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lundi 28 mars 2016

Dérapage bordiguiste : les bandes d'assassins de daech expressions des tensions sociales ?



« La différence entre le génie et la bêtise, c’est que le génie a des limites » Robert Byrne

Les nouveaux internationalistes tenant d'une classe universelle multiculturaliste sont sans conteste la camarade Merkel et le pape François (à ne pas confondre avec le nain français), l'immigration sans fin est le stade suprême de l'humanité démocratique dans sa sainte guerre contre daech, ce profanateur du coran ; même si trop d'immigration tue l'immigration et sert de cache sexe à la guerre impérialiste en Syrie.
Parfois on croit avoir touché le fond de la bêtise en politique, voire croire sa répétition impossible pour la minorité de ceux qui gardent leur chapeau sur la tête lors des défilés militaires. Ainsi on sait que l'électeur vulgum pecus de la supercherie démocratique sera toujours bête, il votera éternellement pour la photo du candidat qu'il a vu à la télé comme il achète la marque de lessive qui mousse à l'écran juste avant le « 20 heures ». Mais quand dans cette minorité des gardeurs de chapeau sur la tête face aux flonflons patriotiques, on s'aperçoit que certains mangent leur chapeau, on est triste pour eux.
Attentif et régulier lecteur du « Prolétaire », journal maximaliste bordiguiste au papier épais qu'ils m'envoient fraternellement à la boite aux lettres de Pierre Hempel, je me mis à lire leur dernier numéro (le n°518) et en premier lieu - plutôt confiant après la prise de position communiste de ce groupe (?) face aux attentats - l'article de tête, ou de front : "Pour défendre le capitalisme, l'Etat d'urgence en permanence". La majuscule à Etat était-elle un jeu de mot intentionnel au lieu de état, terme insignifiant ? La dénonciation sévère de l'état (en minuscule) d'urgence au début de l'article m'intrigua. Cet état d'urgence ne gêne nullement la plupart des prolétaires qui prennent les transports en commun et voient d'un bon œil tous ces braves troufions mitraillettes en main (bien que perçus comme inutiles et possibles victimes eux aussi). Certainement que nombre de perquisitions policières ont dérapé ou été odieuses, mais on ne fait pas d'omelettes anti-terroristes sans casser quelques portes de HLM de barbus zarbis. Le problème est que nos militants bordiguistes raisonnent dans l'abstrait comme si nous étions au moment des lois d'exception en Allemagne ou en France fin dix-neuvième après des attentats anarchistes. Ils se gourent complètement de période et de configurations des protagonistes et autres antagonistes. Mon oreillette droite (immigrée de la seconde génération) se met soudain à rougir lorsque mon œil gauche perçoit l'intertitre « une mesure héritée de l'ère coloniale ». Holà me dis-je, il y a une obsession de l'oppression des peuples d'Orient (Bakou – le congrès des peuples d'Orient d'un parti bolchevique désorienté – était presque bakouniniste) et certainement une préférence immigrée...
Tout s'explique, tout « se tient » dans la complot anti-immigré du gouvernement avec la déchéance de nationalité : « En ciblant les bi-nationaux de naissance, Hollande a sans aucun doute voulu embarrasser la droite et l'extrême droite et réaliser un coup politique. Mais cette proposition a une signification plus profonde ; renforçant officiellement le soupçon envers les enfants d'immigrés ou de colonisés, elle aggrave le statut d'exception qui pèse en fait sur tous les prolétaires immigrés ou issus de l'émigration. Elle contribue ainsi à maintenir et à accroître la division entre travailleurs au moment précis où redoublent les attaques anti-ouvrières. En politique tout se tient ; ce n'est pas par hasard que le gouvernement s'obstine à faire adopter cette mesure qu'il juge lui-même « symbolique » en même temps que les mesures répressives qui le sont beaucoup moins ».
Notre minuscule ombre de parti disparu ne s'interroge même pas sur l'essentiel – on se fiche en particulier du critère de la nationalité depuis 200 ans dans le mouvement ouvrier – qui est que cette histoire de déchéance fût un débat obscur entre factions bourgeoises dont tout prolétaire se fichait comme de son premier pointage au turbin ; et où , si on leur avait demandé leur avis, prolétaires de souches comme prolétaires immigrés d'hier ou d'avant-hier eussent répondu : à la porte les tueurs de civils ou au peloton d'exécution !
Les prolétaires n'étant en général aucunement gênés dans leurs activités quotidiennes par les horribles lois d'exception – plutôt dubitatifs sur ce cinéma sécuritaire qui de dix morts en janvier 2015 réussit l'exploit de passer à 130 victimes en novembre – nos ennemis de l'Etat d'exception ne trouvent à plaindre que les bobos : « les premiers touchés (paix à leur âme) ont été des militants et sympathisants écologistes, assignés à résidence et interdits de manifestation ». Ces assignations et interdictions de manifestation de la petite bourgeoisie, on s'en bat les couilles, mais le pire est à venir.
Alors qu'on est en plein refroidissement de toute lutte sociale sérieuse, avec une ambiance de terreur et d'expectative chaque jour pour celui qui se rend au travail, où même le radotage du Premier ministre Valls - « on est dans une guerre longue » - finit par être pris au sérieux, où notre devoir de mémoire de maximalistes se figure dans quel état de sidération étaient nos ancêtres dans la société de naguère et de jadis après les attentats anarchistes, on va nous expliquer d'abord que l'armée dans les rues ne visent pas « à empêcher de futures représailles de l'Etat islamique contre les habitants d'un pays qui le bombarde. Elles sont en réalité des mesures préventives et qui se veulent dissuasives, contre l'explosion des tensions sociales qui ne cessent de s'accumuler... »1.
Sur le web, tous les morveux émoustillés par quelques pets estudiantins téléguidés par des barons
le tag "et après?" est de votre serviteur
roses s'imaginent déjà que le 31 mars va être autre chose qu'un enterrement classique par la poulpe syndicale et que les futurs cadres du PS encore simples arsouilles de l'Unef et les syndicats collabos vont mordre la main qui les nourrit.

Mais ce qui suit est du jamais vu pour vous lecteur de 2016 – moi j'avais déjà entendu dire que Baader et Rouillan étaient des frères de classe et que les deux millions de cambodgiens déportés par les khmers rouges n'étaient que des petits bourgeois – mais sachez maintenant que la « violence des déclassés » est le breuvage révolutionnaire de demain :
« Les djihadistes qui commettent des attentats au nom de l'Etat islamique, d'Al Qaïda ou autre, sont le produit de ces tensions dont ils expriment la force explosive de manière réactionnaire et suicidaire, leur situation de marginalisation sociale les conduisant à être attirés par des organisations bourgeoises islamistes2 et leur idéologie religieuse. Dans une autre situation, la violence exprimée y compris par ces éléments déclassés pourrait servir à la lutte révolutionnaire, mais à la condition d'être encadrée, orientée et disciplinée par des organisations de classe ; sinon ce sont des forces bourgeoises qui l'utiliseront directement contre le prolétariat.
Quoiqu'il en soit, c'est l'ébranlement de la paix civile interne, de la paix sociale, autrement dit la fin de la passivité résignée du prolétariat, que redoute au plus haut point la classe dominante et qui lui font adopter des mesures répressives préventives ». Pour appuyer cette incongruité, une note renvoie à un spécialiste de l'islam (une référence!) qui blablate sur la « révolte de ces jeunes », « avant-garde d'une guerre à venir »... çà oui !

La dialectique bordiguiste ne casse ni des briques ni un carreau de plâtre. Présenter la piétaille racaille terroriste (voleurs et petits macs ) comme des produits des « tensions sociales » et leurs crimes comme une « violence qui pourrait servir à la lutte révolutionnaire », c'est considérer que les membres anti-sémites des premiers corps francs pré-hitlériens, que les malfrats tueurs de prêtres au début du bordel impérialiste espagnol en 1936, et que tous les lâches poseurs de bombes contre les civils y inclus les prolétaires sont des … éveilleurs de conscience de la violence très saignante et très humanitaire ! C'est du langage stalinien tout cru à la façon de la pétasse cougar Passionaria : « il vaut mieux tuer cent innocents qu'épargner un seul coupable». Et on se fiche par après comme d'une guigne des radotages de papy Bordiga avant 39 sur la parti unique mystique.
Les terroristes islamiques c'est le lumpen moderne. Ce sont des produits non de leur pauvre famille, souvent prolétaire et absolument contrite, meurtrie et honteuse ; familles auxquelles j'adresse mon salut fraternel et ma compassion ; un des pères a eu cette réflexion géniale : »faut pas croire qu'on contrôle nos enfants »3 ; c'est le capitalisme décadent qui « éduque » ou plutôt « déséduque » nos enfants.
Les résidus bordiguistes ne sont plus marxistes en n'ayant pas compris cette notion de décadence. Leur opportunisme dans les années 1970, face à la description d'une classe ouvrière autochtone comme « embourgeoisée », alors qu'elle n'était que consumérisée, les avait conduit à théoriser une classe ouvrière de remplacement : les immigrés. La préférence immigrée, la théorie de l'aide au pauvre typique du bobo compatissant, en lien avec les lueurs « incandescentes » (mais indécentes) des libérations nationales qui allaient réveiller le prolétariat endormi des pays riches, débouche sur cette minable exaltation d'un terrorisme de lumpen, de petits cons paumés appointés par l'Arabie Saoudite et par l'argent du pétrole.
Le délire hors de la réalité ne s'arrête pas à cette série d'énormités et d'amalgames invraisemblables, insultes à tout le mouvement ouvrier, aux prolétaires immigrés et à Bordiga, mais se rétracte lâchement dans la critique aux moutons gauchistes de la démocratie honteuse. Certes on n'imagine pas que les bordiguistes voudraient se placer derrière l'Etat bourgeois pour combattre daech, car il faut « se placer sur une position de lutte de classe indépendante et opposée à tous les fronts bourgeois ; autrement dit d'opposer la lutte de classe aux guerres bourgeoises et au capitalisme en général ». Evidemment : « quand les bourgeois veulent enrôler les prolétaires dans leur guerre au terrorisme, il ne faut pas tergiverser, mais répondre par la réaffirmation de la guerre au capitalisme ».
En attendant que daech montre l'exemple de la violence révolutionnaire une nouvelle fois aux prolétaires, français et immigrés !
Franchement l'utilisation de la « violence exprimée par des déclassés » pour la lutte de classe, est un délire qui me fait gerber sur le journal Le Prolétaire. La question n'est pas qu'on nous demande notre avis à nous les prolétaires, c'est surtout que les explosions, les meurtres massifs, les familles dans le malheur, tout cela ne nous redonne pas du tout confiance en l'Etat bourgeois (qui est coresponsable par ses guerres et son incurie) mais nous rend impuissant et très abattus.

Les grosses et balourdes généralités bordiguistes, avec leur soutien déguisé aux « révolutionnaires » de daech4 ne doivent pas faire écarter ce qui n'est pas fait pour l'heure : lutter contre le terrorisme de guerre impérialiste et l'ensemble des Etats bourgeois, ce serait, ce sera de manifester – ouvriers, étudiants, population indifférenciée - partout contre la longue guerre syrienne, à moins qu'ils ne l'interrompent sous peu parce que y en a marre.



Notes:

1Une interrogation sur le contenu de ce raisonnement. On accrédite l'existence de cet « Etat islamique » alors que personne, excepté les médias, ne peut valider ce soi-disant Etat qui n'est qu'un conglomérat de bandes armes financées directement ou indirectement par Arabie Saoudite, Qatar et une fraction pétrolière de la bourgeoisie US. Concéder une telle dénomination revient à nous ressortir la fumisterie de la libération nationale alors que ces bandes armées ne sont que des suppôts des impérialismes en lice. Quant à la théorie gauchiste des représailles contre les civils d'un pays (colonial) qui les bombarde, c'est avaliser le terrorisme impérialiste car : 1. les populations civiles ne sont pas responsables de l'industrie d'armement, et 2 : les tueurs de daech ne sont pas ni les défenseurs ni les représentants des populations arabes prises en otage.
2Mais honorées du qualificatif « d'Etat », post-colonial ou néo-colonial ?
3OBS7231/attentats-de-bruxelles-plongee-dans-l-enfance-des-el-bakraoui-les-freres-kamikazes.html?xtor=RSS-13&google_editors_picks=true « faut pas croire qu'on contrôle ses enfants »

Lire aussi, parce que l'idéologie musulmane n'est pas innocente et sert de base aux tarés terroristes qui tuent plus souvent et partout des coreligionnaires étrangers au culte de la mort et tolérants envers athées et autres croyances : /03/28/vive-emotion-au-royaume-uni-apres-le-meurtre-d-un-commercant-musulman_4891316_3214.html

L'attentat au Pakistan est encore plus ignoble que celui de Bruxelles mais... c'est loin : 1 Pakistan : un attentat-suicide fait plus de 70 morts dans un parc où des chrétiens fêtaient Pâques 13240
4Rouillan a raté une occasion de ne plus se taire en arguant que les tueurs terroristes avaient agi avec « courage », quel courage de tirer à la mitraillette contre une foule inoffensive ! Cet idiot ne vaut guère mieux que les journalistes de RFM qui n'ont cessé de répéter que les tueurs de Bruxelles étaient morts en martyrs. Martyrs de quoi ? De leur embrigadement débile ?

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