : première JA sur les retraites. François Chérèque : « La réforme est mal comprise par les salariés ».
23 mai : JA. Titre de Libération : « Le gouvernement échappe à une mobilisation massive »
26 mai : Titre de Libération  « Les ouvriers paieront l’addition ».
Bernard Thibault : « Nous jouons une grosse partie ». SONDAGES : 57% des français restent attachés à la retraite à 60 ans, contre 41% prêt à aller au-delà.
27 mai : Titre de Libération  « Le gouvernement rassuré, les syndicats aussi ».
16 juin : Eric Woerth annonce que la retraite sera repoussée dans un premier temps de deux ans.
24 juin : 2ème JA, deux millions de manifestants revendiqués par les syndicats.
20 juillet : discussion du projet au parlement. Le gouvernement se fiche du scandale Bettencourt.
7 septembre : 3ème JA, près de trois millions de manifestants selon les syndicats.
23 septembre : Le Monde titre : « Fillon inflexible, les syndicats offensifs ».
13-15 septembre : adoption en première lecture du projet par les députés. Tous les médias témoignent que l’opinion publique trouve injuste la réforme des retraites.
24 septembre : Georges Frêche déclare : « La retraite ça me fait peur » (Il meurt le 24 octobre).
2 octobre : deuxième procession du samedi sensée réunir public et privé, toujours près de trois millions de manifestants.
5 octobre : titres de la presse : « appel aux grèves reconductibles ».
Bernard Thibault : « L’unité des syndicats doit survivre à tous les événements ». François Chérèque : « Si les salariés veulent aller plus loin, ce n’est pas moi qui les retiens ».
7 octobre : Selon Le Monde, la fédération CGT des cheminots fait preuve d’une grande prudence ; Bernard Thibault : « La CGT ne souhaite pas jouer le jeu de la radicalisation ».
8 octobre : toujours en proue pour le larbinage gouvernemental, Le Figaro croit bon de titrer (ce qui est une gaffe !) : « Les propositions de l’Elysée divisent les syndicats ».
10 octobre : François Chérèque (essoufflé) : « Le 12 sera le dernier moment pour protester ».
11 octobre (le même) : « Je déplore que le gouvernement (ait) besoin de l’affrontement »
12 octobre : 4ème JA, près de quatre millions de manifestants.
15 octobre : Bernard Thibault : « L’objectif en soi des mouvements de grève (…) n’est pas de stopper l’activité économique (…) Il va bien falloir que le gouvernement aborde le fond du problème ».
16 octobre : procession syndicale du samedi, encore beaucoup de manifestants.
19 octobre : 5ème JA. Beaucoup de manifestants.
21 octobre : Sarkozy : « On n’a pas le droit de prendre en otage des gens qui n’y sont pour rien ».
23 octobre : 2ème sondage truqué du Figaro (après celui de Juin), 53% des sondés pour se coucher devant vote du parlement. Sondage Libé ; 79% des sondés pour que le gouvernement négocie. Sarkozy passe sous la barre des 30% de sondés satisfaits.
24 octobre : Borloo a bluffé Fillon dans la gestion de la fermeture des raffineries.
25 octobre : Eric Woerth : «Une fois la loi votée, elle doit s’appliquer. C’est la démocratie».
26 octobre : Bernard Thibault : « On aura montré qu’on s’est battu jusqu’au bout ».La version dite définitive du projet de loi sur les retraites est adoptée au Sénat. Eric Woerth « saisit au bond la perche que lui a tendu le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque qui a dit souhaiter l’ouverture de négociations sur l’emploi des seniors et des jeunes ». Le ministre a salué cette ouverture d’esprit comme la veille la présidente du Medef, Laurence Parisot ainsi que la ministre Lagarde.
27 octobre : Bernard Thibault : « Le mouvement n’est pas fini ». Il dénonce les policiers déguisés en manifestants. Pinçon-Charlot : « On va incontestablement vers une guerre de classes » (au pluriel classes). Le directeur du Point déclare que la réforme est passée.
28 octobre : 6ème JA. Les médias annoncent deux fois moins de manifestants.
29 octobre : Devant une centaine de salariés de la raffinerie Total de Feyzin (Rhône), près de Lyon, les délégués syndicaux du site ont annoncé, vendredi 29 octobre à 14 heures, la reprise du travail après 17 jours de grève. "On les a appelés à quitter leurs postes pour se mobiliser, et maintenant, on leur dit que tout est fini. Ce n'est pas évident", avoue Michel Lavastrou, délégué CGT, la voix lasse et le regard triste. "On y a cru jusqu'au bout", déclare Paul. Ce technicien de 54 ans a d'autant plus de mal à digérer l'échec de la mobilisation qu'il fera partie des premiers concernés par la réforme : il ne partira pas à la retraite dans six mois mais dans deux ans et demi, à 57 au lieu de 55 ans.
30 octobre : Jean-Claude Mailly (FO): « on ne va pas continuer à manifester 6 mois comme ça »
Conclusion (provisoire et anticipée) par le journal Le Monde : « Malgré une longue et forte mobilisation citoyenne et syndicale, l'Elysée n'a pas cédé et la réforme des retraites a été adoptée par le Parlement. De cet échec, plusieurs syndicalistes disent néanmoins sortir renforcés. La CGT, la CFDT, FO, la FSU, l'UNSA, la CFE-CGC, la CFTC et Solidaires ont appelé à une nouvelle journée de manifestation, samedi 6 novembre, comme un ultime baroud d'honneur avant un remaniement ministériel et d'autres batailles ».
2 novembre : SUD-RATP accuse la direction de « financement occulte » des syndicats. La CGT accuse SUD de « jeter le discrédit sur l’ensemble du syndicalisme ».
13 novembre : Les syndicats CGT du groupe Total ont annoncé vendredi que les fonds récoltés en solidarité avec les salariés des raffineries qui ont cessé le travail durant 18 jours contre la réforme des retraites seront reversés à tous les grévistes. La CFDT a quant à elle prévu d'indemniser ses seuls adhérents grévistes, à hauteur de 18 euros par jour non travaillé, et avec ses propres fonds.
14 novembre : Fin du long suspense sur le remaniement gouvernemental : Fillon est reconduit comme Premier ministre. Woerth est remplacé par Xavier Bertrand au ministère du travail.
18 novembre : le président Sarkozy remercie encore les syndicats lors de sa prestation télévisée..
Chérèque (CFDT) : « Il faut faire confiance à l’imagination des syndicats plus qu’à celle du gouvernement ».
LA SUITE AU PROCHAIN NUMERO SYNDICAL, MEDIATIQUE ET GOUVERNEMENTAL .