PAGES PROLETARIENNES

mardi 27 juin 2017

AU-DELA DU PATRIOTISME MINABLE DE MELENCHON


RETOUR DE LA VIEILLE « religion patriotique » et vacuité de l'immigrationnisme de la gauche bourgeoise

« Dans l'idée de rendre plus dociles des peuples ignorants et sauvages, leurs premiers législateurs inventèrent des religions (…) On effraya les hommes sans les rendre meilleurs ». Baron d'Holbach

« Je ne suis pas un nationaliste, je suis un patriote » Mélenchon (23 fev 17)1

"Abolissez l'exploitation de l'homme par l'homme et vous abolirez l'exploitation d'une nation par une autre nation."
Karl Marx - 1818-1883


Lors de cette longue et navrante campagne de tricherie électorale, le mot « patriote » si utilisé par toutes les factions en lice, qu'il sembla interloquer via divers pages du web – les médias sont dans l'ensemble des libéraux mondialistes post-stalinisme – fait pourtant depuis belle bluette partie du vocabulaire du résidu PCF ; du reste, depuis une dizaine d'années le personnel syndicaliste CGT ne se gêne point pour l'utiliser au nom de la sauvegarde de « nos entreprises ». Sous le premier gouvernement Hollande, le pitre Montebourg, éphémère ministre hystérique pour un « redressement productif », en mannequin pour maillot rayé made in chez nous, avait demandé aux « français » d'être « patriotes ». Mélenchon pour sa part, espérant damer le pion à la mère Le Pen, proclama à la fête de L'Huma millésime 2013 : « je ne suis pas nationaliste, je suis un patriote ».
"Le président des patriotes", l'anaphore "être patriote", terme, massivement employé par le Front national, est apparu par après dans les discours du produit pour supermarché européen Emmanuel Macron2. Lire la verbosité creuse de sa définition :
"Être patriote, ce n'est pas la gauche qui s'est rétrécie sur ses utopies. Être patriote, ce n'est pas la droite qui se perd dans ses avanies et l'esprit de revanche. Être patriote, ce n'est pas le Front national, le repli et la haine qui conduira à la guerre civile. Être patriote, c'est vouloir une France forte, ouverte dans l'Europe et regardant le monde." Plus creux et tu serais alter-nationaliste !

Question sentiment, le Front national n'a pas le monopole de la revendication d'un amour pour la France, un électeur quelconque peut aimer la patrie... comme sa mère (vieille chanson populaire, mais pas encore populiste), ou comme son porte-monnaie, ou comme son patrimoine immobilier. Certes le FN nous saoulait de fumée depuis au moins la guerre d'Algérie avec le mot « patriote » et son dérivé patriotisme à tout crin. Le mot sonne ringard en diable. Il n'a plus ni le sens révolutionnaire bourgeois de 1792 – les patriotes de Valmy défendaient la République contre les monarchies réacs – ni le sifflet recruteur des Déroulède et Hitler3. C'est tout simplement devenu un mot creux, mais dont suinte encore l'arrière goût fade et ignoble d'une notion fantasmatique d'un chez nous interclassiste qui exigeait d'envoyer au sacrifice des millions de prolétaires et de paysans pour les « marchands de canon », voire protéger du viol ennemi nos femmes et « nos capitaux ».

Utiliser un tel mot si chargé de sens négatif et passéiste pour la lutte de classe obéit chez le mitterandolâtre aigri et pervers Mélenchon à une volonté de confusion, pour recruter d'abord banalement la clientèle chenue des derniers dinosaures staliniens, quelques ouvriers arriérés attirés par le vote FN et par après la mouvance bobo des professions intellectuelles avec le milieu du business écolo. Pour leur faire avaler que la défense des intérêts nationaux (localistes), mais au surplus, au milieu de la crise migratoire, seraient mieux pris en compte que par les autres compétiteurs de la gauche antiraciste mondialiste et islamophile. Un peu comme à la cantine on sert les premiers arrivés surtout s'ils ont la carte du parti français.

Le mot ne plaît pas trop à un certain nombre d'embrigadés de France insoumise, qui pensent être surtout des internationalistes libertaires, ouvert à tous les peuples, sauf aux migrants qui viendraient polluer leur propre jardin. Dans le programme mélanchonesque, nullement internationaliste ni révolutionnaire, on trouve néanmoins bien des concepts idéalistes de cette gauche libérale-libertaire (absence des questions et soucis concernant l’insécurité, légalisation du cannabis, discours universaliste et utopique sur l’immigration à tout va) qui est finalement depuis des décennies, le credo des ultra-libéraux bourgeois, concrétisé à chaque fois par leur soutien à un terrorisme policier accru s'ils sont en position de pouvoir et un soutien purement verbal au « malheur » des migrants. Mélenchon se livre à d'excessifs moulinets d'estrade, flattant un public crédule qui psalmodie : « tous sont pourris mais au moins on a Mélenchon ». Et lui au moins, il ne cesse de dénoncer Merkel, sauf sur la question migratoire.Il n'a pas encore compris l'ex-sous ministre de Mitterrand que ce qui est excessif est insignifiant.

QUAND LE MOT INTERNATIONALISME N'AVAIT PAS DISPARU...

L'antimilitarisme à la veille de la guerre de 14 semblait être le moyen principal pour empêcher la guerre. Anarchistes et socialistes protestaient contre l'accroissement des budgets militaires et se moquaient des défilés armés. La polémique ne cessait jamais contre les bourgeois pacifistes, tenant de cette cynique imposture de la classe dominante qui n'avait pour but, avec ses discours humanitaires, que de faire diversion face à la réalité de la permanente guerre économique menée contre les prolétaires. La guerre serait toujours évitée grâce aux arbitrages internationaux, assuraient les vieux messieurs barbus et en chapeaux quand Jules Guesde tonnait qu'il fallait faire confiance au parti socialiste qui saurait en temps voulu faire obstacle au bellicisme capitaliste grâce à la mobilisation de l'auguste Seconde Internationale.
Cet antimilitarisme était cependant autre chose que les chimères humanistes et secouristes d'Angélique Merkel et de tous les intellos gauchistes français à sa suite. Il contenait une réelle critique de fond de la marche du capitalisme : « le capitalisme c'est la guerre » et pas une possible société de paix éternelle, écologique, islamophile et antiraciste. Plus loin il y avait l'idée d'une nécessaire démoralisation de l'armée et des troupes mercenaires de l'Etat (police, gendarmerie) pour que la révolution soit possible. Les mutineries de 1907 avaient réellement inquiété la bourgeoisie d'époque, pourtant repue de ses massacres et viols en juin 1848 et mars 1871.
Le patriotisme fonctionna par contre hélas en effet comme une nouvelle religion. Les religions en général ne sont qu'une expression particulièrement mystificatrice du mensonge fondateur de la société des classes ; à l'origine de la plupart des Etats antiques, elles sont toutes bellicistes même si elles se prétendent toutes de nos jours ce vulgaire mirage « d'amour et de paix ». L'Union nationale patriotique fonctionna sur le modèle de l'imposture religieuse. Le nouveau Moloch sacré fût la patrie qui réclamait à son tour le sang sacrificiel des hommes. La foi patriotique eût ses dévôts comme Charles Péguy, ancien socialiste, ancien anarchiste pacifiste, qui fût rapidement sanctifié par une balle « boche ». La montée à la guerre était devenue communion, rassemblement sacré. Le christianisme convenait parfaitement à cette résignation à la guerre et à la soumission aux curés militaires pour une durée prétendue éphémère, « fraîche et joyeuse ».
Chassé par la fenêtre en 1905 le cléricalisme rentrait par la porte de l'armée4. A l'époque on bénissait encore les ouvriers en assemblée d'usine à la prise du travail comme on bénissait les régiments avant le départ au combat. C'est bien la peine de montrer du doigt de nos jours les embrigadés guerriers musulmans comme exceptionnelle étrangeté barbare5.
L'antipatriotisme n'empêcha pas la guerre pourtant parce qu'il n'était pas la réponse aux enjeux d'une guerre mondialisée, parce qu'il était encore limité aux conceptions nationales des anarchistes et des socialistes qui ne concevaient pas encore le phénomène révolutionnaire comme international, quand bien même ils reprenaient le concept du Manifeste de Marx : « les prolétaires n'ont pas de patrie, on ne peut leur enlever ce qu'ils n'ont pas » (concept assez confus encore chez Marx comme on l'analysera plus loin). Mais répété sans analyse des circonstances et du rapport des forces le concept relève de la méthode Coué idéaliste6. Un des plus acharnés contempteurs de la « collaboration de classe » que signifiait le patriotisme, Gustave Hervé, passera d'un coup à l'Union sacrée ; il signait jusque là ses articles : « un sans patrie » ; il faut toujours se méfier des radicaux extrémistes de la phrase qui cachent souvent une simple girouette, capable de tourner casaque au moment fatidique (ils furent nombreux dans la deuxième Internationale comme dans la troisième stalinisée!).
L'antipatriotisme, par ses outrances, ne sera pas pris au sérieux par la classe ouvrière imbibée de religiosité patriotique et de revanchisme (l'Alsace et la Lorraine). Le syndicaliste Dumoulin a le courage de tirer la leçon en 1921 : « Notre propagande antimilitariste, plus tapageuse que réelle nous a trompé (…) nous nous sommes trompés en nourrissant notre orgueil dans des congrès bruyants avec des motions boursouflées et pleines de suffisance ».
Cet échec historique de l'antipatriotisme, comme doctrine séparée de la lutte de classe gréviste, a été finalement un peu comme l'antiracisme moderne qui est devenu un idéalisme interclassiste qui peut faire communier le prolétaire comme le bourgeois dans un statut d'observateur indigné, et le conduire à se laisser mobiliser dans la guerre à la manière du recrutement antifasciste. Echec également de l'internationalisme vu, telle que la mythique grève générale, comme un vœu pieux et supplanté par le mondialisme communautariste.
Cela ne signifie pas qu'il faudrait en revenir au patriotisme miteux, ou rejoindre ce demi-patriotisme électoraliste à la Mélanchon qui n'est ni un internationalisme déguisé ni une base pour défendre les intérêts et la nature du prolétariat. Comme tous les autres compétiteurs des diverses solutions bourgeoises aux problèmes nationaux, la faction de Mélenchon ne propose que de mirifiques plans de sauvetage de l'économie bourgeoise en crise, dont la nationalisation est le sommet du ridicule et la glorification des syndicats un conte de fée.


LE CONCEPT D'IDENTITE NATIONALE (patriotique?)

Bien que Sarkozy ait proposé un débat large sur le sujet, aucune des factions bourgeoises n'a tenu finalement à ce qu'il ait lieu. Trop risqué. Trop fouillis. Le faux communisme parodiait le marxisme en appelant à la fin des nations, masquant son propre impérialisme et son encouragement à la création de nations croupions dans les zones décolonisées. L'Europe d'après-guerre a officié à la planification de la disparition des « vieilles nations », sous pression américaine. La monnaie unique comme l'abolition des frontières intra-européennes étaient une façon de faire la nique au projet communiste originel et de le reléguer dans son statut d'utopie incrédible et vieillerie invariante. Les vieilles nations ont bel et bien résisté à l'annonce de leur mort prochaine par Hannah Arendt, célèbre politologue acquise au mensonge américain. L'implosion du bloc de l'Est a généré une foule d'autres mini-nations très vindicatives et arrogantes. Le capitalisme semblait avoir trouvé la parade à l'hégémonie bipolaire des blocs et un moyen de survie à son système destructeur de marche à l'abîme. Ce retour au pullulement national s'est accompagné fort opportunément, comme s'en vante d'ailleurs 7.
Poutine dans l'interview complaisante que lui a servi Oliver Stone, du grand remplacement du stalinisme par la religion. Mieux qu'Obama, le tsar Poutine se félicite d'une longue mixture des religions en Russie, orthodoxe, musulmane et juive, comme base du fonctionnement « pacifique » (hic!) de la société russe actuelle, nation éternelle s'il en fût. L'islam sert à l'ouest comme à l'est d'arme à double face : une positive et l'autre négative, mais comme la religion pendant la guerre de 1914 et 1945 (les croix chrétiennes des tombes ont été bien plus nombreuses que les croix gammées sur les fanions)
Ce que l'on nomme depuis peu repli sur soi nouveau, à la suite du Brexit et de l'élection de Trump, n'est qu'un trompe l'oeil. Les nations européennes sont toujours restées jalouses de leurs prérogatives, caractéristiques et identités (de langue et de culture, de religion et de mode de vie). Ce n'est pas demain la veille ni avec la menace du « grand remplacement musulman » que les choses changeront. Ce que l'on peut constater est que les vagues migratoires – et leurs à-côtés scandaleux – servent à blinder à nouveau le concept d'identité nationale mais dans un sens opaque qui mêle défense économique, mode de vie et racismes divers (non avoués)8.
La disparition des nations, envisagées par le marxisme, peut-elle être confondue avec la oumma islamique et sa prétention à conquérir l'univers ?
La bourgeoisie mondiale dominante n'a pas du tout l'intention de laisser triompher un mode de domination arriérée, comme elle n'a pas permis au stalinisme de triompher. La musulmanie lui sert autant que le stalinisme pour une période donnée, et cette « expansion » apparente, avec ses bigotes voilées et ses burkinades ridicules, reste superficielle. Elle va de pair avec la fable des nouvelles, non pas indépendances nationales, mais prétendus exigences des minorités, politico-religieuses, raciales, communautaristes, à faire croire que l'humanité peut rester émiettée en catégories séparées, hostiles culturellement et aux modes de vie incompatibles, donc en guerres permanentes par respect pour les croyances de chacun.

MARX ET TOUS LES ANARCHISTES ET SOCIALISTES DU XIXe SIECLE SE SONT-ILS TROMPES EN ENVISAGEANT LA FIN DES PATRIES ?

Marx et Engels, dans leurs analyses plus fouillées à la fin de leur vie, voyaient le capitalisme évoluer vers la constitution de grands ensembles. Ce qui a en effet tendu à se dessiner avec les deux grands blocs puis avec les marchés nord-américains, européens, asiatiques. Sauf que la réalité d'une tendance à une économie unifiée sembla contrebattue par l'expansion de tant de nouvelles patries du tiers-monde jusqu'à l'implosion du bloc de l'Est. Le pullulement de nations fantoches n'est pourtant pas incompatible avec l'existence de grands marchés dominant les orientations politiques de tel ou tel Etat, et même fractionnant les Etats les plus puissants. Le social-traître Kautsky avait été combattu par le lucide Lénine en prétendant qu'un ultra-impérialisme pourrait dominer un jour la planète. Et c'est l'anti-léniniste Poutine qui donne raison à Lénine finalement en contestant régulièrement depuis quinze ans la prétention à l'hégémonie mondiale par l'hyper puissance américaine. En effet le capitalisme ne peut pas mettre fin à la concurrence intrinsèque qui régit les rapports de domination et de production. Mais il y a un phénomène nouveau et que, finalement, avec malice, Poutine est le seul en catimini à soulever : s'il y a une domination incontestable, économique et militaire, de la « patrie américaine », elle n'est pas unitaire, elle est bicéphale, voire tricéphale. Le scandale d'une prétendue manipulation des élections américaines par les très compétents services informatiques de Poutine (hérités de la maestria du KGB) est révélateur de la scission entre fractions américaines, sur la question pétrolière et sur la guerre en Syrie. Même au faîte de leur prétendue domination du monde les capitalistes américains ne peuvent même pas prétendre avoir réalisé l'ultra-impérialisme d'un seul, car les intérêts économiques du mode de vie du capitalisme ne le permettent pas. Le capitalisme ne peut pas aspirer à l'unité, disons à la paix avec un commerce « équitable » (idéologie hulotienne très en vogue chez les bobos), ce qui signifierait sa mort car il est basé encore et toujours sur la compétition acharnée.
D'où l'intérêt pour les Poutine et Trump de continuer à tromper les masses en faveur du mythe de l'indépendance nationale. Ce n'est pas non plus un repli sur soi, comme le prétendent de naïfs militants maximalistes à la suite des journaleux. Le système reste dominé par de grands cartels pétroliers et bancaires qui se fichent d'indépendance nationale comme de leur propre zone d'appartenance. Le capitalisme compétiteur et destructeur est même plus « internationaliste » que ne l'est encore le prolétariat. Mais voilà qu'il mélange patrie et mode de vie et religion.
Revenons aux projections de Marx.
Le Manifeste de 1848 disait :
« En outre, on a accusé les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalité. Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu'ils n'ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s'ériger en classe dirigeante de la nation, devenir lui-même la nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens bourgeois du mot. Déjà les démarcations nationales et les antagonismes entre les peuples disparaissent de plus en plus avec le développement de la bourgeoisie, la liberté du commerce, le marché mondial, l'uniformité de la production industrielle et les conditions d'existence qu'ils entraînent. Le prolétariat au pouvoir les fera disparaître plus encore. Son action commune, dans les pays civilisés tout au moins, est une des premières conditions de son émancipation. Abolissez l'exploitation de l'homme par l'homme, et vous abolirez l'exploitation d'une nation par une autre nation. Du jour où tombe l'antagonisme des classes à l'intérieur de la nation, tombe également l'hostilité des nations entre elles. »
Je déplore depuis des années qu'il n'y ait plus de réflexions approfondies sur la nécessaire période de transition du capitalisme à une société humaine, qu'on la nomme communisme ou post-capitaliste. Un chercheur, dont j'ai eu l'occasion de louer les qualités9, Henri Maler, nous fournit quelques réflexions pertinentes :
«  Mais le moins que l’on puisse dire c’est que le pronostic d’un dépérissement des démarcations nationales et des antagonismes entre les peuples ne s’est pas vérifié, en dépit de l’universalisation de l’exploitation capitaliste et, partant, d’une tendance à l’uniformisation (sous le joug capitaliste) des conditions d’existence du prolétariat. Ces tendances à l’universalisation et à l’uniformisation ont été d’emblée minées par la concurrence entre nations, largement contemporaine de la mondialisation capitaliste, elle-même déjà partiellement et tendanciellement à l’œuvre quand Marx écrit. En cela, les formes nationales des luttes ont toujours eu des effets sur leur contenu.
En tout cas, quoi que dise ou laisse entendre Marx dans le Manifeste, force est d’admettre que, dans le cadre des sociétés existantes, l’appartenance de classe n’abolit pas l’appartenance nationale et que les travailleurs ont bien une nationalité, comprise non pas au simple sens de sa définition juridique et encore moins au sens d’une identité substantielle, mais comme construction historique et sociale. Cette construction a culminé avec celle des États-nation : des États de classe qui ne sont pas naturellement voués à clore l’histoire des pouvoirs publics. Mais cette construction s’est, depuis le XIXe siècle, intensifiée sous l’effet à la fois des conquêtes sociales propres à chaque pays et de la mise en concurrence des prolétariats nationaux.
Dans la mesure où la dissolution des démarcations nationales et de l’hostilité entre nations ne s’est pas réalisée, l’internationalisme peut-il et doit-il être remisé dans le bric-à-brac des idées mortes ? Le postulat d’une universalité essentielle du prolétariat, non de condition (sociale), mais de privation (d’appartenance nationale) est intenable. Si l’internationalisme devait se fonder sur une universalité de privation de nationalité qui serait porteuse d’une universalité sans délimitation, ni démarcation nationale (fussent-elles provisoires), il serait sans objet. Si l’internationalisme est une nécessité politique et un objectif stratégique, c’est aussi parce que les prolétaires ne sont pas sans nationalité et que cette nationalité affecte, parfois pour le pire, le contenu de leurs luttes.
Or celles-ci sont pour le moins équivoques : on ne peut plus guère soutenir, comme Marx tendait encore à le faire en 1848, que la vocation révolutionnaire du prolétariat et la vocation communiste de la révolution dérivent de l’existence d’un prolétariat qui serait la dissolution en acte de la société bourgeoise, et d’affirmer que l’universalité de cette vocation est inscrite dans la privation de nationalité ou de patrie de ce même prolétariat. L’internationalisme ne peut être fondé sur une telle privation, si du moins on prend au sérieux le fait que, pas plus en ce début de XXIe siècle que durant le précédent, la mondialisation capitaliste n’efface les démarcations nationales et n’assèche les mouvements nationalistes. On pourrait d’ailleurs affirmer le contraire : en accroissant la concurrence entre travailleurs de différents pays et de différentes régions du monde, mais aussi entre les États dont le rôle n’a nullement décru avec la mondialisation, cette dernière stimule les pires passions nationalistes.
Mais l’internationalisme est à la fois l’affirmation d’une universalité de condition sociale et le projet d’une solidarité internationale à construire. Or cette solidarité n’est pas seulement celle de combats communs et convergents. L’internationalisme est une perspective stratégique et organisationnelle que les défaites cumulées depuis la rédaction du Manifeste ne permettent pas de congédier. Une perspective stratégique que traduit ce mot d’ordre impératif : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » Comment, dans quelles limites et dans quel but ? C’est une autre affaire. C’est même la principale affaire ».
Or, si le questionnement paraît juste, en effet partout les passions nationales, pas forcément nationalistes comme le suggère notre ex-trotskien, semblent avoir repris le dessus. Or, si on n'oublie pas le passé trotskien (LCR et Révolution ! De Maler) il manque visiblement d'imagination, ou en tout cas de la capacité d'analyse du maximalisme, que certains nomment encore « gauche communiste » (pouah je préfère encore « droite capitaliste »!). Maler ne connaît visiblement rien aux débats sur la période de transition parmi les Gauches de la 3e Internationale. Bien sûr que l'abolition des frontières partout sera nécessaire et possible mais à condition d'une révolution mondiale, mais en tirant vers le haut l'expérience de toutes les nations les plus évoluées vers la vraie liberté qui suppose l'éradication de toutes les pratiques et sanctions barbares de toutes les religions et en particulier de la principale aliénée l'islam, en faveur d'un véritable « mode de vie communiste » sans entraves marchandes ni religieuses, et qui conservera les meilleurs acquis culturels (pas cultuels) des diverses nations.
On peut trouver les formulations du Manifeste imprécises, voire troublantes ou insuffisantes, mais sur le fond oui les prolétaires n'ont pas de patrie et on ne peut leur enlever ce qu'ils n'ont pas, ce qui n'empêche qu'il existe des culturelles nationales plus évoluées et des zones où la femme n'est plus considérée comme une chienne. D'ailleurs, à son niveau dérisoire et encore encadré par les lois capitalistes, la libre circulation (d'européens exclusivement et de toute classe) en Europe de Schengen révèle un réel confort de déplacement et élimine la bureaucratie douanière et celle des bureaux de change10.

Bordiga écrivait dans les années 1950, bien qu'avec des illusions sur les libérations nationales, mais ne fallait-il pas en passer par ce processus, même pour prouver la fausseté des décolonisations (n'en déplaise aux puristes luxemburgistes de RI) ?:
« Alors que pour nous le marché national et l'Etat capitaliste et national centralisé ne sont qu'un passage inévitable pour arriver à l'économie internationale sans Etat et sans marché, pour ces grands prêtres de la démocratie que Marx raillait en la personne des Mazzini, Garibaldi, Kossuth, Sobieski, etc., la formation des Etats nationaux démocratiques constitue un point d'arrivée qui mettra fin à toute lutte sociale. Ce qu'ils veulent, c'est un Etat national homogène où les patrons n'apparaissent plus comme un corps étranger parmi des travailleurs exploités. En réalité, à ce moment historique, le front éclate et la classe ouvrière va se jeter dans la guerre civile contre l'Etat de sa «patrie». C'est au cours du processus des révolutions et des guerres nationales bourgeoises pour la formation des Etats en Europe (et aujourd'hui en Asie et en Afrique) que ce moment se rapproche et que ses conditions mûrissent: tel est le problème sans cesse changeant, aux développements extrêmement variables, qu'il faut déchiffrer ».
Si Bordiga a fait fausse route en misant sur une nouvelle étape de libérations nationales progressistes dans le tiers-monde du XXe siècle, sa réflexion de base marxiste n'en reste pas moins autrement plus profonde que les simplismes d'un certain maximalisme eurocentré et superficiel :
«Ce serait une très grave erreur de ne pas voir ou de nier que les facteurs ethniques et nationaux ont encore un impact très important dans le monde d'aujourd'hui. Parmi les tâches actuelles s'impose donc l'étude précise des limites historiques et géographiques dans lesquelles les soulèvements pour l'indépendance nationale liés à une révolution sociale contre les formes pré capitalistes (asiatiques, esclavagistes, féodales), ainsi que la fondation d'Etats nationaux de type moderne, représentent encore une condition nécessaire pour le passage au socialisme (par exemple en Inde, en Chine, en Egypte, en Iran, etc.). L'évaluation précise des différentes situations est rendue difficile, d'une part par la xénophobie suscitée dans ces pays par l'impitoyable colonialisme capitaliste, et d'autre part par la large diffusion dans le monde entier des ressources productives et des produits qui atteignent les marchés les plus reculés; mais à l'échelle mondiale la question brûlante de 1920 (qui se posait même dans l'aire de l'ex-Empire russe), la question du soutien politique et armé aux mouvements d'indépendance des peuples d'Orient, continue à se poser. Dire par exemple que le rapport entre le capital industriel et la classe ouvrière se pose de la même façon en Belgique et au Siam, et que dans un cas comme dans l'autre on peut mener la lutte sans tenir compte des facteurs de race et de nation, ce n'est pas faire preuve d'extrémisme révolutionnaire, c'est montrer que l'on n'a rien compris au marxisme.Ce n'est pas en amputant le marxisme de la profondeur, de l'étendue et de la complexité de son analyse qu'on acquiert le droit de dénoncer et un jour d'abattre les misérables qui le renient ».
Mais appliquer sans précaution ce même raisonnement de Bordiga en 1950, relativement plus juste à l'époque que les naïvetés luxemburgistes, reviendrait à cautionner le paternalisme politique des gauchistes vis à vis des migrants et leur secourisme en peau de lapin, à applaudir les libéraux au pouvoir qui n'aiment jamais tant que les «migrants » conservent leurs sinistres traditions tribales pour une paix sociale assurée et un cloisonnement des classes ouvrières. Le fond de la crise politique mondiale n'est qu'un avatar du développement inégal du capitalisme décelé par les meilleurs marxistes au début du XX e siècle, et la dite crise migratoire n'est pas due pour l'essentiel aux problèmes climatiques ou à la seule guerre en Syrie, mais de l'incapacité ou plutôt de la volonté du capitalisme de ne pas industrialiser le tiers-monde mais bien pour y pomper à la demande un prolétariat terrorisé et soumis ; la fable des nations émergentes ne concernant qu'une poignée de grands pays où reste freinée voire interdite le partage des technologies haut de gamme, même si les chinois se démènent dans l'espionnage industriel.


L'IDEOLOGIE PATRIOTIQUE RENFORCEE PAR L'IMMIGRATIONNISME

Dans un très intéressant article, JF Daguzan11, pose le problème d'une orientation vers une « patrie et démocratie ethno-confessionnelle » :
« La Nation à contrat social tend elle à s’effacer au profit de l’Etat identitaire ? Si la démocratie demeure une demande forte des populations, on détecte une tendance à ne la réserver qu’à son environnement paroissial. Finalement, les Basques, les Catalans, les Kosovars, les Corses, les Ecossais, les Touaregs, les tribus, militant pour leur indépendance, admettent parfaitement un jeu démocratique à la condition exclusive qu’il soit circonscrit dans les limites de leur appartenance ethno-linguistique. On retrouve alors la première définition de l’UNESCO de l’Etat-nation dans laquelle fusionnent la logique d’un groupe et d’une forme de gouvernement. C’est valable aussi pour de plus grosses masses, comme en Irak (et peut-être demain en Syrie) où Chiites, Sunnites et Kurdes se séparent progressivement tout en maintenant la fiction d’un Etat fédéral ».
Daguzan fournit une analyse très lucide par après de la situation mondiale et de la perte de vue (et de perspective) du projet communiste de fin des nations :
« Si la nation a été depuis la fin du XIXème siècle plutôt inscrite dans le cadre frontalier de l’Etat, d’autres propositions ont existé. Le communisme a été une « patrie » transnationale dans laquelle se sont reconnus des millions d’hommes avant que cette idée ne sombre dans la découverte sinistre du totalitarisme stalinien et de son cortège d’épouvante. La fin de l’Union soviétique quasi-ultime représentante paradoxale de ce modèle – car fortement construite autour de l’Etat – en sonna le glas. L’islamisme radical universaliste d’Al Qaida est un autre exemple de ces propositions. Fondé sur le principe coranique d’une Umma (communauté des croyants) sans frontières, les leaders d’Al Qaida proposent l’avènement d’un Dar al Islam (le monde de l’islam) vidé de toutes les influences délétères (occidentales d’abord, ou pré-islamiques). Or, depuis son émergence (le début des années 1980) et malgré ses succès « publicitaires » (le 11 septembre 2001 au premier chef), Al Qaida et sa nébuleuse ont perdu toutes leurs batailles sur le terrain (la dernière en date au Mali, 2013) et si des succès tactiques viennent ici ou là rappeler la nocivité de ce mouvement, il n’en demeure pas moins ravalé au rang de mouche du coche. Il n’y aura pas de « Grand soir » islamiste pas plus qu’il n’y a eu de « Grand soir » communiste. De la même façon la crise économique et financière mondiale a brisé les modèles de destruction de l’Etat – considérés pendant un temps par les ultra-libéraux comme économiquement obsolète. Si l’Etat-nation est remis en cause aujourd’hui, ce n’est pas par la pression des grands ensembles économiques mais par la pression socio-culturelle de populations qui lui dénient le rôle de gouvernance. Finalement, seules les diasporas, qui ne relèvent que partiellement d’un modèle idéologique, devraient continuer de survivre en tant que nations transnationales mais le phénomène devrait aller en s’affaiblissant. La question de l’Union européenne, entité fédérale en devenir ou ensemble multilatéral conjoncturel fruit de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre froide mérité également d’être posée tout comme celle des modèles équivalents (ASEAN, etc.) ».


LA PRESSION SOCIO-CULTURELLE DES POPULATIONS ?

Là cet auteur nous déçoit. Qu'est-ce que cette « pression socio-culturelle », il ne le développe pas. Or, du point de vue marxiste, nous voyons bien une orchestration des Etats, une focalisation sur la question religieuse et des règles de vie opposées. Les populations en général ont bon dos, mais elles restent encadrées par des mafias étatiques, tant capitalistes qu'islamistes ou dictatoriales. L'Etat est la religion de la société capitaliste comme la religion est la meilleure expression désormais des volontés de l'Etat capitaliste. Ce ne sont pas les aspects ethniques, raciaux, climatiques qui divisent les peuples et les prolétariats, mais bien des modes de vie qui permettent de rendre la liberté impossible ou utopique : liberté de circuler, liberté sexuelle, solitude si utile au marché capitaliste, etc. L'islam est bien en ce sens la religion number one de la réaction bourgeoise mondiale, pas sa oumma ni l'utilisation du terrorisme islamique comme terreur ...des Etats dominants (qui en profitent pour renforcer leur propre terreur étatique). Le rigorisme de l'islam est mille fois supérieur disons à la période victorienne puisque, dans tous les pays, il impose une ghettoïsation de la femme, une morale ascétique très famille-patrie. Il s'immisce comme mode de vie dans la plupart des capitales occidentales avec la bénédiction des Etats démocratiques et de leurs contreforts gauchistes. Il est l'ordre moral dont ce système pourri jusqu'à la moelle prétend sauvegarder ses turpitudes financières et ses crimes impérialistes12.
Daguzan remarque finalement que l'émiettement en micro-nations n'est pas fait pour complaire au capitalisme moderne ni destiné à durer, et il cite le fameux rapport de la CIA de 2012 dont j'ai déjà parlé ici - Global Trends 2030 - qui souligne un phénomène d’hybridation : « L’Etat-nation ne devrait pas disparaître, mais les pays organisent et orchestrent de plus en plus des coalitions « hybrides » d’acteurs étatiques et non étatique qui changent selon l’objet. ».
La seule classe capable de mettre fin aux idéologies patriotiques est à l'heure actuelle complètement incapable de remettre en cause dispersions nationales et hybridations diverses, elle reste dominée, non par un rejet raciste, comme disent les rigolos gauchistes, mais par des appréhensions non d'invasion non plus, mais d'attaques sur le mode de vie occidental ; et cela personne n'en parle, même pas les révolutionnaires maximalistes amateurs, et Mélenchon le sait par contre qui met un bémol à l'immigrationnisme industriel à la Merkel13.
L'internationalisme de la classe ouvrière ne peut non plus aucunement se développer en applaudissant aux migrations massives, qui aboutissent logiquement à renforcer l'illusion patriotique14, aussi bien en France que, par exemple, en Algérie où « les autorités » ne s'embarrassent guère de gants pour laisser crever les migrants dans le désert, ce dont l'ex-tiers-mondiste patenté le journaleux bourgeois Plenel se garde de parler15.
Je laisse la conclusion, pessimiste, à Michèle Tribalat :

«  En Allemagne, le pic de l’enthousiasme a correspondu à septembre 2015 après la mort du petit Aylan sur les côtes turques : 79 % des Allemands sont alors d’accord pour qu’on répartisse les migrants qui arrivent entre les divers pays européens et pour en accueillir une partie. C’était le début de la grande vague migratoire déclenchée par le discours d’Angela Merkel. Rappelez-vous, c’était le 31 août : « Le monde voit dans l’Allemagne une terre d’espoir et d’opportunités. Et ce ne fut pas toujours le cas ». Tout le monde comprend alors, en Allemagne et ailleurs, qu’Angela Merkel fait référence à l’époque nazie. Beaucoup d’Allemands se sont alors mobilisés avec enthousiasme pour être à la hauteur. Mais la proportion d’Allemands répondant favorablement à l’accueil des migrants a quand même perdu 18 points de pourcentage en moins de deux ans. (...) On s’est beaucoup félicité de l’évacuation de la jungle de Calais sur le moment. Mais on sait maintenant que des migrants reviennent ou viennent à nouveau dans le coin. Donc, la maîtrise du phénomène est encore à démontrer. Le développement de barrages sur l’autoroute, avec la mort d’un chauffeur de camion mardi dernier a sans doute encore rafraîchi les bonnes volontés. Il y a donc une fluctuation des réponses à ce type de sondage en fonction des événements, mais les Français restent majoritairement opposés  à la répartition des migrants qui débarquent sur les côtes européennes. C’est seulement après la diffusion des photos sur le petit Aylan que la proportion de Français favorables à une répartition des migrants a frisé les 50 %. Quand ils répondent ce qu’ils répondent, on peut supposer que les Français souhaitent échapper à la déferlante. Répartir les migrants ce n’est pas maîtriser les flux migratoires. Ça peut même être compris comme étant tout le contraire : se faire à ce qui nous arrive ».

D'où la popularité du renforcement des frontières ! Surtout parmi la classe ouvrière ancienne ou nouvelle.




NOTES



et voir LO : https://journal.lutte-ouvriere.org/2017/04/19/melenchon-un-patriote-professionnel_88474.html

2Pendant toute la campagne son pensum « Révolution » barrait l'entrée de tous les supermarchés, ce sont maintenant des rayons entiers qui sont dédiés à la saga Macron. On se croirait plongé dans une librairie roumaine des seventies, à la gloire du couple Ceausescu, tout auteur désirant entrer dans la carrière étant invité à tresser une ode livresque au président des présidents, au bourgeois des bourgeois, au gigolo de la finance ravie.

3Le patriotisme est historiquement autant une notion de droite que de gauche. La Ligue des Patriotes de Déroulède mène campagne pour l'union nationale contre les Prussiens, (comme le parti socialiste qui avait appelé à l'union nationale en 1914) et surtout contre l’occupant juif incarné par la figure du capitaine Dreyfus. Le Parti des Patriotes de Taittinger qui a également pour ennemi principal les Juifs, lui succède au cours des années 1930. Pendant l’Occupation, tout le monde est patriote ; les résistants sont patriotes contre l’occupant nazi. Vichy est patriote contre l’envahisseur "judéo-communiste"sponsorisé par Londres et Moscou. A la Libération le PCF caracole sous les termes de « front national ».


4Les historiens officiels reprochent encore aux syndicalistes révolutionnaires et à Paul Lafargue d'avoir été les tenants d'une déchristianisation sectaire, Lafargue s'en fichait : « La bourgeoisie a besoin d'une religion qui lui promette une vie céleste pour continuer sa vie terrestre de fainéant et de jouisseur ». Voir aussi les multiples interprétations de la loi de 1905 par les missi dominici du système, qui la révisent et prétendent qu'elle servait à adapter les religions mais pas à les supprimer complètement de la sphère civile et politique.

5On prie le Seigneur de sauver la peau des combattants mais surtout de les autoriser à massacrer sans vergogne. La joie et l'indifférence face au meurtre n'est pas une nouveauté dans l'histoire chaotique de l'humanité. Le grand historien de l'Antiquité, Paul Veyne, décrit comment spectateurs des arènes romaines et chrétiens étaient parfaitement indifférents aux meurtres et égorgements des gladiateurs. Dolf Oehler – Juin 1848 : le spleen contre l'oubli – décrit l'absolue indifférence des flics lorsqu'ils étripent à la baïonnette les prolétaires insurgés. Ce qui choque de nos jours une grande partie de l'humanité consciente n'en émeut pas une autre partie à l'instinct primaire et à qui cela ne fait pas plus d'effet que d'écraser des mouches, surtout en temps de guerres.

6C'est la révolution russe de 1917 qui pose la question de l'internationalisme conçu comme fin des frontières, beaucoup plus clairement in vivo que n'avait pu le faire Marx.

7Parmi les nombreux mensonges de Poutine, qui conchie régulièrement les origines du socialisme comme le grand nettoyage religieux des bolcheviks. La majeure partie de la population musulmane serait dans la région de Moscou, et cette confrérie est très choyée par le tsar Poutine, comme sa consoeur orthodoxe. Bernard Guetta, lors du débat suivant l'émission, salue comme Hubert Védrines, l'importance du rôle de Poutine : sa victoire écrasante en Tchétchénie aurait évité à la Russie de devenir une république musulmane. C'est le discours inverse de l'empire US mais cela y ressemble étrangement. Des milliers de russes musulmans seraient au service de daesch, et le malin tsar laisse entendre, comme tous les sites dits « révisos », en tout cas critiques du big brother Washington (Réseau international, Voltaire, etc.), que daech n'est qu'une faction de la bourgeoisie américaine. Poutine ou Lavrov ont les infos et une parfaite compréhension de ce qui se passe entre fractions de la bourgeoisie US et en jouent avec beaucoup de malice. Caldwell : « Alors pourquoi les gens se soucient-ils autant de Poutine ? Parce qu’il est devenu un symbole d’auto-détermination nationale. Les conservateurs populistes le voient de la manière dont les progressistes ont vu Fidel Castro, comme la seule personne qui dit qu’il ne se soumettra pas au monde qui l’entoure. »


8Le charity business des associations pour réfugiés, vanté par Le Monde et les gauchistes spectateurs, fait partie de l'économie capitaliste : appel d'offres sur les centres de rétention administrative, développement d'hébergement de réfugiés chez des particuliers, l'accueil des réfugiés et demandeurs d’asile est (plutôt mal) réalisé dans des permanences spécialisées de Frontex (une bureaucratie cynique qui les traite par-dessous la jambe) et diverses autres dépendantes d'aides étatiques et qui surexploitent des bénévoles « en stage ». Face à des bateaux de fortune qui arrivent avec des migrants enchaînés, expédiés ainsi par leur Etat d'origine, un gisement d'emplois est là pour conseils et aide juridique à toutes les étapes de la procédure, même en les faisant tourner en bourriques (envoi à Berlin puis retour à Rome, puis Vintimille, etc.) : dossier Ofpra, recours à la cour nationale du droit d’asile (CNDA), admission au séjour, procédure de réadmission « Dublin III », défense contre les abus des préfectures, ou encore réunification familiale des réfugiés. etc ...
Tout ce cinéma rapporte des millions aux assocs à but non lucratif... et sert l'idéologie du bon accueil antiraciste, si mensonger.

9Cf. mon livre « Dans quel « Etat » est la révolution ? ». Que je suis étonné de voir en vente, ainsi que mon histoire du maximalisme, à des prix scandaleux, très chers, par des quidams sur Amazone alors que j'ai tant d'invendus que je brade. La thèse de Maler « Convoiter l'impossible » est une très utile réflexion pour le communisme, si on le retrouve.

10L'Europe de Schengen n'est évidemment pas cette fable longtemps rêvé par nos trotskiens nationaux « d'Etats-unis socialistes d'Europe », invention d'un Trotsky qui voulait faire concurrence aux « Etats-unis communistes » de Staline, mais une impasse de pays riches et la place du principal marché mondial pour fournisseurs des grandes puissances !

11https://www.diploweb.com/La-fin-de-l-Etat-Nation-Surprise.html

12Macron a été très activement soutenu par l'UOIF des frères musulmans - organisation considérée comme terroriste par la Russie et que les républicains aux Etats-Unis ont vainement tenté de faire classer de même.

13 Mélenchon radotait en 2012 sur la Canebière, avec ce terrorisme verbal hérité de sa kultur trotskienne, que « notre chance, c’est le métissage » avant de louanger les « Arabes et Berbères» ayant importé « la science, les mathématiques ou la médecine » sur le Vieux Continent. En revanche, son livre-programme, Le Choix de l’insoumission (Le Seuil, 2016), développe une vision de l’immigration moins gauchiste angélique : « Si on ne veut pas que les gens viennent, il vaut mieux qu’ils ne partent pas [...] Donc éteignons l’une après l’autre les causes de leur départ. Elles sont très simples, c’est la guerre et la misère. Une fois que les gens sont là, que voulez-vous faire ? Les rejeter à la mer ? Non, c’est absolument impossible. Donc il vaudrait mieux qu’ils restent chez eux. » A Florange, en janvier dernier, il se déclarait favorable à la « régularisation des travailleurs sans papiers mais pas pour le déménagement permanent du monde, ni pour les marchandises ni pour les êtres humains ». Protectionniste et antilibéral, il n’en prétend pas moins rester partisan d’une « république universelle » par la généralisation du droit du sol et des naturalisations. Mais sans destruction de l'Etat capitaliste ! Et sans en référer au fait que les petites nations sous-développées doivent rester de simples réservoirs à main d'oeuvre corvéable et encadrée sagement par l'islam. Plus à droite, si je puis dire, que Mélenchon on trouve un site du PCF 'Réveil communiste' qui récuse l'enchantement immigrationniste et ne se bouche pas la vue avec la généralité « nos frères de classe », mais avec un arrière-goût très marchaisien : http://www.reveilcommuniste.fr/pages/Les_communistes_et_limmigration_quels_principes_adopter_augmente_1382011-5126356.html


14Ce que certains commentateurs anonymes qualifient, pas à tort à mon sens de « folie migratoire », comme celui-ci : « Le problème ne vient pas des migrants mais de nos politiques qui refusent d'admettre la colonisation par l'islam et qui font bénéficier les clandestins de l'état providence destiné aux citoyens qui ont travaillé et cotisé ; l'envoi des enfants mineurs depuis l'Afrique est devenu une source de revenus pour des villages entiers ! De plus, ces migrants vont se transformer en des poches de problèmes car ils viennent avec leurs traditions contraires à notre république et notre mode de vie ! Avant d'envisager des arrivées nouvelles de personnes à la logique communautariste, il est utile de solutionner les zones à problème existantes sur notre territoire et combattre sans complaisance ceux qui veulent imposer leurs traditions et culture moyenâgeuse hors de notre conception sociétale ». Le questionnement dans le désarroi contient des vérités mais encore une fois dans l'espoir que l'Etat « providence » bourgeois pourrait remédier à une situation bordélique... dont il a besoin pour continuer à diviser la société !



15Le rédacteur du minuscule GIGC s'est bien fait avoir par la propagande autour de l'exhibition du cadavre du petit Aylan, un « petit frère de classe » ! S'il récuse de se laisser entraîner par les campagnes de solidarité humanitaire gauchiste, il ne propose que la lutte gréviste (!?) pour mettre fin à la barbarie et au massacre des migrants, comme saut dans le Grand Soir libérateur ! Or, où est le programme maximaliste : attentisme + attitude de spectateur indigné ! Ne faut-il pas par contre que les minorités maximalistes insistent, d'une part comme le fait partiellement Mélenchon sur la nécessité de l'arrêt de la guerre, et surtout la perspective d'une « réorganisation » de la société en laissant les gens là où ils sont plutôt que d'encourager une soit disant prolétarisation, prolifération qui confine à ghettoïsation du salariat et généralisation du mode de vie islamique (ce que le malin Poutine a fort justement glissé dans l'interview au journaliste américain) (cf . Sur le site Guerre ou Révolution et le tract informatique : « Exode massif sur tous les continents, ce sont nos frères de classe que le capitalisme assassine).

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