PAGES PROLETARIENNES

dimanche 21 avril 2013

UN DEBAT EXEMPLAIRE AVEC DES PROLETAIRES EN GREVE SORTIS DE LEUR USINE





Modeste compte rendu de la rencontre-débat en solidarité (politique) avec des ouvriers de PSA Aulnay en grève depuis trois mois
 
Un formidable débat a bel et bien eu lieu à la librairie L’insoumise à Lille, le dimanche après-midi de ce 21 avril 2013. Ce genre de débat peut être qualifié d’historique jusqu’à plus ample informé. Il est très rare en France qu’un groupe d’ouvriers sorte de l’usine où ils sont en grève, toutes tendances syndicales mêlées, pour aller non simplement « populariser » leur lutte mais chercher autre chose que la simple solidarité financière, qui est certes importante et nécessaire pour tenir aussi longtemps : avec cette volonté incroyable, preuve d’une conscience historique, de favoriser échange d’expériences, prises de contact hors des canaux officiels du syndicalisme étatique et des grouillots politiques divers de la gauche bourgeoise. Quand de plus la démarche de ces prolétaires vise à étendre la lutte, souligne la nécessité de se contacter directement entre secteurs en lutte et sous-entend carrément que la finalité de la lutte a pour but, tôt ou tard, la révolution, conçue comme mise à bas de la société d’exploitation et de profit. Comment ne pas être attiré voire fasciné par une telle détermination ? Comment ne pas se gausser de tous les olibrius intellectuels au service du pouvoir qui rabâchent une disparition de la classe ouvrière, voire son innocuité sociale et politique. Une classe dont les grèves ne seraient que les derniers feux-follets d’un passé prolétarien considéré comme erratique.
Une assemblée d’une cinquantaine de personnes de tous horizons c'est par rien, outre par la présence dynamique des ouvriers de secteurs différents, de retraités mais aussi de jeunes n’ayant jamais travaillé et taraudés par l’angoisse d’un avenir obscur et sans rêve d’une société débilitante. Cette assemblée, ouverte à tous, a été capable - foncièrement ancrée dans la réalité sociale lugubre et hostile à tout renoncement -, de poser les véritables enjeux de classe sur tous les plans qui concernent la société moderne.
C’est tout à l’honneur de l’OCL (organisation communiste libertaire) et à « La Mouette enragée » (Boulogne sur mer) d’avoir permis la pleine et entière organisation de ce débat. Contrairement aux poncifs des ignorants ou victimes de la propaganda de l’Etat dit démocratique, ce ne fût pas une empoignade d’anarchistes ni des « terroristes ». Face à la gravité des attaques dont ces prolétaires sont l’objet, je remarque immédiatement qu’il n’est nul besoin de « tribune » avec meneurs de débat, avec ficelles classiques des organisateurs professionnels de meetings solidement « encadrés » avec claque ou chefaillons chargés de cornaquer le débat et de l’amener à des conclusions d’appareils prédéfinies.
La discussion se déroula tout le long d’une manière ordonnée, respectueuse des interventions de chacun. Elle s’approfondit naturellement au fur et à mesure allant des détails sur le déroulement de la grève aux questions générales de la société capitaliste en crise. Et la conclusion découla sans fard avec lucidité sur les questions  de l’heure, sans emphase et sans trémolos.
Epatant oui épatant. Pourtant, malgré quelques politesses de convenance lors de la réception et de poignées de main, les premiers échanges furent rudes. La veille, la presse bourgeoise avait annoncé que le syndicat SUD s’était prononcé pour la suspension de la grève face au jeu « perso » de la CGT à Aulnay dans les négociations avec le patronat. Fort de ma longue expérience des AG de prolétaires, j’avais demandé des explications sur cette curieuse césure, que je nommais trahison corroborée à la soit disante unité syndicale qui préside à tout conflit à ses débuts. J’avais eu recours à l’image suivante : depuis des décennies les syndicats se présentent unis au début des grèves, ensuite ils se divisent, certains appelant à continuer la grève quand d’autres jugent plus responsables de la faire cesser pour améliorer la poursuite des négociations triparties (gouvernement-patronat-syndicats). Le syndicalisme est une sorte de train fou, ajoutais-je, dont le conducteur a sauté avant que le convoi ne verse dans le ravin : tiens, se dit-il, le wagon de Grandange a basculé, puis celui de Florange, puis celui de Petroplus, de Spanghero… ah bon et bientôt ce sera celui PSA Aulnay, de celui de Virgin Megastore… Et je dis, voilà ce que c’est quand on laisse la direction de la lutte au départ aux syndicats coalisés. J’ai cité le mot du fameux Talleyrand : « la trahison est une question de calendrier » ; et le calendrier syndical est toujours le même, on brame « tous ensemble ouais ! » et peu après « plus ensemble ouais ! ». Mais mes interlocuteurs, entre deux sandwichs préliminaires à la discussion générale, furent plus choqués que je leur dise qu’ils ne pouvaient mener une lutte exemplaire avec le signe « CGT ». On m’objecta qu’il ne s’agissait point de la hiérarchie de la CGT nationale mais de la CGT d’Aulnay laquelle ne prenait aucun ordre de la fédération nationale, et que c’est l’assemblée des grévistes, certes minoritaires à l’heure actuelle, qui dirigeait la lutte. Des membres de SUD étaient présents que je ne pouvais identifier., mais certainement de ceux qui firent sourdre leur colère face à mes propos : « comment osez-vous parler de trahison ? » (La plupart jeunes ouvriers de 30 à 40 ans ne se résolvaient pas à me tutoyer, pourtant je ne suis pas si vieux), ponctué d’un « vous n’êtes pas avec nous ». (Ils me faisaient penser aux sidérurgistes de Longwy il y a trente ans qui persistaient à me dire notre signe « SOS Longwy » est notre drapeau et le garant de notre victoire). Ils persistaient à ne pas prendre en compte mon insistance sur le fait que le sigle CGT est aussi repoussoir en France que PCF pour la plupart des travailleurs.
Au-delà des sigles – et je me fous qu’on ouvrier soit syndiqué ou pas dès lors qu’il est partie prenante de la lutte générale - malgré les jongleries verbales limite mauvaise foi des animateurs d’Aulnay,  je ne me laissais pas démonter ni impressionner, je martelais deux insistances comme forme de ma véritable solidarité avec leur grève : « il faut constituer dès à présent des comités de lutte afin que, échec ou pas, vous pouviez garder contact entre vous sans succomber à la démoralisation », et « il serait opportun de créer un blog qui centralise toutes les informations des luttes hors des syndicats officiels et des partis politiques de gauche qui prétendent décider à notre place, y compris les sous-marins trotskystes ». Fort de ma connaissance des multiples trahisons syndicales des trois dernières décennies de Longwy à la lutte des infirmières, je me permettais d’affirmer aussi que personne n’était incorruptible et que de nombreux « délégués de base » finissaient par faire carrière dans les appareils (ndlr ou au PS), mais on me répondit que eux à PSA ils étaient « purs » et qu’on avait tenté d’acheter un délégué avec une forte somme mais qu’il avait refusé la compromission.
-          Est-ce que toi comme délégué tu es révocable, demandais-je soudain à Samir ?
Ses camarades répondirent à sa place :
-          Oui s’il ne respecte pas le mandat que l’assemblée lui a confié.
Une jeune fille m’interrompit en me disant que j’avais assez monopolisé la parole et qu’il fallait la laisser aux autres présents, lesquels n’étaient pas encore partant. On nous fit assister ensuite à un film sur la lutte « des PSA ». Le film retraçait brièvement des caillassages  face à l’arrogance direction féodale de Peugeot et faisait défiler le portrait d’ouvriers sanctionnés.
Le débat qui suivit, mené entre autres par deux jeunes ouvriers d’origine maghrébine, brillants orateurs très précis et intelligents, prit pourtant une autre tournure. A cet endroit je délaisse toutes les interventions nominales de ma part tant la discussion révéla une homogénéité de fond entre nous tous.
La première partie porta sur la perception par « l’opinion publique » de cette grève. Il fût souligné l’importance des profits du trust PSA, sa capacité à produire des bagnoles de qualité et des ventes qui, contrairement aux dires de la presse bourgeoise, seraient en expansion sauf que la grève fait perdre des milliers de véhicules tant qu’elle dure à PSA. Plusieurs intervenants se satisfaisaient de l’impact médiatique, décrivant leur invasion « musclée » du congrès du parti gouvernemental, l’occupation d’un Pôle emploi ou celle du siège du Medef où les forces policières avaient été le plus décuplées et les camarades embarqués sévèrement dans les fourgons policiers ; le siège patronal est le blockhaus le plus sanctuarisé de France ! A la question : est-ce qu’il n’y a pas une crise de surproduction qui fait que les voitures Peugeot sont invendables parce que trop chères, qui bute sur une réalité où la plupart des prolétaires ne peuvent acheter que des voitures d’occasion… les intervenants en grève de PSA argumentèrent que cela était faux, que Peugeot figurait encore parmi les meilleures ventes en Europe et faisait la nique à Volkswagen, et qu’il y avait même en route des prototypes de véhicules fonctionnant sans essence. Comment expliquer alors que Peugeot ait programmé une telle masse de licenciements ?
Après qu’une partie de la discussion ait ondoyé sur une description informative du déroulement de la grève, le fond du problème ressurgit un peu plus tard. Un camarade de « La Mouette » insista sur la gravité de la crise, après que José d’Aulnay ait estimé que « la crise a bon dos » et qu’il y a de l’argent. L’autre camarade avait objecté en soulignant la surproduction de voitures dans les autres pays, notamment en Chine où des parkings entiers sont remplis de voitures invendues. Un autre camarade fît remarquer que l’impact de la crise n’était pas automatique pour la riposte des ouvriers, et que, par exemple, en 36 ou en 68 ce n’était pas une crise économique d’une telle ampleur qui avait provoqué l’insubordination des ouvriers.
A ce stade les camarades d’Aulnay insistèrent sur le fait  que, malheureusement, malgré leurs multiples démarches hors de l’usine, des rencontres avec ceux de Sanofi, Goodyear, etc., il fallait déplorer l’absence de solidarité des autres travailleurs amorphes (les retraités pa r contre sont les plus nombreux à verser à la caisse de grève…, soutien appréciable et qui bat en brèche la propagande sur les retraité repus et planqués…).
« C’est quand même incroyable, ajouta Samir, que tous ces travailleurs qui vont connaître le même sort que nous, ne se bougent pas quand on voit qu’en face la droite avec cette histoire délirante de mariage pour tous mobilise des foules entières sur les avenues !… quand est-ce que nous les ouvriers on sera capable d’en faire autant ?».
Plusieurs types d’explications, après des confusions sur la notion d’opinion publique, répondirent à ce questionnement. D’abord le gouvernement et le patronat médiatisent à outrance telle ou telle grève de façon parcellaire comme s’il s’agissait d’un combat ringard, passéiste. Les grévistes eux-mêmes sont piégés dans l’organisation du « spectacle » des « actions coups de poing » puisque la masse des autres prolétaires est réduite à l’état de « spectateurs » avec la même compassion que soulignée au début du débat : « eh oui les pauvres ouvriers d’Aulnay sont sacrifiés dans la compétition mondiale… on n’y peut rien… leurs voitures sont plus chères que celles des marques étrangères » (un intervenant avait dérapé en disant qu’il estimait qu’il était préférable d’acheter des voitures produites en France…, rabroué par un autre contre tout patriotisme économique). Les syndicats ne font rien pour étendre et coordonner les luttes sinon leurs permanents ne seraient plus rétribués par l’Etat. Il existe un « chacun pour soi » ancien qui pousse la plupart à la politique de l’autruche. Enfin il existe aussi des attentes invraisemblables d’une amélioration parce qu’il y a un gouvernement de gauche quoiqu’il peine à tenir ses promesses électorales de « croissance ».
Donc il ne s’agit pas d’accuser simplement les autres prolétaires d’amorphisme dans une situation où les attaques restent sélectives, dispersées, touchent des entreprises devenues obsolètes comme Pétroplus, où comme Spanghero accusé de malversations sur les produits, ou Virgin Mégastore victime de la concurrence d’internet. Et dans une ambiance où tous les partenaires assurent se faire des cheveux blancs pour retrouver un « repreneur ». Le capitalisme n’a pas de repreneur, il veut continuer en généralisant la misère. Il se révèle donc comme incapable. Les solutions dites alternatives sont du pipeau : l’autogestion est une farce, la nationalisation a servi à reconstruire le pays après guerre. Les SCOP servent à des cartels syndicaux. Les questions posées par les luttes actuelles posent la question de la prise du pouvoir par les Conseils ouvriers et d’établir la dictature du prolétariat (la réflexion était de mon cru et fît tiquer certains dans la salle).

Comment réaliser l'unité dans la lutte en extension? Importante question à laquelle il fût répondu comme ceci: il ne s'agit pas d'être les représentants commerciaux bis de telle ou telle firme, on est pas là pour vanter la qualité de telle marque d'automobile sinon les ouvriers de Spanghero victimes de l'utilisation de produits frelatés ne peuvent se défendre en vantant la qualité de leur viande; il faut donc mettre en avant les revendications communes: maintien de l'emploi ou restructuration convenable, et si la lutte est devenue unitaire et que par exemple ceux de PSA ont gagné, ils ne laissent pas tomber ceux de Spanghero ou de Virgin; à l'Etat de se démerder pour nous fournir des emplois sinon ceux qui ont connu une grève victorieuse peuvent se remettre en lutte en solidarité avec les parents pauvres de telle autre industrie.
Une partie de la discussion s’efforça ensuite de réfléchir aux contradictions du capitalisme ; pour l’un ces contradictions peuvent ouvrir des issues à la confrontation des classes quand pour un autre il ne faut rien attendre des contradictions du capitalisme.
Cette opposition n’était pourtant pas nette, car, comme il le fut souligné, la principale contradiction du capitalisme c’est la guerre. Le libéralisme capitaliste mondialisé prône partout la paix mais en réalité favorise la guerre partout. Et c’est le camarade Samir d’Aulnay qui mit le doigt où çà fait mal en rappelant que les premiers projets de licenciements massifs de PSA dataient des mesures de rétorsion exigées contre l’Iran par les Etats Unis. En effet, pour le coup c’est un marché de 25.000 voitures qui passait sous le nez de PSA. Inutile de dire que pour tous les présents il s’agit bien d’une soumission de la bourgeoisie française, comme au Mali, aux désidératas de l’impérialisme dominant. Obama ne veut plus se mêler des guerres externes mais y pousse les alliés européens d’une façon ou d’une autre. Sous Chirac, le refus de la France de participer à l’effort de l’empire US avait été payé très cher. En gros, les ouvriers de PSA ont donc été en première ligne pour payer les pots cassés des vassaux français.  Ce qui a fait rappeler à un camarade que les révolutions sont souvent sorties de la lutte contre la guerre, mais après des centaines de milliers de morts et que tant qu’un tel sacrifice n’est pas imposé on peut comprendre que la masse des ouvriers croit encore possible de reculer les échéances. De ce point de vue, la lutte des ouvriers de PSA est en effet historique et s’en prend non simplement au patronat, qui n’est qu’une partie de l’Etat, mais au cœur de l’enfumage idéologique sur la raison des licenciements. Le camarade Samir expliqua longuement à son tour que la grève de janvier 2013 n’était pas advenue par hasard et qu’elle était le fruit d’une longue préparation à la suite des échecs des grèves des années précédentes en particulier celle de 1982, ne sachant (il n'était pas né) que cette grève eut lieu dans une vague de luttes internationales de la Pologne à la Grande Bretagne, et qu’une telle dynamique n’existait pas encore malgré l’avalanche des licenciements en Espagne et Italie.
Une camarade éleva enfin le niveau de la discussion en posant la question de la nécessité de la convergence des luttes, soulignant les nombreuses magouilles autour de cette histoire de convergences (cf. voir mon article " Convergences des luttes … vers les impasses syndicales et juridiques", mais pas convergence au singulier ). Il faut disait-elle qu’il y ait une véritable convergence des luttes en cours qui échappe au contrôle des syndicats et des partis.
C’était évidemment la clé de ce débat. Un autre camarade posait donc en gros à son tour la question : comment sauter par-dessus tous ceux qui veulent phagocyter notre lutte ? Il lui fût répondu que la seule manière de réduire à néant tous les manipulateurs ou fossoyeurs de la lutte était d’exiger des AG ouvertes à tous, au passant de la rue, au chômeur, au flic même car, comme disait Marx, la lutte de classes a besoin de la lumière du jour, que nous ne sommes pas des terroristes cachotiers (plusieurs camarades étaient intervenus ponctuellement pour dénoncer le fait que la bourgeoisie tente de nous assimiler à la racaille barbue ou aux terroristes). Les petits caïds d'un syndicalisme étroit des groupes trotskystes ou d'autres n'ont jamais tant de pouvoir que quand chacun reste enfermé frileusement dans sa boite ou dans la corporation de la corporation.

Deux jeunes filles, qui n’avaient jamais travaillé, émirent des objections contre une lutte étroitement focalisée sur la défense du salariat et qu’il fallait certes tous ensemble lutter contre le système mais sans se limiter à la sauvegarde des emplois de telle usine (mais je ne suis pas certain d’avoir compris leur interrogation de toute manière marginale et reflet d’une jeunesse déboussolée). En d’autres temps, de sévères révolutionnaires moralistes eussent tancés d’aussi superficielles jeunes filles, mais, ayant laissé le soin de répondre aux camarades d’Aulnay, nous fûmes agréablement surpris de leur voir répondre avec correction et intelligence à ces naïvetés compréhensibles.
« Bien sûr personne n’a envie d’aller travailler dans une usine de merde, mais il nous faut bouffer et conserver notre dignité. Nous sommes bien sûr pour l’abolition du salariat, mais ce n’est pas encore l’heure. Notre combat, s’il est victorieux, permettra aux jeunes diplômés d’être embauchés à des conditions respectables sinon on va tous retomber dans le XIXe siècle. Et nous misons encore sur notre victoire ». C’était la conclusion naturelle et saluée par tous les présents de José.
Il faut signaler que, comme j’avais évoqué la grande Rosa Luxemburg (« la révolution n’est que l’aboutissement d’une longue série de défaites », un camarade d’Aulnay répondit que, même défaits, ils continueraient à lutter sous d’autres formes, et qu’en plus des camarades espagnols les ont invité à venir les voir à Barcelone bientôt. Je ne me suis pas gêné pour saluer une dynamique internationaliste de leur lutte.
Après avoir salué et félicité plusieurs des camarades, je les ai quittés avec l’envie de chialer.
PS : le débat a été filmé en son intégralité par deux cameramen dont un de la radio Fréquence Paris Plurielle. Le numéro 228 de la revue « Courant alternatif » (mars 2013) comporte deux excellents articles sur la lutte des travailleurs de PSA Aulnay. On y trouve des pépites :
«C’est bien l’industrie automobile qui fut le moteur (ah !ah !) de la société d’après guerre (…) La restructuration du capital tel que nous la subissons aujourd’hui (…) crise classique de surproduction) frappe donc naturellement de plein fouet la production automobile, et en particulier PSA. (…) La problématique syndicale à Aulnay, comme dans tout le groupe PSA, découle de l’histoire tourmentée de la gestion de l’exploitation de la main d’œuvre par la direction du groupe automobile (…) La CGT quant à elle tire sa légitimité et son crédit des conflits qu’elle a conduits en 2007 pour des augmentations de salaires, mais de manière plus ancienne du combat historique de 1982 durant lequel les ouvriers immigrés de l’usine ont obtenu après une âpre lutte, la liberté syndicale et d’une manière générale une dignité jusque là bafouée. Pourtant ce n’est pas sur cette tradition de combat que le syndicat a choisi de miser. Dans un premier temps celui-ci a réclamé l’intervention de l’Etat, et le maintien intégral de la production sur le site. Ne pouvant obtenir la tenue de ces fameuses réunions tripartites (Etat, patronat et syndicat), la CGT a poussé au déclenchement de la grève, en maintenant cependant un discours productiviste et légaliste (contre les patrons voyous et les ouvriers pas casseurs). On ne révélera aucun secret en soulignant que la direction du syndicat est sous la coupe de Lutte Ouvrière (Jean-Pierre Mercier, le secrétaire du syndicat CGT a été le porte-parole de Nathalie Arthaud lors de la dernière élection présidentielle et LO a présente des ouvriers de PSA comme candidats lors des législatives), organisation présente dans certains conseils municipaux de Seine Saint-Denis (Philippe Julien est conseiller municipal de Saint-Denis et Geneviève Reminger est élue au conseil municipal de Bagnolet). C’est donc toute une stratégie politique qui se trouve interrogée ».

PETIT RAPPEL DU CIRQUE "CONVERGENCES", voici ce qu'on pouvait lire en février sur la colonne gauche aléatoire (que je dégraisse régulièrement des articles plus liés à l'actualité) de mon blog:


Convergences des luttes... PCHITT!!!
On allait voir ce qu'on allait voir! Le 12 février 2013"l'explosion sociale" était en vue, le ministre de l'Intérieur tremblait dans l'attente des violences des ouvriers floués de l'automobile; en haut lieu ne disait-on pas craindre une "action musclée" de l'extrême gauche? Sur les blogs syndicrates anarcheux n'annonçait-on pas le grand soir des coordinations basiques des grincheux de Renault, PSA, Goodyear, Sanofi, Candia... Promesses de violences... promesses de poivrot syndical! Plus de 80% des lecteurs du Parisien, si perméables à la propaganda et aux questions bêtes, avouaient craindre l'explosion sociale (cf. plus bas dans cette colonne)! Vous vous souvenez de mon article du 7 février qui se moquait de ces roulements d'épaule et autres bombages de torse? Rien, il ne s'est rien passé le 12 février, et on est le 14. Tout est dans la manière syndicrate, dans la gueulante gauchiste, on rue, on hue, on menace de l'émeute finale et le pompier social refait surface sous l'anar badgé et échevelé. Tel est le syndicalisme, outré dans le verbe et pisse-froid dans la théorie. Compte-rendu sur CGT Philips Dreux, à chier:
"Des travailleurs en colère et dignes face aux patrons et à la police de Valls:
Journée de contestation des travailleurs en luttes à Reuil Malmaison, des milliers de salariés entreprises menacés de licenciements sont venus devant le siège de Goodyear en solidarité avec les«Goodyear» partis ce mardi au petit matin de leur usine d'Amiens-Nord pour faire entendre leurs voix contre la fermeture de leur site.

Au grand dam du ministre de l’intérieure manuel valls, aucun débordement n’a été constaté, la seule violence observait découle d’un gouvernement de gauche qui prône le dialogue social par le déploiement des forces de l’ordre afin de montrer aux travailleurs dans quel camp le gouvernement PS se range. « Du jamais vu, autant de police pour un comité central d'entreprise où les salariés viennent dire qu'ils veulent garder leur emploi", a regretté pour sa part le délégué CGT Goodyear, Mickael Wamen.

La réunion entre direction et organisations syndicales n’a rien apporté de nouveau la présentation des livres concernant l’argumentaire économique et mesures d'accompagnement pour la fermeture de l'usine d’Amiens. Le prochain rendez-vous est fixé au 7 mars. Les hostilités sont ouvertes.

Néanmoins, ce mardi, une grande majorité de travailleurs ont répondu à l'appel de la CGT Goodyear. Des salariés de Sanofi, Fralib, Ford et PSA ArcelorMittal Lactel et bien d’autres, une efflorescence de la convergence depuis le grand meeting du 24 janvier de cette année à sciences Po, contre les licenciements et pour la convergence des luttes semble orienter les travailleurs vers une stratégie d’un programme commun face au démantèlement de l’emploi".
Ce langage de flic syndical "responsable", bien trempé au biberon stalinien, qui promeut la grosse casse la veille d'un pet de souris ne craint pas plus les fautes d'orthographes grossières que "l'efflorescence" d'un vocabulaire mal maîtrisé et désuet. Pour l'explosion sociale, faudra savoir attendre. Mais continuer à se mobiliser selon les humeurs des chefaillons syndicaux de tout poil. Parait qu'à la fin du meeting, un caïd basique a déclaré: "rentrez chez vous les mecs,on s'occupe du reste"!

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