PAGES PROLETARIENNES

mardi 28 juillet 2020

OU EN EST LA FONCTION DISSOLVANTE DU TROTSKISME ?






Quand la radicalité gauchiste se ridiculise
Ah mes salauds ex-militants ou militants en cachette, vous vous dorez la pilule confinés sur une plage, et moi je vais encore vous distraire en continuant à vous distiller le contenu génial de mes chères archives, réchappées d’un autodafé du CCI. Merci qui ?

 L’histoire du trotskisme c’est l’histoire du délitement de la théorie révolutionnaire à la sauce bolchevique stalinienne, c’est l’aboutissement de la stratégie du « petit remplacement » depuis la chute de la maison stalinienne. Ce n’est pas un grand soir syndical, car le badge syndical reste obligatoire ; un grand soir municipal et parlementaire ? pas vraiment non plus, de Krivine à Poutou, plus mollasse sera la chute. L’hétéroclite, la démultiplication des causes et des revendications futiles (appui au gang Traoré puis la subversive revendication « des masques pour tous »)  avaient commencé au temps du grand gourou victime du coup de piolet d’Alain Delon. Comment peut-on être persan se demandait jadis Montesquieu ? J’ajoute : « comment peut-on être trotskiste aujourd’hui ? ». Impossible à moins d’être un crétin, me direz-vous. Certes mais d’un esprit crétin il ne peut plus rien sortir ni d’intelligent, ni de révolutionnaire.

-          Je ne vous le fais pas dire, conclut mon interlocuteur.



GOUROV s’est gouré !


Gourov en tenue de général
Trotsky n’aimait pas le terme de fraction trop scolastique selon lui. Il ne supporte pas les critiques de la fraction italienne, qu’il ostracise à la suite de Lénine comme « ultra-gauche », synonyme d’anarchisme. Certes il aimait bien Bordiga et lui dédicaça l’un de ses livres. Trotsky a des ornières et est incapable, voire aveugle sur la réalité de la contre-révolution au seuil des années 1930. Il voit la révolution venir alors que le stalinisme a triomphé, il soutient comme exemplaires ses féroces plans quinquennaux « en voie de dépasser le capitalisme » ; il sous-estime la montée nazie en Allemagne, puis s’enthousiasme pour les événements espagnols puis français.

Le texte que je publie par après, que vous ne trouverez pas dans les archives des sectes trotskistes, est signé Gourov, nom de clandestinité de Trotsky, et cela fera bien rire les fractions de révolutionnaires dans l’avant-guerre et jusqu’aux trotskistes enfermés dans les isolateurs en Sibérie : tout le monde aura compris que « Gourov s’est gouré ! » Et vraiment gouré de fond en comble. Il y a du gourou qui vaticine dans ce texte lamentable de pronostics foireux, avec une bêtise par paragraphe.

Trotsky n’a pas les qualités de rigueur et de rassembleur comme Lénine. Son courant reste un marécage de sectes, de scissions permanentes autour de tant de petits chefs (comme aujourd’hui), incapable de reconstituer un vrai parti, mais, et le texte en est un condensé, Trotsky enseigne le plus piteux suivisme au stalinisme pour les générations à venir. Il choisit la défense de la démocratie bourgeoise lorsqu’il se réfugie en Amérique du sud mais reste un queuiste du stalinisme par une fidélité coincée sur le sol russe.

En 1931, une délégation de la fraction de gauche du PCI déplore le fractionnement de l’Opposition autour du gourou Trotsky, les querelles incessantes de clans, elle déclare ne pouvoir travailler avec le secrétariat de la Ligue :  « … mêlé aux luttes personnelles après avoir perdu toute autorité pour faciliter le travail politique (…) nous ne nous dirigerons jamais dans la direction d’un appui à tel ou tel courant tant qu’une clarification sur la base politique de la plateforme ne sera pas fait ».[1]

En Allemagne comme en Espagne on a procédé à « des combinaisons de personnes ». Contrairement aux groupes de l’Opposition la fraction italienne n’est pas le fuit de « rencontres de militants » mais d’une tradition. Les courants de la Ligue sont hétéroclites et parfois bizarres : « Nous devons aussi exprimer notre étonnement quand nous avons su qu’il existe aussi « un groupe juif », qui a organisé une fraction à l’intérieur de la Ligue. Nous croyons que ces camarades feraient très bien de dissoudre cette formation parce qu’il ne serait pas possible de prouver que la délimitation de juif puisse correspondre à une limitation principielle ou même tactique dans le domaine du marxisme. D’autre part ces formations ne sont pas du tout faites pour faciliter la clarification politique mais elles apportent de la confusion. Il est évident que l’anarchie organisatoire doit cesser… ». Mais au bout du compte, et toute l »histoire des trotskismes le confirmera, l’anarchie organisatoire restera le mode de vie du trotskisme, car son rôle n’est plus et ne sera plus que celui de la cinquième roue du carrosse, ou pour dépasser la limite de l’imagerie, de disposer en permanence du sous-ministère de la parole, de la contestation gratuite.

Notons que le « groupe juif » n’était pas le pire, quoique  toujours attaché à la stupide défense de l’URSS, il était cependant celui qui avait une activité des plus sérieuses auprès des ouvriers, mais juifs, quand les autres sectes se battaient autour de cadors intellectuels sans réelle activité de classe[2].



LA REDACTION DU BULLETIN RUSSE VOUS ENVOIE A TITRE D’INFORMATION, NON POUR PUBLICATION LA LETTRE DU CAMARADE GOUROV (28 juillet 1931)



« I. Le flux révolutionnaire est maintenant indubitable. Les partis communistes se renforcent dans certains pays. Le flux élémentaire de forces écarte les questions de stratégie et les ramène au deuxième et troisième plan. Les ouvriers vont vers les communistes comme vers le parti le plus intransigeant. C’est dans la même direction qu’agissent les succès économiques en URSS, reconnus par une importante partie de la presse bourgeoise et devenant par là encore plus convaincante pour les ouvriers.

II. Cette situation politique générale, quoique cela soit à première vue, paradoxal, frappe non seulement l’Opposition de droite, mais aussi la gauche. Par la s’expliquent en dernier ressort les capitulations autrichiennes, l’arrêt de la croissance dans certains pays, l’affaiblissement de l’activité, etc. En plus de toute cause locale, particulière et personnelle, il existe une cause générale : la poussée spontanée, qui n’a pas encore complètement tranché les contradictions dans la situation du Comintern et de ses sections à une nouvelle étape historique. Il est évident que dans ces conditions, une fraction qui ne nage pas simplement dans le sens courant, mais qui étudie la situation critiquement et pose consciemment toutes les questions de stratégie, doit inévitablement, pour un certain temps être repoussée ; au sein de cette même fraction, doivent se manifester des sentiments d’impatience qui dans des cas isolés, prennent une forme capitularde.

III. Dans certains cas, victoire est possible, même avec une très mauvaise politique. Avec l’approfondissement de la crise, sa prolongation, avec la désagrégation ultérieure de la social-démocratie, la démoralisation des gouvernants, la victoire du parti communiste allemand n’est pas exclue, même avec la politique de la direction de Thaelmann.

Mais malheureusement, elle n’est pas exclue. Les chances réelles d’une telle victoire ne sont pas grandes. Bien entendu si les combats se développent, l’opposition de gauche y prendra part à titre de détachement peu nombreux, mais le plus décidé. Je pense que dès maintenant l’Opposition de gauche devrait faire une déclaration, non publique, mais officielle, à ce sujet : par exemple adresser au Comité central du parti communiste allemand une lettre dans laquelle on déclarerait que sans renoncer en rien à ses vues, l’Opposition de gauche dans son ensemble, et chacun de ses membres en particulier, sont prêts à mettre leurs forces à la disposition du parti pour n’importe quelles conséquences immédiates, aurait une importante éducative et aurait porté profit dans l’avenir.

IV. La victoire en Allemagne aurait une importance internationale décisive. Nous avons dit qu’elle n’est pas exclue, même avec la direction actuelle. Mais jusqu’à la victoire, il y a au moins encore loin. Le trait fondamental de la situation en Allemagne, cette fois-ci aussi, est la disproportion extrême entre l’acuité de la situation révolutionnaire et la force du Parti. Là-dessus, TROTSKY (Gourov parle ici de lui-même ç la troisième personne) a parlé dans sa brochure consacrée aux dernières élections au Reichstag. Les contradictions dans la situation politique caractérisées dans cette brochure n’ont fait que s’aiguiser depuis. Le parti, après s’être affaibli pendant quelques années par une offensive intempestive, se trouve maintenant contraint, alors que la situation exige l’offensive, de mener une politique au fond défensive et d’attente. Là naît une perspective tout à fait réelle : la situation objective peut changer en faveur de la bourgeoisie avant le reflux à demi-spontané des forces permettant au Parti communiste de passer à une offensive décisive.

V. En Espagne, la même disproportion. Pendant le développement de la révolution, exclusivement uniforme et favorable au prolétariat, le Comintern laisse échapper les mois après les mois, découvre sa faiblesse et insolvabilité, nourrit l’anarcho-syndicalisme, donne à la bourgeoisie la possibilité de s’affermir et ainsi prépare l’issue de la révolution non dans le style russe mais dans le style allemand ‘1918-1919).

VI. Je suis maintenant peu la Chine, mais là-bas aussi, les fautes criantes des dernières années, l’ignorance de la situation réelle du pays, la négation des tâches révolutionnaires démocratiques, le fait d’ignorer le prolétariat, la transportation du centre de gravité sur la guerre paysanne, ont préparé le dénouement tragique. TCHANG-KAÎ-SHECK commence la destruction des foyers paysans alors que les villes sont tranquilles. Sa victoire dans ce cas menace les communistes d’une extermination effroyable et d’un nouvel affaiblissement de la révolution pour une période prolongée.

VII. Le développement économique de l’URSS entre maintenant visiblement dans une phase critique. « Le tableau bigarré » de l’exécution du plan quinquennal (selon l’expression de STALINE) signifie la rupture des proportions même dans les cadres formels du plan. Cependant, toute la question réside en cela : réussira-t-on, te dans quelle mesure, à établir les proportions nécessaires entre les éléments du plan et les processus spontanés et mispontanés (Trotsky invente des néologismes en passant) dans l’économie. Dès le commencement nous avons prévenu que les contradictions et les disproportions qui s’accumulent avec l’absence d’une régulation constante et ouverte, éclateraient la troisième, la quatrième ou la cinquième année. Maintenant cette étape s’est approchée tout à fait.

VIII. Selon les conditions objectives, nous sommes entrés dans la période des révolutions et des guerres révolutionnaires. L’armée rouge est dans ces conditions un facteur historique d’une importance énorme. Sur le plateau de la balance historique, l’armée rouge pourrait l’emporter de beaucoup non seulement sur le fascisme allemand, mais de plus sur le polonais. La situation générale de l’Europe justifierait entièrement une offensive révolutionnaire. Mais ici se pose d’une manière particulièrement aiguë la question du pain, de la viande, des chevaux, de l’avoine, et après cela celle des sentiments de la paysannerie et aussi des sentiments de la classe ouvrière. La planification et la régulation inharmoniques (sic) et bureaucratiques mènent à ce que, dans un moment critique, l’économie puissante d’après ses possibilités abstraites est extrêmement faible d’après ses ressources réelles.

IX. Dans une politique à longue échéance, il faut aussi prévoir la pire variante, surtout si la probabilité est aussi grande que dans les conditions actuelles. Quelle est donc cette pire variante ? Le prolétariat allemand ne s’empare pas du pouvoir dans la période proche. Le Parti communiste espagnol ne réussit pas à croître en temps opportun jusqu’au rôle dirigeant de la classe ouvrière. Le capitalisme bénéficie d’un répit. Sous les formes fascistes ou « démocratiques », ou combinées, il se tire de la crise. Bien entendu le caractère dégradant du capitalisme ne peut pas être surmonté. Mais déjà rien que l’apaisement temporaire de la Chine peut ouvrir une place d’armes pour les opérations de grand style. Un nouvel essor industriel ne peut aucunement être considéré comme théoriquement exclu d’avance.

X. La période écoulée se caractérise par le fait que la capitalisme a glissé de plus en plus dans les fondrières de la crise tandis que l’UNION Soviétique a donné des pourcentages de croissance de plus en plus grandioses. Le danger consiste en ce que le monde peut donner dans la période qui s’ouvre un tableau d’un caractère jusqu’à un certain point opposé.

Notamment : le capitalisme va se tirer de la crise et dans l’Union Soviétique se feront jour toutes ces disproportions et ces contradictions rentrées par la pression bureaucratique et dont le raisonnement est le dernier discours de STALINE.


                                                OOO



Tout ce qui est dit plus haut a bien entendu un caractère hypothétique (sic). Comme dans la planification économique, il peut y avoir des variantes maxima et minima, ainsi dans les pronostics politiques, il faut prendre la variante la meilleure et la pire. Plus haut est analysé la pire des variante possibles. La réalité passera quelque part entre la meilleure et la pire des variantes, bien que comme on peut le craindre, plus près de la pire que de la meilleure. Que signifie cela du point de vue du développement du communisme lui-même ? Une période de crise intérieure profonde, de critique, de vérification de l’expérience passée et des discussions du passé. Qu’a fait l »Opposition de gauche, effectivement, jusqu’ici ? Très peu. Il y a une certaine quantité& de travaux critiques et de plateformes que le prolétariat d’Occident, même son avant-garde, même l’avant-garde de cette avant-garde, n’a pas assimilé et n’a pas vérifié sur sa propre expérience. Dans différents pays existaient pendant ces dernières années des groupes oppositionnels qui n’ont eu quelquefois rien de commun avec le bolchevisme et qui ont seulement compromis l’Opposition de gauche par leur sympathie pour elle. Notre travail dans cette dernière période se réduisait dans une grande étrangers, et est réellement pernicieux (le secrétaire de Trotsky devait être fatigué à la frappe). Avec cela, nous-mêmes avons fait pas mal de fautes qui sont tout à fait inévitables, étant le pris de l’enseignement. Rien d’étonnant si les ouvriers ne se sont aucunement précipités à corps perdu à l’appel des groupes oppositionnels de gauche dans les différents pays. Le flux révolutionnaire actuel apporte par lui-même aux ouvriers avancés la satisfaction naturelle qui leur permet de ne plus penser aux problèmes stratégiques. Tout cela, comme il est dit plus haut, explique entièrement pourquoi l’Opposition de gauche se sent dans une série de cas repoussée du lit principal du mouvement. Mais cela s’explique comme une situation provisoire. Les questions de la stratégie révolutionnaire seront dans un temps proche posées dans une série de pays, tout d’abord en Allemagne et en Espagne, avec une acuité exceptionnelle. Une grande partie de ce qui est dit par l’Opposition dans le passé et qui serait maintenant oublié, (qui en partie est oublié par l’Opposition elle-même), montera demain à la surface, revivra, acquerra de nouveau un caractère extraordinaire actuel.


Nous défendons des idées et des méthodes absolument justes à l’aide de faibles, de pitoyables moyens primitifs. Le Comintern défend des idées fausses à l’aide de la « technique américaine ». Mais à la fin des fins, c’est l’idée juste qui vainc.


De cela découle encore une conclusion. Notre forme au stade donné est dans une appréciation générale juste, dans une conception marxiste, dans un pronostic révolutionnaire juste. Ces qualité nous devons les présenter tout d’abord à l’avant-garde prolétarienne. Nous agissons en premier lieu comme des propagandistes. Nous sommes trop faibles pour essayer de donner des réponses à toutes les questions, pour intervenir dans tous les conflits particuliers, pour formuler partout et en tous lieux les mots d’ordre et les réponses de l’Opposition de gauche. La poursuite d’une telle universalité avec notre faiblesse et l’inexpérimentation de bien des camarades, mènera souvent à des conclusions trop précipitées, à des mots d’ordre imprudents, à des solutions erronées. Par des pas particulièrement faux, nous nous compromettrions nous-mêmes en empêchant les ouvriers d’apprécier les qualités fondamentales de l’Opposition de gauche. Je ne veux nullement dire par là que nous devons être à l’écart de la lutte réelle de la classe ouvrière. Rien moins que cela. Vérifier les avantages révolutionnaires de l’Opposition de gauche, les ouvriers avancés le peuvent seulement sur l’expérience vivante, mais il faut apprendre à choisir les questions les plus vives, brûlantes et principielles, et sur ces questions engager le combat sans se disperser dans des minuties et des particularités. C’est en cela que m’apparaît maintenant la règle fondamentale de l’Opposition de gauche.



28 Juillet 1931 à Paris.   G. Gourov[3]







LA FONCTION ACTUELLE DES TROTSKISMES


Au milieu des années 1970, RI pouvait écrire, et le répète encore maintenant :


« La fonction des trotskistes actuels

« Trente ans après la tenue du Congrès de fondation de la IVème Internationale, les groupes politiques qui perpétuent la tradition trotskiste végétaient à l’ombre des partis communistes staliniens et parfois même, pour certains, en leur sein. Depuis la fin des années 60 cependant, ces groupes ont vu leurs rangs se renforcer et leur importance au sein de l’appareil politique du capital faire de même. Or, ce changement notable ne peut pas s’expliquer par un bouleversement de leurs positions politiques. Ce que l’on constate en effet, c’est plutôt la persistance des erreurs de Trotsky poussées jusqu’à l’absurde, c’est à dire en clair, la défense des intérêts bourgeois ! Les groupes trotskistes d’aujourd’hui sont tous des continuateurs de la politique contre-révolutionnaire des trotskistes pendant la guerre et des défenseurs du fameux “Programme de Transition” quelles que soient par ailleurs les différences d’interprétation que chacun de ces groupes peut en faire. (…)

Donc, comme on le voit, l’activité des groupes trotskistes depuis la fin des années 60 s’inscrit parfaitement dans la lignée de la dégénérescence des années 30 et du passage dans le camp bourgeois lors de la seconde guerre mondiale. Et le regonflement relatif des groupes trotskistes ces dernières années s’explique, à la lumière des changements intervenus dans la vie du capitalisme vers la fin des années 60 et son entrée dans une nouvelle phase de crise économique, avec le resurgissement des luttes du prolétariat mondial. C’est à la lumière des problèmes et des nécessités qui s’imposent au capital que l’on peut comprendre le renforcement de la place des trotskistes ».[4]


UNE EXAGERATIO N DE LA PLACE DES TROTSKIENS DANS LA LUTTE DE CLASSE



Près de 50 années plus tard, le CCI-RI est toujours un bon pit bull des errements trotskiens et de leur complicité avec les modes idéologiques bourgeoises successives. C’est le seul groupe politique maximaliste qui, malgré ses propres errements organisationnels et politiques, continue un travail remarquable de critique de ces aventuriers politiques, dont ils négligent pourtant la lente et inexorable chute vers l’anarchisme le plus plat et le plus confusionniste ; d’ailleurs Besancenot se définit plus volontiers comme anarchiste que comme marxiste. On verra que, plus « ultra-gauche » (donc plus surrenchéristes de l’extrême gauche mais pas coupés de leurs affabulations tiers-mondistes) ils passent à côté du grand remplacement du prolétariat par l’immigration, dans la droite ligne du conclave bourgeois Terra nova, d’où les radotages obsolètes sur une capacité éternelle des trotskars « à enchaîner une classe ouvrière » qu’ils méprisent de plus en plus ouvertement avec leurs nunucheries antiracistes et secouristes.

Examinons donc le suivi actuel des méfaits trotskiens par le vintage CCI, sous le titre du dernier journal (électronique ! et quel besoin de persister à fabriquer la version papier qui reste austère et invendable ?) : « Les groupes gauchistes face à la pandémie ! chiens de garde et rabatteurs du capitalisme ». Certes, certes, le titre est le même qu’il y a 50 ans, mais plus précisément, n’y a-t-il aucune nouveauté ? Cherchons-la.

« Les gauchistes enchaînent la classe à l’État bourgeois À propos du confinement, le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) écrit par exemple : “l’État continue de refuser d’imposer la fermeture de secteurs de la production, pire il impose des mesures remettant en cause le droit du travail en protégeant les entreprises”. Ce parti trotskiste français n’invoque en fait rien d’autre que le “respect du Droit du travail” qui établit déjà partout les “règles” de l’exploitation capitaliste. La préoccupation du NPA est donc comment, à ses yeux, mieux faire fonctionner l’économie capita liste à bout de souffle. De même, le NPA réclame “un programme de sortie de crise pour rompre avec le capitalisme et reprendre le contrôle du système bancaire par la socialisation des banques”. Il préconise de “mettre l’appareil productif au service des besoins sociaux, sanitaires et de la transition écologique” par une série “de mesures d’urgence… ».

C’est déjà prêter une bien grande importance à un projet politique de la part d'une secte qui passe son temps à dénoncer la police « raciste », à faire des leçons de morale féministe, anti-fasciste et syndicaliste. Je doute fort que dans l’activisme effréné qui fait courir en tout sens les très jeunes recrues petites bourgeoises, ces dernières se soucient du programme de « socialisation des banques » des vieux coucous du trotskisme qui maternent en sous-main la maison girouette de Besancenot et Cie. Tout comme je suis certain que la majorité de la classe ouvrière n’a pas plus à fiche de ce programme, ignoré et néo-stalinien, ni n’est gagnée à une quelconque de ses facéties comme solution « nationalisée ».

Nos trotskistes nationaux ont-ils les moyens d’être machiavéliques dans une perspective d’usurpation d’un hypothétique renversement de l’Etat bourgeois, soit par des élections surprenantes, soit par l’arrivée d’une armée rouge trotskienne ? Le CCI n’est quand même pas bête au point d’imaginer que les lointains petits fils de Gourov veuillent encore se prendre pour les bolcheviques à la veille de la prise du palais d’Hiver, il les cantonne au rôle de garde-barrières, de vigiles de la bourgeoisie. Cet aspect là est en effet du même ordre que la fonction de la flicaille syndicale, avec laquelle nos vigiles trotskiens marchent comme jamais main dans la main, avec régulières félicitations mutuelles. Le CCI sur ce plan aurait donc raison d’écrire la même chose qu’il y a 50 ans : « La gauche du capital joue ici parfaitement son rôle d’agent de contrôle et de mystification de la classe ouvrière en tentant d’enchaîner cette dernière au mythe d’un capita lisme géré par un “État social et démocratique” non plus pour les profits mais pour les intérêts du “peuple”. Or, que la propriété soit aux mains d’entreprises privées ou soit nationalisée par l’État, cela ne change rien à l’affaire, ces deux formes de propriété ne sont que les deux faces de la même pièce ». Mais c’est faux désormais, car c’est oublier que le trotskisme était fort du règne du stalinisme, et qu’il l’a suivi pour l’essentiel au tombeau, notamment avec la farce des nationalisations ; c’est oublier que si le stalinisme ne contrôle plus la classe ouvrière, le trotskisme, qui n’est qu’un sous-stalinisme, en est d’autant plus incapable qu’il renie cette classe au profit d’une morale centrée sur l’immigration, les femmes petites bourgeoises et un soutien prioritaire au lumpenprolétariat de banlieue. 


Après un machiavélisme supposé tout puissant de ces dérisoires sectes électoralistes et syndicalistes, voici nos « habiles » trotskiens qualifiés de « fossoyeurs de la lutte de classe », fossoyeurs ? pas plus que la CGT ou les mesures dilatoires du gouvernement ou de l’assurance chômage ! Les trotskiens sont désormais couverts par l’anonymat du terme « gauchiste » mais jamais au grand jamais en tant que « islamo-gauchistes » qui signifie que vous êtes automatiquement fan du petit chien de lunettes arrière Zemmour. Certes, à l’unisson des divers gangs syndicaux, ils sabotent systématiquement toute prise en main de la lutte par les ouvriers eux-mêmes, mais sur la question du retrait, le rédacteur de RI a poussé le zèle jusqu’à proférer une ânerie hors de la réalité.

« Les gauchistes fossoyeurs de la lutte de classe. La plupart de ces groupes revendiquent comme nouvelle forme de lutte un “droit de retrait”. Convergences révolutionnaires (CR), autre tendance du NPA, vante ainsi “la riposte des ouvriers à la base et à l’initiative de militants locaux qui ont imposé ou bataillé pour imposer leur droit de retrait”. Pour CR, il s’agirait également d’ “une nouvelle forme de grève”. On apprend ainsi que la lutte de classe en temps de pandémie ne se résumerait qu’à imposer “le droit de retrait”. Ce “droit” serait devenu le nec plus ultra de la lutte face à l’obligation faite aux prolétaires d’aller travailler au risque de contracter un virus mortel. Les gauchistes se moquent ouvertement des ouvriers ! Ils leur demandent d’appliquer… la loi, celle prônée par les syndicats et les institutions pour éviter des grèves massives et briser toute réaction basée sur une solidarité de classe par des initiatives individuelles. Les réactions spontanées, collectives et solidaires des prolétaires ont dans les faits démontré l’inanité de ces prétendus “moyens de luttes” individualistes, diviseurs et nocifs préconisés par les trotskystes ».

On ne polémique pas pour dire systématiquement le contraire de son ennemi qui a le droit de professer parfois une partie de la vérité. ET avec l’argument perpétuellement paranoïaque de la malfaisance intentionnelle, où le moindre pet de syndicaliste signifie une  manœuvre pour empêcher la grève de masse. Le CCI ne s’en est pas aperçu au début, et je crois être le premier à l’avoir signalé (et leurs premiers articles sur la pandémie semblaient en avoir tenu compte), le droit de retrait a été effectivement, à un niveau mineur, une réponse au milieu de la surprise et de l’improvisation face à la pandémie qui a pesé sur nous tous. Oui c’est vrai qu’au début on ne pouvait envisager que ce putain de droit de retrait et pas s’amuser à tenir des AG « révolutionnaires » dans le domaine d’extension des clusters ! Et je ne crois pas que la tendance du NPA montrée du doigt ait maintenue cette position avec le déconfinement. Le gouvernement a été contraint d’improviser, ses gauchistes aussi. S’il faut penser qu’ils contrôlent tout, voire sciemment avec l’intention de se détruire avec, les gens du CCI sont des nihilistes qui professent une révolution impossible. Ils ne comprennent rien au véritable rôle néfaste et anti-ouvrier du gauchisme trotskien : avec le culte de l’étranger immigré,qui-a-le-droit-de-croire-au-coran, et de chier éternellement sur le méchant colonialisme français, il sert à gonfler hors de proportion l’identité nationale et à faire passer l’ouvrier français et le flic moyen pour des gros beaufs. La « stratégie » gauchiste sert, qu’elle le veuille ou non, à diviser la classe ouvrière, surtout à la dissoudre, et à gonfler le mythe du fâchisme à nos portes. Ce gauchisme hystérique joue au fond le même rôle que le stalinisme dans les années 1930 qui a été un facilitateur de la montée du nazisme et du fascisme. Nos amis de Radio Vosstanie et du garap ne le voient pas aussi clairement, mais ils n’en sont pas loin.


HEUREUSEMENT L’ISLAMO-GAUCHISME EST FORT BIEN analysé



Par cette mouvance de ceux que je nomme les groupes-individu, ce qui n’est pas forcément péjoratif puisque la plupart des sectes empêchent de penser. Aussi je ne résiste pas à vous reproduire partiellement (car ces zigotos sont très longs », les échanges sur radio Vosstanie avec le Garap. Ils sont incontestablement sur les positions de classe. Le jeune directeur de radio Vosstanie est certes conseilliste et plutôt esthète et intello déclassé, mais il mène depuis plusieurs années une expérience unique et original de radio-libre du point de vue prolétarien. Le GARAP je ne les connais pas, mais ils offrent des analyses saisissantes de vérité qui carbonisent systématiquement la mystification gauchiste, peut-être un peu trop à mon avis en héritiers de Debord et avec un programme anarcho-bolchevique genre « tout tout de suite ». Mais lisez donc retranscrit soigneusement par écrit cet étonnant dialogue.


L’ARRIERE FOND DE L’ANTIRACISME GAUCHISTE (l’intertitre est de moi)


GARAP – Cette vision est d’ailleurs au cœur du travail qu’entreprend le Parti des Indigènes de la
République (PIR). Derrière leur dénonciation perpétuelle de ce qu’ils nomment le « champ politique blanc », il y a surtout une volonté de faire de la politique à l'ancienne mais entre gens moins « « blancs » ». En gros il ne s’agit que de ça, sans aller au-delà. Le PIR, à ses débuts, avaient même dénoncé le système de recrutement au sein des Renseignements Généraux, en pointant du doigt le fait que les RG n'embauchaient pas assez de musulmans. Et donc ils ont écrit un communiqué pour demander de facto à ce qu'il y ait une part plus importante de musulmans dans les RG en France. Tous ces discours basés sur l’ethnie et/ou la religion et/ou la « « race » » ne visent en réalité qu'à répartir différemment les pouvoirs au sein de la classe dominante française ! Et tout le vernis subversif ne sert qu’à masquer cette réalité tristement réformiste (au mieux). Les envolées à prétention lyriques de Houria Bouteldja sur les plateaux de télévision, servent à masquer cela.



Vosstanie – D’un point de vue strictement progressiste, je te suis. Mais d’un autre côté, le paradoxe c’est l’infiltration dans des luttes sectorielles, par exemple le féminisme, de phénomènes identitaires ...
GARAP – Dans ce cas-là, ce ne sont pas des féministes. On assiste à une appropriation, que l’on pourrait qualifier d’expropriation, de la langue-même de l’émancipation. Il y a tout un jeu pervers qui s’effectue et qu’on rencontre en permanence lorsque l’on affronte le phénomène identitaire. Ça te fait passer des vessies pour des lanternes. Une féministe voilée ne sera jamais féministe, c’est un tissu de conneries politiques notamment avancé par les Frères Musulmans pour faire passer la conquête de l’espace public par leur doctrine religieuse sous couvert d’émancipation. On vient confondre la régression avec l’émancipation, et cela se produit lorsque viennent adhérer à ces conceptions des relativistes (ceux qui considèrent qu’il n’y a pas / plus de projet universel) - tels que le sont une bonne partie des militants de la gauche et de l’extrême-gauche -, auxquels viennent se greffer des scories de l’anti-impérialisme.religieux comme les revendications de « féministes » voilées.



. GARAP – On ne peut pas mettre sur le même plan les luttes parcellaires concernant la revendication de certains droits dans une visée progressiste, et des luttes menées dans un cadre strictement identitaire. Il faut appréhender avec méfiance ces luttes parcellaires car elles sont clairement détachées d’une perspective concrètement révolutionnaire. Pour le cas du mouvement féministe, la perspective était toute autre dans les années 1970, car le combat était lié à cette époque à un projet révolutionnaire, et était porté par l’assaut prolétarien contre le vieux monde. Ces luttes parcellaires d’aujourd’hui sont clairement détachées de la perspective révolutionnaire. Par contre, les autres luttes identitaires sont, elles, réactionnaires par essence, et soutiendront le capitalisme jusqu’au bout.

À partir de là, des glissements se font entre l’oppression économique et politique, et l’oppression identitaire. Si bien que la défense de l’identité, concernant l’opprimé, c’est la défense de sa liberté. On va donc transformer la religion – l’un des plus anciens mécanismes d’oppression, de négation de l’individu, d’archaïsme total – en un point d’émancipation, parce que « religion des opprimés ». Les opprimés s’expriment au travers de leur religion, et il va falloir être de leurs côtés, donc il faut défendre la religion contre le méchant impérialiste. En réalité, le mécanisme ne se déroule pas de cette façon, car cette analyse balaie totalement les compositions de classe à l’intérieur de ces pays dits dominés, et surtout elle est en complet décalage par rapport aux évolutions du capitalisme, parce que finalement elle l’accompagne. Le capitalisme depuis 40 ans a opéré un virage dans le sens d’une transnationalisation des capitaux, ce qui fait que ses acteurs peuvent aussi être des citoyens de pays dominés – un Indien ici, un Mexicain là – qui sont des grandes fortunes, et qui n’ont plus rien à foutre des frontières et du soi-disant impérialisme.

GARAP – Chris Harman est un théoricien du Socialist Worker Party, trotskiste anglais. Il a théorisé, dans un livre intitulé Le prophète et le prolétariat publié en 1994, l’alliance avec les islamistes. Ici on rentre au cœur de cette logorrhée anti-impérialiste qui vient soutenir les mouvements les plus réactionnaires. Que nous dit-il ? Que les islamistes sont des petits bourgeois qui avancent derrière des discours et des idéologies spiritualistes et religieuses un peu archaïques au niveau des mœurs certes, mais qui objectivement peuvent représenter une composante avec laquelle s’allier pour vaincre l’impérialisme. Il faut quand même se rappeler qu’en 1994, en Algérie, ont lieu des massacres à l’instigation de ces mêmes islamistes. C’est simplement scandaleux d’avoir le toupet de théoriser cette alliance ; il faut être assez déshumanisé, sous couvert de stratégie politique, et en plus il faut vraiment ne rien avoir à foutre du projet communiste pour tenir de telles propos. Proposer une possible convergence - ce n’est pas une réflexion sans conséquence - soi-disant pour combattre l’impérialisme américain... Pendant ce temps-là, durant la guerre civile algérienne, se déroulent des massacres et où les islamistes égorgent par exemple 500 personnes en une nuit. La « conciliation » avec ces barbares, qu’est-ce que ça veut dire ? C’est juste honteux ! Et une grosse partie du trotskisme aujourd’hui, au NPA en particulier, est encore travaillée par cela. Des militants tolèrent à leurs côtés les croyances les plus débiles comme la création de la terre par dieu, la science habitée par l’islam ou le relativisme culturel envers la violence infligée aux femmes. Qu’est-ce que c’est que ces conneries ? De toute façon, on est amenés à les affronter sur ce terrain. Ces trotskistes sont les alliés objectifs de l’aggravation de nos conditions de vie. Et c’était déjà le cas pour les Algériens en 1994, lorsqu’on te racontait qu’un islamiste qui te coupait la gorge était en fait un allié objectif du mouvement ouvrier. C’est honteux !

Vosstanie – Sans compter l’Iran, par exemple.



GARAP – Je vais être méchant. Tous ces milieux sont, au fond, soulagés d’abandonner définitivement le projet affirmé du communisme, affranchi de l’État et des classes : à savoir le communisme authentique. Ils se sont acharnés à l’écraser et à obstruer toutes possibilités de sa réalisation au XXe siècle, donc c’est en fin de compte un soulagement. Désormais, il s’agit de défendre la religion des opprimés, en validant au passage des assignations identitaires, culturalistes, ce qui fait fonctionner la caserne et permet de trouver des points de concordance et de légitimation de la part de ce qu’ils considèrent comme les masses opprimés. Aujourd’hui, l’extrême-gauche n’a plus vraiment prise sur le prolétariat... or il faut bien faire fonctionner la machine clientéliste.

GARAP – En juin 2015, c’était les dix ans de l’appel du MIR, ce qui a été l’occasion pour Houria Bouteldja de s’exciter devant quelques centaines de personnes, en compagnie d’Angela Davis – icône populiste des luttes des noirs aux USA, maintenant une bonne universitaire bien intégrée au système – et des défenseurs des gender studies d’Outre-Atlantique. Elle en a profité pour faire une apologie de Tariq Ramadan à la fin de son discours, et pour développer le concept de « race sociale », puisé chez Gumplowicz, un théoricien fumeux du XIXe siècle. En bref, elle a testé sa panoplie gauchiste en organisant un véritable crash-test appareillé de considérations d’extrême-droite pour voir si ce discours pouvait prendre dans la salle. Bien évidemment, ça marche comme prévu, les gens applaudissent ; d’ailleurs sur la vidéo tu te rends compte que son auditoire inclut un grand nombre de bobos - dont la majeure partie ne fait clairement pas partie de ce qu’elle pourrait considérer comme des « racisés » ! -, plutôt des looks de gauchistes ayant la soixantaine. En bref tout ce public sent le gauchisme décomposé. A la suite de cela, le PIR a organisé une marche, « La marche de la dignité et contre le racisme », afin de dénoncer le racisme d’État, – D’ailleurs le résultat est assez pauvre, car cela aboutit à défiler

Vosstanie – Peut-on faire succinctement un historique du PIR ?

GARAP – Pour faire bref, le PIR a 11 ans d’existence, depuis l’appel du Mouvement des Indigènes de la République (MIR). L’appel était un texte qui, à l’époque, opposait au sein même du prolétariat, les blancs et les non-blancs, ce qui était synonyme selon eux de « prolétariat issu des colonies »... alors que ce n’est pas automatique du tout car la France n’a pas eu le monopole du colonialisme à l'échelle mondiale. Ainsi, l’utilisation de ces concepts comme s'il s'agissait d'évidences est présent dès l’Appel, alors qu’il s’agit en réalité d’imbécilités à déconstruire. Cet Appel a eu un certain succès, qui allait au-delà même de ce qu’escomptaient ses initiateurs, car de nombreux médias et politiciens en ont parlé. Le MIR s’est constitué à la suite de ce texte. Quatre ans plus tard, les membres décident de se constituer en tant que parti, le PIR, ce qui leur donne un objectif clairement électoraliste, car ils déclarent ne plus vouloir se contenter de peser sur le « champ politique blanc » - ce qui n’a aucun sens mais se constituer en « force indigène autonome », dans le but, donc, de présenter des candidats aux élections. Mais, sept ans après sa constitution en force politique, le PIR n’a toujours pas présenté le moindre candidat dans aucune élection, pas même cantonale ou législative. Ils savent très bien qu’entre leur présence médiatique importante et leur poids réel en terme militant, il y a un véritable gouffre. En gros, le meilleur moyen pour eux de rester crédibles, c’est de s’en tenir à de l’agitation spectaculaire chez Taddei ou autre, et de ne pas se brûler les ailes à faire de la politique politicienne en se présentant aux élections. De plus, ils se prévalent d’une présence importante dans les quartiers populaires... qui, pour une large part, n’en ont rien à foutre de la politique politicienne. Donc vouloir les attirer par le biais des élections serait vraiment se tirer une balle dans le pied. C’est pourquoi le PIR est un parti qui en est resté au même stade au niveau du jeu politique que son ancêtre le MIR. Très peu de divisions, donc, mais en revanche un fort pouvoir de nuisance, ne serait-ce que par leur présence médiatique, et par leurs relais dans les réseaux d’extrême-gauche, voire libertaires. C’est pourquoi il est important d’en parler et de s’attaquer à leur prose.

Vosstanie – Pourquoi le PIR est-il (fin de la question perdue)

GARAP – Aucune, si ce n’est que cela rejoint des éléments déjà abordés, à savoir d’abord que ces milieux sont bien contents de pouvoir se débarrasser de ce qu’il leur restait de lutte des classes au sein de leur corpus théorique politique. Ainsi le glissement de la lutte des classes à ce que le PIR appelle « la lutte des races » leur permet d’évacuer par cette pirouette tout le mouvement ouvrier. Un fait révélateur est que la Ligue Communiste Révolutionnaire est devenue, à peu près au même moment où elle se mettait à soutenir les Indigènes de la République, le NPA... Évacués donc les termes « communiste » et « révolutionnaire », et bienvenu l'adjectif flou « anticapitaliste », comme un symbole d’un soutien avoué (voire agressif) au PIR.

GARAP – Il y a quand même certaines réactions, ce discours travaille une partie de l’extrême-gauche. Des clivages se mettent en place, malgré la difficulté de se faire entendre due à une certaine lâcheté politique. En réalité, le PIR est un Think Tank qui tire sa force de partis politiques situés dans les institutions, et qui le soutiennent de facto. Les signataires de l’appel du MIR sont pour l’ensemble des staliniens, des écolos, des trotskistes, donc tout ce qui représente la gauche de gouvernement, avec quelques trotskistes en marge qui font de l’agitation de rue, quoique désormais l’agitation se fait surtout sur le Net. En gros, ce sont des réacs de gauche qui soutiennent ce mouvement, issus des éléments bureaucratiques chauvins, nationalistes, autoritaires. Des réacs qui, une fois de plus, se révèlent pour ce qu’ils ont toujours été. Tout ce que je dis peut sembler un peu réducteur, mais il y a au fond cette réalité qui fait surface, et encore une fois il y a ce soulagement de pouvoir abandonner le mythe du soulèvement révolutionnaire prolétarien. Là, ils retombent sur des terres qu’ils connaissent, à savoir des terres essentialistes, culturelles, hiérarchiques : on remplace le prolétariat par le peuple, ce qui (leur) permet de parler de patrie, avec les notions de nations opprimées (« prolétaires »), concepts fascistes à l'origine ! Ça nous ramène aux idées de Enrico Corradini, au début du XXe siècle, lequel était adhérent au parti fasciste italien. Ce sont essentiellement des masques qui tombent.

GARAP – Ils sont interclassistes également sous la plume de Sadri Khiari, « théoricien » du PIR, qui écrit que, selon ses critères, l’ « indigène » qui vote à droite parce que Sarkozy s’est engagé à construire des mosquées est plus subversif que l'indigène qui vote PS pour défendre ses intérêts économiques... ce qui a le mérite de la clarté ! Au même moment où Khiari écrivait cela, Sarkozy – alors ministre de l’intérieur et des cultes – pondait des bouquins comme La République, les religion, l’espérance... Dans ce bouquin, Sarkozy écrivait justement - qu’il manquait beaucoup de mosquées et de synagogues dans certaines communes du 93 ! Ainsi Khiari, dont le cœur de cible est la population des villes du 93, indique qu’il préfère un vote sarkozyste pour avoir des mosquées, alors que le but caché évident d’un Sarkozy, à travers la construction de lieux de culte, est de canaliser une éventuelle colère populaire dans certains quartiers... Donc le PIR est clairement interclassiste.

GARAP – Du reste, les membres du PIR approuvent les gouvernements réactionnaires de droite comme de gauche, à travers la participation des indigènes au sein même de ces gouvernements. Voici un extrait du discours de Bouteldja pour les dix ans du PIR : « Et enfin, même l’action des traîtres comme Rachida Dati, Malek Boutih ou Rama Yade est aussi une manifestation de la lutte des races sociales. N’oubliez pas que je venais de dire qu’elles étaient ambivalentes. Leur ambition dévorante, leur ascension telles des Bel ami de l’immigration qui nécessitent de vous piétiner pour réussir, c’est une manifestation de la lutte individuelle et égoïste des races sociales. Lorsque Rachida Dati obtient le ministère de la justice, un ministère régalien, lorsqu’elle est au sommet de sa gloire, et aussi
traître qu’elle soit, elle ne peut pas ne pas penser à sa mère Zora, et c’est le nom qu’elle a donné à sa fille. Elle ne peut pas ne pas penser au chemin parcouru par une fille d’immigrés maghrébins. Elle a sa revanche sur l’histoire. Même s’il faut les combattre, les traîtres participent à leur manière à la lutte indigène. » Cette vision vient absolument couvrir, valider, les pires saloperies qui sont faites par l’UMP à l’époque, au travers de Rachida Dati, de Rama Yade ou encore Malek Boutih à la tête de SOS Racisme. Ce discours vient totalement justifier la réaction gouvernementale, et les PIRistes sont vraiment des auxiliaires patentés de la réaction institutionnelle.

Vosstanie – Leur poids médiatique est-il tributaire de notre époque internetisée et twittesque ? Parce que, globalement, on se rend compte qu’ils ne représentent pas grand-chose, mais pour autant ils ont un poids qui pourrait peut être trouver sa justification dans l’importance des nouvelles technologies de communication et de diffusion.

GARAP – Les nouvelles technologies, oui, mais ils sont finalement peu présents sur les réseaux sociaux. Ils restent tributaires de la communication classique télévisuelle, surtout sur le service public. Il faudrait s’interroger sur le nombre de passages qu’Houria Bouteldja a pu faire sur les chaînes de télé publiques. Elle a d’ailleurs vendu la mèche récemment lorsqu’elle a été mise en difficulté par un intellectuel de gauche, qui a eu le mérite de lui renvoyer dans les dents quelques vérités élémentaires : elle a déclaré que l’important n’était pas le contenu de ses bouquins mais le fait que l'on parle d'elle

GARAP – Ça nous ramène aussi à une constante du discours d’extrêmedroite, qui privilégie le mythe sur le logos. Il s’agit avant tout d’avancer des images, des icônes, des légendes ou des déclarations performatives au détriment des raisonnements logiques. Et peu importe qu’ils trouvent sur leur route des contradicteurs. On trouve cette constante au sein de l’extrême-droite, et en cela H. Bouteldja s’y inscrit totalement. Tous les discours qui s’y rattachent ont pour seul visée la production d’une subjectivation identitaire et sa diffusion la plus large possible. En ce qui concerne le PIR, ses membres ont également le soutien appuyé de toute une clique universitaire, ce qui renvoie donc aux appareils d’extrême-gauche présents pour vendre leur production intellectuelle, et dans ce cadre la valeur du scandale est à la hauteur du bénéfice de leurs ventes futures. (…)
ils jouent uniquement sur leurs sentiments et leurs émotions, et c’est justement ce que fait Houria Bouteldja. Elle joue complètement sur l’émotionnel, elle envoie tout et n’importe quoi pourvu que ça puisse piquer une forme de refoulement, de frustration sociale et, en creux, créer une subjectivation. Alors, pour pouvoir étayer mon propos, je me suis replongé dans La psychologie de masse du fascisme. Reich est une personnalité qui a pu être décriée à maints égards ; en effet il a défendu certaines positions critiquables (notamment sur l’homosexualité, qu’il considérait comme pathologique). (…)

GARAP – Je trouve ça particulièrement dégueulasse, et je vais te dire pourquoi. Tout simplement parce qu'on est en 2016 et on continue de nous parler de colonialisme. Mais le colonialisme à la papa n'existe plus. Bien sûr qu'aujourd'hui il reste des pays riches et des pays pauvres. Mais comme on l'a déjà esquissé, il y a une transnationalisation du capital à l'œuvre. Par contre, s'il y a bien une colonisation, c'est celle de la marchandise. Et comme par hasard, ce petit détail n'est absolument pas remis en cause. Et la colonisation marchande, ça c'est un fléau. S'il y a une déshumanisation, elle se fait aujourd'hui sous le coup de la marchandise qui détruit nos vies".








NOTES

[1] Intervention de la délégation de la fraction de gauche du P.C.I. sur les question politiques, 1931.
[2] Voir le document de 1932 : A toutes les sections nationales de l’Opposition de gauche et au camarade Trotsky, signé : le groupe juif de la ligue communiste en France.
-          lettres de Gourov (Trotski qui s’est gouré) : http://maximalismarx.over-blog.com/search/lettres/
https://sites.google.com/site/sozialistischeklassiker2punkt0/leon-trotsky-1/1929/leon-trotsky-lettre-a-ottorino-perrone
Anton Ciliga dans "Au pays du mensonge déconcertant" raconte comment les trotskistes prisonniers dans les isolateurs se moquaient de Gourov et de son "soutien critique" sado-maso au régime stalinien qui emprisonnait et tuait les vrais révolutionnaires restés bolcheviques.
[4] https://fr.internationalism.org/Brochure/trotski1 (R.I n° 26; 27; 28 et 29 -1976)

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