PAGES PROLETARIENNES

vendredi 26 juin 2020

PARENTHESE ARCHIVISTE : du mérite de l’ancien sur le nouveau






AVERTISSEMENT



C’est sur la base de ce texte qu’un groupe de camarades de la Gauche Communiste (FFGCI) s’est unifié avec le groupe « Socialisme ou Barbarie ». Précédemment, il avait été discuté au sein de la Gauche et repoussé par une partie des membres de l’organisation, hostiles par ailleurs à une unification avec « S. ou B. ».

Au cours des discussions entre ses signataires et les camarades de « S. ou B. », il a été décidé d’y apporter certaines modifications. Très limitées, elles ne changent en rien le contenu politique du texte. La dernière partie concernant la tactique de lutte (Front unique, question coloniale, question paysanne) a été considérablement abrégée – un accord complet existe entre les camarades sur ces trois questions, mais ils ont estimé qu’elles étaient traitées de façon trop hâtive dans le texte et qu’il était préférable de les aborder ultérieurement de façon plus complète.

Le texte définitif sera publié dans le prochain numéro de la revue « Socialisme ou Barbarie ».



LETTRE DE VEGA : Perspectives et tâches

Paris le 3 mars 1950


La Fraction Française au P.C. Inter. D’Italie


Chers camarades,


La crise politique et organisationnelle de la Fraction française est arrivée à son point d’éclatement. Après le cycle de discussions avec le groupe « Socialisme ou Barbarie », les positions politiques au sein de la Fraction se sont précisées.

Un groupe de camarades estime qu’il n’y a pas de divergence fondamentale entre les positions de « S. ou B. », précisées au cours des discussions, et leurs propres conceptions. En ce qui concerne les perspectives et les tâches de l’avant-garde, ces dernières ont été exprimées pour l’essentiel dans le texte « Perspectives et tâches » (ci-joint) et avec lequel le groupe « Socialisme ou Barbarie » s’est déclaré d’accord.

Quant au rôle du parti révolutionnaire dans la lutte des classes, ses rapports avec la classe ouvrière, sa fonction dans la dictature du prolétariat ainsi que l’organisation même de celle-ci, cette tendance manifeste son désaccord avec une certaine conception existant, sur ce sujet, dans la Gauche ; bien que cette conception ne se soit clairement exprimée par une analyse critique de la III ème Internationale et de la révolution russe (qui seule aurait pu la justifier), elle n’en existe pas moins  et domine aujourd’hui la vie politique de la Gauche elle-même. Elle se concrétise dans les formules « Gouvernement du parti », « dictature du parti » et n’est en réalité que le reprise pure et simple des positions prises par les bolcheviques en Russie sous la pression d’une situation défavorable, positions qui ont été érigées en dogmes par l’Internationale dans la période de la bolchévisation.

Ces camarades estiment qu’une telle position n’est qu’un aspecte de l’attitude générale de la Gauche – et en particulier du part italien – qui, au lieu de représenter un effort d’analyse de la situation actuelle et, sur cette base, de dépassement des formulations et analyses périmées, traduit, au contraire, une cristallisation sur ces dernières qui se reflète dans toute son orientation. Ils affirment en conséquence qu’il est impossible de poser la question de l’adhésion du groupe « S. ou B. » à la GCI dans la mesure où celle-ci non seulement n’a pas pris position sur les problèmes fondamentaux de l’époque actuelle, mais semble, au contraire, vouloir nier leur existence même.

Ce groupe de camarades pense que l’effort de discussion et de clarification et d’analyse ne doit pas être subordonné à des questions, aujourd’hui formelles, d’organisation, et que, sur le plan français comme sur le plan international, un travail commun avec le groupe « s. ou b. » ne peut que faciliter ces tâches. Ils proposent donc à la Fraction française de se joindre à « S. ou B. » sur la base d’une déclaration politique commune et sous condition de l’ouverture d’une large discussion internationale avec le parti italien sur tous ces problèmes. Ces camarades se proposent donc de faire dans un document ultérieur une critique des positions existant dans la Gauche et plus haut mentionnées.

Ces camarades tiennent à se délimiter des conceptions exprimées par le camarade Lastérade et qui traduisent un retour à une interprétations non marxiste des rapports des classes, tout come celles que le camarade Chazé défend dans la mesure où il proclame son accord avec le courant (…) (suite du texte disparue).



Paris le 22 mars 1950



La Fraction française au CC du P.C. int. d’Italie



Chers camarades,

La dernière réunion de groupe a confirmé que huit camarades parmi lesquels les cam. Chazé, Vega, Camille, Gaspard, que vous connaissez et quatre autres éléments jeunes recrutés par l’intermédiaire des cercles d’études entendaient adhérer rapidement au groupe Chaulieu, ensuite des propositions de travail commun fait par ce groupe. Une proposition de la cam. Frédérique d’élaborer une plateforme de la FF qui serait présentée au groupe Chaulieu comme bas d’adhésion a été repoussée par ces camarades. Le résultat est que la Fraction se trouve divisée en deux, seuls les camarades italiens et trois camarades français se refusant à quitter la Gauche. Les huit entristes ont toutefois déclaré, dans la discussion de votre réponse à notre proposition d’envoi d’un délégué, qu’ils « ne nous donneraient pas satisfaction de brusquer la scission et attendraient la venue du délégué italien ». Ils ont décidé en réunion « fractionnelle » au terme d’une lettre insistant sur la nécessité d’envoyer un délégué.

A la réunion de groupe, ils ont relevé dans la condition organisationnelle que vous mettiez à la venue de celui-ci une conception « stalinienne » des rapports politiques.
Réunis également en « fraction », les camarades italiens et les trois camarades français qui se refusent à dissoudre la Fraction, adressent au Parti les conclusions et les propositions suivantes :

1°) Ils tiennent à protester pour la légèreté avec laquelle la lettre du Parti liquide la question de la nature politique du groupe Socialisme ou Barbarie avec les termes de « résidus du trotskysme ». Ni les documents, ni les thèses présentées par ce groupe dans la discussion commune ne justifient une telle appréciation. Celle-ci ne s’applique pas davantage aux positions exprimées dans la lettre du camarade Lastérade, à laquelle, semble-t-il, il est fait également allusion dans la lettre. Les camarades de la FF tiennent à insister auprès du CC sur les difficultés que lui suscitent une attitude aussi peu scrupuleuse de sa part.

2°) Ils relèvent une contradiction dans le fait d’affirmer d’une part « qu’il faut reconnaître qu’il n’existe pas d’unité de vue au sein du Parti sur une série de questions programmatiques ou d’appréciation de l’actuelle période historique  (rôle du parti dans la dictature-société bureaucratique)  et qu’il n’existe pas à ce sujet une littérature politique suffisante et de conclure, d’autre part, que le parti répondra aux camarades qui quitteraient la FF par « les idées et les programmes qu’ils présentent à tous (les autres regroupements) ».

3°) Ils considèrent que la seule base délimitative d’une organisation réside dans ses positions politiques et que l’exigence d’unité concerne ces positions politiques seules, sans qu’on puisse l’appliquer aux interprétations théoriques ni aux perspectives programmatiques qui correspondent à chaque nouvelle phase de la société capitaliste et de la lutte de classe et dont la discussion constitue le contenu de l’activité de la Fraction.

4°) En conséquence, ils entendent tenter un dernier effort pour éviter une scission, qui, réalisée dans la confusion, ne peut que retarder la clarification des positions doctrinales du groupe « Socialisme ou Barbarie » à laquelle le mouvement ne peut avoir qu’intérêt et que ruiner toute possibilité de vie politique et d’expression de la Fraction en la privant de ses éléments les plus actifs.

Sur la base des considérations du point 3, la FF a donc décidé d’envoyer au groupe Chaulieu la lettre que vous trouverez ici jointe et sur laquelle nous vous demandons une réponse immédiate.

La Fraction insiste sur la nécessité qu’un délégué du Parti vienne à Paris soutenir, en cas d’accord, cette lettre au nom du BI de la GCI, auprès des camarades qui veulent entrer dans le groupe Chaulieu, afin que puisse être prise une décision unanime des camarades de la FF, sans laquelle la scission la scission a toutes les chances de se produire. Nous rappelons à ce sujet qu’une normale réunion de groupe – c’est-à-dire avec les huit camarades « entristes » a été prévue pour le vendredi  31 mars. La FF demande au Parti d’envoyer son délégué à Paris pour cette date, ou à défaut, de nous prévenir à temps pour que nous puissions en convoquer une pour le dimanche 1 er avril.

5°) En ce qui concerne la lettre même, la Fraction rappelle au Parti qu’elle se justifie par l’inexistence des conditions d’une délimitation politique d’avec le groupe « Socialisme ou Barbarie ». Par ailleurs, la crise de la Fraction et le manque de littérature de la Gauche en général sur les problèmes d’interprétation de la phase capitaliste d’Etat de l’économie, sur la contre révolution russe et même sur le programme de la dictature du prolétariat en face à cette phase totalitaire (y compris le rôle du partilui-même) ne nous permet nullement de poursuivre isolément la clarification des thèses du groupe Chaulieu sur ces points.

La Fraction attire toute l’attention du Parti sur le caractère nouveau du problème politique et d’organisation posé par la proposition de travail commun du groupe « Socialisme ou Barbarie » en raison du caractère politique de ce groupe et des thèses qu’il présente sur les problèmes que nous sentons un malaise à avoir insuffisamment abordés, thèses que la Gauche n’a pas encor eu à affronter de la part d’aucun groupement  (ci-joint un document de la discussion entre les deux groupes, qui avec ceux qui vous ont déjà été envoyés, constitue tout ce que nous pouvons vous faire savoir de ce groupe.

Les camarades de la FF se réunissent à nouveau en réunion extraordinaire le dimanche 26 mars. Ils vous prient de répondre par retour et par exprès pour leur communiquer votre position sur le projet de lettre ci-joint et leur faire savoir s’ils peuvent compter sur un délégué.



Salutations fraternelles, pour la FF.



Dimanche 26 mars 1950



Chers amis,



Submergés que nous sommes par les textes, les polémiques et surtout par la rapidité des prises de position face à la crise de la FF, je n’ai guère eu le temps de répondre à la lettre du 23 février ; D’autre part, je crois que tu as reçu l’essentiel, sinon la totalité des textes, résolutions, lettres, etc. en présence puisque ta dernière lettre au groupe nous a été lue ce matin par Mothé qui fait état de ces documents. Dans ces conditions, tu es tenu au courant des mouvements d’opinion ! Je vais cependant essayer de te mettre sur ce papier quelques conclusions.

Tu auras vu qu’un groupe de camarades parmi lesquels Alberto (Vega), Camille, Gaspard, partisans de l’entrée dans le groupe Chaulieu, ceci sans demander auparavant à ce groupe un accord sur les positions historiques de la Gauche, avaient parallèlement conclu à la mort politique de la FF. En dehors de critiques parfaitement justifiées à l’adresse du Parti italien (conservatisme des positions face à l’IC, trop souvent même refus d’accorder une importance aux problèmes actuels du capitalisme d’Etat), ces camarades, obnubilés par l’adresse de Chaulieu, son audace théorique, sa facilité d’expression, sa nouveauté même, en sont venus à considérer comme nuls les principes d’action de la GCI comme sa filiation historique de luttes de l’expériences. En résumé, ces camarades en sont arrivés à confondre les positions politiques issues de l’expérience de la lutte des classes et de la tradition de lutte de la Gauche italienne, même si celles-ci présentent aujourd’hui des insuffisances, des lacunes et même des erreurs d’appréciation, avec des études théoriques, sorte de contribution purement intellectuelle à l’étude des phénomènes d’évolution de la société capitaliste, laquelle loin de pouvoir constituer une plateforme politique pour un groupe peut parfaitement se concevoir à l’intérieur des cadres d’une organisation existante, pourvu que celle-ci soit politiquement révolutionnaire et dispose d’une plateforme politique précise. Les dits camarades, out en se retranchant derrière les traits négatifs de la Gauche italienne, s’avèrent incapables de dresser eux-mêmes une critique de ces positions, aussi bien d’ailleurs que le groupe Chaulieu.

Alors quoi ? Où cela mène—il de scissionner, si le minimum pour une scission n’est pas donné, c’est-à-dire le désaccord politique sur une série de question principielles. Ce n’est pas le cas. Pour notre part (Mothé, Suzanne et les Italiens) nous reconnaissons l’impossibilité pratique de mener un quelconque travail d’avant-garde à Paris avec nos seules forces. D’autre part, nous ne voyons, dans la confusion actuelle des idéologies successives de Chaulieu, qu’une solution : admettre le groupe Chaulieu dans la GCI, sous réserve de l’accord de celui-ci sur les bases de la Plateforme politique du Parti italien, publiée en 19.

A l’intérieur d’une même organisation, il sera possible de déterminer si le groupe « S. ou B. » est constitué par des fumistes, des « académistes » ou des camarades de bonne volonté, égarés sur des routes de la recherche scientifique (hypothèse la moins redoutable). Il est bien entendu que notre position nous est dictée par deux données de fait.

La situation extrêmement confuse dans laquelle nous nous trouvons par la faute des « entristes » dans le groupe Chaulieu et aussi par le fait que nous avons été incapables, les uns et les autres, de clarifier les positions principales de la Gauche et de les développer (…).



DOCUMENTS POUR LA DISCUSSION (de S ou B)


Extraits de deux « textes d’orientation » suivants, du ponte Chaulieu/Castoriadis qui sont reproduits intégralement dans mon bouquin « La critique de « socialisme ou barbarie » par Lucien Laugier (2002, édition du pavé, à 50 exemplaires). J’ai été en remettre un exemplaire à Jacques Signorelli, ancien de S ou B, qui était un de mes voisins à Fontenay aux Roses (il vivait sans se connaître dans la même cité que notre regretté Jacquy Mamane) ; il avait apprécié les analyses critiques de Laugier, mais pas les miennes trop cciennes.*


LA NOTION DE CLASSE ET DU PARTI


1.La discussion  sur la notion de la classe et du parti, et sur les rapports respectifs de ces deux facteurs n’a pratiquement jamais été menée dans le mouvement marxiste d’une manière approfondie et correspondant au niveau scientifique général du marxisme (hi hi). Il est décevant de voir que les principales « positions » classiques présentées sur ce problème ont été défendues uniquement par des affirmations gratuites – « la classe d’elle-même ne peut arriver qu’au trade-unionisme, la conscience socialiste est inculquée de l’extérieur au prolétariat par l’intelligentsia petite bourgeoise » - ou bien la spontanéité de la classe la conduit à la révolution -, sans aucune tentative d’analyse sérieuse de la formation de la conscience de classe ; il est étonnant de constater que les « positions » qui ont été défendues par les groupes de gauche depuis 1923 ne sont qu’une resucée appauvrie de ces affirmations gratuites.

Ile serait aujourd’hui complètement inutile et insipide de reprendre cette discussion sur les bases traditionnelles, pour affirmer ou pour nier, sans preuves et en se servant uniquement « d’exemples » historiques convenablement choisis et préparés pour les besoins de la cause, la « limitation » ou la « spontanéité » de la classe. Ce qui est actuellement nécessaire, c’est d’appliquer pour la première fois la méthode marxiste – l’histoire du mouvement ouvrier lui-même et à la question de la formation de la conscience de classe du prolétariat. Cet exemple est aujourd’hui rendu possible par l’existence d’une expérience historique du mouvement ouvrier couvrant un siècle et demi, il est d’autre part indispensable, parce qu’il donne seul les moyens de répondre aux idéologues réactionnaires (bourgeois et bureaucrates) qui contestent la capacité révolutionnaire du prolétariat, de résoudre le problème posé par la dégénérescence successive de toutes les organisations se réclamant de la classe ouvrière et de poser sur une base correcte la question des rapports entre la classe et le parti.

L’importance de ces questions est telle, qu’il faut purement et simplement refuser le droit à l’existence politique aux courants et aux groupes qui, sur ces problèmes, restent muets, ou se bornent à perpétuer un empirisme depuis longtemps périmé…

2. Depuis la fondation de la III ème Internationale, la stratégie révolutionnaire d’ensemble a été posée sur une base fausse, qui continue à prévaloir parmi tous les courants issus du léninisme jusqu’aujourd’hui et fût (et reste) une des raisons de la carence de ces courants (qu’il s’agisse du bordighisme ou du trotskysme). Le développement du capitalisme et de la classe ouvrière et partant des conditions subjectives et objectives de la révolution) était considéré comme étant parvenu à son terme, au-delà duquel la décadence et le pourrissement tendent à s’emparer de toute la société (y compris le prolétariat) : la tâche considérable qui se posait était de construire les partis dans ces conditions qui ne pourraient jamais plus devenir favorables.

Cette conception déjà discutable en 1919 est aujourd’hui insoutenable théoriquement et défaitiste politiquement. Insoutenable car aucune base objective n’est offerte pour garantir cette construction indispensable du parti. Défaitiste, parce que si toutes les conditions de la révolution sont données, à l’exception du parti, et puisque ce parti n’a pas pu se construire pendant 30 années, on ne voit pas pourquoi il pourra le faire à l’avenir.

A cette conception en fin de compte superficielle il faut opposer une stratégie basée sur l’idée du développement des conditions objectives et subjectives de la révolution. Nous partons quant à nous de l’idée que les forces productives de l’humanité continuent à se développer, c’est-à-dire qu’à la fois la production des biens continue à croître et que les potentialités productives (technique) croissent encore plus ; (voir l’article sur « la consolidation temporaire du capitalisme mondial », n°3 de S ou B; où cette affirmation est prouvée statistiquement). Nous partons ensuite de l’idée que le prolétariat continue à croître en nombre et en importance (son nombre absolu, son poids relatif et son poids spécifique continuent à augmenter). Nous partons enfin et surtout de l’idée que les capacités subjectives se développent toujours. C’est de cette dernière idée, qui est le fond de la discussion actuelle et qui touche le plus directement l’élaboration d’une nouvelle stratégie prolétarienne. Lorsqu’on parle du développement de la capacité historique du prolétariat, il ne faut pas entendre ce développement comme une progression constante, uniforme et sans opposition, mais comme comportant des ruptures, des reculs apparents et surtout des contradictions très profondes. Ces contradictions se résument en celle-ci, qu’en même temps qu’il développe la conscience du prolétariat, le capitalisme développe à un degré inouï l’exploitation et partant l’aliénation de cette classe au sens le plus large du terme. Mais nous laisserons de côté dans ce texte les aspects négatifs du processus sur lequel il ne pourrait pas y avoir en gros de divergences.

3. Le développement de la capacité historique du prolétariat se traduit par le développement de sa culture, de son expérience, et de sa conscience.

Malgré et contre l’approfondissement de l’exploitation et de l’aliénation, le prolétariat participe au développement général de la culture au moins dans une proportion plus considérable que les autres classes de la société. L’abîme qui existait dans les formes précédentes de la société entre la culture de la classe exploiteuse et la non-culture des exploités a été supprimé ; d’autre part, et surtout, le développement de la technique et de l’économie du capitalisme moderne a comme condition indispensable le développement de la culture industrielle des producteurs. A la base du développement de la culture du prolétariat, aussi bien de la culture générale que de la culture industrielle, se trouve la nécessité pour la classe dominante de développer la production, qui implique fatalement le développement des aptitudes productives du prolétariat.

Tout aussi important que la culture industrielle est la culture sociale générale que s’approprie avidement le prolétariat. Il ne s’agit pas ici non plus d’une progression culturelle graduée et insensible, mais du fait que les grandes masses sont jetées brutalement dans la vie moderne, qui leur impose des conditions impliquant l’appropriation latente de toutes les formes de culture héritées ou en train de se créer et le rejet des autres qui sont en train d’être dépassées.

Si nous parlons de cultures du prolétariat, entendant par là la participation du prolétariat au développement de la conscience humaine en général, nous devons entendre par expérience du prolétariat la formation qui lui est propre en tant que classe exploitée de la société moderne, c’est-à-dire les éléments concernant sa situation de classe, sa lutte, ses buts et les moyens de celle-ci.

Cette expérience a comme origine précisément l’action propre du prolétariat dans deux sens : d’abord ce n’est que dans la mesure où le prolétariat envisage la société et sa propre situation comme une réalité à transformer qu’une expérience de classe peut être formée. Ensuite l’expérience du prolétariat se forme en tant qu’expérience non pas d’un individu ou d’un groupe, mais surtout (quoique non exclusivement), en tant qu’expérience objective ; c’est-à-dire à chaque étape importante la classe réalise, incarne le but et les moyens de sa lutte dans une forme donnée, qui prend par la même une réalité sociale… ».



o O o



Il y a ainsi des pages et des pages de ce jargon sociologique que Monsieur Castoriadis a jugé bon de reproduire dans ses œuvres complètes de fumiste psychanalyste, oui vrai fumiste comme l’ont compris à l’époque Mothé et les autres. On se demande comment la poignée de militants bordiguistes français a pu se laisser séduire par un langage aussi ampoulé et étranger au langage marxiste. L'arrogance de Castoriadis/Chaulieu justifie l'appel au secours au PC Int. du 22 mars (envoyez-nous un délégué!). Le radicalisme verbal de Chaulieu, qui étale son arrogance de « découvreur » (je vous ai souligné en gras sa prétention au début du texte) est pourtant puéril alors qu’il ne fait que recopier en seconde main le meilleur de Lénine et de Rosa, et qu’il a piqué le « conseillisme » à un Pannekoek encore vivant, sans respect pour lui.




LES PERSPECTIVES ET LES TACHES

(second texte de SB soumis à la discussion)


« Avoir une perspective pour un marxiste c’est avoir une orientation d’action (fortiche !). Dans cette mesure on peut dire qu’il existe un rapport étroit entre le programme révolutionnaire et la perspective révolutionnaire (quel oxymore !). Or ce qui caractérise essentiellement la situation de l’avant-garde à notre époque c’est qu’est remise en cause pour elle à la fois le programme et la perspective.

En effet le véritable point de départ d’une nouvelle prise de conscience par l’avant-garde de ses tâches réside dans la reconnaissance du caractère historiquement dépassé du programme socialiste défini comme suppression des rapports de propriété prévalant dans la société capitaliste classique et comme la nationalisation des moyens de production… ».



                                                                        


Tout est ainsi survolé superficiellement. Le capital s’est élevé au-dessus du simple monopole. Les bolcheviques avaient sous-estimé la tendance à la concentration du capital. Le capitalisme d’Etat russe n’aura été qu’une manifestation de cette tendance à la concentration accrue. Une troisième guerre mondiale vers l’extension de la domination « bureaucratique » russe. Il espère enfin qu’une avant-garde, de type léniniste pourtant, pourra apparaître avant cette troisième guerre mondiale.



On sait comment a fini Castoriadis, en particulier comme fervent défenseur du bloc US. L’intérêt de ce survol rapide, et de cette découverte de nouvelles correspondances entre minorités révolutionnaires tourne sur la fascination pour l’ancien et l’attirance pour le nouveau. La tradition de la Gauche italienne reste une référence indomptable dans la durée. Il existe encore dans le monde des militants qui défendent mordicus la théorie bordiguiste de prise du pouvoir par le parti, et qui font partie des générations renouvelées qui font toujours confiance à la capacité historique de la classe ouvrière. Du courant S ou B, il ne reste plus rien, sinon une référence pour la sociologie distinguée, quand Casto a compilé ses textes pour les accoler à son œuvre philosophique. Pourtant issu du trotskisme ce courant a produit des hommes de valeur, les Lyotard, Souyri, et même Henri Simon, mais, exceptée la courte existence de Pouvoir ouvrier et la Gauche Marxiste, rien de rien depuis le début des années 1970. Ce bâtard de l’opportunisme d’avant-guerre, devenu frère du stalinisme rangé des goulags, le trotskisme lui a survécu avec les mêmes tares politiques que S ou B avait bien su dénoncer, tantôt sous forme populiste syndicaliste, tantôt sous l’anarchisme de toutes les couleurs du NPA.

Il faut reconnaître que S ou B avait constitué un effort politique louable dans l’immédiat après-guerre et le profond désarroi que la guerre n’ait pas facilité une nouvelle révolution. La « nouveauté », ou la prétention à tout revoir en plus fort que la génération précédente, s’accompagne souvent d’un « élu de la providence », d’un chefaillon qui se gonfle les chevilles, dans à peu près tous les groupes. Castoriadis n’aura été que le Dr Raoult de l’époque de pandémie stalinienne, avec discours scientiste et mépris pour l’ancien « mouvement ».



Je souscris au propos de Mothé lorsqu’il dit que c’est S ou B qui aurait dû, dans l’absolu (et en se débarrassant de son guru) se fondre dans le PC Int. Les huit « déserteurs » du bordiguisme n’avaient accompli qu’une moitié du chemin (dépasser la conception du parti-Etat) et se sont fourvoyés dans l’impasse d’un groupe bâtard d’un courant de l’extrême gauche néo-stalinienne sans principes.

L’ancien mouvement partidaire portait pourtant l’avenir. Même le PC int. avec ses conceptions voisines du stalinisme sur le parti, gardait des principes marxistes qui lui ont permis de durer jusqu’à nos jours. Et puis, on n’avait pas attendu un nouveau guru issu du trotskisme dégénéré, il suffisait de connaître Pannekoek et de lire Rosa Luxemburg… On ne prêtait aucune importance à la GCF (Gauche Communiste de France avec son journal à prétention éphémère "L'étincelle" pâle copie franchouillarde de… L'iskra) qui avait été plus loin, bien avant les approches de Chaulieu/Castoriadis. Les huit « entristes » qui se sont égarés dans S ou B, se sont perdus ensuite dans la nature (sauf Chazé), et surtout n’ont rien apporté théoriquement ni de nouveau ni d’ancien.

Par contre, ceux qui sont restés fidèles à la continuité organisationnelle, les Marc Chirik et Lucien Laugier, ils nous ont transmis les principes et les leçons de cette époque. Chirik par un travail théorique au long terme via Ri et le CCI. Laugier, dans la solitude du mémorialiste, est arrivé aux mêmes conclusions, plus brillamment sur le plan littéraire mais avec moins d’impact que Chirik. Ces deux hommes ont montré que l’ancien peut ne pas être un frein au moderne s’il sait voir dans le moderne ce qui vérifie l’ancien et dans le moderne ce qui ne peut se séparer de l'ancien.


Le clinquant de l’historicisme universitaire qui fait croire à la brillance de S ou B face au « vieux monde bordiguiste » vous cachera pour l’éternité l’influence inévitable d’une petite fraction. La terreur de la fraction bordiguiste, Suzanne (Bordiga lui dit un jour d’aller se faire soigner et préférait correspondre avec Laugier) mais robuste combattante du prolétariat, inverse les clichés dans un courrier :

« …il n’était pas dit du tout que nous n’ayons été pour rien dans l’évolution du groupe Chaulieu ; je trouve au contraire des choses qui me semblent venir directement de nous et qui en tout cas diffèrent sensiblement des déclarations révisionnistes orales, dans l’affirmation : « qu’il faut reposer les problèmes à partir du point où Marx et ses successeurs l’ont fait et se placer dans une tradition, ne pas toucher aux positions marxistes avant que les événements sociaux ne les aient rendus clairement caduques » (*)


(*) p. 86 de mon livre, grâce soit rendu à François Langlais d’avoir sauvegardé et compilé ces textes, parce que les sectes n’ont pas d’archives ou les détruisent ; je ne comprends toujours pas qui a donné l’ordre de détruire les archives de RI il y a trente ans à Montrouge, et pourquoi ? même si j’ai réussi à en sauvegarder une grande partie ! On disposait d'archives rares sur tout le mouvement révolutionnaire prolétarien de l'avant-guerre, classées et annotées par Max.

Ces lettres retrouvées auraient pu être insérées dans mon édition de 2002 dédiée à Laugier, publié faute de moyens à 50 exemplaires, et il mériterait de trouver un éditeur vu la qualité des textes de Laugier et son décryptage du révisionnisme de S ou B.
Sur Laugier et les grands noms du mouvement révolutionnaire moderne occultés par la bien-pensance historique dominée par l'extrême gauche bourgeoise et leurs pères staliniens, lire "Notices biographiques 1915-2015", l'extraordinaire travail d'exhumation et de transmission de la mémoire de ces flambeaux marxistes de la perspective révolutionnaire plus loin que nos vies, par Philippe Bourrinet (je peux faire suivre sur demande le fichier, qui demande sans cesse à être renouvelé ou corrigé, un travail de Titan.




mardi 23 juin 2020

LE RACIALISME UN NOUVEAU FASCISME ?


« (...) arrêtquel est le rôle propre joué par l’anarchisme dans la révolution russe ? Il est devenu l’enseigne de voleurs et de pillards vulgaires ; c’est sous la raison sociale de "l’anarcho-communisme" qu’ont été commis une grande partie de ces innombrables vols et brigandages chez des particuliers qui, dans chaque période de dépression, de reflux momentané de la révolution, font rage. L’anarchisme dans la révolution russe n’est pas la théorie du prolétariat militant mais l’enseigne idéologique du Lumpenproletariat contre-révolutionnaire grondant comme une bande de requins dans le sillage du navire de guerre de la révolution. Et c’est ainsi sans doute que finit la carrière historique de l’anarchisme » (La grève de masse, Rosa Luxemburg, 1906)1.

Au sortir de la guerre, en 1945, Claude Lefort critique le fameux livre de Guérin, qu'il considère marxiste simpliste dans son analyse du fascisme:

"Si l’on veut comprendre le fascisme il ne faut donc pas le définir par l’économique seul. Aussitôt son originalité semble réapparaître. L’écart entre fascisme et grand capital se traduit concrètement par la lutte qui n’a cessé d’opposer le parti et l’armée, les « Plébéiens » fascistes et la vieille administration bourgeoise, la mystique fasciste et l’esprit bourgeois. Il ne faut pas, dira-t-on, camoufler cette dualité. Et on aura beau jeu de reprocher de reprocher au marxisme une réduction artificielle à l’économique".

Lefort qui va bientôt cofonder "Socialisme ou Barbarie" avec Castoriadis, sort d'un trotskisme pas très clair en théorie marxiste2. Que pouvait bien vouloir dire pareille stupidité: "Il aurait fallu montrer que sur tous les plans le fascisme est une révolution manquée"? Puis Lefort mêle le vrai et le faux:

"Le fascisme se présente comme une totalité mais c’est une fausse totalité. Il se dit socialiste mais
il est national-socialiste; il se dit un régime de masse, mais la masse fasciste n’est qu’une foule anonyme qui essaye de se projeter en un fantôme d’absolu – s’émerveillant de se ressembler quand elle se regarde dans la glace; il se dit antibourgeois mais ce qu’il attaque c’est la bourgeoisie du père, confortable et mesquine, il est lui-même un enfant de vieux qui tente de s’affranchir en brutalisant sa mère (la petite bourgeoisie). Le fascisme est tout le contraire d’une totalité, c’est le négatif pur, l’absolu de la destruction. S’il rassemble les hommes de toutes les classes dans des réunions grandioses et s’il donne à ces foules l’illusion d’une existence unique, s’il s’appuie sur des entités artificielles: les jeunes, les anciens combattants, en fait il « atomise » la seule classe qui par son travail est une unité: la classe ouvrière, il brise les syndicats, il désintègre toutes les organisations, il interdit les contrats collectifs et ne laisse plus subsister que les individualités qui cherchent désespérément le social, mais qui s’ignorent".

Lefort manque l'essentiel comme Guérin, la nature de base du fascisme/nazisme c'est l'embrigadement pour la guerre mondiale. La classe ouvrière en 1933 a déjà été atomisée par la social-démocratie qui, en Allemagne, n'a pas envoyé des gaz lacrymogènes comme un vulgaire Hollande ou Macron mais tiré à la mitrailleuse sur la masse des ouvriers en révolution. Lefort est au départ un mauvais trotskiste car le maître Trotsky a clairement expliqué que la contre-révolution a été menée par la social-démocratie quand le fascisme n'a fait que la parachever; par après Trotsky a dégénéré à son tour en prônant l'alliance avec la social-démocratie contre le fascisme, sous la justification que le fascisme était la réaction principale, comme le suppose déjà à son tour le jeune Lefort! Ajoutons que, contrairement à ce que Lefort affirme, le fascisme n'a pas brisé les syndicats. Le texte de A.Lehmann dans la revue "Masses" en 1933 était autrement plus clair. Il montre, entre autres, que les syndicats ont préparé à l'esprit de soumission au fascisme3 et qu'ils sont intégrés naturellement, avec leur esprit bureaucratique, dans le fascisme:

"L'organisation pratique devait être mintenue à tout prix mais l'idéologie avait besoin d'être changée; la bourgeoisie remplaça alors le réformisme par le fascisme4. Les syndicats furent d'abord intégrés purement et simplement dans le fascisme. Il ne pouvait pas être question de résistance de la part des bureaucrates puisque la réalité de l'organisation réformiste de collaboration de classe était conservée; seule était rejetée, comme un oripeau inutilisable l'idéologie réformiste. Le remplacement du réformisme par le fascisme comme soutien du capitalisme se produisit donc de la façon la plus simple et si la bourgeoisie n'avait pas eu besoin d'hommes nouveaux, elle aurait pu conserver les services des bonzes qui ne demandaient pas mieux". Lehmann ajoute: "Il s'est montré dans cette circonstance que les syndicats n'étaient pas une organisation qui puisse être utile à la classe ouvrière et que cela résultait non pas d'une mauvaise direction mais de la structure et du but même des syndicats comme organes de représentation des intérêts corporatifs dans le cadre du capitalisme; de telles organisations deviennent donc nécessairement un organe du fonctionnement normal du capitalisme et ne peuvent donc pas être utilisés dans des buts révolutionnaires"5.

Lefort enjambe cette assimilation du syndicalisme par les Etats capitalistes, que Guérin avait esquivé également, et il découvre le fascisme comme un "capitalisme différent", ignorant toujours la dimension militariste de cette doctrine "d'engagement national":

"... il n’en est pas moins vrai qu’il est un capitalisme différent. Il est l’instrument de la classe bourgeoise mais il offre ce paradoxe de mépriser la bourgeoisie dont il raille la sénilité, de jeter ses représentants en prison. C’est ce problème qui exige une mise au point du Marxisme".
Examinons la mise au point de notre marxiste "trotskiste":
"Certes le Marxisme est toujours vrai, mais il n’est vrai qu’en droit: or que signifie cette vérité de droit en histoire ? Que reste-t-il du Marxisme si des diversions sont toujours possibles ? N’y-a-t-il pas mauvaise foi à situer ces diversions par rapport à la lutte des classes, à se cramponner à ce point de repère que l’histoire effective n’admet peut-être plus ? – Problème théorique est qui solidaire d’un problème pratique: comment organiser sa vie en fonction de la révolution prolétarienne si en fait l’histoire ne répond pas à ce qu’on en attend ?".

Eh! il suffit d'éliminer la dialectique du raisonnement:

"La dialectique n’est pas nécessaire. Elle est « de fait ». Nous voulons dire par là qu’elle s’appuie sur un passé qui a été contingent et qu’elle s’ouvre sur un avenir qui n’est pas donné à l’avance. La lutte des classes n’a pas toujours eu lieu. c’est une vérité historique, c’est-à-dire qu’elle correspond à un certain stade de la société: elle peut, et même elle doit s’abolir si la société sans classes est réalisée. Alors d’autres problèmes se présenteront qui exigeront peut-être une nouvelle théorie de l’histoire".
L'affirmation tient lieu de démonstration: "La lutte de classes n'a pas toujours eu lieu". CQFD! C'est sûr qu'au coeur de la guerre la lutte des classes est effacée, cela signifie-t-il pour autant qu'elle a disparu définitivement?
Pas besoin de démonstration pour se permettre de dire que "la révolution n'est pas nécessaire" et qu'il faut bien se résoudre à constater qu'elle n'a pas eu lieu depuis la Première guerre mondiale.
Re-servons-nous opportunément de la dialectique qu'il venait peu avant de jeter aux orties :
« La dialectique marxiste est complexe. Il n’y a pas seulement et capitalisme et le socialisme prolétarien face à face, l’exploitant et l’exploité: il y a plusieurs partis qui se réclament du prolétariat, il y a aussi… le fascisme qui défend la bourgeoisie en se disant socialiste. C’est que la dialectique de l’existence historique ne peut avoir la pureté de la dialectique hégélienne du Maître et de l’esclave ».
Il y aurait donc un simplisme maximaliste (qualifié à l'époque d'ultra-gauche par les résidus du trotskisme dégénérés), ne considérant le fascisme que comme une simple faction bourgeoise, alors il suffit d'inventer ce qui sera le gimmick de toutes les branches trotskiennes au XX e et XX ème siècles : "Le fascisme est donc un possible permanent ».
Alors que le fascisme est daté, correspond au plus profond de la période de contre révolution il devient une seconde menace parallèle au capitalisme « en permanence » et pourquoi ? Parce que la révolution n'est pas assurée de sa nécessité, parce que le capitalisme n'est pas appelé à mourir, peut-être à pourrir. Au fond Lefort n'a jamais cru à la possibilité de la révolution, d'abord parce qu'il a participé de la fabrique de l'idéologie antifasciste dès la Libération, ensuite parce que devenu théoricien « conseilliste » il a vite remis en cause la question fondamentale et sine qua non du parti pour finir comme universitaire sociologue.
Le fascisme n'est pas non plus un produit de la petite bourgeoisie comme l'imagine le groupe néo-gauchiste Nuevo Curzo 6 dans une définition extrêmement confuse: « Le fascisme est la continuité de la révolution petite-bourgeoise dans les conditions du capitalisme d’État. Il s’agit de mouvements de masse, nationalistes et « populaires » qui tentent de raviver les messages et les slogans démocratiques « en attente » des révolutions bourgeoises et des libérations nationales, présentant le renforcement autoritaire et répressif de l’État comme la base d’une conciliation impossible des intérêts – des oppositions de classe »7.


Où est cette révolution petite bourgeoise, à l'époque et maintenant ? On n'en saura rien. Par contre sur les derniers événements, que l'on peut identifier comme « révolte antiraciste mondiale » et les émeutes afférentes, deux autres groupes de ce conglomérat où se rattache Nuevo Curzo, ont publié un tract (prise de position politique) extrêmement intéressant, dont je liste ici quelques extraits.[il existe une fâcheuse tendance dans le milieu maximaliste ou apparenté à utiliser le terme "interclassiste" qui a tout de la langue de bois, car les jeunes générations ont oublié les vrais termes plus explicites pour cette notion: la collaboration des classes].

"Malgré la colère sincère et justifiée qui a suivi ce meurtre odieux, ainsi que la volonté apparente de nombreux participants à ces manifestations d’affronter physiquement la police, les protestations sont marquées par plusieurs faiblesses importantes qui sont communes à de nombreux mouvements populaires interclassistes que nous avons observés au cours des deux dernières années ; principalement l’identitarisme et le démocratisme. Indépendamment de ces caractéristiques, l’avant-garde politique de la classe ouvrière ne peut pas ignorer la réalité de ces manifestations simplement parce qu’elles ne sont pas "purement" prolétariennes"8.

La démonstration est implacable et démolit l'accusation fébrile gauchiste du "racisme institutionnel":

"Le rôle social universel de la police est fondamentalement d’agir comme garant de la domination capitaliste, plutôt que comme véhicule de la suprématie blanche, ou de la suprématie raciale en général ; cela nous amène à conclure qu’agir selon le slogan soulevé par les manifestants pour ’abolir la police’ nécessite l’abolition de l’État capitaliste dans son ensemble. Cela implique à son tour que la classe ouvrière s’empare du pouvoir politique et exerce sa dictature sur la société. Le point de vue alternatif, selon lequel la police est fondamentalement un instrument de la suprématie blanche, mène tout droit à la conclusion qu’il suffirait d’avoir des Noirs en position de pouvoir pour changer le caractère de la police, ce qui n’a manifestement pas été le cas, comme le montre la présidence d’Obama".

Contrairement au CCI qui raisonne en "noir et blanc" et ignore les niveaux de gris dans les classes sociales9, la Gulf et la GIGC n'oublient pas le rôle central du lumpen dans cette agitation mondiale hétéroclite et dangereuse pour la vraie classe révolutionnaire:

"... Les effets néfastes de la lumpenisation et du pillage sur la conscience de la classe ouvrière
Lorsque nous parlons de lumpenisation, nous faisons référence au processus qui a conduit beaucoup de gens vers la petite délinquance, l’escroquerie, le trafic de drogue, la prostitution et d’autres activités socialement inutiles ; c’est en grande partie une conséquence de la désindustrialisation à grande échelle de villes comme Detroit. La tragédie est que cette conséquence de la crise capitaliste rend le développement de la conscience de classe plus difficile et rend donc plus dure la lutte contre le processus même qui a créé ce phénomène social indésirable en premier lieu ».
« Une activité typique du lumpenprolétariat en période de troubles est le pillage, qui a été une caractéristique des protestations/révoltes en cours, en raison de leur caractère interclassiste. Les communistes s’opposent au pillage, qui est une affirmation complète de la logique capitaliste, à savoir l’appropriation privées/individuelles et la destruction de forces productives. Pour donner un exemple, la destruction des grands magasins de détail est totalement étrangère aux intérêts des travailleurs, car elle rend l’infrastructure inutile pour toute appropriation éventuelle par un corps collectif de travailleurs, et permet un nouveau cycle d’exploitation du travail dans le cadre de la reconstruction après la destruction. À cet égard, elle a un effet similaire à la guerre impérialiste : la destruction physique de la main-d’œuvre morte (usines, magasins, infrastructures) permet un nouveau cycle d’exploitation de la main-d’œuvre vivante, qui est la source de valeur dans notre société. Que les travailleurs se livrent au pillage ou s’engagent dans des milices de commerçants, ils sont mobilisés comme chair à canon pour une bataille entre deux fractions opposées de la petite bourgeoisie (car le lumpenprolétariat n’est, après tout, que la section "illégale" de la petite bourgeoisie)".
Et encore bravo pour le final:
"Nous ne devons pas hésiter à démontrer le caractère totalement réactionnaire des organisations comme Black Lives Matter [BLM], qui vise à mobiliser les travailleurs noirs derrière l’État capitaliste et sur une base totalement identitaire. En fait, deux de leurs objectifs déclarés sont « d’engager vigoureusement nos communautés dans le processus électoral » et de « promouvoir l’inscription des électeurs parmi la génération Z, la communauté noire et nos alliés »   L’effet pratique de l’activité du BLM est de renforcer l’establishement du Parti démocrate et de diffuser le poison idéologique de l’identitarisme racial, qui a été l’un des piliers de la stratégie du Parti démocrate ces dernières années.
Black Lives Matter et les différentes machines militantes du Parti démocrate ne feront que canaliser une révolte antiraciste contre la violence policière vers le terrain petit-bourgeois impuissant du boycott de la consommation et de la représentation culturelle, le renforcement d’un projet permettant aux propriétaires/gérants d’entreprises noirs d’obtenir le droit exclusif d’exploiter les travailleurs noirs, et aux cadres noirs (petits-bourgeois d’entreprise) d’utiliser leur identité comme levier lorsqu’ils sont en concurrence avec leurs homologues blancs pour des postes salariés dans la bureaucratie étatique et celle des entreprises privées. C’est la version petite-bourgeoise de l’’antiracisme’"10.

PRIVILEGE BLANC ET CONCURRENCE VICTIMAIRE OU QUEL CONTENU POLITIQUE?

Nous sommes tous des victimes du capitalisme, même le député bourgeois qui est mort du covid parce qu'il a trop serré les mains de ses électeurs. Mélenchon a justement ridiculisé l'idée d'un privilège "blanc". Laissons journalistes et sociologues s'empailler, cacophoniquement, sur cette histoire de privilège blanc (qui remplacerait le privilège "bourgeois") et une concurrence "victimaire" qui est une réalité tant les injustices sont inégales et disproportionnées...
On ne peut que souscrire à la plaidoirie initiale de la Gulf Coast concernant la chaîne des événements au niveau mondial déclenchée par des meurtres policiers impunis par leur propre commanditaire: la justice bourgeoise:
"Nous ne pouvons ignorer la réalité sociale de la brutalité policière, ni du racisme anti-noir généralisé, et en particulier la fonction de ce dernier dans l’histoire du capitalisme américain ; le faire reviendrait à se rendre complice du chauvinisme. Nous devons exprimer notre solidarité avec les victimes de la brutalité/violence policière et de la discrimination raciste, tout en essayant de mettre en évidence les insuffisances du contenu et du terrain de ces luttes du point de vue de la lutte contre l’intensification de l’exploitation de la classe ouvrière et de la répression étatique. En tant que communistes, nous proposons une orientation sur le terrain de la classe ouvrière, le seul qui soit adapté à la lutte contre la domination capitaliste et le racisme qui fait partie de l’arsenal des armes idéologiques utilisées pour la maintenir".

Et évidemment on ne peut se ranger sous la bannière interclassiste de l'antiracisme. Mais à l'anti-raciste, somme toute humanitaire et convivial du petit bourgeois gauchiste, est venu se greffer un racisme anti-blanc et une prétention de réviser en particulier toute l'histoire du capitalisme à travers une stigmatisation du seul colonialisme aux dépents des aspects les plus proéminents dans le monde moderne: l'exploitation salariée et la chair à canon. La conséquence est de deux ordres: contrôle de la production idéologique à l'Université pour la réduire à une lutte raciale victimaire et, plus comique, destruction des statues des salauds de colonialistes. Cette révision de l'histoire plait énormément à la gauche caviar et à la gauche bobo, comme social-démocrates et staliniens avaient été séduits par les grèves fascistes. La dernière révision de l'histoire aussi infâmante avait été tentée par les nazis (mais une fois parvenus au pouvoir). Leur but (révolutionnaire) était de démontrer qu’une relecture de l’histoire s’imposait, à la fois pour justifier l’avènement du nouveau règne en tant que résultante logique de l’évolution du Peuple allemand, et pour mobiliser les esprits en vue d’accomplir le dessein de la Providence dont le Führer (comme le coran) possédait la clé : on pouvait discerner les traces de cette prédestination dans la trame d'une nouvelle histoire universelle devant graviter autour de la notion de race11. Les chantres du racialisme vengeur n'auront jamais la puissance étatique du nazisme, mais ils peuvent mentir autant, comme ce représentant d'une association antiraciste qui, mêlant ignorance et bêtise, a déclaré que De Gaulle était un fugitif qui avait pris la poudre d'escampette en Angleterre et échappé à l'obligation de défendre son pays… comme quoi des racialistes peuvent être pétainistes!

La connaissance de l’histoire sert toujours l’engagement politique, surtout si elle est interprétée ou refaçonnée, voire réinventée. Dans le milieu éclectique du lumpenprolétariat, les croyances superstitieuses et théories du complot se chevauchent. Les bateleurs de foire sont nombreux et souvent brillant et accrocheurs. Le prototype de ce phraseur "anti-flic" professionnel est incarné par un des amis du gang Traoré, Almamy Kanouté, présenté comme militant associatif, éducateur et acteur dans le navet anti-flic "Les Misérables"; avec sa barbe sauvage qui pousse de la lèvre au nombril il incarne le révolté banlieusard à l'air méchant, mais l'homme est intelligent et s'exprime très correctement. Depuis peu il est invité et abondamment flatté à la télé trotskienne par le petit chef anarchiste Besancenot – L'anti-capitaliste – mais aussi hier sur Cnews où les journalistes l'ont laissé tranquillement ridiculiser le syndicaliste policier qui poireautait devant la Préfecture de Créteil pour ne pas aller favoriser l'émeute au pied de "l'oeuvre d'art" représentant Floyd et Traoré frère.

Dans la saga racialiste, le choix des personnages vedettes par le gang Traoré est significatif. La soeur Traoré est visible à trois kilomètres avec sa chevelure de lionne. Elle est belle, s'exprime bien aussi, même si elle répète toujours la même chose: "justice"! Elle ne semble se rendre compte comment les médias l'exposent au ridicule comme une prétendue nouvelle Angela Davis, en la filmant en gros plan à chaque apparition. A rendre jalouse la Priscilla Ludowski. Pourquoi? Parce qu'elle se comporte en guru-femme omnisciente, reine d'Egypte qui dit ce qu'il faut faire et qu'on "ne lâchera rien" (langage besancenotien), qu'elle a ses troupes avec apparatchiks bodybuildés, et qui se sait désormais reine fantasmatique des réseaux sociaux. Devant la fresque, qui a ému la corporation policière à Stains, elle pose menton levé et déclare aux dizaines de perches-micro:
"Effacer mon frère, recouvrir son visage, c'est nier son existence. (...) C'est profaner nos morts", "Si cette fresque disparaît, si une lettre disparaît, le seul responsable sera le syndicat de police Alliance", et on sera là tous les jours. On lâchera rien ».

Le maire de la "diversité" communiste de Stains, Azzédine Taïbi, a fait appel au ministre de la police qui a su si bien lâcher ses troupes par solidarité avec les "pauvres victimes de banlieue", surtout par trouille d'une confrontation violente entre escouade syndicaliste policière et le gang Traoré et pour son avenir politique d'édile racialiste. Ce maire, premier beur nominé à la gestion des communes de misère a pourtant patronné ce tag mural, qui est à l'art ce que San Antonio est à la littérature classique. Azzédine Taïbi ne dérogeait en rien à la nouvelle gauche bourgeoise multiculturaliste qui caresse l'idéologie du lumpenprolétariat: "Cette fresque est une expression artistique et pacifiste, en soutien et hommage à toutes les victimes de l'injustice", il faut "dénoncer les comportements inadmissibles de certains policiers qui outrepassent leurs droits."

Toujours dans la saga racialiste, on aligne les héros, tous morts sous les coups de la police. Cette saga tient lieu de base théorique. C'est Malik Oussekine, c'est Zyed et Bouna Traoré (encore un), c'est Théo (en effet salement enculé par une matraque policière), etc12. Avec ces meurtres successifs impunis et la faconde gouernementale du maintien des méthodes de meurtre les plus efficaces – étranglement et plaquage ventral – sans oublier l'incapacité des flics eux-mêmes à récuser ces méthodes de la même manière qu'ils avaient fait déporter les juifs sans états d'âme, nous ouvriers blancs ou pas ne pouvons qu'être solidaires de l'immense protestation quoique sans nous faire d'illusion sur une justice ni à court ni à long terme. Malheureusement cette "base théorique" je la connais depuis fort longtemps. J'ai eu l'occasion de connaître d'anciens "fellaghas" et terroristes arméniens. L'un de ces derniers m'avait invité un jour à venir dîner chez lui avec femme et enfants. Un seul souci me taraudait. Il m'avait certifié posséder des cartons entiers de théorie révolutionnaire dans son grenier. Impatient, et même avant le dessert je lui avais demandé de me montrer enfin ces textes théoriques pour voir, espéré-je, des textes plus ou moins marxistes du genre probablement tiers-mondistes ou guévaristes. Que Nenni! Lorsqu'il ouvrit ses cartons poussiéreux, ils ne contenaient que des revues avec les photos des jeunes combattants arméniens morts pour la cause!
- où sont tes textes théoriques? Demandé-je.
- ils sont tous là devant toi!

Voilà à quoi se réduit le culte des morts à son tour dans le racialisme; on ne fera pas l'honneur à Boutleja et aux éditions La Fabrique, de leur créditer que leur merde jargonneuse c'est de la théorie comestible. Le récit racialiste est d'ailleurs pitoyable comparé aux sagas des libérations nationales, à un combat nationaliste de décolonisation que nous pouvons tout de même considérer aujourd'hui comme respectable et non pas du niveau du fait divers ou de la simple haine anti-flic. Le récit de la mort de ces jeunes "racisés" est pauvre et rapide mais c'est la même idéologie réactionnaire petite bourgeoise qui voudrait pousser les jeunes de la banlieue et la jeunesse bobo parisienne à ... s'identifier à leur martyre et à se mettre à la remorque de la beauté farouche Assa et de son avocat vedette13. Pitoyable comme action politique militante! Et qui débouche sur quoi? Le déboulonnage des statues des pillards du passé. Autant aller casser les croix sur leurs tombes, cela ne les empêchera pas de rigoler. La destruction des statues – qui couvrent toujours une oeuvre perverse - je m'en fiche, je suis plutôt
pour, surtout celles de Clémenceau et De Gaulle au bas des Champs-Elysées. Mais il ne faut pas en ériger d'autres. Or la fresque de Stains, tout comme la statue érigée pour Zyed et Bouna Traoré (qui a disparue du web?) 14 où la municipalité "socialiste" a laissé fabriquer un autel et attribué leur nom à une impasse, symbolise les symboles faux ou réducteurs comme les statues des salauds de colonialistes et de généraux-chair-à-canon. Puis se met en place à chaque drame un deuxième enterrement "démocratique" des jeunes morts:

une action racialiste?
"Entouré de sa famille, de celle de Zyed, du ministre de la Ville Patrick Kanner et du maire socialiste de Clichy, Olivier Klein, cet homme aujourd'hui trentenaire, très ému, a tenu à remercier ceux qui ont fait qu'ils sont "encore debout". Avant les dépôts de gerbe et une minute de silence, une allée menant de la mairie de cette commune populaire de la banlieue parisienne au collège Robert Doisneau a été baptisée "Zyed Benna et Bouna Traoré" pour que "les centaines de personnes qui empruntent cette route chaque jour gardent leurs noms en mémoire".  Ces braves inaugurateurs de chrysanthèmes de la gauche hypocrite couvrent en même temps des pratiques très antisémites des "militants" racialistes qui assimilent juifs et nazis.

LES JOURNALISTES SERVILES PRETENDENT PARTOUT QUE LA POLICE BOURGEOISE A SEULE LE MONOPOLE DE LA VIOLENCE EN DEMOCRATIE

La gauche même au pouvoir prend la défense de victimes pas totalement victimes mais ne dissout jamais la police... On se souvient de Théo avec à son chevet Hollande, le chef principal de la police!
Le prédécesseur de Castaner
Macron reste à moitié de gauche (caviar et multiraciale); sa porte-voix Sibeth, pas si bête comme le croit Pierre Perret, n'a pas dit une nouvelle bêtise en minaudant qu'elle ne savait pas comment expliquer à des petits enfants s'il faut ou pas lancer des pierres au flic (nous aussi on rigolait: "tu verras quand tu seras grand tu leur en balanceras dès qu'ils commenceront à étrangler tes copains!"); elle a fait un clin d'oeil à la banlieue... noire comme elle, n'est-ce pas? Une habitude du double discours gouvernemental intelligent mais intelligible que pour ceux à qui il est destiné.
Le tumulte antiraciste est cependant facile à dégonfler. Prenons le cas de cet ouvrier livreur Cédric Chouviat. Nous avions tous été indignés par son meurtre par plaquage ventral au mois de janvier dernier. L'affaire était destinée à être enterrée comme pour n'importe quelle victime noire ou arabe des flics zélés et inhumains. Voilà que, comme pour le rat Fillon, la justice se précipite pour faire inculper les quatre soudards qui ont étouffés, bien avant Floyd le noir, le pauvre gars qui avait certainement un comportement de gilet jaune. "Justice enfin"! Comme dirait Assa Traoré. Pas du tout, et c'est malin. Ressortir cette affaire n'a pas pour but de consoler la famille Chouviat mais de montrer que la police... n'est pas raciste. Prolétaire blanc ou noir, on peut t'étouffer en plaquage ventral et ta famille n'aura que ses yeux pour pleurer! Et la corpo des avocats corbeaux et magistraticule de se frotter les mains. Cerise sur le caveau de Chouviat, on nous montre soudain la mère Balkany toute souriante enfilant un bonnet rouge sur la tête d'un bambin de la famille éplorée; Elle est belle la solidarité des taulards riches avec les pauvres victimes prolétariennes de la brutalité policière! Papy Balkany dansait dans la rue allègrement et fût invité le soir même sur CNews par Pascal Praud pour conchier à son aise la justice (bourgeoise) et être défendu par l'avocat honnêtement franco-israélien Goldnagel. Les pourris de chez pourri pouvaient donc traîner dans la boue la justice "de classe" alors même que quand ils passent leur temps à s'enrichir et à pavaner, ils se fichent qu'un soudard étrangle un noir ou un ouvrier; et on causa surtout des intestins du condamné à se balader et à se faire soigner dehors mais aucunement d'un certain Adama Traoré ni du pauvre Cédric Chouviat dont les intestins pourrissent sous terre. Praud était aux anges, l'audimat faisait monter ses primes!

Eteignons la lucarne ignominieuse. Le trust "Valeurs actuelles" nous fournit rétroactivement un résumé de l'histoire des émeutes en France (étrangement non qualifiées de raciales), mais qui ne confirme ni une véritable crise de l'Etat ni une victoire de l'islamisme radical:

"Avec l’affaire Théo, la crise d’autorité de l’État a dégénéré en crise de légalité et de légitimité. Crise perceptible dès les émeutes de 2005, liées au décès de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans l’enceinte d’un poste électrique après avoir décidé de s’y cacher pour éviter un contrôle de police. Ces émeutes annonçaient une nouvelle donne qui rompait sur le fond avec les embrasements des Minguettes, en 1981, où 250 voitures avaient été détruites, de Charvieu, en août 1989, de Vaulx-en-Velin, en 1990, de Sartrouville et Mantes-la-Jolie, en 1991, ou de Strasbourg, le 1er janvier 2002, quand 515 voitures avaient été incendiées.

Victoire à la Pyrrhus qui montre rapidement ses effets délétères. L’islamisme profite de la disparition du contrôle étatique et de la perte de repères civiques au sein de cette population abandonnée au laxisme et au multiculturalisme. La destruction de la légitimité républicaine a conduit à la construction de zones hors droit où prolifèrent crime, drogue, prostitution. Et sous la cendre du consensus pacifique, un jeu de dupes pour l’État : la multiplication des passerelles entre crime et islamisme radical.
De son côté, la gauche socialiste de Benoît Hamon justifie le retrait de l’État dans ses fonctions assimilationnistes au nom du droit à la différence. Et, au lieu de mettre en avant ses fonctions souveraines de sécurité des personnes et des biens, il voudrait le voir jouer un rôle d’assistance sociale qui assurerait l’intégration des migrants, persuadé d’obtenir, en conséquence, sécurité et paix civile. Il est dans la continuité des politiques qui ont toujours échoué, depuis le programme de 1977, Habitat et Vie sociale, qui visait à réhabiliter 53 grandes cités HLM dégradées. Zones d’éducation prioritaires, de 1981, pour lutter contre l’échec scolaire ? Mission Banlieues 89, de 1983, pour désenclaver une centaine de cités ? Zones franches urbaines d’Alain Juppé, en 1996, avec ses avantages fiscaux pour favoriser l’emploi ? Programme national pour la rénovation urbaine de Jean-Louis Borloo, en 2003, pour refonder le parc de logements locatifs sociaux ? Plan Espoir banlieues de 2008 ? Dispositif Ayrault de 2013 pour 1 300 quartiers prioritaires ? Échec. Encore et toujours. Plus l’État finance et abandonne ses fonctions traditionnelles de sécurité, plus le désordre augmente. Les « ghettos », découverts sur le tard par Manuel Valls, sont la sanction première de ce retrait de l’État. Son corollaire : 800 “zones sensibles”, 150 mosquées salafistes, la présence des Frères musulmans sur ces zones de non-droit où délinquance, délits, crimes, islamisme radical prolifèrent. C’est le règne du plus fort, des bandes, de la violence.
Au contact du terrain, les policiers vivent la désintégration sociale et la sécession territoriale avec une population comptant 52,6 % de personnes issues de l’immigration dans les zones urbaines sensibles. Leur “colère” et la rupture de leur lien avec le gouvernement n’expriment-elles pas leur exigence de voir l’État assurer sa tâche conventionnelle, la sécurité ? Au lieu de la paperasserie et des charges indues, de la garde des détenus dans les hôpitaux à la protection des personnalités, la reconquête des territoires et le travail d’îlotage.
La situation est grave, indubitablement. La laisser dégénérer est l’assurance d’un chaos demain. Il n’est plus même possible de compter sur l’état d’urgence, comme en 2005 : celui-ci est déjà là et n’a pas empêché le désordre. L’État est à reconstruire. Qui le pourra ? ».

J'aime bien la dernière question de « Valeurs actuelles » (l'Etat est loin d'être détruit!), mais comme organe très à droite, parfois lucides, ils se trompent ce n'est pas la comédie islamiste qui triomphe c'est le parrainage et le chemin électoral de la gauche multiculturelle, qui ne pourra plus jamais raisonnablement parvenir au pouvoir dans une posture contestataire, utopique et irresponsable, mais qui tient et inspire toutes ces mouvances hétéroclites. Comme quoi être de gauche c'est encore une fois être contre ce qui est pour et pour ce qui est contre.


Pour conclure provisoirement, si je vous ai démontré avec succès que le racialisme peut être comparé aux idéologies les plus réactionnaires du passé, cela n'en fait pas une politique en expansion en vue d'une prise du pouvoir. Il ne repose pas sur une base de classe fondamentale. Il est désormais à un niveau supérieur au simple racisme un instrument de confusion et de division du prolétariat mondial face aux confrontations sociales majeures qui se profilent. Outre de reconditionner le vieux racisme, il offre la possibilité aux gouvernants de renforcer leur leçon de morale permanente, contre la voyoucratie ou en relâchant les terroristes islamophiles, comme avec la pédagogie écologiste.
Le fascisme est apparu lui après la défaite du prolétariat dans le pays majeur l'Allemagne. L'idéologie de la vengeance y avait gagné autant le milieu ouvrier (effrayé dans sa masse par la violence de la répression, comme après celle de la Commune de 1871) que le milieu petit bourgeois et surtout lumpen (militaires déclassés, chômeurs ex boutiquiers). 
Le prolétariat actuel n'est pas battu, n'a pas encore fait de révolution, se relève malgré tant de fossoyeurs des élites bourgeoises qui l'avaient définitivement enterré et dont certains persistent à secouer le goupillon. L'idéologie racialiste de la vengeance est, en modèle réduit et sous-développée, similaire à l'idéologie raciale nazie. L'idéologie de la vengeance est typique de la préparation à la guerre, comme la vengeance pour le capitaine Dreyfus qui avait été un des ferments de l'union nationale. Derrière l'idéologie racialiste et comme aboutissant il y a le fameux « tous ensemble » (interclassiste) des mafias syndicales, et comme aboutissant un possible « sacrifice commun ». A réfléchir.


NOTES


1Bienheureuse citation, que je ne connaissais pas, repiquée sur le (très bon) tract de la Gulf Coast Communist Fraction et du Groupe International de la Gauche Communiste.
2Texte entier lisible sur le site : La Bataille socialiste, injoignable parce que son adresse mail est caduque.
3« Les bureaucrates syndicaux nombreux, bien payés et embourgeoisés régnaient sur les ouvriers par le moyen de la gestion des institutions d'assistance de toute sorte (maladie, chômage, etc.). La participation à ces institutions et aux différents avantages syndicaux retenaient les ouvriers dans l'obéissance et permettait la persistance du pouvoir des bureaucrates malgré les trahisons répétées et toujours plus cyniques ». Parallèlement au développement de la bureaucratie syndicale s'était développée dans l'appareil d'Etat une bureaucratie spéciale pour l'application des lois sociales, de l'assistance, des secours de chômage, etc (…) Ce réformisme étatique contribuait également au même rôle de maintien de la classe ouvrière dans l'ordre, l'obéissance et l'illusion ».
4Remarque formidablement intéressante qui détruit toute la théorie bourgeoise hâbleuse (depuis 50 an) du fascisme comme produit du bolchevisme par les divers cuistres historiens Sternhell, Courtois et Furet .
5Texte intégral à lire sur mon autre site: Archives maximalistes. Article publié pour la première fois en novembre 1933 dans le numéro II de Masses (de René Lefeuvre), une publication mensuelle éclectique liée à la gauche de la social-démocratie française, dont la version libertaire-académiste se continue avec les Cahiers Spartacus de mister Kay et du banquier Gallar. On peut le lire en version anglaise ici : http://libcom.org/library/economic-political-social-origins-fascism . Il a été écrit par A. Lehmann (à ne pas confondre avec Albert Lehmann membre de la Ligue des Justes en 1848 et qui avait rejoint la secte Willich-Shapper opposée à Marx), il avait été membre des groupes ouvriers communistes en Allemagne, qui avaient leur origine dans le KAPD [Parti ouvrier communiste d’Allemagne].
On voit que Masses avait une action importante et diversifiée, Kay ne pourrait-il pas nous en fournir l'historique?


6 Description superficielle et hors histoire de la montée du fascisme dans les années 1920 et 1930 : « C’est pourquoi il grandit, attirant en masse la petite bourgeoisie en colère, quand le mouvement de classe hésite ou est faible. A ce moment-là, la bourgeoisie lui donne tout son soutien et lui donne les portes de l’Etat. Elle devient alors la forme de la réaction bourgeoise à la révolution ou une forme de réorganisation et de préparation de la société à la guerre. Le danger fasciste émerge lorsque les ouvriers ne parviennent pas à affirmer leur mouvement indépendant ou il stagne, ou il est dilué et subordonné à une faction bourgeoise. C’est le piège de l’anti-fascisme ». (traduit et repris du site de la Gulf Coast Communist Fraction (un nouveau groupe-individu?). Le triomphe du fascisme n'a pas eu lieu parce que les ouvriers "ne parvenaient pas à affirmer leur mouvement indépendant" mais parce que la révolution internationale avait été brisée par la répression féroce en Allemagne et la ghettoïsation de la révolution russe.
7Dans mon livre « Le nazisme son ombre sur le siècle », publié aux cahiers Spartacus (en 2002), je passe mon temps à démontrer que le fascisme-nazisme n'est pas un produit de la petite bourgeoisie contre toutes les théories simplistes gauchistes et je signale, comme Lehmann l'a fait pour les syndicats, et Vercesi,qu'il vient de la gauche bourgeoise : « La social-démocratie a accouché le fascisme après avoir détenu les postes fondamentaux de l'Etat » (p.50).
8Prise de position commune de la Gulf Coast Communist Fraction et du Groupe International de la Gauche Communiste. sur ce GULF: https://communist.blog/ et http://igcl.org/Nouveaux-points-d-unite-du-Gulf

9Sauf dans deux excellents articles contre le racialisme des indigestes de la République : https://fr.internationalism.org/icconline/201712/9636/racialisme-premiere-partie-d-ou-vient-il-et-qui-sert-il , assez tardifs pourtant publiés en 2017 et 2018, alors que la secte à Bouteja sévissait depuis le début des années 2000. LO avait publé dès le début de petits textes, très valables eux aussi : 2004-02 Port du voile à l’école : un débat qui noie le poisson / 2005-03 L’appel des «Indigènes de la République» : dénoncer le colonialisme… ou renforcer le communautarisme ? / 2010-02 Une femme voilée sur une liste du NPA . (site de la Bataille socialiste) . La première partie de l'article du CCI en 2017 informe sur le type de comportement facho de cette mouvance, des types qui débarquent à une trentaine pour empêcher la tenue d'une réunion sur leur étrange "philosophie".Les deux textes du CCI sont très bien mais pourquoi l'hétéroclite Lucien de la Bataille socialiste ne les a-t-il pas reproduit et n'a gardé que les prises de position légères de LO.

10Tract du 5 juin Manifestations contre la violence policière aux États-Unis : implications politiques et perspectives pour la classe ouvrière (5 juin 2020)

Prise de position commune de la Gulf Coast Communist Fraction et du Groupe International de la Gauche Communiste

11Lire : "Le discours historique nazi et les manuels d’histoire du IIIe Reich" par Rainer Riemenschneider https://journals.openedition.org/trema/1820

12Le milliardaire Omar Sy dans son plaidoyer clientéliste en donne une liste plus exhaustive où, hélas, il y un blanc : « Malik Oussekine, Makomé, Lamine Dieng, Babacar Gueye, Gaye Camara, Ibrahima Bah, Rémi Fraisse, Angelo Garand, Sabri Choubi, Cédric Chouviat, Ali Ziri, Hakim Ajimi, Gabriel… la liste est tristement longue ». La liste est longue d'autres vedettes de la saga qui tiennent le haut du pavé de la représentation anti-raciste, les Mouloud Achour, Camilla Jordana, sans oublier les rappeurs musclés et voyous. Et le VRP du clan Traoré l'acteur à la barbe broussailleuse comme celle de Ben Laden.
13La carrière de cette fille est douteuse. Elle est sponsorisée successivement ou couverte par des personnages de médias. Causeur s'étonne de l'obscurité de son emploi par la fondation Rothschild, quand en arrêt maladie depuis un an, elle perçoit toujours un salaire, tout en faisant voyages promotionnels et exhibitions dans les médias, ce qui est en effet un métier politique qui ne rend pas malade. Elle s'est permis d'aller faire la tournée des lycées, non pas tant pour embrigader des cervelles molles que pour multiplier les selfies qui flattent son ego, jusqu'à ce que le ministère en prenne ombrage et mette fin à cette gaminerie de vedette de variétés.
14Je me souviens avoir vu dans cette banlieue une statue en hommage aux deux jeunes électrocutés dans un poste EDF en 2005. A-t-elle été discrètement retirée ? Le poste de haute tension, derrière un grillage, ils n'étaient pas obligés de rentrer dedans, et on ne voit pas comment le policier et la policière auraient pu les en empêcher, comme la justice le leur a reproché (c'est comme les jeunes qui refusent de porter un masque en ce moment, ils font ce qu'ils veulent... on ne peut pas les forcer). La réflexion des deux flics sur le moment a été présentée comme cynique, mais n'importe quel électricien comme moi aurait pu dire aussi : « s'ils se précipitent là dedans ils sont morts » ! Le problème n'est-il pas venu de l'Eduque Naze qui n'enseigne plus en banlieue depuis trente ans les conditions de vie en société et les règles de prudence... quand on utilise par exemple un deux roues à moteur...Le vrai problème est certes plus général comme l'a fort bien dit pour une fois SOS racisme dans un article de Libé.  En dix ans d’enquête et de procédure: «il est des questions qui n’auront jamais pu être posées dans notre pays». «Pourquoi des jeunes de quartier populaire, à la vue de la police et alors qu’ils n’avaient manifestement rien à se reprocher, ont préféré prendre la fuite et se réfugier dans un endroit où ils risquaient leurs vies ?». Il y aurait beaucoup à dire sur le délit de faciès. Les flics vivent avec des clichés qui ne sont pas toujours faux. Dans les années 50, un type en blouson noir avait plus de chance de se faire contrôler. Aujourd'hui une jeune arabe et un jeune noir qui rasent les murs ou se mettent à courir alors qu'ils sortent d'une impasse... n'y-a-t-il pas une chance qu'ils aient fait des conneries? Et j'en ai vu dans ma banlieue.