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samedi 21 janvier 2017

C'est qui qui va le renverser le capitalisme?

LE CAPITALISME VA-T-IL S'EFFONDRER DE LUI-MEME ?

Voici quelques extraits sur le sujet qui ont sous-tendu la discussion du 20 janvier

 

Marx, prophète de l’effondrement du capitalisme

Denis Clerc 01/09/2016


Karl Marx, lui, ne croyait pas aux vertus de la main invisible du marché. Arrivé sur la scène intellectuelle près d’un siècle après Smith - le premier volume du Capital a été publié en 1867 -, il a sous les yeux, en Rhénanie d’abord, puis à Paris, Bruxelles et Londres, où il habita, les conséquences de la révolution industrielle en cours. Certes, la production a considérablement augmenté, mais la misère aussi. C’est pourquoi il voit dans le capitalisme un système social fondé sur l’exploitation du travail des uns au profit de ceux qui possèdent les moyens de production. Il n’était ni le seul ni le premier à penser ainsi, et nombre de réformateurs sociaux essayaient d’inventer un système social mariant efficacité et justice.
Marx ne s’intéresse que médiocrement à ces utopies. Son ambition est autre. Il souhaite analyser le fonctionnement du capitalisme, ses ressorts cachés, et montrer qu’il est basé sur une contradiction insoluble : les forces productives reposent sur une socialisation croissante (on passe d’une économie artisanale à une économie de grandes entreprises, et c’est l’effort collectif qui permet d’être efficace, de mettre en place un appareil de formation et d’effectuer les investissements nécessaires...), mais la propriété des moyens de production est privée et entre les mains d’un nombre de plus en plus réduit de patrons, du fait du mouvement de concentration. Pour sortir de cette situation, il faut donc socialiser les moyens de production, faire en sorte qu’ils deviennent la propriété commune des travailleurs associés.
Même si la démonstration a pris du plomb dans l’aile, l’esprit critique de Marx continue de souffler et d’alimenter toute une famille de pensée qui voit dans les crises, les krachs et les violences sociales la preuve que son analyse sur la logique, l’instabilité et les ressorts du capitalisme demeure d’actualité.

"Le capitalisme touche à sa fin"

Pour le sociologue Immanuel Wallerstein, la crise actuelle signe la fin du capitalisme. D'ici peu, un nouveau système aura émergé.

Signataire du manifeste du Forum social de Porto Alegre ("Douze propositions pour un autre monde possible"), en 2005, vous êtes considéré comme l'un des inspirateurs du mouvement altermondialiste. Vous avez fondé et dirigé le Centre Fernand-Braudel pour l'étude de l'économie des systèmes historiques et des civilisations de l'université de l'Etat de New York, à Binghamton. Comment replacez-vous la crise économique et financière actuelle dans le "temps long" de l'histoire du capitalisme ?
Immanuel Wallerstein : Fernand Braudel (1902-1985) distinguait le temps de la "longue durée", qui voit se succéder dans l'histoire humaine des systèmes régissant les rapports de l'homme à son environnement matériel, et, à l'intérieur de ces phases, le temps des cycles longs conjoncturels, décrits par des économistes comme Nicolas Kondratieff (1982-1930) ou Joseph Schumpeter (1883-1950). Nous sommes aujourd'hui clairement dans une phase B d'un cycle de Kondratieff qui a commencé il y a trente à trente-cinq ans, après une phase A qui a été la plus longue (de 1945 à 1975) des cinq cents ans d'histoire du système capitaliste.
Dans une phase A, le profit est généré par la production matérielle, industrielle ou autre ; dans une phase B, le capitalisme doit, pour continuer à générer du profit, se financiariser et se réfugier dans la spéculation. Depuis plus de trente ans, les entreprises, les Etats et les ménages s'endettent, massivement. Nous sommes aujourd'hui dans la dernière partie d'une phase B de Kondratieff, lorsque le déclin virtuel devient réel, et que les bulles explosent les unes après les autres : les faillites se multiplient, la concentration du capital augmente, le chômage progresse, et l'économie connaît une situation de déflation réelle.
Mais, aujourd'hui, ce moment du cycle conjoncturel coïncide avec, et par conséquent aggrave, une période de transition entre deux systèmes de longue durée. Je pense en effet que nous sommes entrés depuis trente ans dans la phase terminale du système capitaliste. Ce qui différencie fondamentalement cette phase de la succession ininterrompue des cycles conjoncturels antérieurs, c'est que le capitalisme ne parvient plus à "faire système", au sens où l'entend le physicien et chimiste Ilya Prigogine (1917-2003) : quand un système, biologique, chimique ou social, dévie trop et trop souvent de sa situation de stabilité, il ne parvient plus à retrouver l'équilibre, et l'on assiste alors à une bifurcation.
La situation devient chaotique, incontrôlable pour les forces qui la dominaient jusqu'alors, et l'on voit émerger une lutte, non plus entre les tenants et les adversaires du système, mais entre tous les acteurs pour déterminer ce qui va le remplacer. Je réserve l'usage du mot "crise" à ce type de période. Eh bien, nous sommes en crise. Le capitalisme touche à sa fin.
Pourquoi ne s'agirait-il pas plutôt d'une nouvelle mutation du capitalisme, qui a déjà connu, après tout, le passage du capitalisme marchand au capitalisme industriel, puis du capitalisme industriel au capitalisme financier ?
Le capitalisme est omnivore, il capte le profit là où il est le plus important à un moment donné ; il ne se contente pas de petits profits marginaux ; au contraire, il les maximise en constituant des monopoles - il a encore essayé de le faire dernièrement dans les biotechnologies et les technologies de l'information. Mais je pense que les possibilités d'accumulation réelle du système ont atteint leurs limites. Le capitalisme, depuis sa naissance dans la seconde moitié du XVIe siècle, se nourrit du différentiel de richesse entre un centre, où convergent les profits, et des périphéries (pas forcément géographiques) de plus en plus appauvries.
A cet égard, le rattrapage économique de l'Asie de l'Est, de l'Inde, de l'Amérique latine, constitue un défi insurmontable pour "l'économie-monde" créée par l'Occident, qui ne parvient plus à contrôler les coûts de l'accumulation. Les trois courbes mondiales des prix de la main-d'oeuvre, des matières premières et des impôts sont partout en forte hausse depuis des décennies. La courte période néolibérale qui est en train de s'achever n'a inversé que provisoirement la tendance : à la fin des années 1990, ces coûts étaient certes moins élevés qu'en 1970, mais ils étaient bien plus importants qu'en 1945. En fait, la dernière période d'accumulation réelle - les "trente glorieuses" - n'a été possible que parce que les Etats keynésiens ont mis leurs forces au service du capital. Mais, là encore, la limite a été atteinte !
Y a-t-il des précédents à la phase actuelle, telle que vous la décrivez ?
Il y en a eu beaucoup dans l'histoire de l'humanité, contrairement à ce que renvoie la représentation, forgée au milieu du XIXe siècle, d'un progrès continu et inévitable, y compris dans sa version marxiste. Je préfère me cantonner à la thèse de la possibilité du progrès, et non à son inéluctabilité. Certes, le capitalisme est le système qui a su produire, de façon extraordinaire et remarquable, le plus de biens et de richesses. Mais il faut aussi regarder la somme des pertes - pour l'environnement, pour les sociétés - qu'il a engendrées. Le seul bien, c'est celui qui permet d'obtenir pour le plus grand nombre une vie rationnelle et intelligente.
Cela dit, la crise la plus récente similaire à celle d'aujourd'hui est l'effondrement du système féodal en Europe, entre les milieux du XVe et du XVIe siècle, et son remplacement par le système capitaliste. Cette période, qui culmine avec les guerres de religion, voit s'effondrer l'emprise des autorités royales, seigneuriales et religieuses sur les plus riches communautés paysannes et sur les villes. C'est là que se construisent, par tâtonnements successifs et de façon inconsciente, des solutions inattendues dont le succès finira par "faire système" en s'étendant peu à peu, sous la forme du capitalisme.
Combien de temps la transition actuelle devrait-elle durer, et sur quoi pourrait-elle déboucher ?
La période de destruction de valeur qui clôt la phase B d'un cycle Kondratieff dure généralement de deux à cinq ans avant que les conditions d'entrée dans une phase A, lorsqu'un profit réel peut de nouveau être tiré de nouvelles productions matérielles décrites par Schumpeter, sont réunies. Mais le fait que cette phase corresponde actuellement à une crise de système nous a fait entrer dans une période de chaos politique durant laquelle les acteurs dominants, à la tête des entreprises et des Etats occidentaux, vont faire tout ce qu'il est techniquement possible pour retrouver l'équilibre, mais il est fort probable qu'ils n'y parviendront pas.
Les plus intelligents, eux, ont déjà compris qu'il fallait mettre en place quelque chose d'entièrement nouveau. Mais de multiples acteurs agissent déjà, de façon désordonnée et inconsciente, pour faire émerger de nouvelles solutions, sans que l'on sache encore quel système sortira de ces tâtonnements.
Nous sommes dans une période, assez rare, où la crise et l'impuissance des puissants laissent une place au libre arbitre de chacun : il existe aujourd'hui un laps de temps pendant lequel nous avons chacun la possibilité d'influencer l'avenir par notre action individuelle. Mais comme cet avenir sera la somme du nombre incalculable de ces actions, il est absolument impossible de prévoir quel modèle s'imposera finalement. Dans dix ans, on y verra peut-être plus clair ; dans trente ou quarante ans, un nouveau système aura émergé. Je crois qu'il est tout aussi possible de voir s'installer un système d'exploitation hélas encore plus violent que le capitalisme, que de voir au contraire se mettre en place un modèle plus égalitaire et redistributif.
Les mutations antérieures du capitalisme ont souvent débouché sur un déplacement du centre de "l'économie-monde", par exemple depuis le Bassin méditerranéen vers la côte Atlantique de l'Europe, puis vers celle des Etats-Unis ? Le système à venir sera-t-il centré sur la Chine ?
La crise que nous vivons correspond aussi à la fin d'un cycle politique, celui de l'hégémonie américaine, entamée également dans les années 1970. Les Etats-Unis resteront un acteur important, mais ils ne pourront plus jamais reconquérir leur position dominante face à la multiplication des centres de pouvoir, avec l'Europe occidentale, la Chine, le Brésil, l'Inde. Un nouveau pouvoir hégémonique, si l'on s'en réfère au temps long braudélien, peut mettre encore cinquante ans pour s'imposer. Mais j'ignore lequel.
En attendant, les conséquences politiques de la crise actuelle seront énormes, dans la mesure où les maîtres du système vont tenter de trouver des boucs émissaires à l'effondrement de leur hégémonie. Je pense que la moitié du peuple américain n'acceptera pas ce qui est en train de se passer. Les conflits internes vont donc s'exacerber aux Etats-Unis, qui sont en passe de devenir le pays du monde le plus instable politiquement. Et n'oubliez pas que nous, les Américains, nous sommes tous armés...
Propos recueillis par Antoine Reverchon

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2008/12/16/le-capitalisme-touche-a-sa-fin_1105714_1101386.html#ZUMRib6AV0W1iOMi.99
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http://www.mediapart.fr/journal/economie/111108/michel-husson-je-ne-crois-pas-a-l-effondrement-du-capitalisme
Michel Husson : «Je ne crois pas à l’effondrement du capitalisme»
Crise du capitalisme, ralentissement des pays émergents, intensification des divergences au sein de la zone euro, nouveau «Bretton Woods»... :
Michel Husson, économiste à l'Institut de recherches économiques etsociales, membre d'Attac, livre son analyse du grand séisme économique en cours.
Diriez-vous, comme le penseur américain Immanuel Wallerstein, que «le capitalisme touche à sa fin» ?

J'adopterais une position intermédiaire. Effectivement, l'ampleur de la crise est telle qu'elle remet en cause la nature du capitalisme. En même temps, j'ai toujours critiqué l'idée d'un effondrement du système capitaliste. Je ne crois pas au scénario de l'implosion. Mon schéma d'interprétation est le suivant : les profits ont augmenté, mais les investissements n'ont pas suivi. La satisfaction d'une partie croissante des besoins sociaux n'intéresse plus le capitalisme, parce qu'ils impliquent une baisse de la rentabilité. On préfère donc ne pas les satisfaire. Du coup, la finance joue le rôle de déversoir de ces profits, qui ne sont plus investis dans la sphère réelle. Le mode de reconnaissance des besoins sociaux du capitalisme est devenu excluant, autrement dit il «trie» entre ce qui est rentable et ce qui ne l'est pas. D'où l'incapacité du capitalisme d'aujourd'hui à faire ce qu'il a su faire à peu près, durant les Trente glorieuses, et qui lui conférait de la légitimité : l'amélioration du
pouvoir d'achat.
Quand j'étais étudiant, on m'expliquait que le capitalisme garantissait le plein emploi, la progression du pouvoir d'achat et l'extension de l'Etat social. Ces prétentions-là ont complètement disparu aujourd'hui. C'est un véritable élément de crise systémique. De là à dire qu'automatiquement cela entraîne la «fin du capitalisme», je ne le pense pas. Cela force le capitalisme à chercher des formes de reproduction de plus en plus régressives socialement. »

LA THEORIE DE L'ECROULEMENT DU CAPITALISME par Anton Pannekoek (1934)

Dans les premières années qui suivirent la Révolution Russe, on vit prédominer l’opinion selon laquelle le capitalisme entrait dans sa crise finale, sa crise mortelle. Quand le mouvement ouvrier révolutionnaire d’Europe occidentale commença de faiblir, la III ème Internationale abandonna cette théorie. Pourtant, le mouvement d’opposition, représenté par le K.A.P. [1], s’y tint avec énergie : selon lui, reconnaître l’existence d’une crise mortelle constituait un signe distinctif entre le point de vue révolutionnaire et le point de vue réformiste. La question de savoir si l’effondrement du capitalisme est automatique et inévitable et ce que l’on doit entendre par là, voilà un problème de la première importance pour la classe ouvrière, aussi bien dans le domaine de la connaissance que dans celui de la tactique. Rosa Luxemburg se l’est posée, dés 1912, dans son livre l’accumulation du Capital [2] et elle est arrivée à la conclusion que dans un système capitaliste pur et fermé la plus-value destinée à l’accumulation ne peut être réalisée et que, par conséquent, le capitalisme ne peut survivre qu’en s’étendant continûment par le commerce dans les pays non capitaliste. Autrement dit : si cette expansion cesse d’être possible, le capitalisme s’effondre. Il ne peut se maintenir plus longtemps en tant que système économique. Le K.A.P. s’est souvent référé à cette théorie, bien que celle-ci ait fait l’objet, dés son apparition, de nombreuses critiques, venues de tous les horizons. En 1929 Henryk Grossmann a exposé une théorie toute différente dans son livre : Les lois de l’Accumulation et de l’effondrement du système capitaliste. Il y arrive à la conclusion que le capitalisme doit finir par connaître l’effondrement économique, c’est-à-dire que, indépendamment des efforts des hommes, de l’éclatement ou non de révolutions, le capitalisme ne peut se maintenir comme système économique. La crise de 1930, à la fois sévère et durable, a, sans doute aucun, rendu les esprits accessibles à cette “ théorie de la crise mortelle ”. Dans le manifeste des United Workers of America qui vient de paraître, on propose d’utiliser la théorie de Grossmann comme base théorique d’une nouvelle orientation du mouvement ouvrier. Voilà pourquoi il est bon d’examiner cette théorie d’un œil critique. Et, dans cette intention, on ne peut éviter d’exposer comment la question est abordée par Marx et les différents auteurs qui en ont traité par la suite.

(lire la suite sur le site de La Bataille socialiste)

SUR LA PREVISION MARXISTE

Robin Goodfellow écrit : « Selon notre analyse actuelle, à partir des données disponibles au 30 octobre 2016, nous serions entrés dans la phase du cycle qui précède la crise. Nous l’appelons, conventionnellement, « vague d’accélération ». Elle pose la question de sa durée puisque celle-ci détermine la prévision de la crise. La publication, fin août 2016 et révisées en septembre (et maintenues en octobre), par le BEA, des données du deuxième trimestre 2016, sont l’occasion pour rectifier la prévision. Sur la base des données disponibles au moment de la sortie du livre « le cycle des crises aux Etats-Unis depuis 1929 », les méthodes que nous avons développées pour anticiper le point de départ de la vague d’accélération, donc la dernière phase du cycle avant la crise de surproduction, désignaient le premier trimestre 2019. Compte tenu de la longueur potentielle d’une vague d’accélération, cela nous permettait d’escompter une crise de surproduction en 2019-2020. Les nouvelles données, publiées fin juin 2016, conduisent sur la base des mêmes méthodes à rapprocher de plus de deux ans la crise de surproduction. Dans ce texte, d’une part nous rectifions à nouveau la prévision, à la suite d’une erreur de calcul, et d’autre part, nous revenons sur la détermination de la durée potentielle de la vague d’accélération ». (cf. La précision de la prévision)
Contact : robin.goodfellow@robingoodfellow.info

et aussi :

https://www.robingoodfellow.info/pagesfr/.../crise_refondue_20090930.pdf
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30 sept. 2009 ... VITALE DE LA PREVISION ... Parti et prévision du communisme. .... LE MARXISME VULGAIRE CONTRE ROSA LUXEMBURG .................................102. 9.1 ...... ajouté par feu Roger Dangeville et non d'un titre écrit par Marx.


« Des crises permanentes, çà n’existe pas » (Marx)


Les nombreuses erreurs de perspectives au sein du mouvement ouvrier sur l’évolution de la crise et de la lutte de classe sont à rattacher aux visions catastrophistes sur la dynamique et les contradictions du capitalisme. Non seulement Marx n’a jamais défendu une telle vision, mais sa conception était toute autre. Tel est le sujet de cet article.

Catastrophes économiques et catastrophisme


Une des sources de ces erreurs récurrentes réside dans l’idée que Marx aurait défendu une théorie de l’effondrement économique inévitable du capitalisme : « Si on le comprend bien, le schéma marxien de l’accumulation est par son insolubilité même le pronostic exact de l’ effondrement économique inévitable du capitalisme… » [1]. Rosa Luxemburg attribue la paternité de cette idée à Marx et la réitère à longueur de pages dans son ouvrage sur L’accumulation du capital [2]. Sans cette assise matérielle, soutenait R. Luxemburg, « le socialisme perd le fondement de granit de la nécessité historique objective,… », et les révolutionnaires ne peuvent alors que « s’enfoncer dans les brumes des systèmes et des écoles pré-marxistes qui prétendaient faire découler le socialisme de l’injustice et de la noirceur du monde actuel, ainsi que de la volonté révolutionnaire des classes laborieuses » [3]. Elle rejoignait ainsi la même démarche qu’empruntera plus tard Henryk Grossman, à savoir la nécessité de fonder le socialisme sur une « démonstration économique de l’écroulement du capitalisme » [4].
En réalité, Marx n’a jamais développé une telle idée ; il défend une vision du processus révolutionnaire qui est toute différente : « Les contradictions capitalistes provoqueront des explosions, des cataclysmes et des crises au cours desquels les arrêts momentanés de travail et la destruction d’une grande partie des capitaux ramèneront, par la violence, le capitalisme à un niveau d’où il pourra reprendre son cours. Les contradictions créent des explosions, des crises au cours desquelles tout travail s’arrête pour un temps tandis qu’une partie importante du capital est détruite, ramenant le capital par la force à un point où, sans se suicider, il est à même d’employer de nouveau pleinement sa capacité productive. Cependant ces catastrophes qui le régénèrent régulièrement, se répètent à une échelle toujours plus vaste, et elles finiront par provoquer son renversement violent » [5].
Dans la description de cette spirale de « contradictions » créant « des explosions, des crises, des cataclysmes, des arrêts de travail et la destruction de capitaux », Marx souligne que le capitalisme traverse ces dernières « sans se suicider » et que ‘ces catastrophes le régénèrent et le ramènent à un niveau d’où il pourra reprendre son cours’. En effet, pour Marx, la nécessité de transformer la société de fond en comble naît au sein de ces cataclysmes répétitifs dans le cadre d’un mode de production obsolescent : le développement croissant des contradictions du capitalisme suffisent à féconder la nécessité de la révolution. Nulle part dans son œuvre, Marx ne met en place un raisonnement qui postule une « impossibilité économique du capitalisme » comme le lui attribue R. Luxemburg.
En effet, il n’existe pas de limites quantitatives prédéfinies au sein des forces productives du capitalisme qui détermineraient un point alpha précipitant ce mode de production dans la mort (que ce soit un pourcentage de taux de profit, une quantité donnée de marchés solvables ou extra-capitalistes, etc.). Les limites des modes de production sont avant tout socio-économiques, produites par leurs contradictions internes, et par la collision entre ces rapports devenus obsolètes et les forces productives. Dès lors, c’est le prolétariat qui abolira le capitalisme à la faveur de la manifestation de ses contradictions objectives, et pas ce dernier qui mourra de lui-même suite à un « effondrement », une « impossibilité économique objective du capitalisme ». Telle est la méthode posée par Marx : « La production capitaliste tend sans cesse à dépasser ces limites qui lui sont immanentes, mais elle n’y parvient qu’en employant des moyens qui, de nouveau et à une échelle plus imposante, dressent devant elle les mêmes barrières » [6].
Cependant, il est clair que si le capitalisme ne s’effondrera pas de lui-même, il n’échappera pas davantage à ses antagonismes destructeurs. Fin catastrophiste du système et catastrophe sont deux choses distinctes. Si la première conception défendue par R. Luxemburg postule l’existence d’une « impossibilité économique du capitalisme » qui mène à « l’effondrement économique inévitable du capitalisme… », l’autre défendue par Marx conçoit la possibilité de « catastrophes » et de « cataclysmes », mais qui le « régénèrent » pour le ramener « à un niveau d’où il pourra reprendre son cours ». Ce ne sont alors pour Marx que les « répétitions à une échelle toujours plus vaste » de cette spirale qui pousseront le prolétariat à la révolte, ouvrant la possibilité d’un « renversement violent du capitalisme ». En effet, s’il faut écarter toute vision catastrophiste, il faut cependant réaffirmer que le système capitaliste a déjà connu et connaîtra des crises, guerres et catastrophes d’ampleur croissante.

LIRE LA SUITE DE CET EXCELLENT ARTICLE DE MARCEL ici : http://www.leftcommunism.org/spip.php?article187 site de Controverses en Belgique

Pour une autre analyse, catastrophiste et plus discutable :

Élection de Trump : le choix de la marche à la guerre généralisée. Seul le prolétariat révolutionnaire peut s’y opposer (9 novembre 2016)

 

Sidération. Stupeur. « L’impensable est pourtant bien arrivé » clament ce matin les éditorialistes. L’élection de Trump qui vient d’être confirmée à l’instant où nous écrivons, provoque les mêmes réactions dans les classes bourgeoises du monde entier que celles qui ont suivi le Brexit, la victoire du “ oui ” au referendum britannique sur la sortie du Royaume Uni de l’Union européenne. L’ambassadeur français aux États-Unis a écrit sur Twitter : « Après le Brexit et cette élection, tout est désormais possible. Un monde s’effondre devant nos yeux. Un vertige ».
Ce nouveau “ impensable ” n’est pas l’expression d’un monde qui deviendrait “ fou ”. Il est l’expression des poussées historiques vers la guerre généralisée. Il est l’expression du monde capitaliste et de son impasse ; de l’exacerbation de ses contradictions historiques insurmontables ; et des difficultés croissantes des différentes bourgeoisies nationales à y faire face, à commencer par la plus expérimentée au monde, la britannique avec le Brexit, et maintenant la plus puissante, l’américaine. La fin du bipartisme classique d’alternance gouvernementale et la montée des extrême-droites dans les principaux pays européens, tout comme les attentats sanglants qu’ils ont subis depuis 2015, en France et en Belgique en premier lieu, annoncent encore de nouveaux “ impensables ”. L’impasse économique, surtout depuis 2008, et l’exacerbation des rivalités et guerres commerciales et impérialistes qu’elle provoque, précipitent des bouleversements politiques au sein des classes bourgeoises des principales puissances impérialistes, et y compris certaines divisions en son sein.

Blog: "Révolution ou guerre" du groupe international de la gauche communiste (GIGC)

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