PAGES PROLETARIENNES

lundi 5 mars 2012

LES "INVISIBLES": crève-la-faim en fin de droits, disparaissez!


Dans les permanences d'élus, la détresse sociale des "invisibles" (titre de l'article de l'immonde ci-dessous...)

Traduit ainsi: « en avant pour les crève-la-faim en fin de droits »

Autant le terme « indignés » était et est ridicule, quoique juste pour caractériser les émois sentimentaux de la petite bourgeoisie en déshérence, autant la caractérisation des chômeurs comme « invisibles » est hélas pertinente, et j’ajouterai même celle de « qui n’existent pas », voire qui n’ont pas le droit à l’existence ni sociale, ni politique, ni, surtout, personnelle.

Ce genre d’article dans un journal bourgeois est toujours intéressant dans la mesure où il relève du domaine de « l’enquête » sans parti pris, permet de fournir une vision plus étendue de la misère, mais aucune solution politique ne transparaît. Le journaliste se contente de décrire pourtant avec un autre parti pris, pourri et mensonger, celui de faire croire que « les élus » tentent de faire quelque chose. C’est bien le plus gros mensonge, les « élus » sont élus d’abord pour s’en mettre plein les poches ; si « la politique ne rapportait pas, ils n’en feraient pas », dit un solide dicton populaire. De plus, ces faux derches auto-élus par leur parti mafia, reçoivent ces « invisibles », quémandeurs désespérés comme des mendiants, compatissent et les reconduisent à la porte, ou leur envoient les flics s’ils font du grabuge, ou les regardent se cramer eux-mêmes comme la mère de famille de six enfants qui s’est immolée dans la mairie (suicide qui n’émeut guère l’auteur de l’article puisque cette femme « avait été expulsée plusieurs fois pour impayés et violences »… Avec ce discours qui se veut objectif mais misérabiliste, on n’est pas loin de la dénonciation du « chômeur fainéant » de la camarilla oligarchique de Sarkozy. Que faire lorsqu’on est « sans emploi », laissé livré à soi-même par les incapables de pôle emploi, méprisé par les puissants ? Se suicide ? Certainement pas. Se grouper comme chômeurs, cela n’a jamais véritablement marché, le chômage a été parfaitement individualisé par la bourgeoisie avec un système d’aide compliqué et assistanciel. « Unité chômeurs-travailleurs », slogan gauchiste et maximaliste, aussi creux que l’unité de Mars et Jupiter ou des "visibles" et des "invisibles". La division raciale des quartiers ouvriers par la propagande électorale (droite bobards contre gauche angélique) tue aussi toute dynamique vers un regroupement des « invisibles ». Les tentatives de regroupement de chômeurs, au cours des dernières trente années en France en tout cas, se sont toujours immédiatement soldées par des échecs ; soit elles étaient des constitutions artificielles d’arrivistes gauchistes ou anarchistes, soit elles devenaient (dixit Pagat puis l’APEIS) des officines louches de l’Etat, consistant à enfermer le chômeur dans une curieuse spécificité féodale dénommée « assistanat ». L’idéologie bourgeoise (sarkozienne en l’occurrence) estime avec dédain que le chômeur est « en trop » et que donc il doit crever de faim en fin de droits, qu’il ait 20 ans, 40 ans ou 60 ans, et que donc il ne doit surtout pas percevoir une retraite lorsqu’il est vieux et malade. Sous les cris affolés des tueurs de l’UMP tétanisés à l’idée de perdre la place de pillards de l’Etat, les promesses tempérées du candidat Hollande ne donnent pas plus d’espoir à celles et ceux qu’on condamne au suicide et à la famine.

C’est révoltant et on a envie de devenir terroriste quand on voit autour de nous tous ces jeunes hommes de 40 ans et moins, ou plus, obligés de mendier un repas chez leurs parents, auxquels nul emploi n’est proposé. La politique de Sarkozy est une politique de nazi. Les nazis niaient leurs chambres à gaz, comme ces salopards de gouvernants nient qu’ils produisent le chômage et qu’ils poussent par milliers les prolétaires « en trop » à la déchéance, à l’autodestruction et à a mort.

Alors le problème pour les prolétaires « invisibles », pour qu’ils relèvent la tête, reste bien sûr de briser l’isolement, de constituer des comités de défense lors des rencontres aux restos du cœur par exemple, lors d’une expulsion d’un locataire dans le quartier (les ouvriers et les employés voient leurs revenus bouffés à 80% par les loyers faramineux), pour que peu à peu une vraie solution soit esquissée, qui concerne chômeurs et travailleurs, une revendication unitaire : puisque les capitalistes veulent nous faire payer leur crise de l’immobilier, leurs recels et détournements de biens sociaux (du petit patron de PME au ministre) : IL FAUT CESSER DE PAYER LES LOYERS !

Une telle revendication est unitaire et devrait permettre enfin aux actifs de se joindre enfin aux chômeurs, car la misère réelle qui est le produit de la démence libérale pose MAINTENANT VRAIMENT, la faim et le froid, la solitude et la mort, pour tous ces prolétaires jetés à la rue et tous ceux à qui est interdite même la dignité de prolétaire !

C’est le besoin de vivre, de ne pas se laisser mourir qui posera vraiment la nécessité du combat commun, non seulement pour manger à sa faim, ne pas vivre dans un carton à la rue, mais pour renverser l’Etat capitaliste, ses profiteurs et ses tueurs.

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Depuis quelques années et plus encore ces derniers mois, avec la crise qui redouble, les élus locaux sont sollicités par une population qu'ils n'avaient pas l'habitude de rencontrer dans leurs permanences. De plus en plus de jeunes, de travailleurs pauvres, de femmes seules, mais aussi de cadres, ou bien encore des retraités, viennent demander de l'aide dans les mairies et les conseils généraux.

Certes, la crise n'est pas nouvelle. "Les gens subissent la hausse du chômage depuis plusieurs années", rappelle Pierre Cohen, maire (PS) de Toulouse. Et toutes les catégories sociales ne sont pas touchées. Dans la Ville rose, "les cadres de l'aéronautique sont relativement épargnés", remarque le député de la Haute-Garonne.

Mais ceux qui, jusqu'ici, se sentaient à l'abri redoutent d'être exclus, tandis que les plus démunis ont de moins en moins l'espoir de s'en sortir. Du coup, les élus sont confrontés à la "désespérance" des uns, disent-ils, et au "pessimisme" des autres. Aujourd'hui, "en plus des populations très précaires, ceux qu'on voit dans nos permanences, ce sont les petites classes moyennes, cette France des invisibles, ces modestes "plus"", qui ne venaient guère, jusqu'ici, aux guichets des services sociaux, raconte Marie-Françoise Pérol-Dumont, présidente (PS) du conseil général de la Haute-Vienne.

A force, les élus voient leur rôle évoluer. Ils se définissent eux-mêmes comme des "protecteurs", comme "le dernier bouclier social", mais aussi comme des "intercesseurs", et ils se découvrent un rôle de "soutien moral".

"Quand je reçois les gens, ici, je ne sais jamais dans quel état psychologique je vais en sortir", dit Jérôme Guedj, 40 ans, qui tient pourtant des permanences depuis quatorze ans. "La dureté des situations est de plus en plus grande !" confie ce socialiste, président du conseil général de l'Essonne.

Entre la boucherie et le coiffeur, une affiche de François Hollande signale la permanence de M. Guedj au milieu du centre commercial de Massy. Ce jour-là, il bruine sur les hautes barres d'immeubles alentour. Chantal Duditlieux franchit la porte du local pour la première fois. "On n'a jamais rien demandé, aucune aide à qui que ce soit. Mais on se décourage", explique cette habitante de 63 ans. A côté d'elle, son fils Benjamin, 28 ans, cherche un emploi depuis la fin de ses études de droit. Hébergé par sa mère, il vit avec un revenu de solidarité active (RSA), depuis 2009, de quelque 400 euros mensuels. Ensemble, ils sont venus plaider auprès de M. Guedj une remise gracieuse du conseil général, qui réclame à Benjamin un trop-perçu de RSA.

Avant eux, ce jour-là, est entrée dans la permanence Marie-Hélène Sylla, 61 ans, mère de 9 enfants. "Je n'ai rien, M. Guedj, plus de revenu", a-t-elle glissé avec pudeur. D'une voix douce, cette ancienne secrétaire a raconté qu'elle emprunte à une amie "de quoi payer" son loyer, le temps de toucher sa retraite, qui ne lui est toujours pas versée.

Le logement, singulièrement en Ile-de-France, est devenu l'un des premiers motifs de démarche auprès des élus. "Il y a dix ans, dans mes permanences, sur dix habitants, j'avais huit demandes d'emploi, constate Stéphane Beaudet, maire (UMP) de Courcouronnes, dans le même département. Aujourd'hui, sur dix, huit vont me demander un logement."

"Les gens me demandent essentiellement des logements", confie Didier Paillard, maire (PCF) de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). "Ils sont dans des situations de plus en plus dramatiques", assure l'édile communiste, encore sous le choc, un samedi, dans sa mairie déserte. Trois jours plus tôt, une mère de 6 enfants s'est immolée dans les murs de l'hôtel de ville. En errance depuis des années, expulsée pour loyers impayés et violences, elle attendait en vain un nouveau toit.

Depuis 2007, la mairie a été le théâtre de deux autres tentatives d'immolation pour des motifs similaires. "Injuste et révoltant !" s'exclame M. Paillard. "Ce drame est injuste d'abord pour la personne. Il est injuste aussi pour Saint-Denis, la ville qui construit le plus grand nombre de logements dans la région", souligne le maire.

Aux dossiers de logement s'ajoute l'inflation des demandes d'emploi. "Il n'est plus rare que des gens, dans la rue, me glissent le CV de leur enfant qui cherche un boulot", raconte Jacqueline Gourault, maire (MoDem) de La Chaussée-Saint-Victor et sénatrice du Loir-et-Cher. "Je n'ai pas la prétention de faire concurrence à Pôle emploi !" plaisante Frédéric Valletoux, maire (UMP) de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Pourtant, dit-il, "il m'arrive de plus en plus souvent d'intervenir pour pousser un CV dans une entreprise".

Face aux institutions de plus en plus méfiantes, "on est là pour mettre de l'huile dans le système", commente M. Valletoux. A la demande de commerçants ou de particuliers qui peinent à obtenir un crédit, le maire de Fontainebleau décroche volontiers son téléphone pour appeler des banques.

"Pour toutes les populations, on est maire à tout faire !" finit par s'agacer M. Beaudet. "Même le petit-bourgeois vient me voir pour que j'intervienne auprès de France Télécom ou de La Poste parce qu'il a un problème !" raconte le maire de Courcouronnes, conseiller régional d'Ile-de-France.

S'ils sont de plus en plus sollicités, les élus savent aussi que certains publics rechignent à toute démarche. Parmi eux, les jeunes des cités, dont une partie s'est résignée à ne plus chercher d'emploi, ou des étrangers sans papiers, qui ont peur, ou encore, tout simplement, des familles qui ont honte de leur situation.

Pour détecter ces "oubliés", les élus vont au-devant d'eux. A Courcouronnes, un bus de la mairie stationne devant les écoles maternelles, et les parents peuvent venir y exposer leurs difficultés. Chaque premier jour du mois, Mme Pérol-Dumont tient sa permanence au marché de Bellac. "Des femmes seules sans ressources viennent me voir, raconte la présidente du conseil général de la Haute-Vienne. Des retraités me confient qu'ils n'ont plus les moyens de payer la maison de repos de leurs parents."

Autre lieu d'observation pour les élus, Les Restos du coeur. "C'est dans ce genre d'endroit qu'on voit que la société laisse de plus en plus de monde au bord de la route", observe Adeline Hazan, maire (PS) de Reims. A Noël, "j'ai même rencontré un ancien agent de la mairie, retraité, et sa femme venir chercher un colis pour offrir un dîner de réveillon à leurs enfants", se souvient-elle, émue.

A force de voir les "plus démunis s'enfoncer" et les "plus modestes décrocher", les élus ne cachent plus, parfois, leur sentiment d'impuissance. "Ça fait dix ans qu'on bosse comme des cinglés, qu'on essaye d'aider les familles avec les moyens microscopiques qui sont les nôtres. Malgré nos efforts, je regarde la population s'appauvrir", se désespère le maire de Courcouronnes. "Nous n'avons, nous, les élus, d'autre pouvoir que de mettre des serpillières sur des incendies", se désole Mme Pérol-Dumont. "On a parfois l'impression d'être devant un puits sans fond", avoue le maire de Toulouse.

Ce n'est pas faute de chercher de nouveaux filets de protection. Face à la hausse du coût du logement, la ville de Reims a modifié le mode de calcul de ses aides financières. Le montant des versements est fonction du poids des charges de logement et de chauffage dans les dépenses des habitants, et non plus seulement de leurs déclarations de revenus. Le département de la Haute-Vienne a créé un fonds pour combler les impayés de cantines. En Essonne, le conseil général finance des maisons de retraite.

Mais c'est aussi, paradoxalement, auprès de la population que les élus trouvent l'antidote à leur découragement. "Sans doute parce qu'ils se sentent eux-mêmes fragilisés, les gens stigmatisent moins les SDF", constate M. Cohen. "On observe des élans de solidarité envers les plus pauvres qu'on ne voyait pas avant", assure le maire de Toulouse. A Saint-Denis, M. Paillard voit "le retour d'un besoin de collectif, d'une envie de construire ensemble". Dans certains quartiers, raconte-t-il, les habitants se sont spontanément regroupés pour organiser la garde des enfants des parents qui partent faire des ménages à Roissy très tôt le matin. "Les gens ont la volonté de s'en sortir ! Ils ont la niaque ! C'est ce qui nous sauve un peu !" sourit soudain le maire de Saint-Denis, dans son bureau à l'ombre de la basilique.

Béatrice Jérôme

Article paru dans l'édition du Monde du 04.03.12

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