PAGES PROLETARIENNES

dimanche 22 septembre 2019

Giletjaunisme : Rebel without a cause



et le CCI cause without rebel....

CONVERGENCES DIVERGENCES ALLEGEANCES...


Je m'apprêtais à écrire un article sur les ravages de l'infantilisme climatique, cette orchestration ridicule « pour sauver le climat » autour d'une gamine suédoise autiste (certes de la catégorie ultra intelligente), Greta Thunberg qui serait l'égérie du siècle pour une jeunesse universelle sans cervelle et sans autre conscience pour meubler la vacuité politique bourgeoise que la tambouille écolo-bobo. Campagne dans l'urgence qui, à mon humble avis, n'est qu'une farce pour conjurer le tout prochain chaos économique, voire une guimauve pacifiste généralisée pour conditionner à une possible troisième boucherie mondiale... Nuançons que pour l'heure j'exagère...
Je m'apprêtais seulement à recenser les appels des jeunes bobos cadres (inquiets de la situation climatique) jusqu'aux vestes jaunes les plus repenties (inquiets de la situation sociale) prêtes à converger derrière l'idéologie bourgeoise la plus martelée quotidiennement pour nous convaincre que la préservation de la terre prime sur les luttes des classes1. Ce samedi 21 septembre s'annonçait comme un possible front unique des bobos écolos et des dernières vestes jaunes à la dérive ; le pirate Rodrigues, troisième larron du trio aventurier avec Drouet et Nicolle casquette à l'envers l'assurait: «Il faut que le mouvement mute. Je suis pour converger vers la lutte contre le mal-être, pour la justice environnementale et pour intégrer des cortèges différents». Une « nuit des barricades » était prévue. Les agités en veste jaunes, apparemment surtout quelques vieux et retraités avec l'aide de leurs potes black blocks, ont en vérité rendu service au pouvoir, qui s'est permis de les ridiculiser sans coup férir par un quadrillage policier très loin du laisser-faire qui avait marqué certains samedis troubles. Sous couvert de convivialité et de tolérance, le pouvoir n'a jamais lésiné sur les moyens terroristes. Comme dès le début de la révolte il avait donné ordre à ses flics de crever les yeux des manifestants, il rétabli sans fard les voltigeurs qui avaient été dissous après la mort de Malik Oussekine en 1986. Ces unités nommées BRAV (Brigade de Répression de l’Action Violente) ou unité anticasseur, précisément BRAV-M, mériteraient plutôt le nom de LACH-M. Cette nouvelle violence très redoutable dans des poursuites ciblées a d'ailleurs parfaitement réussi à défaire les velléités barricadières des obstinés en veste ou sans veste jaune. Cette efficacité, et la manière dont les télés aux ordres ont filmé la prise de contrôle militaire des rues, est venue combler une opinion qui en a marre des agitations stériles et dégonflées des résidus d'une protestation devenue depuis longtemps caduque.
Certaines minuscules sectes pensent pouvoir récupérer ou annexer cette campagne « climatique » bourgeoise en assurant avec un marxisme simpliste et ridicule « seule la classe ouvrière peut sauver la planète » ! Or, comme pour la circulation automobile ou le partage des richesses la classe ouvrière n'a pas plus à dire son avis sur l'écologie ou le réchauffement climatique réel ou exagéré. Même et surtout après la révolution ce n'est pas en tant que classe ouvrière qu'elle pourra ou pourrait être chargée de « sauver le monde des pollutions diverses engendrées par le capitalisme » !
Après le renversement du capitalisme il n'y a plus de place pour les classes, le prolétariat devient lui-même classe universelle donc non classe, cette humanité libérée de l'aliénation bourgeoise peut en effet s'attaquer aux diverses questions dramatiques, satisfaire tous les besoins humains, faire disparaître les engins de mort, s'occuper bien sûr de sauver la planète des exactions du capitalisme, etc2. L'idéologie écologiste est un bla-bla apolitique qui tente de faire croire que si les classes restent cloisonnées par les règles du profit et du foutage de gueule, elles auraient « dans l'urgence » (mais laquelle et si confusément définie par le ramdam médiatique?) un intérêt commun, suivant cet OVNI « grève générale pour le climat » prêtée aux jeunes du monde entier indistincts avec ou sans dents. A moins qu'il ne s'agisse d'exorciser d'éventuelles grèves générales renaissantes d'un monde (ouvrier) qui est susceptible d'avoir disparu. Ce qui n'est pas pour déparer avec les multiples récupérations idéologiques bourgeoises : les grèves syndicales sclérosées systématiquement en réactions corporatives impuissantes, l'internationalisme détourné en immigrationnisme charitable chrétien, l'antifascisme remplacé par l'antiracisme3, etc.

Campagne mondiale avec la môme suédoise, manifestations massives de bobos écolos en Allemagne, ratées en France, l'écologisme comme le giletjaunisme est sans programme de changement de société. La bobologie universelle ne se sent plus pisser mais reste terriblement transparente et médiocre, servant encore de dentelle à n'importe quel politicien. Sur ce sujet qui veut nous mener en bateau, l'article du CCI de 2013 sur l'idéologie verte reste une référence et d'actualité4.
Je m'apprêtais à démontrer une nouvelle fois que l'idéologie verte est contre révolutionnaire dans le sens où Marx pose la problématique dès 1844 : « La Nature, prise abstraitement, pour elle-même, fixée dans la séparation d'avec l'homme, est pour l'homme néant », quand l'aliénation écolo est venue se glisser dans le processus de satisfaction des besoins humains pour huiler la tentative de ressourcement industriel du capitalisme à l'agonie (bla-bla sur la taxe carbone, réchauffement climatique)... lorsque le CCI est venu atterrir dans ma boite mail donnant de ses nouvelles mensuelles, avec un supplément fort intéressant au premier bord et qui semble tout dire de manière définitive : Bilan du mouvement des “gilets jaunes”: Un mouvement interclassiste, une entrave à la lutte de class5e.
Par une lecture rapide, et sur le fond il n'y aurait rien à redire du point de vue marxiste et révolutionnaire. Sauf qu'il accorde bien trop d'importance à ce mouvement en effet mélangeant les classes sans permettre à la classe ouvrière d'en détenir contrôle et direction politique et sociale. Sauf que le CCI, comme la plupart des sectes, couples et individus maximalistes est toujours en décalage par rapport à la réalité du conflit permanent des classes.

COMMENT UN PETIT GROUPE POLITIQUE COURT DERRIERE LA REALITE ?

En prétendant faire le bilan d'un mouvement de révolte, pourtant déjà out depuis au moins janvier de cette année, on tente de nous faire croire non à une simple science infuse mais à une sorte d'omniscience et lucidité du groupe du début à la fin de la révolte des vestes jaunes qui ont ramassé une veste définitive (je croyais même qu'il pourraient égaler en durée les poujadistes).

C'est dans la seule note du « supplément » qu'on trouve le pire mensonge et la pure félonie pour masquer l'incapacité de ce groupe, pourtant vintage, à saisir le sens initial de la révolte ; malgré mes objurgations répétées, il est resté sans voix durant les deux premiers mois de la « jacquerie », pour finalement passer son temps ) l'accabler de son mépris comme la plupart des groupes gauchistes d'ailleurs. Voici une aberration condensée :

"1) C’est cette nature interclassiste du mouvement des “gilets jaunes” qui explique pourquoi Marine Le Pen a salué dès la première heure un “mouvement légitime” du “peuple français” ; pourquoi Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, a soutenu ce mouvement : “Il faut bloquer toute la France…), il faut que la population française dise à ce gouvernement : maintenant ça suffit !” ; pourquoi Laurent Wauquiez, alors président de Les Républicains a qualifié les “gilets jaunes” de “personnes dignes, déterminées, et qui demandent juste qu’on entende les difficultés de la France qui travaille” ; pourquoi le député Jean Lassalle, à la tête de Résistons, a été l’une des figures du mouvement et arboré son gilet jaune à l’Assemblée nationale comme dans la rue. Tout mouvement prolétarien, à contrario, est toujours soumis à un puissant réflexe de rejet et aux calomnies de la part de la classe dominante ».

Laissons de côté la dialectique marxiste, mais plaçons-nous au plan du simple raisonnement déductif logique face à la technique du raccourci propagandiste. Traduction : Marine Le Pen aurait saisi « dès la première heure » la nature « interclassiste » du « mouvement légitime du peuple français », passons sur les autres diablotins évoqués. Donc, malgré eux, ou leurs premiers supporteurs, les gilets jaunes n'auraient fait qu'exprimer les désirs (nationalistes) de la fille Le Pen ! A charge de revanche de deux mois de silence radio du principal messager mondial du prolétariat (en bonne et pure forme) c'est plutôt minable. Un tantinet élitaire de la part d'une orga de profs à la retraite qui rêvent d'un prolétariat qui se batte dans un remake bolchevique et conchient les gens de peu... D'accord il ne s'est pas enclenché un processus d'avenir révolutionnaire, et très vite les petits leaders autoproclamés se sont révélés aussi cons et limités que ceux des « Nuit debout ». Mais franchement reprendre le principal argument du gouvernement Macron comme bilan du mouvement... à ses débuts, c'est du brejnévisme poussif... Pas si interclassiste que cela si on lit le supplément au cœur :

« Ce mouvement des “gilets jaunes” n’est, au mieux, rien de plus que la manifestation la plus visible et spectaculaire de l’énorme colère qui gronde au sein de la population et particulièrement dans toute la classe exploitée face à la vie chère et aux mesures d’austérité du gouvernement Macron. Il n’est, au mieux, rien d’autre qu’un signe annonciateur des futurs combats de classe du prolétariat. De nombreux ouvriers se sont mobilisés contre la pauvreté, les attaques économiques incessantes, le chômage, la précarité de l’emploi… Mais en rejoignant les “gilets jaunes”, ces ouvriers se sont momentanément égarés, ils se sont mis à la remorque d’un mouvement menant dans une impasse. C’est cette impasse qui permet aujourd’hui au gouvernement Macron de redoubler d’arrogance en continuant de plus belle à porter de nouvelles attaques ».

Comment, si vous n'avez point oublié l'entame du titre « entrave à la lutte de classe », un mouvement « salué par Marine Le Pen », peut-il soudain être devenu « au mieux … manifestation la plus visible d'une énorme colère... particulièrement dans toute la classe exploitée »... Mieux mieux « au mieux, rien d'autre qu'un signe annonciateur des futurs combats de classe du prolétariat »... Mieux mieux... avec des ouvriers égarés et « à la remorque d'un mouvement menant dans une impasse ». Alors qu'on a pu constater, même dans la presse bourgeoise, que les ouvriers avaient été aussi muselés qu'avec les « nuit debout », que cette même presse voit plus clair que la faction CCI maximaliste puriste : la queue du giletjaunisme a été absorbée par le gauchisme et n'en est plus qu'une variante plus ou moins allégeante et alléchante à l'écologisme bourgeois. Le problème n'est pourtant pas de conférer une paternité à cette jacquerie comme moment annonciateur d'un futur mouvement vraiment « de classe avec AG et grève généralisée et tout et tout », mais d'analyser la signification de ce qui s'est passé dans le rapport des classes et à l'Etat de type monarchique et même pas démocratique !
L'entrave est devenue une impasse, (qui n'avait pas la prétention d'empêcher la lutte de classe la vraie) tout en agitant la venue de la révolution « véritablement prolétarienne » qui ne vient jamais et cela dépasse notre entendement. Tout ce gourbi pour continuer à masquer l'inaction pendant deux mois des spectateurs maximalistes derrière leurs écrans de salonards face à un mouvement d'emblée coiffé par la mère Le Pen (même Macron n'avait pas osé dire cela). Dans le cas de nos révolutions référentielles où est la classe ouvrière ? Le début de la révolution de 1905 est la pétition d'un pope...que Marine Le Pen aurait évidemment salué ! En février 1917 c'est au cours de la journée internationale des femmes pour le pain que le mouvement va se cristalliser... et que Marine Le Pen aurait salué... ceci prouvant son inanité. De janvier à Octobre 1917, ce n'est pas spécialement la classe ouvrière qui est la vedette de l'actualité, mais certainement que Marine Le Pen eût salué le putsch de Kornilov... La groupe CCI n'aurait pas pu suivre pendant tout ce temps le déroulé des événements car l'industrie informatique voyeuse n'avait pas encore été inventée ni la TV.

Pourtant dans le bilan on passe sur l'essentiel, l'attaque frontale sur les lieux du pouvoir le premier décembre 20186, où en effet le pouvoir a été surpris et apeuré. Moment remarquable et rare qu'il ne faut pas oublier comme la fuite à Baden-Baden de De Gaulle en mai 1968. Le groupe essaie de faire passer ce moment pour une feinte du pouvoir croyant l'Etat impavide et imprenable, preuve de son aveuglement de secte hors de la réalité. C'est rare, c'est bref, mais il y a eu quelques moment d'instabilité étatique au XXe siècle qui même s'ils n'ont pas abouti à leur renversement, montre que les Etats sont périssables. Ce moment, qui avait ému la « communauté bienséante internationale » ne doit pas être oublié. Il révèle que si l'ensemble de la population même composée d'une petite partie de la classe ouvrière, est décidée à forcer les portes du pouvoir, si plus aucun parti et syndicat ni porte-parole n'est pas présent comme pute intermédiaire7.
Et, désireux de décrédibiliser complètement tout apport de la jacquerie à la confrontation des classes – qui a pourtant beaucoup inquiété l'Etat pour avoir repoussé les offres de récup syndicale – le supplément, toujours dans une maïeutique tordue, plus perverse que logique, est tout d'abord contrarié de cet échappement à l'emprise syndicale, zigzague sur « une difficulté de la classe ouvrière à exprimer sa combativité » du fait du sabotage syndical (c'est nouveau?) pour nous assurer que ces maudits gilets jaunes ont piqué l'idée aux ouvriers !

« Le mouvement des “gilets jaunes” ne s’est pas développé seulement en dehors des structures syndicales, il s’est aussi positionné en grande partie contre. L’ampleur de ce mouvement interclassiste s’explique par la difficulté de la classe ouvrière à exprimer sa combativité du fait de toutes les manœuvres syndicales de sabotage des luttes (comme on l’a encore vu récemment avec la longue grève perlée à la SNCF). Ce mécontentement contre les syndicats qui existe au sein de la classe ouvrière a été récupéré par ceux qui ont lancé le mouvement ».

Encore une bonne vieille vision ouvriériste me direz-vous ? Oui, certes mais surtout une vision d'étanchéité doctrinale qui réserverait à la seule classe ouvrière la conscience du rôle de saboteurs des encadreurs professionnels intermédiaires. Comme si les artisans, les paysans et même les fonctionnaires flics n'éprouvaient pas le même dégoût des corps intermédiaires de l'Etat bourgeois ! Alors qu'il faut se féliciter au contraire de cette capacité, même de la part de leaders petits bourgeois à refuser de composer avec le syndicalisme, attitude qui leur valait mépris d'ailleurs de la part des instances gauchistes !

Etre hors de la réalité, comme on vient de le voir pour le groupuscule minuscule CCI, c'est gommer deux moments clés et inoubliables de la jacquerie dans sa période initiale : attaque sans gants du lieu de l'Etat et rejet de ses principaux larbins syndicaux. Mais courir derrière la réalité est encore pire avec l'usage du raccourci propagandiste. Il s'agit maintenant de faire la leçon du mouvement ouvrier vintage et, au passage, avec le même style de raccourci, d'accuser les vilains canards comme moi et plusieurs de mes correspondants éjectés de la secte, pour des supporters … des patrons :

« Ce que beaucoup de supporters du mouvement des “gilets jaunes” veulent faire passer, c’est que les méthodes de lutte des salariés (grève, assemblées générales souveraines et manifestations massives, comités de grève…) ne mènent à rien. Il faut donc faire confiance maintenant aux petits patrons (qui protestent contre les taxes et l’augmentation des impôts) pour trouver “d’autres méthodes de lutte” contre la vie chère, pour améliorer les institutions démocratiques et la représentati­vité, et rassembler tout le “peuple de France” ».

Là aussi, il y a une maille (raccourci) qui ne passe pas dans le discours pervers, on ne sait pas qui dit réellement que les « méthodes grévistes » ne servent plus à rien, ce qui est pourtant globalement le cas dans ce monde de l'urgence et de la décomposition sociale et politique ; on passe d'une négation vague à une affirmation que les mêmes critiques du ronron gréviste corporatif « font confiance aux petits patrons » ! Beaucoup de leaders auto-proclamés n'étaient pas petits patrons. Mais cet amalgame insensé fait passer sous la table l'aspect insurrectionnaliste dans la bagarre des classes (car il s'agit bien d'une bagarre de classes même avec connotation petite bourgeoise dominante) : le rejet des syndicats était une violence. Le désir de ne pas lambiner en pourparlers inutiles était d'esprit plus révolutionnaire que nos pleureuses du CCI, loin des bagarres aux ronds-points ou sur les Champs, devant l'écran plasma... Puis au lieu de souligner et souligner encore cet épisode notoire et à marquer d'une pierre blanche, plus que la grève corporative à Trifouillis-les-oies, le supplément nous invite à surtout noter que « les syndicats en ont profité pour tenter de limiter leur discrédit », ce dont on se branle royalement. Au lieu de dénigrer tout mouvement de révolte qui n'est pas purement prolétarien, avec le terme de la langue de bois maximaliste, incompréhensible pour le citoyen lambda, "interclassisme", il eût été plus intelligent de réfléchir au fait que de larges couches de la population, ni vraiment profiteuse ni complètement salariée, sont devenues hostiles aux attaques économiques et morales de l'Etat bourgeois, et de cesser de les mettre en demeure de se mettre à genoux dans l'attente du prolétariat messianique qui ne viendra jamais puisqu'il sera ce qu'il a toujours été et demeure, un aiguillon central dans la lutte pour changer la société mais pas le seul acteur de ce bouleversement.

COURIR APRES LA REALITE POUR LA REFABRIQUER avec le passé

La jacquerie en jaune (sic) n'a été qu'une occasion pour le pouvoir de se pérenniser, reste une tâche ardue : « Le prolétariat doit recouvrer son identité de classe ». Psychologie de comptoir ou nouvel arrangement avec la réalité ?

« La classe ouvrière traverse une période difficile. Depuis 1989, avec les campagnes sur l’effondrement du stalinisme identifié à la prétendue faillite du communisme, le prolétariat n’a pas été en mesure de retrouver son identité de classe et de se reconnaître en tant que classe et sujet révolutionnaire. Incapable d’esquisser les contours d’une société sans exploitation, la classe exploitée, manquant de confiance en ses forces, demeure très vulnérable et se sent impuissante sur le terrain de la lutte ».

Il faut certainement rester dans ses charentaises dans le fauteuil du salon pour geindre pareillement. Le CCI n'est-il plus qu'un pauvre vieillard cacochyme ? Que signifie ce terme « identité de classe » ? Une concession aux diverses identités communautaristes ? Le terme n'existe pas chez Marx ni dans le marxisme. Pour les économistes classiques, les critères d'identité d'une classe résident dans l'origine des revenus : aux trois types de revenus, la rente foncière, le profit, et les salaires, correspondent les trois grands groupes de la nation les propriétaires fonciers, les entrepreneurs et les travailleurs. Existence de classe ? Conscience de classe était le terme habituel jusqu'à l'invention du CCI. Hors de la réalité (révisionnisme Kafka?) le CCI identifie les prolétaires en général à des crétins congénitaux, confondus certainement avec les pauvres hères qu'on exhibe dans les jeux télévisés :

« La classe ouvrière n’est même pas consciente de son existence en tant que classe antagonique à la classe bourgeoise et distincte des couches sociales intermédiaires (notamment la petite bourgeoisie). Elle a perdu la mémoire de son propre passé, et ne parvient même pas se référer à son immense expérience historique, dont elle a même honte puisque sans cesse la bourgeoisie assimile le mot ouvrier à une espèce disparue et le mot communisme à la barbarie du stalinisme ».

C'était le propre du stalinisme de « penser à la place » du prolétariat, et même en général chez la plupart des marxistes orthodoxes. On nuance ensuite que le prolétariat est toujours là « bien vivant » ; quelle concession à ce que l'OBS bourgeois ne met même pas en cause, et même de solides organes bourgeois comme le Figaro, qui se fiche d'une quelconque identité du prolétariat mais qui sait mieux que Libération qu'il reste la principale classe dangereuse, indépendamment des aléas des convulsions politiques et géostratégiques de la bourgeoisie mondiale depuis trente ans.

Le groupe kafkaïen se réfugie dans un passé mythifié qui comporte toujours les mêmes dates comme les radars que bousillaient les vestes jaunes, dates devenues mystiques qui :

« ...n’ont rien de commun avec le mouvement populaire interclassiste, faussement radical et jusqu’au-boutiste des “gilets jaunes”. Quand le prolétariat développera sa lutte, ce seront les assemblées générales massives, souveraines et ouvertes à tout le monde qui seront au cœur du mouvement, des lieux où les prolétaires pourront ensemble s’organiser, réfléchir aux mots d’ordre unitaires, à l’avenir. Il n’y aura alors pas de place pour le nationalisme mais, au contraire, les cœurs vibreront pour la solidarité internationale et unitaire propres à la grève de masse car “les prolétaires n’ont pas de patrie”. Les ouvriers doivent refuser de chanter La Marseillaise et d’agiter le drapeau tricolore, ce drapeau des Versaillais qui ont assassiné 30 000 prolétaires lors de la Commune de Paris en 1871 !
Pour préparer cet avenir, tous ceux qui ont conscience de la nécessité de la lutte prolétarienne doivent essayer de se regrouper, discuter, tirer les leçons des derniers mouvements sociaux, se pencher à nouveau sur l’histoire du mouvement ouvrier et ne pas céder aux sirènes, en apparence radicales, des mobilisations citoyen­nes, populaires et interclassistes de la petite bourgeoisie ! ».

C'est presque aussi beau que le camion du jusqu'auboutiste sans cause Eric Drouet ! Le prolétariat en chair et en os, en osmose et périphrase apportera la solution par la bonne parole des AG « ouvertes à tout le monde » (même aux gilets jaunes et aux bourgeois?). « Il n'y aura pas de place pour le nationalisme »... parce que celui-ci aura disparu comme par enchantement ? « Les cœurs vibreront » comme à la messe ? Interdiction de chanter la Marseillaise et de se pointer avec un drapeau tricolore... il faudra des flics prolétariens pour filtrer les entrées des rigolos qui se pointeront avec leur drapeau national versaillais, pourtant très 14-18, mais peut-être par un internationalisme surrané et naïf tolérer l'oriflamme algérien. Aucune analyse du phénomène de repli national frileux, de ras-le-bol du multiculturalisme, de l'hypocrisie de l'antiracisme, de la redondance écologique, de l'invasion de la « culture » musulmane, de l'inabordable sujet de l'immigration... tous ces sujets sont impurs face à la pure lutte de classe (svp). Comment expliquer qu'une partie de la classe ouvrière ne veuille plus en être, succombant à l'idéologie du petit entrepreneur, refusant le statut de salarié comme les viles tâches quand les patrons sont bienheureux de recourir au travail des migrants lesquels ne veulent pas plus se considérer comme classe ni renier leur religion d'origine...un monde qui ne fonctionne donc plus comme avant où les classes, les sexes et races se chevauchent, se mêlent, s'entremêlent et s'en mêlent au nom de l'individu roi. Apologie du multiculturalisme et mépris des cultures nationales renforcent le pouvoir d'aliénation de la classe toujours plus dominante.
La révolution la vraie la pure, "aculturelle" (x), obéira aux schémas du passé même si ceux-ci sont caducs ou notoirement irréels dans la confusion régnante, où ce n'est plus la classe ouvrière qui est la seule victime de l'aliénation et de l'exploitation capitaliste ni une espèce de corridor qui permettrait seul de s'indigner et de lutter contre l'Etat. Une classe pure face au reste constitué de fachos et d'affreux gilets jaunes, voilà tout.

Il faut discuter « de la nécessité de la lutte prolétarienne », mais il n'est pas dit où et comment, ni pourquoi et avec quel programme, parce que le CCI n'a pas plus de programme contre la déréliction du monde actuel que nos derniers mohicans en veste jaune. On rejette, on dénonce mais c'est du domaine de l'invention du passé restauré, de la mièvrerie utopique qui se sert des maillons du passé comme de recettes révolutionnaires d'avenir. La bourgeoise a pillé et dévitalisé la plupart des concepts qui faisaient honneur à la vieille « gauche communiste » maximaliste, et elle ne s'en rend même pas compte. Le supplément invraisemblable n'a été lu que par soixante personnes, dont acte.

On ne se trempe jamais deux fois dans le même fleuve disait un philosophe chinois. N'est-ce pas ?




NOTES

1La formation idéologique de base pour jeunes patrons et cadres est une unité en plein essor. « Le Parisien » présentait comme un écolo lambda un des pires bureaucrates de l'idéologie écologiste, polytechnicien, qui a le culot de prétendre que « le salaire n'est pas la priorité », (le sien bien sûr comme ingénieur...) : "Ce qui est sûr, c'est que je vais travailler pour la transition écologique", affirme le jeune homme qui a déjà une idée très précise de la manière dont il va sélectionner son futur employeur : « Quand je serai en entretien d'embauche pour une entreprise, je poserai des questions sur leur stratégie environnementale, et ce sera à moi de juger si je la trouve assez ambitieuse ou pas". Preuve supplémentaire de son engagement, Benoît Halgand fait partie d'un groupe d'étudiants qui alerte les chefs d'entreprises en prenant la parole dans des séminaires de grands groupes. L'objectif est de rappeler aux cadres l'urgence climatique, mais également leur dire qu'ils auront du mal à les recruter sans donner de vrais gages sur leur politique environnementale ».
"Là où autrefois, 60 à 70 % des jeunes sortis des grandes écoles allaient dans l'économie conventionnelle, c’est-à-dire des grandes groupes, des grandes entreprises, des grands secteurs industriels ou la finance, ils sont aujourd'hui environ 30%", affirme la directrice du groupe SOS Transition Ecologique. Quant aux 70% restants, ils se répartissent "entre économie sociale, entreprise familiale, ou création d'entreprise". Au vu de la situation climatique, ces jeunes ne regarderont pas le salaire en premier ».
2Lire mon Manuel de préparation à l'insurrection du prolétariat, The end (2009).
3Cette dernière filouterie est dénoncée par un type que j'aime bien finalement, Alain Finkielkraut, dans son intéressante interview par l'OBS. Contre l'épouvantail climatique, il est aussi très subtil ! « Je plaide donc pour une écologie générale. Le principe de sauvegarde ne peut pas se limiter à la terre. Il doit englober la culture, la langue, le silence et la douceur de vivre ». J'ai rencontré deux fois Finkielkraut, en 1972 et en 2014, il peut venir boire un verre chez moi quand il veut.
4 https://fr.internationalism.org/internationalisme/201305/7096/ecologie-piege-mystification-et-alternatives

6https://www.franceinter.fr/societe/gilets-jaunes-chronologie-de-deux-mois-de-mobilisation
7On n'oubliera pas le génie de Drouet se rendant à la réunion ministérielle, face à un ministre déjà corrompu, refusant de discuter et filmant toute la discussion à l'insu des serviteurs étatiques. Même si par la suite il s'est gonflé les chevilles et n'est plus qu'un vulgaire anar.

(x) Sur l'aculture: http://gestion-des-risques-interculturels.com/risques/lillusion-aculturelle/

Tableau de mes dernières stats preuve que je ne vous raconte pas des bobards ni que je ne serais  lu que par 60 pékins.

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