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mardi 27 février 2024

COMMENT LES PAYSANS TOMBENT DANS LE PROLETARIAT? (3)

 


L'immigration massive n'est-elle pas un boomerang de la question paysanne et un poids ambigu dans le prolétariat

3 ème partie

ORIGINE SOCIALE DES MIGRANTS

Au cours des deux précédentes parties on a vu comment le capitalisme – sous ses habits libéral, nazi et stalinien - a fait tomber massivement les paysans dans le prolétariat par la guerre et la famine. Quittons 1914 et la Chine. Examinons comment se passe l'intégration ou la non intégration en France comme sans doute en général en Europe.. On verra qu'on ne peut définir le prolétariat comme une classe d'immigrés, définition wokiste de la secte qui régresse vers la conception tiers-mondiste bordiguiste des années 1970 où l'immigré était supposé être le stade suprême de la révolution prolétarienne à venir ; voire le principal porteur de la conscience de classe internationaliste.

Penchons-nous d'abord sur le rapport statistique de l'INSEE.

« En 2019-2020, les descendants d’immigrés âgés de 18 à 59 ans et vivant en logement ordinaire viennent plus souvent de milieux sociaux modestes que les personnes ni immigrées ni descendantes d’immigrés. 52 % des descendants d’immigrés ont un père qui était ouvrier à leurs 15 ans, contre 35 % pour la population sans ascendance migratoire ou ultramarine directe. Être issu d’un milieu ouvrier est particulièrement fréquent pour les descendants d’immigrés originaires du Maghreb, d’Afrique sahélienne ou d’Europe du Sud. Par ailleurs, les pères des descendants d’immigrés étaient plus souvent des ouvriers non qualifiés (dans 18 % des cas) que les pères des personnes sans ascendance migratoire ou ultramarine (10 %). Les descendants d’immigrés venant d’Afrique guinéenne ou centrale se distinguent par des origines sociales plus élevées : 20 % d’entre eux avaient un père cadre ou exerçant une profession libérale, contre 16 % des pères de personnes sans ascendance migratoire ou ultramarine. Cette surreprésentation des catégories sociales supérieures s’explique par la sélectivité de l’émigration dans ces pays : les personnes venant de catégories sociales plus élevées ont plus d’opportunités d’émigrer en France. Les descendants d’immigrés de Turquie ou du Moyen-Orient viennent quant à eux plus souvent d’un milieu agricole, artisan ou commerçant (22 %). 23 % des descendants de natifs d’Outre-mer ont un père qui était employé à leurs 15 ans, contre 10 % des personnes sans ascendance migratoire ou ultramarine.  10 % des descendants d’immigrés d’origine algérienne ont un père qui était agriculteur, artisan ou commerçant lorsqu’ils avaient 15 ans. 

Si les descendants d’immigrés viennent en moyenne de milieux plus modestes, la mobilité sociale entre générations est plus fréquente pour eux que pour les personnes sans ascendance migratoire ou ultramarine directe. Parmi les descendants d’immigrés âgés de 30 à 59 ans, seuls 19 % appartiennent à la même catégorie socioprofessionnelle que leur père lorsqu’ils avaient 15 ans, contre 26 % des personnes sans lien à la migration. La mobilité ascendante est forte : 33 % des descendants d’immigrés dont le père était ouvrier non qualifié deviennent cadres ou exercent une profession intermédiaire ; une telle mobilité concerne 27 % des personnes sans ascendance migratoire ou ultramarine (figure 2). La mobilité descendante est également plus fréquente chez les descendants de deux parents immigrés venant de milieux favorisés : 63 % de ceux dont le père était cadre appartiennent à une catégorie socioprofessionnelle salariée inférieure. Ces déclassements ne concernent que 44 % des descendants d’un seul parent immigré dont le père était cadre, et 50 % des personnes sans lien à la migration.

 L’accès à une catégorie sociale plus élevée que celle du père varie selon le sexe : quel que soit le statut des parents vis-à-vis de la migration, les hommes ont plus souvent des mobilités ascendantes que les femmes et moins souvent des mobilités descendantes. L’écart en faveur des hommes est cependant plus prononcé pour les personnes sans aucun parent immigré que pour celles en ayant au moins un : 28 % des hommes sans lien à la migration atteignent un statut social plus élevé que leur père, contre 21 % des femmes. Pour les descendants d’un seul parent immigré, cet écart est de 3 points, et de 5 points pour ceux ayant deux parents immigrés ».1

Ces statistiques de l'INSEE sont évidemment passionnantes. Chacun en tirera les conclusions qu'il veut. Pour ce qui me concerne voici la première. Contrairement à un vieux préjugé, qui était aussi le mien, en tout cas concernant les catégories étudiées, la majorité de ces immigrés, au sud de l'Europe ou depuis l'Est, proviennent de parents ouvriers. J'en vois certains ricaner et me dire : tu vois bien que les migrants sont bien tous des enfants de la classe ouvrière et pas des envahisseurs parasites ! Tu regardes trop CNEWS !

Or deux points viennent contredire ce satisfecit plus humanitaire que politique. Le premier est que les immigrés viennent de deux ouches différentes, pour ne pas dire classes : une couche plus élevée, petite bourgeoise qui « a les moyens de migrer ». Et le deuxième : la mobilité ascendante est deux fois plus importante pour « les catégories sociales supérieures » que pour ceux qui sont issus des couches plus défavorisées.

Ce constat implique une question : au de-là des diverses causes (crise, guerre, persécution politique) qu'est-ce qui se dégage de ces  statistiques : une volonté d'intégrer la classe ouvrière ou un simple arrivisme personnel ? Ces statistiques confirment bien que c'est la volonté de « monter » dans la nouvelle société d'adoption, volonté de grimper l'échelle sociale toutefois plus restreinte pour les femmes.Avant de montrer les implications d'un état d'esprit concurrentiel plutôt étranger à une conscience de classe non corporatiste, voyons comment fonctionne l'immigré de l'intérieur qu'il vienne de Bretagne ou de Lozère grâce à des sociologues honnêtes.

L'immigré de l'intérieur : MONTER A PARIS OU GRIMPER A L'USINE DU COIN

 En France comme en Italie, bien avant la crise de 1973, les attributs de la prospérité contribuaient à multiplier les déracinés, de nouveaux urbains déclassés. Les anciens ruraux étaient d’autant plus désorientés que l’émigration vers la ville signifie souvent la sortie d’une structure sociale paternaliste dominée par la figure autoritaire du père ou du patron, notamment en Toscane où les métayers tissent, selon l’expression locale, des « liens d’amours et de reconnaissance » avec les propriétaires .A l'époque, les cas d'agriculteurs qui quittent sont rares et continuent à travailler à la ferme tout en étant devenu cheminot à la SNCF, ce qui marque plus un souci de la « gagne » individuelle qu'une prédisposition à faire grève.

La socialisation ouvrière est le résultat d’un long processus de séparation entre travailleurs des champs et travailleurs de l’industrie, la genèse de la classe ouvrière française est étroitement imbriquée aux milieux agricoles. Souvent associés au XIXe siècle avec ce que l’on a appelé les « ouvriers paysans », les deux groupes se séparent progressivement au tournant du XIXe siècle et la classe ouvrière du XXe siècle se forme à partir d’une main-d’œuvre essentiellement d’origine agricole, y compris pour sa composante étrangère. Au début du XXIe siècle, les deux groupes se distinguent par un degré d’autoreproduction plus élevé que les autres catégories socioprofessionnelles: ceux qui deviennent agriculteurs ou ouvriers d’usine sont très majoritairement issus respectivement de familles agricoles ou ouvrières. La genèse et la morphologie des groupes ouvriers sont étroitement associées à la longue histoire du passage des agriculteurs et de leurs enfants dans l’industrie. Ce processus est souvent réduit à la question de « l’exode rural » qui a vu, à partir surtout de la fin du XIXe siècle, le départ de ruraux vers les villes. Ce type de migration est bien sûr massif et déterminant pour le monde ouvrier jusque dans les années 1970. Bien d’autres mouvements de sortie de l’agriculture, mais de proximité, étaient également à l’œuvre, en restant dans région et en conservant la même mentalité : s’embaucher dans des entreprises implantées dans les campagnes où il existe une longue histoire d’industrie rurale.

Après les usines les services publics sont demandeurs, Poste, SNCF, EDF, etc. La perception des nouveaux ouvriers aux origines agricoles par ceux qui sont depuis longtemps ancrés dans la condition ouvrière, peut être conflictuelle ; voire problématique pour les militants syndicaux qui ne comprennent pas leur refus de faire grève.

 En raison de leur poids démographique, les agriculteurs ont participé activement, jusqu’à aujourd’hui, à la constitution d’une main-d’œuvre industrielle. Anciens paysans et surtout enfants de paysans alimentent traditionnellement les mondes industriels qu’ils soient urbains ou ruraux. Si certaines industries propres aux espaces ruraux comme les mines et le textile déclinent au cours du XXe siècle, la présence industrielle en milieu rural se renouvelle continuellement. Elle est notamment relancée dans les années 1960 et 19702 dans le cadre d’une politique d’aménagement du territoire et de stratégies patronales favorisant la décentralisation industrielle. Des usines métallurgiques, du secteur automobile en particulier, accueillent une nouvelle vague d’ouvriers issus des milieux agricoles. 

Les fils d’agriculteurs restent nombreux à devenir ouvriers mais leur surreprésentation se réduit : le long processus qui, pendant deux siècles, a conduit les fils d’agriculteurs à former les nouveaux contingents de main-d’œuvre ouvrière s’achève lentement avec le rétrécissement des exploitations agricoles (à l'échelle de la France pas de la Chine). Et, comme le disait Bourdieu, une grande partie des enfants d’agriculteurs devenus ouvriers est-elle issue des groupes agricoles les plus modestes, ceux qui subissent une crise de reproduction non seulement économique mais aussi symbolique, les parents échouant à transmettre l’envie de devenir agriculteur. 

Les recherches ont montré que les ouvriers d’origine agricole étaient en général peu qualifiés en raison de leur scolarité courte. Certaines études ont aussi souligné que le départ de l’exploitation pour l’usine était subi plus que souhaité même si cela permettait d’améliorer ses conditions de vie. 

Déjà dans les années 1950, la population agricole baissait continuellement sous l’effet de la concentration des terres. Les villages s’ouvriérisaient en même temps que les « gros » agriculteurs éliminaient les « petits » dans un contexte où la présence d’emplois locaux dans l’industrie et l’artisanat facilitait ces sorties de l’agriculture.  

À la charnière des XIXe et XXe siècles, le mouvement de sortie de l’agriculture pour l’accession à des positions ouvrières a été un phénomène massif. L'attrait des services publics, pas seulement pour les enfants des agriculteurs, c'est Cependant, l'ouvrier-paysan le pari de la conversion professionnelle ou de l’école afin de stabiliser une condition ouvrière ou d’accéder aux emplois de bureau. Dans un contexte de craintes accrues quant à la précarité de l’emploi industriel, des enfants de métallos sont incités à rejoindre la SNCF même si les salaires y sont moins importants. Aux côtés des « cheminots paysans », une fraction des agents de la SNCF est d’ascendance « métallurgique ». Enfants d’agriculteurs et de métallos recherchent de meilleures conditions de travail que celles que connaissent leurs proches (et qu’eux-mêmes expérimentent souvent lors de leur premier emploi) sur les chaînes des usines (bruits, cadence, travail posté, etc.) 

Cependant, l'ouvrier-paysan conserve une idéologie entrepreneuriale et méritocratique, forte , valorisant une éthique de l’effort individuel et rentable. Cet état d'esprit est décrié par les anciens et les syndicalistes, pourtant eux-mêmes arrivistes de par leur fonction d'encadrement social. Du point de vue des ouvriers établis, la sortie de l’agriculture pour l’entrée à la SNCF n’est en effet pas perçue comme une promotion sociale mais plutôt comme le résultat d’un échec à se maintenir dans un monde considéré comme plus doté économiquement. Les cheminots d’origine agricole sont vus comme des descendants de « grandes familles » qui ont été obligés de devenir ouvriers.

Du point de vue des militants de la CGT, ces paysans ont subi une « déchéance » en intégrant le monde industriel. Mais, du fait de leur ancrage dans le monde agricole, associé à la détention d’un patrimoine mobilier et immobilier distinctif, ils sont aussi perçus comme des cheminots singuliers, plus dotés économiquement : ils habitent sur des terrains familiaux, possèdent des meubles et des machines de valeur, cumulent des activités rémunératrices grâce à leurs réseaux familiaux, etc. . Deux cheminots d’origine agricole, qui militent au syndicat depuis les années 1980, sont ainsi appelés les « barons rouges ». Ces cas sont des exceptions, car les « cheminots paysans » sont plutôt perçus dans le collectif militant comme des adversaires du syndicalisme. Jouant le jeu de la carrière professionnelle et de la bonne entente avec la direction de l’atelier, ils auraient une promotion plus facile et on les retrouverait surtout dans les bureaux, aux postes administratifs, et dans l’encadrement.

Pour certains syndicalistes, les « paysans » de l’atelier peuvent même être désignés comme des « anti-cheminots » dans le sens où ils ne participent pas aux actions collectives de défense du statut, aux grèves notamment. Ce sont des « jaunes ». Se rejouent dans l’univers usinier la rivalité et la stigmatisation croisée entre ouvriers et agriculteurs, les premiers étant vus par les seconds comme des « fainéants » et les seconds perçus par les premiers comme des « trouillards ». Les premiers ne sont pas de « vrais travailleurs ». Les seconds ne sont pas de « vrais cheminots ». Les conflits municipaux portent la trace de ces luttes : les agriculteurs, avec d’autres indépendants (artisans, commerçants, professions libérales, etc.), s’allient avec des membres de l’encadrement usinier contre les listes ouvrières de gauche. Ils dominent les conseils municipaux des petites localités jusqu’aux années 1980 et gardent depuis une surreprésentation qui contraste avec la marginalisation des classes populaires salariées.

 L'intégration sociale et de classe n'est pas impossible. La pression amicale des camarades d'atelier l fait comprendre à l'ouvrier-paysan qu’il peut résister à la hiérarchie et s’opposer aux ordres des supérieurs. Par rapport aux entretiens réalisés avec des cheminots d’ascendance ouvrière, son entretien est singulier car il est plein d’expressions de surprise devant les normes du monde ouvrier qu’il découvre. La présence syndicale dans cet atelier est importante. Rapidement, sollicité par les militants, il demande à celui qui l’a fait embaucher s’il doit se syndiquer.

Fils d'un père devenu ouvrier qui, lorsque cela bardait avec ma mère, j'étais témoin à chaque fois de l'insulte suprême : paysan ! Mon père haïssait pourtant le souvenir de sa jeunesse aliénée à la campagne. Bien avant qu'une autre société ne mette fin au capitalisme, celui-ci réussit à faire disparaître la paysannerie, laquelle, industrialisée et hiérarchisée, ne peut plus fonctionner qu'avec des employés ? Ce qu'il en reste ne doit plus être qu'une résidence secondaire à bobos.

La gentrification rurale met fin à la plongée dans le prolétariat

La sortie de l'agriculture se fait plus par le haut et les études supérieures. Contrairement aux petits exploitants, ici très peu se destinent à devenir ouvrier. Protégés par le patrimoine familial, en cas de difficultés scolaires, ils reprendront l'exploitation ou s'installeront indépendants dans la région. 

L'ancien modèle est aujourd'hui rattrapé par les jeunes agriculteurs bobos. Ces couples rénovateurs souvent plus diplômés et pourtant plus proches du salariat que les autres, se distinguent plus particulièrement par leurs épouses qui, toutes, ont une forme d'extériorité à l'agriculture locale, sont indépendantes grâce à un emploi en ville. En plusieurs endroits on peut constater que la dépaysannisation semble achevée. Leur embourgeoisement devient perceptible dans les loisirs, le rapport au corps, l'élégance vestimentaire, l'apparat des épouses, la consommation de véhicules pour certains luxueux, la pratique de la langue, les études supérieures de leurs enfants et leurs aspirations à devenir cadres... fleurissent leurs éoliennes, panneaux solaires et récupération de l’eau de pluie. On voit en Bretagne des fermes bio de quatre cents hectares avec des robots de traite, y compris en circuit court3.L'ascension sociale observée ici est conservatrice. Elle n'a pas conduit à une contestation symbolique de la réalité sociale.

Comme on le ressent lors du déroulement du conflit en ce moment, l' affrontement entre la Confédération paysanne et la FNSEA peut s'assimiler à un conflit entre les pôles économiques et culturels des élites agricoles. Sans solution de continuité. Ainsi, les positions différentes, l'espace social, positions en partie héritées mais bien plus produit récent de l'évolution des marchés agricoles et de la massification scolaire, contribuent en retour au renforcement des différenciations politiques, fissurant l'unité syndicale paysanne qui longtemps a réussi l'illusion d'unir en un groupe politique et social la grande diversité des mondes agricoles. Or, historiquement, contrairement à la classe ouvrière, la paysannerie a été incapable de s'unir ou de créer un parti homogène, du fait de sa nature...mercantile avant tout et sacralisant une propriété privée qui ne leur appartient même plus..

Le paysan reste un roublard dont l'Etat se méfie à juste titre (cf. les révélations lors des divorces). Comme les autres couches indépendantes, les agriculteurs mettent individuellement en  oeuvre diverses stratégies éprouvées de minimisation de leurs revenus déclarés, selon un continuum allant de la négociation à la fraude. Les montants déclarés au fisc ne sont pas contrôlés par un tiers, l'employeur, mais reposent sur la comptabilité de l'entreprise et incorporent de nombreuses exonérations.

 Causes des suicides

Karine Lemarchant est la vitrine qui tente de cacher la misère sexuelle et la solitude des agriculteurs4. Certains passent à l'acte parce qu'ils ont peu de chances de retrouver une compagne, mais la cause la plus probable reste l'endettement faramineux pendant de leur propre ambition démesurée et de la peur de « tomber » dans la condition ouvrière, alors qu'ils vivent dans des conditions de travail plus contraignantes et pires que ce que vivent la plupart des salariés. Lors des procès pour divorce, c'est un classique, c'est toujours la femme qui est désavantagée.

 Depuis 2018, les élus bourgeois régionaux ont mis en place un "coaching" à destination des agriculteurs et des éleveurs qui souhaitent changer de métier. Depuis quelques années, les cas d'agriculteurs qui quittent tout ne sont plus rares. Un accompagnement a d’ailleurs été mis en place pour des « personnes perdues ».

En grande difficulté face à la contraction du marché depuis 2021, les filières biologiques échangent depuis plus d'un an avec le ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire sur le soutien que l'Etat devrait apporter face à cette situation. En période de salon de l'agriculture, elle sont arrivées à la douloureuse conclusion que malgré l’objectif de presque doubler les surfaces bio en 5 ans, le soutien gouvernemental tant espéré ne vient pas (sic). De plus dans la crise le bio ne marche plus.

Enchaînés à l’impératif du rendement, montrés du doigt pour leurs pratiques polluantes, cernés par les résidences secondaires, les agriculteurs conventionnels du Morbihan observent avec désarroi le succès de leurs collègues qui se sont tournés vers le bio, la vente directe, les circuits courts, etc. Des cultures différentes cohabitent… sans qu’émerge une solution globale au modèle agricole dominant5. En revanche c'est leurs collègues bios maintenant qui se retournent vers eux : est-ce qu'on peut redevenir conventionnels ?

LE BOUMERANG DE L'IMMIGRATION MASSIVE

Comme seule explication au manque de bras « pour les tâches pénibles » les médias ressassent le refus du travail par les jeunes français fainéants. Mais, outre que les nouvelles générations ont hérité du mépris du travail manuel (explosion des emplois de bureaux), la véritable source de la prolétarisation, le monde rural, s'est tarie. Donc la véritable raison de l'arrivée massive des migrants n'est pas la guerre, la persécution politique, et. mais les besoins du capitalisme lui-même. En conclusion de cette étude je peux même affirmer que les migrants ne sont pas responsables de leur migration.

Au grand jadis le flux migratoire était naturel, cyclique, bien mal venu mais assimilable. Aujourd'hui c'est le symbole du chaos capitaliste qui déborde partout sans solution. Dans le passé, l'immigration était soluble dans la classe ouvrière, renforçait sa dimension internationaliste. Aujourd'hui pour une majorité qui va rester dans la misère, se faire humilier ou expulser, une solide minorité, complètement arriviste, débarque pour gravir l'ascension sociale. De plus en plus de toubibs arabes, des chefs de service et des journalistes noirs.J'ai vécu cette transformation au cours des dernières années de travail à EDF au début des années 2000. Je m'en fichait d'avoir une chef de service arabe, des contremaîtres ou chefs syndicaux noirs. Seule importe la compétence, pas vraiment heureuse souvent.... Or il s'agissait de l'installation de l'idéologie d'Etat « anti-raciste », admirable moyen de diviser une classe ouvrière qui est traditionnellement d'abord autochtone mais, outre qu'elle doit être caractérisée comme « couche moyenne » est vouée désormais à être une couche républicaine diversifiée. Cette immigration massive , encouragée par l'Etat et ses patrons, accessoirement par les révolutionnaires en chambre, n'est plus un renforcement du prolétariat mais un fait utilisé contre lui.




NOTES

2Cf. «La fin des paysans » (Mendras, 1967)

4On n’est donc pas surpris d’entendre un jeune homme déclarer : « Il y a plein de célibataires dans le coin. » Il fustige des émissions comme « L’amour est dans le pré », un programme de téléréalité très populaire (environ quatre millions de téléspectateurs à chaque épisode) diffusé depuis 2005 dans lequel des agriculteurs célibataires en quête du « grand amour » accueillent pendant une semaine dans leur ferme des « prétendantes » citadines. 

5 par  Maëlle Mariette.

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