PAGES PROLETARIENNES

mardi 27 juillet 2010

VOUS ETES EN DANGER ? APPUYEZ SUR LA TOUCHE ETOILE…


















(Il n’y a plus d’interlocuteur au numéro que vous avez demandé)



« Peut être est-ce encore l’innocence qui réussit le plus facilement en ce monde à travers le chaos des éléments... » . Kafka, La Métamorphose
«Quand j'appelle une entreprise, je voudrais parler à un être humain » Matthews – Gordon (inventeur de la messagerie vocale).


UNE MISE EN DANGER DE LA VIE D’AUTRUI

Vous êtes souvent en colère lorsque vous appelez une administration, un des derniers services publics, une compagnie d’internet, une compagnie d’assurance, un dispensaire, la Poste, ERDF ou la compagnie Veolia. Vous êtes excédé parce qu’après avoir suivi les consignes de la machine stéréotypée elle vous répond froidement et invariablement: « nous n’avons toujours pas saisi votre message », puis « veuillez recommencer ». Ma dernière déconvenue montre l’irresponsabilité de cette automatisation généralisée dans le cas de ERDF, bâtard d’EDF dérèglementé. Je désirais joindre en urgence le service dépannage. J’avais bien suivi la première indication de la voix neutre de la machine inhumaine : « le numéro de dépannage se trouve sur votre facture ». Quelques minutes plus tard, après avoir tapé 1 ou 2, je ne me rappelle plus, puis étoile ou dièse, la conversation kafkaïenne avec la machine se terminait ainsi : « Veuillez contacter votre fournisseur ! ».
J’étais atterré ! Les « fournisseurs », ces requins du profit comme Poweo, Direct Energie (mafia qui facture illégalement les chèques à 2,99 euros), etc. n’ont pas de service dépannage ! La privatisation d’EDF comme de France Télécom c’est comme les chemins de fer britanniques y a plus personne pour gérer « l’après-vente », « l’entretien », « la sécurité », « l’usure », « l’accident ». Pas grave me direz-vous, tout le monde s’en bat l’œil ! Si c’est grave. Au 141 avenue de la division Leclerc à Gentilly, un coffret répartiteur est brisé et à ciel ouvert. Au ras du trottoir, à la hauteur d’un enfant de trois ans, des câbles de 380 volts sont à nu. Cela fait des mois que l’épicier d’un côté et le restaurateur de l’autre l’ont « signalé » à ERDF. Personne n’est jamais venu. On sait simplement qu’un clochard est mort à cet endroit il y a quelque temps, on ne sait pourquoi. En tant qu’ancien de l’EDF, fier à bras, j’avais assuré les deux commerçants que j’allais faire le nécessaire.
La phrase de la machine « veuillez contacter votre fournisseur » résonne encore dans ma tête. J’ai honte depuis, honte de ce à quoi aboutit la dérèglementation des mannequins de la finance, aussi criminels que les pilotes de chasseurs bombardiers qui ne voient jamais éclater le corps de leurs victimes.
J’ai confectionné avec un carton et du scotch fourni par le restaurateur un faible couvercle de protection et j’ai marqué « danger 380 volts » avec le feutre qu’il m’a fourni. Le vent et la pluie balaieront bientôt ma fragile parade. Un jour un enfant ou un adulte qui trébuchera sera électrocuté et on mettra cela sur le compte de la fatalité.
Puis, prenant du champ, je me suis dit que nous sommes de plus en plus dans une société totalement autiste, cloisonnée par des « machines à communication » hermétiques et bien inventées pour rendre fou en se débarrassant du client, de toute récrimination, de tout compte à rendre, enfin une société à sens unique qui vous met en danger quotidiennement, et qui vise au profit sans limites en se fichant des risques pour la population.

Un Claude Allègre, demi-fou scientifique et conseiller de Sarkozy, ne voit pas d’inconvénient à ce que la police soit privatisée (cf. son livre interview « Les audaces de la vérité ») ; imaginez le répondeur automatisé des polices privées : « Tapez 1 s’il s’agit d’un meurtre, tapez 2 s’il s’agit d’un viol, tapez 3 s’il s’agit d’un vol à l’arraché. Pour toute autre communication ou dénonciation anonyme veuillez contacter votre police de quartier Bouygues Cops ou Vivendi cowboys », et « Votre attente téléphonique peut se retourner contre vous ».

Des groupes de gens désemparés tentent de faire passer le message sans écho de l’Etat autarcique et autiste, avec ses milliers de robots fonctionnaires, impavides exploiteurs du prolétariat : « Nous nous adressons à vous car l’univers kafkaïen de Orange / France Télécom nous y oblige. Les services clients, consommation et recouvrement ne communiquent pas entre eux, chacun vit dans son service, en autarcie visiblement, sans se soucier de ce qui se passe ou se dit ailleurs. Et nous les clients, nous sommes baladés de l’un à l’autre sans jamais pouvoir joindre un vrai responsable avec un nom, un grade… Notre nom à nous ils nous l’ont demandé mille fois, avec notre n° de téléphone, notre n° de client, mille fois nous avons répété la même histoire en refaisant tout l’historique, à des interlocuteurs anonymes sur des plateformes où les responsables leur disaient de raccrocher quand nous devenions trop insistants (hé oui, on a parfois l’ouïe fine !!). Alors quand au bout de trois mois on nous met en service restreint sans nous prévenir et que l’on s’en rend compte au moment où on veut appeler le médecin parce que notre fille a 39° de fièvre et qu’elle tousse… » (lu sur le web).

LA FOLLE TECHNOCRATIE QUI SE FICHE DE LA MAINTENANCE

Dès que vous avez signé un contrat pour une société de téléphonie-internet ou pour une gamme de « chaînes » de télévision, vous ne vous appartenez plus (et en plus vous avez souvent eu la bêtise de vous faire prélever automatiquement par la société suceuse) : VOUS NE POUVEZ PAS RESILIER VOTRE APPARTENANCE AU CAPITALISME. Un exemple suit.
Le mot RESILIER n’existe pas sur le site France Telecom ni sur Orange (ex Wanadoo). Ils ne digèrent pas d’avoir été privatisés et veulent se croire encore indispensables, management technocratique obtus des grandes firmes privées qui fait presque regretter la lourde bureaucratie nationalisée . Sur Orange il est question de déménagement, mais les crétins d’ingénieurs maison ne doutent pas que si vous déménagez vous conserverez le cordon ombilical… Orange. Donc on vous livre la question suivante, que vous n’avez pas posée et que vous n’avez pas envie de poser :
- « Comment conserver ma connexion haut débit après mon déménagement ? »
- Mais je ne veux plus en entendre parler, je veux ré-si-lier !!!
- - contacter « Mon assistance » ; sur quoi on lit : « Comment contacter le service client internet Orange ? » Réponse : sur Orange.fr Rubrique « Mon compte », « bien utiliser l’assistance »
- Vous décidez d’essayer encore le 12 14, la voix suave de la corde vocale maison vous apprend que : « suite à un changement de réglementation le service est désormais accessible par un numéro à six chiffres que vous pouvez trouver en tapant www… bla bla…., donc vous êtes sensé retourner sur internet dans votre quête du Graal qui va vous délivrer de l’immonde chaîne du net Orange.
- Décidant de vous calmer, vous cliquez à nouveau sur « nous contacter », terme avenant et qui doit ouvrir sur une fenêtre sans nul doute conviviale. Cela va de mal en pis. Des crétins de commerciaux ont pensé à vous profondément :
- « Vos questions commerciales avant de contacter le service client Orange… »
- Mais je me fous des questions commerciales, je veux ré-si-lier !
- Qu’à cela ne tienne : « Vérifiez que votre question n’a pas sa réponse… »
- Mais je m’en fous, cela fait une demi-heure que je ne trouve pas ni la question ni la réponse !
- « Bien utiliser le moteur de recherche… »
- Mais le moteur de recherche ne comporte pas le terme ré-si-lier !!! Ah si il y a le terme
- « contact », mais c’est une boucle, il ne sert à établir aucun contact !
- « Utilisez les formulaires de contact… »
- Mais ils sont introuvables les dits formulaires.
- « Mes contacts » ? Ah non, ce sont mes contacts, rien à voir avec Halloween Orange !
- Ah que je suis content, je trouve une ligne : « réclamations par téléphone… nom de dieu ! dans un premier temps écrire au « service national de consommation » à Bordeaux !!!!??
Mon cerveau se rembrunit. Un déclic se produit lorsque je visualise « espace client ». Je pense tenir le bon bout. Hélas, on ne me demande que mes nouvelles coordonnées de déménagement, en parlant à ma place : « je déménage/communique mes nouvelles coordonnées ». Alors j’enrage, je les leur met mes nouvelles coordonnées
- M.Cochondepayant
68 rue de la résiliation75000 Trouduc

Longtemps les boites nationalisées furent considérées comme des parangons de bureaucratie épaisse et inhumaine quand cette bureaucratie existait déjà dans n’importe quelle boite privée. La « privatisation » n’a pas supprimé la bureaucratie, elle l’a aggravé considérablement. Avant vous aviez des agences « physiques », des interlocuteurs, souvent uniques, pas toujours aimables, mais des êtres humains. Avec cette mondialisation de la téléphonie rigide et uniforme la bureaucratie de lourde est devenue affligeante, insultante pour la personne qui quémande. Elle est devenue le symbole de la chosification des rapports non seulement marchands mais humains, devenus mécaniques comme les formulaires administratifs ou les questions des sondages, ou les livrets de garantie de machine à laver : en aucun cas votre question ne peut avoir été oubliée, la liste des questions et des réponses vous est fournie, par conséquent n’essayez pas d’inventer une question de votre cru, elle n’est pas plausible de toute façon et vous dérangeriez « l’institution commerciale » qui a fait l’effort de s’aligner sur le modèle de messagerie vocale du monde entier ou plutôt de toutes les entreprises capitalistes de la planète. Pensez : on est si nombreux, que pourrait bien gérer une entreprise sans messagerie vocale ? C’est comme si vous demandiez à ERDF de cesser de faire tourner les centrales nucléaires et de faire revenir les livreurs de charbon de Lozère à Paris !
Vous rêviez encore à cette secrétaire de direction qui se fadait incontinent des appels téléphoniques incessants jadis pour votre seule jouissance de petit client individuel ? Et bien dansez maintenant, il n’y a plus d’interlocuteur au numéro que vous avez demandé, réparez vous-même votre panne ou achetez une autre machine ; pour votre bien nous sommes plusieurs concurrents sur le marché, si vous êtes pas content, allez voir ailleurs !

Qui est l’imbécile qui a inventé la messagerie vocale ? (ou vmail)

Un certainWilly Müller a inventé le répondeur automatique vers 1935. Il faisait trois mètres de haut. Le répondeur Ansafone a été inventé en 1960 par Kazuo Hashimoto pour Phonetel, d'abord écoulé aux Etats-Unis. Le trust Casio a créé le dispositif de réponse téléphonique moderne de l’industrie (TAD), modèle 400. En 1971, ce modèle « phone mate » est commercialement viable, il peut recevoir 20 messages sur une bande-bobine et un écouteur permet de récupérer les messages privés. Kazuo Haschimoto refait parler de lui en 1983 avec sa mise au point du Digital TAD (Telephone Answering Devices)
Le « pionnier » de la Voicemail (le « père » de la messagerie vocale) est Gordon Matthews. La nécessité d'une messagerie vocale n’est apparue que vers la fin du XXe siècle. Dans les années 1970 et au début des années 1980, le coût d'un appel téléphonique avait diminué et les communications d'affaires par téléphone avaient explosé La rentabilité du travail aussi et le capital ne pouvait pas se permettre de démultiplier le nombre de téléphonistes comme nous gardons en mémoire ces vastes salles des années 1930 avec des centaines d’employées pendues au téléphone par rangées entières et entassées. La croissance vertigineuse des clients de la « société de consommation » ne permettait plus à une ou deux secrétaires de gérer des milliers d’appels en temps réel, des appels en plus qui étaient souvent perdus (pendant l’heure du déjeuner ou au moment des pauses des employés). L’invention de la messagerie vocale obéit alors tout simplement à l’adage capitaliste « time is money » et non pas au mensonger « nous sommes à votre service 24 heures sur 24 » ! Les premières solutions ne permettaient pas de satisfaire la demande, la messagerie e-mail et les téléphones cellulaires n’existaient pas encore ; ils ne se généralisèrent que dans les années 1970 et 80. La messagerie vocale n'a vraiment commencé à se développer qu’à partir du milieu des années 1990. La solution initiale au problème de la communication par téléphone pour les entreprises avait été le centre de messagerie, service de réponse manuelle composée de quelques standardistes répondant de façon harassante à tout le monde ; souvent, la ligne principale étant occupée, il était impossible de joindre l’entreprise une journée entière (cf. « Monsieur, EDF est nul, j’ai passé toute la journée à essayer de vous joindre au téléphone et personne ne m’a répondu, vous en avez de la chance de détenir le monopole, avec le privé on serait plus libre ! »). Les malheureux préposés au téléphone filiaire d’époque et au standard crapoteux ne disposaient que de peu de temps pour offrir des réponses satisfaisantes. Le Capital a réagi donc par l’intronisation généralisée de la messagerie vocale qui a, pour lui, le double avantage : de supprimer des emplois et de se passer de fournir des réponses longues (time is money) ; à ERDF et à France Télécom, les employés sont à la fois « écoutés » en permanence mais aussi « chronométrés » sur le temps de réponse.

La polémique n’est pas close sur qui a inventé la messagerie vocale, il reste impossible de prouver qui fût le premier, dans la mesure où l’idée germa en même temps chez plusieurs « développeurs ». Malgré une mise en application interne réussie, ces deux sociétés ne réussirent pas à commercialiser l’invention.
L’inventeur le plus probable, dans la mesure seulement où il a su faire décoller commercialement l’invention de « Voicemail » serait Scott A.Jones. Scott est âgé de 25 ans en 1986 lorsqu’il affirme avoir inventé la première messagerie vocale efficace et dont tout le monde va avoir besoin. La même année, ce découvreur avisé, fonde immédiatement son entreprise la Boston Technology Inc. Il tombe bien au cœur du démarrage de la dérèglementation universelle du capitalisme en crise, avec la cession de AT & T, Bell Atlantic et autres "Baby Bells" qui ont vu l’intérêt d’approcher les inventeurs potentiels d’une messagerie vocale vraiment efficiente et rentable Plusieurs petits inventeurs avaient déjà déposés des demandes de brevet pour une technologie vocale capable de gérer l'ensemble des régions métropolitaines ; Scott les a tous doublés Il a énergiquement promis à Bell Atlantic de livrer en trois mois ce qui aurait pris des années avec ses concurrents, et au moment où les concurrents de Bell Atlantic . Le groupe technologique de Boston avec Scott a emporté la mise avec un système plus évolutif, plus fiable, plus conviviable (qu’ils disaient…). Or, c’est une règle de la marche en avant débridée du capitalisme que Marx avait déjà identifiée au milieu du XIXe siècle, chaque nouvelle invention de la « civilisation capitaliste » finit par se retourner contre elle. Ainsi en est-il de cette abominable machinerie vocale qui finit par être contre-productive, génère stress et suicide, et participe de la déshumanisation accélérée des rapports sociaux.

Je vais terminer par une note d’humour car seul l’humour nous sauve toujours de la bureaucratie totalitaire des machineries capitalistes. Voici ce que j’ai trouvé sur un blog en anglais et dont j’ai refait la traduction.

ICI L’ENFER, TAPEZ SUR ETOILE POUR ENTRER

« Je ne nie aucunement l’utilité de la messagerie vocale. Je l’ai toujours détestée mais jamais autant que récemment. Je souhaite, pour l'inventeur de la messagerie vocale, un traitement spécial pour l'éternité. Il sera à jamais voué à entendre :
Je vous remercie de votre appel. Vous appel est important pour nous. Afin d'accélérer votre évasion de l'enfer, s'il vous plaît, écoutez attentivement les options suivantes :
- Pour sortir de l'enfer, s'il vous plaît appuyez sur le 1 maintenant.
Vous avez choisi de quitter l'enfer. Pour sortir de l'enfer en français, veuillez appuyer sur le 1 maintenant.
Désolé nous n'avons pas pu identifier votre réponse. Veuillez appuyer sur 1 pour continuer à quitter l'Enfer.
(musique de Jeux interdits)
Si vous souhaitez quitter l'enfer, veuillez appuyer sur 1 ou 2, sinon appuyez sur dièse pour d'autres options.
- Vous avez choisi de quitter l'enfer. Veuillez appuyer sur 1 pour obtenir la documentation avec laquelle vous devriez rester dans l'enfer de la douleur éternelle ou appuyez sur 2 pour continuer.
Êtes-vous sûr de vouloir quitter l'enfer? Appuyez sur 1 pour Oui et 2 pour non»
Vous avez choisi de quitter l'enfer. Veuillez rester en ligne pendant que nous vous vous connectons au démon disponible suivant.
Nous sommes désolés, tous les démons sont actuellement en train de tourmenter d'autres malades. S'il vous plaît appuyez sur 1 pour continuer votre agonie en enfer, ou restez indéfiniment sur la ligne pour le démon disponible suivant.
(musique du fameux solo de Santana)
Nous sommes désolés pour votre attente interminable. S'il vous plaît appuyez sur 1 pour rester en enfer, 2 pour continuer à attendre dans l'angoisse ou 9 pour raccrocher et écourter votre agonie.
(marche funèbre de Chopin)
Je vous remercie de votre appel. Vous appel est important pour nous. Afin d'accélérer votre évasion de l'enfer, s'il vous plaît, veuillez écouter attentivement les options suivantes…
Until Hell freezes over (Jusqu'à ce que l'enfer gèle)


PS : Le site du médiateur de la République est conçu de la même manière autiste et imbécile que n’importe quelle messagerie vocale et strictement encadré par les formulaires déjà cuits et recuits par les technocrates qui épaulent Jean-Paul Delevoye. Citation :

« Pour toute question ou remarque relative au fonctionnement du site internet (ATTENTION toute saisine du Médiateur envoyée à cette adresse ne sera pas prise en compte, merci d'utiliser le formulaire prévu à cet effet ci dessus ) »

1 commentaire:

  1. Salut camarade
    Très bon blog, quoi que bénéficiant d'une présentation qui ne met pas en valeur les textes (page trop longue principalement obligeant à défiler).
    Bonne continuation

    Un jeune maoïste

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