PAGES PROLETARIENNES

jeudi 31 janvier 2019

LE MOUVEMENT PEUT-IL SE RELANCER DERRIERE ses blessés ?



« On rapatrie les égorgeurs français de Daech et dans le même temps, le gouvernement parle de "peste brune" pour décrire les Gilets Jaunes! » anonyme sur le web

Il en aura subi des coups ce pauvre mouvement des gilets jaunes, mais les pires sont venus de l'intérieur. Je me suis prononcé sur le réseau en soutien à Drouet en accord avec l'auteur du texte suivant, qui s'est bien évidemment fait couvrir d'insultes, troll, macronien, etc.

« Il est important de clarifier la situation à l’intérieur du mouvement gilets jaunes !
Une scission s’est produite et plusieurs figures connues, que je qualifierais de modérées, se sont écartées du mouvement ! Les radicalisés comme Drouet, Fly ryder et d’autres du même cercle en ont profité pour imposer leurs vues sur les méthodes et l’action que le mouvement doit avoir pour sa pérennité ! Je relève toute de suite que ce changement de cap initié par les radicalisés, les anarchistes violents n’a donné lieu à aucun débat interne ni aucune concertation ! Ce sont quelques personnages dont ceux que j’ai cité qui imposent leurs vues et circulez il n’y a rien à voir et à discuter ! Je l’écris, car il faut simplement le savoir ! Tous ceux qui ont encore une image idéalisée des contestataires spontanées et populaires de l’origine, en sont pour leur frais !
Ainsi fleurissent dans les pages Facebook contrôlés par les extrémistes des propositions de lutte de plus en plus radicales et l’obsession de la confrontation violente avec le pouvoir !
Ce sont ainsi : grève générale ,recours auprès de la cour internationale des droits de l’homme donc de l’onu ,plainte déposée contre le ministre de l’intérieur ,le président de la République ,et plus grave l’appel qui a été fait aux blacks blocks, organisation ultra violente de lutte urbaine , lors du dernier rassemblement à Paris mais aussi que les menaces de mort envers les personnes aux opinions divergentes, qui sont plus qu’intolérables ! Bien sûr il est légitime de se défendre contre les violences policières avérées, mais gardons raison ! Ces méthodes sont celles de groupes d’activistes anarchistes dument élaborées au sein d’un schéma plus vaste pour faire tomber le gouvernement et le président aux profits de partis prêt à les remplacer!

La conclusion c’est que d’un mouvement spontané contre l’iniquité de l’élite et la hausse des taxes le mouvement des gilets jaunes devient aujourd’hui l’instrument de partis qui sous traitent le sale boulot à cette organisation désincarnée de ces fondamentaux égalitaires et démocratiques !
Voilà donc ce qui faut savoir de l’évolution en cours, certains trouvent ça bien, c’est leur problème !
Par contre ,Je conseille a ceux qui ont un avis divergent de cette évolution et notamment à Jacline Mouraud et à Ingrid Levavasseur d’abandonner toutes références ou sigles Gilets jaunes dans leurs futures organisations car ce vocable sera en tous les cas décrédibilisé par les actions instrumentalisées par les partis politiques extrêmes !Pour ma part j’enlève ainsi toutes marques distinctives et références de ce mouvement sur ma page Facebook et je ne suis plus gilet jaune d’aujourd’hui malgré que je sois encore dans le cœur pour ses aspirations nobles initiales ».

Texte très lucide. Beaucoup ont plié bagages devant un tel flou et la chute du nombre de manifestants n'est pas dûe à la simple répression policière, certes ignoble et cruelle. Je ne suis pas d'accord avec la caractérisation des Drouet et Fly rider comme « radicalisés », le terme est accommodé à toutes les sauces et ne veut plus rien dire. Forfanterie conviendrait mieux encore que durcissement ; ces gens qui se prennent pour des commandantes ne disposent que de troupes très versatiles, hétéroclites et peu fiables. Ils sont l'expression opportuniste et sans tête de la petite bourgeoisie artisanale et entrepreuneuriale. Cela était flagrant avec Priscilla Ludosky, mais cela l'est devenu plus encore quand nos deux routiers barbus ont embrassé la cause pacifique et ringarde du RIC (vieille complainte de l'extrême droite pour une démocratie directe sous la dictature capitaliste). Indépendamment des habituels flots d'injures et autres onomatopées sur facebook, nous avons pu nous glisser et tenir quelques fois des discussions cohérentes au-dessus de la horde des groupies de Drouet et consorts.
Une entrée en scène du bâtard « apolitique » de l'auto-entreprenariat ?

Jean-Philippe Brunon, à la suite de l'article du Monde sur l'explosion du nombre d'auto-entrepreneurs, s'est livré à une analyse qui remettait en cause selon lui le marxisme « traditionnel », il écrivait :

« La critique de la valeur dissociation (approche marxienne et non marxiste) permet de mettre en relief les limites et contradictions internes du capitalisme, à savoir que pour produire de la valeur d'échange, pour des raisons de concurrence, il faut toujours moins de capital vivant (travail humain), et toujours davantage de capital mort (machines, robots, ordinateurs, IAs, ...), alors que le profit réel est dégagé seulement sur le surtravail humain, donc l'homme est toujours nécessaire pour le profit du capital, mais de moins en moins utile au procès de production.
Ce qui explique la fuite en avant dans le capital fictif qui est un pari (perdu d'avance) sur les profits futurs (crédit, spéculation, publicité, big data, ...), générant chômage massif, jobs précaires payés au lance pierre, bullshit jobs, crise permanente avec formation de bulles de capital fictif toujours plus grosses, destruction de l'environnement, monétisation des relations humaines, individualisme, …
Les nouveaux prolétaires sont auto exploités...Comme quoi la 3e révolution industrielle (depuis 1980 en gros) échappe à la grille de lecture du marxisme traditionnel (capital vs salariat qui fonctionnait encore durant la phase précédente, celle du compromis fordiste keynésien) toujours utilisée par nombre d'officines trotskistes, mais pas à la lutte des classes ».

Ce à quoi je répondais : « Cela ne remet pas en cause le marxisme mon cher, la classe ouvrière reste encore la majorité du prolétariat dans les pays développés, et les nouveaux prolétaires "auto exploités" font partie du prolétariat en général mais à tendance ...bobo comme le confirment les limites du mouvement des GJ . Le phénomène que tu décris est évident mais cela se déroule dans la cadre de la baisse tendancielle du taux de profit… où de fait le capitalisme ne peut plus être progressif pour l'humanité. Il te reste à expliquer le pourquoi de la guerre ». Jean-Philippe ajoutait :

« Je ne pense pas que l'auto entreprenariat soit négligeable dans les anciens centres du capitalisme, et il est en forte augmentation, précarisation...D'ailleurs Darmanin vient de se gargariser d'une augmentation record de la création d'entreprises, il oublie de dire que la plupart sont des auto entrepreneurs dont une majorité ne sort pas un SMIC et qu'en parallèle il y a un nombre également croissant de dépôts de bilan ».
Ce à quoi je répondis : « il n'est pas négligeable mais il n'aura jamais autant d'importance que le petit commerce a eu et a encore, et qu'on s'accorde sur sa taille ou pas, il faut convenir qu'il véhicule une idéologie pas du tout hostile au capitalisme mais pleine d'illusions sur sa réforme (cf le chiméRIC comme l'a si bien formulé mon camarade Vincent).
Vincent m'approuvait : « Oui et tout ceci est ultra nombriliste !. Comme le souligne Pierre Hempel l'autoentrepreunariat c'est une goutte d'eau dans le prolétariat mondial et ce ne sera jamais son avenir... Il faut au contraire revenir à Marx ». Nous convenions donc que ce statut, synonyme de création d’entreprise, est aussi devenu celui de la précarisation du monde du travail du possible petit patron en voie d'élévation au traditionnel salarié mal élevé, tout en renforçant la prégnance de l'idéologie individualiste petite bourgeoise anti-parti et anti-classe ouvrière. Les « nouveaux prolétaires », qui ne se reconnaissent pas comme tels, sont donc paradoxalement auto-exploités, ce qui explique qu'ils s'autodésignent.. individuellement, mutuellement en clans familiaux et sans consultation. L'apolitique de charbonnier maître chez soi et qui décide de toutes les affaires du monde entre le fromage et le dessert. La vieille politique proudhonienne !

ON SE RABIBOCHE LE TEMPS DU DEFILE DES GUEULES CASSEES

La PME (Priscilla, Maxime, Eric) se reconstitue à la veille de l'acte 12, avec la menace qui nous tétanise tous, que Fly rider quitte la France pour aller se faire tatouer ailleurs. Après les engueulades de couloir entre « familles » dont nous ne saurons jamais rien, alors qu'on eût aimé que Drouet nous les filme en caméra cachée comme lors de l'entrevue avec le ministre Rugy, voilà une rangée d'oignons, avec les blessés de circonstance qui vont meubler la tête du cortège samedi, acte 12, comme nos pitoyables unions syndicales de circonstances funèbres de jadis. Aussi tordu que les unions de façade syndicale un procédé qui ne va pas ramener la foule des grands jours...ou ponctuellement une ultime fois. Puisqu'on alterne entre comédie et tragédie depuis le début rappelons à notre PME les règles d'une pièce classique depuis le XVII ème siècle. Les actes sont d’ordinaire au nombre de cinq, les quatre premiers devant se terminer par un effet de suspense. On ne peut pas dire que le suspense a disparu avec les 11 actes précédents du mouvement mais constater qu'il y a eu beaucoup trop d'entractes, lesquels sont certes utiles à l’action dramatique. Il s’y déroule ce qu’il est impos­sible de représenter sur scène (batailles entre clans et partis, hospitalisations, bataille d'images avec le président mariole, etc.). L’entracte permet de dramatiser l’action (accéléra­tion, ellipse temporelle1). Les scènes rythment un acte, en marquant les entrées et les sorties des personnages. À côté des grandes manifestations où se déroulaient des moments forts de l’action, il existait des ronds-points de transition qui per­mettaient le passage d’une samedi à un autre.

La structure de la pièce gilet jaune - « Facho et bolcho vont en bateau » – et donc le dérou­lement de l’intrigue apolitique – répondait aux règles pré­cises, élaborées tout au long du XVIIe siècle.
  • la règle des trois unités
    • L’unité d’action est réalisée dans la comédie de rue et la tragédie des nombreux blessés lorsqu’on peut dégager une seule action principale contre la troupe des soudards playmobil que soutiennent éventuellement dès l’ex­position des actions spectaculaires des black blocs.
    • L’unité de temps préconise, pour renforcer l’inté­rêt dramatique, que l’action ne dépasse pas 24 heures de préférence le samedi.
    • L’unité de lieu. Se déduisant des deux unités pré­cédentes, elle recommande un décor du palais de l'Elysée pour la tragédie et d’intérieur bourgeois parlementaire ou de place publique pour la comédie.
  • la vraisemblance et la bienséance
    • Le respect de la vraisemblance répond au désir de rendre crédible ce qui se déroule à la télé au théâtre tous les soirs. Cette exigence est souvent incompatible avec la tragédie qui présente des êtres hors du commun, parce que vus sur les plateaux TV avec gilets de chantier.
    • La bienséance interdit de représenter les éborgnés et les handicapés à la télé afin de ne pas choquer le public. Elle se traduit par un langage de journaliste noble au service du gouvernement et de sa police, dans les tragédies surtout.

Le LIVE de Yannick Krommenacker

C'est ainsi que je vois apparaître soudain hier sur mon écran d'ordi en fin d'après-midi la conférence de la « famille Drouet ». Les « live » sont ainsi personnalisés, ainsi demain on pourra suivre le live de Dupont ou le live de Djamel, c'est comme la couleur des portables on peut choisir. Le live est filmé par le vidéaste alsacien qui est désormais associé semble-t-il à « la famille », qui a été pris pour cible délibérément, comme Jérôme, par un tir de flash ball (L'Etat bourgeois n'aime pas les vidéastes autonomes). C'est la conférence de presse de la « famille » en vue du samedi de l'acte 12, dédié aux blessés et mutilés, alors que, impulsif comme à son habitude, Drouet avait annoncé que ce serait pour son seul pote Jérôme. Sont assis à la table Drouet et Jérome, un gars qui fait l'introduction et un éborgné au nom de Franck. L'intervention la plus carrée et construite est celle de Jérôme Rodrigues. Il ne se contente pas de raconter les circonstances de sa blessure à l'oeil par le tir policier, comme le fera un peu trop longuement Franck2. L'ancien cadre commercial a du bagout, mieux que ses compères. Il argumente avec beaucoup de démagogie (pour « nos » enfants, pour un salaire décent), mais une critique virulente du gouvernement aussi dure que n'importe quelle guimauve syndicale. Aussi radical que Priscilla, il appelle la police à faire son travail avec les black blocs, à les arrêter avant qu'ils ne nuisent aux gilets jaunes ; ce qui est fort le café, car une manif sans casse personne n'en parle, et nombre de gilets jaunes étaient plutôt empathiques avec la casse risquée de certains black blocs (surtout des Porsche du 16 e) qui ne sont pas tous des policiers déguisés. Fort de sa blessure de guerre, et des diverses victimes instrumentalisées pour servir à la victoire finale du RIC, il se permet d'appeler au calme la manif prochaine comme s'il était le secrétaire général d'un syndicat millionnaire. Le vidéaste filme en amateur avec des angles stupides et des déplacements intempestifs qui ne permettent pas de suivre sérieusement la conférence, mais c'est la touche d'jeun, mal éduqué et nul en orthographe qui tient lieu de mode anti-système. Drouet est en général muet (comme Staline... à ses débuts). Il parle enfin à la fin dans un coin, interrogé sans doute par la télé russe :
  • c'est quoi vos revendications ?
  • Une hausse générale des salaires, la baisse des taxes et le RIC.

Tout est dit, c'est à dire rien. Au moins il n'est pas du côté de Le Pen (qui refuse la hausse des salaires pour ne pas pénaliser les petits patrons... GJ et a voté la loi anti-manif de la mafia macronienne). Tournant vers les ouvriers ? Du tout, lui aussi croit que les ouvriers n'existent plus. Il a appelé quelques jours avant à participer à la journée d'action CGT, le premier syndicat anti-prolétaire, qu'il a renommée sans honte « grève générale » (mais n'est pas Poutou qui veut). La tonalité ultra pacifiste des présentations au cours de cette conférence a confirmé que Eric avait dû se faire souffler dans les bronches en famille et hors caméra. Il n'y a que lui à ne pas se rappeler qu'il avait appelé «à un soulèvement sans précédent par tous les moyens utiles et nécessaires». Des propos jugés comme un «un appel à l'insurrection» par le castagneur de l'Intérieur, qui a souhaité que la justice poursuive le Lénine de papier. Le chauffeur routier ne se destine pourtant plus à être chauffard insurrectionnel,mais a fait cause commune avec Jérôme Rodrigues, pour l'auguste appel au calme à la troupe mexicaine, ci-dessus rappelé.

LA VRAIE PLATEFORME DES GILETS JAUNES ?

La discussion démocratique n'a jamais été le fort du mouvement dans la rue ou sur les réseaux, alors parade ou charade le contre « vrai débat » des gilets jaunes auto-promus directeurs de conscience ? Le débat gouvernemental n'intéresse personne, à part les retraités qui s'emmerdent, on ne débat pas avec les chefs des tabasseurs et de salauds qui visent les yeux de gens sans défense et sans protection. Le débat parallèle mis en place n'est pourtant pas à négliger. J'y participe sans illusions. Tout sera aussi filtré et censuré que dans la version gouvernementale, la modération se fera si les termes des propositions "tombent sous le coup de la loi", précisent les organisateurs.(je vous refile le résumé du Hufpost) Le risque, évidemment, c'est d'avoir de nombreux doublons. Mais l'outil permet normalement d'éviter cela en précisant à une personne souhaitant faire une proposition les autres sujets similaires déjà en ligne. Les équipes réfléchissent également à la possibilité de fusionner les propositions strictement similaires. Après cette première phrase, qui doit durer jusqu'au 3 mars, les organisateurs s'attelleront à une tâche difficile, peut-être la plus difficile de toutes: la synthèse des revendications. La synthèse, c'est l'élément décisif qui permet de juger de l'utilité d'une telle consultation. Elle doit être exhaustive et transparente.
N'ayant pas de moyens, les gilets jaunes à l'origine du vrai débat ont invité les chercheurs spécialistes de ces questions à les contacter pour produire une "synthèse digne de ce nom". Le site a également mis au point une cagnotte pour aider à payer la location d'un serveur informatique, notamment. Si cette étape, qui devrait durer jusqu'au 17 mars, est une réussite, viendra ensuite le temps de la création de "conférences citoyennes délibératives".
L'idée: organiser neuf conférences dans neuf villes (autant que de thématique) afin de discuter des propositions qui ont émergé lors de la consultation. Une fois toutes ces étapes effectuées, les résultats de la synthèse et de ces conférences seront rendus publics. "Chaque citoyen, à titre individuel ou dans un cadre collectif, pourra se saisir de la synthèse de ces résultats", expliquent les organisateurs. Encore une fois, par souci de transparence et de neutralité. Reste donc à voir si la fréquentation sera au rendez-vous et si le résultat sera à la hauteur des objectifs fixés par les organisateurs de ce "vrai débat".
J'ai tendance à penser qu'il sera aussi foireux que le débat contrôlé par le gouvernement, la face pile étant même plus capable de s'embourber dans la cacophonie et imbécillité du ric. De plateforme des gilets jaunes il peut y avoir oui, mais vraiment plate.

MANIFESTER POUR HONORER LES BLESSES, ET APRES ?

Après pas grand chose à se mettre sous la dent. Les GJ n'ont pas l'imagination bobo de 68, ils sont plutôt finalement très conformistes et moutonniers. Le stade suprême de leur revendication, formulée par leur porte parole auto-proclamé Jérôme est « un travail décent pour un salaire décent », quoique Jérôme ait déclaré que, comme tous les autres éborgnés, c'est le chômage qui l'attend lui, et un chômage pas décent pour tant d'autres. Une préoccupation pour les exclus du travail qui n'a pas spécialement motivée les divers porte paroles de la PME tout le long du truc.

Personne dans le prolétariat ne se sent concerné par le RIC des petits bourgeois entrepreneurs faussement novices en politique « apolitique », c'est la question économique qui reste prioritaire car le droit de parler et de délirer n'est pas encore interdit en France comme dans les dictatures islamiques. La question économique est avant tout sociale et pas juridique. C'est pourquoi les pâles théoriciens de la ridicule démocratie pour petits suisses nous font rigoler et portent ce RIC comme simple chrysanthème du mouvement.
Va-t-on retomber dans le train-train syndical des processions corporatives, des geignements de fonctionnaires, observer les négociations secrètes entre partenaires sociaux en éteignant la télé, se laisser appauvrir par les augmentations destinées à augmenter, les impôts à être péyés, les dettes à être remboursées ? Va-t-on se laisser assourdir à nouveau par les discoureurs politiciens et subir ces prochaines élections sans autre intérêt que de sponsoriser des délégués de l'Etat bourgeois, incontrôlables et méprisants ?
Les leçons du mouvement, son exigence de la transparence politique et sociale et la nécessité d'assumer la lutte sans intermédiaires, seront-elles dissoutes dans la monotonie de la vie quotidienne ?

L'Etat macronien a en tout cas pris ses dispositions pour mouiller la poudre, après la prime aux flics, dix milliards de prime unique, et une promesse de hausse des salaires des enseignants. Il navigue à vue cependant, une louche par ci, une louche par là. Macron obligé désormais de faire toujours ses rencontres en cachette du public non choisi et même des journalistes. Les exigences du capital en crise lui fouette le cul. Il n'a pas le choix, élu par le Capital et pour le Capital, il doit continuer à saigner la classe ouvrière, et celle-ci sait qu'elle ne pourra pas compter sur les gilets jaunes pour la remplacer ou la mener dans le combat inévitable qui se prépare à une autre échelle que la plainte contre les taxes ou une amélioration des farces électorales « démocratiques »


NOTES
1 « ellipse temporelle », également appelée « ellipse narrative ». Consiste à passer sous silence une période de temps, c'est-à-dire à ne pas en raconter les événements. Il s'agit donc d'une accélération du récit. L'ellipse est classique dans les médias, heureusement qu'on avait le web pour combler les trous de la censure journalistico-gouvernementale.

2C'est terrible pour un blessé grave mais en public faut faire bref au risque d'ennuyer, ce n'est pas un cabinet de consolation. Je me suis fait virer du site Gilets jaunes blessés, qui n'est qu'une litanie de plusieurs «( malheureux) handicapés à vie par la terreur policière, parce que je disais hola à la simple exposition des crimes gouvernementaux sur les corps, mais que l'on laisse la place à l'analyse et à la dénonciation de la violence étatique : c'est cela la bêtise de l'apolitisme aussi. J'ai signalé que l'étalage des « martyrs » sans analyses ni réflexion est la couverture et la seule illustration de tous les magazines terroristes. De réflexion politique point.

lundi 28 janvier 2019

LE CHEVAL DE TROIE DES GILETS JAUNES


Porte-paroles GJ en voie d'intégration
Le grand débat national éborgné
Quelques étranges figures de commandants gilets jaunes

et la franchouardise

« Je crains les Grecs même s'ils apportent des cadeaux »


Le grand débat national éborgné


Je ne suis jamais de ceux qui regrettent d'avoir fait grève ou combattu pour une cause. Je ne renierai jamais l'heureuse surprise que j'ai ressenti lors de l'échappée belle en gilets jaunes de chantier ni d'avoir partagé un moment pleinement cette lutte contre l'arrogance étatique. Il restera probablement dans les mémoires un intermède réjouissant de rejet général des institutions bourgeoises et d'apparition au premier plan de personnes de rien, qui n'étaient rien mais qui disaient presque tout l'essentiel avant d'être laminées à leur tour par le système et leurs destinées. Un cheval de Troie est entré dans la forteresse gilet jaune pourtant, et dans le ventre de l'animal de carnaval on va retrouver la plupart de ces gilets de pacotille qui prétendirent lutter contre « l'injustice sociale », mais déjà à notre insu pour une chimérique « justice sociale » dans un monde dominé par le capitalisme. Il faudra attendre encore un petit peu pour la révolution, j'ai calculé qu'il fallait attendre trois ou quatre ans en moyenne après les jacqueries populaires avant de déboucher sur une vraie révolution.

L'acte XI a remisé au second plan le triomphalisme du lancer de nains « grand débat national »1, simple tremplin électoral2 pour Macron3, qui confirme, comme le pensent plus des trois quart de la population qu'il n'a pas changé, comme l'Etat n'a pas changé, ne changera pas et n'a aucun risque d'être renversé même par l'armée mexicaine des gilets jaunes. Le défilé des foulards rouges pro-Macron, avec des chiffres certainement gonflés par les fakes policiers, n'a eu aucune espèce d'importance ni un effet de surprise comme signal de reprise en main de l'ordre dominant4. Le défilé des bobos climatiques et de leurs lycéens n'a intéressé personne. La possible énucléation d'un auto-élu porte-parole de la mouvance des gilets jaunes, avec des médias qui s'obstinaient à minimiser la responsabilité des policiers en parlant de simple blessure, a suscité bien plus d'émotions chez les partisans de l'hétéroclite mouvement que dans l'ensemble de la population qui mit cela sur le dos des bavures inévitables au cours des manifestations.

Indépendamment de Jerôme Rodrigues, qui a été pris délibérément pour cible à mon avis sur ordre hiérarchique, cette nouvelle atteinte à l'intégrité physique en vue d'handicaper une vie entière vise toujours à impressionner le plus grand nombre. Car, de massive, la volonté de manifester s'est réduite surtout face à cette répression ignoble. Aucun des problèmes sociaux, d'inégalités salariales et de paupérisation n'a été réglé, mais peu à peu ils ont relégués au second plan par une proposition politique chimérique monomaniaque par les fondateurs du mouvement même. Les « dix milliards », comme les primes ou la suspension provisoire de certaines taxes, n'ont été que goutte d'eau dans la mer des salaires misérables et d'un niveau de vie précaire pour les couches les plus précarisées de la classe ouvrière, et périphérique. Mais ce mouvement protéiforme s'est-il jamais adressé à la classe ouvrière ? Pas que je sache. Rien sur les chômeurs, malgré une dénonciation de la pauvreté. Rien sur les attaques incessantes sur les retraites, malgré une présence de nombreux retraités dans les diverses manifestations. Malgré un soutien majoritaire de « l'opinion » sorte de vade-mecum qui tient lieu de satisfecit aux auto-proclamés porte-paroles, une détestation du pouvoir d'Etat sert d'aliment à une incapacité à se situer dans la lutte des classes, et, à l'horizon, nulle grève générale en vue. La classe ouvrière est-elle demeurée absente avec son expression propre ou la révolte des gilets jaunes lui est-elle apparue « étrangère » ? Etrangère, laissons ce terme aux sectes propriétaires du label « classe ouvrière » – car les prolétaires se sont sentis et se sentent concernés par la remise en cause du niveau de vie de la population salariée et pauvre – mais par contre peu concernés par le schmilblic RIC imaginé par de troubles théoriciens. Et qui sonne creux politiquement et surtout socialement. La classe ouvrière ne pouvait donc se porter, comme le veut le marxisme classique, à la tête des couches intermédiaires révoltées. Au mois de novembre j'avais intitulé un des mes articles : « voulez-vous mourir pour le RIC ? ». Tout comme j'ai dit à plusieurs reprises aux porte-paroles de cesser d'envoyer au casse-pipe les manifestants5 et quand le gouvernement et les médias assuraient que les violences étaient le fait de l'ultra-droite et pas des flics. Le 24 novembre, je commentais : «  traité d'anarchiste par le pouvoir il n'a eu pourtant aucun soutien des anars ni des gauchistes qui sont restés chez eux, ni de nos intraitables marxistes maximalistes pour qui la grève est le nec plus ultra de la révolution ce qu'elle n'a jamais été et ne sera jamais par elle-même. La principale faiblesse du mouvement est à mon avis l'incapacité des résidus de minorités révolutionnaires, congelés ? (…) Et pourtant il faut et il faudra des organismes politiques, des gens qui réfléchissent pour contribuer, pas diriger, aider au développement de la conscience « laborieuse » de classe, faute de quoi il restera mou puis se dissoudra ». Depuis plus de deux mois, malgré les efforts de quelques trotskistes infiltrés6, point de tels organismes malgré la réunionite à Commercy, mais une débandade en compétiteurs prêts à « intégrer le système » électoral bourgeois, de l'opportuniste Cisco à Ingrid et Jacline, et des roulements de tambour de « la famille » à Drouet et Cie.

UN SOCIALISME VILLAGEOIS EN GILETS JAUNES

Je n'ai pas été emballé par l'expériece de Commercy dans la Meuse, où quelques uns de mes amis marxistes en gilets jaunes se sont répandus en éloge d'une possible jonction avec la classe ouvrière. Les mouvements anti-intellectuels me rendent toujours méfiant, ce sont souvent ceux qui ont finalement le plus besoin d'intellectuels parce que le statut de révolté ne vous donne pas toute la faconde et culture pour vous opposer à l'élite bourgeoise. On sait comment plusieurs clans ont été approchés et séduits par la bande au petit professeur Chouard. A Commercy, même chose. C'est un ancien prof, Ladislas, moitié hippie, qui s'est fait le VRP des gilets de Commercy, ville ouvrière désindustrialisée . Il est parti faire son tour de France avec la recette locale : «Dans les grandes villes, les réunions ne permettent pas de se mettre d’accord. Avec de petites assemblées, de trente ou quarante personnes, on peut s’écouter et prendre des décisions.»
En soi, si l'on croit les sornettes du CCI qui croit à une perte d'identité de la classe ouvrière, l'initiative de cet auto-stoppeur, nouvel Agricol Perdiguier, serait plutôt à louer, quoique je pense qu'il soit atteint d'organisativite trotkiste depuis ses fonds baptismaux. J'ai pu constater lors d'un des premiers ronds-points en novembre, comme dans les grèves au cours de ma carrière, que le besoin d'extension surgit naturellement rapidement de la part des prolétaires, mais qu'ils sont souvent bridés par des professionnels de l'organisation. Les comptes rendus de la presse donne à voir plutôt une Zad bis : « Au fil des assemblées générales, les gilets jaunes du coin ont construit une solidarité à toute épreuve. Dans leur cabane, installée au centre-ville, ils sont une quinzaine à discuter, à rire ou à nourrir le feu, indispensable. Une véritable famille militante est née de cette mobilisation à petite échelle : «En refaisant la démocratie, des gens qui souffraient reprennent espoir. Tout semble à nouveau possible», témoigne Guy, retraité et bénévoles dans plusieurs associations ».
« Cette soif de pouvoir politique prend racine non loin de Bure. Isabelle Masson-Loodts a filmé la révolte des opposants à l’enfouissement des déchets radioactifs. Entre répression et contrôle judiciaire des militants, la documentariste a eu le sentiment d’observer «une vieille colonie en guerre.» Elle n’est pas étonnée de voir des Meusiens aussi déterminés qu’organisés : «Là où le déni de démocratie est le plus fort, la population reprend contact avec le politique.7»
Les derniers débats centralisés avec plusieurs délégations n'ont pourtant accouché que d'une souris, et d'une polémique gênante parce que les gauchistes parisiens voulaient ajouter le mot migrants à ouvriers8.

RETOUR A LA CAPITALE

Aux pâles souteneurs foulards rouges, qui exhibaient le panneau « Oui à la démocratie, non à la révolution », j'aurais pu répondre : ne vous inquiétez pas, point de révolution en cours mais une dispersion avérée, et un délitement implicite car les couches intermédiaires ne sont pas une force sociale cohérente ; elles sont incapables de s'unir, ou alors il faudrait que la notion de peuple ne soit pas ce qu'elle est, un fourre-tout symbolique mais pas du tout subversif. Ce peuple, aussi inconnu que le soldat du même nom et auquel Macron s'adresse si bien en sermons de charité, tout en donnant ordre à ses soudards d'éborgner et de blesser à vie « pour qu'une autre vie commence avec « nous », finit par n'être que le spectateur de la confusion régnante.

La décrue des manifestations n'est donc pas niable, mais peut-on affirmer que tout est de la faute de l'Etat ? On assiste à une bataille d'images, contradictoire mais autiste. Avec son débat national, la mafia gouvernementale a attaqué le mouvement à son point faible, l'inutilité de débattre – normale lorsque celui qui prétend discuter vous flanque des coups sur la gueule – mais confortée par une attitude rigide avec un projet « indébattable » d'hyper démocratie, totalement fumiste et inapplicable et plus encore en régime d'oppression capitaliste.
Lazare Macron renaissant de ses cendres, au milieu d'auditoires choisis, a passé du temps à jouer encore et toujours au pédagogue qui explique à des enfants de cinq ans, pour n'expliquer que superficiellement le fonctionnement de l'Etat, en excluant d'informer sur le rôle « électoral » des réseaux financiers et les passe-droits du système régalien, en appelants « mes enfants » ses auditeurs. Il n'a nullement changé dans le genre pédagogue crétin. En face, ou plutôt hors champ, une bande de gilets jaunes auto-désignés remet en cause la capacité à gouverner de l'Etat en proposant de rafistoler la constitution avec la rustine du RIC ; l'obscur Chouard nomme cela « une capsule », et un de ses adorateurs, le Jérôme à longue barbe, pas encore grièvement blessé, déclarait cette chouardise, dans une émission qui l'a rendu célèbre pour son punch face à l'idiot de service Pascal Praud : « je tiens à améliorer la constitution » !

Il y avait Ali Baba et les 40 voleurs, voici le RIC et les 42 revendications gilets jaunes ! Il nous faut sérier ce qui pose problème non seulement à celui qui rédige ici, ni non plus à la seule opinion généraliste mais à tout ouvrier qui réfléchit et qui ne se laisse pas happer par l'enfer des borborygmes et menaces sur les réseaux, où celle-là et celui-ci se comportent littéralement comme un flic : « c'est le RIC qu'il nous faut... c'est ça ou rien... tu n'es pas un « vrai » gilet jaune... Arrêtez d'attaquer Eric c'est le meilleur... ».

LE CAS ERIC DROUET ou le péché de forfanterie:

Il restera à Eric le mérite impérissable d'avoir mis le feu à la plaine, avec ce petit plus génial (oublié par politologues, syndicalistes et léninistes) d'avoir filmé en direct, avec caméra cachée l'entretien avec un ministre au tout début ; on regrettera qu'il n'ait pas appliqué la même formule de transparence avec son petit clan dit « la famille ». Mais personne n'imagine des complots sans comploteurs ni des comploteurs sans complot. Les réunions secrètes de la haute flicaille avec Castaner n'étaient pas filmées non plus.
L'utilisation du flux des réseaux sociaux lui a réservé par la suite une importance outrancière qu'il n'a pas pu assumer, déclarant lui-même être inapte à parler en public. Ce qui n'empêche certes pas d'être intelligent ou avisé, mais fait un tantinet incongru lorsqu'il a eu la prétention de faire envahir l'Elysée. Je disais à l'époque que seul un parti peut prétendre appeler à une telle insurrection. Mais il ne s'agit qu'une des multiples forfanteries des agités du bonnet nombreux et nombreuses au début mouvement qui en appelaient « aux armes » avec pour tout fusil les pistolets à eau de leurs enfants ou petits enfants.

Le personnage a pris peu à peu la grosse tête mais gardé ses tics agaçants, comme à peu près tous ceux qui ont eu les honneurs de la télé. Cela vous fait reconnaître dans la rue, avec moult demande de selfies, on est tout de même heureux de devenir visible comme des stars ! Dans le désert ambiant où c'est la stupeur qui règne parmi toutes les smalas politiques et syndicales, l'appel quasi putschiste d'un type qui ne représente rien que lui-même ou sa bande de potes, laisse tout le monde sur le cul ; encore un truc à répercussion dont aurait tant aimé Besancenot afin de ne pas avoir une vie de trotskiste raté ou une vie ratée de trotskiste. Le bonhomme, bien qu'arrêté par la police un quelconque samedi, ne se dédie pas :  « Ne jamais mettre en cause ma détermination ça serais mal me connaître !! Je croit plus en cette république dsl (désolé) !!", écrit-il. "La France a mon sens besoin de renouveau !! Beaucoup trop de gens ce meurt !!! ».
L'orthographe malmenée c'est sa marque de fabrique. Je lui ai écrit pour lui conseiller de demander quelques corrections au moins à sa femme. Il a répondu que je n'avais pas ma place sur son forum. Je reviendrai plus loin sur cette goujaterie formaliste. Il se prend désormais pour un général anti-général, anti-système, anti-politique, mais politique quand même puisque mettre en cause l'Etat n'est pas une simple opération sportive. Puis, plus sombre, voyons comment il conçoit le fonctionnement de son parti secret en réseaux avec pouvoir de filtrer et de sélectionner ce qui lui convient :

« Drouet conçoit sa fonction comme celle d’un «messager» qui relaie, fort de son audience, les initiatives qu’on lui transmet. «Vous me donnez beaucoup de choses à partager, j’essaye de faire le tri», disait-il dans un direct. Les gilets jaunes sont devenus une fourmillante boîte à idées : grève générale, marche des femmes, chaîne humaine à travers toute la France, «Nuit Jaune», marche des blessés… Pour se concrétiser sur le terrain, les créateurs de ces événements ont besoin de l’audience et de l’onction que représente un partage par Eric Drouet ou Maxime Nicolle. Leur influence les rend incontournable. Une manifestation parisienne ne devient «officielle» pour les gilets jaunes que si elle est partagée par Eric Drouet ». (inerview de l'OBS)

«J’essaie de partager le maximum», répète sans cesse Eric Drouet dans ses lives. La vérité est plus contrastée. Il ne partage que les événements que lui et son équipe veulent bien partager. Le processus de sélection est tout sauf transparent. Des gilets jaunes le soupçonnent d’avoir mis en place une direction officieuse du mouvement, dont personne ne sait rien. Face à ces accusations, Eric Drouet répond que les initiatives qu’il promeut ne font que retranscrire la volonté de la base.
Le concept d’une «Nuit Jaune» viendrait ainsi directement d’un sondage mené sur son groupe, où il demandait aux internautes de lui soumettre de nouvelles idées. En se présentant comme un simple «messager» qui retranscrit la volonté de la base, il s’exonère de la responsabilité juridique et morale des événements. Interrogé sur l’antenne de RT France, Eric Drouet assurait ne pas en être responsable et ne faire que «relayer les informations». «C’est la remontée des réseaux sociaux», expliquait-t-il ».

A nos sectaires « marxistes orthodoxes », qui récusent tout enseignement de l'expérience gilet jaune, je demande de réfléchir à ce type de fonctionnement qu'il nous importe d'identifier comme anti-collectif, anti-socialiste, anti-organisation et finalement... très léniniste. La plupart des sectes politiques fonctionnent ainsi, et je n'en voudrai pas autrement à Eric en lui disant qu'il n'invente rien, et qu'on a connu pire fonctionnement arbitraire que celui de « sa famille ». Et que l'apolitisme régnant n'est pas fasciste, comme le disent le CCI et les sectes trotskistes (le gaullisme était alors fasciste lui aussi?)9, mais un réel dégoût du substitutionnisme politique des partis de toutes les couleurs, et une manifestation de ce que la classe ouvrière n'a pas perdu son identité de classe parce qu'elle a en horreur l'exemple du parti étatique bolchevique ou n'a jamais eu envie de suivre les ordres de la « famille » à Eric Drouet. Bien au contraire, ce refus de suivre les désidératas d'aventuriers petits bourgeois, routiers et commerciaux, révèle une certaine maturité (je dis cela pour les ânes du CCI qui, dans leur dernier pensum sur les GJ, ne sont capables que de comparaisons hors de propos avec l'apolitisme fasciste des années 1930). Au vrai, comme en 68, la classe ouvrière n'est jamais totalement amorphe, elle veille, mais elle n'est pas prête à aller au casse-pipe pour Eric Baba et ses 42 voleurs.

Son catéchisme à lui aussi c'est donc ce misérable RIC contre l'Europe des banquiers et la ploutocratie. Alors que ce petit routier individualiste ne sait pas ce que c'est la classe ouvrière historiquement, il l'appelle à se mettre à la remorque de la pauvre journée d'action de la CGT le 5 février, mais cela devient « le peuple » avec des termes dont il n'a pas vérifié le sens : GREVE GENERALE pour un "blocage total", en précisant l'invariable programme creux et sac de patates :« Il faut d'abord qu'on obtienne le RIC. Mais il n'y a pas que ça, les gilets jaunes, c'est 42 propositions sur la fiscalité, le pouvoir d'achat, les services publics ».

Après qu'un de ses lieutenants, Jérôme ait été touché lâchement à l'oeil par l'explosion d'une bombe policière, il monte comme jamais sur les 750 chevaux de son gros camion, chose qu'il aurait dû faire bien avant pour la dizaine d'anonymes autres éborgnés :

« Nous appelons à un soulèvement sans précédent par tous les moyens utiles et nécessaires (…) Ainsi nous déclarons l’état d’urgence du peuple. Cela nécessite des mesures exceptionnelles. Nous appelons à un soulèvement sans précédent par tous les moyens utiles et nécessaires pour que plus personne ne soit victime de ces blessures de guerre. Amis gilets jaunes, organisez-vous plus que jamais, laissez vos querelles de côté, un combat ne se joue pas, il se gagne", dit le communiqué de « la famille ». Qui est ce « nous » ? La fédération jurassienne de Bakounine ? Une fédération clandestine des gilets de tout bord politique et « apolitique », sa « famille » ? Plus probablement sa « famille », un quarteron invisible mais qui a au moins fait l'effort de produire un communiqué sans faute. Ce n'est pas le cas lorsque Jérôme lui expédie son message de détresse : « je vais perdre mon œil la famille ». Drouet répond sans doute direct depuis son portable sans souci de l'éclat de rire involontaire que va provoquer son orthographe « vocale » :
« Il ont toucher a toi mon amie !! Toi Jérôme qui filmais et qui étais pacifiste !! Ils n'aurais pas du !!! ». Est jointe la photo souriante de quatre membres du comité central, pardon de « la famille » et un communiqué qui rampe en faveur d'une police « professionnelle » et qui fasse bien son boulot.10.
Ce serait la couleur du temps, c'est comme le contrôle de ce qui est risible ou pas par les austères mémères féministes bourgeoises. De Marianne à certains politiciens, c'est offensant de relever les fautes d'orthographes car cela reflèterait un mépris culturel. Le journal à barbouzes « Canard enchaîné », vengeur des pauvres en orthographes, a d'ailleurs publié un communiqué de l'ex ministre de l'Intérieur avec des fautes alors qu'il est docteur en lettres. Je me fiche de ce moralisme qui entérine la médiocrité, la goujaterie qui chie sur l'instruction laïque. Respecter l'autre c'est d'abord s'exprimer correctement surtout en public et lisible. Pour des gens qui se prennent pour des commandants d'armée en gilets jaunes cela fait dérisoire et pas sérieux ; sur les sites de rencontre, les fautes inconsidérées c'est la fuite assurée de celle que vous prétendiez séduire. C'est du Marchais dans le texte, alors qu'en privé ce démagogue s'efforçait de parler très correctement.

Cap back to front Maxime, casquette à l'envers Fly rider : gilet jaune versus ministre

Fort marri de ne pas avoir eu le droit d'entrer en salle de classe tant d'années avec sa casquette à l'envers, Maxime, devenu à son tour héros gilet jaune, a fait de ce couvre-chef un nouveau béret Guévara, sans oublier l'exhibition de gras tatouages sur son avant bras gauche. L'individu est motard. L'esprit motard forme un homme à une solidarité très supérieure à celle des automobilistes. On parle équipements, cylindrée, performances. Je ne doute pas que Cap back to front soit un connaisseur en la matière. Politiquement il est niveau pompe à vélo. Certainement adulé dans les lycées pour son port de la casquette retournée au lit ou sous la douche, mais je doute qu'il passe l'écran pour les prolétaires qui n'ont pas les moyens de s'offir une moto ou qui ne goûtent guère les allures loulou ringard des fifities. Il parle au nom des « êtres humains » sur un plateau où il est assis à côté d'un sous-ministre gentil à la fin de la journée de l'acte XI – il a dû venir au studio en avion car il avait été arrêté durant l'après-midi à Bordeaux. L'aéropage de journalistes, dont Apathie, qui l'entourent, apparaissent à la fois fascinés et ulcérés par ce petit mec habillé comme un ado. Mais qui se pique de politique. Ecoutons es sages conseils du motard volant.
  • « Macron a été élu par une minorité, nous on représente 80% de la population », si on veut...
  • « Le 5 février on veut bien des syndicats mais qu'ils viennent individuellement ».
  • « le RIC est la seule solution parce que c'est la seule solution ».

Il était co-auteur de la lettre ouverte à Macron de la part du groupe Facebook « La France en colère » au temps où Drouet et Ludosky marchaient encore ensemble, ces équipes qui s’intitulent toujours eux-mêmes porte-paroles du mouvement. Cette lettre répètait plusieurs fois vouloir discuter avec Macron, faisant ainsi preuve d’une modération et d’une volonté de collaboration qui tranchait avec le mouvement violent des autres gilets jaunes incontrôlables, n'estce pas ? La formule des bobos réunis était d'une « classe » indicutable: « c’est une véritable lutte de classes qui s’engage et ceux qui le disent ne le souhaitent pas du tout ! « Comprenez-vous que vous appelez à une véritable lutte des classes néfaste à l’unité et à la cohésion de la France ? » écrivaient-ils… ».
Ahahahaha...

L'avantage de Back to the front et consorts est donc bien de révéler leur nature anti-ouvrière ! On retrouve la même mise en garde auprès du président, indirectement dans leurs déclarations successives aux médias, lui et Drouet. Ils appellent quasi à l'insurrection, sans savoir que c'est grave une insurrection et que ça s'organise, et après ils lâchent leurs billes : « on est contre toute violence ». Dimanche, Jérôme Rodrigues a précisé s'être mis d'accord avec le commandante Eric Drouet pour lancer «un appel au calme» et «renforcer les actions, sans violence». «Je ne lâcherai pas, je serai à des manifs dès que mon état me le permettra», a-t-il assuré.C'est l'oscillation typique du petit bourgeois couard dont Jérôme est aussi l'illustration, fort en gueule mais c'est toujours la faute aux autres. Pour se préserver soi-même.

Jérôme ou le martyr en politique « apolitique »

Jérôme Rodrigues est connu pour être l’un des membres de la « bande à Drouet », qui se surnomme elle-même « la famille ». Les «gilets jaunes» Laetitia Dewalle, Ramous, Mike Rambo ou encore Yannick Krommenacker en font notamment partie. Ce sont eux qui, chaque samedi, motivent les troupes sur le groupe « La France en colère !!! ». Organisé autour d’Eric Drouet, tous considèrent qu’« il ne faut rien lâcher » et poursuivre la mobilisation dans la capitale. Lors de la manifestation ce samedi, il s’était d’ailleurs confectionné un gilet jaune spécial avec écrit dans le dos « Jérôme Officiel La famille ».
Jérôme bénéficie d'une certaine notorité suite à son passage à une émission de l'ancien journaliste sportif Pascal Praud, dans le créneau du vulgaire et de la franchouillardise (on imagine quand il invitera la chouardise en personne...). Au cours de cette émission il tient tête avec efficacité aux interruptions stupides et vulgaires de Praud. Il sait se mettre en colère de façon raisonnée et ne pas se laisser marcher sur les pieds. Mais ce n'est pas du tout un ouvrier. Il a été vingt ans cadre commercial en cravate (avait-il alors cette barbe de père Noël qui fait lindy hop?) et désormais suit une formation de plombier, pas pour le rester mais devenir auto-entrepreneur. Il a du répondant mais son discours est le même que celui de Back to the front : « nous parlons aux humains » et « je veux améliorer la constitution avec le RIC ».  Sur la chaine russe RT, avec son œil bandé, il n'a aucune honte à dire "je suis le peuple", "je suis apolitique" (ce qui fait ignorant les mains pleines) ou pire, voire le credo du mouvement: "chacun est libre de faire ce qu'il veut". Je l'avais croisé vers les Invalides lors de l'acte X, juché sur une cabine téléphonique, saluant la foule et acceptant des selfies. Le vedettariat.
Je déplore qu'il ait été victime d'un tir policier mais je trouve assez obscène la façon dont « la famille » rentabilise la blessure. Auto-film, reproduction rapide des multiples photos et vidoés du saignement, exhibition à la fenêtre de l'hôpital poing levé. Communiqués véhéments et menaçants de Drouet, pour ensuite les démentir. Appel au calme de l'intéressé lui-même emmailloté comme un bédouin, tel le général pacifiste demandant le calme à ses troupes en fureur, la pose du capitanat en quelque sorte. Un avocat qui va porter plainte, un gouvernement qui tremble devant une telle bavure contre quelqu'un de connu (selon Le Monde). Tout est réuni pour que de ce côté des gilets jaunes des choses se règlent en justice, comme cela on sera encore plus éloigné de la question sociale...

La martyrologie a été très souvent utilisée en politique. Le souvenir des morts et des atrocités dont ils ont été victimes émeut logiquement les foules « d'humains ». Cette exaltation du martyr est généralement propre au moment des guerres et la base sentimentale des groupes terroristes de toute sorte du pays basque aux pays du Maghreb ; la fabrique des martyrs est une énorme ressource culturelle de mobilisation des sectes patriotiques. Le simple blessé ne peut être commémoré au même titre que celui qui a été tué, donc la glorification de Jérôme devrait rester limitée11. Les hommages au martyr Jérôme qui se sont bousculés sur les réseaux avec celui de Mélenchon, illustrent parfaitement la bataille communicationnelle des factions de gilets jaunes en quête de reconnaissance et de respectabilité face à l'Etat « assassin » mais la protestation juridique ne servira à rien puisque le mouvement a été incapable de réclamer massivement l'arrêt de la répression, l'indemnisation des victimes et la suppression de ces armes létales ou estropiantes ; cela aussi sera une leçon a contrario pour le prolétariat à l'avenir dont le programme suppose de passer de la critique des idées à la critique des armes, et qu'il sait où trouver lui contrairement aux pistolets à eau de nos amis en gilets jaunes. Passons maintenant de la critique des commandants gilets jaunes à la critique des rigolos Chouard et Cie.

La complainte du petit bourgeois floué : le RIC cette franchouardise

A cours d'idée, ou même sans idée du tout les premiers youtubers et nombreux pétitionnaires ont
foncé contre les taxes puis, prenant conscience de l'ampleur du mouvement ont cherché à lui trouver une perspective. Elle était toute trouvée avec l'arrivée des mains moites de Chouard et de ses amis fachos. J'ai déjà écrit plusieurs fois de façon rapide et elliptique contre cette chimère. Quatre éléments sont à distinguer si vous entreprenez une discussion avec des sectateurs de cette lubie devenue monomaniaque.
La première chose qui m'a frappé c'est l'absence d'esprit critique des gilets jaunes qui se sont mis à arborer la pancarte RIC. La deuxième c'est qu'un petit prof de lycée, n'y connaissant pas autant en constitutionnalité qu'un législateur ou qu'un prof de droit, ramène sa fraise avec ses airs mystérieux et patelins. Et propose au peuple d'écrire lui-même la constitution. Après le masque et la plume, le masque rétro et des millions de doigts. La meilleure caractérisation que j'ai trouvé, outre chiméRIC, c'est bien RIC FACHO, car le débat « citoyen » proposé par Chouard est très spécialisé, très juridique, pas à notre portée à tous, c'est donc un enfumage à la Macron, pour débattre « entre gens intelligents » à la place de la masse des incultes et autres ignorants du minimum des lois pour régenter une société donnée. Enfin, on est dans un monde imaginaire, toujours dans le capitalisme et avec des inconnus qui rédigent constitutions et projets de lois ; la vie est devenue chiante avec des référendums toutes les semaines à gerber ; on est toujours loin de la société communiste qui suppose la fin de la politique. Avec Chouard restez franchouillards !

Je ne vais pas perdre mon temps à réfuter toutes les suppositions bancales et inapplicables de ce zozo, aussi je vous résume par quelques extraits de spécialistes qui montrent l'inconséquence et la nullité du petit bourgeois Chouard.


Étienne Chouard se présente comme le penseur de la démocratie « réelle ». Sa proposition de tirage au sort d’une assemblée constituante est cependant une imposture. Elle mêle des principes généraux que l’on peut partager, du moins en partie, mais repose sur une argumentation assez spécieuse, débouchant au final sur une étrange et dogmatique conception de la démocratie. Il est épaulé par deux sectes,, les Gentils Virus (GV) et Les Citoyens Constituants (LCC), deux organisations qui propagent cette fumisterie.
Certes, un système électoral favorise les élites. Chouard n’est pas le premier à décrire cette dérive. Mais en déduire que « La Démocratie représentative n'est donc pas la Démocratie. » constitue une simplification des analyses auxquelles il prétend se référe
Pour Chouard, « La Démocratie "réelle" c'est quand les citoyens votent eux-mêmes les lois et écrivent eux-mêmes leur constitution. » C’est ce que les droits populaires suisses autorisent, en soumettant toute modification de la constitution à un référendum obligatoire et en rendant possible une initiative citoyenne pour modifier la constitution. La Suisse est-elle un exemple parfait de démocratie ? Malgré tout le bien que je pense de ces droits référendaires qui donnent au peuple helvète un véritable pouvoir constituant, celui-ci ne suffit pas à déloger les élites du pouvoir. La description brouillonne de l’histoire du tirage au sort n’a que peu à voir avec les références historiques et académiques qu’il évoque rapidement dans ses conférences.
(…) Van Reybrouck, dans son ouvrage « Contre les élections », cite son professeur Verdin à propos de l’Athènes classique des Vè et IVè siècles avant notre ère disant : « on ne doit jamais oublier un caractère essentiel de la polis, à savoir la nature exclusive des droits civiques. Les femmes, les étrangers, les mineurs et les esclaves : aucun d’eux n’avait voix au chapitre. (in Chapitre III. Pathogenèse) Van Reybrouck précise plus loin dans le même chapitre : «  Le système athénien était plus pragmatique que dogmatique. Il ne procédait pas pas d’une théorie, il était fondé sur l’expérience. Par exemple on ne tirait pas au sort les plus hautes fonctions militaires et financières. Là on recourait à l’élection, et la rotation n’était pas obligatoires ».Van Reybrouck ne confond pas tirage au sort et démocratie directe : « Je souscris donc totalement aux conclusions d’une étude récente, qui décrit la démocratie athénienne non pas comme une démocratie “directe”, mais comme une démocratie représentative d’un type à part, une démocratie représentative non élective. » Enfin, dans les conclusions de son livre, il écrit « le tirage au sort n’était jamais employé isolément, mais toujours en combinaison avec des élections ». Chouard préconise de fait une démocratie représentative aléatoire dont le tirage au sort est censé remédier à tous les problèmes, toutes les dérives qu’affronte le régime électoral. Rien n’est moins « mécanique », comme l’illustre la procédure que Chouard propose.

Sur un des sites de Chouard, la première vertu du tirage au sort est qu’elle « ne repose pas sur la volonté des gens et donc ne donne aucune prise aux escrocs, menteurs séduisants, trompeurs professionnels de volonté ». Or le tirage au sort à la Chouard repose toujours sur des volontaires…
Il n’y a aucune réflexion sur la façon de garantir que les volontaires soient représentatifs de la population (sociologiquement, politiquement), aucune interrogation sur les processus sociologiques qui font qu’on se déclare ou non volontaires, aucune allusion à la possibilité que des minorités organisées s’imposent dans de tels processus. Il n’y a pas plus de réflexion sur la façon de réguler cette assemblée, l’information, la formation des citoyens tirés au sort… Qui est garant du processus de tirage au sort ? Qui veillera aux tentatives d’infiltration ? Quelles autorités garantiront l’honnêteté du processus ? Cette conception du tirage au sort revient à considérer la procédure comme un outil neutre, intervenant dans un espace vierge de débats et d’organisations.  C’est croire que les procédures résolvent ou dissolvent tous les débats et dissensus politiques comme par miracle12.

L’expérience des démocraties représentatives devrait nous apprendre qu’il ne suffit pas d’inscrire dans la constitution des principes pour qu’ils soient respectés, sauf à considérer que le tirage au sort dissoudra comme par enchantement la mécanique négative de l’élection...
Chouard se soucie beaucoup de la bonne diffusion de son idée de tirage au sort d’une assemblée constituante. « Comme ce changement ne se fera pas par le pouvoir en place (élus, médias, finances), il faut que le message se répande par la base ; il faut qu'on se passe le virus de la démocratie, jusqu'à ce qu'une majorité de citoyens l’appelle de tous leurs vœux ». Ce que cette phrase ne dit pas, c’est que cela signifie une stratégie d’alliance tous azimuts et l’infiltration des mouvements écolos, citoyens, Nuit debout. Les faits sont bien établis.

Sous prétexte d’organiser des « altermanifs », Les citoyens constituants se sont ainsi présentés sur une manifestation de la manif pour tous, le 26 mai 2013, afin de prêcher leur bonne parole pour le tirage au sort. L’opération a été rééditée le « jour de colère » du 26 janvier 2014, organisé par de nombreuses organisations d’extrême droite avec le soutien d’Alain Soral et de Dieudonné.  Quant aux Gentils virus, leurs pratiques non démocratiques sont bien soulignées dans un texte témoignage mis en ligne par un groupe de militants d’Alternatiba relatant leur expérience avec les Gentils virus. Enfin, plus récemment, un des animateurs des GV a rédigé un mode d'emploi pour infiltrer Nuit debout, que nous avons décrit par ailleurs. Les GV sont parvenus également en avril 2016 avec d'autres organisations d'extrême droite à se faire accueillir dans un regroupement de mouvements citoyens dénommé Synergie démocratique. D'autres fois, ils sont présents sans se déclarer. Il n'est donc pas  étonnant que Chouard renvoie sur son site vers celui d'Égalité et réconciliation d'Alain Soral qui se définit lui-même comme un "national-socialiste".

La fin est dans les moyens comme l’arbre est dans la sève. Le contenu de son projet comme la méthode de dissémination préconisée par Chouard et ses organisations satellites ne relèvent ni de la « vraie démocratie », ni de la « démocratie réelle », mais représentent bien une imposture théorique et politique.

Dans ses vidéos en ligne, il répond de manière affable aux questions qu'on lui pose, en se frottant régulièrement les lèvres d'un geste mécanique. Prétendant s'inscrire dans la lignée de l'éducation populaire, il appelle ses lecteurs et les personnes qui visionnent ses vidéos à s'approprier ses idées, et à évangéliser à leur tour. D'où la métaphore filée des "virus" qui vont gripper le système.

Cet activisme forcené, et le côté monomaniaque de leur revendication, contribuent à donner l'impression qu'ils sont réellement omniprésents. "C’est le principe de la minorité agissante, explique Rudy Reichstadt, fondateur du site Conspiracy Watch, l'observatoire du conspirationnisme : ils ne sont pas forcément très nombreux, mais ils sont en revanche très actifs, ce qui

Il faut dire qu'Etienne Chouard traîne un certain nombre de casseroles idéologiques qui contribuent logiquement à le marginaliser. Conspiracy Watch, qui veille attentivement aux références du blogueur, a révélé qu'en 2007, il adoubait déjà la thèse du complot sur les attentats du 11 septembre suite à sa rencontre avec le conspirationniste Thierry Meyssan. Il qualifiait alors celui-ci de "résistant", comme il le fait aujourd'hui avec Alain Soral, idéologue d'extrême droite fondateur d'Egalité & Réconciliation. Etienne Chouard a d'ailleurs animé un débat organisé par l'association conspirationniste ReOpen 911 en 2010. Il recommandait également sur son blog en 2011 un livre du théoricien du complot Antony C. Sutton et un autre du néonazi américain Eustace Mullins. Concpiracy Watch a également révélé que depuis 2011, des conférences d'Etienne Chouard ont été commercialisées par Culture libre, une association dont le fondateur est responsable de la section locale d'Egalité & Réconciliation (E&R) à Marseille13.

C’est une personne qui va chercher ses arguments dans des sphères assez marquées idéologiquement, pour ne pas dire d’extrême droite. Ces 'thèses' sont donc logiquement reprises et partagées dans cette sphère, estime le journaliste Thomas Huchon, qui participe à un groupe de veille de la fachosphère. Il crée, volontairement ou non, un cercle vertueux pour les thèses conspirationnistes. Il évolue dans une sphère qui partage une vision complotiste du monde, habillée d’un antisionisme de façade qui ne devrait plus tromper personne»

Etienne Chouard est également membre du groupe Facebook "Boycott Roshen" (une entreprise ukrainienne de confiserie frappée d'un embargo russe), à l'iconographie digne des années 30 : sur la photo en bannière de la page, l'homme d'affaire Petro Porochenko, président de l'Ukraine depuis le 7 juin 2014, est dessiné dans une baignoire remplie de sang, un sceptre avec une croix gammée à la main. Etienne Chouard a liké la page à l'invitation d'André Chanclu (vraisemblablement administrateur de la page), ancien militant du GUD et du Groupe d'intervention nationaliste, aujourd'hui à la tête du collectif France-Russie, qui vante les mérites du Kremlin.

Anthony Rêveur, un proche d’Étienne Chouard, a publié le 19 avril 2016 sur le média confusionniste Agoravox un article, publié également sur son blog, sous le titre « NuitDebout : 6 arguments libertaires contre l’exclusion ». L'article est un argumentaire à l’usage des militants d’extrême droite qui tentent d’infiltrer le mouvement Nuit Debout et se heurtent à des mesures d’expulsion.

Son auteur, qui signe Anthony Reveur, est un compagnon de route de Chouard. Pour cerner un peu mieux ce personnage, on peut consulter le blog Mediapart de Serge Victor qui a publié le 21 avril 2015 un billet intitulé « Confidences et mises en garde d’un ex-lieutenant d’Étienne Chouard ». Serge Victor voit dans ce récit la confirmation de « la collusion d'Etienne Chouard et de ses "Gentils Virus" (GV) avec des groupes d'extrême-droite parmi les plus dangereux, et les tentatives d'infiltration et de déstabilisation des partisans de Chouard au sein de la gauche radicale (PG, FdG et surtout m6r) ». Anthony Rêveur est cité dans les termes suivants dans le témoignage qui s’adresse au philosophe Yannis Youlountas :« Méfie-toi d’un GV en particulier sur face de bouc. Il se fait appeler Anthony rêveur. Tu ne le connais pas, mais lui te connait bien. Il n’est pas dans tes amis, mais d’autres le sont pour lui. C’est un des GV les plus proches d’Etienne. Il est tout sauf un ange, contrairement à son avatar (un angelot). Si tu vas voir, tu remarqueras peut-être dans ses amis les gens d’Égalité et Réconciliation, Étienne et surtout ceux qui sont les anciennes et prochaines cibles : Gabriel Rabhi, Kruger, Bellon, Jennar. C’est comme ça que ça fonctionne : on contamine au niveau des idées mais aussi en créant du réseau, des liens qui vont d’un bout à l’autre et qui finissent par faire tomber les barrières. » 


PS : je vous livre enfin les dernières perles du CCI

Les ouvriers égarés par la lutte contre le gouvernement Macron : « Qui peut sérieusement prétendre que ces slogans sont “apolitiques” ? En réalité, dans le mouvement composite et interclassiste des “gilets jaunes” n’existe pas une, mais des expressions politiques diverses et variées, un véritable kaléidoscope reflétant les nuances multiples provenant des couches intermédiaires que forment notamment la petite bourgeoisie et dans laquelle se sont égarés beaucoup d’ouvriers qui, en raison du vide laissé par la classe ouvrière, sont réduits à rester de simples “citoyens” attachés à la “nation”.

Un mouvement « souillé » et assimilable à l'apolitisme fasciste des années 1930 : « Une chose est certaine, le prétendu “apolitisme” n’a malheureusement pas d’autre effet que de déposséder les ouvriers mobilisés et de les diluer dans un magma informe, allant du lumpen proletariat aux petits patrons, en les privant de leur autonomie de classe et de leurs propres moyens de lutte. Comme elle n’est pas un mouvement de la classe ouvrière, cette protestation n’a pu prendre que la forme disséminée de piquets, d’attroupements, de poussées violentes et aveugles, de guérillas urbaines, de casse et de pillages sur fond de chants nationalistes et même parfois de propos xénophobes. Qu’un tel mouvement puisse s’accommoder d’expressions politiques réactionnaires et xénophobes de la pire espèce, de chants patriotiques et nationalistes sur les Champs-Élysées notamment, sans s’en démarquer ni les rejeter fermement de manière explicite, témoigne de la souillure morale qu’un tel mouvement, au-delà de sa colère légitime, peut véhiculer. Même si la période est totalement différente aujourd’hui, le prolétariat ne doit pas oublier que c’est au nom de “l’apolitisme” que le fascisme s’est imposé dans les années 1930 ».

Ce n'était qu'un mouvement puant de la petite bourgeoisie haineuse : « Le prolétariat ne doit donc pas se fourvoyer dans des pratiques de guérilla urbaine enfermée par les slogans nationalistes de la petite bourgeoisie haineuse et révoltée, mais au contraire s’ouvrir sur un mouvement massif à vocation internationale, un mouvement unitaire dont la perspective est l’abolition consciente des rapports sociaux capitalistes. Un combat historique et mondial dont l’objectif politique est l’abolition des classes sociales et la réunification de l’humanité. »


NOTES


1Et du lancer de cons chez le saltimbanque Hanouna.
2Commentaire anonyme : « Le fameux grand débat donne bien l'occasion à l'énarque Macron de faire son show d'éloquence et à moindre frais sa campagne européenne . Ou est donc le Csa ? Tous les partis politiques en course pour les européennes devraient avoir un même temps de parole que Macron au sein du grand débat ou en parallèle à la tv .Schiappa , elle , fait du Macron , adule son discours antifrancais ( les français comme ci , les français comme ça ) , Schiappa , c'est la croupie bobo du pianiste Macron qui joue à la playmate chez Hanouna . C'est la politique spectacle à plein régime . Bientôt le gouvernement va faire un spectacle au moulin rouge « .

3Priscilla nous a transmis l'article de Médiapart : https://drive.google.com/file/d/1pDRSS25sl203BPA0JIMNnlOtaAwMJCqb/view

4Le chiffre est conforme à l'espoir d'avoir 10.000 participants "minimum" affiché par les organisateurs.Alors que la tête du cortège scandait "Oui à la démocratie, non à la révolution !" sous une banderole "Stop aux violences", les manifestants arboraient quelques drapeaux français et une poignée de drapeaux européens. Ils répondaient à un "appel à la majorité silencieuse qui reste terrée chez elle depuis dix semaines", selon les termes de l'initiateur de la marche, l'ingénieur toulousain Laurent Soulié. C'est depuis sa page Facebook que celui-ci a lancé mi-décembre l'idée de cette marche, avant d'être rejoint par le collectif des "foulards rouges", né fin novembre pour protester contre les blocages des "gilets jaunes". Cette majorité silencieuse ne fût guère impressionnante tant elle est si bruyante grâce aux médias aux ordres. On relève en passant l'intervention sucrée d'un jeune homme adorable ! « Redouane, 18 ans, est un « gilet jaune ». Ce dimanche, il est venu « se montrer » face à « ces foulards rouges qui n’ont rien compris ». Fustigeant un groupe de « bourgeois des Trente Glorieuses » face au « prolétariat majoritaire », il appelle les foulards rouges à « prendre conscience de la violence politique et policière du pays ». « S’ils se font gazer, ils deviendront des “gilets jaunes” », assure-t-il. « On n’est pas venu pour provoquer », ajoute le jeune homme.
5Article : « Honte à Macron et aux lâches gilets jaunes ». Le 19 nov : « Aucune mafia politique, aucune mafia syndicale n'aurait misé un kopec sur un projet aussi « populiste », « manipulé par le RN ». Cette « jacquerie » ne durerait que le temps d'une fleur coupée, coupée de toute ramification politique ou syndicale... ». Lors de l'acte II fin novembre : « Pas vraiment courageux les présumés porte-paroles en gilets jaune "choisis" (préselectionnés avant hors du champ de la caméra) qui ont dénoncé au micro de BFM les violences alors qu'ils les avaient regardées avec grand plaisir sur place, les jugeant inévitables (eh oui...) puisqu'on bloquait leur possible réception (ou intronisation) au grand palais élyséen. Excepté au début des fugaces interviews en matinée où de jeunes manifestants cagoulés ou non avaient refusé de s'associer aux questions lâches des journalistes, on n'entendit plus dans la soirée qu'une dénonciation pleurnicharde et bc bg de la violence par monsieur n'importe qui vêtu de gilet jaune; horrible violence bien entendue pilotée par l'obscure l'ultra-droite, nouvel axe du mal pour Madame la Marquise et ses palefreniers mal rasés et puants de servitude. Daech n'étant plus qu'un mauvais souvenir ».
6Ces spécialistes de l'organisation en kit, surtout des luttes syndicales, se précipitent toujours pour chapeauter. Par refus du substitutionnisme ce n'est nullement l'attitude que doivent avoir de vrais révolutionnaires, la question est : ou le mouvement est capable de secréter lui-même ses propres organismes ou il ne l'est pas, alors il doit mourir. En général, dans les révoltes ou révolutions l'organisation se met en place tout de même très vite, là rien, donc c'est mou est destiné à disparaître comme je l'ai écrit il y a deux mois.(Par mollesse je n'entends pas absnece de radicalité de casse dans les rues ni coups de gueule, mais incapacité à créer de vrais organismes représenttaifs et contrôlables. Début janvier de cette année dans l'article « Quel avenir pour les gilets jaunes ? » je me demandais qu'est-ce que c'était cette dénomination « notre famille » par Drouet, on verra plus loin ici que ce n'est ni brillant ni légitime.
7Le niveau de débat semble avoir en tout cas été plus élevé que partout ailleurs en France, et loin des ordures écchangées sur les réseaux : « Eric défend le RIC, à fond. «RIC, RIP, truc, barbatruc», se moque une membre de la commission «organisation locale». Chantal vient d’Ariège et, pour elle, le RIC est une mauvaise idée : «Quand on demande l’avis des gens, c’est surtout les bourgeois qui répondent, je ne veux pas qu’on nous confisque le débat.» Pendant ce temps, Eric continue d’aller de table en table.Ce dimanche matin, le rapport aux syndicats est un autre des sujets brûlants. La veille, un ancien syndicaliste attrapait le micro jaune pour dire son dégoût. Il insiste : «Les directions sont intégrées à l’appareil d’Etat, on doit s’adresser à la base.» Certains proposent la création de groupes gilets jaunes au sein des entreprises. Dans leur compte rendu, le rapporteur résume : «Il faut construire avec les syndicats en tenant éloignés les directions… et surtout ne pas oublier les chômeurs, ça passe, par exemple, par l’occupation des Pôle Emploi».
8Chassez le trotskiste il revient au galop même déguisé en curé s'il le faut. Robert Paris qui se démène comme un beau diable sur les réseaux en balançant toutes les infos imaginables pour entretenir l'indignation de base, a même inventé un « GILET JAUNE insurgé », où l'on peut redécouvrir ce caméléonisme délicieux mêlé d'opportunisme et de rouerie du léniniste dans la naphtaline : « Si nous voulons que plus personne ne parle en notre nom ou récupère le mouvement, il faut impérativement nous coordonner nationalement pour qu’une expression issue des comités de Gilets Jaunes coordonnés émerge. »Au RIC bidon de Macron-Philippe, Organisons le vote d’un RIC pour enlever le monopole de l’argent et du pouvoir aux Riches !!! Fini le pouvoir des milliardaires et des forces de répression à leur service ! Tout le pouvoir au peuple travailleur ! » Même son ancienne secte, LO, n'a pas osé cela.
9En 1968, le gaullisme et ses partisans même dans les lycées se disaient apolitiques. La secte CCI, voit du fascisme partout avec sa dégénérescence gauchiste. L'apolitisme, de tout temps, c'est laisser la politique à d'autres, aux spécialistes de la bourgeoisie, comme à tous les racoleurs genre Chouard. Avec le développement du sport à la fin du 19 ème siècle, la bourgeoisie progressiste s'efforce de généraliser le sport interclasse dans les clubs ouvriers sans considération de politique au début des années 1920, ce n'est qu'ensuite quele fascisme comprendra l'utilité interclassiste du sport.
10« Nous dénonçons certains agents des autorités qui ne respectent pas les conditions d'utilisation de leurs armes et s'en servent avec la volonté de briser des vies. Ils ternissent l'image de leurs collègues qui ont encore une conscience et du bon sens, il faut donc briser leur vie en les banissant du maintien de l'ordre, ils ne protègent pas les français mais les agressent et sont la honte de leur profession ». (le communiqué a dû être rédigé par un avocat légaliste et bon en ortho.)
11http://www.revue-signes.info/document.php?id=4425
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12https://blogs.mediapart.fr/antoine-bevort/blog/290616/chouard-et-democratie-une-imposture-intellectuelle-et-politique

13https://www.lesinrocks.com/2014/11/23/actualite/comment-les-gentils-virus-detienne-chouard-contaminent-web-11536153/
Un aperçu de la bouillabaisse GJ, résistance bourgeoise et fachos de salon.