PAGES PROLETARIENNES

vendredi 6 avril 2018

Bashing SNCF, épisode 4: NEGOCIATIONS PIEGE A CONS


Après la manif exploratoire du 22 mars, pas terrible malgré les satisfecits de la secte LO, la deuxième série séquentielle de la grève intermittente n'a pas soulevé d'énormes vocations parmi les masses exploitées par Micron 1er. Même le CCI n'a pas jugé utile de publier le moindre communique ou article pour au moins encourager les grévistes à ne pas se laisser berner trop longtemps par la comédie des conciliabules du "négoce" en permanence du gouvernement et de ses syndicats chéris, cette comédie de boulevard digne d'un Eugène Labiche qui aurait pu s'intéresser au philistin syndicaliste, à ses travers et ridicules comme au bourgeois, sa cible principale ainsi qu'il l'avoue au Figaro en 1880 : « Je me suis adonné presque exclusivement à l'étude du bourgeois, du philistin ; cet animal offre des ressources sans nombre à qui sait les voir. Il est inépuisable. C'est une perle de bêtise qu'on peut monter de toutes les façons. Il n'a pas de grands
vices, il n'a que des défauts, des travers, mais au fond il est bon, et cette bonté permet de rester dans la note gaie ». Bon et con finissent par la même lettre, disait ma mère1. L'essentiel n'est ni la revendication, ni la révolution, ni la cristallisation d'une conscience de classe, mais la négociation, cet art de gérer ensemble l'Etat capitaliste entre politiciens parvenus, même minoritairement au pouvoir, et valets syndicalistes à la vue bornée à leur seule corporation et carrière individuelle.

DES TRAVAILLEURS COMME MASSE DE MANOEUVRE...
Des conciliabules gouvernementeurs à foison... Vous ne le savez sans doute pas, mais au total, environ 70 réunions de négociation étaient prévues pour les mois de mars et avril entre le gouvernement et les syndicats. La causette à rallonge ils s'y connaissent ! Pas besoin d'avoir fait l'ENA ou une école de cadres cheminots. Pour se distraire un peu entre négociateurs ils ont jugé bon d'inventer un scénario de grève intermittente prolongée, prolongeable et gonflable. Certainement pour balader les ouvriers et employés de la SNCF mais aussi pour y convier des millions de spectateurs dont la seule solidarité chantée même par Le Figaro n'est envisagée que comme solidarité pécuniaire. Les cheminots ont été poussés à une grève séquentielle totalement encadrée, individualisée comme le vote politique isolatoire dans l'urne2, où la décision
le passif des conciliabules  moqué grossièrement...
finale comme initiale reste entre les mains des bonzes syndicaux anonymes, sans que personne ne pense un instant qu'ils agissent en concertation permanente avec leurs maîtres (les permanents syndicaux de hight class sont payés par l'Etat ou ses officines indirectes... de service public!). Il n'est pas né le chien qui mordra la main de celui qui le nourrit.3

« Posture » des syndicats selon la clique gouvernementale ! « Mascarade » de concertation selon les cliques syndicales. Hier six heures de palabres pour rien, et ce vendredi deux heures et demie dans une voie de garage exclusivement revendicative sur le négoce de la dette de 55 milliards d'euros de la SNCF versus le non transfert des cheminots vers des sociétés privées après l'ouverture à la concurrence."C'est une véritable mascarade" avec "un gouvernement qui brode", qui "n'a pas de propositions et qui ne règle pas les problèmes", a déploré Laurent Brun, secrétaire général de la CGT Cheminots."Le gouvernement avance à marche forcée pour tenter de nous asphyxier (…) Il n'y a pas eu de négociation », puis il a assuré que «la grève pourrait aller au-delà du mois de juin ».(oulala! le moment des vacances est propice à généraliser la lutte... sur la plage)
« On est dans une situation où le mouvement social risque bien de se durcir », a renchéri de son côté le ventripotent Roger Dillenseger pour l'Unsa (la presse écrite se gardant de préciser que le ton était plus courtois et qu'il ajoutait qu'il sentait tout de même venir la négociation). Voire de tomber à l'eau...

Ce même vendredi matin, la ministre des Transports, Elisabeth Borne (bornée?), pour son côté ministériel déplora que "la posture des syndicats ne change pas", et au contraire vanta des avancées dans le vaudeville syndical, estimant avoir "donné des garanties" aux cheminots qui partiraient chez la concurrence en cas de perte d'un marché par la SNCF à l'avenir. Ils conserveraient selon elle "l'essentiel des garanties du statut". En gros le gouvernement explique et les syndicats ne... veulent pas comprendre.
COMMENT DURCIR UN GROS MOU ? OU LA CRISTALLISATION IMPOSSIBLE
Les organisations dites « représentatives » à la SNCF (CGT, Unsa, SUD, CFDT), pourtant étrangères au mouvement ouvrier, sont sorties du ministère après ces deux heures et des broquilles aussi « scandalisées » les unes que les autres comme si la négociation avait été violée . . «Les cheminots vont augmenter la pression», a surenchéri le bonze CFDT Didier Aubert, annonçant dans certaines régions «quatre à cinq points de plus» de mobilisation pour les deux prochains jours de grève. «Le gouvernement a besoin d'une nouvelle démonstration», a-t-il assuré."Hélas, les cheminots vont devoir se mobiliser dimanche et lundi (...) Nous sommes partis sur un conflit qui risque de durer si le gouvernement ne revoit pas sa méthode", a menacé le bonze de la CFDT.
La clique syndicale,qui passe pour la plus radicale, a re-surenchéri par la voix de Erik Meyer de SUD Rail«C'est absolument inacceptable ce qui vient de se passer aujourd'hui», et en annonçant avoir l'intention de «proposer lundi de durcir le mouvement». Le même représentant de clique syndicale, interrogé le soir sur BFM, assurait que « les syndicats restent unis » autour de la défense du service public et d'une SNCF non basée sur le profit4 ; la plupart des sous-fifres syndicaux ont leur deux minutes de gloire devant micros et caméras mais pour radoter les mêmes discours faux sur l'unité dans la lutte « du privé et du public », triste racontar comme en 95 et dans les années 2000 où le privé n'a pas la force pour faire grève ou reste isolé et sans soutien des grands groupes nationalisés. Ce n'est pas pour une véritable convergence qu'ils militent ces arsouilles, convergence des travailleurs eux-mêmes d'où qu'ils viennent, mais pour leurs amalgames troubles entre cartels syndicaux en lutte des places. La cristallisation des luttes sociales est impossible tant que ces menteurs professionnels, camelots des vieilleries nationalisées et sans projet politique alternatif, occupent le devant de la scène. La grève planifiée et dévitalisée a autant à voir avec mai 68 que le défunt programme commun avec Octobre 17.
Ce qui est le plus honteux c'est bien cette défense de la comédie de l'unité des cartels syndicaux alors qu'on sait qu'ils vont se diviser lors du sprint final (comme toujours), et cette inféodation au mythe de la représentativité de ces organismes d'Etat si on compare avec le caméléonisme de leurs pères en trotskysme en 1968 (mais poussés au cul dans une période autrement singulière par une classe qui déchirait les cartes syndicales) : à l'époque les trotskistes récemment sortis du stalinisme ne passaient pas leur temps à coller des calicots CGT ou SUD mais revendiquaient des comités élus et révocables en AG et refusaient que la parole des grévistes soit « usurpée » par les bureaucraties syndicales5
Pour SUD-Rail jeudi soir, il fallait "renforcer, amplifier, durcir" la grève pour "faire plier" le gouvernement.
La reprise de la grève est prévue samedi à 20H00, jusqu'à mardi 07H55. Ce sera le deuxième épisode de grève deux jours sur cinq, après celui des 3 et 4 avril, lors duquel le trafic ferroviaire a été très perturbé. Le mouvement est emmerder usagers et gouvernement jusqu'au 28 juin, voire plus s'il est nécessaire de vraiment bien faire mordre la poussière aux plus excités, et que cela signifie une défaite pour l'ensemble de la classe ouvrière, laissant les mains libres à Jupiter pour honorer les cieux patronaux jusqu'au renouvellement de sa sinécure élyséenne.


Les divers conflits agitent le pays - universités, Air France, milieu hospitalier, fonctionnaires – restent cloisonnés entre leur quatre murs, et aucune convergence n'est possible dans le magma des revendications, voire leur étrangeté dans l'obscurité des conciliabules syndicalo-gouvernementaux. Macron ne s'est pas fait remarquer pour sa brutalité mais, toujours pédagogue Labiche, il a expliqué que les mouvements sociaux "ne doivent pas empêcher le gouvernement de gouverner". Et les menuisiers de menuiser.
Le vaudeville syndicalo-gouvernemental risquant de lasser les spectateurs, les comédiens durcissent le scénario. Il devrait «s'amplifier», prévient Force ouvrière. Pour SUD Rail, «il va falloir renforcer, amplifier, durcir» la grève pour «faire plier» le gouvernement et «arriver au bout des revendications». L'Unsa Ferroviaire appelle également les cheminots et usagers à «se mobiliser si on veut faire plier le gouvernement». «Il faut avoir en mémoire qu'on a derrière nous (sic, un par un) des cheminots mobilisés. Plus le conflit va durer, plus les positions vont se radicaliser», assure Didier Aubert de la CFDT. Selon ce dernier, la mobilisation des cheminots, appelés à cesser le travail samedi à 20 heures jusqu'à mardi à 7h55, devrait être «au moins aussi importante» qu'en début de semaine. Et la lassitude, même si les figurants Hamon, Mélenchon et Ruffin organisent des « sorties » pour distraire un peu de la vacuité politique et sociale.



NOTES

1Macron figure assez bien ce bon bourgeois parvenu de vaudeville, avec ce comique mépris de classe, hautain et moralisateur. Il a accumulé des perles ces dernières années qui auraient ravi Labiche. « Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord » ; « Il faut des jeunes Français qui aient envie de devenir milliardaires » ; et il EXPLIQUE que « la meilleure façon de se payer un costard c'est de travailler », sans oublier les « illettrées » de l’entreprise Gad… Dans un bassin minier du Nord, comme n'importe quel curé du temps jadis il EXPLIQUE : «l’alcoolisme et le tabagisme se sont peu à peu installés dans le bassin minier. Tout comme l’échec scolaire. Il faut traiter cela en urgence afin de rendre le quotidien de ces personnes meilleur», Sur un plateau TV il EXPLIQUE que les ouvriers sont des privilégiés : « Bien souvent, la vie d'un entrepreneur est bien plus dure que celle d'un salarié, il ne faut pas l'oublier. Il peut tout perdre, lui, et il a moins de garanties ». Mais il se fait aussi régulièrement recadrer comme à Rouen cette semaine face à une aide-soignante (certes militante LO) qui refuse de lui serrer la main. Bravo c'est déjà ce qu'il faut faire refuser de serrer la main de tous ces pantins de négociateurs en chef, et en cravate, comme aurait dit Labiche.
2Chaque gréviste doit se déclarer à son petit chef de service, lui indiquer le jour et les heures où il fait grève, un casse-tête aussi débile à gérer que le début d'application des 35 heures... voir l'article de Libération à ce sujet : http://www.liberation.fr/france/2018/04/04/sncf-a-la-gare-du-nord-la-crainte-d-une-mobilisation-a-la-carte_1641001
3Dans certaines entreprises nationalisées on pouvait naguère assister à une partie des négociations direction/syndicats. J'y ai assisté une paire de fois, ce n'était que bavardages inconsistants, roulements de tambour et déclarations bravaches qui n'en finissaient pas, à chaque fois j'ai claqué la porte.
4Les chiffres de comparaison qu'il avait inventé pour prouver que les transports coûtent plus cher en Allemagne et en Angleterre étaient faux ; l'intérêt de la concurrence libérale écrase la lourdeur du monopole nationalisé stalinien, baisse des prix en réalité et une concurrence qui permet de choisir ou de changer de prestataire comme on en voit les avantages avec la téléphonie. Ce discours syndical vieillot – très corporatiste – se ridiculise lui-même, et fait les gorges chaudes chez les millions de cons-somateurs plutôt du côté de l'Etat... mercantile.
5Dans son livre d'archiviste, Ludivine Bantigny - « 1968 de grands soirs en petits matins » (Seuil 2018, 25 euros) – rappelle cela, mais les trotskistes restaient complices et suce-boules des syndicats staliniens, en fait ils se calquaient sur les positions autrement révolutionnaires des minorités révolutionnaires qui commençaient à réapparaître, hors du caméléonisme trotskien, mais peu audibles, à part les esthètes situs.

mercredi 4 avril 2018

SNCF bashing, épisode 3: A QUI SERT UNE GREVE SYNDICALE INTERMITTENTE?


Nos nouveaux ploum-ploum y croient.
Nouveauté syndicale ou vieillerie corporative renouvelée ?
Les journalistes se sont échinés à trouver un qualificatif pour la grève des cheminots contre le projet de privatisation de la SNCF par le gouvernement Macron : grève en pointillé, grève perlée, alors que j'ai tendance à me moquer de cette grève « programmée », si bien « organisée » et « dévitalisée » d'emblée en la nommant « grève intermittente du spectacle syndical ». Aucun terme n'est satisfaisant au regard de la définition juridique des diverses formes de grèves sur le site du ministère du travail : la grève perlée désigne le fait de « travailler au ralenti ou dans des conditions volontairement défectueuses, sans interruption véritable d’activité », Elle est d'ailleurs illégale, ce qui offenserait le collaborationnisme des bonzes syndicaux dont les think tank ont sagement proposé un calendrier loufoque de débrayage deux jours sur cinq pendant trois mois afin de suffisamment ôter aux prolétaires concernés toute envie de recommencer une grève dans les années à venir. C'est quoi cette grève à la con avec ambiance 14-18, et des militaires encore au coin des rues?

On me permettra de noter ici (intermittence du narrateur) combien, sans crier gare et sans commentaires étonnés de nos sociologues gouvernementaux ou des connards communisateurs, la classe ouvrière redevient soudain première au hit-parade des infos gouvernementales, prééminente, dangereuse, paralysante, dérangeante même entourée des garde-chiourmes syndicaux et des gauchistes aboyeurs ! On l'ausculte soudain dans ses « privilèges », ses retraites « dispendieuses » pour l'Etat notre ami à tous... Quoi ils existent encore ces pkanqués du rail et de la voirie, mais pour emmerder les « usagers », s'accrocher à leurs privilèges qui ruinent la nation, qu'on leur envoie les flics !
En 1995 ce sont surtout les roulants (métier en voie d'extinction...) qui étaient majoritaires dans la lutte, maintenant ils s'y seraient tous mis... à 30% ! Faudra que la débâcle finale du cirque syndical passe pour une défaite majeure de tout le prolétariat, nom de nom ! On veut voir Micron 1er et Madame se mirer au soleil dès juin !

Ce n'est pas non plus une grève tournante, comme le croit Juan du blog « Révolution ou guerre »1, laquelle consiste en des arrêts successifs des différents services de l'entreprise, ou des différents ateliers d'une usine, afin que les effectifs ne soient jamais au complet au même moment dans l'entreprise. Le cirque syndical actuel intermittent, est pourtant assimilable en termes de légalité à la classique grève tournante, supposant, en principe, une minimisation des pertes de salaire (ce qui reste sujet à caution vu que la direction de la SNCF menace de coupes plus importantes dans les salaires même en incluant les journées travaillées).
On ne connaît pas encore la destinée en durée de cette grève intermittente (qui s'arrête et reprend par intervalles) mais ce qu'on peut déjà noter est qu'elle est parfaitement orchestrée par chefs et sous-chefs syndicaux, quand bien même les syndicats sont devenus tout petits par rapport à la place qu'ils tenaient avant.
La nouvelle (présumée) invention d'une « d'usure », de «bras de fer », qui permettrait aux ouvriers de tenir sans trop de dégâts jusqu'au terme des trois mois afin de servir de claque à la gauche parlementaire pour contester une dernière fois le « Jupiter des riches », a pour principale fonction préliminaire, introductive au scénario improbable, de faire oublier à l'ensemble de la classe ouvrière, en France, les promenades corporatives antérieures et autres unions syndicales foireuses qui ont si bien conduit aux défaites successives dont la dernière en date, sur le code du travail avec ronde dérisoire autour du bassin de l'Arsenal. Deux menaces extraordinaires pèsent sur les petites têtes des appareils syndicaux : la spontanéité de classe (soudaine et inattendue comme en mai 68) et la généralisation du mouvement prolétarien, avec ou sans étudiants, avec ou sans retraités.
Formellement la première menace n'a jamais existé pour la sauvegarde d'une des très vieilles entreprises nationalisées (la nationalisation n'a jamais été une mesure socialiste ni un acquis ouvrier) et même pour un statut juridique avantageux elle est en voie de disparition à peu près partout. Les bonzes et les petits réduits gauchistes ont tout préparé, de l'arrière-cuisine syndicale au calendrier qu'ils auraient pu nommer « de la balade syndicale au chant parlementaire ». La deuxième menace est toujours un casse-tête pour la noria des encadreurs professionnels, alors ce coup-ci – l'extension – ou la généralisation est conseillée... avec la manière, généralisation qu'ils avaient tous, de la CGT à SUD machin chose, saboté lors de toutes les grèves des 50 dernières années, pour « être responsables » (Séguy), « limiter les débordements » (Viannet), « ouvrir les négociations » (Krasucki), etc.
Martinez qui serait invisible en tête de cortège sans sa moustache Staline revival a osé même un très bakouninien « Fédérez-vous !». Les grévistes suivistes des généraux syndicaux se fédérer ? Mais comment ? Et entre qui est qui ? Basta c'est des mots. Des mots mis en musique syndicale vintage par Philippe Martinez, cornant en faveur d'une «journée nationale de mobilisation interprofessionnelle» le jeudi 19 avril. Et ce, «dans la recherche de convergence des luttes». Presque du Besancenot dans le texte. Côté province, dans les Bouches-du-Rhône, l’union départementale cégétiste appelle même, dès ce mercredi, à un «grand rassemblement de lutte» devant la gare Saint-Charles, afin d’étendre la contestation. Ah « étendre la contestation », Râ lovely comme c'est bandant ! La contestation (ce piège à cons...) pourra aussi compter, médiatiquement Ruffin, sur Tartempion, sur Jean-Luc Mélenchon, partisan lui aussi d'un appel au fédéralisme de la contestation. «Compte tenu du nombre des protagonistes engagés et de leur diversité, le mouvement fédérateur peut partir d’eux, du terrain, partout où c’est possible», juge le fondateur de La France insoumise sur son blog, lundi, en exhortant les salariés : «Agissez ! Auto-organisez-vous ! Fédérez-vous !»
Rassemblement, convergence, fédéralisme, des mots creux typiques des ploum-ploums anars qui crient « grève générale » chaque fois qu'ils doivent payer une amende.
Les dirigeants syndicaux ont tous leur bac désormais, et sont capables de varier le bla-bla médiatisé. Quand l'un affiche des ficelles trop grosses, inhabituelles ou fort ridicules pour tout ouvrier qui réfléchit et reste doué de mémoire, on peut s'attendre à ce que face au « maximalisme » langagier de certains, se dresse un minimalisme plus terre à terre et à l'enthousiasme moins délirant que celui du trotskien de base : « La «convergence des luttes […], cela ne s’improvise pas, a réagi lundi le numéro 1 de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, auprès de l’AFP. Ce n’est pas parce que vous avez plusieurs points de conflit qu’obligatoirement cela coagule.»
Exceptés quelques vieillards cacochymes, qui ne pouvaient déjà pas lancer un vrai pavé à l'époque, et qui imaginent un nouveau « soulèvement de la jeunesse », voire des barricades restaurées rue Gay-Lussac, un journaliste peut toujours se renseigner sur la réalité morne actuelle en allant trouver un universitaire politologue pas bête : «... prudence pour Baptiste Giraud, maître de conférence en sciences politiques à l’université Aix-Marseille : «Mai 68 peut inspirer symboliquement des franges de militants, mais ce n’est pas ça qui va faire converger les luttes. A l’époque, le privé, et notamment l’industrie, était fortement syndiqué. Aujourd’hui, le monde du travail n’a plus rien à voir : seuls les secteurs public et parapublic bénéficient d’un fort ancrage syndical. Pour cette raison, la mobilisation générale du monde du travail est hautement improbable.» En revanche, une forte mobilisation dans un secteur «peut inciter un autre secteur à se mobiliser à son tour», ajoute l’universitaire.
Oui mais, on n'est plus en mai 68. Le pouvoir n'est plus du même type d'autoritarisme lourdingue, il ne se laisse pas surprendre, il prend les devants ; un nouveau mai 68 est impensable pour trois raisons : la classe ouvrière est archi atomisée, l'économie n'est pas en mauvais point (elle est propice aux augmentations salariales, et Macron mise dessus) et les étudiants sont retournés à leurs études et sont mignons tout plein ; les lycéens, qui auraient bien besoin de faire péter le système, qui doivent attendre fin mai la sélection de Parcoursup, l'américanisation de la reproduction sociale, se réveilleront quand les flambeaux syndicaux seront déjà éteints.

Le but de la grève intermittente longue est de :
  • faire chier les millions de prolétaires usagers et qui vont le faire savoir, pas dans le sens du carnaval syndicalo-gauchiste ;
  • ringardiser un peu plus la classe ouvrière en épuisant la population avec cette agitation ponctuelle, creuse politiquement, inscrite dans la durée où on ne discute de rien d'important, ni d'alternative de société ni de possibilité de fonctionner autrement pour l'humanité, donc à des kilomètres des débats géniaux, souvent utopiques de 68, mais autrement plus passionnants. 
Pour sa deuxième journée intermittente la grève corporative à la SNCF aurait été moins suivie, nul doute que la tendance à la baisse va se confirmer. Les Etats-majors syndicaux n'ignorant pas que la grève à Air France pique du nez, et lançant en même temps des actions corporatives un peu partout comme ils l'avaient fait en 1995, ce qui ne propage en rien le feu mais la dispersion en des tonnes de revendications corporatives, plus corporatives unes que les autres. Je me suis promené dans le quartier gouvernemental aujourd'hui et je ne vis nulle inquiétude dans les regards qui émergeaient des limousines.

Pour ce troisième épisode, je conclus en me pliant en deux sur la menaçante parole d'un quelconque chefaillon permanent syndical, qui a dans sa poche en permanence le numéro de téléphone du patron et du ministre concerné. Le secrétaire adjoint de la CGT-Cheminots, Thierry Nier, pense que le gouvernement doit "prendre ses responsabilités et ouvrir des négociations" au sujet de la réforme de la SNCF. Interrogé par franceinfo, Thierry Nier l'assure : la grève ne se poursuivra "que si les négociations ne s'ouvrent pas avec le gouvernement". Comprenez : on appuiera sur le bouton fin de la grève intermittente dès les négociations secrètes seront ouvertes, et après on vous fera savoir sur le perron de l'Elysée s'il faut faire la négociation ou la révolution.



Nous ne sommes pas des "gréviculteurs"
¨par Marc Chirik

(Des journalistes et des politiciens s'en sont pris à un vulgaire député d'En Démarche, pour l'usage du terme « gréviculteur » ; or ce terme est ancien dans notre milieu révolutionnaire, c'est ainsi que les meilleurs marxistes ont toujours qualifiés les anarchistes gréviculteurs obsessionnels de la fumeuse grève générale (et leurs bâtards Besancenot, Poutou et Cie). L'intervention orale au 3ème congrès de Révolution Internationale, en 1978 reflète cette époque et pour l'essentiel, pour l'intervention d'un vrai groupe politique maximaliste (mais y en a plus) demeure une leçon de choses. (reproduit d'après un enregistrement audio et en bon français)

« ...C'est vrai qu'il y a une distinction qui se fait entre l'action de l'organisation comme telle, et celle des militants. C'est vrai aussi que le militant agit partout comme membre de l'organisation, mais là se fait la distinction: c'est sur les plans où se situent ces activités. C'est cela que ne voient pas ceux qui sont amenés à dire que les militants doivent chercher à être les chefs dans les luttes immédiates. Cette vision n'est pas tout à fait la nôtre. Ce que nous cherchons, nous, ce n'est pas de demander sa confiance à la classe pour qu'elle nous délègue la direction de ses luttes, mais de faire en sorte que la conscience de la classe se généralise pour que ce soit elle en tant que classe qui assume ses tâches. C'est là notre tâche fondamentale.
Nous ne pouvons pas dire seulement "généralisation" des luttes, les syndicats sont capables de récupérer ce mot d'ordre, on l'a déjà vu. Nous devons en dire plus, ne pas limiter la généralisation à l'espace, mais l'étendre au fond, allant des luttes pour des questions partielles aux questions générales. Dans les luttes nous devons toujours avoir présent à l'esprit trois soucis:
- pourquoi est menée cette lutte ?
- qui la mène ?
comment se mène-t-elle ?

La grève n'est pas en elle-même une panacée. Les syndicats peuvent déclencher des grèves sur des revendications anti-prolétariennes, on l'a vu en Italie avant 1914, avec des grèves qui préparaient les ouvriers à la guerre. Nous ne sommes pas des "gréviculteurs".
Ce n'est pas un hasard sir la question de l'intervention directe se pose à nous aujourd'hui, cela révèle deux moments: celui du développement des luttes ouvrières, et celui du développement de l'organisation des révolutionnaires qui est de plus en plus impliquée concrètement dans les luttes. Pour répondre à ce problème, il faut souligner que:
- l'intervention des militants est toujours sous le contrôle de l'organisation,
- le militant ne doit jamais exiger que la lutte dans l'usine atteint une conscience globale pour y participer, pour en être un facteur actif en intervenant. Nous devons absolument faire nôtre ce que Marx disait dans le Manifeste sur les communistes qui sont les combattants les plus décidés dans la lutte de classe.
- tant l'organisation que le militant n'ont pas à faire de la surenchère, à être plus radicaux que les ouvriers; cette attitude existe chez certains groupes parce qu'ils sont isolés, coupés de la classe, comme le FOR.
- les militants de la classe ouvrière doivent mener la lutte locale de la manière la plus effective et la plus efficace. Ce n'est ni un sport, ni une fête, comme peuvent le penser les surréalistes ou les situationnistes. Etre au sein des luttes, avec sérieux et responsabilité, c'est le contraire de ce que font les anarchistes qui font la "grève générale" tous seuls ou des "actions exemplaires". C'est avoir la conviction d'une victoire partielle possible et rejeter l'attitude du style "le capitalisme n'a rien à accorder", défendre les positions des ouvriers contre les atteintes du capital, et être avec eux décidés à faire aboutir la lutte.
- Notre dénonciation des syndicats et courants anti-prolétariens doit être la plus énergique possible; cela signifie qu'elle ne doit jamais prendre des formes abstraites, plaquées sur la lutte, mais être le démasquage concret, dans le faits, à travers les problèmes pratiques, de leur nature anti-prolétarienne.
- Nous devons exercer une vigilance constante à l'égard des manoeuvres anti-prolétariennes; si, au début de la lutte, il est difficile de démontrer les manoeuvres syndicales, il faut s'assurer de pouvoir les dénoncer immédiatement, au fur et à mesure du développement de la lutte.
- à l'égard de toute tentative de formation de groupes au sein de usines, il faut être conscient que de tels groupes, comme ceux qui se réclamaient de l'autonomie ouvrière, sont des groupes politiques qui entravent la formation de l'organisation politique de la classe. Par contre, nous apportons notre soutien à tout surgissement réel de groupes de réflexion dans les usines ou les quartiers et nous y participons ».

UNE SEULE NOTE (eh oui)
1A ma connaissance, ce camarade est le seul à se prononcer courageusement pour dénoncer le carnaval syndical : « La tactique que les syndicats ont mis en place isole d’avance le combat des travailleurs de la SNCF dans la corporation et dans un planning de journées de grève qui ne peut que les enfermer encore plus dans une grève sans autre perspective que de la faire durer “jusqu’au bout ”… ce qui, très rapidement, provoquera la division au sein même des grévistes entre ceux qui voudront et pourront faire grève et ceux qui ne le pourront pas, ou moins, et qui se décourageront. La tactique syndicale des journées d’action est à rejeter. Elle impose des revendications et des combats corporatistes et isolés. Pire même, en imposant les préavis légaux pour faire grève et en n’appelant plus aux assemblées générales dans bien des dépôts SNCF - sur ce point DRH, “ management ” et syndicats œuvrent de concert dans toutes les entreprises –, les journées d’action syndicales font de la grève une décision purement individuelle et non collective ce qui affaiblit d’autant la volonté de combat et le sentiment de solidarité ouvrière, chaque ouvrier étant renvoyé à sa conscience ou volonté “ individuelle ”, y compris maintenant à la SNCF en faisant une déclaration individuelle préalable ». Il a une solution bonux, mais complètement décalée avec la réalité, conforme à ce que définissait Marc Chirik en 1978 (voir plus bas le texte de Marc) mais c'était en 1978 !
« S’opposer par la grève et l’extension à l’enfermement et l’isolement syndical. Pour cela, il convient d’avancer des revendications les plus unitaires possibles que les autres travailleurs puissent reprendre pour leur propre compte.
Quelques propositions parmi d’autres (et à discuter, voire à décliner, selon les situations locales particulières) : les travailleurs de la société de nettoyage des gares ONET sont en grève. Il faut avancer qu’ils aient les mêmes conditions de travail et de salaire que les cheminots – voire, selon la force de la grève, exiger la fin des sous-traitants et leur embauche par la SNCF. Face aux menaces de licenciements à Ford Bordeaux, maintien des salaires et du contrat de travail jusqu’à la fin de leur chômage, voire embauche dans des services publics. Ou encore, puisque la retraite des cheminots va être de nouveau attaquée, avancer la revendication de la mise à niveau de toutes les retraites, publiques-privées, sur celle des cheminots ou plus largement des transports publics. Ou bien encore, dans la foulée des revendications à Air France, augmentation des salaires et des retraites pour tous… Tout ce qui va dans le sens de l’unité est à reprendre. Tout ce qui va dans le sens de l’isolement est à rejeter.
Enfin, partout où c’est possible, il convient que les travailleurs les plus combatifs et les plus convaincus de ces orientations, du besoin de lutter contre l’isolement et les pièges syndicaux, se regroupent en comités de lutte ou “ assemblées interpro ” – peu importe le nom – afin de s’organiser et d’intervenir collectivement partout où ils le peuvent pour assumer ce combat à la fois pour l’extension et l’unification et contre leur sabotage par les syndicaux. Car, le combat pour l’extension et l’unification ne pourra faire l’économie de cet affrontement politique contre les organes particuliers, car agissant directement en milieu ouvrier, de l’État capitaliste que sont les syndicaux et les partis de gauche.
Dès le 3, dans tous les dépôts SNCF, assemblées générales pour imposer la grève reconductible ! Dans les entreprises, les quartiers et les villes, extension et unification de la grève, des manifestations et du combat de classe !Dans les entreprises, les quartiers et les villes, regroupement et organisation des travailleurs les plus combatifs désireux de combattre pour l’extension et l’unification de la lutte ! ».

Tout cela c'est souffler dans le mégaphone des comiques syndicaux avec cette invention des « revendications unitaires » improbables et même caricaturales. Faut pas se tromper d'époque ni de moment camarade ! La grève c'est pas la révolution ! Même si tu crois encore, à la suite de papy Lénine que derrière toute grève se planque la révolution.


lundi 2 avril 2018

LES CROQUE-MORTS de la grève programmée larmoyante à la SNCF


Je bénis la grève perlée!
Après la phase d'héroïsation des victimes de « l'hydre terroriste » voici que les suivistes gauchistes relaient le gouvernement avec l'hydre de la grève générale qui n'a pourtant aucune chance d'exister à partir d'une grève ultra-corporative ni même de rivaliser avec la « surprise » du mouvement sans commandants syndicalistes ni trotskiens en mai 68. En effet, c'est un classique la lutte de classe ne peut procéder que par surprise, sans permission ni autorisation ministérielle et des obscurs bureaux syndicaux, c'est à dire hors des programmations des partis faux-culs et des syndicats gouvernementaux et de leurs groupies gauchistes. Les vieux machins comme Krivine auront beau écumer les villes de province pour enseigner un mai 68 complètement refabriqué à la manière des caporos trotskistes qui n'y jouèrent aucun rôle, c'est à dire en réinventant une union de la gauche picrocholine de vieux coucous qui ne sont plus pris au sérieux (voir plus bas) – la défaite programmée des cheminots maquillée en un scénario à dormir debout, concocté surtout pour emmerder des millions de prolétaires sans statuts ni garantie salariale, qu'elle soit brève ou étalée dans le temps, sera ensuite exhibée comme symbole de l'impuissance de toute la classe ouvrière voire une preuve de plus de sa « disparition ».
Voici une grève Hollywood, scénarisée et officialisée comme un feuilleton à épisodes variables avec l'aval de l'aumônerie de l'Elysée, sans compter les modifications de scénario ou nouvelles versions telles que le gouvernement veut bien mettre en veilleuse telle revendication, ou "reculer" selon les larbins syndicaux qui ont toujours une traîtrise prévue dans leurs cartables de généraux de la terrrible négociation; sans oublier comment les autres événements politiques ou mécontentements "populaires" (sondalogie organisée) vont peser, voire comment va procéder même la fermeté ou pas envers les marginaux zadistes.

On va dire que je harcèle ici le NPA mais cette secte donne les verges pour se faire fesser. Je le répète la nature du gauchisme moderne, néo-stalinisme recyclé moitié libertaire (version Bakounine, lire ci-dessous le texte de Rosa sur la fable de la grève générale), est d'être suiviste par rapport à l'élite bourgeoise, sur tous les plans de la MORALE voulue : féminisme bobo, antiracisme anti-ouvrier, antifascisme de pacotille, lâcheté face aux campagnes anti-terroristes, complicité avec les pires nationalistes et les pires religions, etc.

Seule la secte LO a refusé de s'associer à la confrérie de la gauche décatie communiant pour la circonstance cheminote, qui n'est pas une simple attaque contre les avantages (et inconvénients) d'une corporation qui n'est plus ce qu'elle était, mais une réorganisation technocratique aux ordres de Bruxelles dans une compétition mondiale exacerbée où il n'est plus question de « reconstruire le pays » mais de se débarrasser des dinosaures de la reconstruction pour générer un profit sans concession et sans entraves corporatives. Cet appel oecuménique il faut vous l'imaginer comme si, au début de 1968, Mitterrand, Marchais, Séguy et les divers bonzes syndicaux avaient été les initiateurs de la « grève généralisée » (c'est à dire une grève spontanée qui se généralisa et non pas mise en branle aux ordres des milliers de sous-offs syndicaux) « pour mettre en mouvement les classes populaires » (!?). Le scénario nomme « modalité » par les faux-culs du NPA n'est pas une seconde critiqué pour son aspect militaire et fallacieux, voire surtout démoralisant parce qu'il laisse toute initiative aux appareils ; on y ajoute simplement d'autres scénarios, grève reconductible dans un coin, ou « campagne unitaire d'opposition au gouvernement et de soutien à la grève », c'est à dire des coquins enturbannés bleu-blanc-rouge qu'on pourrait placer en tête des défilés syndicaux bien ordonnés comme naguère les austères promenades PS-PC-GT-PSU, + ploum-ploums en fin de cortège et drapeaux trotskistes. Tous ces commandants et sous-chefs nous proposent donc de les « suivre », afin de « modifier le rapport des forces en faveur du monde du travail » (sic) ; « monde du travail », « classes populaires », vocabulaire féministe débile et vocables sociologiques qui fleurent bon l'anarchisme bon teint, oecuménisme et nullissime du « tous ensemble » merdique et touché coulé depuis 95. Vous remarquerez et vous retiendrez un seul argument qui peut mettre en danger toutes ces constructions syndicalo-gauchistes bourgeoises: l'exigence de négociations filmées en direct et visibles par toute la population prolétaire; exigence qui avait été la mienne comme délégué de classe en 1969 (exigence oubliée de mai 68 par tous ces chenapans arrivistes) et surtout par les ouvriers polonais en 1980 (micros dans la salle des négociations et répercussion par hauts parleurs dans l'usine de Gdansk). Vous m'objecterez, mais faudrait être en période révolutionnaire pour imposer cela aux négociateurs professionnels de l'ombre! C'est ce que je voulais vous faire dire!
Après le scénario torché apprêté, voici le « plan de travail » et la feuille de route des sergents recruteurs syndicaux :

Communiqué du NPA :« La modalité d’organisation de la grève à la SNCF, de deux jours sur cinq, fait grincer des dents, car elle est en-deçà de la nécessité d’une grève reconductible. De même, la date du 19 avril est bien lointaine… d’autant que FO refuse d’y participer. Mais ces coups de frein ne sont pas réellement nouveaux, et pour les révolutionnaires, la question est de savoir ce qu’ils et elles peuvent faire pour modifier le rapport de forces en faveur du monde du travail.
C’est ce que nous avons fait en interpellant les autres courants de gauche pour une campagne unitaire d’opposition au gouvernement et de soutien à la grève. Il nous reste à décliner cette campagne sur le plan local, pour mettre en mouvement les classes populaires. C’est ce que nous faisons également en défendant bien sûr la grève reconductible et des manifestations de masse, unitaires et unifiant les différents secteurs, mais surtout en convaincant autour de nous de la nécessité d’un « touTEs ensemble ». Cette nécessité repose sur la similitude des attaques dans les différents secteurs, sur la possibilité de gagner davantage quand on se bat au même moment, et sur la nécessité de construire une opposition politique contre Macron, c’est-à-dire une intervention politique du prolétariat sur la scène nationale, sa constitution en classe active.
Un élément clé dans cette équation sera l’action du secteur privé. À partir des négociations annuelles obligatoires, à partir de la mobilisation contre les licenciements, des possibilités existent. C’est pourquoi la lutte à Ford (voir page 8), animée notamment par notre camarade Philippe Poutou, revêt une grande importance dans la situation : elle peut contribuer à poser la question de l’entrée dans la bataille de ­millions de travailleurEs ».


Contre les mensonges de la gauche (décatie) et de l'extrême gauche bourgeoise (figurante et suiviste) lisez et relisez jeunes gens notre bonne Rosa Luxemburg :
Dès 1902, Rosa Luxem­burg ana­lyse la grève géné­rale en Bel­gique pour la conquête du suf­frage uni­ver­sel égal, qui venait de s’achever sur un échec. Elle écrit à cette occa­sion que « la pre­mière condi­tion pour appré­cier sérieu­se­ment la grève géné­rale, c’est de dis­tin­guer entre grèves géné­rales natio­nales et grèves inter­na­tio­nales, grèves poli­tiques et grèves syn­di­cales, grèves indus­trielles en géné­ral et grèves pro­vo­quées par un événe­ment déter­miné, grèves décou­lant des efforts d’ensemble du pro­lé­ta­riat, etc. » Il faut donc éviter « toute ten­ta­tive de sché­ma­ti­ser, de reje­ter ou de glo­ri­fier som­mai­re­ment cette arme »1. En 1913, après un nou­vel échec en Bel­gique, elle rap­pelle que « la grève poli­tique de masse n’est pas, en elle-même, un moyen mira­cu­leux. Elle n’est effi­cace que dans une situa­tion révo­lu­tion­naire, comme expres­sion d’une éner­gie révo­lu­tion­naire for­te­ment concen­trée, et d’une haute ten­sion des anta­go­nismes. Déta­chée de cette éner­gie et de cette situa­tion, trans­for­mée en une manœuvre stra­té­gique déter­mi­née long­temps d’avance et exé­cu­tée de façon pédante, à la baguette, la grève de masse ne peut qu’échouer neuf fois sur dix. »
lire l'ensemble de cet excellent article ici : http://www.critique-sociale.info/928/rosa-luxemburg-et-la-greve-de-masse/


Grève de masse, parti et syndicat

Rosa Luxemburg



Presque tous les écrits et les déclarations du socialisme international traitant de la question de la grève générale datent de l'époque antérieure à la révolution russe, où fut expérimenté pour la première fois dans l'histoire, sur une large échelle, ce moyen de lutte. Cela explique pourquoi ces écrits ont pour la plupart vieilli. Ils s'inspirent d'une conception identique à celle d'Engels, qui, en 1873, critiquant Bakounine et sa manie de fabriquer artificiellement la révolution en Espagne, écrivait :
« La grève générale est, dans le programme de Bakounine, le levier qui sert à déclencher la révolution sociale. Un beau matin tous les ouvriers de toutes les entreprises d'un pays ou même du monde entier abandonnent le travail, obligeant ainsi, en quatre semaines tout au plus, les classes possédantes soit à capituler, soit à attaquer les ouvriers, si bien que ceux-ci auraient le droit de se défendre, et par la même occasion d'abattre la vieille société tout entière. Cette suggestion est bien loin d'être une nouveauté : des socialistes français et à leur suite des socialistes belges, ont, depuis 1848, souvent enfourché ce cheval de bataille qui, à l'origine, est de race anglaise. Au cours du développement rapide et vigoureux du chartisme parmi les ouvriers anglais, à la suite de la crise de 1837, on prêchait dès 1839, le « saint mois », la suspension du travail à l'échelle de la nation [1], et cette idée avait trouvé un tel écho que les ouvriers du nord de l'Angleterre tentèrent en juillet 1842 de la mettre en pratique. Le Congrès des Alliancistes à Genève, le 1° septembre 1873, mit également à l'ordre du jour la grève générale. Simplement tout le monde admettait qu'il fallait pour la faire que la classe ouvrière soit entièrement organisée et qu'elle ait des fonds de réserve. C'est là précisément que le bât blesse. D'une part les gouvernements, surtout si on les encourage par l'abstention politique, ne laisseront jamais arriver à ce stade ni l'organisation ni la trésorerie des ouvriers; et d'autre part les événements politiques et les interventions des classes dominantes amèneront l'affranchissement des travailleurs bien avant que le prolétariat ne parvienne à se donner cette organisation idéale et ce fonds de réserve gigantesque. Par ailleurs, s'il les possédait, il n'aurait pas besoin du détour de la grève générale pour parvenir à son but [2]”.
C'est sur une telle argumentation que se fonda dans les années suivantes l'attitude de la social-démocratie internationale à l'égard de la grève de masse. Elle est dirigée contre la théorie anarchiste de la grève générale qui oppose la grève générale, facteur de déclenchement de la révolution sociale, à la lutte politique quotidienne de la classe ouvrière. Elle tient tout entière dans ce dilemme simple : ou bien le prolétariat dans son ensemble ne possède pas encore d'organisation ni de fonds considérables - et alors il ne peut réaliser la grève générale - ou bien il est déjà assez puissamment organisé - et alors il n'a pas besoin de la grève générale. Cette argumentation est, à vrai dire, si simple et si inattaquable à première vue, que pendant un quart de siècle elle a rendu d'immenses services au mouvement ouvrier moderne, soit pour combattre au nom de la logique les chimères anarchistes, soit pour aider à porter l'idée de la lutte politique dans les couches les plus profondes de la classe ouvrière. Les progrès immenses du mouvement ouvrier dans tous les pays modernes au cours des vingt-cinq dernières années vérifient de la manière la plus éclatante la tactique de la lutte politique préconisée par Marx et Engels, par opposition au bakouninisme : la social-démocratie allemande dans sa puissance actuelle, sa situation à l'avant-garde de tout mouvement ouvrier international est, pour une très grosse part, le produit direct de l'application conséquente et rigoureuse de cette tactique.



On peut lire sur le site « Révolution ou guerre », « pour une riposte prolétaire efficace... », l'avis du dernier rejeton d'un CCI pur (pas encore devenu secte, sorte de CCI de jadis conservé dans le formol des mêmes radotages généralistes) mais complètement irréaliste. Il appelle à crier plus fort dans le mégaphone des sergents gauchistes. On n'appelle pas toujours ou à tout moment à la « lutte générale », et surtout pas quand les dés sont pipés à ce point. Cet appel concomitant à entrer en lutte avec les cheminots est du type de l'erreur économiste, pour ne pas dire syndicaliste mode CGT 1905, c'est à dire sans tenir compte de la
situation politique (favorable aux menées bourgeoises) ni de l'environnement politique (campagnes terroristes et anti-terroristes, jugement des zozos de Tarnac, crucifixion de Sarkozy, etc.) ni surtout de la longue programmation de ladite grève perlée avec une avalanche de commentaires qui ont déjà détruit toute possible solidarité généralisée et toute grève généralisable.
Maintenant, vous êtes libres d'exprimer votre avis, mais c'est à mon sens peine perdue de se mettre au service d'une lutte déjà criminalisée, déjà inintéressante pour ses principales revendications corporatives qui laissent croire à une sécurité... statutaire pour le prolétariat dans un régime capitaliste en pleine tourmente et sans rivages crédibles.


Il faudra savoir attendre.